Titre : Le Gaulois : littéraire et politique
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1882-07-27
Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication
Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication
Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32779904b
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 94503 Nombre total de vues : 94503
Description : 27 juillet 1882 27 juillet 1882
Description : 1882/07/27 (Numéro 10). 1882/07/27 (Numéro 10).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k524312m
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/02/2008
Seizième Année Troisième ~me Numé~ 10
PARIS t S CeiltÏmëS< DÉPAMEMEMTS Et GARES CEMTÏMES)
Jeudi 27 Juillet 18~
EE. DE 3=~ÊS3NT3E
K<
-ANNONCES
MM. CH. LAGmANGrB, CBHB' & U
6, PLACE DE LA BOUBSBj6 ~) .·
jE< a <'4dmMtt".ADMINISTRATION
( .DKDIXHEUMSACÏNQ~fEUaM
t~ boulevard de" ttatien*, W
A BOMNEMÈNTS,PET)f ES ANNONCES
RENSEIGNEMENTS
9, boulevard des Italien:, $
~TR.TTBE'C'R ]M:E'Y]ES.
Dtree~Kr
ABONNEMENTS X'
Farift Départements~ 1
Unmois. 5fr. Unmois.j&'6'
Trois mois. 13 50 Trois mois.i6fr.<' L
Six mois. 27fr..Sixmois.tSafr~'
Unan. 54&. Unan. \64fr.
Etranger
TroMmou) (Union postale). 18fr. J
RÉDACTION
e, boulevard des Italiens, 9
t MMnXHNrMS'AMtNMT
PA~TSJ~RmL
Prime à nos Lecteurs
Le G'faire des sacrifices lorsqu'il s'agit
d'être agréable à ses nombreux
lecteurs.
C'est ainsi que, demain, le nu-
méro portant la date du 28 juillet
contiendra une C<~e <~M ~<~re
<~es opérations en J?~Ja été dressée par les soins de l'A-
gence Havas, qui l'a fait dessiner
d'après la. grande carte de M. Des-
huissons, sous les ordres et le con-
frôle de M. Ferdinand de Lesseps.
Nous sommes certains que nos
lecteurs sauront apprécier la clarté
et la netteté de ce supplément, qui
leur permettra de suivre toutes les
'phases de la guerre.
JAMS &_Mjm'mt
Je viens de lire un livre intéressant
de M. G. d'Heylli, .Rac~ <ï'ap~ sa
eorre~poM~Mcc. C'est, à dire vrai, une
apologie de la grande tragédienne.
L'auteur admire son caractère autant
que son génie, et nous la fait voir seule-
ment par les beaux côtés. Il faut en ra-
battre quelque chose. Rachel avait bien
ses faiblesses, des faiblesses qui nous la
rendent peut-être plus aimable, la mon-
trant très femme et la rapprochant de
nous. Il n'est pas bon, à mon sens,
de vouloir les gens célèbres trop par-
faits et impeccables. Quand on nous les
donne pour tels, ils excitent en nous je
.ne sais quelle jatousie dont nous faisons
payer les frais à leur génie. Etre une
bonne créature, avec quelques petits dé-
fauts, est le mieux qui puisse arriver à
une personne dont le public s'occupe.
Les < petits défauts sont là comme ces
négligences de toilette qui sont une co-
quetterie et un charme de plus.
Rachel en avait bien deux ou trois,
sans compter qu'elle ne savait pas l'or-
thographe, ce qui n'est pas un gros
péché) 1
On ne peut guère songer à Rachel
sans penser en môme temps aux autres
femmes de théâtre, et particulièrement
àcelles qui, sans la remplacer compté-
lement, lui ont cependant succédé dans
les préoccupations du public. Mme Sa-
rah Bernhardt est peut-être la femme
qui oSre le plus d'analogie avec Ra-
chel. Les points de contact sont nom-
breux. Il y a cependant entre les deux
comédiennes des dissemblances mar-
quées, qui sont intéressantes à noter,
.parce qu'elles marquent surtout la dif-
férence du temps.
Tontes deux sont d'origine étrangère.
Je ne sais si Mlle Sarah Bernhardt est
Israélite, comme on l'a dit. Mais, l'une
'et l'autre sont nées dans une famille
nombreuse, errante, dans une < tribu
se dispersant volontiers ça et là dans le
monde, restant pourtant unie et ajou-
tant au lien de la parenté je ne sais
quelle franc-maçonnerie de la bohème.
La misère, la gône tout au moins, sont
& leurs origines. Elles sont élevées un
peu au hasard. Leurs caractères seront
le libre développement de leur nature,
et leur génie ou leur talent viendront
presque tout entiers de leur instinct.
Elles auront toutes les deux un succès~
rapide, indiscuté, qui les fera reines de
leur théâtre, et, toutes les deux, elles au-
ront les caprices de leur royauté; elles
iront volontiers par les chemins, en
Angleterre, en Russie, en Amérique,
malades toutes d'eux, d'apparence ché-
tives, agonisantes pendant des années et
-surmontant pourtant des fatigues et des
travaux qui effrayeraient le plus vigou-
reux des hommes.
Elles seront entourées d'amitiés illus-
tres, inspireront desamours passionnées,
seront amantes et mères. Elles excite-
ront enfin, comme femmes, partout où
elles iront, une curiosité presque égale
aux enthousiasmes qu'elles feront naî-
tre comme artistes. Rachel ennn et
Sarah auront une même sorte de beauté,
où l'expression est tout, une de ces
beautés dont on dit que les femmes
(avec le conseil du diable) se les fabri-
quent à elles-mêmes quand elles en ont
besoin.
La ressemblance, cependant, malgré
tous ces traits cummuus et d'autres en-
core que je néglige, est peut-être plus
apparente que réelle. Chez l'une de ces
femmes,, en eNet, la qualité maîtresse,
c'est la mesure chez l'autre, la carac-
téristique, c'est l'outrance en toutes
choses. Et c'est ici que paraît surtout la
diSérence des temps, et qu'on s'aperçoit
que Rachel est de 1840 et Mlle Sarah
Bornhardt de 1880. C'est nous, ce sont
nos mœurs, nos façons avec les femmes
de théâtre, qui ont surtout rendu ces
deux femmes si dissemblables, laissant
l'une si profondément originale dans
son apparente simplicité, condamnant
l'autre à se montrer si laborieusement
excentrique.
La presse ne saurait imposer long-
temps au public une femme sans talent;
mais, quand il s'en trouve une, elle peut,
en un rien de temps, la lancer. Or, cette
opération du < lançage indispensable,
ne s'est pas toujours pratiquée de la
même façon. En 1840, ûsufnsait d'un
feuilleton. Un article de Jules Janin, en
eSet, nt monter les recettes de Rachel à
la Comédie de douze cents francs–
elle avait débuté par < faire sept cent
cinquante à six mille t Aujourd'hui,
îa. critique & subi une sorte de rdvolu-
tion, parallèle aux révolutions de l'an-
nonce, et qui la fait ressembler & celle-
ci. Certes, on peut compter encore cinq
ou six JMMtM~es ou critiques du lende-
main dont l'opinion est précieuse pour
les gens de théâtre mais l'information
et le reportage ont une valeur égale à la
critique, une importance quelquefois
supérieure.
Exagérant le procédé analytique de
Sainte-Beuve, lepoussantjusqu'àîa plus
indécente grossièreté, le public, quand
il s'agit d'un artiste quel qu'il soit, sur-
tout d'une femme, veut savoir avant
tout gM~ est. Nous avons tous tort,
tant que nous sommes, de nous prêter à
ces curiosités malsaines du public, et
j'approuverais fort une actrice qui met-
trait à la porte de chez elle reporters et
photographes, au lieu de leur livrer ses
traits, ses grâces, et jusqu'aux mys-
tères de son cabinet de toilette. Il fau-
drait savoir suivre le conseil du poète
Ami, cacheta, vieetrëpa.ndston esprit.
Mais peut-on trop reprocher à une
actrice, qui vit du public et dépend de
lui, d'avoir eu la faiblesse de satisfaire
ses goûts ? La femme de théâtre a be-
soin qu'on s'occupe d'elle. Elle est ame-
née, par une pente naturelle, à forcer sa
nature, à chercher de pénibles folies
pour donner un aliment à la curiosité,
sachant bien que, si elle écarte ainsi
d'elle l'estime des délicats, elle s'attire
la faveur du nombre, maître des arts,
hélas ) comme de la politique. C'est ainsi
que les Sarahs nous font connaître peu à
peu leurs chiens, leurs chats, leurs per-
roquets, leurs singes, leur hôtel, leur
salon, leur sculpture, et leurs amis
qu'elles se laissent voir dans leur
costume de théâtre d'abord, puis en
robes de ville, en robe de chambre, en
déshabillé, en garçon, en morte, et que
le culte de l'art, encore sincère chez
elles, se célèbre sur un autel banal, avec
tous les accessoires d'un écœurant cabo-
tinage. Tant pis) j'ai lâché le mot qui
était au bout de ma plume. Il est sur-
tout sévère pour nous, et non pour
Sarah, qui force l'indulgence et presque
l'admiration par son réel talent.
