Titre : Le Gaulois : littéraire et politique
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1913-10-15
Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication
Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication
Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 octobre 1913 15 octobre 1913
Description : 1913/10/15 (Numéro 13150). 1913/10/15 (Numéro 13150).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/04/2008
TARIS ET DÉPARTEMENTS PIS CENTIMES
MERCREDI OCTOBRE
ARTHUR MEYER
Directtur
RÉDACTION
DX QT7A.TR1 HKURES DU SOIR A UNB HSUBÏ Dû MATIM
2, rue Drouot, 2
(AngU du boulevard! Montmartre et du ItilMaa)
ABONNEMENTS
Paris et département.
Trois mois I4£r. Un an 56 fr.
Etranger
Trois mois (Union postale) 18 fr.
TÉLÊPH0ME.TroisU^s7(02ir7-209.00-SI2.ai
ARTHUR MEYER
Directeur
ADMINISTRATION
ABONNEMENTS, PETITES ANNONCM
2, rue Drouot, 2
à (Jjigli 2m boulevard* Montmartre et du Itelitai)
ANNONCES
MM. LAGBANaE, CEHI1 G»
8, ruai si la. soxntsB, 8
JH 1 rafonmitrartm tu Jcurmil ̃
Les mtaaierit* ̃.• tent fil i«iin
La Crise
radicale
Il est intéressant de noter les manifestations
qui se produisent au sein du parti républicain,
parce qu'elles sont la préface d'une crise gou-
vernementale qui éclatera, sans doute, à la ren-
trée du Parlement. Ces manifestations sont des
déchirements. Les républicains ont désappris
ce qu'est la république du moins ne s'enten-
dent-ils pas sur ce qu'elle doit être. Les socia-
listes tiennent la république présente pour un
régime de réaction bourgeoise, et. ils le détes-
tent au même titre, et pour les mêmes raisons,
que l'Empire ou la Royauté. Les radicaux qui
occupent le pouvoir ne se montrent pas plus
satisfaits. Comme ils sont essentiellement laï-
cisants et que leurs délégués au gouvernement
de la république n'ont pas encore extirpé jus-
qu'aux racines le catholicisme, son enseigne-
ment et son culte, ils crient à la trahison.
Les leaders de leur parti nous donnent, en ce
moment, des consultations retentissantes. M.
Steég, qui fut ministre et ne pense qu'à le re-
devenir, veut nous persuader que le radicalisme
est « le vrai, le seul parti national », parce qu'il
est l'interprète d'une doctrine de libération in-
tellectuelle et sociale. Cette affirmation- com-
porterait une glose explicative que M. Steeg
n'est pas homme, sans doute, à nous refuser.
De quelles servitudes entend-il nous libérer ? In-
tellectuellement, c'est, j'imagine, des croyances
surnaturelles et religieuses, qui font échec à la
_̃ souveraineté de la raison, et, socialement, des
conventions qui régissent encore la propriété.
En cela, comme en tout le reste, le radica-
lisme confine au socialisme, dont il est le four-
rier. Mais pourquoi ne pas le dire nettement ?
On verrait plus clair et plus loin dans la doc-
trine radicale.
De son côté, M. Léon Bourgeois, qui est le
grand prophète de la secte, prétend qu'elle reste
fermée et militante. L'apaisement, dit-il, est un
non. sens en politique. A la bonne heure, et
voilà M. Briand bien accommodé ) 1 enfin, M.
Thomson ne reconnaît droit de cité dans la ré-
publique qu'aux « vieux républicains ». Il ré-
serve ce titre d'honneur à ceux qui étaient déjà
républicains sous l'Empire. C'est, ce qui reste
de la vieille garde de Gambetta. Il y.a quelque
témérité à mettre en ligne ces grognards, car
ils sont démodés et dépassés par les nouveaux
leaders du radicalisme. Tous les articles de
leur programme ont été réalisés par la républi-
que pour représenter quelque chose, ils sont
obligés de l'emprunter aux néo-radicaux qui
'les ont remplacés à l'avant-garde du parti. Mais,
vieux ou jeunes, les radicaux ont ce trait com-
mun de caractère qu'ils ne reconnaissent et
n'acceptent qu'une république de parti, exclu-
sive, oppressive et sectaire, qui ne vive et ne
gouverne que pour la persécution. C'est un phé-
nomène comme il n'y en a pas d'autre dans
l'histoire du monde. En général, les gouverne-
ments ne cherchent qu'à rallier leurs anciens
adversaires ou tout au moins à les désarmer à
for.ce.de justice ou même de -bonne grâce. Et
c'est, en vérité, le plus élémentaire de leurs de-
voirs. Un gouvernement est une.tutelle com-
mune qui veille impartialement sur le bien et
sur la vie de chacun et met tous ses soins à le
préserver de tout mal: Cette obligation est d'au-
tant plus étroite en république qu'elle est, par
essence comme par définition, le gouvernement
de tout le monde. Si je disais à M. Léon Bour-
geois que la république a le devoir de me trai-
ter aussi bien que lui, il tiendrait sans doute
cette revendication pour une énormité. C'est
qu'il est imbu, comme tous les gens de sa secte,
de ce préjugé familial que la république est un
fief de parti qui ne doit à ceux du dedans que
des sourires et des faveurs, et à ceux du dehors
,une guerre d'extermination.
On a peine à comprendre qu'une conception
aussi sauvage du gouvernement ait pu péné
trer et s'établir dans le cerveau d'un civilisé.
Elle dépasse en horreur l'idée que l'histoire
nous a donnée des tyrannies les plus fameuses
de l'antiquité ou de l'Asie. M: Léon Bourgeois
est un inquisiteur attardé, mais un inquisiteur
à rebours, qui applique aux catholiques les
procédés que le Saint-Office appliquait aux
infidèles, sans tenir compte des luttes de qua-
tre siècles que la conscience humaine a soute-
nues pour la liberté.
Il ne sert à rien, d'ailleurs, de raisonner
contre les chats-fourrés de la libre-pensée ma-
çonnique et jacobine, ou de se plaindre de
leurs noirceurs. Ils sont nos maîtres et ne
s'emploient qu'à nous le montrer. C'est pour-
quoi leur république reproduit à s'y mépren-
dre la tyrannie qu'exerce l'Allemagne sur
l'Alsace-Lorraine il faut penser, marcher,
parler et s'habiller comme des Allemands, sous
peine de perdre son droit de citoyen. Il y a
quarante ans et plus que les fils de nos vieil-
les provinces restés fidèles à la nationalité
française ont perdu leur droit à la patrie. La
république des Bourgeois, des Combes et des
Clemenceau a fait le même sort aux catholi-
ques et aux nationalistes qui sont les meilleurs
fils de notre race. C'est en vain qu'ils protes-
tent. La république radicale s'est fait pour eux
une âme étrangère. Elle ne veut ni les connaî-
tre; ni les entendre seulement, elle se punit
elle-même, sans s'en douter, de l'atrocité de
ses mœurs, par l'horreur qu'elle inspire au
génie clair, généreux et franc de notre nation.
M. Millerand a prononcé sur le gouvernement
radical de M. Combes une sentence de mort.
C'est, disait-il, le régime le plus abject que la
France ait jamais connu. Et jamais républi-
cain indépendant ne rendit un jugement plus
juste. Régime d'oppression populacière, de
politique haineuse, d'égoïsme féroce, d'avidité
bestiale, de dilapidation bachique, d'ignorance
bouffonne et d'incommensurable imbécillité
régime sans honneur, sans vertu, sans talent;
sans horizon et sans clarté, qui n'était en son
essence comme en ses modes que l'épanouisse-
ment des plus bas instincts de la bête humaine.
M. Combes a disparu, mais le régime qu'il
personnifiait est resté. On peut admettre que
ses successeurs l'ont appliqué avec des formes
un peu moins grossières c'est toute la diffé-
rence que l'on peut faire entre eux. Que ce soït
M. Clemenceau, M. Briand, M. Poincaré ou M.
Barthou, la république qu'ils ont gouvernée
n'a, jamais cessé d'être entre leurs mains un
gouvernement de secte ou de parti. Et le trait
commun de leurs ministères successifs est la
persistance de la fureur anticléricale. Je dis
fureur bien que la plupart d'entre eux soient
de eomplexion plutôt pacifique et volontiers
encline à la conciliation. Malheureusement
leur personnalité n'est pas une force directrice.
Tous ont été, à des degrés divers,' mais unifor-
mément, des ministres de parti, et comme leur
parti n'a pour viatique unique que l'anticléri-
calisme, ils ont à qui mieux mieux hurlé avec
les loups. A l'heure qu'il est, le ministère, qui
doit aux catholiques du Parlement d'être en-
core vivant, expulse, proscrit et frappe les éta-
blissements religieux avec un prosélytisme de
laïcité que ne dépassait pas M. Combes lui-
même.
C'est la fatalité du régime. Il est ainsi et ne
peut être autrement. Cependant'personne n'est
satisfait. La secte est en querelle, et l'on n'en-
tend parler que de manifestes et de consulta-
tions sur la crise vitale que traverse le radi-
calisme. On interroge les prophètes de la doc-
.mine.aui répondent ex cathedrâ.Il n'a pas fallu
à M. Doumergue moins de trois colonnes de
journal, pour exposer ce qu'il pense, et je veux
être pendu-s'il y-a trois personnes en France
qui s'intéressent à cela. Puis, après M. Dou-
mergue, on a recueilli avec la même vénération
les opinions de M. Buisson, de M. Dalimier et
de M. Bouffandeau. Cela seul indique à quel,
degré de misère l'entreprise est tombée. A la
rue de Valois, qui frappe d'anathème les radi-
caux suspects de modérantisme, s'oppose la rue
de La Rochefoucauld, qui ouvre ses portes
toutes grandes aux républicains de bonne vo-
lonté. C'est là qu'officie l'Alliance démocrati-
que. C'est un troupeau de bonnes bêtes qui
ânonnent sans les comprendre les vieilles for-
mules de l'âge héroïque et se réclament de la
Déclaration des droits de l'homme et du ci-
toyen. L'effort de ces républicains résipiscents
est louable, en ce sens qu'il constitue un pré-
cieux indice du mouvement d'opinion qui se
manifeste jusqu'en ces milieux enténébrés con-
tre le radicalisme maçonnique et jacobin. Seu-
lement, ils ne se doutent pas de, leur impru-
dence. Ce rappel de la Déclaration des droits
de l'homme implique le reniement et l'abandon
de toute l'œuvre laïque, car cette charte répu-
blicaine est essentiellement une charte de li-
berté. Toutes les libertés refusées au catholi-
cisme et frappées d'interdit par la politique
radicale, liberté d'association, liberté d'ensei-
gnement et. de prédication, l'égale et libre ac-
cession de tous les citoyens aux charges publi-
ques, sans exclusion comme sans préférence,
nous ont été promises par la charte républicaine
et nous sont dues par le régime qui en est
l'expression. Seulement, le jour où elles nous
seraient octroyées, il n'y aurait plus de répu-
blique.
Jules Delafosse
Ce qui se passe
LA POLITIQUE
DANS LES ÉGLISES ET DANS LES CASERNES
L'Humanité s'indigne que dans des casernes
soient affichées des maximes telles que cel-
les-ci
La foi seule inspire les grandes actions, la foi
jointes à la volonté les réalise. La foi fait les mar-
tyrs, la foi fait les héros.
L'homme de devoir ne craint pas la mort. Le
soldat qui court à la mort entre dans l'immorta-
lité. Tu mourras à ton heure, sois donc crâne sous
les balles. L'homme qui ne compte pas avec la
mort est un être terrifiant.
D'abord ces maximes-là sont-elles réellement
affichées ? Si elles ne l'étaient pas, nous le
regretterions. Du moment qu'on passe à un
homme un uniforme militaire, l'Humanité
voudrait-elle qu'on lui enseignât à avoir peur
de la mort à laquelle cet uniforme l'expose ?
