Titre : Le Gaulois : littéraire et politique
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1882-11-05
Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication
Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication
Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 05 novembre 1882 05 novembre 1882
Description : 1882/11/05 (Numéro 112). 1882/11/05 (Numéro 112).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5244152
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/02/2008
Dimanche 5 Novembre i88£
Paris FA. fit centimes. Départements et Gares CENTIMES
Seizième Année Troisième Série Numéro 112
~3: D~ ~P~N7~
Rédacteur en Chef
i. ANNONCES i
MM* CEE. LAGHAISTGE, QEïlB1 & .-O*
• 6> PLACE DK LA BOURSE, 6
Et à l'Administration du tournai
ADMINISTRATION
DE DIX HEURES A CINQ HKUBSS
», boulerard des Italien*, •
ABONNEMENTS, PETITES ANNONCÉS
RENSEIGNEMENTS
9, boulevard des Italiens, 9
,All~;°A'~9fYT13, 1~IE~lO~i
Directeur
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Paria Département*
Un mois 4 5 Fr. Un mois. 6 fr.
Trois mois. 13-50 Trois mois. 18 fr.
Six mois. 27 fr. Six mois 33 fr.
Un an. 54 fr. Unau. 84 ~r.
Etranger
Trois mois (Union postale) 18 fr.
RÉDACTION
9, boulevard des Italiens, •
DE DEUX HEURES A MINUIT
Pari s- Journal
SOMMAIBB
Mes Souvenirs. –A. DelpU.-
Nos Echos. Un Domino.
Le petit Navire. Paul Ferrier.
MONSBIGNEUR, GUIBERT ET LES JOURNALISTES.–
,X. Z.
FiLOC·ICTBS PARISIBN. TOat-.Paria,
Bloc-Notes Parisien. Tout-Paris.
R:c£Ption ou Nonbe. R. de Sutil.
M. Henry Maret. Mermeias.
La Bourse. Henri Prioat.
Chronique des Tribunaux. Maître X.
Nouvelles diverses. André Sourdes.
TébÉORAMMES ET CORRESPONDANCES. G. LitlS.
Soirées parisiennes. Choufleuri.
Echos des Théâtres. Maurice Ordonneau.
Sport. R. de Lu y.
MES SOUVENIRS
Pendant que j'étais à Marseille, l'autre
semaine, je cherchais à- reconstituer la
vie littéraire de la vieille cité. Je con-
naissais bien d'ailleurs les poètes nés là-
bas, au bord de la Méditerranée sou-
riante. Comment ne pas s'envoler dans
le monde des rêves, en voyant ce mer-
veilleux paysage? A l'horizon, la ligne
grise et immuable des rochers; sur le
premier plan, le château d'If, où l'on
montre encore, avec un admirable sé-
rieux, t le cachot de ce pauvre Edmond
Dantôs » enfin, partout, la mer bleue,
caressante, tranquille.
Je connaissais ce Barthélemy qui fit
la Némèsîs, Les hommes qui ont main-
tenant soixante ans se rappellent encore
ce succès-là. Toutes les semaines, Bar-
thélémy tournaillait solidement minis-
tres et députés. Tant qu'elle fut dans
l'opposition, la Némésis eut un succès
Considérable. Un beau jour, elle tourna
au gouvernement. Son crédit fut perdu.
Bien des histoires coururent. On ra-
conta qu'après une grosse perte au jeu
Barthélémy reçut la visite d'un auge
tentateur ressemblant à M. Thiers. Ce-
pendant, dans la Kabbale, les aages ten-
tateurs sont beaux Toujours est-il que
la Némèsis, n'ayant plus de crédit, n'eut
plus de lecteurs, et, n'ayant plus de lec-
teurs, cessa de paraître.
Que devint Barthélémy? On ne sait
trop. M. Charles Monselet m'a raconté
lavoir vu, un soir, au foyer d'un petit
théâtre de Bordeaux, où la fille du viru-
lent satirique jouait la comédie. Le poè-
te, pauvre, vieilli, oublié, était bien dé- i
chu de son ancienne gloire. Avoir
empli la France de son nom et devenir
une mère d'actrice ̃'
Je connaissais ce Méry, improvisa-
teur merveilleux, spirituel, presque au-
tant qu'Alexandre Dumas père et fils.
Un jour, Méry se battait au pistolet. La
balle de son adversaire vint s'aplatir
sur une grosse pièce de cinq francs
qu'il portait en son gousset.
Ma parole, dit Méry, voilà de l'ar-
gent bien placé 1
.Une autrefois, on lui annonce la mort
de M. Persil, procureur général à la cour
royale.
Allons donc 1 M. Persil est mort?
Mais oui.
C'est qu'on lui aura fait avaler un
perroquet! l
#
Je connaissais surtout ce Joseph Au-
tran, la gloire toujours vivante de Mar- j
seille. Pourquoi la génération actuelle
le lit-elle si peu? Hélas parce que les
ombres se pressent nombreuses dans les
Catacombes littéraires 1
J'avais beaucoup causé de lui avec j
Armand de Pontmartin. J'ai voulu re-
lire les œuvres d'Autran en face de
cette Méditerranée qui lui fut clémente.
Et la Fille d'Eschyle, drame nerveux et
fler, joué à l'Odôon au mois de mars
1848, et dont le poète a dit lui-même
Ce fut un grand succès doat tout Paris parla
Comme un homme prudent, je m'en suis tenu là.
Et puis encore les Poèmes de la mer,
qui valurent à Autran un article violent
et iû juste de M. Barbey d'Aurevilly. En-
fin toutes ces pages, éloquentes et ado-
rables, qui me font souvent regretter de
n'avoir pas connu cet esprit da haute 1
volée. Lisez son discours de réception à 1
l'Académie (où il remplaçait François
Ponsard), et vous verrez combien il
avait de l'esprit. La dent un peu dure
aussi 1 Ses critiques littéraires avaient
une finesse. impitoyable. C'est Autran
qui a'porté les plus jolis jugements sur
les poètes français:
ALEXANDRE GTTIRAUD ¡
Il y eut un moment, vers 1825, où le
baron Alexandre Guiraud était aussi célè-
bre que le vicomte Victor Hugo.
SAINTE-BEUVE
Un critique doublé d'un poète. La cri-
tique est grand, le poète petit.
THÊOÏHILE GAUTIER
Un poèt» doublé d'un, critique. Tous
doux de la môme taille.
DELPHINE DE GIRARDIN
Une muse couronnée de fleurs. arti-
ficielles.
CHATEAUBRIAND
II avait la passion des vers. Malheu-
reusement il en a fait. j
• VOLTAIRE • • j
Le plus grand prosateur du dix-hui-
tième siècle. Sa prose n'a été mauvaise.
que dans ses vers.
Quoi de plus fin que cette concision ?
C'est encore Autrau qui a émis un j ¡
jour, causant avec un de ses amis, cette l
pensée profonde j
Ce sont les pauvres qui achètent les
livres. Ils les prêtent aux riches qui ou-
blient de les leur rendre J
#
Deux des amis les plus intimes d'Au-
tran furent Lamartine, quand il était
jeune Alexandre Dumas fils, quand il
devint un homme. J'ajoute qu'Autran
est peut être le seul qui ait peint sous
son vrai jour l'illustre poète des Médita-
tions. Je renvoie ceux de mes lecteurs
qui voudront s'en assurer, tout en passant
des heures charmantes, au septième vo-
lume Œuvres complètes d'Autran.
En 1848, à l'époque où Lamartine gou-
vernait la France du haut de son génie,
et du fond de son cabinet des affaires
étrangères, Autran et Alexandre Du-
mas allèrent le voir. Les galeries étaient
pleines de têtes étranges. Que de figures
hétéroclites, mon Dieu! et que de bottes
ôeulées traînant sur les tapis! Dumas
traversait tout ce monde-là avec sa séré-
nité accoutumée. Ils entrent dans le ca-
binet du ministre. Lamartine les reçoit
avec affabilité. Puis la conversation
s'engage. La visite achevée, Dumas
aperçoit sur la cheminée un canif, avec
lequel, d'habitude, le poète jouait ma-
chinalement. Le même tic qu'eut plus
tard ce grand bûcheron appelé Abraham
Lincoln.