Dans la société de 1840, Rachel ne con-
nut aucune de ces exigences, aucun de
ces entraînements fâcheux. Bohème à
seize ans, elle ne fut jamais cabotine.
Une liaison discrète avec un homme de
grande race, ménagée avec art, presque
sanctifiée par une paternité avouée, lui
ouvrit le monde plutôt qu'elle ne l'en
écarta. Tenue en bride, éclairée, soute-
nue par un milieu bien supérieur au
nôtre,' elle y ût preuve d'un tact exquis.
Acclamée par les foules, comme àMar-
seille, où on lui donnait des aubades, ad-
mise à la table de la reine Victoria et du
Czar, elle sut garder une véritable mo-
destie dont la trace se retrouve dans ses
lettres, sincères et écrites avec laisser-
aller, sans aucune pensée que le public
les aurait un jour. Elle reporte à son
art, dont elle ne parle jamais sans émo-
tion, à ses maîtres aussi, surtout à Sam
son, ces triomphes dont elle jouissait,
qui furent la gloire de sa vie et non la
réclame nécessaire de sa carrière.
Elle fut respectueuse et respectée. Il
reste dans sa vie quelque chose de cette
belle sobriété classique qui fut son gé-
nie, de cette tenue de statue qu'elle
avait à la scène, où l'on oubliait qu'elle
fut une femme. Cette simplicité de son
existence, qui ne la priva d'aucune joie,
est, à mon sens, tout ce qu'on peut de-
mander de vertu à une femme de théâ-
tre. Elle sut la pratiquer. Aussi, devant
son image, taitlée dans le marbre, dit-
on < la grande Rachel Et, de son trône
de reine, elle domine l'art théâtral de
son temps, n'ayant jamais eu besoin de
grimper dans un ballon pour monter
plus haut que ses rivales ) 1
DANCEAU
No s Echos
AUJOURD'HUI
A 6 heures et demie, dtner au Gra.nd-Hotel
admission jusqu'à 7 heures.
Pendant la durée du dtner, l'eroheatre de
M. Desgrangea jouera dans la nouvelle salle de
musique.
MENU
Potage Bagration
Hors-d'oBUvro
Saumon sauce homard
Croquettes Da.uphine
Filet de bœuf à la printa.nière
Vol-au-vent à la financière
Chapons du Mans au cresaop
Salade
Petits pois à la paysanne
Gâteau topaze
Glace
Dame blanche au marasquin
Desserts
Fromages, fruits et petits-foura
Le salon des dames est ouvert aux voyageurs.
Piano, orgues, tables de jeux.–Dîner à la carte
au restaurant. Billards au Café Divan.
Le programme du dtner-conoert. (Voir à la
4' page.)
=X~
A deux heures. 87' séance publique de la
session de la Chambre des députes.
A deux heures, séance publique au Sénat.
Musée Grévin, 10, boulevard Montmartre.
De onze heures du matin à onze heures du soir.
Français. 8 h. Les JRa/t~ottt.
LA PODTtOUE
La -P'raMce a reçu de Berlin une dé-
pêche qui conûrme la. nouvelle qu'a le
premier dans la presse française don-
née le .Pa~s-Jot~'M~, à savoir que M. de
Bismarck méditait l'annexion à l'Alle-
magne du.' grand-duché de Luxem-
bourg.
Seulement, notre confrère ajoute que,
d'après ses informations particulières,
l'Angleterre n'aurait commencé son ex-
pédition en Egypte qu'avec Tassent!'
ment de M. de Bismarck, et que l'Alle-
magne avait voulu de cette façon s'as-
surer l'appui de l'Angleterre pour le
moment où il mettrait à exécution son
projet d'annexion du grand-ducbé de
Luxembourg.
~=
Le roi des Pays-Bas vend toutes les
propriétés qu'il possède dans le grand-
duché de Luxembourg.
Ces propriétés appartenaient au frère
du Roi, le prince Henri, qui, après avoir
épousé, en 1878, la princesse Marie, fille
du prince Frédéric-Charles de Prusse,
mourait le d3 janvier 1879, sans testa-
ment.
Le roi Guillaume III héritait l'im-
mense fortune de son frère, et ce sont les
biens du prince Henri qui sont aujour-
d'hui en vente.
La nomination de M. Ressmann au
poste de conseiller d'ambassade italienne
à Paris, en remplacement de M. le ba-
ron Marochetti, nommé ministre d'Ita-
lie à Copenhague, est, dit-on, la préface
de la nomination de M. le commandeur
Nigra aux fonctions d'ambassadeur, en
remplacement de M. le général Cialdini,
depuis si longtemps démissionnaire.
M. Ressmann passe, en efEet, pour être
dans la confidence de M. le commandeur
Nigra, et il ne viendrait à Paris que
pour lui préparer les logis.
Le gouvernement anglais a été tenu
au courant, au fur et à mesure, des dé-
libérations de la commission des cré-
dits.
Au reste, M. Goschen, dont nous
avons annoncé la présence à Paris il y
a trois jours, en était reparti édifié sur
nos intentions. On trouvera, dans le
compte rendu de la séance de ce soir du
Parlement anglais, l'expression des sen-
timents du cabinet de Saint-James su r
notre attitude.
M. Floquet assistait hier à la séance
du Conseil municipal. Il a pris la parole
à deux reprises.
Comme nous l'avions fait prévoir, le
préfet de la Seine ne démissionne plus.
Il est clair qu'il n'en a jamais eu l'in-
tention, et qu'il a simplement donné au
Conseil l'occasion de faire une petite
manifestation sur son nom.
C'est maintenant un maire de Paris
platonique.
LE MONDE ET LA VtLLE
S. A. R. le prince Arthur, duc de Con-
naught, est attendu après-demain à Pa-
ris. Son Altesse se rend à Malte, où Elle
prendra le commandement de la 1"' bri-
gade de l'armée d'Orient.
Le prince Arthur sera accompagné
de M. J.-B. Scott, chirurgien-major, qui
parvint à retrouver le corps du Prince
impérial dans le Zoulouland en ~879.
M. de Montbel, premier secrétaire
d'ambassade près le Vatican, qui se
trouve actuellement en congé, doit re-
gagner son poste dans les premiers
jours du mois prochain.
Notre ambassadeur, M. Desprez, re-
viendra en France dès que M. de Mont-
bel sera rentré à Rome.
Ischl, le petit bourg de la Haute-Au-
triche, que l'empereur François-Joseph
a choisi pour résidence d'été, deviendra
le rendez-vous des souverains.
L'empereur d'Allemagne doit s'y ren-
dre avant de unir sa cure à Gastein le
roi de Serbie y viendra probablement à
la même époque; enfin, le roi et la reine
de Grèce y sont attendus vers le 4 août
prochain.
Nous avons annoncé la maladie de S.
Exc. le prince OrloS, ambassadeur de
Russie à Paris.
Il y a huit jours, le prince Orloff, à
peine de retour des cérémonies de fané-
railles de sa belle-mère, la princesse
Troubetzkoï, a été atteint de douleurs
hépathiques des plus violentes, lesquel-
les sont arrivées aujourd'hui à leur
point le plus aigu. Trois médecins, ave:
îe docteur Guéneau de Mussy, soignent
l'illustre .malade, qui a passé une très
mauvaise nuit hier; la journée a été
un peu meilleure. Le prince, sauf de lé-
gers bouillons, ne prend aucune espèce
de nourriture, et toute préoccupation ou
tout travail lui est formellement in-
terdit.
Depuis hier que ,la nouvelle s'est
plus particulièrement répandue, on va
s'inscrire chez le prince, à l'Ambassade,
où se sont successivement présentés
Mlle Dosne, la princesse A. de Galitzine,
M. R. de Murait, le général comte
Fleury, le Nonce apostolique, M. Dau-
brée, de l'Institut M. de Poggenpoll, le
comte de Wimpiïen, M. Boucher-Ca-
dart, sénateur, etc.
M. Bonnat vient d'arriver à Vienne,
où il doit prendre part aux délibéra-
tions du jury international chargé de
l'examen des peintures figurant à l'Ex-
position universelle des beaux-arts.
Deux journaux du soir ont annoncé
que le trésorier-payeur des Alpes-Ma-
ritimes, M. Gauthier de Rigny, avait
quitté Nice sans laisser trace de la des-
tination de son voyage.
Nos confrères ont été même plus loin,
nous ne parlons pas du voyage sup-
posé, –ils ont ajouté que la cause de
cette fugue intempestive était la consta-
tation d'un déûcit de plus d'un mil-
lion et demi dans la caisse du dépar-
tement.