De son côté, la Lanterne, qui doit craindre
que l'Humanité ne lui fasse une concurrence
victorieuse en anticléricalisme, s'indigne non
moins que, dans des églises, soient affichés les
noms des auteurs des manuels scolaires con-
damnés par les évêques. Qu'est-ce^ue cela
peut bien lui faire à la Lantcrne ? Ses lecteurs
ne vont pas dans les églises et les interdictions
des évêques ne leur font, comme on dit, ni
chaud ni froid. Par conséquent, cet affichage
n'intéresse que ceux qui fréquentent les églises
et obéissent aux évêques, dont le devoir est de
prémunir leurs fidèles contre les manuels qui
peuvent mettre leur foi en péril. Où cet affi-
chage est-il mieux à sa place que dans les
églises, qui sont la maison commune des catho-
liques et que la loi de séparation de l'Eglise et
l'Etat met à la disposition des catholiques ?
L. Desmoulins.
ÉCHOS DE PARTOUT
M. Nénot, membre de la section d'architec-
ture de l'Académie des Beaux-Arts, fut délé-
gué de l'Institut, on s'en souvient, pour s'en-
tendre avec la Ville de Paris au sujet des
projets de transformation de l'Institut et de la
démolition de ses annexes, en vue du prolon-
gement de la rue de Rennes. Il eut à ce propos
plusieurs entrevues avec le préfet de la Seine
et lui exposa un plan d'ensemble des travaux
que M. Delanney accepta, après avoir demandé
et obtenu plusieurs légères modifications. Le
résultat de ces entrevues fut communiqué à
l'Académie des Beaux-Arts et approuvé par
elle.
M. Nénot termine en ce moment un plan
d'ensemble des travaux à faire à l'Institut
qu'il soumettra tout d'abord à la commission
administrative, puis ensuite à l'Institut, toutes
sections réunies.
Naturellement ce plan respecte l'aspect exté-
rieur du palais Mazarin on ne touchera pas
à la façade semi-circulaire ni aü dôme, dont
l'ensemble décoratif est digne de l'intérêt des
archéologues. En revanche, à la grande satis-
faction de tous ceux qui ont assisté aux séances
ordinaires de toutes les Académies à l'ex-
ception de l'Académie française la salle or-
dinaire de réunion, ce long et incommode pa-
rallélogramme dans lequel on n'entendait rien,
disparaîtra. Vraiment, ce ne sera pas trop tôt.
Mais quand commenceront les travaux ?
Une statistique tristement édifiante et qui
en dit long, hélas sur les ravages de l'alcool
en France et la multiplicité des crimes, c'est
celle que vient de publier le ministère des
finances dans son Bulletin de statistique et de
législation comparée.
Ce document, dont on ne saurait trop recom-
mander la lecture à nos législateurs, démontre
la progression alarmante du nombre des débits
de boissons en France, et particulièrement à
Paris. Lisez ces chiffres suggestifs.
En 1912, on comptait, en France, 481,159 dé-
bits de boissons. Il n'y en avait que. 478,843 en
1911, ce qui fait une augmentation de 2,316
débitants. En 1910, le chiffre n'était que de
477,808 en 1879, il était encore beaucoup plus
bas, soit 354,852. On voit que l'échelle d'ac-
croissement monte d'année en année.
Pour Paris, la progression est encore plus
accentuée. A l'heure actuelle, on y compte en-
viron 5,000 débits de boissons, c'est-à-dire que
le nombre de ces établissements a plus que
doublé en ces quinze dernières années.
Ces chiffres ne sont-ils pas effrayants à cons-
tater ?. Et les criminalistes, les médecins spé-
cialistes, tous ceux, enfin, que préoccupe l'ave-
nir de la race française, n'ont-ils pas raison,
mille fois raison, d'entreprendre la grande
croisade moderne contre l'alcool, pourvoyeur
des prisons et des asiles d'aliénés ?
Paris n'a plus, depuis quelques jours, rien à
envier à Saint-Pétersbourg. du moins en ma-
tière de voiture?.
Nous avons pu, en effet, apercevoir, à plu-
sieurs reprises, une troïka authentique, moins
les grelots, conduite par un cocher dont les
apparences sont celles d'un moujick.
Sans vouloir médire des moyens de locomo-
tion chers à nos amis et alliés, la troïka est d'un
effet au moins inattendu, lorsqu'on la voit se
mouvoir à côté des fiacres et des taxis.
C'est donc à la porte d'Orléans que nous
avons rencontré ce véhicule petit-russien. Sa
fraîcheur était douteuse, mais les personnages
qui le montaient lui prêtaient un air exotique
qui n'était pas sans grandeur.
Vêtus de vestes vert olive à brandebourgs
noirs et à larges boutons d'argent, coiffés de
feutres ronds à larges bords, chaussés de bottes,
tenant à la main de lourdes cannes à pommeau
d'argent ciselé, deux hommes au teint foncé, à
la barbe noire, ayant tout à fait l'air de Cosa-
ques, se prélassaient sur les banquettes de la:'}
voüure. Y
On revit le même véhicule tout près de l'0-
pér a-Comique, sur les grands boulevards, où
l'étonnement des promeneurs fut à son com-
ble.
On chuchote que les voyageurs et le cocher
ne sont autres que des chanteurs connus, qui,
gaiement, ont voulu s'amuser aux dépens de
leurs contemporains
Paris-Olympe.
Ce serait un beau titre de revue de fin d'an-
née. C'est vraiment à tort que l'on dit Les
dieux s'en vont » il serait plus exact de décla-
rer qu'ils reviennent.
Paris a sans doute semblé aux anciens dieux
de l'Olympe un séjour enchanteur, si. l'on en
juge par l'énumération suivante, glanée dans
le Bottin.
On y voit figurer
Jupin, architecte-vérificateur Junon, épi-
cier Minerve, coiffeur Mars, teinturier-dé-
graisseur Vulcain, rôtisseur Apollon, mar-
chand de vins-traiteur Hercule, statuaire
Flore, boulanger Cupidon, chapelier Eros,
tonnelier.
Contraste.
Les Prussiens et les Saxons se préparent à
commémorer, par des réjouissances « kolossa-
les » et par un monument inesthétique, la ba-
taille de Leipzig, où 350,000 alliés finirent par
triompher sans gloire de 157,000 Français.
Nul n'eût pensé, chez nous, à célébrer, hier,
l'anniversaire d'Iéna, où 40,000 Français écra-
sèrent 70,000 Prussiens, si toutefois un brave
homme, un inconnu, ne s'était acquitté, de la
façon la plus touchante et la plus jolie, de cette
pieuse mission.
Il vint, hier, solitaire et modeste, déposer à
la grille de la colonne Vendôme une fragile pe-
tite couronne de papier peint encadrant un car-
ton sur lequel il avait calligraphié quelques
vers qui rappelaient au passant l'un des plus
glorieux épisodes de l'immortelle épopée.
France et Espagne.
Encore un écho du voyage présidentiel
S. M. le Roi d'Espagne vient d'accorder son
auguste patronage à une entreprise qui ne
manquera pas d'intéresser les partisans si nom-
breux de l'accord franco-espagnol. et de tous
les musiciens.
Le mercredi soir 29 octobre, l'Orchestre
Symphonique de Madrid fera entendre, sous
la direction de son chef M. E.-F. Arbos, et
avec le concours de MM. Pablo Casals et
Achille Rivarde, les maîtres les plus notoires
de la musique. espagnole coniemporaine
Albeniz, Condado del Campo, Perez Casas,
Turina. Il y a quelques j,ours, à Madrid, ce
même orchestre faisait entendre sous la direc-
tion du même chef des œuvres de Saint-Saëns,
de Chabrier, de Debussy, de Paul Dukas. A
cette occasion seule manifestation artistique
du voyage à laquelle le Roi et le Président aient
assisté ensemble le Roi présenta M. Arbos -a
M. Poincaré. Ce dernier félicita chaudement
l'éminent chef d'orchestre et lui dit tout l'inté-
rêt qu'il portait au voyage des musiciens espa-
gnols; ,à Paris. La musique continuera ainsi
l'œuvre des diplomates et nous trouverons dans
les. jardins de l'harmonie de nouvelles et sé-
dùisantës Taisons d'aimer l'Espagne.
PARISIANA
LE FAUX-COL
On dit que, suivant l'exemple des
Américains, nos fashionahles vont,
à leur tour, supprimer l'usage du
faux-col.
Encore une mode nouvelle
Qui nous arrive de là-bas,
Puisque notre pauvre cervelle
De nos jours n'en invente pas;
On vit, jadis, de par le monde,
̃̃ ,L Des individus de haut vol
De qui l'on disait à la ronde
Ces gens-là se « poussent du col
Or, cette phrase lapidaire
Dont l'usage n'a pas duré
S'employait parfois solidaire
Au propre comme au figuré
Elle ne serait plus de mise
Grâce à la mode de demain,
Car on ne verra la chemise
Que juste au-dessus de la main.
Mais, dédaigneux de la parure,
Ne craignez-vous pas d'avoir l'air,
En adoptant cette échancrure,
De. clients de monsieur Deibler?
Puis je songe, en rimant cette ode,
A nos pauvres limonadiers
Qui, pour suivre à leur tour la mode,;
Devront servir des bocks entiers.
Adieu, la mousse frémissante
Par laquelle on était tenté.
On dira d'une voix cassante
Garçon Un bock décolleté
X. GRANIER.,
Les ballons de la Coupe Gordon-Bennett,
qu'on pensait dimanche soir partis pour la Côte
d'Azur, s'en sont allés sur la Côte d'Emeraude.
Ils y sont allés tout doucement par le chemin
des écoliers, pivotant sur eux-mêmes dès lundi
matin, et pour la plupart ne se sont décidés à
descendre qu'une fois au bord de l'Atlantique.
On connaissait hier soir le lieu d'atterrissage
de quatorze d'entre eux le Honcy Moon, an-
glais, à Langueux, près de Saint-Brieuc le
Patrie, belge, à la Roche-Terrien le B.-A.,
italien, à Villehutte-Dahnet, près de Pléneuf le
Roma, italien, à Plouézoc (Finistère) le Picar-
die, à Cordemais, près de Saint-Nazaire le
Banshee, anglais, à Pléneuf l'Astarté, autri-
chien, à Touguedec, près de Lannion le Duis-
burg, allemand, près de Paramé l'Ile-de-
France, à Trévoux-Tréguignec (Côtes-du-Nord);
le Hamburg-II, allemand, au cap Frehel l'Hel-
vetia, suisse, à Polazec, près e Huelgoat le
Stella, français, à Plestin-les-Grèves le Bel-,
gica-ll, à Saint-Michel-en-Grèves le Metzcler,
allemand, à Ducey (Côtes-du-Nord).
'Jusqu'à nouvel ordre, YHelvetia semble le
mieux placé. La Coupe échapperait donc à la
France. Il est toutefois prématuré de dire à qui
elle a chance d'aller. Il paraît, en effet, que plu-
sieurs concurrents se sont aventurés au delà
des côtes. On vit, entre autres, le ballon an-
glais Good Year, piloté car Ralph Upson, tra-
verser le ciel de Granville et continuer sa route
au-dessus des flots. Ralph Upson espérait, sans
doute, toucher les îles anglaises ou gagner la
Bretagne. C'est d'une belle audace.
Les exploits cygénétiques remplissent en ce
moment les colonnes de tous les journaux mon-
dains. L'actualité appartient aux innombra-
bles disciples de Nemrod. Tout le Paris élé-
gant est en province, et dans les châteaux de
Seine-et-Oise, de la Normandie, de la Touraine,
ce ne sont que festins splendides et divertisse-
ments raffinés. L'anisette Marie Brizard est
toujours la liqueur préférée dans toutes ces
réunions, où le, bon goût règne en maître.
Faut-il en être surrris au moment où les
boissons hygiéniques sont à l'ordre du jour ?