Est-ce là le canif dont vous avez
coutume de vous servir? demande
Alexandre Dumas à Lamartine.
Oui. Pourquoi cette question 1
Parce que vous me combleriez de
joie, répondit Damas, si vous me pér-
mettiez d'emporter ce canircomme une
relique.
Prenez dit Lamartine avec con-
descendence.
Etes-vous de mon, avis ? Je trouve
que la rencontre de ces deux orgueils
est tout ce qu'il y a au monde de plus
amusant I
#*#
L'intimité d'Autran et de Dumas fils
remonte à 1847. Ce n'est pas d'hier t
Voicile portrait da l'auteur de Y Etran-
gère, à cette époque, tracé de main de
maître par le poète de la Fille d'Eschyle
« Qui n'a pas connu Dumas fils vingt
ans, ne sait pas ce que peuvent être les
qualités les plus séduisantes de la jeu-
nesse. S'il a fait des victimes en ce
temps-là, je n'en veux rien savoir; mais
je crois que le Père Eternel leur aura
pardonne, car la séduction était vrai-
ment trop forte.
» Toutes les facultés qui, plus tard, se
sont produites chez lui avec tant d'éclat
s'y faisaient dès lors pressentir. Ce n'é-
taient pas encore les fruits; c'était la
plus précoce et la plus riche des florai-
sons. Dans ce gamin de génie, dans ce
glorieux héritier d'un nom illustre, il y
avait déjà un poète, un philosophe, un
moraliste. Je ne dis rien de sa per- 1
sonne, une vraie figure de héros de ro-
man, comme en rêve toute jeune femme
penchée à son balcon. »
Quoique Autran eût douze ans de plus
que Dumas fils, ils se lièrent tout de
suite. Et quelles bonnes causeries 1 Quel-
les longues promenades surtout! Ils
avaient la douce manie de ne conver-
ser. qu'en vers. Dumas fils rencontrait
Autran, et lui disait
Si vous voulez, ami, nous irons au musée,
Distraire d'un roman notre âme inaimatée.
Et, comme il faisait très chaud, Au-
tran de répondre très gravement
Cette température a quelque chose en elle
Qui me produit l'effet d'un gilet de flanelle 1
Dumas père dirigeait alors le Théâ-
tre-Historique Auguste Maquet et lui
y faisaient jouer des chefs-d'œuvre.
C'était un asile pour la Fille d'Eschyle.
Mais les journées de Juin amenèrent la
fermeture du théâtre Autran s'en alla
à l'Odéon. C'est aussi de cette époque
(1847) que datent ces quatre vers écrits
par Lamartine, au bas du buste d'Au-
tran, buste où le sculpteur le représen-
tait sombre et élégiaque
Le portrait n'a rien de banal
J'en ris un peu, tant il est triste.
Quel est ici l'original
Est-ce le modèle ou l'artiste ? P
~=
Ah comme on a raison de dire qu'A-
lexandre Dumas père n'était qu'un or-
gueilleux I
Un peu plus tard, Joseph Autran alla
passer quelques jours à Monte-Cristo.
Il devenait l'hôte du père, après avoir
été l'hôte du fils. L'auteur de Mademoi-
selle de Belle-Isle habitait une petite
chambre, dans son palais. C'est là que, ¡
avec Auguste Maquet il écrivait ces ré-
cits merveilleux qui passionnaient le
monde entier. Notez, qu'alors, Alexan-
dre Dumas père vivait en pleine gloire.
Son nom sonnait comme une fanfare.
Le lendemain de son arrivée, Autran
vit entrer dans sa chambre un petit né-
gro vêtu de velours, nommé Fleur-de-
Benjoin. Fleur-de Benjoin venait de-
mander à Autran ce qu'il voulait pour
déjeuner.
Mais cela m'est absolument égal,
répondit le poète. Je mangerai ce que
mangera tout le monde.
Le nègre faisait la moue.
Eh bien! voyons, qu'est-ce qu'il
y a?
Fleur-de-Benjoin baissa les yeux; et
avec beaucoup de timidité
M. Dumas, dit-il, devant faire la
cuisine lui-même, demande que mon-
sieur donne le menu. Sinon, monsieur
pourrait croire que M. Dumas a fait les
seuls plats qu'il sache faire!
Avoir écrit dix chefs-d'œuvre et vou-
loir être un bon cuisinier 1. Ces hommes
de génie ont toutes les prétentions. 1
Classer Joseph Autran? A quoi bon. '1
Je hais cette méthode de critique. En
littérature on peut avoir des préférences, 1
mais il faut être éoleetique. Je mettrais 1
volontiers la Fille d'Eschyle après les
drames de Victor Hugo, mais avant les
tragédies de Ponsard. Je sais que les °
vers d'Autran sont beaux, et que beau-
coup vivront. Je sais aussi que j'ai lu de
lui d'adorables pages de prose. En faut-
il plus pour aimer et louer sa mémoire ?
Les temps sont tristes et le ciel est noir.
C'est l'heure où le penseur attristé se re-
plie sur lui-même. De même, quand
l'hiver arrive, des nuées d'hirondelles
s'envolent à l'horizon. C'est donc l'heure
aussi où l'on bénit les poètes qui nous
charment et nous emportent avec eux
sur l'aile de leur rêve 1
ALBERT DELPIT
»
PETITE BOURSE DU SOIR
3 0/0 Amôrtiss. nauv. 81.
5 0/0. 114 90, 9?:
Italien. 88 92, 95.
Turc. 1262.
Banque ottomane. 797 50, 796 87.
Lots turcs. 57 25.
E6çypta. 362-18, 362 50.
Rio. ï 640.
Panama. 493 75, 495.
Phénix espagnol. 540, 545.
i^ummc m peuta uuurao u nier ciiuulg uiuiu»
de monde en conséquence, les affaires ont été
encore plus rares.
La crainte domine le marché. Les engage-
ments à la hausse ne peuvent so faire avant
quelques jours. Ainsi que nous le disions il y a
une huitaine, on attend la rentrée des Chambres
pour se décider.
__♦ -j
Nos Echos
AUJOURD'HUI
A 6 heures, dîner au Grand-Hotal admission
jusqu'à 6 heures et demie.
Pendant la durée du dîner, l'orchestre de
M. Dasgranges jouera dans la nouvelle salle de
musique.
MENU
Potage Victoria
Hors-d'œuvre
Turbot sauce hollandaise
Pommes de terre à l'anglaise
Filet de bœuf aux cepts
Ri» de veau aux petits pois
Faisans bardés sur croustades
Salade
Haricots panachés maltre-d'hôtel
Abricots à la Condé
Glace
Grand-Hôtel
Desserts
Le salon des dames est ouvert aux voyageur».
Piano, tables de jeux.- Dîner à la enrttaurant.- Le jour et le soir, séances et leçons de
billard, par M. Gibelin. Café Divan.
Le programme " 4* page.)
Musée Grévin, 10, boulevard Montmartre.
De ouze heures du matin à onze heures du soir.
*#*
Français, 7 h, 3/4. La Famille Poisson.
Les liant z au,
Opéra-Comique, 8 h. Roméo et Juliette.
tA POLITIQUE
Hier matin, le conseil des ministres
s'est réuni pour examiner le projet de
réforme judiciaire élaboré par le garde
des sceaux, M. Devès.
Le conseil a adopté le principe du
maintien des cours et tribunaux exis-
tants, dont les traitements seraient aug-
mentés dans une proportion qu'on ne
nous fait point connaître, mais dont la
compétence et les attributions seraient
modifiées, on ne nous dit point non
plus en quel sens ni dans quelle me-
sure.
Nous ne pouvons donc nous pronon-
cer sur ces diverses réformes, sauf sur
celle de l'augmentation des traitements,
que nous approuvons en principe, mais
dont nous aurons peut-être à critiquer
la mise en œuvre.
Tout en maintenant nos cours et nos
tribunaux, le projet Deves supprimerait
160 sièges dans les cours et 230 dans les
tribunaux. Ne connaissant pas non plus
l'économie de cette suppression, il ne
nous est pas davantage possible, pour le
moment, d'émettre un avis.
Rappelons que, pour des raisons que
nous avons déjà dites et que nous redi-
rons en temps voulu, une réforme judi-
ciaire quelconque nous paraît ne pré-
senter que des inconvénients pour le
public.