Un de nos collaborateurs est allé aux
informations et a vu M. Pallain. Il est ré-
sulté de leur entrevue le renseignement
suivant c'est que le trésorier général
n'est pas en fuite; il n'est pas arrêté
mais que malheureusement, après
quelques plaintes qui sont arrivées au
ministère, l'inspecteur des finances a
constaté un gros déficit dans la caisse
de l'administrateur mis en cause.
M. Gambetta est rentré hier à Paris,
par le rapide de dix heures.
L'ancien président du conseil avait
arrêté de prolonger son séjour à Nice
jusqu'à mercredi matin mais, sur un
télégramme de M. Ranc, il a brusqué
son départ.
M. Gambetta, parti de Nice à huit
heures du matin, a dîné à Marseille, en
compagnie de M. Liouville, député.
Ensuite il est monté dans un coupé-.
lit de P.-L.-M., d'où il n'est descendu
qu'à Paris.
Sur le quai de la gare de Lyon, M.
Gambetta et M. Jacquin, premier député
de la nation française à Alexandrie, ont
été présentés ~un à l'autre. Ces deux
messieurs ont pris rendez-vous pour un
jour très prochain.
Nous avons reçu hier, dans la jour-
née, le télégramme suivant de notre
correspondant particulier
Bruxelles, 26 juillet.
"La rencontre qui devait avoir lieu ce
matin, à la frontière hollandaise, entre
M. Aurélien Scholl et le baron Harden-
Hickey, n'a pu avoir lieu. A deux repri-
ses différentes la rencontre a été empê-
chée par l'intervention de la gendarme-
rie belge d'abord, puis par celle de la
police hollandaise.
NOUVELLES A LA MAIN
Un esprit fort de village disait un
jour à son curé
Moi, d'abord, je ne crois pas aux
miracles. Du reste, je ne sais même pas
ce que c'est.
Ah répond le curé. Et veux-tu le
savoir ?
–Oui.
Eh bien, retourne-toi 1
Le paysan se retourne, et le curé,
après lui avoir envoyé un maître coup
de pied au bas du dos
L'as-tu senti ?
Oh que oui, que je l'ai senti. Eh
ben?
Eh bien, mon garçon, si tu ne l'a-
vais pas senti. ça serait un miracle!
Un pochard, voyant sur un journal
une nomination de commandeur dans la
Légion d'honneur
Et dire que le père Noé n'était seu-
lement pas chevalier).dit-il en haus-
sant les épaules.
MM OOmtNf
ET L'ANGLETERRE?
Nous le déclarons sans barguigner,
nous ne sommes point partisan de l'ex-
pédition d'Egypte, telle que l'entend le
gouvernement, de cet envoi de patrouille
impuissante, de cette occupation sans in-
tervention, comme l'appelle en son pa-
thos et en son ithos, M. de Freycinet. Si
l'on se décidait à une action, nous la
voudrions forte, énergique, efficace, dé-
cisive, comme il convient à un grand
pays qui jette son épée dans le plateau où
il lui plaît que penchent les événements.
Encore pour que nous accordions notre
confiance à cette politique, serait-il né-
cessaire qu'au préalable l'on nous dé-
montrât qu'elle est utile au pays.
Hier, le gouvernement a donné un
spectacle lamentable. M. de Freycinet a
laissé voir qu'il ne demandait les cré-
dits que pour ne pas les obtenir. Sa du-
plicité, son irrésolution, ont éclaté à
tous les yeux. On lira plus loin les débats
et les votes de la commission. Ce double
jeu est percé à jour. On cherche en vain à
pénétrer les mystères de cette politique:
il n'y a qu'ignorance, que sottise, que
fourberie, que faiblesse. Aussi la com-
mission a-t-elle refusé les crédits. Que
fera la Chambre ? Que fera le Sénat? 2
Mais dans toute cette affaire, il y a un
tiers qu'on paraît oublier. Le gouver-
nement nous a annoncé qu'il avait con-
clu un traité avec l'Angleterre. Ce
traité résulte-t-il d'un échange d'expli-
cations, ou d'un instrument authen-
tique ? Peu nous importe. Pour nous,
écrite ou verbale, la parole de la France
est sacrée, elle nous engage, elle nous
lie. Qu'on l'ait donnée légèrement, nous
n'en doutons point. Si l'on jugeait le
gouvernement d'après sa conscience des
choses, certes il serait irresponsable, car
il est de ceux dont on dit qu'ils ne sa-
vent pas ce qu'ils font.
Depuis plus de trois ans, depuis que
l'avènement de M. Grévy laisse la ré-
publique nous inonder de ses lumières,
l'Angleterre a cuisiné l'agitation de
l'Egypte. Pendant son passage aux
affaires, M. Gambetta n'a cessé de pres-
ser les Anglais d'intervenir, à la vérité
avec notre concours. M. Gambetta, lui
aussi, ignorait ces menées souterrai-
nes. Mais les Anglais, sollicités, chauf-
fes, n'ont pas su résister, n'est-ce pas t
ils sont intervenus, sans nous, puisqu'a-
près avoir pris les devants, en étour-
neaux, nous nous sommes replies en
arrière comme des oiseaux de basse-
cour.
EnRn, si nous avons des engagements
avec l'Angleterre, de quelle nature sont
ces engagements? Sont-ils subordonnés
au vote ou au rejet des crédits ? Si M. de
Freycinet n'a pas pris cette précaution,
et cela ne nous surprendrait point, quelle
va être notre situation vis-à-vis de l'An-
gleterre, au cas, vraisemblable, proba-
ble, où la Chambre et le Sénat adopte-
raient les conclusions de la commission ?
Négligeons le parti que prendra le
gouvernement. M. de Freycinet don-
nera-t-il sa démission? Quoi qu'il en
soit, sur quel pied serons-nous avec
l'Angleterre ? Il n'est pas douteux
qu'elle n'ambitionne de tirer de son
expédition, de son occupation en
Egypte, tout le fruit possible. Mais si,
non contente d'établir son empire en
Egypte, poussée, comme elle a été l'hi-*
ver dernier, par M. Gambetta, mais cette
fois par quelqu'un de moins folâtre, M.
de Bismarck, par exemple, elle nous
suscite une querelle sur la non-exécu-
tion de nos engagements, et rien ne se-
rait plus facile que de faire naître une
complication de ce genre, en quel équi-
page nous trouverions-nous ?
Si nous posons cette hypothèse, c'est
que le caractère du dernier voyage à
Paris de M. Goschen et du chef d'état-
major anglais, ne nous est pas expliqué
c'est qu'il y a six semaines, des craintes
de désaccord, de rupture, de connit, di-
sons le mot, de guerre, ont agité les
cercles politiques; c'est qu'à l'heure qu'il
est, le ministère est en pleine crise,
devant cette même menace. Ces Hanlon-
Lee, qui connaissent si bien la mesure
de tous les pieds d'Europe, n'ont oublié
qu'une chose, c'est de se demander ce
que penserait le peuple anglais, dont le
Parlement accueille déjà les plaintes 1
mms TESTE.
tA PMMti'R!i' A RAVBft!TH
LA iKMiiMuh A Mïtu'~iH
DE NOTRE CORRESPONDANT SPÉCIAL
B&yreuth, 26 juillet, 4 h. 15.
Je suis arrivé à Bayreuth, où j'ai
trouvé toutes les têtes à l'envers. La.
représentation de -Pays~y~, de Richard
Wagner, amène dans cette petite ville
de province une telle affluence qu'on ne
sait plus où l'on en est. On voit des gens
de tous les pays, des musiciens et des
critiques de toutes les nuances, accou-
rus pour la grande solennité. On a bien
de la peine à se loger. Comment fera.-
t-on demain et les jours suivants.quand
les trains auront déversé les innombra-
bles étrangers qui se font annoncer 9
Beaucoup de personnes se sont inscrites
pour plusieurs représentations. Le théâ-
tre, qui ne renferme que douze cents
places environ, réserve des déceptions
à bien du monde. La plupart des places
sont retenues depuis très longtemps et
quelques-unes depuis plusieurs années.
L'Amérique est représentée par deux
reporters. Les Parisiens et les Français
sont en nombre. Je ne vous parle pas
des Belges, des Hollandais, des Italiens.
Nous sommes en plein cosmopolitisme.
On a répété l'œuvre avec un soin mi-
nutieux. M. Hermann-Lévy, maître de
chapelle du théâtre royal de Munich,
dirige l'orchestre. C'est le maître lui-
même qui a présidé aux répétitions,
secondé par l'éminent capellmeister et
par M. Joseph Rubinstein, auquel on
doit la réduction pour piano et chant
de la partition.
Les représentations commenceront à
quatre heures précises. Chaque entr'acte
durera une heure, et, vers dix heures,
tout sera fini.
Le duc de Mecklembourg et presque
tous les princes allemands assisteront
à la première. En revanche, on assure
que le roi de Bavière ne viendra pas.
Son absence n'étonnera personne.
MEMOR
NOUVELLES ET DEPECHES
f~rutce ~M~apA~Me ~M GAULOIS)
Londres, 26 juillet, 7 h.
