Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1888-01-10
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 10 janvier 1888 10 janvier 1888
Description : 1888/01/10 (A22,N7916). 1888/01/10 (A22,N7916).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4723961r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 31/12/2017
LA PETITE PRESSE
J ■•"■ ' "' <'-' Jl •' 'V': - •" ^
,. Le Numéro 5 centimes , «
1
1- «JOURWIVTJ CONSERVATEUR QUOTIDIEN
Le Numéro 5 centimes
'
ABONNEMENTS ;
Trois mois Six raols Un il '
Paris et Départements... I . 6 îr. 10 fr. 18 fr.
Bureaux : 13, quai Voltaire, - à Paris. ^
■ - -.T. ; , .CÏ —? '
VnGT-DÊlXIÈJlE ANNÉE, - Numéro 7916. - MARDI 10 JANVIER 1888. - Saint Agathon
Les Annonces sont reçues
Chez MM. L. AUDBOURG et Cie, 10, plaoe do la Bonrs. y
Et dans les Bureaux du Journal. ,
Désirant que là- PET1TIÇ PRFSSS re-
trouve auprès du public, la faveur qu'elle
s'était acquise autrefois par le choix de
ses feuilletons, nous nous sommes adressés
à un écrivain de grand talent, M. Alexan-
dre L ACOSTE, qui, à notre demaïide,
a écrit spécialement pour nous
L'ffiere de Saiig j
Grand roman qui renferme les péripéties
les plus émouvantes, empruntées a la vie
réelle et dont tous les détails sont étudiés
d'après nature, f ^ ;
L'ouvre de Sanrr
■iV "{' V O ;
reproduit, dans un de ses, épisodes les
plus dramatique^ les circonstances, d':un
crime qui a fortement ému l:opinLon et
dont le mobile est jusqu'ici demeuré un
rnystère. 1 •• ** **: - •**>• - ;
- ' — 'f ?
Nous commencerons, le 16; JANVIER
PROCHAIN, la publication de
L Dg
Depuis le 1er QCtobre, M. Ferdinand
Duval, ancien préfet de la Seine, mem-
bre du Conseil municipal, de Paris et du
Conseil général de la Seine, a pris la direc-
tion politique de la PETITE PliÊSSB,
avec le concours de MM. Riant; Ga-
mard, ' LeroHe, Denys Cochin,
Aniedée Du l»aure, Deville, Despa-
tys, conseillers municipaux, Clioppin,
secrétaire général du Comité conserva-
teur du département de la Seine, Henri
Cochin, Froment Menrice, Pierre
de Witl, Edmond Villetard, G. de
la Barre. , e
M. Ernest Baudouin, l'édactezw en
clief. ' , "
Les Chevaliers du Dragon
Le nouvel an a été fertile en surprises ;
chose toute naturelle, du reste; les étren-
nes font moilié moins de plaisir quand on
s'y attend.
Nous avons eu le discours de M. le pre-
mier président Périvier conviant avec
grâce M. Carnot à regretter avec lui son
prédécesseur : quelque chose comme la
veuve menant son nouveau mari porter
des fleurs sur la tombe du défunt.»
Nous avons vu, au moment où la guerre
semblait inévitable, se produire dans les
relations internationales une détente qui
permet à nos soldats de n'avoir plus le
doigt sur celle de. leurs fusils. Cette accal-
mie est due à la preuve que des docu-
ments ont été falsifiés dans un pays où
l'on ne connaît pourtant M.' Wilson et M.
Grévy que de réputation.
Nous avons vu décorer des gens qiff n'a-
vaient point payé leur décoration, — pas
plus de leur mérite que de leur argent.
Mais ce qui a semblé à votre serviteur
le plus étonnant, le plus imprévu, ; ,C'est
d'apprendre que M. Poubelle, préfet de la
Seine, est décoré de l'ordre du Dratfoii de
l'Annanu -■ -- • - • --'".y0 i
Comment M. Poubelle ar-t-il apprivoisé
ce lézard oriental ? C'est ce que je n'ai pu
saisir d'une façon parfaite. Désirant me
rendre compte des mérites qui ont p\(.lu!
•* ~ •" - ,* - 'T. '.-r# j t
procurer cette -haute'..distinction,'je me
suis mis' en quête d'un' recueil dans le-
quel j'eusse chancel de trouver des ren-
seignements sur M. Poubelle. D'instinct,
j'étendaislamain vers le rayon de ma bi-
bliothèque contenant les Vies des hommes
illustres, de; Plutarque, mai» j'ai songé
tout de suite que c'était trop ancien; j'ai
pensé alors à la Galerie des hommes utiles,
mais il n'y a pas d'édition récente ; enfin,
je me suis rabattu sur le Dictionnaire des
contemporains. Pas de Poubelle dans mon
Vapereau, ni dans la première partie, ni
dans les suppléments. Le préfet de la
Seinq est un homme heureux, il n'a pas
d'histoire, — mais il paraît qu'il a des ti-
tres.
M. Poubelle, se serait il préparé à la
carrière administrative par quelque mys-
térieux voyage l'; dans "l'Extrême-Orient,
pendant lequel il aurait pu faire apprécier
ses capacités. S. M. le roi d'Annam au-
rait-il fait adopter dans son royaume le
système? imag4né par M. Poubelle pour
l'enlèvement des'malpropretés, — au re-
bours de la République française qui pa-
rait n'en avoir pas fait un usage ass-ez as-
sidu? ^ r 4 ,• -il;*- ^ C
- Serait-il simplement possible que le
souverain annamite, instruit de la belle
attitude qu'observe le préfet de la Seine
au Conseil municipal, eût voulu lui per-
mettre de léguer à ses. petits-enfants son
portrait de. charmeur de serpents, pres-
sant d'une main sur son cœur le Dragon
de l'Annam et caressant de l'autre l'Hydre
,de l'Anarchie? - "
" Comment léclaircir ce mystère? Si je
cherchais dans YAvewr du Tonkin, jour-
nal oriental qui contient cette étonnante
nouvelle, j'y trouverais . peut-être quel-
ques renseignements. Je connais juste-
ment un spéculateur abonné à cette pu-
blication.