Puisque nous parlons du conseil des
ministres, ajoutons que le ministre de
linstruction publique a soumis à ses
collègues un projet de décret conférant
à la section permanente du conseil su-
périeur de l'instruction publique une
partie des attributions du conseil lui-
même, notamment les décisions concer-
nant la mise à la retraite des profes-
seurs que le ministre des finances, M.
Tirard, a ébauché la déclaration qu'on
nous laisse igsorer, et qu'il fera demain
lundi à la commission du budget; enfin,
que M. Duclerc a fait connaître la com-
position de la commission de la créa-
tion d'un ministère spécial des colo-
nies.
Au conseil d'Etat
M. Gendarme de Bévotte, conseiller
d'Etat, président de la section des tra-
vaux publics, de l'agriculture et du
commerce, est admis à faire valoir ses
droits à la retraite et nommé conseiller
honoraire.
M. Picard, directeur du service de
l'exploitation des chemins de fer au mi-
nistère des travaux publics, est nommé
conseiller d'Etat, en remplacement de
M. Gendarme de Bévotte.
LE MONDE ET LA VILLE
M. Campenon, ancien avocat général
à Paris, est mort subitement vendredi,
en son domicile.
M. Campenon était un magistrat de
grand mérite, qui avait donné avec éclat
sa démission lors de l'exécution des
décrets du 28 mars.
A la clôture de la session, en com-
mençant son réquisitoire, M. l'avocat gé-
néral Campenon déclara que c'était la
dernière fois qu'il prenait la parole
comme magistrat
II est des moments, ajouta-t-il, où
l'honneur commande de déserter le poste
que l'on occupe. »
Et, le soir même, il adressait sa dé-
mission au ministre-
Cette manifestation avait une portée
d'autant plus grande, que M. Campenon
appartenait à l'opinion républicaine li-
bérale.
Esprit grave et cultivé, orateur de
grand sens et de bon ton, il avait parmi
les magistrats de la cour une haute au-
torité d'autant plus que toutes ces qua-
lités étaient rehaussées par une remar-
quable simplicité d'allures et une rare
modestie.
Il avait épousé la fille de M. Desma-
rest, l'ancien bâtonnier de l'ordre des
avocats, et, depuis qu'il avait dû quitter
la magistrature, il collaborait au Soleil et
au Français. Il laisse cinq enfants, dont
deux fils l'aîné de ceux-ci écrivait aussi
dans le Français.
Les obsèques de M. Campenon auront
lieu aujourd'hui, à midi, à la Trinité.
On se réunira rue de Boulogne, 36.
on nous annonce la mort d'un des
rares survivants des gardes du corps
qui ont suivi Louis XVIII à Gand pen-
dant les Geat-jours.
M. "Octave de La Chapelle, décédé à
Beaumont du Périgord, appartenait à
l'une des plus anciennes familles du
Bergeracois.
Son grand-père était gouverneur de
Bergerac. Son bisaïeul, après s'être dis-
tingué dans les guerres de Louis XIV,
est mort officier général, gouverneur de
Joux et de Pontarlier.
Le défunt était le père du comte Al-
fred de La Chapelle, qui fut, jusqu'à la
mort de Napoléon III, secrétaire de l'au-
guste exilé.
Ce deuil frappe un grand nombre de
familles le comte et la comtesse de
Constantin, les Livois, le baron de La-
borde, le prince maronite Paul Rochaïd-
Dahdah, etc.
Télégramme de Rome
M. Pioda, ministre plénipotentiaire de
Suisse prés le gouvernement italien,
vient de mourir. Ses funérailles auront
lieu demain; le clergé de sa paroisse a
jusqu'ici refusé d'y participer.
A l'Institut.
Aucune lettre de candidature n'est en-
core parvenue au secrétaire perpétuel
de l'Académie française, pour les fau-
teuils laissés vacants par la mort de M.
Charles Blanc et de M. de Champagny.
Il est certain, cependant, que MM.
Pâilleron et de Mazade sont décidés à se
présenter; mais ce qui n'apas encore
été dit, l'un et l'autre se posent can-
didats pour les deux fauteuils. On a
aussi parlé d'une candidature qui se fe-
rait jour au dernier moment. Nous
croyons savoir qu'il s'agit de Mgr Lavi-
gerie, cardinal-archevêque d'Alger, qui
est un littérateur fin et disert.
Les titres académiques de l'éminent
prélat sont, avec ses sermons et ses dis-
cours, une série de lettres fort remar-
quables sur l'Orient.
L'Académie des beaux-arts recevra,
samedi 11 novembre, communication
des lettres des divers candidats au fau-
teuil de M. Jouffroy.
Le samedi suivant, lecture du rap-
port et élection du nouvel académicien.
C'est demain, à onze heures et demie,
que sera célébré, à la Nonciature, le ma-
riage de Mlle Lœtitia Bueno avec le ri-
chissime hidalgo Mariano Agrela*
Mgr l'évêque d'Avila, venu d'Espagne
tout exprès, donnera la bénédiction nup-
tiale.
La corbeille de la charmante fiancée
est une merveille de féerie elle con-
tient, entre autres joyaux, un collier de
perles évalué un demi-million.
Le château de Vauventriers, en Eure-
et-Loir, s'apprête à recevoir sa nouvelle
châtelaine. Da grands préparatifs se
font dans le vieux et charmant domaine
de M. Jacques-Henri Grandet de Vau-
ventriers, fils de l'avocat à la cour de
cassation, qui fut conseiller général
d'Eure-et-Loir.
M. Henri de Vauventriers va épouser,
comme on sait, Mlle Yolande de Corbel
de Corbeau, fille du marquis de Corbeau,
propriétaire du beau château de Vaul-
serre, dans le département de l'Isère.
On est fort irrité, dans le mondescien-
tiflque d'outre-Manche, contre la direc-
tion du Brilish Muséum, parce qu'elle
n'a pas pris les mesures nécessaires pour
assurer au peuple anglais la possession
de la célèbre collection de manuscrits
de la bibliothèque de Sunderland, mise
aux enchères par le duc d'Hamilton.
C'est le gouvernement prussien qui a
acheté,àuprix de deux millionsde francs,
cette collection destinée à devenir désor-
mais un des plus précieuses richesses
de la bibliothèque de Berlin.
Parmi les curiosités bibliographiques
de cette collection unique, on cite un
psautier du septième siècle, et entière-
ment écrit de la main de sainte Sala-
berge, abbesse du cou vent de Saint-Jean-
Baptiste de Laon. Un autre psautier,
datant du neuvième siècle, donne le
texte grec en regard du texte latin.
Détail particulièrement intéressant le
texte grec est écrit en lettres latines,
de sorte qu'il fournit des preuves irré-
futables de la prononciation du grec à
l'époque où l'empire de Byzance était à
l'apogée de sa gloire littéraire.
Le plus précieux joyau du trésor,
c'est une copie à la main de la Dwina
Commedia du Dante, ornée de plus de
quatre-vingtsdessins du célèbre Sandro
Botticelli! 1
M. Gibelin, le célèbre professeur du
Casino de Vichy, a repris, depuis le 1er du
mois, ses séances du jour et du soir au
Grand-Hôtel.
II y a chaque jour affiuence au café-
divan de cet établissement.
**#
Ne quittons pas le Grand-Hôtel sans
annoncer que les mandolinistes italiens
se feront entendre aux dîners-concerts
les mardi et vendredi de chaque se-
maine.
Nous engageons vivement nos lec-
teurs à aller entendre ces artistes d'un
talent si original.
NOUVELLES A LA MAIN
Taupin, sortant du Père-Lachaise, où
il vient de lire sur des centaines de tom-
bes
« Bon mari. Bonne femme. Bon
époux Epousé dévouée, etc. »
Décidément, c'est encore là que
sont les meilleurs ménages 1
Quelques gens de lettres se racontent
leurs succès, comme c'est l'usage.
Mon dernier roman a été traduit en
anglais, en allemand et en italien, fait
un feuilletonniste avec quelque jactance.
Moi aussi, j'ai été traduit exclame
un jeune pornographe.
Tiens! et en quoi donc? 3
En correctionnelle i
Argot de métier.
Le peintre Z. cause de ses travaux
devant quelques intimes:
Mon Christ n'avance pas, et je dois
le livrer fin courant.