Clôture meilleure sur article du r~HM
et sur le bruit qu'Arabi cherche à négocier
sa soumission.
Consolidés, 99 65 Egyptien, 48 65 pa-
rité, 244 40; Turc, 10 62: parité, 1080; Ban-
que ottomane, 17 65 parité, 694.
Berlin, 26 juillet.
On s'entretient beaucoup, dans les cer-
cles politiques de Berlin, d'une dépêche
que M. de Bismarck aurait adressée à M.
de Freycinet au sujet des araires d'Egypte,
de l'alliance franco-anglaise, des rapports
de l'Allemagne avec l'Angleterre.
On la dit conçue en termes si ambigus
qu'on se demande ce qu'elle signiSe et
qu'on la croit grosse de menaces.
Londres, 26 juillet.
M. Goldsmid, contrôleur de la Daïra Sa-
nieb, a déclaré que les fonds nécessaires
au paiement intégral du coupon échéant le
15 octobre prochain étaient déposés à la
Banque d'Angleterre.
Il en est de même pour le coupon de la
dette privilégiée (chemins de fer), et les
sommes en caisse affectées à l'Uninée re-
présentent déjà. 11/4 0/0 d'intérêt pour le
semestre échéant le 1" novembre pro-
chain.
Constantinople, 26 juillet.
Les préparatifs militaires turcs sont très
avancés.
Dervisch-Pacha a été désigné pour pren-
dre.le commandement du corps'expédition-
naire envoyé en Egypte.
Alexandrie, 26 juillet.
Deux incendiaires ont été fusillés.
Toutes les décisions des autorités an-
glaises sont prises au nom du Khédive.
Le général Alison s'attend à une pro-
chaine attaque des troupes de Toulba Pa-
cha, Le camp de Ramieh est très fortifié
et ses feux se croisent avec ceux des cui-
rassés ~M/~a~Meet ~MMa~, mouillés sur la
côte. Ramleh est défendu par 1,600 soldats
d'infanterie de marine.
Les mollahs et les derviches prêchent la
guerre sainte jusqu'aux portes d'Alexan-
drie. ·
La crue du Nil est très avancée. Elle
promet d'être très forte.
Ali-Pacha, Moubarck et Ahmet-Pacha-
Nachaat retournent demain au Caire par
la voie d'Ismailia. A leur arrivée, ils con-
voqueront le grand conseil, qu'ils éclaire-
ront sur les accusations portées par AraM
contre le Khédive.
PETITS POEMES PARISIENS
o
t
D'où vient-elle ? Je l'ignore. Est-elle
mariée ou demoiselle, grande dame ou
aventurière? Qui le sait Elle ne connaît
personne, et personne ne la connaît. Un
soir, je l'ai entendue qui parlait. Elle aix
voix chantante des Russes. Est-elle Russe?
Peut-être bien. Et puis? Et puis elle est
blonde, jeune, élégante et jolie. Son teint
est mat, son œil bleu pâle, sa taille mince.
Point excentrique, d'ailleurs, en ses toi-
lettes. Une petite capote, où danse une
plume rose, une robe sombre, le plus sou-
vent noire, avec des dentelles, et peu de
bijoux. Et puis? Et puis, elle arrive, tous
les soirs, et toujours seule, à sept heures
et demie. Sa place est retenue, sur la ter-
rasse des Ambassadeurs, au premier rang,
contre la balustrade. A son entrée, les
garçons s'empressent, respectueusement.
Le maître d'hôtel, la serviette sous lebras~
s'avance avec son plus engageant sourire,
et la salue, très bas. Elle, s'étant assise,
lentement, remonte sa voilette sur le front,
enlève ses gants qu'elle pose à droite,
après les avoir étilé.s sur la nappe, et les
coudes appuyés à la table, ses long doigts
réunis et croisés, elle écoute, recueillie,
l'homme en habit noir qui compose le
menu.
Les dîneurs déjà installés s'interrompent
pour regarder l'étrangère. Les femmes la
dévisagent, avec de grands yeux enrontés.
On chuchote. Toutes les attentions, toutes
les curiosités vont vers elle. Mais elle, très
à l'aise et simple, reste indiSerentë a- ce
qui l'entoure. Elle ne voit nin'entendrien.
On sent qu'elle n'est pas venue là ~our
se donner en spectacle, pour chercher une
aventure.
Quel vin madame prendra.-t-elle ? de*
mande le maître d'hôtel.
Mais toujours le même
En bas, les rangées de banquettes peu a
peu se garnissent. Les globes s'allument et
festonnent sous les branches des marron-
niers. On entend les violons qui s'accor-
dent, les éclats brusques d'un piston, le
ronflement d'une contrebasse, et la voix
aigre d'un marchand de programmes.
L'inconnue mange. Devant elle s'alignent
quatre bouteilles de vin iin, couchées
dans leur panier d'osier. Elle mange et
boit. Les plats dénient, les verres se vident.
Elle boit toujours. Tout près, une table oc-
cupée par des gommeux et des demoiselles
fait un bruit d'enfer. On accompagne avec
les couteaux le refrain d'une chanson-
nette qui se chante là-bas sur la scène,
flamboyante de lumières. On interpelle
les chanteurs; on reprend en chœur le
couplet à succès. Mais l'inconnue ne prend
pas garde au tapage. Elle mange, elle boit,
sans s'étonner, sans regarder, élégante et
calme, la joue à peine rosé, l'ceil à peine
brillant. Et tout à l'heure, la dernière bou-
teille vidée, elle s'en ira, droite et lente,
nullement troublée par ces yeux braqués
sur elle, avec un peu de rouge qui s'allume
au coin des tempes.
Je demande au maître d'hôtel
Savez-vous qui est cette femme ?
Non.'monsieur. Depuis un mois, tous
les soirs elle vient ici. Tous les soirs elle
boit ses quatre bouteilles de vin. Personne
ne l'accompagne, personne ne la connaît.
Elle dépense cent cinquante francs à son
repas, quelquefois plus, jamais moins.
Bien étrange, allez. Des fois, ces messieurs
ont voulu lui parler. Elle ne les regarde
seulement pas, et ne répond rien. C'est
égal jamais je n'ai vu boire comme ça.
Depuis quelques jours, l'étrangère a dis-
paru, emportant son mystère avec elle.
Est-ce une excentrique, est-ce une malheu-
reuse ? 0 femmes 1 qui plongera jamais au
fond de vos cœurs et de vos cerveaux?
e*noEt))tc
,ï
LA CRISE
ET LA COMMtSStOM BES CREDITS
La commission des crédits égyptiens
a tenu hier deux séances: l'une à neuf
heures et demie, l'autre a trois heures.
<~e Matin
Le matin, elle a entendu les ministres
et spécialement M. de Freycinet, qui a.
reproduit sous divers aspects cette for-
mule occMpaMoM sans M~er~e~ïo~.
Il a dit que la convention intervenue
entre l'Angleterre et la France ne visait
qu'à la protection du canal < purement
et simplement qu'une puissance com-
me la France ne devait pas se désinté-
resser de ce qui se passe sur les bords
de la Méditerranée, etc., etc.; il a re-
fusé, sous prétexte de raison d'Etat, de
communiquer les documents diploma-
tiques que lui demandait la commis-
sion.
Le ministre de la guerre est intervenu
et a assuré la commission que les crédits
demandés étaient suffisants pour l'expé-
dition ~M)M~pas si l'on voulait intervenir efficace-
ment, etc.
Dans tout cela, rien de net, rien de
franc le président du conseil se déro-
bait à toutes les question les efforts et
l'habileté de M. Ribot lui-même n'ont
rien pu en tirer.
On lui a demandé s'il poserait la ques-
tion de cabinet; il a esquivé la réponse
et s'est borné à cette phrase vague
< qu'il prendrait conseil des circons-
tances
En présence de cette attitude ëquivo.
que, on s'est demandé si, au fond., les
ministres ne sollicitaient pas les crédits
avec l'arriëre-pensée de se les faire re-
fuser on en a été bien vite convaincu
et l'on a fait comprendre fort durement
au président du conseil qu'on pénétrait
son plan. C'est dans ces dispositions ai*
guës qu'on s'est séparé,
PARIS t S CeiltÏmëS< DÉPAMEMEMTS Et GARES CEMTÏMES)
Jeudi 27 Juillet 18~
EE. DE 3=~ÊS3NT3E
K<
-ANNONCES
MM. CH. LAGmANGrB, CBHB' & U
6, PLACE DE LA BOUBSBj6 ~) .·
jE< a <'4dmMtt
( .DKDIXHEUMSACÏNQ~fEUaM
t~ boulevard de" ttatien*, W
A BOMNEMÈNTS,PET)f ES ANNONCES
RENSEIGNEMENTS
9, boulevard des Italien:, $
~TR.TTBE'C'R ]M:E'Y]ES.