La vente du raisin de la Treille du Roi a eu
lieu hier à Fontainebleau. Un nombreux pu-
blic se pressait autour des tables disposées le
long du fameux mur. On a joyeusement dé-
gusté les grains de ces .raisins, et les ache-
teurs, après les avoir savourés, ont poussé les
enchères à des prix plus élevés que d'habitude.
Le raisin était d'ailleurs très beau et les grap-
pes très fournies.
On a vendu quarante-deux lots de 25 kilo-
grammes chacun qui ont produit un total de
2,3i8 francs, soit une moyenne de 2 fr. 26
le kilog.;
Par l'acquisition de la collection d'antiquités
là maison
Perret-Vibert, 33, rue du Quatre-Septembre, se
trouve à même d'offrir en ce moment à sa nom-
breuse clientèle artiste un choix unique de ri-
ches porcelaines anciennes, de broderies, bron-
zes et cloisonnés du quinzième au dix-huitième
siècle, ainsi que jades, émaux, divinités et lan-
ternes de temples aux lignes si variées et si
originales et aux coloris si chauds. Les belles
pièces se faisant chaque jour plus rares, une
visite 33, rue du Quatre-Septembre, s'impose
sans retard.
Les merveilleuses journées de ce mois d'octo-
bre retiennent sur les rives du lac d'Enghien
une clientèle d'élite. Et dans l'admirable décor
de la charmante station thermale, toute bai-
gnée du parfum des roses d'automne, les heu-
res passent agréablement, coupées, comme en
pleine saison, de concerts remarquables, de
représentations théâtrales que rehausse le
concours de nos meilleures vedettes parisien-
nes, et de réunions élégantes autour des menus
délicats du maître Negresco.
NOUVELLES A LA MAIN
On parle de la tension des rapports franco-
allemands
L'Allemagne a, paraît-il, beaucoup de
griefs contre nous, dit quelqu'un.
Boireau, gravement
Ils sont léyion
Un Dômino
Une Boiwsation
avec le Roi de Grèce
Les Lectures pour Tous publient dans leur nu-
méro d'aujourd'hui d'intéressantes déclarations
qu'un de leurs rédacteurs, M. Jean Leune, a obte-
nues du roi de Grèce. L'intention du souverain est
visible de dissiper le malentendu qui a inquiété
l'opinion française, et de reconnaître les services
rendus à la Grèce par la mission Eydoux.
Le roi Constantin explique d'abord les raisons
qui l'ont amené à faire sa double visite à Berlin
et à Paris
Je ne voulais faire cette année aucune
visite, étant en deuil. J'avais l'intention d'en
faire seulement l'an prochain, officiellement,
en grande tenue.
1 » Mais je ne pouvais décliner l'invitation de
l'Empereur. Je fis en conséquence aussitôt
savoir à. votre gouvernement que, dans ces
conditions, j'entendais me rendre'également à
Paris, pour y visiter M. Poincaré, incognito
toujours, à cause de mon deuil. Car, ainsi que
je l'ai fait dire alors, je voulais le remercier
de l'aide que la France nous avait, depuis un
an, si largement accordée.
» Vous, voyez ainsi quels étaient mes senti-
ments.
Puis, abordant la question du taast qui a sou-
levé en France, l'émotion que l'on sait, le Roi en
donne ce commentaire
J'ai dit en Allemagne que les principes de
la tactique prussienne m'avaient donné la vic-
toire. Etait-ce donc nier l'œuvre de la mission
française ?
» Il y a plusieurs facteurs dans ce qu'on
appelle la victoire ». Il y a la pensée du chef
qui conçoit les plans et qui veille à leur exécu-
tion il y a la valeur « en soi » de ceux qui
doivent en assurer l'exécution, et puis il y a
leur instruction. Ces trois éléments ne vous
paraissent-ils pas absolument indépendants les
uns des autres, en ce sens que la valeur de l'un
n'entraîne nullement celle des autres ?
Une troupe peut avoir une instruction par-
faite si elle est mal conduite, ou si elle man-
que de moral, elle sera pourtant nulle au point
de vue de la victoire. Et réciproquement.
·· La victoire s'obtient lorsque ces trois fac-
teurs acquièrent leur maximum de puissance
ou de développement.
» Mais chacun a sa part, c'est justice d'au-
tant plus que la valeur de l'un de ces facteurs
ne saurait entraîner la nullité des autres
J'ai donc pu très bien employer, moi per-
sonnellement, pour la conduite de mes troupes,
les principes de tactique prussienne mes trou-
pes, soldats et officiers, ont pu parfaitement
montrer sur les champs de bataille une endu-
rance, un héroïsme, un enthousiasme qu'elles
n'avaient appris dc personne, mais qu'elles
possédaient seulement comme qualités' natives
de race il n'en reste pas moins pour la mis-
sion française une part très réelle et nullement
dédaigner pour sa participation au dévelop-
pement du troisième facteur, organisation et
instruction.
» La mission française a dirigé l'instruction
des troupes en garnison à Athènes. Elle a fait
à un certain nombre d'officiers des cours pré-
paratoires à votre Ecole supérieure de guerre.
Elle a dirigé, l'an dernier, des grandes manœu-
vres auxquelles participèrent plusieurs divi-
sions et deux classes de réservistes. Des offi-
ciers de la mission sont directeurs de service
(intendance, santé, cavalerie) au ministère de
la guerre. Les bases d'une organisation nou-
velle ont été jetées. Il y avait dix-huit mois
que la mission était en Grèce lorsque la guerre
a commencé en 1912. Pouvait-elle vraiment, en
dix-huit mois, faire plus que ce que je viens
de vous dire ?
» Encore une fois, elle a fait tout ce qu'elle
ouvait faire. Je suis le premier à le reconnaî-
tre. »
Pour ce qui est de l'avenir, le roi de Grèce le
définit en ces termes
Je ne vois pas pourquoi nous ne travail-
lerions pas bien ensemble, la mission française
et moi. Le général Eydoux me secondera dans
ma tâche écrasante de commandant en chef des
armées de terre et de mer. Je ne demande qu'à
l'avoir pour collaborateur et je sais, parce que
je le connais, qu'il me sera un collaborateur
loyal avec qui je pourrai toujours m'entendre.
Ensemble, nous verrons les mesures à prendre,
ensemble nous les discuterons impartialement,
et je ne m'arrêterai jamais qu'à la solution qui
apparaîtra la meilleure pour le bien du pays et
de l'armée.
» On a dit que mon pauvre père recevait le
général Eydoux bien plus souvent que moi.
Mais on était alors en temps de paix. Je ne
suis devenu Roi qu'en pleine période de crise
et de perturbations. Je n'ai donc. pu agir com-
me je l'eusse fait en d'autre temps. Feu mon
père n'était pas militaire. Il recevait le général
Eydoux une fois par semaine, pour lui deman-
der où en étaient les choses. Moi, je suis pas-
sionnément soldat. »
Et le Roi répète plusieurs fois ces deux mots
sur un ton étrangement impressionnant.
« Je veux m'occuper constamment de mon
armée. Aussi ne sera-ce pas une fois par se-
maine que je recevrai le général Eydoux. Ma
porte lui sera ouverte tous les jours s'il a cha-
que jour une mesure intéressante à me propo-
ser. »
On jugera par ces extraits de l'intérêt que pré-
sente la conversation relatée par les Lectures pour
tous.
En terminant, le Roi réclame le droit, que per-
sonne ne lui conteste, d'être, avant tout, roi de
Grèce. Et il ajoute « Ne croyez-vous pas que les
intérêts de la France puissent être bien souvent
d'accord avec ceux de la Grèce ? » La netteté des
| déclaràttoïis .«'.a roî Cgnstantm ne pourra,
quer d'impressionner favorablement l'opinion
française et de faciliter cet accord si souhaitable
entre deux nations qui n'ont cessé de sympathiser.
Paul Roche
Bloc-Notes Parisien
Autour d'un Mariage princier
C'est aans la chapelle royale de Saint-James Palace
que sera célébré aujourd'hui, à midi, le mariage de
LL. AA. RR. le Prince Arthur-Frédéric-Patrick-Albert de
Connaught, cousin et aide de camp de S. M. George V,
et de la Duchesse Alexandra-Victoria-Alberta-Edvina-
Louise de Fife, fille de S. A. R. la Princesse Louise-
Victoria-Alexandra-Dagmar, sœur du souverain de
Grande-Bretagne et Princesse royale depuis la mort de
l'Impératrice Frédéric. On sait qu'il n'y a jamais qu'une
Princesse royale à la fois.
Le Prince de Connaught a trente et un ans; la Du-
chesse de Fife, qui a hérité, nous l'avons dit, du titre de
son père en 1912, a vingt-deux ans.
La Duchesse de Fife est fort riche. On ne sait pas le
chiffre de sa fortune, car le testament du Duc de Fife,
son père, comme celui des Princes, n'a pas été rendu
public; mais au moment de sa mort l'on estimait sa for-
tune à plus d'un million sterling..
Pendant son enfance et sa jeunesse la Duchesse a mené
une vie très retirée, auprès de son père et de sa mère,
que le monde n'attirait pas et qui préféraient les joies
calmes du foyer au mouvement du monde de la Cour et
de l'aristocratie. Mais le 'Prince Arthur de Connaught,
par goût et par devoir, est très mêlé à la vie officielle
et mondaine, et l'on dit, dans les milieux aristocratiques,
que le superbe hôtel de Mount Street, où les jeunes
époux s'installeront après la lune de miel, est destiné à
être le théâtre de fêtes et de réceptions vraiment prin-
.cièces. ï.: » ̃ ̃ .̃
Voici maintenant le programme de l'imposante jour-
née
Leurs Majestés britanniques, S. M. la Reine Alexandra,
LL. MM. le Roi et la Reine de Norvège, LL. AA. RR.
le Prince de Galles, la Princesse Mary, le Prince John,
la Princesse héritière de Suède (Margaret de Connaught)
formeront cortège aux deux jeunes époux par qui seront
réunis, dans le même blason, le trèfle irlandais et le
chardon d'Ecosse.
Chaque détail'de la cérémonie, qui sera célébrée avec
une pompe quasi-royale et dont plusieurs répétitions ont
eu lieu cette semaine, sous la direction du grand-cham-
bellan de la Cour, a été soigneusement réglé.
Onze heures. Ouverture des portes de la chapelle
pour permettre aux invités (au nombre de deux cents
environ) de prendre place dans la nef.
Le docteur Alcock, auquel a été dévolu le soin de tenir
le grand orgue, exécutera successivement la Marche
Nuptiale dn Tannhceuser (Wagner), la Marche Impériale
(sir E. Egar) et la Marche de la Reine de Saba (Gou-
nod).
Onze heures quarante. Arrivée de LL. MM. les
Reines Alexandra et Mary et de LL. MM. le Roi et la
Reine de Norvège.
Onze heures cinquante. Arrivée du fiancé, accom-
pagné de LL. AA. RR. le Prince de Galles et le Duc de
Connaught, qui lui serviront de « beestmen n.
Le docteur Alcock exécutera la Marche Nuptiale, com-
posée spécialement par lui à cette occasion.
Onze heures cinquante-cinq. La fiancée, au front
de laquelle S. A. R. la Princesse Mary aura posé la cou-
ronne d'oranger et épinglé le voile nuptial, pénétrera dans
la chapelle au bras de S. M. George V.
A ce moment, le chœur, composé des gentlemen and
children » des chapelles royales, entonnera l'hymne Con-
duis-nous, Père céleste; puis, pendant que la procession
se déroulera Lève les yeux. (Mendelssohn).
L'archevêque de Cantorbéry officiera, avec l'assistance
de l'évêque de Londres, qui lira l'Exhortation.
Les draps éclatants et l'or des uniformes, les pierres
précieuses et les émaux des ordres dont seront constel-
lées les poitrines masculines, la somptuosité des toilettes
des invitées feront de ce cortège un des plus brillants
qu'on ait vus jusqu'ici à Londres, en dehors des solen-
nités royales.