Livrer un Christ Eh 1 va donc,
Judas! 1
UN DOMINOi
LE PETIT ~A~IRE1
VIEILLE CHANSON
II était un petit navire,
Qui portait le char de l'Etat
Le ciel permit, pour le conduire,
Que papa Duclerc y montât.
Au gré de Neptune et d'Eole,
D'abord touchant de ci, de là,
Sans gouvernail et sans boussole,
Tant bien que mal l'esquif alla.
Mais, sur ses pas traînant l'orage,
Survint l'hiver qui l'assiégea.
On n'était pas à mi-voyage,
Et les vivres manquaient déjà 1
Pas un biscuit dans la cambuse,
Pas une goutte de tafia t
On se fût cru sur la Méduse
Que Géricault glorifia.
C'est le revers de la médaille
Pour qui sur mer s'aventura,
Que l'on tire à la courte paille
Quel est celui qu'on mangera 1
En cette triste conjoncture
Sous la loi cV^rn se courba,
Et ce fut la magistrature
Sur qui le mauvais sort tomba.
Donc, sans pudeur ni honte fausse,
Devès prit son grand coutelas 1
Restait à dire à quelle sauce
On mangerait les magistrats?
Tous avaient une préférence
Pour celle-ci, pour celle-là I
Ce fut un torrent d'éloquence
Qui, quinze jours durant, coula.
L'un votait blanche, l'autrej; brune
Câpres, madère, et caftera
Chacun tenant pour sa chacune
Dans son vouloir persévéra
Or, comme ils disputaient encore,
Retardant l'heure du repas,
Quand revint la seizième aurore,
La faim sévit, qui n'attend pas l
Elle fit son lugubre ouvrage,
Fauchant, cruelle, à tour de bras?,.
Et tout périt en ce naufrage,
Tout. sauf pourtant les magistrats 1
PAUL FCRRIEB
NT GUILBERT
ET LES JOURNALISTES
Ce n'est point de S. Em. Mgr le cardi-
nal Guibert, archevêque de Paris, qu'il
s'agit ici, mais de Mgr Guilbert, évêque
d'Amiens. Ne confondez point, s'il vous
plaît. Donc, Mgr Guilbert vient de
lancer une lettre pastorale contre la
presse en général, et la « presse reli-
gieuse > en particulier Si MM. les co-
médiens ont reçu leur paquet de M. Mir-
beau, MM. les journalistes reçoivent le
leur de Mgr Guilbert. Seulement, si notre
Mgr Mirbeau n'est pas plus bienveillant,
il est moins intéressant. Nous sommes
des cancres, des imbéciles, des porno-
graphes, des vendus. Il n'y a de profon-
ément pur que Mgr Bellot des Miniè-
res, et de réellement sublime que Mgr
Guilbert. C'est entendu. Si nous écri-
vons l'un à côté de l'autre les noms de
Mgr Guilbert et de Mgr Bellot des Mi-
nières, nous n'entendons point les con-
fondre comme prêtres, mais seulement
comme évoques. Ce sont les deux évê-
ques les plus républicains de France.
Nous pensons que le lecteur est édifié
sur Mgr Bellot des Minières au tour
maintenant de Mgr Guilbert qui ne nous
a pas envoyé moins de mille «écus pour
faire son portrait. Lecteurs, vous n'en
doutez pas I `
Mgr Guilbert est de la Manche, c'est
un électeur de M. Savary. Prélat très en-
tiché de l'idée de moderniser l'Eglise.
Il a trouvé pour cela une formule in-
connue avant lui « Rendez à César ce
qui appartient à César. » Mgr Bellot
des Minières a écrit dans son livre
À travers le Siècle
Notre ciel à nous, c'est un sein chéri.
Mgr Guilbert ne démord pas de sa
formule « Rendez à César ce qui appar-
tient à César. »
Sous l'Empire, Mgr Guilbert était curé
près de Cherbourg. Il avait la réputa-
tion d'un impérialiste, d'un bonapar-
tiste ardent, militant. On ne rendait ja-
mais à César tout ce qu'on lui devait.
Lui, il lui donnait le plus qu'il pouvait.
Si bien que César finit par se montrer
reconnaissant, en le nommant à l'évêché
de Gap, qui n'est pas précisément un
port de mer.
La République arrive. Mgr Guilbert
écrit de son rocher des Alpes deux let-
tres pastoral es sur son thème favori:
« Rendez à César ce qui est à César. »
Après la première, il a le désagrément
de recevoir la rosette d'officier de la
Légion d'honneur, et, après la seconde,
il a la douleur d'être appelé à diriger
l'un des plus opulents diocèses de
France. « Rendez à César ce qui appar-
tient à César. »
César prod igue ses biens ,'̃ ̃•
A ceux qui font vœu d'être siens.
On raconte que les membres de son
clergé qui peuvent avoir l'honneur de
l'approcher, ont supplié Mgr Guilbert
de garder en portefeuille cette ôpître â
la presse. Mais Mgr Guilbert n'aurait
rien voulu entendre. Ses œuvres ne se
composent que de ses lettres pastorales
qui, depuis 1867 jusqu'à 1882, roulent à
peu près toutes sur le « Rendez à César
ce qui appartient à César, » et il n'a pu
se résoudre à sacrifier ce nouveau fruit
de son génie. Pour un évoque qui est
écrivain, il n'a pas fait d'écrits, mais
pour un évêque qui n'est pas écrivain, il
a fait des écrits, comme on dit en Nor-
mandie, en parlant des pommes. Et cette
pomme-là, Mgr l'évêque d'Amiens nous
la lance à la figure.
Mgr Guilbert va-t-il avoir le désespoir
de monter sur un siège d'archevêque ? 7
En présence de ses foudres contre la
« presse religieuse», la République peut-
elle faire moins que de le nommer à la
coadjutorerie cum fidurasiiccessione, de
Bordeaux ? Si la République vient a
mourir, elle aura au moins la consola-
tion de penser qu'elle laissera un évê-
que qui tiendra haut et ferme le drapeau
de l'Etat, et qui répétera, humblement
incliné devant la Monarchie « Rendez
à César ce qui appartient à César. »
Un de ses collègues, parmi les plus
courageux et les plus doctes de France,
disait que si son savoir- était modeste,
que si son talent était maigre, sur le
chapitre des droits de César, Mgr Guil-
bert était ferré à glace, et que jamais f;
César n'aurait à se plaindre de lui.
x. z..̃̃.̃•̃
Bloc-Notes Parisien
J'édite Goquelln
Personnages M. Mirbeau, Premier Editeur,
Deuxième Editeur, Troisième EDITEUR,
Chœur des Editeurs.
SCÈNE I
M. mirbeau, assis et rêveur
Si je faisais une brochure? Une bro-
chure, ça rapporte ( Mon article, les arti-
cles des autres journaux qui ont parlé de
l'incident, les lettres d'acteurs, mes lettres
à Magnard, l'héroïsme de Daubray, tout
enfin. C'est d'une littérature facile et
d'une vente assurée. Magnard ne peut me
refuser un peu de réclame dans le Figaro.
Oui, c'est cela, faisons une brochure. Chez
quel éditeur irai-je? Tous les éditeurs sont
bons et tous seront enchantés de l'aubaine.
(Se levant et prenant son chapeau.) Et
maintenant, chez l'éditeur 1
SCÈflE II
M. MIRBEAU. PREMIER EDITEUR
M. MIRBEAU
Monsieur, je vous salue 1
PREMIER ÉDITEUR
Et moi de même, monsieur. Vous dési-
rez ?
M. MIRBEAU
M, Mirbeau.
PREMIER ÉDITEUR
Ah! 1 parfaitement. M. Mirbeau, des co-
médiens! Veuillez vous asseoir, monsie ur.
M. MIRBEAU
J'ai pensé à faire paraître une petite bro-
chure. Vous comprenez, une petite bro-
chure relative.
PREMIER ÉDITEUR
Parfaitement, parfaitement, une petite
brochure. Cela me va. Très bien cala me
va. Oui, une jolie couverture, un joli ti«
tre. Cela me va.
M. MIRBEAU
Très impartiale, vous comprenez docu-
mentaire, seulement documentaire. Je don-
nerais toutes les pièces du procès.