Dtree~Kr
ABONNEMENTS X'
Farift Départements~ 1
Unmois. 5fr. Unmois.j&'6'
Trois mois. 13 50 Trois mois.i6fr.<' L
Six mois. 27fr..Sixmois.tSafr~'
Unan. 54&. Unan. \64fr.
Etranger
TroMmou) (Union postale). 18fr. J
RÉDACTION
e, boulevard des Italiens, 9
t MMnXHNrMS'AMtNMT
PA~TSJ~RmL
Prime à nos Lecteurs
Le G'
d'être agréable à ses nombreux
lecteurs.
C'est ainsi que, demain, le nu-
méro portant la date du 28 juillet
contiendra une C<~e <~M ~<~re
<~es opérations en J?~Ja été dressée par les soins de l'A-
gence Havas, qui l'a fait dessiner
d'après la. grande carte de M. Des-
huissons, sous les ordres et le con-
frôle de M. Ferdinand de Lesseps.
Nous sommes certains que nos
lecteurs sauront apprécier la clarté
et la netteté de ce supplément, qui
leur permettra de suivre toutes les
'phases de la guerre.
JAMS &_Mjm'mt
Je viens de lire un livre intéressant
de M. G. d'Heylli, .Rac~ <ï'ap~ sa
eorre~poM~Mcc. C'est, à dire vrai, une
apologie de la grande tragédienne.
L'auteur admire son caractère autant
que son génie, et nous la fait voir seule-
ment par les beaux côtés. Il faut en ra-
battre quelque chose. Rachel avait bien
ses faiblesses, des faiblesses qui nous la
rendent peut-être plus aimable, la mon-
trant très femme et la rapprochant de
nous. Il n'est pas bon, à mon sens,
de vouloir les gens célèbres trop par-
faits et impeccables. Quand on nous les
donne pour tels, ils excitent en nous je
.ne sais quelle jatousie dont nous faisons
payer les frais à leur génie. Etre une
bonne créature, avec quelques petits dé-
fauts, est le mieux qui puisse arriver à
une personne dont le public s'occupe.
Les < petits défauts sont là comme ces
négligences de toilette qui sont une co-
quetterie et un charme de plus.
Rachel en avait bien deux ou trois,
sans compter qu'elle ne savait pas l'or-
thographe, ce qui n'est pas un gros
péché) 1
On ne peut guère songer à Rachel
sans penser en môme temps aux autres
femmes de théâtre, et particulièrement
àcelles qui, sans la remplacer compté-
lement, lui ont cependant succédé dans
les préoccupations du public. Mme Sa-
rah Bernhardt est peut-être la femme
qui oSre le plus d'analogie avec Ra-
chel. Les points de contact sont nom-
breux. Il y a cependant entre les deux
comédiennes des dissemblances mar-
quées, qui sont intéressantes à noter,
.parce qu'elles marquent surtout la dif-
férence du temps.
Tontes deux sont d'origine étrangère.
Je ne sais si Mlle Sarah Bernhardt est
Israélite, comme on l'a dit. Mais, l'une
'et l'autre sont nées dans une famille
nombreuse, errante, dans une < tribu
se dispersant volontiers ça et là dans le
monde, restant pourtant unie et ajou-
tant au lien de la parenté je ne sais
quelle franc-maçonnerie de la bohème.
La misère, la gône tout au moins, sont
& leurs origines. Elles sont élevées un
peu au hasard. Leurs caractères seront
le libre développement de leur nature,
et leur génie ou leur talent viendront
presque tout entiers de leur instinct.
Elles auront toutes les deux un succès~
rapide, indiscuté, qui les fera reines de
leur théâtre, et, toutes les deux, elles au-
ront les caprices de leur royauté; elles
iront volontiers par les chemins, en
Angleterre, en Russie, en Amérique,
malades toutes d'eux, d'apparence ché-
tives, agonisantes pendant des années et
-surmontant pourtant des fatigues et des
travaux qui effrayeraient le plus vigou-
reux des hommes.
Elles seront entourées d'amitiés illus-
tres, inspireront desamours passionnées,
seront amantes et mères. Elles excite-
ront enfin, comme femmes, partout où
elles iront, une curiosité presque égale
aux enthousiasmes qu'elles feront naî-
tre comme artistes. Rachel ennn et
Sarah auront une même sorte de beauté,
où l'expression est tout, une de ces
beautés dont on dit que les femmes
(avec le conseil du diable) se les fabri-
quent à elles-mêmes quand elles en ont
besoin.
La ressemblance, cependant, malgré
tous ces traits cummuus et d'autres en-
core que je néglige, est peut-être plus
apparente que réelle. Chez l'une de ces
femmes,, en eNet, la qualité maîtresse,
c'est la mesure chez l'autre, la carac-
téristique, c'est l'outrance en toutes
choses. Et c'est ici que paraît surtout la
diSérence des temps, et qu'on s'aperçoit
que Rachel est de 1840 et Mlle Sarah
Bornhardt de 1880. C'est nous, ce sont
nos mœurs, nos façons avec les femmes
de théâtre, qui ont surtout rendu ces
deux femmes si dissemblables, laissant
l'une si profondément originale dans
son apparente simplicité, condamnant
l'autre à se montrer si laborieusement
excentrique.
La presse ne saurait imposer long-
temps au public une femme sans talent;
mais, quand il s'en trouve une, elle peut,
en un rien de temps, la lancer. Or, cette
opération du < lançage indispensable,
ne s'est pas toujours pratiquée de la
même façon. En 1840, ûsufnsait d'un
feuilleton. Un article de Jules Janin, en
eSet, nt monter les recettes de Rachel à
la Comédie de douze cents francs–
elle avait débuté par < faire sept cent
cinquante à six mille t Aujourd'hui,
îa. critique & subi une sorte de rdvolu-
tion, parallèle aux révolutions de l'an-
nonce, et qui la fait ressembler & celle-
ci. Certes, on peut compter encore cinq
ou six JMMtM~es ou critiques du lende-
main dont l'opinion est précieuse pour
les gens de théâtre mais l'information
et le reportage ont une valeur égale à la
critique, une importance quelquefois
supérieure.
Exagérant le procédé analytique de
Sainte-Beuve, lepoussantjusqu'àîa plus
indécente grossièreté, le public, quand
il s'agit d'un artiste quel qu'il soit, sur-
tout d'une femme, veut savoir avant
tout gM~ est. Nous avons tous tort,
tant que nous sommes, de nous prêter à
ces curiosités malsaines du public, et
j'approuverais fort une actrice qui met-
trait à la porte de chez elle reporters et
photographes, au lieu de leur livrer ses
traits, ses grâces, et jusqu'aux mys-
tères de son cabinet de toilette. Il fau-
drait savoir suivre le conseil du poète
Ami, cacheta, vieetrëpa.ndston esprit.
Mais peut-on trop reprocher à une
actrice, qui vit du public et dépend de
lui, d'avoir eu la faiblesse de satisfaire
ses goûts ? La femme de théâtre a be-
soin qu'on s'occupe d'elle. Elle est ame-
née, par une pente naturelle, à forcer sa
nature, à chercher de pénibles folies
pour donner un aliment à la curiosité,
sachant bien que, si elle écarte ainsi
d'elle l'estime des délicats, elle s'attire
la faveur du nombre, maître des arts,
hélas ) comme de la politique. C'est ainsi
que les Sarahs nous font connaître peu à
peu leurs chiens, leurs chats, leurs per-
roquets, leurs singes, leur hôtel, leur
salon, leur sculpture, et leurs amis
qu'elles se laissent voir dans leur
costume de théâtre d'abord, puis en
robes de ville, en robe de chambre, en
déshabillé, en garçon, en morte, et que
le culte de l'art, encore sincère chez
elles, se célèbre sur un autel banal, avec
tous les accessoires d'un écœurant cabo-
tinage. Tant pis) j'ai lâché le mot qui
était au bout de ma plume. Il est sur-
tout sévère pour nous, et non pour
Sarah, qui force l'indulgence et presque
l'admiration par son réel talent.
Dans la société de 1840, Rachel ne con-
nut aucune de ces exigences, aucun de
ces entraînements fâcheux. Bohème à
seize ans, elle ne fut jamais cabotine.
Une liaison discrète avec un homme de
grande race, ménagée avec art, presque
sanctifiée par une paternité avouée, lui
ouvrit le monde plutôt qu'elle ne l'en
écarta. Tenue en bride, éclairée, soute-
nue par un milieu bien supérieur au
nôtre,' elle y ût preuve d'un tact exquis.
Acclamée par les foules, comme àMar-
seille, où on lui donnait des aubades, ad-
mise à la table de la reine Victoria et du
Czar, elle sut garder une véritable mo-
destie dont la trace se retrouve dans ses
lettres, sincères et écrites avec laisser-
aller, sans aucune pensée que le public
les aurait un jour. Elle reporte à son
art, dont elle ne parle jamais sans émo-
tion, à ses maîtres aussi, surtout à Sam
son, ces triomphes dont elle jouissait,
qui furent la gloire de sa vie et non la
réclame nécessaire de sa carrière.