Au reste, on n'a reculé devant aucun effort pour que
chaque détail des costumes et de la décoration soit la
perfection même.
La toilette de la mariée, d'une incomparable richesse,
quoique très simple de coupe, est faite de satin char-
meuse ivoire.
Un réseau de perles fines et de diamants, montés sur
tulle, décore le corsage, à la ceinture duquel sera fixé
un bouquet composé de fleurs d'oranger, de myrte et
de bruyère blanche.
Celle-ci sera expédiée spécialement d'E;osse et ar-
rivera à Londres quelques instants à peine avant la cé-
rémonie, afin d'avoir encore toute sa fraîcheur.
Le voile est fait d'admirables dentelles de Bruxelles
et la longue traîne, soutenue à l'endroit où l'étoffe fait
une cassure par un lourd rang de perles fixé à l'épaule.
C'est dans cette toilette, dont aucun motif ne sera mo-
difié, que, suivant une antique coutume, la jeune femme
fera sa première visite à la Cour, en février prochain.
Sitôt après la cérémonie la nouvelle Princesse de Con-
naught se rendra dans un salon spécialement préparé
pour elle dans le palais de Saint-James, où, assistée par
ses demoiselles d'honneur, elle quittera sa robe nuptiale
pour prendre un costume de voyage de noces composé
d'une jupe de charmeuse grise légèrement drapée, d'un
corsage de dentelle orné d'une ceinture bleue à glands
d'argent, d'una tunique également de dentelle, d'un
grand manteau de velours gris avec étole et poignets
d'hermine et de chinchilla.
Un manchon d'hermine, bordé de chinchilla, et un cha-
peau en velours gris foncé, garni d'une magnifique ai-
grette blanche, complèteront l'équipage.
Le trousseau de la jeune femme, dont chaque pièce a
été faite en Angleterre, dépasse en beauté et en luxe
celui qui fut effectué pour la Princesse Ena de Batten-
berg, lors de son mariage avec S. M. le Roi d'Espagne.
Ir comporte, outre la lingerie, cinquante-cinq robes,
dont vingt-cinq robes de soirée, trente-huit chapeaux et
plusieurs somptueux manteaux de fourrure.
Voici maintenant quelques-unes des toilettes qu'il sera
donné d'admirer dans l'illustre assisatnce
S. A. R. la Princesse Louise robe de charmeuse
grise brodée de paillettes. Bouquet de roses à la cein-
ture.
S. A. R. la Princesse Victoria robe de charmeuse
abricot drapée sur un fond de jupe brodé de topazes et
d'or.
S. A. R. la Princesse Alexandra de Teck robe ve-
lours chiffon bleu saphir, drapée sur fond orné de perles
de cristal bleu corsage filet bleu brodé, recouvrant un
corps de mousseline chiffon blanche; tunique filet brodé
descendant jusqu'aux genoux.
Décolleté et bas de la jupe ourlés de zibeline.
Les demoiselles d'honneur, au nombre de huit, sui-
vant la tradition, seront toutes vêtues strictement de
mêmes robes en charmeuse rosée, recouvertes de tuni-
ques de dentelles ivoire.
Elles porteront à la ceinture un bouquet de bruyère
blanche d'Ecosse.
De toutes ces toilettes, la plus somptueuse est celle
dont sera parée S. M. la Reine Alexandra.
Depuis le décolleté jusqu'à l'ourlet du bas, sa robe,
extrêmement collante, garnie de jais et de diamants, scin-
tille comme une cotte de mailles.
La jupe est ornée de filet blanc sur lequel des feuilla-
ges peints à la main se dégradent depuis le noir le plus
profond jusqu'au plus tendre gris.
Enfin, des barrettes de diamants arrêtent et fixent le
drapé du corsage.
La décoration de la chapelle sera fort brillante.
Depuis des mois, le jardinier en chef du château de
Windsor travaille à préparer, en vue du mariage, les
roses blanches les plus pures, les plus éclatantes.
Après bien des hésitations, les variétés suivantes ont
été choisies par le grand-chambellan de la Cour la
Mollie Crawford, la Killarney et la Beautiful Kaiserin,
splendide fleur ivoirine à reflets à peine rosés.
Les jeunes époux ont reçu de nombreux cadeaux, qui
ont été transportés au palais Saint-James.
On y remarquera de magnifiques objets d'art anciens,
des tapisseries, des meubles de grand prix, une série de
petites statuettes de Saxe portant de minuscules torchères
électriques, une collection unique au monde de montres
anciennes, parmi lesquelles les plus remarquables sont
françaises.
Enfin la ville de Londres a offert aux deux jeunes
époux une cassette rectangulaire en or, dont le couvercle
porte les armes conjuguées des deux familles.
Sur le panneau de face on remarque un monogramme
en diamants, les armes de la ville de Londres et de très
fines peintures représentant le Guild Hall sous ses dif-
férents aspects.
Encore un mot pour finir
Le mariage du Prince Arthur'ae Connaught et de la
Duchesse de Fife, bien qu'unissant deux membres de la
famille royale, ne sera pas célébré avec la pompe ordi-
naire d'une union royale, mais avec un caractère semi-
privé, malgré la présence de la Cour et de plusieurs
Princes étrangers apparentés à la famille régnante an-
glaise. Il n'y aura pas de représentants des Cours étran-
gères, sauf les membrss du corps diplomatique.
individuellement.
Tout-Paris
Demain, le ¡Gaulois commencera la publica-
tion de
Les Deux Fantômes
grand roman par le
Comte Stanislas RZEWUSKI
l'écrivain si regretté, qui, dans cette dernière,
oeuvre d'un dramatique intense, a mis toutes
les qualités que noms lecteurs ont maintes fois
appréciées le mouvement, l'émotion, tout le
pathétique d'une situation poignante, dans ce
cadre de la vie russe q2c'il excellait à évoquer.
un
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
t- M. G. de Maizière
Maillane, 14 octobre
Il y a juste deux ans, dans ce même petit
salon de Maillane,. où se pressent aujourd'hui
les autorités officielles en veine d'admiration
pour la. poésie, j'écoutais ce même Mistral
m'expliquer, avec l'abandon qu'on apporte
dans une conversation familière, pourquoi il
se refusait à répondre aux vœux unanimes qui
l'appelaient à l'Académie française.
Ce n'est, ni du dédain, ni de l'indifférence,
me disait-fi, mais j'estime avoir été assez ré-
compensé le soir où, dans l'allée sombre d'un
bois d'oliviers, j'ai entendu un jeune homme
à bout de propos affectueux, dire à sa fiancée,
en guise de dernier argument de sincérité et
de suprême marque d'admiration, ce seul mot
de Mireille.
L'Académie ne me donnera jamais pareille
gloire, et il y a, dans la tendresse des choses,
plus de poésie que dans les discours des hom-
mes.
Aujourd'hui, cependant, Mistral écoute un
président de république, venu exprès pour, le
saluer avec des généraux tout brodés d'or, des
préfets en argent et des journalistes couverts
de poussière. Le salon est plein de fleurs et,
devant la porte, il y a des jeunes filles qui
chantent au son des tambourins et des fifres.
La poésie s'est mise en frais pour recevoir le
monde officiel, et le poète a revêtu une redin-
gote. Allons, me disais-je, le voici comme les
autres, il a suffi d'un sourire de la fortune,
des puissants, et voici sa grandeur qui s'a-
baisse et sa modestie qui se rend. Ah que nan 1
Aux compliments, le poète, par avance, a ré-
pondu par un hymne, d'où sa muse a écarté
avec soin les mots fâcheux de je et de moi.
On était venu le fêter, le choyer, lui jeter
des fleurs. Il n'a vanté, lui, que les autres, et
renvoyé à la France les couronnes offertes à la
Provence. Il était très ému, le vieux poète
dont on venait troubler l'intimité, si ému, que
la lyre tremblait un peu entre ses doigts.
Pensez donc Avoir chanté la tendresse de
Mireille et puis, tout d'un coup, être mis en
demeure de parler devant des préfets Mistral
ne s'est pas embarrassé pour si peu et, resté
jeune comme un soldat, il a parlé du pays en
amoureux. Les fonctionnaires en semblaient
tout glorieux et prenaient dans leurs uniformes,
des poses de ténors. Ainsi, quelquefois, des
vieux se méprennent, et font les entendus
quand la jeunesse devant eux parle d'amour.
Et voici ce qu'a dit le beau vieillard
Monsieur le Président,
Je me garderai bien de prendre pour moi seul
le grand honneur que vous me faites.
En venant saluer, dans son humble village, le
poète provençal qui ne l'a jamais quitté, vous té-
moignez très haut vos sympathies de patriote pour
ce régionalisme dans lequel notre France aura,
j'en ai la foi, son rajeunissement. Ils sont nom-
breux de plus en plus ceux qui, pour conserver la
beauté du pays et le bonheur d'y vivre, souhaitent
le maintien de ce qui fait le charme de nos vieille.s
provinces les coutumes, les costumes, les tradi-
tions, les dialectes, et toutes ces variétés qui ex-
priment la vie d'un peuple vra,iment'libre et qui
enracinent la race au terroir des ancêtres.
La Provence, avec son nom et sa, délimitation
d'origine immémoriaie la Provence, avec son his-
toire inscrite sur ses monuments, son climat, ses
paysages où l'habitant s'est appareillé, démontre
clairement qu'elle ne veut pas mourir.
Et elle ne mourra pas, cette mère des paysans et
des soldats de France J'en atteste les cuirassés
de la flotte française sur lesquels refleurissent les
noms de la Lorraine, de la Bretagne et de la Pro*
vence.
A chaque oiseau
Son nid est beau,
dit un proverbe provençal.
Monsieur le Président, soyez remercié pour la
signification qui surgit de votre voyage au cœur
de nos provinces, trop dédaignées depuis quelques
siècles, et que votre tour de France, si justement
applaudi et acclamé, soit un réconfort nouveau
pour leur reviviscence.
M. Poincaré, lui, a été de son âge et a nuancé
un petit discours dont toutes les strophes com-
mençaient par ces mêmes mots à vous. A
vous, cher et auguste maître, notre admiration,
etc. A vous, notre reconnaissance, etc.
Le Président a trouvé une jolie for-
mule pour louer le patriotisme de Mistral
« Vous avez, en chantant la Provence, tressé
à la France une verte couronne d'oliviers. »
Au surplus, voici le discours complet de
M. Poincaré
Cher et illustre maître,
A vous qui avez élevé, en l'honneur d'une terre
française, des monuments impérissables à vous
qui avez éclairé de votre soleil nos imaginations
assombries à vous qui avez relevé le prestige
d'une langue et d'une littérature dont notre his-
toire nationale a lieu de s'enorgueillir à vous qui
avez dressé dans nos souvenirs les figures immor-
telles de Vincent et de Mireille, de Calendal et
d'Estérelile à vous qui avez chanté, en des stances
inoubliables, l'es magnanarelles et les gardians à
vous, le noble poète du Rhône et des îles d'Or
à vous, qui, en glorifiant la Provence, avez tressé
à la France elle-même une verdoyante couronne
d'olivier à vous qu'il y -plus d'un demi-siècle,
Lamartine saluait déjà comme un nouvet Homère,
et dont le premier livre lui apportait, disait-il,
dans sa. mélancolique retraite; une goutte de ro-
sée, une haleine du matin, un rayon de lumière
à vous, qui avez vécu entouré de l'admiration uni-
versehe, et qui êtes resté fidèle à votre cher mas
de Maillane à vous dont les générations futures
surpasseront, à travers les âges, comme des fleurs
qui ne se faneraient pas, les poésies divines
à vous, augaste maître, j'apporte aujourd'hui
le témoignage de reconnaissance de la république
et de la grande patrie.
La réception a duré à peine quelques minu-
tes, après quoi le président de la république a
invité le poète à déjeuner.
