Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-06-29
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 29 juin 1868 29 juin 1868
Description : 1868/06/29 (A3,N802). 1868/06/29 (A3,N802).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717804b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
JOURNAL QUOTIDIEN -
S (t-nl. k - numéro
H cent. le numéro
AJo SNBMESTS — Trois ni ois. ' Sii mois. • Un ano
Paris ....... ;fr. / ■ ■. > &,*' f 8
"
ôeparteiiionts". ; "8 Mi.':'-'■ <
Administrateur, :•< E. DE-LSAUX.' •; .
:;-»v""■^■■■■a:n:Déê. —- LUNDI/29 JUIN.; 1^68, :^ !r.i 8(2 r
Dircctcur-Proprir!taire : Jannin "~*i-
Bégàâïcw en Chef: A. de Ba-lathIer?Bragelonne*
BCRRAÈ*
......1 ADMiNlSXJtÀTIOîf : ■!}>' lj$:
PARIS, 28 JUIN 1868
PHYSIONOMIES PARISIENNES
LE PETIT CLERC
t'êtude est une grande ^piècé, ccftée-du
po.èle classique. Les tuyaux "traversent la
chambne pour rejoindre une cheminée con-
damnée. Le plancher n'est jamais frotté,
mais il est toujours sali. Près de la fendre se
trouve le secrétaire à cylindre du premier
clerc. La petite table du second clerc y' est
adossée. Sur une de ses parois, l'étude a pour
ornement ces grandes a fQches jaunes qui an-
noncent des ventes, des y ci talions entre ma-
jeurs et mineurs, des adjudications défini-
tives ou préparatoires. Sur les astres parois
'Sont des casiers qui vont de haut en bas, et
dont chaque compartiment est bourré de
liasses à étiquettes et à bouts de fil rouge. Les
«mgs inférieurs sont pleins de cartons d'un
?ert jauni par l'usage, sur lesquels se
lisent, soit les noms des gros clients, soit tes
-litres des principales affaires. Les vitres de la
îroisée laissent passer peu de jour. Partout
?êgno la poussière, Mais cette négligence est
concevable. Tout le monde entre dans une
s bu de. Personne n'y séjourne. Ici, tout est
'banal: lè mobilier qui se transmet avec la
chaTge. les affaires, qui se succèdent en se ré-
pétant. Un observateur qui chercherait des
profondeurs sous les surfaces dirait qu'il s'y
joue des drames et d-es comédies, et que, lors-
que la pièce est iatéressatite, le décor est in- °,
,dJfèt'ünt. ' _. ■ ' ^ I (
Les clercs-sont, — ou des fils de famille qui
font leur stage en attendant qu'ils achètent
une étude à leur tour, — ou de simples em-
ployés ayant un p. belle écriture et vouant
leur vie à Mil travail sans perspective d'avenir
ni de position. Mais ce.' derniers sont les plus
rares. En général, dans une étude, on est
jeune, on-espère et l'on rit. De quoi rit-on?..
Eh ! mon Dieu ! De rien, d'un client qui a des
culottes trop courtes, d'un autre qui bégaye
en parlant, d'un trois.ème qtii salue trop bas.
Une bonne femme entre lJrC jour dins'une
étude de Bourg. Un clerc lisait le journal à
haute voix.
t On attribue ceMpçen'die à la mal-
y ei M'a n ce.; ..,T ... .... V-.:
-h La EGalveillaiïGe ! dit la cliente, Pa-t-on;
arrêtée'? " ''
Il y a vingt ans de cela, Allez dans une
étude de Bou.rg, et vous verrez si l'on ne vous
répète pas le mot. ■ : :
Chaque province, chaque ville a ainsi sa
tradition. Il en est de la basoche comme de
l'armée. Certaines plaisanteries y sont héré-
ditaires. ■ ,
— Rien de nouveau ? dit le s°rgent.
— Pardon! répond le fusilier. Le banc,
qui était devant la caserne, a été détruit par
vétusté. ■ t
— Vétusté ! Qui est-ce , que je le flanque
au clou ?... " :
C'est vieux comme le monde, mais cela
fait toujours rire.
■ Dans certaines études, on rédige des Jour-
n'a:x tirés à deux exemplaires. Dans d'autres,
o -i organise des scies à l'usage des nouveaux.