Elle fut respectueuse et respectée. Il
reste dans sa vie quelque chose de cette
belle sobriété classique qui fut son gé-
nie, de cette tenue de statue qu'elle
avait à la scène, où l'on oubliait qu'elle
fut une femme. Cette simplicité de son
existence, qui ne la priva d'aucune joie,
est, à mon sens, tout ce qu'on peut de-
mander de vertu à une femme de théâ-
tre. Elle sut la pratiquer. Aussi, devant
son image, taitlée dans le marbre, dit-
on < la grande Rachel Et, de son trône
de reine, elle domine l'art théâtral de
son temps, n'ayant jamais eu besoin de
grimper dans un ballon pour monter
plus haut que ses rivales ) 1
DANCEAU
No s Echos
AUJOURD'HUI
A 6 heures et demie, dtner au Gra.nd-Hotel
admission jusqu'à 7 heures.
Pendant la durée du dtner, l'eroheatre de
M. Desgrangea jouera dans la nouvelle salle de
musique.
MENU
Potage Bagration
Hors-d'oBUvro
Saumon sauce homard
Croquettes Da.uphine
Filet de bœuf à la printa.nière
Vol-au-vent à la financière
Chapons du Mans au cresaop
Salade
Petits pois à la paysanne
Gâteau topaze
Glace
Dame blanche au marasquin
Desserts
Fromages, fruits et petits-foura
Le salon des dames est ouvert aux voyageurs.
Piano, orgues, tables de jeux.–Dîner à la carte
au restaurant. Billards au Café Divan.
Le programme du dtner-conoert. (Voir à la
4' page.)
=X~
A deux heures. 87' séance publique de la
session de la Chambre des députes.
A deux heures, séance publique au Sénat.
Musée Grévin, 10, boulevard Montmartre.
De onze heures du matin à onze heures du soir.
Français. 8 h. Les JRa/t~ottt.
LA PODTtOUE
La -P'raMce a reçu de Berlin une dé-
pêche qui conûrme la. nouvelle qu'a le
premier dans la presse française don-
née le .Pa~s-Jot~'M~, à savoir que M. de
Bismarck méditait l'annexion à l'Alle-
magne du.' grand-duché de Luxem-
bourg.
Seulement, notre confrère ajoute que,
d'après ses informations particulières,
l'Angleterre n'aurait commencé son ex-
pédition en Egypte qu'avec Tassent!'
ment de M. de Bismarck, et que l'Alle-
magne avait voulu de cette façon s'as-
surer l'appui de l'Angleterre pour le
moment où il mettrait à exécution son
projet d'annexion du grand-ducbé de
Luxembourg.
~=
Le roi des Pays-Bas vend toutes les
propriétés qu'il possède dans le grand-
duché de Luxembourg.
Ces propriétés appartenaient au frère
du Roi, le prince Henri, qui, après avoir
épousé, en 1878, la princesse Marie, fille
du prince Frédéric-Charles de Prusse,
mourait le d3 janvier 1879, sans testa-
ment.
Le roi Guillaume III héritait l'im-
mense fortune de son frère, et ce sont les
biens du prince Henri qui sont aujour-
d'hui en vente.
La nomination de M. Ressmann au
poste de conseiller d'ambassade italienne
à Paris, en remplacement de M. le ba-
ron Marochetti, nommé ministre d'Ita-
lie à Copenhague, est, dit-on, la préface
de la nomination de M. le commandeur
Nigra aux fonctions d'ambassadeur, en
remplacement de M. le général Cialdini,
depuis si longtemps démissionnaire.
M. Ressmann passe, en efEet, pour être
dans la confidence de M. le commandeur
Nigra, et il ne viendrait à Paris que
pour lui préparer les logis.
Le gouvernement anglais a été tenu
au courant, au fur et à mesure, des dé-
libérations de la commission des cré-
dits.
Au reste, M. Goschen, dont nous
avons annoncé la présence à Paris il y
a trois jours, en était reparti édifié sur
nos intentions. On trouvera, dans le
compte rendu de la séance de ce soir du
Parlement anglais, l'expression des sen-
timents du cabinet de Saint-James su r
notre attitude.
M. Floquet assistait hier à la séance
du Conseil municipal. Il a pris la parole
à deux reprises.
Comme nous l'avions fait prévoir, le
préfet de la Seine ne démissionne plus.
Il est clair qu'il n'en a jamais eu l'in-
tention, et qu'il a simplement donné au
Conseil l'occasion de faire une petite
manifestation sur son nom.
C'est maintenant un maire de Paris
platonique.
LE MONDE ET LA VtLLE
S. A. R. le prince Arthur, duc de Con-
naught, est attendu après-demain à Pa-
ris. Son Altesse se rend à Malte, où Elle
prendra le commandement de la 1"' bri-
gade de l'armée d'Orient.
Le prince Arthur sera accompagné
de M. J.-B. Scott, chirurgien-major, qui
parvint à retrouver le corps du Prince
impérial dans le Zoulouland en ~879.
M. de Montbel, premier secrétaire
d'ambassade près le Vatican, qui se
trouve actuellement en congé, doit re-
gagner son poste dans les premiers
jours du mois prochain.
Notre ambassadeur, M. Desprez, re-
viendra en France dès que M. de Mont-
bel sera rentré à Rome.
Ischl, le petit bourg de la Haute-Au-
triche, que l'empereur François-Joseph
a choisi pour résidence d'été, deviendra
le rendez-vous des souverains.
L'empereur d'Allemagne doit s'y ren-
dre avant de unir sa cure à Gastein le
roi de Serbie y viendra probablement à
la même époque; enfin, le roi et la reine
de Grèce y sont attendus vers le 4 août
prochain.
Nous avons annoncé la maladie de S.
Exc. le prince OrloS, ambassadeur de
Russie à Paris.
Il y a huit jours, le prince Orloff, à
peine de retour des cérémonies de fané-
railles de sa belle-mère, la princesse
Troubetzkoï, a été atteint de douleurs
hépathiques des plus violentes, lesquel-
les sont arrivées aujourd'hui à leur
point le plus aigu. Trois médecins, ave:
îe docteur Guéneau de Mussy, soignent
l'illustre .malade, qui a passé une très
mauvaise nuit hier; la journée a été
un peu meilleure. Le prince, sauf de lé-
gers bouillons, ne prend aucune espèce
de nourriture, et toute préoccupation ou
tout travail lui est formellement in-
terdit.
Depuis hier que ,la nouvelle s'est
plus particulièrement répandue, on va
s'inscrire chez le prince, à l'Ambassade,
où se sont successivement présentés
Mlle Dosne, la princesse A. de Galitzine,
M. R. de Murait, le général comte
Fleury, le Nonce apostolique, M. Dau-
brée, de l'Institut M. de Poggenpoll, le
comte de Wimpiïen, M. Boucher-Ca-
dart, sénateur, etc.
M. Bonnat vient d'arriver à Vienne,
où il doit prendre part aux délibéra-
tions du jury international chargé de
l'examen des peintures figurant à l'Ex-
position universelle des beaux-arts.
Deux journaux du soir ont annoncé
que le trésorier-payeur des Alpes-Ma-
ritimes, M. Gauthier de Rigny, avait
quitté Nice sans laisser trace de la des-
tination de son voyage.
Nos confrères ont été même plus loin,
nous ne parlons pas du voyage sup-
posé, –ils ont ajouté que la cause de
cette fugue intempestive était la consta-
tation d'un déûcit de plus d'un mil-
lion et demi dans la caisse du dépar-
tement.
Un de nos collaborateurs est allé aux
informations et a vu M. Pallain. Il est ré-
sulté de leur entrevue le renseignement
suivant c'est que le trésorier général
n'est pas en fuite; il n'est pas arrêté
mais que malheureusement, après
quelques plaintes qui sont arrivées au
ministère, l'inspecteur des finances a
constaté un gros déficit dans la caisse
de l'administrateur mis en cause.
M. Gambetta est rentré hier à Paris,
par le rapide de dix heures.
L'ancien président du conseil avait
arrêté de prolonger son séjour à Nice
jusqu'à mercredi matin mais, sur un
télégramme de M. Ranc, il a brusqué
son départ.
M. Gambetta, parti de Nice à huit
heures du matin, a dîné à Marseille, en
compagnie de M. Liouville, député.
Ensuite il est monté dans un coupé-.
lit de P.-L.-M., d'où il n'est descendu
qu'à Paris.
Sur le quai de la gare de Lyon, M.
Gambetta et M. Jacquin, premier député
de la nation française à Alexandrie, ont
été présentés ~un à l'autre. Ces deux
messieurs ont pris rendez-vous pour un
jour très prochain.
Nous avons reçu hier, dans la jour-
née, le télégramme suivant de notre
correspondant particulier
Bruxelles, 26 juillet.