Le Président et Mistral se sont arrêtés quel-
ques instants sur le seuil, o permettre aux
photographes de fixer côte à côte les images
d'un des académiciens les plus éminents et de
celui qui n'a pas voulu l'être. Pendant ce
temps, l'élément militaire du cortège se com-
plaisait, avec raison, à. féliciter le chœur des
vingt jeunes Arlésiennes qui avaient prêté à la
fête l'agrément de leurs voix. La photographie
terminée, M. Poincaré lui-même n'y résiste
pas et adresse à la jeunesse son plus gracieux
sourire.
C'est que cette matinée pleine de soleil, .pas-*
MERCREDI OCTOBRE
ARTHUR MEYER
Directtur
RÉDACTION
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JH 1 rafonmitrartm tu Jcurmil ̃
Les mtaaierit* ̃.• tent fil i«iin
La Crise
radicale
Il est intéressant de noter les manifestations
qui se produisent au sein du parti républicain,
parce qu'elles sont la préface d'une crise gou-
vernementale qui éclatera, sans doute, à la ren-
trée du Parlement. Ces manifestations sont des
déchirements. Les républicains ont désappris
ce qu'est la république du moins ne s'enten-
dent-ils pas sur ce qu'elle doit être. Les socia-
listes tiennent la république présente pour un
régime de réaction bourgeoise, et. ils le détes-
tent au même titre, et pour les mêmes raisons,
que l'Empire ou la Royauté. Les radicaux qui
occupent le pouvoir ne se montrent pas plus
satisfaits. Comme ils sont essentiellement laï-
cisants et que leurs délégués au gouvernement
de la république n'ont pas encore extirpé jus-
qu'aux racines le catholicisme, son enseigne-
ment et son culte, ils crient à la trahison.
Les leaders de leur parti nous donnent, en ce
moment, des consultations retentissantes. M.
Steég, qui fut ministre et ne pense qu'à le re-
devenir, veut nous persuader que le radicalisme
est « le vrai, le seul parti national », parce qu'il
est l'interprète d'une doctrine de libération in-
tellectuelle et sociale. Cette affirmation- com-
porterait une glose explicative que M. Steeg
n'est pas homme, sans doute, à nous refuser.
De quelles servitudes entend-il nous libérer ? In-
tellectuellement, c'est, j'imagine, des croyances
surnaturelles et religieuses, qui font échec à la
_̃ souveraineté de la raison, et, socialement, des
conventions qui régissent encore la propriété.
En cela, comme en tout le reste, le radica-
lisme confine au socialisme, dont il est le four-
rier. Mais pourquoi ne pas le dire nettement ?
On verrait plus clair et plus loin dans la doc-
trine radicale.
De son côté, M. Léon Bourgeois, qui est le
grand prophète de la secte, prétend qu'elle reste
fermée et militante. L'apaisement, dit-il, est un
non. sens en politique. A la bonne heure, et
voilà M. Briand bien accommodé ) 1 enfin, M.
Thomson ne reconnaît droit de cité dans la ré-
publique qu'aux « vieux républicains ». Il ré-
serve ce titre d'honneur à ceux qui étaient déjà
républicains sous l'Empire. C'est, ce qui reste
de la vieille garde de Gambetta. Il y.a quelque
témérité à mettre en ligne ces grognards, car
ils sont démodés et dépassés par les nouveaux
leaders du radicalisme. Tous les articles de
leur programme ont été réalisés par la républi-
que pour représenter quelque chose, ils sont
obligés de l'emprunter aux néo-radicaux qui
'les ont remplacés à l'avant-garde du parti. Mais,
vieux ou jeunes, les radicaux ont ce trait com-
mun de caractère qu'ils ne reconnaissent et
n'acceptent qu'une république de parti, exclu-
sive, oppressive et sectaire, qui ne vive et ne
gouverne que pour la persécution. C'est un phé-
nomène comme il n'y en a pas d'autre dans
l'histoire du monde. En général, les gouverne-
ments ne cherchent qu'à rallier leurs anciens
adversaires ou tout au moins à les désarmer à
for.ce.de justice ou même de -bonne grâce. Et
c'est, en vérité, le plus élémentaire de leurs de-
voirs. Un gouvernement est une.tutelle com-
mune qui veille impartialement sur le bien et
sur la vie de chacun et met tous ses soins à le
préserver de tout mal: Cette obligation est d'au-
tant plus étroite en république qu'elle est, par
essence comme par définition, le gouvernement
de tout le monde. Si je disais à M. Léon Bour-
geois que la république a le devoir de me trai-
ter aussi bien que lui, il tiendrait sans doute
cette revendication pour une énormité. C'est
qu'il est imbu, comme tous les gens de sa secte,
de ce préjugé familial que la république est un
fief de parti qui ne doit à ceux du dedans que
des sourires et des faveurs, et à ceux du dehors
,une guerre d'extermination.
On a peine à comprendre qu'une conception
aussi sauvage du gouvernement ait pu péné
trer et s'établir dans le cerveau d'un civilisé.
Elle dépasse en horreur l'idée que l'histoire
nous a donnée des tyrannies les plus fameuses
de l'antiquité ou de l'Asie. M: Léon Bourgeois
est un inquisiteur attardé, mais un inquisiteur
à rebours, qui applique aux catholiques les
procédés que le Saint-Office appliquait aux
infidèles, sans tenir compte des luttes de qua-
tre siècles que la conscience humaine a soute-
nues pour la liberté.
Il ne sert à rien, d'ailleurs, de raisonner
contre les chats-fourrés de la libre-pensée ma-
çonnique et jacobine, ou de se plaindre de
leurs noirceurs. Ils sont nos maîtres et ne
s'emploient qu'à nous le montrer. C'est pour-
quoi leur république reproduit à s'y mépren-
dre la tyrannie qu'exerce l'Allemagne sur
l'Alsace-Lorraine il faut penser, marcher,
parler et s'habiller comme des Allemands, sous
peine de perdre son droit de citoyen. Il y a
quarante ans et plus que les fils de nos vieil-
les provinces restés fidèles à la nationalité
française ont perdu leur droit à la patrie. La
république des Bourgeois, des Combes et des
Clemenceau a fait le même sort aux catholi-
ques et aux nationalistes qui sont les meilleurs
fils de notre race. C'est en vain qu'ils protes-
tent. La république radicale s'est fait pour eux
une âme étrangère. Elle ne veut ni les connaî-
tre; ni les entendre seulement, elle se punit
elle-même, sans s'en douter, de l'atrocité de
ses mœurs, par l'horreur qu'elle inspire au
génie clair, généreux et franc de notre nation.
M. Millerand a prononcé sur le gouvernement
radical de M. Combes une sentence de mort.
C'est, disait-il, le régime le plus abject que la
France ait jamais connu. Et jamais républi-
cain indépendant ne rendit un jugement plus
juste. Régime d'oppression populacière, de
politique haineuse, d'égoïsme féroce, d'avidité
bestiale, de dilapidation bachique, d'ignorance
bouffonne et d'incommensurable imbécillité
régime sans honneur, sans vertu, sans talent;
sans horizon et sans clarté, qui n'était en son
essence comme en ses modes que l'épanouisse-
ment des plus bas instincts de la bête humaine.
M. Combes a disparu, mais le régime qu'il
personnifiait est resté. On peut admettre que
ses successeurs l'ont appliqué avec des formes
un peu moins grossières c'est toute la diffé-
rence que l'on peut faire entre eux. Que ce soït
M. Clemenceau, M. Briand, M. Poincaré ou M.
Barthou, la république qu'ils ont gouvernée
n'a, jamais cessé d'être entre leurs mains un
gouvernement de secte ou de parti. Et le trait
commun de leurs ministères successifs est la
persistance de la fureur anticléricale. Je dis
fureur bien que la plupart d'entre eux soient
de eomplexion plutôt pacifique et volontiers
encline à la conciliation. Malheureusement
leur personnalité n'est pas une force directrice.
Tous ont été, à des degrés divers,' mais unifor-
mément, des ministres de parti, et comme leur
parti n'a pour viatique unique que l'anticléri-
calisme, ils ont à qui mieux mieux hurlé avec
les loups. A l'heure qu'il est, le ministère, qui
doit aux catholiques du Parlement d'être en-
core vivant, expulse, proscrit et frappe les éta-
blissements religieux avec un prosélytisme de
laïcité que ne dépassait pas M. Combes lui-
même.
C'est la fatalité du régime. Il est ainsi et ne
peut être autrement. Cependant'personne n'est
satisfait. La secte est en querelle, et l'on n'en-
tend parler que de manifestes et de consulta-
tions sur la crise vitale que traverse le radi-
calisme. On interroge les prophètes de la doc-
.mine.aui répondent ex cathedrâ.Il n'a pas fallu
à M. Doumergue moins de trois colonnes de
journal, pour exposer ce qu'il pense, et je veux
être pendu-s'il y-a trois personnes en France
qui s'intéressent à cela. Puis, après M. Dou-
mergue, on a recueilli avec la même vénération
les opinions de M. Buisson, de M. Dalimier et
de M. Bouffandeau. Cela seul indique à quel,
degré de misère l'entreprise est tombée. A la
rue de Valois, qui frappe d'anathème les radi-
caux suspects de modérantisme, s'oppose la rue
de La Rochefoucauld, qui ouvre ses portes
toutes grandes aux républicains de bonne vo-
lonté. C'est là qu'officie l'Alliance démocrati-
que. C'est un troupeau de bonnes bêtes qui
ânonnent sans les comprendre les vieilles for-
mules de l'âge héroïque et se réclament de la
Déclaration des droits de l'homme et du ci-
toyen. L'effort de ces républicains résipiscents
est louable, en ce sens qu'il constitue un pré-
cieux indice du mouvement d'opinion qui se
manifeste jusqu'en ces milieux enténébrés con-
tre le radicalisme maçonnique et jacobin. Seu-
lement, ils ne se doutent pas de, leur impru-
dence. Ce rappel de la Déclaration des droits
de l'homme implique le reniement et l'abandon
de toute l'œuvre laïque, car cette charte répu-
blicaine est essentiellement une charte de li-
berté. Toutes les libertés refusées au catholi-
cisme et frappées d'interdit par la politique
radicale, liberté d'association, liberté d'ensei-
gnement et. de prédication, l'égale et libre ac-
cession de tous les citoyens aux charges publi-
ques, sans exclusion comme sans préférence,
nous ont été promises par la charte républicaine
et nous sont dues par le régime qui en est
l'expression. Seulement, le jour où elles nous
seraient octroyées, il n'y aurait plus de répu-
blique.
Jules Delafosse
Ce qui se passe
LA POLITIQUE
DANS LES ÉGLISES ET DANS LES CASERNES
L'Humanité s'indigne que dans des casernes
soient affichées des maximes telles que cel-
les-ci
La foi seule inspire les grandes actions, la foi
jointes à la volonté les réalise. La foi fait les mar-
tyrs, la foi fait les héros.
L'homme de devoir ne craint pas la mort. Le
soldat qui court à la mort entre dans l'immorta-
lité. Tu mourras à ton heure, sois donc crâne sous
les balles. L'homme qui ne compte pas avec la
mort est un être terrifiant.
D'abord ces maximes-là sont-elles réellement
affichées ? Si elles ne l'étaient pas, nous le
regretterions. Du moment qu'on passe à un
homme un uniforme militaire, l'Humanité
voudrait-elle qu'on lui enseignât à avoir peur
de la mort à laquelle cet uniforme l'expose ?
De son côté, la Lanterne, qui doit craindre
que l'Humanité ne lui fasse une concurrence
victorieuse en anticléricalisme, s'indigne non
moins que, dans des églises, soient affichés les
noms des auteurs des manuels scolaires con-
damnés par les évêques. Qu'est-ce^ue cela
peut bien lui faire à la Lantcrne ? Ses lecteurs
ne vont pas dans les églises et les interdictions
des évêques ne leur font, comme on dit, ni
chaud ni froid. Par conséquent, cet affichage
n'intéresse que ceux qui fréquentent les églises
et obéissent aux évêques, dont le devoir est de
prémunir leurs fidèles contre les manuels qui
peuvent mettre leur foi en péril. Où cet affi-
chage est-il mieux à sa place que dans les
églises, qui sont la maison commune des catho-
liques et que la loi de séparation de l'Eglise et
l'Etat met à la disposition des catholiques ?