Mais ! que vois je ! ils sont une armée
de promus; il y a desgrands officiers, des
commandeurs, des officiers, tout comme
chez nous, et parmi eux: des conseillers
d'Etat, des préfets, des sous-préfets, des
conseillers de préfecture, des employés de
ministère; tous fonctionnaires de l'Annam,
pensez-vous ? Non, monsieur, tous ces
nouveaux dignitaires sont des fonction-
naires français. Inutile de chercher plus
loin les titres de l'ingénieux Poubelle : il
a les mêmes que tous ces messieurs.
Allons ! voilà encore une décoration
qui se répand d'une façon immodérée. Ce
dragon-là se donne trop facilement pour
être un dragon de vertu.
Ah ! Monseigneur le Roi, puisqu'ainsi l'on vous
,1 nomme
ne comprenez-vous pas qu'en conférant
votre ordre royal à tout venant, vous lui
faîtes perdre son prix, et qu'il devient
une'bien faible et bien illusoire récom-
pense pour'ceux de vos sujets qui l'ont
réellement mérité ? Ne pensez-vous pas,
qu'au lieu de^ distribuer ainsi votre dra-
gon à desgens qui s'en font un hochet..
Mais j'entends le roi d'Annam m'inter-
rompre : « Pardon, monsieur ! vous allez
me comprendre : je donne le dragon pour
rien à tout le monde afin que personne
n'ait la tentation de l'acheter ! »
G. DE LA BARRE.
LA JOURNÉE
TEMPÉRATURE
Lever du soleil'à 7 h. 51 ; coucher à i heures 20.
Ce jour est en croissance d'une minute sur le
précédent. ' , .1. , , '.♦*««' iJ;¿.,,' •
Nouvelle lune le 13". ,. = '
1 La, hausso barométrique s'accentue sur l'ouest de
l'Europe, où les 'maxima'atteignent 780 mim. Dans
le nord la pression reste relativement basse, mais
la hausse va s'y propager.
L'amélioration que nous avons annoncée se pro-
duit, elle va continuer. -
A Paris, hier, belle journée.
Thermomètre, 6°. — Baromètre, 776 mIm.
NOUVELLES ET DÉPÊCHES
Mardi s'ouvre la session ordinaire de 1888.
L'ordre du jour du SSnat ne comporte
que le tirage au sort des bureaux et la fixa-
tion de l'ordre du jour. A la Chambre on
procédera au vote pour l'élection du président,
de quatre vice-présidents, de huit secrétaires
et de trois questeurs. On sait qu'un des ques-
teurs sortants, M. Margaine, vient d être élu
sénateur dans le département de la Marne.
On prête aux députés de la Gauche radi-
cale, l'intention de poser la candidature de
M. Goblet à l'une des vice-présidences de la
Chambre.
Nous avons dit que des réductions de peine
avaient été accordées par le Président de la
République aux condamnés de Montceau-
les-Mines. Ces réductions sont de quatre an-
nées en faveur de Hariot, condamné à dix
ans de travaux forcés ; de deux ans pour
Gueslaff, également condamné à dix ans de
travaux forcés et qui avait déjà été l'objet
d'une commutation en simple emprisonne-
ment; Jacob, dit Grandjean, condamné à
douze ans de travaux forcés, obtient une ré-
duction de deux ans. Pareille commutation
est prononcée en faveur de Serprix, con-
damné à huit ans de travaux forcés.
Le président et l'un des rapporteurs de la
commission d'enquête sur le trafic des déco-
rations se sont concertés samedi pour pré-
parer l'ordre des travaux de h commission qui
va reprendre très prochainement ses séances.
La reine Victoria a décidé de partir pro-
chainement pour Florence Elle s'arrêtera à
San Remo. pour voir sa fille, la princesse im-
périale d'Allemagne.
On mande de Berlin que l'empereur Guil-
laume est toujours très souffrant, mais que
les médecins ne croient pas, jusqu'ici, à un
danger immédiat.
On écrit de Cracovie à un journal de
Vienne que l'on prépare à Lublin les loge-
ments pour-une division de grenadiers. Cette
nouvelle, si elle se confirme, établirait que les
mouvements des troupes russes se rappro-
chant de la frontière de Pologne se continuent.
On annonce que le ministre dû la guerre en
Italie a pris des mesures disciplinaires contre
lesprinces Massimo del Drago et Malatesta,
.qui, quoique faisant partie de l'armée, étaient
présents à la réception de l'aristocratie ro-
maine par le Pape et à la remise d'une adresse
présentée au nom de cette aristocratie.
Le Shen-Pao annonce que les généraux Liu-
Yung-Fu (c'est le chef des Pavillons-Noirs
au Tonkin) et Fang-Yao, le pacificateur de
Hainan ont été reçus en audience par l'em-
pereur. Celui-ci se serait fait raconter par
Liu-Yung-Fu les principaux événements de
la campagne du Tonkin. Le Shih-Pao, de
Tien-Tsin, parlant de cette audience, dit que
le vieux chef de parlisans a été tellement
ému qu'il n'a pu proférer une parole ni ré-
pondre un seul mot aux questions du jeune
empereur.
Les journaux de Bang-Kok annoncent que
le général Phya-Suri-Sak^Montri, COAlman-
dant en chef du corps expéditionnaire dirige
sur Luang Prabang et de là à la frontière du
Tonkin, s'est mis en route, le 18 décembre,
avec les deux officiers français arrivés récem-
ment au Siam pour participer aux. travaux
de délimitation de la frontière entre le Siam
et l'Annam. Le gros de la colonne, 600 hom-
mes environ, a quitté Bang-Kok le surlen-
demain..
Un courrier de Borna, portant la date du
10 décembre, arrive du Congo. Il n'apporte
pas la moindre nouvelle de l'expédition de
Stanley. A Bomason croit que Stanley n'a pu
donner de ses nouvelles à l'E urope par le Congo,
les moyens de communication faisant défaut.
On pense que les premières nouvelles authen.
tiques ont plus de chances d'arriver par voie
de Zanzibar.
LES
ÉLECTIONS SÉNATORIALES
On sait que les conservateurs ont gugné,"
jeudi, dernier, deux ;départtJmentl!l, l'Ille-et-
Vilaine et la Mayenne.