L'instinct avec lequel on saisit, on développe
une mystification entre clercs est merveil-
leux et n'a son analogue que chez les ,pein-
tres et les sculpteurs. L'étude en -ce genre
est la rivale de l'atelier. On y fait des calem-
bours. Parfois, l'on y déjeune en corps. Les
vieilles pratiques sont restées.
CI Il n'est que déjeuners de clercs, dîners de
traitant et soupers de seigtieurs. »
Le dicton du dix-huitième siècle peut s'ap-
prq,ner au oox-neuvième.
Pour ma part, je me rappellerai "toujours,
avec un plaisir infini, les quatre années que
j'ai passées dans l'élude de Miuffiot, notaire
à Lyon. C'était de 1851 à ISSÎfc Dieu! que
nojs étions jeunes et que nous nous amu-
sions! Mes «amarades, qui sont aujourd'hui
maître un tei ou maître un tel, dans la
Bresse et dans le BCillijolais, doivent se rap-
peler parfois nos éclats de rire, au milieu de
leurs minutes et de leurs dossiers.
Mais ce n'est ni d'eux ni de moi qu'il s'a-
git. C'est du petit clerc, une figure particu-
lière aux grandes villes, et certainement, une
des plus intéressantes et des plus sympathi-
ques qui soient...
Le commun des petits clercs se signale par
des traits généraux : manches trop courtes,
cheveux trop plats, souliers trop lourds... >
' ; ' y-";' '3' •*.; , v i
En revanche, les espèce varient à rinûni. !
Le santé-ruisseau est en général un 'garçôn'
de^ treize : à - quatorze ans, qui tient .au ganvn
par les mœurs et à ta basoche par sa destinée.
Sans Dit;,é,,. sans frein,s; - ;
gueur, avide et paresseux, il chante îe Gha-
peau de la Marguerite el G'est Lê^pre-ûo^
que tout le monde èn est encore' à îenrty
1 ouvrier e et a Ohé 1 les petits agneaux !. Il
défile les plaisanteries du TMàmciirë dans
les corridors du palais, et il co'porte d'ét':de
en étude les mots à effets de la Lanterne :
« Je pris une feuille de papier, ministre,
et ,jlécri vis à celui de l'intérieur./.. 21 Il est
' ravi. Quand vient le soir, il va trouver sa
bonne femme de mère, qui demeure à Un
cinquième étage, qui le gronde de prendre
si peu de so'n de ses vêtements, et avec la-
quoHe il partage les trente ou quarante francs
qu'il gjjgne chaque mois.
Quelquefois aussi le petit olerc est vieux.,
Vous ^vez, de ces vieux auxquels on nè
oonne^as d'âge. Ils sont rasés, râpés, étri-
qnés; ils ne tiennent point de Dfà'ce: On se
demande : —^ui est-ce?... Mais on leur
voit des papierl-isous le bras, et l'on se ré-
pond : v— C'est un cierc.A Londres, on;se:
dirait: —C'est un Irlandais... Ces easqÚetli,
fères, comme disait Balzac en pariajjt des
employés, ont la taille emprisonnée dans un
hab:t noir dont les coutures sont blanches,
et ltur: front est le plus souvent surmonté
d'un chapeau à bord étroit, dont la forme
monte comme une colonne vers le ciel.
Le petit clerc de quatorze ans est le fils
d'un concierge ou d'une --muve cpcmployc.
Mais le vieux saute-ruisseau, d'où vient-il ?
Par combien de professions a-t-il passé? Quel
chemin a-t-il suivi dans la vie? De quel
fleuve est-il l'écume? De quel océan est-il
l'épave?... Rien ne se lit sur sa face blême,
sinon la résignation. Om sent qu'il est prêt àj
tort : à faire les commissions de l'étude, à
porter les billets doux du maître .cierG, à co-
pier les rôles. Qu'y a-t-il au bout de tout;
cela? Du pain. Et le .petit vieux sans âge a
l'air d'un affamé !... '
Un de ceux-là a été huissier en. province; :
la Chambre l'a forcé à vendre son étude. Cet
autre a mangé au jeu la fortune de son père,.
un usurier; il gagne soixante francs par mois,
et il trouve moyen de risquer encore dix,sous,
de temps en temps, dans un tripot. Mon aime ;
t stjuL»jjaW L!/./',75"'^ t:
b ise&airl-) oKiélès mu ,oob0-. '• -:,.b -:vu -:r fvy
Charles Jslfetï Qtr S -eotniTi^n ; qui avait été '
felofcn art Ci/qrtév' H'faiWait'tbni aufomsrtique-
ment. Une, deux; jff prèliAit'.tin carton.'Trois;
Il Ïb e'posait lét tèble.'^Uiier un dossier.