L. Desmoulins.
ÉCHOS DE PARTOUT
M. Nénot, membre de la section d'architec-
ture de l'Académie des Beaux-Arts, fut délé-
gué de l'Institut, on s'en souvient, pour s'en-
tendre avec la Ville de Paris au sujet des
projets de transformation de l'Institut et de la
démolition de ses annexes, en vue du prolon-
gement de la rue de Rennes. Il eut à ce propos
plusieurs entrevues avec le préfet de la Seine
et lui exposa un plan d'ensemble des travaux
que M. Delanney accepta, après avoir demandé
et obtenu plusieurs légères modifications. Le
résultat de ces entrevues fut communiqué à
l'Académie des Beaux-Arts et approuvé par
elle.
M. Nénot termine en ce moment un plan
d'ensemble des travaux à faire à l'Institut
qu'il soumettra tout d'abord à la commission
administrative, puis ensuite à l'Institut, toutes
sections réunies.
Naturellement ce plan respecte l'aspect exté-
rieur du palais Mazarin on ne touchera pas
à la façade semi-circulaire ni aü dôme, dont
l'ensemble décoratif est digne de l'intérêt des
archéologues. En revanche, à la grande satis-
faction de tous ceux qui ont assisté aux séances
ordinaires de toutes les Académies à l'ex-
ception de l'Académie française la salle or-
dinaire de réunion, ce long et incommode pa-
rallélogramme dans lequel on n'entendait rien,
disparaîtra. Vraiment, ce ne sera pas trop tôt.
Mais quand commenceront les travaux ?
Une statistique tristement édifiante et qui
en dit long, hélas sur les ravages de l'alcool
en France et la multiplicité des crimes, c'est
celle que vient de publier le ministère des
finances dans son Bulletin de statistique et de
législation comparée.
Ce document, dont on ne saurait trop recom-
mander la lecture à nos législateurs, démontre
la progression alarmante du nombre des débits
de boissons en France, et particulièrement à
Paris. Lisez ces chiffres suggestifs.
En 1912, on comptait, en France, 481,159 dé-
bits de boissons. Il n'y en avait que. 478,843 en
1911, ce qui fait une augmentation de 2,316
débitants. En 1910, le chiffre n'était que de
477,808 en 1879, il était encore beaucoup plus
bas, soit 354,852. On voit que l'échelle d'ac-
croissement monte d'année en année.
Pour Paris, la progression est encore plus
accentuée. A l'heure actuelle, on y compte en-
viron 5,000 débits de boissons, c'est-à-dire que
le nombre de ces établissements a plus que
doublé en ces quinze dernières années.
Ces chiffres ne sont-ils pas effrayants à cons-
tater ?. Et les criminalistes, les médecins spé-
cialistes, tous ceux, enfin, que préoccupe l'ave-
nir de la race française, n'ont-ils pas raison,
mille fois raison, d'entreprendre la grande
croisade moderne contre l'alcool, pourvoyeur
des prisons et des asiles d'aliénés ?
Paris n'a plus, depuis quelques jours, rien à
envier à Saint-Pétersbourg. du moins en ma-
tière de voiture?.
Nous avons pu, en effet, apercevoir, à plu-
sieurs reprises, une troïka authentique, moins
les grelots, conduite par un cocher dont les
apparences sont celles d'un moujick.
Sans vouloir médire des moyens de locomo-
tion chers à nos amis et alliés, la troïka est d'un
effet au moins inattendu, lorsqu'on la voit se
mouvoir à côté des fiacres et des taxis.
C'est donc à la porte d'Orléans que nous
avons rencontré ce véhicule petit-russien. Sa
fraîcheur était douteuse, mais les personnages
qui le montaient lui prêtaient un air exotique
qui n'était pas sans grandeur.
Vêtus de vestes vert olive à brandebourgs
noirs et à larges boutons d'argent, coiffés de
feutres ronds à larges bords, chaussés de bottes,
tenant à la main de lourdes cannes à pommeau
d'argent ciselé, deux hommes au teint foncé, à
la barbe noire, ayant tout à fait l'air de Cosa-
ques, se prélassaient sur les banquettes de la:'}
voüure. Y
On revit le même véhicule tout près de l'0-
pér a-Comique, sur les grands boulevards, où
l'étonnement des promeneurs fut à son com-
ble.
On chuchote que les voyageurs et le cocher
ne sont autres que des chanteurs connus, qui,
gaiement, ont voulu s'amuser aux dépens de
leurs contemporains
Paris-Olympe.
Ce serait un beau titre de revue de fin d'an-
née. C'est vraiment à tort que l'on dit Les
dieux s'en vont » il serait plus exact de décla-
rer qu'ils reviennent.
Paris a sans doute semblé aux anciens dieux
de l'Olympe un séjour enchanteur, si. l'on en
juge par l'énumération suivante, glanée dans
le Bottin.
On y voit figurer
Jupin, architecte-vérificateur Junon, épi-
cier Minerve, coiffeur Mars, teinturier-dé-
graisseur Vulcain, rôtisseur Apollon, mar-
chand de vins-traiteur Hercule, statuaire
Flore, boulanger Cupidon, chapelier Eros,
tonnelier.
Contraste.
Les Prussiens et les Saxons se préparent à
commémorer, par des réjouissances « kolossa-
les » et par un monument inesthétique, la ba-
taille de Leipzig, où 350,000 alliés finirent par
triompher sans gloire de 157,000 Français.
Nul n'eût pensé, chez nous, à célébrer, hier,
l'anniversaire d'Iéna, où 40,000 Français écra-
sèrent 70,000 Prussiens, si toutefois un brave
homme, un inconnu, ne s'était acquitté, de la
façon la plus touchante et la plus jolie, de cette
pieuse mission.
Il vint, hier, solitaire et modeste, déposer à
la grille de la colonne Vendôme une fragile pe-
tite couronne de papier peint encadrant un car-
ton sur lequel il avait calligraphié quelques
vers qui rappelaient au passant l'un des plus
glorieux épisodes de l'immortelle épopée.
France et Espagne.
Encore un écho du voyage présidentiel
S. M. le Roi d'Espagne vient d'accorder son
auguste patronage à une entreprise qui ne
manquera pas d'intéresser les partisans si nom-
breux de l'accord franco-espagnol. et de tous
les musiciens.
Le mercredi soir 29 octobre, l'Orchestre
Symphonique de Madrid fera entendre, sous
la direction de son chef M. E.-F. Arbos, et
avec le concours de MM. Pablo Casals et
Achille Rivarde, les maîtres les plus notoires
de la musique. espagnole coniemporaine
Albeniz, Condado del Campo, Perez Casas,
Turina. Il y a quelques j,ours, à Madrid, ce
même orchestre faisait entendre sous la direc-
tion du même chef des œuvres de Saint-Saëns,
de Chabrier, de Debussy, de Paul Dukas. A
cette occasion seule manifestation artistique
du voyage à laquelle le Roi et le Président aient
assisté ensemble le Roi présenta M. Arbos -a
M. Poincaré. Ce dernier félicita chaudement
l'éminent chef d'orchestre et lui dit tout l'inté-
rêt qu'il portait au voyage des musiciens espa-
gnols; ,à Paris. La musique continuera ainsi
l'œuvre des diplomates et nous trouverons dans
les. jardins de l'harmonie de nouvelles et sé-
dùisantës Taisons d'aimer l'Espagne.
PARISIANA
LE FAUX-COL
On dit que, suivant l'exemple des
Américains, nos fashionahles vont,
à leur tour, supprimer l'usage du
faux-col.
Encore une mode nouvelle
Qui nous arrive de là-bas,
Puisque notre pauvre cervelle
De nos jours n'en invente pas;
On vit, jadis, de par le monde,
̃̃ ,L Des individus de haut vol
De qui l'on disait à la ronde
Ces gens-là se « poussent du col
Or, cette phrase lapidaire
Dont l'usage n'a pas duré
S'employait parfois solidaire
Au propre comme au figuré
Elle ne serait plus de mise
Grâce à la mode de demain,
Car on ne verra la chemise
Que juste au-dessus de la main.
Mais, dédaigneux de la parure,
Ne craignez-vous pas d'avoir l'air,
En adoptant cette échancrure,
De. clients de monsieur Deibler?
Puis je songe, en rimant cette ode,
A nos pauvres limonadiers
Qui, pour suivre à leur tour la mode,;
Devront servir des bocks entiers.
Adieu, la mousse frémissante
Par laquelle on était tenté.
On dira d'une voix cassante
Garçon Un bock décolleté
X. GRANIER.,
Les ballons de la Coupe Gordon-Bennett,
qu'on pensait dimanche soir partis pour la Côte
d'Azur, s'en sont allés sur la Côte d'Emeraude.
Ils y sont allés tout doucement par le chemin
des écoliers, pivotant sur eux-mêmes dès lundi
matin, et pour la plupart ne se sont décidés à
descendre qu'une fois au bord de l'Atlantique.
On connaissait hier soir le lieu d'atterrissage
de quatorze d'entre eux le Honcy Moon, an-
glais, à Langueux, près de Saint-Brieuc le
Patrie, belge, à la Roche-Terrien le B.-A.,
italien, à Villehutte-Dahnet, près de Pléneuf le
Roma, italien, à Plouézoc (Finistère) le Picar-
die, à Cordemais, près de Saint-Nazaire le
Banshee, anglais, à Pléneuf l'Astarté, autri-
chien, à Touguedec, près de Lannion le Duis-
burg, allemand, près de Paramé l'Ile-de-
France, à Trévoux-Tréguignec (Côtes-du-Nord);
le Hamburg-II, allemand, au cap Frehel l'Hel-
vetia, suisse, à Polazec, près e Huelgoat le
Stella, français, à Plestin-les-Grèves le Bel-,
gica-ll, à Saint-Michel-en-Grèves le Metzcler,
allemand, à Ducey (Côtes-du-Nord).
'Jusqu'à nouvel ordre, YHelvetia semble le
mieux placé. La Coupe échapperait donc à la
France. Il est toutefois prématuré de dire à qui
elle a chance d'aller. Il paraît, en effet, que plu-
sieurs concurrents se sont aventurés au delà
des côtes. On vit, entre autres, le ballon an-
glais Good Year, piloté car Ralph Upson, tra-
verser le ciel de Granville et continuer sa route
au-dessus des flots. Ralph Upson espérait, sans
doute, toucher les îles anglaises ou gagner la
Bretagne. C'est d'une belle audace.
Les exploits cygénétiques remplissent en ce
moment les colonnes de tous les journaux mon-
dains. L'actualité appartient aux innombra-
bles disciples de Nemrod. Tout le Paris élé-
gant est en province, et dans les châteaux de
Seine-et-Oise, de la Normandie, de la Touraine,
ce ne sont que festins splendides et divertisse-
ments raffinés. L'anisette Marie Brizard est
toujours la liqueur préférée dans toutes ces
réunions, où le, bon goût règne en maître.
Faut-il en être surrris au moment où les
boissons hygiéniques sont à l'ordre du jour ?
La vente du raisin de la Treille du Roi a eu
lieu hier à Fontainebleau. Un nombreux pu-
blic se pressait autour des tables disposées le
long du fameux mur. On a joyeusement dé-
gusté les grains de ces .raisins, et les ache-
teurs, après les avoir savourés, ont poussé les
enchères à des prix plus élevés que d'habitude.
Le raisin était d'ailleurs très beau et les grap-
pes très fournies.