Nous trouvons sur les causes quiont amené
le succès des conservateurs dans ce dernier
département des renseignements fort inté-
ressants dans la Gazette de Château-Goniier :
« Le vote de jeudi, dit notre confrère, est la
consécration du vote du 4 octobre 1885. Au-
jourd'hui, comme à cette époque, les élec-
teurs ne voulaient connaître du candidat que
sa nuance politique et ne se posaient qu'une
question : Est-il républicain? C'est-à-dire
est-il décidé à accepter, à ratifier tout ce qu'a
fait la République, au grand dommage des .
intérêts de la France? Si oui, nous n'ea vou-
lons pas. v
« Et c'est dans cet ordre d'idées que les
électeurs viennent de voter pour MM. Le
Breton et Dutreil, conservateurs, contre MM.
Denis et Lecomte, républicains. Ils ne vou-
laient pas de sénateurs républicains, parce
que la République ne fait pas les afraires du
pays, — parce qu'elle est devenue depuis dix
ans un gouvernement oppresseur et tyran-
nique. — parce qu'elle inquiète les cons-
ciences et menace les libertés les plus chères,
— parce qu'elle conduit le pays à deux abt-
rres, également dangereux, l'anarchie et la
vénalité. Nous constatons que le même senti-
ment s'est manifesté dans l'Ille-et-Vilaine et
dans la Nièvre.
« Dans ces départements, ce succès est dû
à une organisation vigilante des forces con
servatrices,— à un respect profond des volon-
tés du corps électoral, — à une propagande
active par la presse. Ceci est bien vrai, et nous
ne saurions trop recommander cet exemple à
nos amis, surtout à la veille des élections
municipales. Mais ce n'est point là la seule
raison de ce triomphe. Le motif déterminant,
c'est que dans notre région on est las d'un
régime qui etoutre les généreux sentiments
du .pays, et qu'on appelle de tous les vceux
un autre gouvernement. »
Notre confrère a raison. Si l'on examine
avec soin les votes des divers départements
où viennent d'avoir lieu'des élections sénato-
riales, on constate que les candidats conser-
vateurs qui ont réussi ou qui sont arrivés
très près du succès, sont ceux dont les décla-
rations étaient les plus nettes et dont les con-
victions monarchiq -ies étaient connues.
Si les conservateurs sont. depuis 1885 en re-
cul dans le Nord et le Pas-de-Calais, c'est qu'ils
ont dans ces départements une attitude indé-
cise, et une politique flottante qui oscille en-
Ire la monarchie et la république conserva-
trice. Les électeurs veulent aujourd'hui des
idées nettes et des déclarations précises. Ils
ne croient plus à la république conservatrice.
Ce n'est pas de ce côté qu'ils attendent le
1 .. 4
bailli
F. D.
L'INCIDENT DE FLORENCE
(NOUVEAUX RENSEIGNEMENTS)
Il est de plus en plus manifeste que les Ita-
liens mettent beaucoup de mauvaise grâce à
régler l'incident de la violation du consulat
français à Florence. Sur l'intervention per-
sonnelle du roi Humbert. M. Crispi a, dit on,
télégraphié à son représentant à Paris que le
juge de paix italien serait, non pas révoqué,
mais déplacé, en précisant que ce déplace-
ment aurait le caractère d'une disgrâce, mais
il paraît que c'est là toute la satisfaction
qu'on nous veut accorder. On raconte, en
effet, que l'ambassadeur français à Rome,
M. de Mouy, ayant demandé à M. Crispi do
reconnaître, avant toute discussion, l'acte de
violation commis sur le consulat de France,
M. Crispi refusa son adhésion, disant -que,
sans nier qu'il y ait eu une certaine bruta-
lité dans la visite du juge de paix au consulat,
la France devait constater que le juge de paix
était dans son droit et que le chancelier du
consulat ignorait les lois italiennes. Tout au
plus, disait M. Crispi, pourrait-on critiquer
la façon d'agir peut-êtr, un peu trop vigoureuse
du prêteur, lorsqu'il s'est trouvé en présence
du refus du chancelier du consulat de Franco
de laisser opérer la mise sous scellés.
On ajoute que la question a dû être sou..
mise hier au conseil du contentieux diplo-
matique et que le sénateur Canonico serait
chargé du rapport.
Les étrangers à Paris
Le Grand-Hôtel a hébergé, l'an passé»
vingt et un mille trois cent soixante quinze
étrangers.
Leur chiffre se décompose comme il
suit :
Anglais 7.905
Américains 2.573
Belges 2.317 '
Hollandais 1.174
Espagnols...... 808
Italiens 627
. Autrichiens : .* - 612 •**
Et le reste entre diverses nationalités
moins importantes. Cela fait une moyenne
de 58 voyageurs par jour.
Or, à côté du Grand-Hôtel il y a l'Hôtel
Continental, et une collection d'hôtels de
premier ordre, qui ne reçoivent que des
voyageurs riches. — Au dessous s'étagent
des hôtels de moindre marque qui n'en de-
bitent pas moins un nombre prodigieux
d'étrangers dans Paris. Qu'on y joigne les
maisons meublées, les pensions de famille,
les Boarding Houses et les Boarding
Schools qui ne se gênent plus pour étaler
leurs enseignes en langue saxonne, enfin le
contingent des maisons particulières, et l'on
n'exagérera rien en portant à 1,000 Ic
chiffre quotidien des apports de l'étranger
à la population de Paris. — En voilà trois
cent soixante cinq 1lulle par an.
La population de Paris s'évaluant à deux
millions deux cent mille habitants, c'eyr
donc un sixième de ce chiffre qui est fourni
par les étrangers.
Cela veut dire que, quotidiennement,
chacun de nous rencontre un étranger sur
six personnes qu'il croise dans la ru2. Si le
même calcul s'appliquait au temps, nous
dirions qu'un jour sur six, Paris appartient
aux étrangers, soit soixante jours, ou deux
mois, par an...
Et il est certain qu'au retour de la bella
saison, il y a tels moments où la surabon-,
dance des produits exotiques est telle
qu'on a la sensation de se croire transporté
dans un monde nouveau, dont la Francs
est aussi éloignée que possible.
Que l'on prenne, par exemple, au mois
de juin, un omnibus à la tête de ligne aux
barrières, — à certaines barrières,'veux-je
dire : Porte-Maillot, le Trône, Saints
Mandé. Tout de suite, on verra le lourd
véhicule pris d'assaut par les touristes des
. cinq parties du monde. Du côté de Vincen-
N° 8 — Feuilleton de la PETITE PRESSE
CLÉOPATRE
PAR
HENRY GRÉVILLE
IV
— Bah! le comte en a vu bien d'autres!