"La rencontre qui devait avoir lieu ce
matin, à la frontière hollandaise, entre
M. Aurélien Scholl et le baron Harden-
Hickey, n'a pu avoir lieu. A deux repri-
ses différentes la rencontre a été empê-
chée par l'intervention de la gendarme-
rie belge d'abord, puis par celle de la
police hollandaise.
NOUVELLES A LA MAIN
Un esprit fort de village disait un
jour à son curé
Moi, d'abord, je ne crois pas aux
miracles. Du reste, je ne sais même pas
ce que c'est.
Ah répond le curé. Et veux-tu le
savoir ?
–Oui.
Eh bien, retourne-toi 1
Le paysan se retourne, et le curé,
après lui avoir envoyé un maître coup
de pied au bas du dos
L'as-tu senti ?
Oh que oui, que je l'ai senti. Eh
ben?
Eh bien, mon garçon, si tu ne l'a-
vais pas senti. ça serait un miracle!
Un pochard, voyant sur un journal
une nomination de commandeur dans la
Légion d'honneur
Et dire que le père Noé n'était seu-
lement pas chevalier).dit-il en haus-
sant les épaules.
MM OOmtNf
ET L'ANGLETERRE?
Nous le déclarons sans barguigner,
nous ne sommes point partisan de l'ex-
pédition d'Egypte, telle que l'entend le
gouvernement, de cet envoi de patrouille
impuissante, de cette occupation sans in-
tervention, comme l'appelle en son pa-
thos et en son ithos, M. de Freycinet. Si
l'on se décidait à une action, nous la
voudrions forte, énergique, efficace, dé-
cisive, comme il convient à un grand
pays qui jette son épée dans le plateau où
il lui plaît que penchent les événements.
Encore pour que nous accordions notre
confiance à cette politique, serait-il né-
cessaire qu'au préalable l'on nous dé-
montrât qu'elle est utile au pays.
Hier, le gouvernement a donné un
spectacle lamentable. M. de Freycinet a
laissé voir qu'il ne demandait les cré-
dits que pour ne pas les obtenir. Sa du-
plicité, son irrésolution, ont éclaté à
tous les yeux. On lira plus loin les débats
et les votes de la commission. Ce double
jeu est percé à jour. On cherche en vain à
pénétrer les mystères de cette politique:
il n'y a qu'ignorance, que sottise, que
fourberie, que faiblesse. Aussi la com-
mission a-t-elle refusé les crédits. Que
fera la Chambre ? Que fera le Sénat? 2
Mais dans toute cette affaire, il y a un
tiers qu'on paraît oublier. Le gouver-
nement nous a annoncé qu'il avait con-
clu un traité avec l'Angleterre. Ce
traité résulte-t-il d'un échange d'expli-
cations, ou d'un instrument authen-
tique ? Peu nous importe. Pour nous,
écrite ou verbale, la parole de la France
est sacrée, elle nous engage, elle nous
lie. Qu'on l'ait donnée légèrement, nous
n'en doutons point. Si l'on jugeait le
gouvernement d'après sa conscience des
choses, certes il serait irresponsable, car
il est de ceux dont on dit qu'ils ne sa-
vent pas ce qu'ils font.
Depuis plus de trois ans, depuis que
l'avènement de M. Grévy laisse la ré-
publique nous inonder de ses lumières,
l'Angleterre a cuisiné l'agitation de
l'Egypte. Pendant son passage aux
affaires, M. Gambetta n'a cessé de pres-
ser les Anglais d'intervenir, à la vérité
avec notre concours. M. Gambetta, lui
aussi, ignorait ces menées souterrai-
nes. Mais les Anglais, sollicités, chauf-
fes, n'ont pas su résister, n'est-ce pas t
ils sont intervenus, sans nous, puisqu'a-
près avoir pris les devants, en étour-
neaux, nous nous sommes replies en
arrière comme des oiseaux de basse-
cour.
EnRn, si nous avons des engagements
avec l'Angleterre, de quelle nature sont
ces engagements? Sont-ils subordonnés
au vote ou au rejet des crédits ? Si M. de
Freycinet n'a pas pris cette précaution,
et cela ne nous surprendrait point, quelle
va être notre situation vis-à-vis de l'An-
gleterre, au cas, vraisemblable, proba-
ble, où la Chambre et le Sénat adopte-
raient les conclusions de la commission ?
Négligeons le parti que prendra le
gouvernement. M. de Freycinet don-
nera-t-il sa démission? Quoi qu'il en
soit, sur quel pied serons-nous avec
l'Angleterre ? Il n'est pas douteux
qu'elle n'ambitionne de tirer de son
expédition, de son occupation en
Egypte, tout le fruit possible. Mais si,
non contente d'établir son empire en
Egypte, poussée, comme elle a été l'hi-*
ver dernier, par M. Gambetta, mais cette
fois par quelqu'un de moins folâtre, M.
de Bismarck, par exemple, elle nous
suscite une querelle sur la non-exécu-
tion de nos engagements, et rien ne se-
rait plus facile que de faire naître une
complication de ce genre, en quel équi-
page nous trouverions-nous ?
Si nous posons cette hypothèse, c'est
que le caractère du dernier voyage à
Paris de M. Goschen et du chef d'état-
major anglais, ne nous est pas expliqué
c'est qu'il y a six semaines, des craintes
de désaccord, de rupture, de connit, di-
sons le mot, de guerre, ont agité les
cercles politiques; c'est qu'à l'heure qu'il
est, le ministère est en pleine crise,
devant cette même menace. Ces Hanlon-
Lee, qui connaissent si bien la mesure
de tous les pieds d'Europe, n'ont oublié
qu'une chose, c'est de se demander ce
que penserait le peuple anglais, dont le
Parlement accueille déjà les plaintes 1
mms TESTE.
tA PMMti'R!i' A RAVBft!TH
LA iKMiiMuh A Mïtu'~iH
DE NOTRE CORRESPONDANT SPÉCIAL
B&yreuth, 26 juillet, 4 h. 15.
Je suis arrivé à Bayreuth, où j'ai
trouvé toutes les têtes à l'envers. La.
représentation de -Pays~y~, de Richard
Wagner, amène dans cette petite ville
de province une telle affluence qu'on ne
sait plus où l'on en est. On voit des gens
de tous les pays, des musiciens et des
critiques de toutes les nuances, accou-
rus pour la grande solennité. On a bien
de la peine à se loger. Comment fera.-
t-on demain et les jours suivants.quand
les trains auront déversé les innombra-
bles étrangers qui se font annoncer 9
Beaucoup de personnes se sont inscrites
pour plusieurs représentations. Le théâ-
tre, qui ne renferme que douze cents
places environ, réserve des déceptions
à bien du monde. La plupart des places
sont retenues depuis très longtemps et
quelques-unes depuis plusieurs années.
L'Amérique est représentée par deux
reporters. Les Parisiens et les Français
sont en nombre. Je ne vous parle pas
des Belges, des Hollandais, des Italiens.
Nous sommes en plein cosmopolitisme.
On a répété l'œuvre avec un soin mi-
nutieux. M. Hermann-Lévy, maître de
chapelle du théâtre royal de Munich,
dirige l'orchestre. C'est le maître lui-
même qui a présidé aux répétitions,
secondé par l'éminent capellmeister et
par M. Joseph Rubinstein, auquel on
doit la réduction pour piano et chant
de la partition.
Les représentations commenceront à
quatre heures précises. Chaque entr'acte
durera une heure, et, vers dix heures,
tout sera fini.
Le duc de Mecklembourg et presque
tous les princes allemands assisteront
à la première. En revanche, on assure
que le roi de Bavière ne viendra pas.
Son absence n'étonnera personne.
MEMOR
NOUVELLES ET DEPECHES
f~rutce ~M~apA~Me ~M GAULOIS)
Londres, 26 juillet, 7 h.
Clôture meilleure sur article du r~HM
et sur le bruit qu'Arabi cherche à négocier
sa soumission.
Consolidés, 99 65 Egyptien, 48 65 pa-
rité, 244 40; Turc, 10 62: parité, 1080; Ban-
que ottomane, 17 65 parité, 694.
Berlin, 26 juillet.
On s'entretient beaucoup, dans les cer-
cles politiques de Berlin, d'une dépêche
que M. de Bismarck aurait adressée à M.
de Freycinet au sujet des araires d'Egypte,
de l'alliance franco-anglaise, des rapports
de l'Allemagne avec l'Angleterre.
On la dit conçue en termes si ambigus
qu'on se demande ce qu'elle signiSe et
qu'on la croit grosse de menaces.
Londres, 26 juillet.
M. Goldsmid, contrôleur de la Daïra Sa-
nieb, a déclaré que les fonds nécessaires
au paiement intégral du coupon échéant le
15 octobre prochain étaient déposés à la
Banque d'Angleterre.
Il en est de même pour le coupon de la
dette privilégiée (chemins de fer), et les
sommes en caisse affectées à l'Uninée re-
présentent déjà. 11/4 0/0 d'intérêt pour le
semestre échéant le 1" novembre pro-
chain.