.Trois; sa J^to^é../ârojte;s'ànongeart*>et il se
: : pour se
^istr^ il;sa^ts^t .vl>:pii^s,.joiRts pir-dêssus
lavable;, .et il,;retombai,llruideir^ent. Ç'était' up
icompas pour laimarche- et un« horloge pour
l'exac,t'itude. Il ne riait jamais...
Je trouve, dans les Petits Français, l'his-
toire meryÊillense ,d'uA saii.te-ruisseau de
-PariS. s-v*'. •
i II- rappelait .Petit, • et U .travaillait chez un
av&ué..;
— Petit, va m'acheter d'eux saucisses...
Voilà quatre sous!... îf . ^
— Petit, une boite de radis pour moi !
■■ ■" Petit/fa":m,e')cirai,igëti Ce"î)illet de cinq
cents au passage Choiseul ! ...
. Dépêclie-toi, Rétit, il faut aller au tri—
"bunal remettre cette lettre à Fanfernot...
—Et passer au .greffe pour, ]?&-ŒàirfcMi«ha- .
let-BertllOUdv.jj y; r. :f...
— Et porter 'cet acte à l'enregistrement...
■ Un/ d-ètïx,"-; tPofe/^qTiatre,^ ëi&q;,' six !...
compte l'enfant sur 'tesdoigts.Ilien que ça!...
Par Où faut-il cbmmonçër?'.'..
. — Allons ! en avant, mïirche ! ' ': "
Je marcherai bien. si je. veux ! • '
Et le gamin s^v.sauye ea heurtant, comme
par megarde,un pa.n hOr.n¡lWUP unpeu épais qu'il
trouve dans le: Yfstibu1.e. i : ^ _
— Arrête, polisson, ai dis-mai si ton patron
est arrivé. •-■
- — Le patron n'arrive"""qtrlà-*sir• treurcs du
soir. '
— Bon, 'ja varls l'attendre.
— A votre, a'ise !."
Petit allonge ses dix doigts au bout de son
nez et reprend sa course; il a trouvé pouf
descendre l'escalier un moyen iïig-éniwix qui
consiste à se laisser g-isserle long de la
rampe. S'il'ile se tue pfe^il arrivera beaucoup
plus vité:ainsi. , : '
En effet,^"il'" est (le ' retour, au bout d'une
.heMre.- c,.r ;V, Mj-;- - v '
Toute?:les commissions sopt faites.
Seulement, 1-e, troisième ,clerc s'aperçoit
qu'il n'y a qu'une saacisse dans le petit .papier
qu'on lui remet. n ;;■: c ,■ ...
— Pe ti.t, je t'avais dit de m'acheter deux
saucisses. ' ■
LA FAMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉ
9
IX
£e sommeil du chevalier djEsparrQj^ffl,^JÇat
p as de longue, duréo »
Soie que le narco'J rue", employé par Te 'vieux
marq;«iSj"de....jla^R.^'Iie-î^ajnbertj fut "à peu pçès
inoffensif, soit qti ? ie calme et le sile'née,, succé-
dait tout i cpup .anx rn-es tM-uyants et,aux COR-,
vexations qui l'entouraient, eussent eu une ac-
tion directe s,ur son système nerveux, le cheva-
Yûir les numéros parus depuis Je 21 îuln.
lier n'était pas seul depuis une heure qu'il s'é-
veilla. r;
Il s'éveilla, non point à la manière des gens
qui ont eu le cauchemar, se frottent les yeux,
cherchent où ils sont, et dont la pensée ne se
dégage qu'avec peine des brouillards du som-
moil, retiouvant lentement et peu à peu sa lu-
cidité, mais tout d'un bloc,, tout d'une pièce,
sans étonnement copimé sans fatigue
Le Récent et ses convives étaient partis.