Et puis, qu'est-se que ça peut faire à âme
qui vive que le comte soit si parfaitement
laid, si complètement lidieule, puisqu'il est
d'ailleurs comblé d'honneurs et de richesses,
voire môme de vertus? ""V t an.-*."- '
Cléopâtre ne rougissait guère; elle pâli f, ce
qui était chez elle un signe de colère.^
— Vous n'été» pas prudent, monsieur Ka-
moutzine, vous vous faites des ennemis par
vofre propre faute, et puis vous vous étonnez
d'en avoir! Laissez ce vieillard en repos. e,
— Je le veux bien! répondit-il avec insou-
ciance. Mais vous conviendrez qu'il est fort
laid.
-, Il est brave, répliqua-t-elle' assez haut.
On s'était approché x. sournoisement,
par derrière, ear toutes les fois que''Ka.mout-
zine s'en prenait à quelqu'un, on comptait
sut du plaisir." La 'réponse de Cléopàlre fut
entendue par plusieurs. ai4î'ii4liiV;*; ' * '
,-r- Qui ça ? demandâ-t-ori. -
.$ — Le général comte Néoutof, répondit-elle
avec une sorte de bravade. \ ^ /
Le général comte n'intéressait personne, et
l'on ne s'en occupa plus. :
■■ Kamoutzine chercha* pendant un jour ou
deux quel motif pouvait avoir poussé la belle
,Çléopàtre à prendre si vivement le parti de
ca; vieux brave, ce, vétéran de province, si
rarement vu à Pétersbourg ; il ne trouva au-
lune raison plausible. Il se demanda alors
pourquoi le général était venu, lui qui, depuis
plusieurs années, n'avait point quitte ses su-
parbes domaines du gouvernement de Tver.
La réponse était toute prête. Le grand-duc
Boris avait prié son vieil ami, le compagnon
d'armes d'Alexandre Ier, de venir le voir. Un
peu de! politique extérieure se mêlait sans
doute à cette faveur signalée,'mais la politi-
que extérieure n'intéressait pas Kamout
zine. Après avoir médité quelque peu, il
donna sa langue au chat et conclut pape cet
aphorisme : Les femmes n'ont'pas besoin d'a-
voir de motifs pour agir, - - -
V
*
.
~
Le grand carême durait toujours. Une ra. ¡
crudescence de froid imposait même à cette
période une apparence " rétrospective d'hiver
plus désolée et plus navrante. Le théâtî-e Mi-
chel seul donnait de temps en temps ,des ta-
bleaux vivant?, sorte de compromis ^avee les
éonsciences timorées. C'était du spectacle,
mais ce n'était pas de la comédie; les'per-
sonnes pieuses s'abstenaient,, les vieilles da-
mes surtout ; les hommes, au contraire, pri-
saient fort ce genre de divertissement qui
leur permettait d'admirer les jolies actrices,
'à un tout autre potnt de vue que celui de la
diction. " J ;
Ce goût était, d'ailleurs, fort avouable : le
grand-duc Boris venait subitement de pren-
dre sous sa protection les tableaux vivants ;
il daignait même en indiquer quelques-uns au
surintendant des théâtres impériaux, qui se
faisait un devoir de les exécuter de son
mieux ; et la vérité oblige à convenir que
nulle part. jamais on n'a vu de tableaux vi-
vants montés avec cette perfection artistique.
Pour amuser les yeux pendant soixante se-
condes, 11 n'était pas rare de voir dépenser
une semaine d'essais, de recherches, de tra-
vail même. Si le résultat obtenu était en réa-
lité peu important, puisque, la toile baissée,
il n'en restait rien, la chose en elle-même
était le plus souvent belle et grandiose, à
moins qu'elle ne fût élc'gante et gracieuse.
Du moment où le grand-duc Boris les pa-
tronnait, les tableaux vivants étaient le ren-
dez-vous à la mode. Mlle Bakhtof n'en man-
quait pas un ; on était sûr de la voir avec sa
tante dans une loge qu'elles avaient louée
pour ces représentations, au premier rang,
près de la scène à droite. Les amis venaient
leur y rendre visite pendant l es entr'actes
longs et nombreux, et Kamoutzine était un
des plus assidus. ^
Un soir, les entr'actes se prolongeaient
plus que d'habitude, et le grand-duc ne
paraissait pas prendre à son divertisse-
ment favori le plaisir accoutume ; il s'ap-
puya" à la paroi de la loge qu'il occupait
toujours: c'était une large et profonde bai-
gnoire d'avant-scène, précédée d'un salon.
Son binocle à la main, il se mit à passer en
revue la salle, où s'étageaient les diverses
classes de la société, presque aussi nettement
scandées que si on les avait coupées par tran-
ches .
Tout près de lui, les fauteuils d'orchestre,
occupés par les hommes en vue : officiers aux
costumes brillants, ou fonctionnaires civils en
habit noir ; au-dessus, les loges de premier
rang, le bel étage, comme on dit encore en
employant le mot français. Là, l'aristocratie
authentique, côté des femmes, car une dame
appartenant au grand monde ne pouvait
alors, sous quelque prétexte que ce fût, se
montrer aux fauteuils d'orchestre ; au second
rang de loges, les parvenues, les dames du
commerce français, qui se trouvaient là chez
elles ; plus haut, un peuple d'employés et de
coiffeurs parisiens. Somme toute, un public
mêlé, mais parfaitement dressé, qui s'amusait
ou s'ennuyait sans bruit, comme il convient
dans la bonne société.
La jumelle du grand-due redescendit
des hauteurs où l'avait dirigée la curiosité,
et, dans ce mouvement de retour, s'arrêta
sur la première loge du bel étage, presque en
fdce.
— Kamoutzine, dit-il à son aide de camp, as.
sis derrière lui à une distance respectueuse, qui
donc est là, dans cette loge? N'est-ce pas la
belle Cléopâtre ?
— C'est elle-même, Votre Altesse Impé-
riale.
L'œil du grand-duc alla chercher la loge de
la cour, vide et morne, vaste trou béant somp.
tueulement illuminé, qui n'avait guère d'au-
tre emploi, tout le long de l'année, que de
gêner prodigieusement les acteurs en scène,
— l'impératrice ne protégeant point le théâtre
Michel.