On a vendu quarante-deux lots de 25 kilo-
grammes chacun qui ont produit un total de
2,3i8 francs, soit une moyenne de 2 fr. 26
le kilog.;
Par l'acquisition de la collection d'antiquités
là maison
Perret-Vibert, 33, rue du Quatre-Septembre, se
trouve à même d'offrir en ce moment à sa nom-
breuse clientèle artiste un choix unique de ri-
ches porcelaines anciennes, de broderies, bron-
zes et cloisonnés du quinzième au dix-huitième
siècle, ainsi que jades, émaux, divinités et lan-
ternes de temples aux lignes si variées et si
originales et aux coloris si chauds. Les belles
pièces se faisant chaque jour plus rares, une
visite 33, rue du Quatre-Septembre, s'impose
sans retard.
Les merveilleuses journées de ce mois d'octo-
bre retiennent sur les rives du lac d'Enghien
une clientèle d'élite. Et dans l'admirable décor
de la charmante station thermale, toute bai-
gnée du parfum des roses d'automne, les heu-
res passent agréablement, coupées, comme en
pleine saison, de concerts remarquables, de
représentations théâtrales que rehausse le
concours de nos meilleures vedettes parisien-
nes, et de réunions élégantes autour des menus
délicats du maître Negresco.
NOUVELLES A LA MAIN
On parle de la tension des rapports franco-
allemands
L'Allemagne a, paraît-il, beaucoup de
griefs contre nous, dit quelqu'un.
Boireau, gravement
Ils sont léyion
Un Dômino
Une Boiwsation
avec le Roi de Grèce
Les Lectures pour Tous publient dans leur nu-
méro d'aujourd'hui d'intéressantes déclarations
qu'un de leurs rédacteurs, M. Jean Leune, a obte-
nues du roi de Grèce. L'intention du souverain est
visible de dissiper le malentendu qui a inquiété
l'opinion française, et de reconnaître les services
rendus à la Grèce par la mission Eydoux.
Le roi Constantin explique d'abord les raisons
qui l'ont amené à faire sa double visite à Berlin
et à Paris
Je ne voulais faire cette année aucune
visite, étant en deuil. J'avais l'intention d'en
faire seulement l'an prochain, officiellement,
en grande tenue.
1 » Mais je ne pouvais décliner l'invitation de
l'Empereur. Je fis en conséquence aussitôt
savoir à. votre gouvernement que, dans ces
conditions, j'entendais me rendre'également à
Paris, pour y visiter M. Poincaré, incognito
toujours, à cause de mon deuil. Car, ainsi que
je l'ai fait dire alors, je voulais le remercier
de l'aide que la France nous avait, depuis un
an, si largement accordée.
» Vous, voyez ainsi quels étaient mes senti-
ments.
Puis, abordant la question du taast qui a sou-
levé en France, l'émotion que l'on sait, le Roi en
donne ce commentaire
J'ai dit en Allemagne que les principes de
la tactique prussienne m'avaient donné la vic-
toire. Etait-ce donc nier l'œuvre de la mission
française ?
» Il y a plusieurs facteurs dans ce qu'on
appelle la victoire ». Il y a la pensée du chef
qui conçoit les plans et qui veille à leur exécu-
tion il y a la valeur « en soi » de ceux qui
doivent en assurer l'exécution, et puis il y a
leur instruction. Ces trois éléments ne vous
paraissent-ils pas absolument indépendants les
uns des autres, en ce sens que la valeur de l'un
n'entraîne nullement celle des autres ?
Une troupe peut avoir une instruction par-
faite si elle est mal conduite, ou si elle man-
que de moral, elle sera pourtant nulle au point
de vue de la victoire. Et réciproquement.
·· La victoire s'obtient lorsque ces trois fac-
teurs acquièrent leur maximum de puissance
ou de développement.
» Mais chacun a sa part, c'est justice d'au-
tant plus que la valeur de l'un de ces facteurs
ne saurait entraîner la nullité des autres
J'ai donc pu très bien employer, moi per-
sonnellement, pour la conduite de mes troupes,
les principes de tactique prussienne mes trou-
pes, soldats et officiers, ont pu parfaitement
montrer sur les champs de bataille une endu-
rance, un héroïsme, un enthousiasme qu'elles
n'avaient appris dc personne, mais qu'elles
possédaient seulement comme qualités' natives
de race il n'en reste pas moins pour la mis-
sion française une part très réelle et nullement
dédaigner pour sa participation au dévelop-
pement du troisième facteur, organisation et
instruction.
» La mission française a dirigé l'instruction
des troupes en garnison à Athènes. Elle a fait
à un certain nombre d'officiers des cours pré-
paratoires à votre Ecole supérieure de guerre.
Elle a dirigé, l'an dernier, des grandes manœu-
vres auxquelles participèrent plusieurs divi-
sions et deux classes de réservistes. Des offi-
ciers de la mission sont directeurs de service
(intendance, santé, cavalerie) au ministère de
la guerre. Les bases d'une organisation nou-
velle ont été jetées. Il y avait dix-huit mois
que la mission était en Grèce lorsque la guerre
a commencé en 1912. Pouvait-elle vraiment, en
dix-huit mois, faire plus que ce que je viens
de vous dire ?
» Encore une fois, elle a fait tout ce qu'elle
ouvait faire. Je suis le premier à le reconnaî-
tre. »
Pour ce qui est de l'avenir, le roi de Grèce le
définit en ces termes
Je ne vois pas pourquoi nous ne travail-
lerions pas bien ensemble, la mission française
et moi. Le général Eydoux me secondera dans
ma tâche écrasante de commandant en chef des
armées de terre et de mer. Je ne demande qu'à
l'avoir pour collaborateur et je sais, parce que
je le connais, qu'il me sera un collaborateur
loyal avec qui je pourrai toujours m'entendre.
Ensemble, nous verrons les mesures à prendre,
ensemble nous les discuterons impartialement,
et je ne m'arrêterai jamais qu'à la solution qui
apparaîtra la meilleure pour le bien du pays et
de l'armée.
» On a dit que mon pauvre père recevait le
général Eydoux bien plus souvent que moi.
Mais on était alors en temps de paix. Je ne
suis devenu Roi qu'en pleine période de crise
et de perturbations. Je n'ai donc. pu agir com-
me je l'eusse fait en d'autre temps. Feu mon
père n'était pas militaire. Il recevait le général
Eydoux une fois par semaine, pour lui deman-
der où en étaient les choses. Moi, je suis pas-
sionnément soldat. »
Et le Roi répète plusieurs fois ces deux mots
sur un ton étrangement impressionnant.
« Je veux m'occuper constamment de mon
armée. Aussi ne sera-ce pas une fois par se-
maine que je recevrai le général Eydoux. Ma
porte lui sera ouverte tous les jours s'il a cha-
que jour une mesure intéressante à me propo-
ser. »
On jugera par ces extraits de l'intérêt que pré-
sente la conversation relatée par les Lectures pour
tous.
En terminant, le Roi réclame le droit, que per-
sonne ne lui conteste, d'être, avant tout, roi de
Grèce. Et il ajoute « Ne croyez-vous pas que les
intérêts de la France puissent être bien souvent
d'accord avec ceux de la Grèce ? » La netteté des
| déclaràttoïis .«'.a roî Cgnstantm ne pourra,
quer d'impressionner favorablement l'opinion
française et de faciliter cet accord si souhaitable
entre deux nations qui n'ont cessé de sympathiser.
Paul Roche
Bloc-Notes Parisien
Autour d'un Mariage princier
C'est aans la chapelle royale de Saint-James Palace
que sera célébré aujourd'hui, à midi, le mariage de
LL. AA. RR. le Prince Arthur-Frédéric-Patrick-Albert de
Connaught, cousin et aide de camp de S. M. George V,
et de la Duchesse Alexandra-Victoria-Alberta-Edvina-
Louise de Fife, fille de S. A. R. la Princesse Louise-
Victoria-Alexandra-Dagmar, sœur du souverain de
Grande-Bretagne et Princesse royale depuis la mort de
l'Impératrice Frédéric. On sait qu'il n'y a jamais qu'une
Princesse royale à la fois.
Le Prince de Connaught a trente et un ans; la Du-
chesse de Fife, qui a hérité, nous l'avons dit, du titre de
son père en 1912, a vingt-deux ans.
La Duchesse de Fife est fort riche. On ne sait pas le
chiffre de sa fortune, car le testament du Duc de Fife,
son père, comme celui des Princes, n'a pas été rendu
public; mais au moment de sa mort l'on estimait sa for-
tune à plus d'un million sterling..
Pendant son enfance et sa jeunesse la Duchesse a mené
une vie très retirée, auprès de son père et de sa mère,
que le monde n'attirait pas et qui préféraient les joies
calmes du foyer au mouvement du monde de la Cour et
de l'aristocratie. Mais le 'Prince Arthur de Connaught,
par goût et par devoir, est très mêlé à la vie officielle
et mondaine, et l'on dit, dans les milieux aristocratiques,
que le superbe hôtel de Mount Street, où les jeunes
époux s'installeront après la lune de miel, est destiné à
être le théâtre de fêtes et de réceptions vraiment prin-
.cièces. ï.: » ̃ ̃ .̃
Voici maintenant le programme de l'imposante jour-
née
Leurs Majestés britanniques, S. M. la Reine Alexandra,
LL. MM. le Roi et la Reine de Norvège, LL. AA. RR.
le Prince de Galles, la Princesse Mary, le Prince John,
la Princesse héritière de Suède (Margaret de Connaught)
formeront cortège aux deux jeunes époux par qui seront
réunis, dans le même blason, le trèfle irlandais et le
chardon d'Ecosse.
Chaque détail'de la cérémonie, qui sera célébrée avec
une pompe quasi-royale et dont plusieurs répétitions ont
eu lieu cette semaine, sous la direction du grand-cham-
bellan de la Cour, a été soigneusement réglé.
Onze heures. Ouverture des portes de la chapelle
pour permettre aux invités (au nombre de deux cents
environ) de prendre place dans la nef.
Le docteur Alcock, auquel a été dévolu le soin de tenir
le grand orgue, exécutera successivement la Marche
Nuptiale dn Tannhceuser (Wagner), la Marche Impériale
(sir E. Egar) et la Marche de la Reine de Saba (Gou-
nod).
Onze heures quarante. Arrivée de LL. MM. les
Reines Alexandra et Mary et de LL. MM. le Roi et la
Reine de Norvège.
Onze heures cinquante. Arrivée du fiancé, accom-
pagné de LL. AA. RR. le Prince de Galles et le Duc de
Connaught, qui lui serviront de « beestmen n.
Le docteur Alcock exécutera la Marche Nuptiale, com-
posée spécialement par lui à cette occasion.
Onze heures cinquante-cinq. La fiancée, au front
de laquelle S. A. R. la Princesse Mary aura posé la cou-
ronne d'oranger et épinglé le voile nuptial, pénétrera dans
la chapelle au bras de S. M. George V.
A ce moment, le chœur, composé des gentlemen and
children » des chapelles royales, entonnera l'hymne Con-
duis-nous, Père céleste; puis, pendant que la procession
se déroulera Lève les yeux. (Mendelssohn).
L'archevêque de Cantorbéry officiera, avec l'assistance
de l'évêque de Londres, qui lira l'Exhortation.
Les draps éclatants et l'or des uniformes, les pierres
précieuses et les émaux des ordres dont seront constel-
lées les poitrines masculines, la somptuosité des toilettes
des invitées feront de ce cortège un des plus brillants
qu'on ait vus jusqu'ici à Londres, en dehors des solen-
nités royales.
Au reste, on n'a reculé devant aucun effort pour que
chaque détail des costumes et de la décoration soit la
perfection même.
La toilette de la mariée, d'une incomparable richesse,
quoique très simple de coupe, est faite de satin char-
meuse ivoire.
Un réseau de perles fines et de diamants, montés sur
tulle, décore le corsage, à la ceinture duquel sera fixé
un bouquet composé de fleurs d'oranger, de myrte et
de bruyère blanche.