Mais la table encore dressée supportai les
restes du souper.
Des lampes à globe dépoli répandaient autour
d'elles une clarté douce,et mystérieuse.
Enfin, un profond silence régnait. ■ .
Le chevalier se dirigea d'abord vers ja table,
prit un verre et se versa à boire. ' - :
Puis il alla regarder la ,p,endule sa trou-
vait surda daeniinée.., . ,. : ....- ;.1S, ..
Il était trois hçures du ,matin. , -l-'"'■■
Un sourie dont eût, été diîTicilet.fùion im-
possible, de fixer la signification glissa alors sur
ses lèv:es.■ { \
— J'ai le temps, murmura-t-il. •
Il s'approcha d'une glace et jeta un coup d'eeil
sur, tuine.1;
Ses nœuds de rubans étalent un peu fripés ;
mais ce ne fut pas à cela qu'il prit garde.-
Ce qu'il examina avec une scrupuleuse atten- I
tion , ce fut sa collerette et le ruban bleu de
ciel noué par des s us en guise de cravate.
— Ah 1 ah t fit-il. -".p"
Il devenait évident pour lui que le nœud avait
été défait, car il n'était pas attaché de la même
manière, que sa colle: ette avait été puverte, et
que très-certainement cette, petite piqûre qu'il
avait au cou avait été montrée au Régent et -à ses
convives.. /..... ,. f ..,(r-
Un nouveau sourira glissa sur ses lè-vrës :
— Parfait ! dit-il entre ses dénts,,' T.'.
Et il chercha son manteau qu'il avait, en en-
trant, jeté sur un meuble, rajusta :1e ceinturon
de sa petite épée de cour, rétablit un peu d'or-
dre dans sa ceitïure, car il portait ses cheveux
longs et sans poudre, mit san trçome sous le
bras et murmura encore : • - i,.
— Maintenant, partons. A niolris:qu'il n'y'ait
de grands changements au Raila Royal et qu'on
en ferme à présent toutes les 'parte,, la^uùit, au
lieu de les laisser discrètement ou verbes, pou,r
tous lès amoureux qui ont. besoin au grand air,
je serai dans dix minutes ,,,dans la ri^...f?ai-a)ti-
Honoré, et on aura de nouveau perdu mes
traees.
Parlant ahisi, le chevalier d'Esparron fit un-
pas vers cette même porte par où le Régent
avait fait partir le vieux marquis de la Roche- j
Lambert, ^ .. I
Muisun geste d'impatience lui échappa, cat
cette porte était fermée. ' ' - ; .. :
— Heureusement, se dit-il è-reoté,, qUe tout
le monde doit être ou endormi ou dans les Mas
dé la beauté, et qu'on né s'occupe plus de moi.
• Il se dirigea dofiç'^ôrs uné "autre porté; la-
quelle donnait t}U1¡r:;: une ^nticliambre attenante
au ,ranq e'^çatier. M... V ' , ...
, Cetta poxta n'hait, pas fermée à clé, et elle
ceda-.s.ons ^n^ain,du chevalier.^,. -3 yfc ,
; Mais comme il allait, erl franchi©ie'seailf il se
trouva face à facai. alVeC motisefgtîeSUl? 'PQ.iHppe
d'Orléan-sluî'-inê me.
— Eh bien t fi -Lla R^ent,. as-tu bien dormi,
mon mignon? .
f mif 0ser
le chevalier, il le repoussa doucement dans la
salle,du^qper., vc , :/H-
— fOiS' tfrkbfé alrafô-t^dohc" coitîtri'é' ce-iaV Àon
ami? dit-il. _. s . '.v
~'l&aw.';^îàolfsè^gWeÛ^.'iiU:'$1 ■.. ..
— T^ti'^iefisfélsr^ié^n continua le Régent avec
bonhomie, que depuis '&ofé^môis qu'on ne t'a
vti, ;il! est bièn;p6ssîl|lé qu'oiï ,*It\ dispofse de toa
logis,"et si tu sortais pour l'aller ebercljer..> ..,
Pas précisément, monseigneur. ■ " '
' —Où. allais-fil"donc? f . '
— Mais, dtÍmet fît naïvement d'Esparron, je
m'en allais,. ; .... :.