— Pourquoi n'est-elle pas dans la loge là-
bas ? Ce serait une charité que d'envoyer Ici
ces pauvres filles gratis, au lieu de leur faire
payer leur place !
Cette réflexion n'étant pas destinée à rece"
voir de réponse, Kamoutzine resta dans une
pose digne et respectueuse à la fois.
A su -vre j
J ■•"■ ' "' <'-' Jl •' 'V': - •" ^
,. Le Numéro 5 centimes , «
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1- «JOURWIVTJ CONSERVATEUR QUOTIDIEN
Le Numéro 5 centimes
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ABONNEMENTS ;
Trois mois Six raols Un il '
Paris et Départements... I . 6 îr. 10 fr. 18 fr.
Bureaux : 13, quai Voltaire, - à Paris. ^
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Chez MM. L. AUDBOURG et Cie, 10, plaoe do la Bonrs. y
Et dans les Bureaux du Journal. ,
Désirant que là- PET1TIÇ PRFSSS re-
trouve auprès du public, la faveur qu'elle
s'était acquise autrefois par le choix de
ses feuilletons, nous nous sommes adressés
à un écrivain de grand talent, M. Alexan-
dre L ACOSTE, qui, à notre demaïide,
a écrit spécialement pour nous
L'ffiere de Saiig j
Grand roman qui renferme les péripéties
les plus émouvantes, empruntées a la vie
réelle et dont tous les détails sont étudiés
d'après nature, f ^ ;
L'ouvre de Sanrr
■iV "{' V O ;
reproduit, dans un de ses, épisodes les
plus dramatique^ les circonstances, d':un
crime qui a fortement ému l:opinLon et
dont le mobile est jusqu'ici demeuré un
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Nous commencerons, le 16; JANVIER
PROCHAIN, la publication de
L Dg
Depuis le 1er QCtobre, M. Ferdinand
Duval, ancien préfet de la Seine, mem-
bre du Conseil municipal, de Paris et du
Conseil général de la Seine, a pris la direc-
tion politique de la PETITE PliÊSSB,
avec le concours de MM. Riant; Ga-
mard, ' LeroHe, Denys Cochin,
Aniedée Du l»aure, Deville, Despa-
tys, conseillers municipaux, Clioppin,
secrétaire général du Comité conserva-
teur du département de la Seine, Henri
Cochin, Froment Menrice, Pierre
de Witl, Edmond Villetard, G. de
la Barre. , e
M. Ernest Baudouin, l'édactezw en
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Les Chevaliers du Dragon
Le nouvel an a été fertile en surprises ;
chose toute naturelle, du reste; les étren-
nes font moilié moins de plaisir quand on
s'y attend.
Nous avons eu le discours de M. le pre-
mier président Périvier conviant avec
grâce M. Carnot à regretter avec lui son
prédécesseur : quelque chose comme la
veuve menant son nouveau mari porter
des fleurs sur la tombe du défunt.»
Nous avons vu, au moment où la guerre
semblait inévitable, se produire dans les
relations internationales une détente qui
permet à nos soldats de n'avoir plus le
doigt sur celle de. leurs fusils. Cette accal-
mie est due à la preuve que des docu-
ments ont été falsifiés dans un pays où
l'on ne connaît pourtant M.' Wilson et M.
Grévy que de réputation.
Nous avons vu décorer des gens qiff n'a-
vaient point payé leur décoration, — pas
plus de leur mérite que de leur argent.
Mais ce qui a semblé à votre serviteur
le plus étonnant, le plus imprévu, ; ,C'est
d'apprendre que M. Poubelle, préfet de la
Seine, est décoré de l'ordre du Dratfoii de
l'Annanu -■ -- • - • --'".y0 i
Comment M. Poubelle ar-t-il apprivoisé
ce lézard oriental ? C'est ce que je n'ai pu
saisir d'une façon parfaite. Désirant me
rendre compte des mérites qui ont p\(.lu!
•* ~ •" - ,* - 'T. '.-r# j t
procurer cette -haute'..distinction,'je me
suis mis' en quête d'un' recueil dans le-
quel j'eusse chancel de trouver des ren-
seignements sur M. Poubelle. D'instinct,
j'étendaislamain vers le rayon de ma bi-
bliothèque contenant les Vies des hommes
illustres, de; Plutarque, mai» j'ai songé
tout de suite que c'était trop ancien; j'ai
pensé alors à la Galerie des hommes utiles,
mais il n'y a pas d'édition récente ; enfin,
je me suis rabattu sur le Dictionnaire des
contemporains. Pas de Poubelle dans mon
Vapereau, ni dans la première partie, ni
dans les suppléments. Le préfet de la
Seinq est un homme heureux, il n'a pas
d'histoire, — mais il paraît qu'il a des ti-
tres.
M. Poubelle, se serait il préparé à la
carrière administrative par quelque mys-
térieux voyage l'; dans "l'Extrême-Orient,
pendant lequel il aurait pu faire apprécier
ses capacités. S. M. le roi d'Annam au-
rait-il fait adopter dans son royaume le
système? imag4né par M. Poubelle pour
l'enlèvement des'malpropretés, — au re-
bours de la République française qui pa-
rait n'en avoir pas fait un usage ass-ez as-
sidu? ^ r 4 ,• -il;*- ^ C
- Serait-il simplement possible que le
souverain annamite, instruit de la belle
attitude qu'observe le préfet de la Seine
au Conseil municipal, eût voulu lui per-
mettre de léguer à ses. petits-enfants son
portrait de. charmeur de serpents, pres-
sant d'une main sur son cœur le Dragon
de l'Annam et caressant de l'autre l'Hydre
,de l'Anarchie? - "
" Comment léclaircir ce mystère? Si je
cherchais dans YAvewr du Tonkin, jour-
nal oriental qui contient cette étonnante
nouvelle, j'y trouverais . peut-être quel-
ques renseignements. Je connais juste-
ment un spéculateur abonné à cette pu-
blication.
Mais ! que vois je ! ils sont une armée
de promus; il y a desgrands officiers, des
commandeurs, des officiers, tout comme
chez nous, et parmi eux: des conseillers
d'Etat, des préfets, des sous-préfets, des
conseillers de préfecture, des employés de
ministère; tous fonctionnaires de l'Annam,
pensez-vous ? Non, monsieur, tous ces
nouveaux dignitaires sont des fonction-
naires français. Inutile de chercher plus
loin les titres de l'ingénieux Poubelle : il
a les mêmes que tous ces messieurs.