Celle-ci sera expédiée spécialement d'E;osse et ar-
rivera à Londres quelques instants à peine avant la cé-
rémonie, afin d'avoir encore toute sa fraîcheur.
Le voile est fait d'admirables dentelles de Bruxelles
et la longue traîne, soutenue à l'endroit où l'étoffe fait
une cassure par un lourd rang de perles fixé à l'épaule.
C'est dans cette toilette, dont aucun motif ne sera mo-
difié, que, suivant une antique coutume, la jeune femme
fera sa première visite à la Cour, en février prochain.
Sitôt après la cérémonie la nouvelle Princesse de Con-
naught se rendra dans un salon spécialement préparé
pour elle dans le palais de Saint-James, où, assistée par
ses demoiselles d'honneur, elle quittera sa robe nuptiale
pour prendre un costume de voyage de noces composé
d'une jupe de charmeuse grise légèrement drapée, d'un
corsage de dentelle orné d'une ceinture bleue à glands
d'argent, d'una tunique également de dentelle, d'un
grand manteau de velours gris avec étole et poignets
d'hermine et de chinchilla.
Un manchon d'hermine, bordé de chinchilla, et un cha-
peau en velours gris foncé, garni d'une magnifique ai-
grette blanche, complèteront l'équipage.
Le trousseau de la jeune femme, dont chaque pièce a
été faite en Angleterre, dépasse en beauté et en luxe
celui qui fut effectué pour la Princesse Ena de Batten-
berg, lors de son mariage avec S. M. le Roi d'Espagne.
Ir comporte, outre la lingerie, cinquante-cinq robes,
dont vingt-cinq robes de soirée, trente-huit chapeaux et
plusieurs somptueux manteaux de fourrure.
Voici maintenant quelques-unes des toilettes qu'il sera
donné d'admirer dans l'illustre assisatnce
S. A. R. la Princesse Louise robe de charmeuse
grise brodée de paillettes. Bouquet de roses à la cein-
ture.
S. A. R. la Princesse Victoria robe de charmeuse
abricot drapée sur un fond de jupe brodé de topazes et
d'or.
S. A. R. la Princesse Alexandra de Teck robe ve-
lours chiffon bleu saphir, drapée sur fond orné de perles
de cristal bleu corsage filet bleu brodé, recouvrant un
corps de mousseline chiffon blanche; tunique filet brodé
descendant jusqu'aux genoux.
Décolleté et bas de la jupe ourlés de zibeline.
Les demoiselles d'honneur, au nombre de huit, sui-
vant la tradition, seront toutes vêtues strictement de
mêmes robes en charmeuse rosée, recouvertes de tuni-
ques de dentelles ivoire.
Elles porteront à la ceinture un bouquet de bruyère
blanche d'Ecosse.
De toutes ces toilettes, la plus somptueuse est celle
dont sera parée S. M. la Reine Alexandra.
Depuis le décolleté jusqu'à l'ourlet du bas, sa robe,
extrêmement collante, garnie de jais et de diamants, scin-
tille comme une cotte de mailles.
La jupe est ornée de filet blanc sur lequel des feuilla-
ges peints à la main se dégradent depuis le noir le plus
profond jusqu'au plus tendre gris.
Enfin, des barrettes de diamants arrêtent et fixent le
drapé du corsage.
La décoration de la chapelle sera fort brillante.
Depuis des mois, le jardinier en chef du château de
Windsor travaille à préparer, en vue du mariage, les
roses blanches les plus pures, les plus éclatantes.
Après bien des hésitations, les variétés suivantes ont
été choisies par le grand-chambellan de la Cour la
Mollie Crawford, la Killarney et la Beautiful Kaiserin,
splendide fleur ivoirine à reflets à peine rosés.
Les jeunes époux ont reçu de nombreux cadeaux, qui
ont été transportés au palais Saint-James.
On y remarquera de magnifiques objets d'art anciens,
des tapisseries, des meubles de grand prix, une série de
petites statuettes de Saxe portant de minuscules torchères
électriques, une collection unique au monde de montres
anciennes, parmi lesquelles les plus remarquables sont
françaises.
Enfin la ville de Londres a offert aux deux jeunes
époux une cassette rectangulaire en or, dont le couvercle
porte les armes conjuguées des deux familles.
Sur le panneau de face on remarque un monogramme
en diamants, les armes de la ville de Londres et de très
fines peintures représentant le Guild Hall sous ses dif-
férents aspects.
Encore un mot pour finir
Le mariage du Prince Arthur'ae Connaught et de la
Duchesse de Fife, bien qu'unissant deux membres de la
famille royale, ne sera pas célébré avec la pompe ordi-
naire d'une union royale, mais avec un caractère semi-
privé, malgré la présence de la Cour et de plusieurs
Princes étrangers apparentés à la famille régnante an-
glaise. Il n'y aura pas de représentants des Cours étran-
gères, sauf les membrss du corps diplomatique.
individuellement.
Tout-Paris
Demain, le ¡Gaulois commencera la publica-
tion de
Les Deux Fantômes
grand roman par le
Comte Stanislas RZEWUSKI
l'écrivain si regretté, qui, dans cette dernière,
oeuvre d'un dramatique intense, a mis toutes
les qualités que noms lecteurs ont maintes fois
appréciées le mouvement, l'émotion, tout le
pathétique d'une situation poignante, dans ce
cadre de la vie russe q2c'il excellait à évoquer.
un
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
t- M. G. de Maizière
Maillane, 14 octobre
Il y a juste deux ans, dans ce même petit
salon de Maillane,. où se pressent aujourd'hui
les autorités officielles en veine d'admiration
pour la. poésie, j'écoutais ce même Mistral
m'expliquer, avec l'abandon qu'on apporte
dans une conversation familière, pourquoi il
se refusait à répondre aux vœux unanimes qui
l'appelaient à l'Académie française.
Ce n'est, ni du dédain, ni de l'indifférence,
me disait-fi, mais j'estime avoir été assez ré-
compensé le soir où, dans l'allée sombre d'un
bois d'oliviers, j'ai entendu un jeune homme
à bout de propos affectueux, dire à sa fiancée,
en guise de dernier argument de sincérité et
de suprême marque d'admiration, ce seul mot
de Mireille.
L'Académie ne me donnera jamais pareille
gloire, et il y a, dans la tendresse des choses,
plus de poésie que dans les discours des hom-
mes.
Aujourd'hui, cependant, Mistral écoute un
président de république, venu exprès pour, le
saluer avec des généraux tout brodés d'or, des
préfets en argent et des journalistes couverts
de poussière. Le salon est plein de fleurs et,
devant la porte, il y a des jeunes filles qui
chantent au son des tambourins et des fifres.
La poésie s'est mise en frais pour recevoir le
monde officiel, et le poète a revêtu une redin-
gote. Allons, me disais-je, le voici comme les
autres, il a suffi d'un sourire de la fortune,
des puissants, et voici sa grandeur qui s'a-
baisse et sa modestie qui se rend. Ah que nan 1
Aux compliments, le poète, par avance, a ré-
pondu par un hymne, d'où sa muse a écarté
avec soin les mots fâcheux de je et de moi.
On était venu le fêter, le choyer, lui jeter
des fleurs. Il n'a vanté, lui, que les autres, et
renvoyé à la France les couronnes offertes à la
Provence. Il était très ému, le vieux poète
dont on venait troubler l'intimité, si ému, que
la lyre tremblait un peu entre ses doigts.
Pensez donc Avoir chanté la tendresse de
Mireille et puis, tout d'un coup, être mis en
demeure de parler devant des préfets Mistral
ne s'est pas embarrassé pour si peu et, resté
jeune comme un soldat, il a parlé du pays en
amoureux. Les fonctionnaires en semblaient
tout glorieux et prenaient dans leurs uniformes,
des poses de ténors. Ainsi, quelquefois, des
vieux se méprennent, et font les entendus
quand la jeunesse devant eux parle d'amour.
Et voici ce qu'a dit le beau vieillard
Monsieur le Président,
Je me garderai bien de prendre pour moi seul
le grand honneur que vous me faites.
En venant saluer, dans son humble village, le
poète provençal qui ne l'a jamais quitté, vous té-
moignez très haut vos sympathies de patriote pour
ce régionalisme dans lequel notre France aura,
j'en ai la foi, son rajeunissement. Ils sont nom-
breux de plus en plus ceux qui, pour conserver la
beauté du pays et le bonheur d'y vivre, souhaitent
le maintien de ce qui fait le charme de nos vieille.s
provinces les coutumes, les costumes, les tradi-
tions, les dialectes, et toutes ces variétés qui ex-
priment la vie d'un peuple vra,iment'libre et qui
enracinent la race au terroir des ancêtres.
La Provence, avec son nom et sa, délimitation
d'origine immémoriaie la Provence, avec son his-
toire inscrite sur ses monuments, son climat, ses
paysages où l'habitant s'est appareillé, démontre
clairement qu'elle ne veut pas mourir.
Et elle ne mourra pas, cette mère des paysans et
des soldats de France J'en atteste les cuirassés
de la flotte française sur lesquels refleurissent les
noms de la Lorraine, de la Bretagne et de la Pro*
vence.
A chaque oiseau
Son nid est beau,
dit un proverbe provençal.
Monsieur le Président, soyez remercié pour la
signification qui surgit de votre voyage au cœur
de nos provinces, trop dédaignées depuis quelques
siècles, et que votre tour de France, si justement
applaudi et acclamé, soit un réconfort nouveau
pour leur reviviscence.
M. Poincaré, lui, a été de son âge et a nuancé
un petit discours dont toutes les strophes com-
mençaient par ces mêmes mots à vous. A
vous, cher et auguste maître, notre admiration,
etc. A vous, notre reconnaissance, etc.
Le Président a trouvé une jolie for-
mule pour louer le patriotisme de Mistral
« Vous avez, en chantant la Provence, tressé
à la France une verte couronne d'oliviers. »
Au surplus, voici le discours complet de
M. Poincaré
Cher et illustre maître,
A vous qui avez élevé, en l'honneur d'une terre
française, des monuments impérissables à vous
qui avez éclairé de votre soleil nos imaginations
assombries à vous qui avez relevé le prestige
d'une langue et d'une littérature dont notre his-
toire nationale a lieu de s'enorgueillir à vous qui
avez dressé dans nos souvenirs les figures immor-
telles de Vincent et de Mireille, de Calendal et
d'Estérelile à vous qui avez chanté, en des stances
inoubliables, l'es magnanarelles et les gardians à
vous, le noble poète du Rhône et des îles d'Or
à vous, qui, en glorifiant la Provence, avez tressé
à la France elle-même une verdoyante couronne
d'olivier à vous qu'il y -plus d'un demi-siècle,
Lamartine saluait déjà comme un nouvet Homère,
et dont le premier livre lui apportait, disait-il,
dans sa. mélancolique retraite; une goutte de ro-
sée, une haleine du matin, un rayon de lumière
à vous, qui avez vécu entouré de l'admiration uni-
versehe, et qui êtes resté fidèle à votre cher mas
de Maillane à vous dont les générations futures
surpasseront, à travers les âges, comme des fleurs
qui ne se faneraient pas, les poésies divines
à vous, augaste maître, j'apporte aujourd'hui
le témoignage de reconnaissance de la république
et de la grande patrie.
La réception a duré à peine quelques minu-
tes, après quoi le président de la république a
invité le poète à déjeuner.
Le Président et Mistral se sont arrêtés quel-
ques instants sur le seuil, o permettre aux
photographes de fixer côte à côte les images
d'un des académiciens les plus éminents et de
celui qui n'a pas voulu l'être. Pendant ce
temps, l'élément militaire du cortège se com-
plaisait, avec raison, à. féliciter le chœur des
vingt jeunes Arlésiennes qui avaient prêté à la
fête l'agrément de leurs voix. La photographie
terminée, M. Poincaré lui-même n'y résiste
pas et adresse à la jeunesse son plus gracieux
sourire.
C'est que cette matinée pleine de soleil, .pas-*
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