JOURNAL QUOTIDIEN -
S (t-nl. k - numéro
H cent. le numéro
AJo SNBMESTS — Trois ni ois. ' Sii mois. • Un ano
Paris ....... ;fr. / ■ ■. > &,*' f 8
"
ôeparteiiionts". ; "8 Mi.':'-'■ <
Administrateur, :•< E. DE-LSAUX.' •; .
:;-»v""■^■■■■a:n:Déê. —- LUNDI/29 JUIN.; 1^68, :^ !r.i 8(2 r
Dircctcur-Proprir!taire : Jannin "~*i-
Bégàâïcw en Chef: A. de Ba-lathIer?Bragelonne*
BCRRAÈ*
......1 ADMiNlSXJtÀTIOîf : ■!}>' lj$:
PARIS, 28 JUIN 1868
PHYSIONOMIES PARISIENNES
LE PETIT CLERC
t'êtude est une grande ^piècé, ccftée-du
po.èle classique. Les tuyaux "traversent la
chambne pour rejoindre une cheminée con-
damnée. Le plancher n'est jamais frotté,
mais il est toujours sali. Près de la fendre se
trouve le secrétaire à cylindre du premier
clerc. La petite table du second clerc y' est
adossée. Sur une de ses parois, l'étude a pour
ornement ces grandes a fQches jaunes qui an-
noncent des ventes, des y ci talions entre ma-
jeurs et mineurs, des adjudications défini-
tives ou préparatoires. Sur les astres parois
'Sont des casiers qui vont de haut en bas, et
dont chaque compartiment est bourré de
liasses à étiquettes et à bouts de fil rouge. Les
«mgs inférieurs sont pleins de cartons d'un
?ert jauni par l'usage, sur lesquels se
lisent, soit les noms des gros clients, soit tes
-litres des principales affaires. Les vitres de la
îroisée laissent passer peu de jour. Partout
?êgno la poussière, Mais cette négligence est
concevable. Tout le monde entre dans une
s bu de. Personne n'y séjourne. Ici, tout est
'banal: lè mobilier qui se transmet avec la
chaTge. les affaires, qui se succèdent en se ré-
pétant. Un observateur qui chercherait des
profondeurs sous les surfaces dirait qu'il s'y
joue des drames et d-es comédies, et que, lors-
que la pièce est iatéressatite, le décor est in- °,
,dJfèt'ünt. ' _. ■ ' ^ I (
Les clercs-sont, — ou des fils de famille qui
font leur stage en attendant qu'ils achètent
une étude à leur tour, — ou de simples em-
ployés ayant un p. belle écriture et vouant
leur vie à Mil travail sans perspective d'avenir
ni de position. Mais ce.' derniers sont les plus
rares. En général, dans une étude, on est
jeune, on-espère et l'on rit. De quoi rit-on?..
Eh ! mon Dieu ! De rien, d'un client qui a des
culottes trop courtes, d'un autre qui bégaye
en parlant, d'un trois.ème qtii salue trop bas.
Une bonne femme entre lJrC jour dins'une
étude de Bourg. Un clerc lisait le journal à
haute voix.
t On attribue ceMpçen'die à la mal-
y ei M'a n ce.; ..,T ... .... V-.:
-h La EGalveillaiïGe ! dit la cliente, Pa-t-on;
arrêtée'? " ''
Il y a vingt ans de cela, Allez dans une
étude de Bou.rg, et vous verrez si l'on ne vous
répète pas le mot. ■ : :
Chaque province, chaque ville a ainsi sa
tradition. Il en est de la basoche comme de
l'armée. Certaines plaisanteries y sont héré-
ditaires. ■ ,
— Rien de nouveau ? dit le s°rgent.
— Pardon! répond le fusilier. Le banc,
qui était devant la caserne, a été détruit par
vétusté. ■ t
— Vétusté ! Qui est-ce , que je le flanque
au clou ?... " :
C'est vieux comme le monde, mais cela
fait toujours rire.
■ Dans certaines études, on rédige des Jour-
n'a:x tirés à deux exemplaires. Dans d'autres,
o -i organise des scies à l'usage des nouveaux.