Allons ! voilà encore une décoration
qui se répand d'une façon immodérée. Ce
dragon-là se donne trop facilement pour
être un dragon de vertu.
Ah ! Monseigneur le Roi, puisqu'ainsi l'on vous
,1 nomme
ne comprenez-vous pas qu'en conférant
votre ordre royal à tout venant, vous lui
faîtes perdre son prix, et qu'il devient
une'bien faible et bien illusoire récom-
pense pour'ceux de vos sujets qui l'ont
réellement mérité ? Ne pensez-vous pas,
qu'au lieu de^ distribuer ainsi votre dra-
gon à desgens qui s'en font un hochet..
Mais j'entends le roi d'Annam m'inter-
rompre : « Pardon, monsieur ! vous allez
me comprendre : je donne le dragon pour
rien à tout le monde afin que personne
n'ait la tentation de l'acheter ! »
G. DE LA BARRE.
LA JOURNÉE
TEMPÉRATURE
Lever du soleil'à 7 h. 51 ; coucher à i heures 20.
Ce jour est en croissance d'une minute sur le
précédent. ' , .1. , , '.♦*««' iJ;¿.,,' •
Nouvelle lune le 13". ,. = '
1 La, hausso barométrique s'accentue sur l'ouest de
l'Europe, où les 'maxima'atteignent 780 mim. Dans
le nord la pression reste relativement basse, mais
la hausse va s'y propager.
L'amélioration que nous avons annoncée se pro-
duit, elle va continuer. -
A Paris, hier, belle journée.
Thermomètre, 6°. — Baromètre, 776 mIm.
NOUVELLES ET DÉPÊCHES
Mardi s'ouvre la session ordinaire de 1888.
L'ordre du jour du SSnat ne comporte
que le tirage au sort des bureaux et la fixa-
tion de l'ordre du jour. A la Chambre on
procédera au vote pour l'élection du président,
de quatre vice-présidents, de huit secrétaires
et de trois questeurs. On sait qu'un des ques-
teurs sortants, M. Margaine, vient d être élu
sénateur dans le département de la Marne.
On prête aux députés de la Gauche radi-
cale, l'intention de poser la candidature de
M. Goblet à l'une des vice-présidences de la
Chambre.
Nous avons dit que des réductions de peine
avaient été accordées par le Président de la
République aux condamnés de Montceau-
les-Mines. Ces réductions sont de quatre an-
nées en faveur de Hariot, condamné à dix
ans de travaux forcés ; de deux ans pour
Gueslaff, également condamné à dix ans de
travaux forcés et qui avait déjà été l'objet
d'une commutation en simple emprisonne-
ment; Jacob, dit Grandjean, condamné à
douze ans de travaux forcés, obtient une ré-
duction de deux ans. Pareille commutation
est prononcée en faveur de Serprix, con-
damné à huit ans de travaux forcés.
Le président et l'un des rapporteurs de la
commission d'enquête sur le trafic des déco-
rations se sont concertés samedi pour pré-
parer l'ordre des travaux de h commission qui
va reprendre très prochainement ses séances.
La reine Victoria a décidé de partir pro-
chainement pour Florence Elle s'arrêtera à
San Remo. pour voir sa fille, la princesse im-
périale d'Allemagne.
On mande de Berlin que l'empereur Guil-
laume est toujours très souffrant, mais que
les médecins ne croient pas, jusqu'ici, à un
danger immédiat.
On écrit de Cracovie à un journal de
Vienne que l'on prépare à Lublin les loge-
ments pour-une division de grenadiers. Cette
nouvelle, si elle se confirme, établirait que les
mouvements des troupes russes se rappro-
chant de la frontière de Pologne se continuent.
On annonce que le ministre dû la guerre en
Italie a pris des mesures disciplinaires contre
lesprinces Massimo del Drago et Malatesta,
.qui, quoique faisant partie de l'armée, étaient
présents à la réception de l'aristocratie ro-
maine par le Pape et à la remise d'une adresse
présentée au nom de cette aristocratie.
Le Shen-Pao annonce que les généraux Liu-
Yung-Fu (c'est le chef des Pavillons-Noirs
au Tonkin) et Fang-Yao, le pacificateur de
Hainan ont été reçus en audience par l'em-
pereur. Celui-ci se serait fait raconter par
Liu-Yung-Fu les principaux événements de
la campagne du Tonkin. Le Shih-Pao, de
Tien-Tsin, parlant de cette audience, dit que
le vieux chef de parlisans a été tellement
ému qu'il n'a pu proférer une parole ni ré-
pondre un seul mot aux questions du jeune
empereur.
Les journaux de Bang-Kok annoncent que
le général Phya-Suri-Sak^Montri, COAlman-
dant en chef du corps expéditionnaire dirige
sur Luang Prabang et de là à la frontière du
Tonkin, s'est mis en route, le 18 décembre,
avec les deux officiers français arrivés récem-
ment au Siam pour participer aux. travaux
de délimitation de la frontière entre le Siam
et l'Annam. Le gros de la colonne, 600 hom-
mes environ, a quitté Bang-Kok le surlen-
demain..
Un courrier de Borna, portant la date du
10 décembre, arrive du Congo. Il n'apporte
pas la moindre nouvelle de l'expédition de
Stanley. A Bomason croit que Stanley n'a pu
donner de ses nouvelles à l'E urope par le Congo,
les moyens de communication faisant défaut.
On pense que les premières nouvelles authen.
tiques ont plus de chances d'arriver par voie
de Zanzibar.
LES
ÉLECTIONS SÉNATORIALES
On sait que les conservateurs ont gugné,"
jeudi, dernier, deux ;départtJmentl!l, l'Ille-et-
Vilaine et la Mayenne.
Nous trouvons sur les causes quiont amené
le succès des conservateurs dans ce dernier
département des renseignements fort inté-
ressants dans la Gazette de Château-Goniier :
« Le vote de jeudi, dit notre confrère, est la
consécration du vote du 4 octobre 1885. Au-
jourd'hui, comme à cette époque, les élec-
teurs ne voulaient connaître du candidat que
sa nuance politique et ne se posaient qu'une
question : Est-il républicain? C'est-à-dire
est-il décidé à accepter, à ratifier tout ce qu'a
fait la République, au grand dommage des .
intérêts de la France? Si oui, nous n'ea vou-
lons pas. v
« Et c'est dans cet ordre d'idées que les
électeurs viennent de voter pour MM. Le
Breton et Dutreil, conservateurs, contre MM.
Denis et Lecomte, républicains. Ils ne vou-
laient pas de sénateurs républicains, parce
que la République ne fait pas les afraires du
pays, — parce qu'elle est devenue depuis dix
ans un gouvernement oppresseur et tyran-
nique. — parce qu'elle inquiète les cons-
ciences et menace les libertés les plus chères,
— parce qu'elle conduit le pays à deux abt-
rres, également dangereux, l'anarchie et la
vénalité. Nous constatons que le même senti-
ment s'est manifesté dans l'Ille-et-Vilaine et
dans la Nièvre.
« Dans ces départements, ce succès est dû
à une organisation vigilante des forces con
servatrices,— à un respect profond des volon-
tés du corps électoral, — à une propagande
active par la presse. Ceci est bien vrai, et nous
ne saurions trop recommander cet exemple à
nos amis, surtout à la veille des élections
municipales. Mais ce n'est point là la seule
raison de ce triomphe. Le motif déterminant,
c'est que dans notre région on est las d'un
régime qui etoutre les généreux sentiments
du .pays, et qu'on appelle de tous les vceux
un autre gouvernement. »
Notre confrère a raison. Si l'on examine
avec soin les votes des divers départements
où viennent d'avoir lieu'des élections sénato-
riales, on constate que les candidats conser-
vateurs qui ont réussi ou qui sont arrivés
très près du succès, sont ceux dont les décla-
rations étaient les plus nettes et dont les con-
victions monarchiq -ies étaient connues.
Si les conservateurs sont. depuis 1885 en re-
cul dans le Nord et le Pas-de-Calais, c'est qu'ils
ont dans ces départements une attitude indé-
cise, et une politique flottante qui oscille en-
Ire la monarchie et la république conserva-
trice. Les électeurs veulent aujourd'hui des
idées nettes et des déclarations précises. Ils
ne croient plus à la république conservatrice.
Ce n'est pas de ce côté qu'ils attendent le
1 .. 4
bailli
F. D.
L'INCIDENT DE FLORENCE
(NOUVEAUX RENSEIGNEMENTS)
Il est de plus en plus manifeste que les Ita-
liens mettent beaucoup de mauvaise grâce à
régler l'incident de la violation du consulat
français à Florence. Sur l'intervention per-
sonnelle du roi Humbert. M. Crispi a, dit on,
télégraphié à son représentant à Paris que le
juge de paix italien serait, non pas révoqué,
mais déplacé, en précisant que ce déplace-
ment aurait le caractère d'une disgrâce, mais
il paraît que c'est là toute la satisfaction
qu'on nous veut accorder. On raconte, en
effet, que l'ambassadeur français à Rome,
M. de Mouy, ayant demandé à M. Crispi do
reconnaître, avant toute discussion, l'acte de
violation commis sur le consulat de France,
M. Crispi refusa son adhésion, disant -que,
sans nier qu'il y ait eu une certaine bruta-
lité dans la visite du juge de paix au consulat,
la France devait constater que le juge de paix
était dans son droit et que le chancelier du
consulat ignorait les lois italiennes. Tout au
plus, disait M. Crispi, pourrait-on critiquer
la façon d'agir peut-êtr, un peu trop vigoureuse
du prêteur, lorsqu'il s'est trouvé en présence
du refus du chancelier du consulat de Franco
de laisser opérer la mise sous scellés.
On ajoute que la question a dû être sou..
mise hier au conseil du contentieux diplo-
matique et que le sénateur Canonico serait
chargé du rapport.
Les étrangers à Paris
Le Grand-Hôtel a hébergé, l'an passé»
vingt et un mille trois cent soixante quinze
étrangers.
Leur chiffre se décompose comme il
suit :
Anglais 7.905
Américains 2.573
Belges 2.317 '
Hollandais 1.174
Espagnols...... 808
Italiens 627
. Autrichiens : .* - 612 •**
Et le reste entre diverses nationalités
moins importantes. Cela fait une moyenne
de 58 voyageurs par jour.
Or, à côté du Grand-Hôtel il y a l'Hôtel
Continental, et une collection d'hôtels de
premier ordre, qui ne reçoivent que des
voyageurs riches. — Au dessous s'étagent
des hôtels de moindre marque qui n'en de-
bitent pas moins un nombre prodigieux
d'étrangers dans Paris. Qu'on y joigne les
maisons meublées, les pensions de famille,
les Boarding Houses et les Boarding
Schools qui ne se gênent plus pour étaler
leurs enseignes en langue saxonne, enfin le
contingent des maisons particulières, et l'on
n'exagérera rien en portant à 1,000 Ic
chiffre quotidien des apports de l'étranger
à la population de Paris. — En voilà trois
cent soixante cinq 1lulle par an.
La population de Paris s'évaluant à deux
millions deux cent mille habitants, c'eyr
donc un sixième de ce chiffre qui est fourni
par les étrangers.
Cela veut dire que, quotidiennement,
chacun de nous rencontre un étranger sur
six personnes qu'il croise dans la ru2. Si le
même calcul s'appliquait au temps, nous
dirions qu'un jour sur six, Paris appartient
aux étrangers, soit soixante jours, ou deux
mois, par an...
Et il est certain qu'au retour de la bella
saison, il y a tels moments où la surabon-,
dance des produits exotiques est telle
qu'on a la sensation de se croire transporté
dans un monde nouveau, dont la Francs
est aussi éloignée que possible.
Que l'on prenne, par exemple, au mois
de juin, un omnibus à la tête de ligne aux
barrières, — à certaines barrières,'veux-je
dire : Porte-Maillot, le Trône, Saints
Mandé. Tout de suite, on verra le lourd
véhicule pris d'assaut par les touristes des
. cinq parties du monde. Du côté de Vincen-
N° 8 — Feuilleton de la PETITE PRESSE
CLÉOPATRE
PAR
HENRY GRÉVILLE
IV
— Bah! le comte en a vu bien d'autres!