PREMIER ÉDITEUR
Entendu, monsieur.Documentaire, c'est
au mieux. (Se frappant le front.) Ah l
mais j'y pense c'est impossible, tout à
fait impossible Je le regrette, monsieur,
croyez bien que je le regrette. Àvèz-vous
des romans sur vous? Donnez-les-moi, Des
romans, mon Dieu, je pourrais vous lès
éditer. Je lepourrais, monsieur, à l'extrêm©
Paris FA. fit centimes. Départements et Gares CENTIMES
Seizième Année Troisième Série Numéro 112
~3: D~ ~P~N7~
Rédacteur en Chef
i. ANNONCES i
MM* CEE. LAGHAISTGE, QEïlB1 & .-O*
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Et à l'Administration du tournai
ADMINISTRATION
DE DIX HEURES A CINQ HKUBSS
», boulerard des Italien*, •
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Trois mois. 13-50 Trois mois. 18 fr.
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DE DEUX HEURES A MINUIT
Pari s- Journal
SOMMAIBB
Mes Souvenirs. –A. DelpU.-
Nos Echos. Un Domino.
Le petit Navire. Paul Ferrier.
MONSBIGNEUR, GUIBERT ET LES JOURNALISTES.–
,X. Z.
FiLOC·ICTBS PARISIBN. TOat-.Paria,
Bloc-Notes Parisien. Tout-Paris.
R:c£Ption ou Nonbe. R. de Sutil.
M. Henry Maret. Mermeias.
La Bourse. Henri Prioat.
Chronique des Tribunaux. Maître X.
Nouvelles diverses. André Sourdes.
TébÉORAMMES ET CORRESPONDANCES. G. LitlS.
Soirées parisiennes. Choufleuri.
Echos des Théâtres. Maurice Ordonneau.
Sport. R. de Lu y.
MES SOUVENIRS
Pendant que j'étais à Marseille, l'autre
semaine, je cherchais à- reconstituer la
vie littéraire de la vieille cité. Je con-
naissais bien d'ailleurs les poètes nés là-
bas, au bord de la Méditerranée sou-
riante. Comment ne pas s'envoler dans
le monde des rêves, en voyant ce mer-
veilleux paysage? A l'horizon, la ligne
grise et immuable des rochers; sur le
premier plan, le château d'If, où l'on
montre encore, avec un admirable sé-
rieux, t le cachot de ce pauvre Edmond
Dantôs » enfin, partout, la mer bleue,
caressante, tranquille.
Je connaissais ce Barthélemy qui fit
la Némèsîs, Les hommes qui ont main-
tenant soixante ans se rappellent encore
ce succès-là. Toutes les semaines, Bar-
thélémy tournaillait solidement minis-
tres et députés. Tant qu'elle fut dans
l'opposition, la Némésis eut un succès
Considérable. Un beau jour, elle tourna
au gouvernement. Son crédit fut perdu.
Bien des histoires coururent. On ra-
conta qu'après une grosse perte au jeu
Barthélémy reçut la visite d'un auge
tentateur ressemblant à M. Thiers. Ce-
pendant, dans la Kabbale, les aages ten-
tateurs sont beaux Toujours est-il que
la Némèsis, n'ayant plus de crédit, n'eut
plus de lecteurs, et, n'ayant plus de lec-
teurs, cessa de paraître.
Que devint Barthélémy? On ne sait
trop. M. Charles Monselet m'a raconté
lavoir vu, un soir, au foyer d'un petit
théâtre de Bordeaux, où la fille du viru-
lent satirique jouait la comédie. Le poè-
te, pauvre, vieilli, oublié, était bien dé- i
chu de son ancienne gloire. Avoir
empli la France de son nom et devenir
une mère d'actrice ̃'
Je connaissais ce Méry, improvisa-
teur merveilleux, spirituel, presque au-
tant qu'Alexandre Dumas père et fils.
Un jour, Méry se battait au pistolet. La
balle de son adversaire vint s'aplatir
sur une grosse pièce de cinq francs
qu'il portait en son gousset.
Ma parole, dit Méry, voilà de l'ar-
gent bien placé 1
.Une autrefois, on lui annonce la mort
de M. Persil, procureur général à la cour
royale.
Allons donc 1 M. Persil est mort?
Mais oui.
C'est qu'on lui aura fait avaler un
perroquet! l
#
Je connaissais surtout ce Joseph Au-
tran, la gloire toujours vivante de Mar- j
seille. Pourquoi la génération actuelle
le lit-elle si peu? Hélas parce que les
ombres se pressent nombreuses dans les
Catacombes littéraires 1
J'avais beaucoup causé de lui avec j
Armand de Pontmartin. J'ai voulu re-
lire les œuvres d'Autran en face de
cette Méditerranée qui lui fut clémente.
Et la Fille d'Eschyle, drame nerveux et
fler, joué à l'Odôon au mois de mars
1848, et dont le poète a dit lui-même
Ce fut un grand succès doat tout Paris parla
Comme un homme prudent, je m'en suis tenu là.
Et puis encore les Poèmes de la mer,
qui valurent à Autran un article violent
et iû juste de M. Barbey d'Aurevilly. En-
fin toutes ces pages, éloquentes et ado-
rables, qui me font souvent regretter de
n'avoir pas connu cet esprit da haute 1
volée. Lisez son discours de réception à 1
l'Académie (où il remplaçait François
Ponsard), et vous verrez combien il
avait de l'esprit. La dent un peu dure
aussi 1 Ses critiques littéraires avaient
une finesse. impitoyable. C'est Autran
qui a'porté les plus jolis jugements sur
les poètes français:
ALEXANDRE GTTIRAUD ¡
Il y eut un moment, vers 1825, où le
baron Alexandre Guiraud était aussi célè-
bre que le vicomte Victor Hugo.
SAINTE-BEUVE
Un critique doublé d'un poète. La cri-
tique est grand, le poète petit.
THÊOÏHILE GAUTIER
Un poèt» doublé d'un, critique. Tous
doux de la môme taille.
DELPHINE DE GIRARDIN
Une muse couronnée de fleurs. arti-
ficielles.
CHATEAUBRIAND
II avait la passion des vers. Malheu-
reusement il en a fait. j
• VOLTAIRE • • j
Le plus grand prosateur du dix-hui-
tième siècle. Sa prose n'a été mauvaise.
que dans ses vers.
Quoi de plus fin que cette concision ?
C'est encore Autrau qui a émis un j ¡
jour, causant avec un de ses amis, cette l
pensée profonde j
Ce sont les pauvres qui achètent les
livres. Ils les prêtent aux riches qui ou-
blient de les leur rendre J
#
Deux des amis les plus intimes d'Au-
tran furent Lamartine, quand il était
jeune Alexandre Dumas fils, quand il
devint un homme. J'ajoute qu'Autran
est peut être le seul qui ait peint sous
son vrai jour l'illustre poète des Médita-
tions. Je renvoie ceux de mes lecteurs
qui voudront s'en assurer, tout en passant
des heures charmantes, au septième vo-
lume Œuvres complètes d'Autran.
En 1848, à l'époque où Lamartine gou-
vernait la France du haut de son génie,
et du fond de son cabinet des affaires
étrangères, Autran et Alexandre Du-
mas allèrent le voir. Les galeries étaient
pleines de têtes étranges. Que de figures
hétéroclites, mon Dieu! et que de bottes
ôeulées traînant sur les tapis! Dumas
traversait tout ce monde-là avec sa séré-
nité accoutumée. Ils entrent dans le ca-
binet du ministre. Lamartine les reçoit
avec affabilité. Puis la conversation
s'engage. La visite achevée, Dumas
aperçoit sur la cheminée un canif, avec
lequel, d'habitude, le poète jouait ma-
chinalement. Le même tic qu'eut plus
tard ce grand bûcheron appelé Abraham
Lincoln.
Est-ce là le canif dont vous avez
coutume de vous servir? demande
Alexandre Dumas à Lamartine.
Oui. Pourquoi cette question 1
Parce que vous me combleriez de
joie, répondit Damas, si vous me pér-
mettiez d'emporter ce canircomme une
relique.
Prenez dit Lamartine avec con-
descendence.