L'instinct avec lequel on saisit, on développe
une mystification entre clercs est merveil-
leux et n'a son analogue que chez les ,pein-
tres et les sculpteurs. L'étude en -ce genre
est la rivale de l'atelier. On y fait des calem-
bours. Parfois, l'on y déjeune en corps. Les
vieilles pratiques sont restées.
CI Il n'est que déjeuners de clercs, dîners de
traitant et soupers de seigtieurs. »
Le dicton du dix-huitième siècle peut s'ap-
prq,ner au oox-neuvième.
Pour ma part, je me rappellerai "toujours,
avec un plaisir infini, les quatre années que
j'ai passées dans l'élude de Miuffiot, notaire
à Lyon. C'était de 1851 à ISSÎfc Dieu! que
nojs étions jeunes et que nous nous amu-
sions! Mes «amarades, qui sont aujourd'hui
maître un tei ou maître un tel, dans la
Bresse et dans le BCillijolais, doivent se rap-
peler parfois nos éclats de rire, au milieu de
leurs minutes et de leurs dossiers.
Mais ce n'est ni d'eux ni de moi qu'il s'a-
git. C'est du petit clerc, une figure particu-
lière aux grandes villes, et certainement, une
des plus intéressantes et des plus sympathi-
ques qui soient...
Le commun des petits clercs se signale par
des traits généraux : manches trop courtes,
cheveux trop plats, souliers trop lourds... >
' ; ' y-";' '3' •*.; , v i
En revanche, les espèce varient à rinûni. !
Le santé-ruisseau est en général un 'garçôn'
de^ treize : à - quatorze ans, qui tient .au ganvn
par les mœurs et à ta basoche par sa destinée.
Sans Dit;,é,,. sans frein,s; - ;
gueur, avide et paresseux, il chante îe Gha-
peau de la Marguerite el G'est Lê^pre-ûo^
que tout le monde èn est encore' à îenrty
1 ouvrier e et a Ohé 1 les petits agneaux !. Il
défile les plaisanteries du TMàmciirë dans
les corridors du palais, et il co'porte d'ét':de
en étude les mots à effets de la Lanterne :
« Je pris une feuille de papier, ministre,
et ,jlécri vis à celui de l'intérieur./.. 21 Il est
' ravi. Quand vient le soir, il va trouver sa
bonne femme de mère, qui demeure à Un
cinquième étage, qui le gronde de prendre
si peu de so'n de ses vêtements, et avec la-
quoHe il partage les trente ou quarante francs
qu'il gjjgne chaque mois.
Quelquefois aussi le petit olerc est vieux.,
Vous ^vez, de ces vieux auxquels on nè
oonne^as d'âge. Ils sont rasés, râpés, étri-
qnés; ils ne tiennent point de Dfà'ce: On se
demande : —^ui est-ce?... Mais on leur
voit des papierl-isous le bras, et l'on se ré-
pond : v— C'est un cierc.A Londres, on;se:
dirait: —C'est un Irlandais... Ces easqÚetli,
fères, comme disait Balzac en pariajjt des
employés, ont la taille emprisonnée dans un
hab:t noir dont les coutures sont blanches,
et ltur: front est le plus souvent surmonté
d'un chapeau à bord étroit, dont la forme
monte comme une colonne vers le ciel.
Le petit clerc de quatorze ans est le fils
d'un concierge ou d'une --muve cpcmployc.
Mais le vieux saute-ruisseau, d'où vient-il ?
Par combien de professions a-t-il passé? Quel
chemin a-t-il suivi dans la vie? De quel
fleuve est-il l'écume? De quel océan est-il
l'épave?... Rien ne se lit sur sa face blême,
sinon la résignation. Om sent qu'il est prêt àj
tort : à faire les commissions de l'étude, à
porter les billets doux du maître .cierG, à co-
pier les rôles. Qu'y a-t-il au bout de tout;
cela? Du pain. Et le .petit vieux sans âge a
l'air d'un affamé !... '
Un de ceux-là a été huissier en. province; :
la Chambre l'a forcé à vendre son étude. Cet
autre a mangé au jeu la fortune de son père,.
un usurier; il gagne soixante francs par mois,
et il trouve moyen de risquer encore dix,sous,
de temps en temps, dans un tripot. Mon aime ;
t stjuL»jjaW L!/./',75"'^ t:
b ise&airl-) oKiélès mu ,oob0-. '• -:,.b -:vu -:r fvy
Charles Jslfetï Qtr S -eotniTi^n ; qui avait été '
felofcn art Ci/qrtév' H'faiWait'tbni aufomsrtique-
ment. Une, deux; jff prèliAit'.tin carton.'Trois;
Il Ïb e'posait lét tèble.'^Uiier un dossier.