Constantinople, 26 juillet.
Les préparatifs militaires turcs sont très
avancés.
Dervisch-Pacha a été désigné pour pren-
dre.le commandement du corps'expédition-
naire envoyé en Egypte.
Alexandrie, 26 juillet.
Deux incendiaires ont été fusillés.
Toutes les décisions des autorités an-
glaises sont prises au nom du Khédive.
Le général Alison s'attend à une pro-
chaine attaque des troupes de Toulba Pa-
cha, Le camp de Ramieh est très fortifié
et ses feux se croisent avec ceux des cui-
rassés ~M/~a~Meet ~MMa~, mouillés sur la
côte. Ramleh est défendu par 1,600 soldats
d'infanterie de marine.
Les mollahs et les derviches prêchent la
guerre sainte jusqu'aux portes d'Alexan-
drie. ·
La crue du Nil est très avancée. Elle
promet d'être très forte.
Ali-Pacha, Moubarck et Ahmet-Pacha-
Nachaat retournent demain au Caire par
la voie d'Ismailia. A leur arrivée, ils con-
voqueront le grand conseil, qu'ils éclaire-
ront sur les accusations portées par AraM
contre le Khédive.
PETITS POEMES PARISIENS
o
t
D'où vient-elle ? Je l'ignore. Est-elle
mariée ou demoiselle, grande dame ou
aventurière? Qui le sait Elle ne connaît
personne, et personne ne la connaît. Un
soir, je l'ai entendue qui parlait. Elle aix
voix chantante des Russes. Est-elle Russe?
Peut-être bien. Et puis? Et puis elle est
blonde, jeune, élégante et jolie. Son teint
est mat, son œil bleu pâle, sa taille mince.
Point excentrique, d'ailleurs, en ses toi-
lettes. Une petite capote, où danse une
plume rose, une robe sombre, le plus sou-
vent noire, avec des dentelles, et peu de
bijoux. Et puis? Et puis, elle arrive, tous
les soirs, et toujours seule, à sept heures
et demie. Sa place est retenue, sur la ter-
rasse des Ambassadeurs, au premier rang,
contre la balustrade. A son entrée, les
garçons s'empressent, respectueusement.
Le maître d'hôtel, la serviette sous lebras~
s'avance avec son plus engageant sourire,
et la salue, très bas. Elle, s'étant assise,
lentement, remonte sa voilette sur le front,
enlève ses gants qu'elle pose à droite,
après les avoir étilé.s sur la nappe, et les
coudes appuyés à la table, ses long doigts
réunis et croisés, elle écoute, recueillie,
l'homme en habit noir qui compose le
menu.
Les dîneurs déjà installés s'interrompent
pour regarder l'étrangère. Les femmes la
dévisagent, avec de grands yeux enrontés.
On chuchote. Toutes les attentions, toutes
les curiosités vont vers elle. Mais elle, très
à l'aise et simple, reste indiSerentë a- ce
qui l'entoure. Elle ne voit nin'entendrien.
On sent qu'elle n'est pas venue là ~our
se donner en spectacle, pour chercher une
aventure.
Quel vin madame prendra.-t-elle ? de*
mande le maître d'hôtel.
Mais toujours le même
En bas, les rangées de banquettes peu a
peu se garnissent. Les globes s'allument et
festonnent sous les branches des marron-
niers. On entend les violons qui s'accor-
dent, les éclats brusques d'un piston, le
ronflement d'une contrebasse, et la voix
aigre d'un marchand de programmes.
L'inconnue mange. Devant elle s'alignent
quatre bouteilles de vin iin, couchées
dans leur panier d'osier. Elle mange et
boit. Les plats dénient, les verres se vident.
Elle boit toujours. Tout près, une table oc-
cupée par des gommeux et des demoiselles
fait un bruit d'enfer. On accompagne avec
les couteaux le refrain d'une chanson-
nette qui se chante là-bas sur la scène,
flamboyante de lumières. On interpelle
les chanteurs; on reprend en chœur le
couplet à succès. Mais l'inconnue ne prend
pas garde au tapage. Elle mange, elle boit,
sans s'étonner, sans regarder, élégante et
calme, la joue à peine rosé, l'ceil à peine
brillant. Et tout à l'heure, la dernière bou-
teille vidée, elle s'en ira, droite et lente,
nullement troublée par ces yeux braqués
sur elle, avec un peu de rouge qui s'allume
au coin des tempes.
Je demande au maître d'hôtel
Savez-vous qui est cette femme ?
Non.'monsieur. Depuis un mois, tous
les soirs elle vient ici. Tous les soirs elle
boit ses quatre bouteilles de vin. Personne
ne l'accompagne, personne ne la connaît.
Elle dépense cent cinquante francs à son
repas, quelquefois plus, jamais moins.
Bien étrange, allez. Des fois, ces messieurs
ont voulu lui parler. Elle ne les regarde
seulement pas, et ne répond rien. C'est
égal jamais je n'ai vu boire comme ça.
Depuis quelques jours, l'étrangère a dis-
paru, emportant son mystère avec elle.
Est-ce une excentrique, est-ce une malheu-
reuse ? 0 femmes 1 qui plongera jamais au
fond de vos cœurs et de vos cerveaux?
e*noEt))tc
,ï
LA CRISE
ET LA COMMtSStOM BES CREDITS
La commission des crédits égyptiens
a tenu hier deux séances: l'une à neuf
heures et demie, l'autre a trois heures.
<~e Matin
Le matin, elle a entendu les ministres
et spécialement M. de Freycinet, qui a.
reproduit sous divers aspects cette for-
mule occMpaMoM sans M~er~e~ïo~.
Il a dit que la convention intervenue
entre l'Angleterre et la France ne visait
qu'à la protection du canal < purement
et simplement qu'une puissance com-
me la France ne devait pas se désinté-
resser de ce qui se passe sur les bords
de la Méditerranée, etc., etc.; il a re-
fusé, sous prétexte de raison d'Etat, de
communiquer les documents diploma-
tiques que lui demandait la commis-
sion.
Le ministre de la guerre est intervenu
et a assuré la commission que les crédits
demandés étaient suffisants pour l'expé-
dition ~M)M~pas si l'on voulait intervenir efficace-
ment, etc.
Dans tout cela, rien de net, rien de
franc le président du conseil se déro-
bait à toutes les question les efforts et
l'habileté de M. Ribot lui-même n'ont
rien pu en tirer.
On lui a demandé s'il poserait la ques-
tion de cabinet; il a esquivé la réponse
et s'est borné à cette phrase vague
< qu'il prendrait conseil des circons-
tances
En présence de cette attitude ëquivo.
que, on s'est demandé si, au fond., les
ministres ne sollicitaient pas les crédits
avec l'arriëre-pensée de se les faire re-
fuser on en a été bien vite convaincu
et l'on a fait comprendre fort durement
au président du conseil qu'on pénétrait
son plan. C'est dans ces dispositions ai*
guës qu'on s'est séparé,
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 82.55%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 82.55%.
- Collections numériques similaires Nadar Nadar /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Nadar" or dc.contributor adj "Nadar")Albums d'autographes et de dessins de personnalités photographiées par Félix et Paul Nadar. XIXe-XXe s. III Année 1879, n° 3. /ark:/12148/btv1b10883051w.highres Albums d'autographes et de dessins de personnalités photographiées par Félix et Paul Nadar. XIXe-XXe s. II Année 1879, n° 2. /ark:/12148/btv1b108830475.highresNadar Paul Nadar Paul /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Nadar Paul" or dc.contributor adj "Nadar Paul") Nadar Félix Tournachon dit Nadar Félix Tournachon dit /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Nadar Félix Tournachon dit" or dc.contributor adj "Nadar Félix Tournachon dit") Duruof Jules Dufour dit Duruof Jules Dufour dit /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Duruof Jules Dufour dit" or dc.contributor adj "Duruof Jules Dufour dit")
- Auteurs similaires Nadar Nadar /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Nadar" or dc.contributor adj "Nadar")Albums d'autographes et de dessins de personnalités photographiées par Félix et Paul Nadar. XIXe-XXe s. III Année 1879, n° 3. /ark:/12148/btv1b10883051w.highres Albums d'autographes et de dessins de personnalités photographiées par Félix et Paul Nadar. XIXe-XXe s. II Année 1879, n° 2. /ark:/12148/btv1b108830475.highresNadar Paul Nadar Paul /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Nadar Paul" or dc.contributor adj "Nadar Paul") Nadar Félix Tournachon dit Nadar Félix Tournachon dit /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Nadar Félix Tournachon dit" or dc.contributor adj "Nadar Félix Tournachon dit") Duruof Jules Dufour dit Duruof Jules Dufour dit /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Duruof Jules Dufour dit" or dc.contributor adj "Duruof Jules Dufour dit")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k524312m/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k524312m/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k524312m/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k524312m/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k524312m
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k524312m
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k524312m/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest