Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-07-19
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 19 juillet 1868 19 juillet 1868
Description : 1868/07/19 (A3,N822). 1868/07/19 (A3,N822).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k47178243
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
LA PETITE PRESSE
S ccal. le niiacio ', ~ 1
.. ~~ 1 ~ JOURNAL ÇXîOTinïEIV - ..
' *
j ' •1-'" - 5 ' - ~ f 1 ;'r = 1 ■ -
i ~ 1 - ~ : ; ^ 5 ~ eeni. , le i . m~qw
! , 1 ):~ il ' ~ 1 ; ' ' > 1 ■ . -.
ABONNEMENTS. — Trois ipois., Six mois. Un an.
P.ins .u,. ' à fr. ' , 9 ft. : 18. fr.
Départe in- € ; 1 t. ' 89
A 'niinû'satci.ir ; E. DËLSAUX.,.,
1
3m année. — DIMANCHE 49 JUILLET ' 1868. —s%%
: i
"■ ■ ■ r1" ■ " ■ . 1 „
Lw ; iKjreptwr-Propriétaire : JAHX*Jïr....\
ïltïaçicleur ea chjf • A. BA LA T H J. Ç N-*$A &'
Bu N EA 6 X -D'AÉ o N H E M K HT : M#' *
; - ■ ADMINISTRATION •. LA, plaça Brada.- jt ■ ,
PARIS, 18 JUILLET 1868
NOTES DE VOYAGE
LYON EN 1868
J'ai fait bien des fois cette remarque, que
' les observateurs les plus profonds étaient en
même temps les enthousiastes les plus naïfs.
Voyant le mal si fréquent et le bien si rare,
,qtiaiid ils rencontraient le bien,ils se mettaient
à genoux devant lui et ils avaient des extases
d'enfante...
De môme les Parisiens les plus épris de Pa-
ris, ceux qui regardent le plus souvent dans
ta rue et le moins souvent dans le ciel, sont
aus?i ceux qui suivent le plus volontiers les
Images. •
— Où va ce flocon blanc dans l'azur ? Oh
si je pouvais voyager comme lui ! Je verrais
au-dessous de moi des choses nouvelles, et le
terre à terre de ma vie journalière disparaî-
trait pour faire place à l'imprévu 1.;,.
Et l'on part.
Pour moi, c'est le vent du Nord,qui pousse
mon nuage, et je vais vers le Midi. Il y a deux
poésies : celle du brouillard, de la légende et
clu rêve; et celle du soleil, de l'histoire et de
Sa pensée. J'aime.à trouver la première dans
les livrès et la seconde sur les lieux.
Et c'est pourquoi, de loin en loin, trop
rarement au gré de mon désir, je vais prendre
un baia d'air et de lumière sur les coteaux
le la Saône gauloise ou du Rhône latin...
Jamais début de voyage ne fut plus heureux
î|iie l'a été le mien.
Je rencontre dans la gare deux de mes
aonfrères, je dois ajouter deux de mes amis,
car, par le temps qui court, il est nécessaire
de s'expliquer.
Adolphe Dupeuly, le populaire auteur des
Canotiers de la Seine, se rend il Saint-Etienne
pour affaires. S'agit-il d'armes ou de rubans ?
les lecteurs de la Petite Presse, le sauront
bientôt.
Henri de la Madelaine, pâle, les yeux en-
tourés d'un cercle maladif, va demander aux
eaux d'Aix, en Savoie, la guérisou d'un rhu-
matisme que le climat de la Provence n'a pu
que soulager.
Nous échangeons une poignée de main;
nous traversons la salle d'attente ; nous som-
mes sur le quai...
\ Un gentleman, à la casquette bordée d'un
. Ion d'or, s'approche de nous , salue, et
:
./ Messieurs, voulez-vous venir avec moi ?
je vais vous placer.
— Nous le suivons .jusqu'à la tète du
traia- Notre guide ouvre la portière d'un
wagon : , ; .
— Messieurs, je vous souhaite un bon
voyao-e. ' .
La portière se referme et le train part.
Nous sommes seuls dans^u compartiment
réservé. ' .j* " ,s
Notre surprise se change 'en joie. Quelle
bonne soirée nous allons passer ensemble !...
Comme, après avoir bien causé, nous pour-
rons bien dormir!... Quelle douceur pour
notre malade de s'étendre à,son aise, 'à l'abri
de regards étrangers!-... : ' r
Nous n'avions pas fini de bénir l'obligeant
inconnu, auquel nous devions tout cela,
qu'une détonation se fait entendre.
I Un feu d'artifice montait dans le ciel, éclai-
j rant les toits de la ville de Melun.
' Tirait-on aussi ce feu d'artifice pour nous?
1 A trois les suppositions vont plus vite que
le train...
j Nous étions en pleine féerie...
C'est pourquoi, afin de continuer le rêve,
nous nous endormîmes àMontereau... ,
* Certaines ^eflfi parcourent le monde avec
un parapluie dans la main droite et un Guide
1 du voyageur dans la main gauche.- Ils ne
voient que des monuments et des musées.
! D'autres, au contraire, cherchent à se ren-
dre. compte des mœurs, et d'autres des gens.
Ceux qui vont devant eux, au hasard, sans
autre préoccupation que celle de l'inconnu,
sont extrêmement rares.
! Je recommande Lyon à ces derniers.
1 Lyon est la ville qu'il faut voir en allant
! devant soi.
Alexandre Dumas, dans ses Impressions de
voyage, a regardé Lyon du sommet d'un des
plateaux qui entourent la ville, et il .a parlé
d'un amas de maisons sales et grises...
S'il était entré dans cet amas de maisons,
il se serait récrié à chaque pas.
i Nulle part, en eflet, le. touriste ne trouvera
■* ' ' .. , > w
«ne pareille variété d'aspects et. de physiono" :
jnies. - .. j ... - ;i
; Au bout de grandes rues, larges, 13roitèSi'
coupées par des squares et des fontaines,
comme la rue Impériale, on trouve des places
immenses, comme la place de Belledopr, en-
tourée d'hôtels classiques qui font un cadre à
la statue équestre, de Louis XIV en (iostume
^rpfnain. " .
> Au bout de petites rues étroites et pleines
4e coudes, comme la rue du Port-du-temple,
Se dresse brusquement une montagne, Four-
vières, dont les pentes raides sont couvertes
de parcs et de couvents. ; ;
1 On fait cinquante pas, on voit la Sa^ne. On
se retourne, on fait cent pas et l'oni voit le
Rhône. La ville s'étend dans la plaineidu côté
de l'Isère ; du côté de l'Ain,ses maisons esca-
ladent, les côtes et s'éparpillent sur Jes pla-
ttix, comme un troupeau à l'étroit dans la
î Vallée... -
. J'ai nommé la rue Impériale, C'est à la fois
Il boulevard des Italiens et la rue de Rivoli.
Ipéjeunoz au café Casati, vous croirez déjeu-
ner au café Riche.
La rue du Port-du-Temple s'appelait au-
trefois la rue Ecorche-Bœuf. Sans doute au
rez-de-chaussée de ses vieilles maisons noires,
l'es viandes saignantes s'étalaient derrière les
grilles. C'est là qu'aboutissaient l'abattoir et
la tuerie... •
Et l'on se représente les bouchers du
moyen âge en cape rouge, causant sur le
.
pas de leurs portes, en écoutant les bruits du
q-thi voisin... ——-
Depuis, des hôtels ont remplacé les bouche-
ries, Mais ces hôtels sont demeurés des hôtel-
leries. Ils ont des enseignes patriarcales. Sur
l'un on lit : A la Croix d'Or, et sur l'autre :
Au Cheval Noir... Il y a deux ans, j'ai logé
au Cheval Noir. J'avais été séduit par un ta-
bleau placé au-dessus de la porte et représen-
tant, non pas un cheval, mais deux dhevaux
attachés à un poteau, qui piaffaient eh se re-
gardant. Cette année, quand je suis arrivé,
on réparait la façade; le tableau avait dis-
paru.— Qu'on remette le cheval, ai-je crié
de mon fiacre,ou je, vais loger ailleurs!... On
l'a remis. On m'a rendu aussi la grande cham-
bre carrelée, à plafond*de solives croisées et
à fenêtres garnies de petits carreaux, qui avait
fait mon admiration lors de ma première
visite...
Que si, le, soir, je sors de chez moi,
trouve une voûte sous une- maison ; une port»
sous cette voûte me conduit dansi.un petit eafê^
sombre, où Guignol joue son répertoire. Uni
peu plus loin, la place de? Célestin s, plantée,
d'arbres, rafraîchie par qes. eaux 'issantes, ;
m'ofïre le mouvement et la vie d'!i ne place -
dé Florence. 11, est onze bettes- il n soir,
«mze heures et demie... La foule qui sort (ta (
théâtre se mêle à celle qui encombre fet ' cafés., 11
U« de ces cafés, le café Isch, décoré à l'ita- - ;
lienne, avec un plafond très-élevé, es\1 par-,. »
couru par des bouquetières chargées d'œi. Hets, ^ )
et des;fajjuinsqui vous offrent des boites d'al-^
lutneàeé. Cela he ressemble en rien aux «-cafés , •
de la rue Impériale; et dix minutes de cite min
à peine vous en séparent,.. ;
Le parc de la Totè-d'Or s'étend sur la rit<
gauche du Rhône, en dehors de la ville. C'est
le bois de-Boulogne de Lyon : j'y ai compté
jusqu'à trois vélocipèdes. Du' reste,,, les pro-
meneurs y sont rarps pendant -l'été. Les né-
gociants de Lyon ont adopté les ^ihœurs des
négociants de Londres; presque tous demeu-
rent à la campagne avec leurs femmes et leurs
enfants. Le matin, ils viennent à cheval, en
voiture ou en bateau, à leurs'affaires; leurs
affaires terminées, ils retournent diner en
famille, et passer leur soirée dans leurs parcs
ou leurs jardins...
LaTête-d'Or a son Madrid,: tén\1 par M.
Grand. De la terrasse qui entoure le restau-
rant, aménagé comme un chalet, on découvre
les coHines- de Sathonay, boisées sur leur
flanc occidental, arides au sommet et décou-
pant le ciel....
Le soir, en revenant, tfri Rhône.
En face s'étend le" quai Snint'.l, Hir, avec sa'
magnifique avenue d'arbres — q-i va du fan-
bourg de Dresse aux portes de -L v.ei'te ville.
C'est par là qu'Henri IV, venaiil' ijl- Bourg,
fil son entrée à Lyon. Le cortégu swdéroulait
sur une lieue de long, et il ne ticpabsait pas
l'avenue... •-
Un bruit d'orchestre. Les ifs de gaz de la
Closerie des lilas éclairent le epuai. Nbus som-
mes devant la porte du Mabille lyonnais. En-
trons. Ce Mabille a son étoile tfomme l'autre.
Il y a deux ans, c'était Mariette, une écuyère,
toute blonde, frêle, nerveuse... Elle vient de
mourir d'ennui dans un châtèhtt-flu Dauphmé.
Mademoiselle Tonine, di.e Chique lté t qui IA
LA FEMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE LA MAISON ENCHANTÉE
XXX
2iJ
M. de"la ilociië-Lamb'eft s^tîfiHdonc mis de-
rant la porte, flamberge au Yent, bien résolu à
lie laisser entrer l'inconnu que lorsque celui-ci
itii aiirait dônnê une explication.
L'inconnu rJ&it au travers de., son masque ï'
-' Vous'alleH' me lai|ger pénétrer chez moi,
1e suppose, 4it-il.. , ' >■; ••
' '
" $\ .'.i : • ... l'..■ ■ ... ■ : - .. •
Voir les numéros parus depuis le 21 ium."
, -. \f':), -y...* ' '
— Pas avant que nouj n'ayons causé un brin, 1
dit l'entêté marquis. i
— Je ne vous connais pas, monsieur, fit cour-
toisement l'inconnu.
..!-Ni moi, monsieur.
— Alors que pouvons-nous avoir à nous dire?
dit l'inconnu d'un ton hautain. f y
— Monsieur, reprit le marquis, vous voulez
entrer daMs..cette maison ?
— Sans doute. , , *
— Et vous prétendez rentrer chez vous?
— Parfaitement'. La preuve en est que voilà
une clé qui tourne dàns la serrure.
— Moi, monsieur, je sors de cette même
maison..
■ — Ah! "
Et au travers du masque, les yeux de lançon-
nu brillcrent comme des lucioles,
— J'y ai trouvé un brave homme qui se
nomme Guillaume Laurent
— Ea vérité!
— Lequel m'a affirmé.que la maison était à
lui.
- Ah !
! -' Or, reprit le marquis avec une logique de
.p!us en':f,lus serjeo, si la maison est à Guil-
liiume,éllè n'est point à\ous ; si elle es~ à vO'JS'
, elle p'estpas .à G^i'lïauras..
' • " u : • <■ •' ,.", : l'O? 7î:
— Et qu'est-ce que cela peut VOMS faire, bon
Dieu ! ; "V
— Cela m'intrigue.
— Mon gentilhomme, dit froidement l'homme
au masque, la curiosité est malsaine par de cer-
taines nuits où il fait clair de lune.
— Vraiment! ricana le marquis.
— Je vous conseille donc d'aller vous coucher
fort tranquillement à votre hôtellerie, car vous
me paraissez un gentilhomme dé province,
ajouta l'homme au masque avec, ironie.
— Que je sois de province où , non, je ne m'en
irai pas! fit le marquis avec obstination.
— Mon cher monsieur, reprit l'inconnu -qui
n'avait rien perdu de son cal me, si vous n'aviez
la moustache noire je jurerais que c'est à un
vieux fou que j'ai affaire, tant votre voix, res-
semble à la sienne. Ne seriez-vous pas par
hasard le marquis de' la Roçhe-I^ambejj;, up
vieux maître qui se sera plongé.'dftns"1 quelque
bain préparé par Buffalo?; : ; ; ;
Le marquis tressaillit.. t 3 ■ ■
Lui aussi croyait avoir entendu ' déjà la voix
qui résonnait à ses oreilles? M '
Et'tout, à coup il dit à son tour: ^
— Et vous, en dépit dç votre riîasqué,|^ vous
reconnais. "V>- '-"î ^
-- Ah 1 ah! •' ' ' ' ■
— Vous §£es le chevalier d'Es&an'ûn ?
#'
— v OUj êtes donc le marquis de la Roche-
Lambert t ' ..V , - f ' ,
— Peut-être...
— Marquis, dit froidement l'homme au.mas.
que, je croyais que vous aviez quitté Paras. /
— Je l'ai quitté, en effet, mais j'y suis re- /
venu.. ;
— Pour Tous mêler de cliœos qui
regardent paé..'
— Peut-ètre. : y-,-ci
— Vous avez tort, marquis. '
— Je veux la voir ! dit le 'V'iùillarcî. y
.- Qui donc ? ' - v ! '
— [le!1 l'à sorcière ! la femme immortelle, qui
loge dans cetta maisoe, «ar, àr-.prés««i[, je Ij'eR
puis plus dwter. ' '' ' , (
. -Dh" a "l, . , ,
— Puisque vous: voilà. ; •,( y. ,
je vous jure, marquis, ooa c'est, un bon
conseil que le.yqu? donne, qn.ypr^i invitant à
vous aller coucher. Vous. ioge# ,tub de l'Arbre-
Sec, iieet-ce pas ?..
Non, plus maintenantlï£fô' Saint-Jacque3K
: au Cheval-Ilou^n,r ,L ; A j ,'Tv
C'est.plus preà. Ponséiivmafljuis..
Et l'hcri»ine au, masqua voulut écarter le œ^r-
quis. ";i!T 1
Mais le vieillard ra>^-aûj lui porta la pointe
dô son êpée au visage.
S ccal. le niiacio ', ~ 1
.. ~~ 1 ~ JOURNAL ÇXîOTinïEIV - ..
' *
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ABONNEMENTS. — Trois ipois., Six mois. Un an.
P.ins .u,. ' à fr. ' , 9 ft. : 18. fr.
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A 'niinû'satci.ir ; E. DËLSAUX.,.,
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3m année. — DIMANCHE 49 JUILLET ' 1868. —s%%
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; - ■ ADMINISTRATION •. LA, plaça Brada.- jt ■ ,
PARIS, 18 JUILLET 1868
NOTES DE VOYAGE
LYON EN 1868
J'ai fait bien des fois cette remarque, que
' les observateurs les plus profonds étaient en
même temps les enthousiastes les plus naïfs.
Voyant le mal si fréquent et le bien si rare,
,qtiaiid ils rencontraient le bien,ils se mettaient
à genoux devant lui et ils avaient des extases
d'enfante...
De môme les Parisiens les plus épris de Pa-
ris, ceux qui regardent le plus souvent dans
ta rue et le moins souvent dans le ciel, sont
aus?i ceux qui suivent le plus volontiers les
Images. •
— Où va ce flocon blanc dans l'azur ? Oh
si je pouvais voyager comme lui ! Je verrais
au-dessous de moi des choses nouvelles, et le
terre à terre de ma vie journalière disparaî-
trait pour faire place à l'imprévu 1.;,.
Et l'on part.
Pour moi, c'est le vent du Nord,qui pousse
mon nuage, et je vais vers le Midi. Il y a deux
poésies : celle du brouillard, de la légende et
clu rêve; et celle du soleil, de l'histoire et de
Sa pensée. J'aime.à trouver la première dans
les livrès et la seconde sur les lieux.
Et c'est pourquoi, de loin en loin, trop
rarement au gré de mon désir, je vais prendre
un baia d'air et de lumière sur les coteaux
le la Saône gauloise ou du Rhône latin...
Jamais début de voyage ne fut plus heureux
î|iie l'a été le mien.
Je rencontre dans la gare deux de mes
aonfrères, je dois ajouter deux de mes amis,
car, par le temps qui court, il est nécessaire
de s'expliquer.
Adolphe Dupeuly, le populaire auteur des
Canotiers de la Seine, se rend il Saint-Etienne
pour affaires. S'agit-il d'armes ou de rubans ?
les lecteurs de la Petite Presse, le sauront
bientôt.
Henri de la Madelaine, pâle, les yeux en-
tourés d'un cercle maladif, va demander aux
eaux d'Aix, en Savoie, la guérisou d'un rhu-
matisme que le climat de la Provence n'a pu
que soulager.
Nous échangeons une poignée de main;
nous traversons la salle d'attente ; nous som-
mes sur le quai...
\ Un gentleman, à la casquette bordée d'un
. Ion d'or, s'approche de nous , salue, et
:
./ Messieurs, voulez-vous venir avec moi ?
je vais vous placer.
— Nous le suivons .jusqu'à la tète du
traia- Notre guide ouvre la portière d'un
wagon : , ; .
— Messieurs, je vous souhaite un bon
voyao-e. ' .
La portière se referme et le train part.
Nous sommes seuls dans^u compartiment
réservé. ' .j* " ,s
Notre surprise se change 'en joie. Quelle
bonne soirée nous allons passer ensemble !...
Comme, après avoir bien causé, nous pour-
rons bien dormir!... Quelle douceur pour
notre malade de s'étendre à,son aise, 'à l'abri
de regards étrangers!-... : ' r
Nous n'avions pas fini de bénir l'obligeant
inconnu, auquel nous devions tout cela,
qu'une détonation se fait entendre.
I Un feu d'artifice montait dans le ciel, éclai-
j rant les toits de la ville de Melun.
' Tirait-on aussi ce feu d'artifice pour nous?
1 A trois les suppositions vont plus vite que
le train...
j Nous étions en pleine féerie...
C'est pourquoi, afin de continuer le rêve,
nous nous endormîmes àMontereau... ,
* Certaines ^eflfi parcourent le monde avec
un parapluie dans la main droite et un Guide
1 du voyageur dans la main gauche.- Ils ne
voient que des monuments et des musées.
! D'autres, au contraire, cherchent à se ren-
dre. compte des mœurs, et d'autres des gens.
Ceux qui vont devant eux, au hasard, sans
autre préoccupation que celle de l'inconnu,
sont extrêmement rares.
! Je recommande Lyon à ces derniers.
1 Lyon est la ville qu'il faut voir en allant
! devant soi.
Alexandre Dumas, dans ses Impressions de
voyage, a regardé Lyon du sommet d'un des
plateaux qui entourent la ville, et il .a parlé
d'un amas de maisons sales et grises...
S'il était entré dans cet amas de maisons,
il se serait récrié à chaque pas.
i Nulle part, en eflet, le. touriste ne trouvera
■* ' ' .. , > w
«ne pareille variété d'aspects et. de physiono" :
jnies. - .. j ... - ;i
; Au bout de grandes rues, larges, 13roitèSi'
coupées par des squares et des fontaines,
comme la rue Impériale, on trouve des places
immenses, comme la place de Belledopr, en-
tourée d'hôtels classiques qui font un cadre à
la statue équestre, de Louis XIV en (iostume
^rpfnain. " .
> Au bout de petites rues étroites et pleines
4e coudes, comme la rue du Port-du-temple,
Se dresse brusquement une montagne, Four-
vières, dont les pentes raides sont couvertes
de parcs et de couvents. ; ;
1 On fait cinquante pas, on voit la Sa^ne. On
se retourne, on fait cent pas et l'oni voit le
Rhône. La ville s'étend dans la plaineidu côté
de l'Isère ; du côté de l'Ain,ses maisons esca-
ladent, les côtes et s'éparpillent sur Jes pla-
ttix, comme un troupeau à l'étroit dans la
î Vallée... -
. J'ai nommé la rue Impériale, C'est à la fois
Il boulevard des Italiens et la rue de Rivoli.
Ipéjeunoz au café Casati, vous croirez déjeu-
ner au café Riche.
La rue du Port-du-Temple s'appelait au-
trefois la rue Ecorche-Bœuf. Sans doute au
rez-de-chaussée de ses vieilles maisons noires,
l'es viandes saignantes s'étalaient derrière les
grilles. C'est là qu'aboutissaient l'abattoir et
la tuerie... •
Et l'on se représente les bouchers du
moyen âge en cape rouge, causant sur le
.
pas de leurs portes, en écoutant les bruits du
q-thi voisin... ——-
Depuis, des hôtels ont remplacé les bouche-
ries, Mais ces hôtels sont demeurés des hôtel-
leries. Ils ont des enseignes patriarcales. Sur
l'un on lit : A la Croix d'Or, et sur l'autre :
Au Cheval Noir... Il y a deux ans, j'ai logé
au Cheval Noir. J'avais été séduit par un ta-
bleau placé au-dessus de la porte et représen-
tant, non pas un cheval, mais deux dhevaux
attachés à un poteau, qui piaffaient eh se re-
gardant. Cette année, quand je suis arrivé,
on réparait la façade; le tableau avait dis-
paru.— Qu'on remette le cheval, ai-je crié
de mon fiacre,ou je, vais loger ailleurs!... On
l'a remis. On m'a rendu aussi la grande cham-
bre carrelée, à plafond*de solives croisées et
à fenêtres garnies de petits carreaux, qui avait
fait mon admiration lors de ma première
visite...
Que si, le, soir, je sors de chez moi,
trouve une voûte sous une- maison ; une port»
sous cette voûte me conduit dansi.un petit eafê^
sombre, où Guignol joue son répertoire. Uni
peu plus loin, la place de? Célestin s, plantée,
d'arbres, rafraîchie par qes. eaux 'issantes, ;
m'ofïre le mouvement et la vie d'!i ne place -
dé Florence. 11, est onze bettes- il n soir,
«mze heures et demie... La foule qui sort (ta (
théâtre se mêle à celle qui encombre fet ' cafés., 11
U« de ces cafés, le café Isch, décoré à l'ita- - ;
lienne, avec un plafond très-élevé, es\1 par-,. »
couru par des bouquetières chargées d'œi. Hets, ^ )
et des;fajjuinsqui vous offrent des boites d'al-^
lutneàeé. Cela he ressemble en rien aux «-cafés , •
de la rue Impériale; et dix minutes de cite min
à peine vous en séparent,.. ;
Le parc de la Totè-d'Or s'étend sur la rit<
gauche du Rhône, en dehors de la ville. C'est
le bois de-Boulogne de Lyon : j'y ai compté
jusqu'à trois vélocipèdes. Du' reste,,, les pro-
meneurs y sont rarps pendant -l'été. Les né-
gociants de Lyon ont adopté les ^ihœurs des
négociants de Londres; presque tous demeu-
rent à la campagne avec leurs femmes et leurs
enfants. Le matin, ils viennent à cheval, en
voiture ou en bateau, à leurs'affaires; leurs
affaires terminées, ils retournent diner en
famille, et passer leur soirée dans leurs parcs
ou leurs jardins...
LaTête-d'Or a son Madrid,: tén\1 par M.
Grand. De la terrasse qui entoure le restau-
rant, aménagé comme un chalet, on découvre
les coHines- de Sathonay, boisées sur leur
flanc occidental, arides au sommet et décou-
pant le ciel....
Le soir, en revenant, tfri Rhône.
En face s'étend le" quai Snint'.l, Hir, avec sa'
magnifique avenue d'arbres — q-i va du fan-
bourg de Dresse aux portes de -L v.ei'te ville.
C'est par là qu'Henri IV, venaiil' ijl- Bourg,
fil son entrée à Lyon. Le cortégu swdéroulait
sur une lieue de long, et il ne ticpabsait pas
l'avenue... •-
Un bruit d'orchestre. Les ifs de gaz de la
Closerie des lilas éclairent le epuai. Nbus som-
mes devant la porte du Mabille lyonnais. En-
trons. Ce Mabille a son étoile tfomme l'autre.
Il y a deux ans, c'était Mariette, une écuyère,
toute blonde, frêle, nerveuse... Elle vient de
mourir d'ennui dans un châtèhtt-flu Dauphmé.
Mademoiselle Tonine, di.e Chique lté t qui IA
LA FEMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE LA MAISON ENCHANTÉE
XXX
2iJ
M. de"la ilociië-Lamb'eft s^tîfiHdonc mis de-
rant la porte, flamberge au Yent, bien résolu à
lie laisser entrer l'inconnu que lorsque celui-ci
itii aiirait dônnê une explication.
L'inconnu rJ&it au travers de., son masque ï'
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— Pas avant que nouj n'ayons causé un brin, 1
dit l'entêté marquis. i
— Je ne vous connais pas, monsieur, fit cour-
toisement l'inconnu.
..!-Ni moi, monsieur.
— Alors que pouvons-nous avoir à nous dire?
dit l'inconnu d'un ton hautain. f y
— Monsieur, reprit le marquis, vous voulez
entrer daMs..cette maison ?
— Sans doute. , , *
— Et vous prétendez rentrer chez vous?
— Parfaitement'. La preuve en est que voilà
une clé qui tourne dàns la serrure.
— Moi, monsieur, je sors de cette même
maison..
■ — Ah! "
Et au travers du masque, les yeux de lançon-
nu brillcrent comme des lucioles,
— J'y ai trouvé un brave homme qui se
nomme Guillaume Laurent
— Ea vérité!
— Lequel m'a affirmé.que la maison était à
lui.
- Ah !
! -' Or, reprit le marquis avec une logique de
.p!us en':f,lus serjeo, si la maison est à Guil-
liiume,éllè n'est point à\ous ; si elle es~ à vO'JS'
, elle p'estpas .à G^i'lïauras..
' • " u : • <■ •' ,.", : l'O? 7î:
— Et qu'est-ce que cela peut VOMS faire, bon
Dieu ! ; "V
— Cela m'intrigue.
— Mon gentilhomme, dit froidement l'homme
au masque, la curiosité est malsaine par de cer-
taines nuits où il fait clair de lune.
— Vraiment! ricana le marquis.
— Je vous conseille donc d'aller vous coucher
fort tranquillement à votre hôtellerie, car vous
me paraissez un gentilhomme dé province,
ajouta l'homme au masque avec, ironie.
— Que je sois de province où , non, je ne m'en
irai pas! fit le marquis avec obstination.
— Mon cher monsieur, reprit l'inconnu -qui
n'avait rien perdu de son cal me, si vous n'aviez
la moustache noire je jurerais que c'est à un
vieux fou que j'ai affaire, tant votre voix, res-
semble à la sienne. Ne seriez-vous pas par
hasard le marquis de' la Roçhe-I^ambejj;, up
vieux maître qui se sera plongé.'dftns"1 quelque
bain préparé par Buffalo?; : ; ; ;
Le marquis tressaillit.. t 3 ■ ■
Lui aussi croyait avoir entendu ' déjà la voix
qui résonnait à ses oreilles? M '
Et'tout, à coup il dit à son tour: ^
— Et vous, en dépit dç votre riîasqué,|^ vous
reconnais. "V>- '-"î ^
-- Ah 1 ah! •' ' ' ' ■
— Vous §£es le chevalier d'Es&an'ûn ?
#'
— v OUj êtes donc le marquis de la Roche-
Lambert t ' ..V , - f ' ,
— Peut-être...
— Marquis, dit froidement l'homme au.mas.
que, je croyais que vous aviez quitté Paras. /
— Je l'ai quitté, en effet, mais j'y suis re- /
venu.. ;
— Pour Tous mêler de cliœos qui
regardent paé..'
— Peut-ètre. : y-,-ci
— Vous avez tort, marquis. '
— Je veux la voir ! dit le 'V'iùillarcî. y
.- Qui donc ? ' - v ! '
— [le!1 l'à sorcière ! la femme immortelle, qui
loge dans cetta maisoe, «ar, àr-.prés««i[, je Ij'eR
puis plus dwter. ' '' ' , (
. -Dh" a "l, . , ,
— Puisque vous: voilà. ; •,( y. ,
je vous jure, marquis, ooa c'est, un bon
conseil que le.yqu? donne, qn.ypr^i invitant à
vous aller coucher. Vous. ioge# ,tub de l'Arbre-
Sec, iieet-ce pas ?..
Non, plus maintenantlï£fô' Saint-Jacque3K
: au Cheval-Ilou^n,r ,L ; A j ,'Tv
C'est.plus preà. Ponséiivmafljuis..
Et l'hcri»ine au, masqua voulut écarter le œ^r-
quis. ";i!T 1
Mais le vieillard ra>^-aûj lui porta la pointe
dô son êpée au visage.
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