Etes-vous de mon, avis ? Je trouve
que la rencontre de ces deux orgueils
est tout ce qu'il y a au monde de plus
amusant I
#*#
L'intimité d'Autran et de Dumas fils
remonte à 1847. Ce n'est pas d'hier t
Voicile portrait da l'auteur de Y Etran-
gère, à cette époque, tracé de main de
maître par le poète de la Fille d'Eschyle
« Qui n'a pas connu Dumas fils vingt
ans, ne sait pas ce que peuvent être les
qualités les plus séduisantes de la jeu-
nesse. S'il a fait des victimes en ce
temps-là, je n'en veux rien savoir; mais
je crois que le Père Eternel leur aura
pardonne, car la séduction était vrai-
ment trop forte.
» Toutes les facultés qui, plus tard, se
sont produites chez lui avec tant d'éclat
s'y faisaient dès lors pressentir. Ce n'é-
taient pas encore les fruits; c'était la
plus précoce et la plus riche des florai-
sons. Dans ce gamin de génie, dans ce
glorieux héritier d'un nom illustre, il y
avait déjà un poète, un philosophe, un
moraliste. Je ne dis rien de sa per- 1
sonne, une vraie figure de héros de ro-
man, comme en rêve toute jeune femme
penchée à son balcon. »
Quoique Autran eût douze ans de plus
que Dumas fils, ils se lièrent tout de
suite. Et quelles bonnes causeries 1 Quel-
les longues promenades surtout! Ils
avaient la douce manie de ne conver-
ser. qu'en vers. Dumas fils rencontrait
Autran, et lui disait
Si vous voulez, ami, nous irons au musée,
Distraire d'un roman notre âme inaimatée.
Et, comme il faisait très chaud, Au-
tran de répondre très gravement
Cette température a quelque chose en elle
Qui me produit l'effet d'un gilet de flanelle 1
Dumas père dirigeait alors le Théâ-
tre-Historique Auguste Maquet et lui
y faisaient jouer des chefs-d'œuvre.
C'était un asile pour la Fille d'Eschyle.
Mais les journées de Juin amenèrent la
fermeture du théâtre Autran s'en alla
à l'Odéon. C'est aussi de cette époque
(1847) que datent ces quatre vers écrits
par Lamartine, au bas du buste d'Au-
tran, buste où le sculpteur le représen-
tait sombre et élégiaque
Le portrait n'a rien de banal
J'en ris un peu, tant il est triste.
Quel est ici l'original
Est-ce le modèle ou l'artiste ? P
~=
Ah comme on a raison de dire qu'A-
lexandre Dumas père n'était qu'un or-
gueilleux I
Un peu plus tard, Joseph Autran alla
passer quelques jours à Monte-Cristo.
Il devenait l'hôte du père, après avoir
été l'hôte du fils. L'auteur de Mademoi-
selle de Belle-Isle habitait une petite
chambre, dans son palais. C'est là que, ¡
avec Auguste Maquet il écrivait ces ré-
cits merveilleux qui passionnaient le
monde entier. Notez, qu'alors, Alexan-
dre Dumas père vivait en pleine gloire.
Son nom sonnait comme une fanfare.
Le lendemain de son arrivée, Autran
vit entrer dans sa chambre un petit né-
gro vêtu de velours, nommé Fleur-de-
Benjoin. Fleur-de Benjoin venait de-
mander à Autran ce qu'il voulait pour
déjeuner.
Mais cela m'est absolument égal,
répondit le poète. Je mangerai ce que
mangera tout le monde.
Le nègre faisait la moue.
Eh bien! voyons, qu'est-ce qu'il
y a?
Fleur-de-Benjoin baissa les yeux; et
avec beaucoup de timidité
M. Dumas, dit-il, devant faire la
cuisine lui-même, demande que mon-
sieur donne le menu. Sinon, monsieur
pourrait croire que M. Dumas a fait les
seuls plats qu'il sache faire!
Avoir écrit dix chefs-d'œuvre et vou-
loir être un bon cuisinier 1. Ces hommes
de génie ont toutes les prétentions. 1
Classer Joseph Autran? A quoi bon. '1
Je hais cette méthode de critique. En
littérature on peut avoir des préférences, 1
mais il faut être éoleetique. Je mettrais 1
volontiers la Fille d'Eschyle après les
drames de Victor Hugo, mais avant les
tragédies de Ponsard. Je sais que les °
vers d'Autran sont beaux, et que beau-
coup vivront. Je sais aussi que j'ai lu de
lui d'adorables pages de prose. En faut-
il plus pour aimer et louer sa mémoire ?
Les temps sont tristes et le ciel est noir.
C'est l'heure où le penseur attristé se re-
plie sur lui-même. De même, quand
l'hiver arrive, des nuées d'hirondelles
s'envolent à l'horizon. C'est donc l'heure
aussi où l'on bénit les poètes qui nous
charment et nous emportent avec eux
sur l'aile de leur rêve 1
ALBERT DELPIT
»
PETITE BOURSE DU SOIR
3 0/0 Amôrtiss. nauv. 81.
5 0/0. 114 90, 9?:
Italien. 88 92, 95.
Turc. 1262.
Banque ottomane. 797 50, 796 87.
Lots turcs. 57 25.
E6çypta. 362-18, 362 50.
Rio. ï 640.
Panama. 493 75, 495.
Phénix espagnol. 540, 545.
i^ummc m peuta uuurao u nier ciiuulg uiuiu»
de monde en conséquence, les affaires ont été
encore plus rares.
La crainte domine le marché. Les engage-
ments à la hausse ne peuvent so faire avant
quelques jours. Ainsi que nous le disions il y a
une huitaine, on attend la rentrée des Chambres
pour se décider.
__♦ -j
Nos Echos
AUJOURD'HUI
A 6 heures, dîner au Grand-Hotal admission
jusqu'à 6 heures et demie.
Pendant la durée du dîner, l'orchestre de
M. Dasgranges jouera dans la nouvelle salle de
musique.
MENU
Potage Victoria
Hors-d'œuvre
Turbot sauce hollandaise
Pommes de terre à l'anglaise
Filet de bœuf aux cepts
Ri» de veau aux petits pois
Faisans bardés sur croustades
Salade
Haricots panachés maltre-d'hôtel
Abricots à la Condé
Glace
Grand-Hôtel
Desserts
Le salon des dames est ouvert aux voyageur».
Piano, tables de jeux.- Dîner à la enrt
billard, par M. Gibelin. Café Divan.
Le programme "
Musée Grévin, 10, boulevard Montmartre.
De ouze heures du matin à onze heures du soir.
*#*
Français, 7 h, 3/4. La Famille Poisson.
Les liant z au,
Opéra-Comique, 8 h. Roméo et Juliette.
tA POLITIQUE
Hier matin, le conseil des ministres
s'est réuni pour examiner le projet de
réforme judiciaire élaboré par le garde
des sceaux, M. Devès.
Le conseil a adopté le principe du
maintien des cours et tribunaux exis-
tants, dont les traitements seraient aug-
mentés dans une proportion qu'on ne
nous fait point connaître, mais dont la
compétence et les attributions seraient
modifiées, on ne nous dit point non
plus en quel sens ni dans quelle me-
sure.
Nous ne pouvons donc nous pronon-
cer sur ces diverses réformes, sauf sur
celle de l'augmentation des traitements,
que nous approuvons en principe, mais
dont nous aurons peut-être à critiquer
la mise en œuvre.
Tout en maintenant nos cours et nos
tribunaux, le projet Deves supprimerait
160 sièges dans les cours et 230 dans les
tribunaux. Ne connaissant pas non plus
l'économie de cette suppression, il ne
nous est pas davantage possible, pour le
moment, d'émettre un avis.
Rappelons que, pour des raisons que
nous avons déjà dites et que nous redi-
rons en temps voulu, une réforme judi-
ciaire quelconque nous paraît ne pré-
senter que des inconvénients pour le
public.
Puisque nous parlons du conseil des
ministres, ajoutons que le ministre de
linstruction publique a soumis à ses
collègues un projet de décret conférant
à la section permanente du conseil su-
périeur de l'instruction publique une
partie des attributions du conseil lui-
même, notamment les décisions concer-
nant la mise à la retraite des profes-
seurs que le ministre des finances, M.