.Trois; sa J^to^é../ârojte;s'ànongeart*>et il se
: : pour se
^istr^ il;sa^ts^t .vl>:pii^s,.joiRts pir-dêssus
lavable;, .et il,;retombai,llruideir^ent. Ç'était' up
icompas pour laimarche- et un« horloge pour
l'exac,t'itude. Il ne riait jamais...
Je trouve, dans les Petits Français, l'his-
toire meryÊillense ,d'uA saii.te-ruisseau de
-PariS. s-v*'. •
i II- rappelait .Petit, • et U .travaillait chez un
av&ué..;
— Petit, va m'acheter d'eux saucisses...
Voilà quatre sous!... îf . ^
— Petit, une boite de radis pour moi !
■■ ■" Petit/fa":m,e')cirai,igëti Ce"î)illet de cinq
cents au passage Choiseul ! ...
. Dépêclie-toi, Rétit, il faut aller au tri—
"bunal remettre cette lettre à Fanfernot...
—Et passer au .greffe pour, ]?&-ŒàirfcMi«ha- .
let-BertllOUdv.jj y; r. :f...
— Et porter 'cet acte à l'enregistrement...
■ Un/ d-ètïx,"-; tPofe/^qTiatre,^ ëi&q;,' six !...
compte l'enfant sur 'tesdoigts.Ilien que ça!...
Par Où faut-il cbmmonçër?'.'..
. — Allons ! en avant, mïirche ! ' ': "
Je marcherai bien. si je. veux ! • '
Et le gamin s^v.sauye ea heurtant, comme
par megarde,un pa.n hOr.n¡lWUP unpeu épais qu'il
trouve dans le: Yfstibu1.e. i : ^ _
— Arrête, polisson, ai dis-mai si ton patron
est arrivé. •-■
- — Le patron n'arrive"""qtrlà-*sir• treurcs du
soir. '
— Bon, 'ja varls l'attendre.
— A votre, a'ise !."
Petit allonge ses dix doigts au bout de son
nez et reprend sa course; il a trouvé pouf
descendre l'escalier un moyen iïig-éniwix qui
consiste à se laisser g-isserle long de la
rampe. S'il'ile se tue pfe^il arrivera beaucoup
plus vité:ainsi. , : '
En effet,^"il'" est (le ' retour, au bout d'une
.heMre.- c,.r ;V, Mj-;- - v '
Toute?:les commissions sopt faites.
Seulement, 1-e, troisième ,clerc s'aperçoit
qu'il n'y a qu'une saacisse dans le petit .papier
qu'on lui remet. n ;;■: c ,■ ...
— Pe ti.t, je t'avais dit de m'acheter deux
saucisses. ' ■
LA FAMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉ
9
IX
£e sommeil du chevalier djEsparrQj^ffl,^JÇat
p as de longue, duréo »
Soie que le narco'J rue", employé par Te 'vieux
marq;«iSj"de....jla^R.^'Iie-î^ajnbertj fut "à peu pçès
inoffensif, soit qti ? ie calme et le sile'née,, succé-
dait tout i cpup .anx rn-es tM-uyants et,aux COR-,
vexations qui l'entouraient, eussent eu une ac-
tion directe s,ur son système nerveux, le cheva-
Yûir les numéros parus depuis Je 21 îuln.
lier n'était pas seul depuis une heure qu'il s'é-
veilla. r;
Il s'éveilla, non point à la manière des gens
qui ont eu le cauchemar, se frottent les yeux,
cherchent où ils sont, et dont la pensée ne se
dégage qu'avec peine des brouillards du som-
moil, retiouvant lentement et peu à peu sa lu-
cidité, mais tout d'un bloc,, tout d'une pièce,
sans étonnement copimé sans fatigue
Le Récent et ses convives étaient partis.