Et puis, qu'est-se que ça peut faire à âme
qui vive que le comte soit si parfaitement
laid, si complètement lidieule, puisqu'il est
d'ailleurs comblé d'honneurs et de richesses,
voire môme de vertus? ""V t an.-*."- '
Cléopâtre ne rougissait guère; elle pâli f, ce
qui était chez elle un signe de colère.^
— Vous n'été» pas prudent, monsieur Ka-
moutzine, vous vous faites des ennemis par
vofre propre faute, et puis vous vous étonnez
d'en avoir! Laissez ce vieillard en repos. e,
— Je le veux bien! répondit-il avec insou-
ciance. Mais vous conviendrez qu'il est fort
laid.
-, Il est brave, répliqua-t-elle' assez haut.
On s'était approché x. sournoisement,
par derrière, ear toutes les fois que''Ka.mout-
zine s'en prenait à quelqu'un, on comptait
sut du plaisir." La 'réponse de Cléopàlre fut
entendue par plusieurs. ai4î'ii4liiV;*; ' * '
,-r- Qui ça ? demandâ-t-ori. -
.$ — Le général comte Néoutof, répondit-elle
avec une sorte de bravade. \ ^ /
Le général comte n'intéressait personne, et
l'on ne s'en occupa plus. :
■■ Kamoutzine chercha* pendant un jour ou
deux quel motif pouvait avoir poussé la belle
,Çléopàtre à prendre si vivement le parti de
ca; vieux brave, ce, vétéran de province, si
rarement vu à Pétersbourg ; il ne trouva au-
lune raison plausible. Il se demanda alors
pourquoi le général était venu, lui qui, depuis
plusieurs années, n'avait point quitte ses su-
parbes domaines du gouvernement de Tver.
La réponse était toute prête. Le grand-duc
Boris avait prié son vieil ami, le compagnon
d'armes d'Alexandre Ier, de venir le voir. Un
peu de! politique extérieure se mêlait sans
doute à cette faveur signalée,'mais la politi-
que extérieure n'intéressait pas Kamout
zine. Après avoir médité quelque peu, il
donna sa langue au chat et conclut pape cet
aphorisme : Les femmes n'ont'pas besoin d'a-
voir de motifs pour agir, - - -
V
*
.
~
Le grand carême durait toujours. Une ra. ¡
crudescence de froid imposait même à cette
période une apparence " rétrospective d'hiver
plus désolée et plus navrante. Le théâtî-e Mi-
chel seul donnait de temps en temps ,des ta-
bleaux vivant?, sorte de compromis ^avee les
éonsciences timorées. C'était du spectacle,
mais ce n'était pas de la comédie; les'per-
sonnes pieuses s'abstenaient,, les vieilles da-
mes surtout ; les hommes, au contraire, pri-
saient fort ce genre de divertissement qui
leur permettait d'admirer les jolies actrices,
'à un tout autre potnt de vue que celui de la
diction. " J ;
Ce goût était, d'ailleurs, fort avouable : le
grand-duc Boris venait subitement de pren-
dre sous sa protection les tableaux vivants ;
il daignait même en indiquer quelques-uns au
surintendant des théâtres impériaux, qui se
faisait un devoir de les exécuter de son
mieux ; et la vérité oblige à convenir que
nulle part. jamais on n'a vu de tableaux vi-
vants montés avec cette perfection artistique.
Pour amuser les yeux pendant soixante se-
condes, 11 n'était pas rare de voir dépenser
une semaine d'essais, de recherches, de tra-
vail même. Si le résultat obtenu était en réa-
lité peu important, puisque, la toile baissée,
il n'en restait rien, la chose en elle-même
était le plus souvent belle et grandiose, à
moins qu'elle ne fût élc'gante et gracieuse.
Du moment où le grand-duc Boris les pa-
tronnait, les tableaux vivants étaient le ren-
dez-vous à la mode. Mlle Bakhtof n'en man-
quait pas un ; on était sûr de la voir avec sa
tante dans une loge qu'elles avaient louée
pour ces représentations, au premier rang,
près de la scène à droite. Les amis venaient
leur y rendre visite pendant l es entr'actes
longs et nombreux, et Kamoutzine était un
des plus assidus. ^
Un soir, les entr'actes se prolongeaient
plus que d'habitude, et le grand-duc ne
paraissait pas prendre à son divertisse-
ment favori le plaisir accoutume ; il s'ap-
puya" à la paroi de la loge qu'il occupait
toujours: c'était une large et profonde bai-
gnoire d'avant-scène, précédée d'un salon.
Son binocle à la main, il se mit à passer en
revue la salle, où s'étageaient les diverses
classes de la société, presque aussi nettement
scandées que si on les avait coupées par tran-
ches .
Tout près de lui, les fauteuils d'orchestre,
occupés par les hommes en vue : officiers aux
costumes brillants, ou fonctionnaires civils en
habit noir ; au-dessus, les loges de premier
rang, le bel étage, comme on dit encore en
employant le mot français. Là, l'aristocratie
authentique, côté des femmes, car une dame
appartenant au grand monde ne pouvait
alors, sous quelque prétexte que ce fût, se
montrer aux fauteuils d'orchestre ; au second
rang de loges, les parvenues, les dames du
commerce français, qui se trouvaient là chez
elles ; plus haut, un peuple d'employés et de
coiffeurs parisiens. Somme toute, un public
mêlé, mais parfaitement dressé, qui s'amusait
ou s'ennuyait sans bruit, comme il convient
dans la bonne société.
La jumelle du grand-due redescendit
des hauteurs où l'avait dirigée la curiosité,
et, dans ce mouvement de retour, s'arrêta
sur la première loge du bel étage, presque en
fdce.
— Kamoutzine, dit-il à son aide de camp, as.
sis derrière lui à une distance respectueuse, qui
donc est là, dans cette loge? N'est-ce pas la
belle Cléopâtre ?
— C'est elle-même, Votre Altesse Impé-
riale.
L'œil du grand-duc alla chercher la loge de
la cour, vide et morne, vaste trou béant somp.
tueulement illuminé, qui n'avait guère d'au-
tre emploi, tout le long de l'année, que de
gêner prodigieusement les acteurs en scène,
— l'impératrice ne protégeant point le théâtre
Michel.
— Pourquoi n'est-elle pas dans la loge là-
bas ? Ce serait une charité que d'envoyer Ici
ces pauvres filles gratis, au lieu de leur faire
payer leur place !
Cette réflexion n'étant pas destinée à rece"
voir de réponse, Kamoutzine resta dans une
pose digne et respectueuse à la fois.
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