Tirard, a ébauché la déclaration qu'on
nous laisse igsorer, et qu'il fera demain
lundi à la commission du budget; enfin,
que M. Duclerc a fait connaître la com-
position de la commission de la créa-
tion d'un ministère spécial des colo-
nies.
Au conseil d'Etat
M. Gendarme de Bévotte, conseiller
d'Etat, président de la section des tra-
vaux publics, de l'agriculture et du
commerce, est admis à faire valoir ses
droits à la retraite et nommé conseiller
honoraire.
M. Picard, directeur du service de
l'exploitation des chemins de fer au mi-
nistère des travaux publics, est nommé
conseiller d'Etat, en remplacement de
M. Gendarme de Bévotte.
LE MONDE ET LA VILLE
M. Campenon, ancien avocat général
à Paris, est mort subitement vendredi,
en son domicile.
M. Campenon était un magistrat de
grand mérite, qui avait donné avec éclat
sa démission lors de l'exécution des
décrets du 28 mars.
A la clôture de la session, en com-
mençant son réquisitoire, M. l'avocat gé-
néral Campenon déclara que c'était la
dernière fois qu'il prenait la parole
comme magistrat
II est des moments, ajouta-t-il, où
l'honneur commande de déserter le poste
que l'on occupe. »
Et, le soir même, il adressait sa dé-
mission au ministre-
Cette manifestation avait une portée
d'autant plus grande, que M. Campenon
appartenait à l'opinion républicaine li-
bérale.
Esprit grave et cultivé, orateur de
grand sens et de bon ton, il avait parmi
les magistrats de la cour une haute au-
torité d'autant plus que toutes ces qua-
lités étaient rehaussées par une remar-
quable simplicité d'allures et une rare
modestie.
Il avait épousé la fille de M. Desma-
rest, l'ancien bâtonnier de l'ordre des
avocats, et, depuis qu'il avait dû quitter
la magistrature, il collaborait au Soleil et
au Français. Il laisse cinq enfants, dont
deux fils l'aîné de ceux-ci écrivait aussi
dans le Français.
Les obsèques de M. Campenon auront
lieu aujourd'hui, à midi, à la Trinité.
On se réunira rue de Boulogne, 36.
on nous annonce la mort d'un des
rares survivants des gardes du corps
qui ont suivi Louis XVIII à Gand pen-
dant les Geat-jours.
M. "Octave de La Chapelle, décédé à
Beaumont du Périgord, appartenait à
l'une des plus anciennes familles du
Bergeracois.
Son grand-père était gouverneur de
Bergerac. Son bisaïeul, après s'être dis-
tingué dans les guerres de Louis XIV,
est mort officier général, gouverneur de
Joux et de Pontarlier.
Le défunt était le père du comte Al-
fred de La Chapelle, qui fut, jusqu'à la
mort de Napoléon III, secrétaire de l'au-
guste exilé.
Ce deuil frappe un grand nombre de
familles le comte et la comtesse de
Constantin, les Livois, le baron de La-
borde, le prince maronite Paul Rochaïd-
Dahdah, etc.
Télégramme de Rome
M. Pioda, ministre plénipotentiaire de
Suisse prés le gouvernement italien,
vient de mourir. Ses funérailles auront
lieu demain; le clergé de sa paroisse a
jusqu'ici refusé d'y participer.
A l'Institut.
Aucune lettre de candidature n'est en-
core parvenue au secrétaire perpétuel
de l'Académie française, pour les fau-
teuils laissés vacants par la mort de M.
Charles Blanc et de M. de Champagny.
Il est certain, cependant, que MM.
Pâilleron et de Mazade sont décidés à se
présenter; mais ce qui n'apas encore
été dit, l'un et l'autre se posent can-
didats pour les deux fauteuils. On a
aussi parlé d'une candidature qui se fe-
rait jour au dernier moment. Nous
croyons savoir qu'il s'agit de Mgr Lavi-
gerie, cardinal-archevêque d'Alger, qui
est un littérateur fin et disert.
Les titres académiques de l'éminent
prélat sont, avec ses sermons et ses dis-
cours, une série de lettres fort remar-
quables sur l'Orient.
L'Académie des beaux-arts recevra,
samedi 11 novembre, communication
des lettres des divers candidats au fau-
teuil de M. Jouffroy.
Le samedi suivant, lecture du rap-
port et élection du nouvel académicien.
C'est demain, à onze heures et demie,
que sera célébré, à la Nonciature, le ma-
riage de Mlle Lœtitia Bueno avec le ri-
chissime hidalgo Mariano Agrela*
Mgr l'évêque d'Avila, venu d'Espagne
tout exprès, donnera la bénédiction nup-
tiale.
La corbeille de la charmante fiancée
est une merveille de féerie elle con-
tient, entre autres joyaux, un collier de
perles évalué un demi-million.
Le château de Vauventriers, en Eure-
et-Loir, s'apprête à recevoir sa nouvelle
châtelaine. Da grands préparatifs se
font dans le vieux et charmant domaine
de M. Jacques-Henri Grandet de Vau-
ventriers, fils de l'avocat à la cour de
cassation, qui fut conseiller général
d'Eure-et-Loir.
M. Henri de Vauventriers va épouser,
comme on sait, Mlle Yolande de Corbel
de Corbeau, fille du marquis de Corbeau,
propriétaire du beau château de Vaul-
serre, dans le département de l'Isère.
On est fort irrité, dans le mondescien-
tiflque d'outre-Manche, contre la direc-
tion du Brilish Muséum, parce qu'elle
n'a pas pris les mesures nécessaires pour
assurer au peuple anglais la possession
de la célèbre collection de manuscrits
de la bibliothèque de Sunderland, mise
aux enchères par le duc d'Hamilton.
C'est le gouvernement prussien qui a
acheté,àuprix de deux millionsde francs,
cette collection destinée à devenir désor-
mais un des plus précieuses richesses
de la bibliothèque de Berlin.
Parmi les curiosités bibliographiques
de cette collection unique, on cite un
psautier du septième siècle, et entière-
ment écrit de la main de sainte Sala-
berge, abbesse du cou vent de Saint-Jean-
Baptiste de Laon. Un autre psautier,
datant du neuvième siècle, donne le
texte grec en regard du texte latin.
Détail particulièrement intéressant le
texte grec est écrit en lettres latines,
de sorte qu'il fournit des preuves irré-
futables de la prononciation du grec à
l'époque où l'empire de Byzance était à
l'apogée de sa gloire littéraire.
Le plus précieux joyau du trésor,
c'est une copie à la main de la Dwina
Commedia du Dante, ornée de plus de
quatre-vingtsdessins du célèbre Sandro
Botticelli! 1
M. Gibelin, le célèbre professeur du
Casino de Vichy, a repris, depuis le 1er du
mois, ses séances du jour et du soir au
Grand-Hôtel.
II y a chaque jour affiuence au café-
divan de cet établissement.
**#
Ne quittons pas le Grand-Hôtel sans
annoncer que les mandolinistes italiens
se feront entendre aux dîners-concerts
les mardi et vendredi de chaque se-
maine.
Nous engageons vivement nos lec-
teurs à aller entendre ces artistes d'un
talent si original.
NOUVELLES A LA MAIN
Taupin, sortant du Père-Lachaise, où
il vient de lire sur des centaines de tom-
bes
« Bon mari. Bonne femme. Bon
époux Epousé dévouée, etc. »
Décidément, c'est encore là que
sont les meilleurs ménages 1
Quelques gens de lettres se racontent
leurs succès, comme c'est l'usage.
Mon dernier roman a été traduit en
anglais, en allemand et en italien, fait
un feuilletonniste avec quelque jactance.
Moi aussi, j'ai été traduit exclame
un jeune pornographe.
Tiens! et en quoi donc? 3
En correctionnelle i
Argot de métier.
Le peintre Z. cause de ses travaux
devant quelques intimes:
Mon Christ n'avance pas, et je dois
le livrer fin courant.
Livrer un Christ Eh 1 va donc,
Judas! 1
UN DOMINOi
LE PETIT ~A~IRE1
VIEILLE CHANSON
II était un petit navire,
Qui portait le char de l'Etat
Le ciel permit, pour le conduire,
Que papa Duclerc y montât.
Au gré de Neptune et d'Eole,
D'abord touchant de ci, de là,
Sans gouvernail et sans boussole,
Tant bien que mal l'esquif alla.
Mais, sur ses pas traînant l'orage,
Survint l'hiver qui l'assiégea.
On n'était pas à mi-voyage,
Et les vivres manquaient déjà 1
Pas un biscuit dans la cambuse,
Pas une goutte de tafia t
On se fût cru sur la Méduse
Que Géricault glorifia.
C'est le revers de la médaille
Pour qui sur mer s'aventura,
Que l'on tire à la courte paille
Quel est celui qu'on mangera 1
En cette triste conjoncture
Sous la loi cV^rn se courba,
Et ce fut la magistrature
Sur qui le mauvais sort tomba.
Donc, sans pudeur ni honte fausse,
Devès prit son grand coutelas 1
Restait à dire à quelle sauce
On mangerait les magistrats?
Tous avaient une préférence
Pour celle-ci, pour celle-là I
Ce fut un torrent d'éloquence
Qui, quinze jours durant, coula.
L'un votait blanche, l'autrej; brune
Câpres, madère, et caftera
Chacun tenant pour sa chacune
Dans son vouloir persévéra
Or, comme ils disputaient encore,
Retardant l'heure du repas,
Quand revint la seizième aurore,
La faim sévit, qui n'attend pas l
Elle fit son lugubre ouvrage,
Fauchant, cruelle, à tour de bras?,.
Et tout périt en ce naufrage,
Tout. sauf pourtant les magistrats 1
PAUL FCRRIEB
NT GUILBERT
ET LES JOURNALISTES
Ce n'est point de S. Em. Mgr le cardi-
nal Guibert, archevêque de Paris, qu'il
s'agit ici, mais de Mgr Guilbert, évêque
d'Amiens. Ne confondez point, s'il vous
plaît. Donc, Mgr Guilbert vient de
lancer une lettre pastorale contre la
presse en général, et la « presse reli-
gieuse > en particulier Si MM. les co-
médiens ont reçu leur paquet de M. Mir-
beau, MM. les journalistes reçoivent le
leur de Mgr Guilbert. Seulement, si notre
Mgr Mirbeau n'est pas plus bienveillant,
il est moins intéressant. Nous sommes
des cancres, des imbéciles, des porno-
graphes, des vendus. Il n'y a de profon-
ément pur que Mgr Bellot des Miniè-
res, et de réellement sublime que Mgr
Guilbert. C'est entendu. Si nous écri-
vons l'un à côté de l'autre les noms de
Mgr Guilbert et de Mgr Bellot des Mi-
nières, nous n'entendons point les con-
fondre comme prêtres, mais seulement
comme évoques. Ce sont les deux évê-
ques les plus républicains de France.
Nous pensons que le lecteur est édifié
sur Mgr Bellot des Minières au tour
maintenant de Mgr Guilbert qui ne nous
a pas envoyé moins de mille «écus pour
faire son portrait. Lecteurs, vous n'en
doutez pas I `
Mgr Guilbert est de la Manche, c'est
un électeur de M. Savary. Prélat très en-
tiché de l'idée de moderniser l'Eglise.
Il a trouvé pour cela une formule in-
connue avant lui « Rendez à César ce
qui appartient à César. » Mgr Bellot
des Minières a écrit dans son livre
À travers le Siècle
Notre ciel à nous, c'est un sein chéri.
Mgr Guilbert ne démord pas de sa
formule « Rendez à César ce qui appar-
tient à César. »
Sous l'Empire, Mgr Guilbert était curé
près de Cherbourg. Il avait la réputa-
tion d'un impérialiste, d'un bonapar-
tiste ardent, militant. On ne rendait ja-
mais à César tout ce qu'on lui devait.
Lui, il lui donnait le plus qu'il pouvait.
Si bien que César finit par se montrer
reconnaissant, en le nommant à l'évêché
de Gap, qui n'est pas précisément un
port de mer.
La République arrive. Mgr Guilbert
écrit de son rocher des Alpes deux let-
tres pastoral es sur son thème favori:
« Rendez à César ce qui est à César. »
Après la première, il a le désagrément
de recevoir la rosette d'officier de la
Légion d'honneur, et, après la seconde,
il a la douleur d'être appelé à diriger
l'un des plus opulents diocèses de
France. « Rendez à César ce qui appar-
tient à César. »
César prod igue ses biens ,'̃ ̃•
A ceux qui font vœu d'être siens.
On raconte que les membres de son
clergé qui peuvent avoir l'honneur de
l'approcher, ont supplié Mgr Guilbert
de garder en portefeuille cette ôpître â
la presse. Mais Mgr Guilbert n'aurait
rien voulu entendre. Ses œuvres ne se
composent que de ses lettres pastorales
qui, depuis 1867 jusqu'à 1882, roulent à
peu près toutes sur le « Rendez à César
ce qui appartient à César, » et il n'a pu
se résoudre à sacrifier ce nouveau fruit
de son génie. Pour un évoque qui est
écrivain, il n'a pas fait d'écrits, mais
pour un évêque qui n'est pas écrivain, il
a fait des écrits, comme on dit en Nor-
mandie, en parlant des pommes. Et cette
pomme-là, Mgr l'évêque d'Amiens nous
la lance à la figure.
Mgr Guilbert va-t-il avoir le désespoir
de monter sur un siège d'archevêque ? 7
En présence de ses foudres contre la
« presse religieuse», la République peut-
elle faire moins que de le nommer à la
coadjutorerie cum fidurasiiccessione, de
Bordeaux ? Si la République vient a
mourir, elle aura au moins la consola-
tion de penser qu'elle laissera un évê-
que qui tiendra haut et ferme le drapeau
de l'Etat, et qui répétera, humblement
incliné devant la Monarchie « Rendez
à César ce qui appartient à César. »
Un de ses collègues, parmi les plus
courageux et les plus doctes de France,
disait que si son savoir- était modeste,
que si son talent était maigre, sur le
chapitre des droits de César, Mgr Guil-
bert était ferré à glace, et que jamais f;
César n'aurait à se plaindre de lui.
x. z..̃̃.̃•̃
Bloc-Notes Parisien
J'édite Goquelln
Personnages M. Mirbeau, Premier Editeur,
Deuxième Editeur, Troisième EDITEUR,
Chœur des Editeurs.
SCÈNE I
M. mirbeau, assis et rêveur
Si je faisais une brochure? Une bro-
chure, ça rapporte ( Mon article, les arti-
cles des autres journaux qui ont parlé de
l'incident, les lettres d'acteurs, mes lettres
à Magnard, l'héroïsme de Daubray, tout
enfin. C'est d'une littérature facile et
d'une vente assurée. Magnard ne peut me
refuser un peu de réclame dans le Figaro.
Oui, c'est cela, faisons une brochure. Chez
quel éditeur irai-je? Tous les éditeurs sont
bons et tous seront enchantés de l'aubaine.
(Se levant et prenant son chapeau.) Et
maintenant, chez l'éditeur 1
SCÈflE II
M. MIRBEAU. PREMIER EDITEUR
M. MIRBEAU
Monsieur, je vous salue 1
PREMIER ÉDITEUR
Et moi de même, monsieur. Vous dési-
rez ?
M. MIRBEAU
M, Mirbeau.
PREMIER ÉDITEUR
Ah! 1 parfaitement. M. Mirbeau, des co-
médiens! Veuillez vous asseoir, monsie ur.
M. MIRBEAU
J'ai pensé à faire paraître une petite bro-
chure. Vous comprenez, une petite bro-
chure relative.
PREMIER ÉDITEUR
Parfaitement, parfaitement, une petite
brochure. Cela me va. Très bien cala me
va. Oui, une jolie couverture, un joli ti«
tre. Cela me va.
M. MIRBEAU
Très impartiale, vous comprenez docu-
mentaire, seulement documentaire. Je don-
nerais toutes les pièces du procès.
PREMIER ÉDITEUR
Entendu, monsieur.Documentaire, c'est
au mieux. (Se frappant le front.) Ah l
mais j'y pense c'est impossible, tout à
fait impossible Je le regrette, monsieur,
croyez bien que je le regrette. Àvèz-vous
des romans sur vous? Donnez-les-moi, Des
romans, mon Dieu, je pourrais vous lès
éditer. Je lepourrais, monsieur, à l'extrêm©
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