Mais la table encore dressée supportai les
restes du souper.
Des lampes à globe dépoli répandaient autour
d'elles une clarté douce,et mystérieuse.
Enfin, un profond silence régnait. ■ .
Le chevalier se dirigea d'abord vers ja table,
prit un verre et se versa à boire. ' - :
Puis il alla regarder la ,p,endule sa trou-
vait surda daeniinée.., . ,. : ....- ;.1S, ..
Il était trois hçures du ,matin. , -l-'"'■■
Un sourie dont eût, été diîTicilet.fùion im-
possible, de fixer la signification glissa alors sur
ses lèv:es.■ { \
— J'ai le temps, murmura-t-il. •
Il s'approcha d'une glace et jeta un coup d'eeil
sur, tuine.1;
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mais ce ne fut pas à cela qu'il prit garde.-
Ce qu'il examina avec une scrupuleuse atten- I
tion , ce fut sa collerette et le ruban bleu de
ciel noué par des s us en guise de cravate.
— Ah 1 ah t fit-il. -".p"
Il devenait évident pour lui que le nœud avait
été défait, car il n'était pas attaché de la même
manière, que sa colle: ette avait été puverte, et
que très-certainement cette, petite piqûre qu'il
avait au cou avait été montrée au Régent et -à ses
convives.. /..... ,. f ..,(r-
Un nouveau sourira glissa sur ses lè-vrës :
— Parfait ! dit-il entre ses dénts,,' T.'.
Et il chercha son manteau qu'il avait, en en-
trant, jeté sur un meuble, rajusta :1e ceinturon
de sa petite épée de cour, rétablit un peu d'or-
dre dans sa ceitïure, car il portait ses cheveux
longs et sans poudre, mit san trçome sous le
bras et murmura encore : • - i,.
— Maintenant, partons. A niolris:qu'il n'y'ait
de grands changements au Raila Royal et qu'on
en ferme à présent toutes les 'parte,, la^uùit, au
lieu de les laisser discrètement ou verbes, pou,r
tous lès amoureux qui ont. besoin au grand air,
je serai dans dix minutes ,,,dans la ri^...f?ai-a)ti-
Honoré, et on aura de nouveau perdu mes
traees.
Parlant ahisi, le chevalier d'Esparron fit un-
pas vers cette même porte par où le Régent
avait fait partir le vieux marquis de la Roche- j
Lambert, ^ .. I
Muisun geste d'impatience lui échappa, cat
cette porte était fermée. ' ' - ; .. :
— Heureusement, se dit-il è-reoté,, qUe tout
le monde doit être ou endormi ou dans les Mas
dé la beauté, et qu'on né s'occupe plus de moi.
• Il se dirigea dofiç'^ôrs uné "autre porté; la-
quelle donnait t}U1¡r:;: une ^nticliambre attenante
au ,ranq e'^çatier. M... V ' , ...
, Cetta poxta n'hait, pas fermée à clé, et elle
ceda-.s.ons ^n^ain,du chevalier.^,. -3 yfc ,
; Mais comme il allait, erl franchi©ie'seailf il se
trouva face à facai. alVeC motisefgtîeSUl? 'PQ.iHppe
d'Orléan-sluî'-inê me.
— Eh bien t fi -Lla R^ent,. as-tu bien dormi,
mon mignon? .
f mif 0ser
le chevalier, il le repoussa doucement dans la
salle,du^qper., vc , :/H-
— fOiS' tfrkbfé alrafô-t^dohc" coitîtri'é' ce-iaV Àon
ami? dit-il. _. s . '.v
~'l&aw.';^îàolfsè^gWeÛ^.'iiU:'$1 ■.. ..
— T^ti'^iefisfélsr^ié^n continua le Régent avec
bonhomie, que depuis '&ofé^môis qu'on ne t'a
vti, ;il! est bièn;p6ssîl|lé qu'oiï ,*It\ dispofse de toa
logis,"et si tu sortais pour l'aller ebercljer..> ..,
Pas précisément, monseigneur. ■ " '
' —Où. allais-fil"donc? f . '
— Mais, dtÍmet fît naïvement d'Esparron, je
m'en allais,. ; .... :.
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