Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-02-16
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 16 février 1868 16 février 1868
Description : 1868/02/16 (A3,N668). 1868/02/16 (A3,N668).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717670n
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
5 ml îe numéro
. JOURNAL - QUOTIDIEN '
5 cent. le numéro
i
Abo:»*S2MENTS — mis mois. s, :1 mois, Un aa...
l'ahs ! a e 9 fr. AS fr. -
Département?.. , . & il et, .., ...
Administrateur: Ë. D KL s AUX. :
f t:
3" année. — DIMANCHE.^ FEVRIER 1868. - No 668
Directeur-Propriétaire : i A N K 1 N.
Rédacteur en chef : A. DE BALATHIER ï3RAGEi,ONSf E.
BUREAUX d'abonnement : 9, rue Drouot,
---------- ADHl:,(ISTRA'fION : 13, place Breda. 1 ,
PARIS, 15 FEVRIER 1868.
FIGURES DE LA SEMAINE
AUBER
Ce soir, l'Opéra-Comique donnrnTiTfVtf-
mier jour de bonheur de M. Auber.
L'auteur du nouvel opéra a quatre-vingt-
quatre ans; il faisait des romances sous le
Directoire.
C'est une gloire toute française. Parisien
par excellence, M. Auber n'a jamais quitté
Paris. Dans sa jeunesse, fils d'un riche corn--
merçant, il montait à cheval, fréquentait les
coulisses, et menait la vie de la fashion.
Vieillard, il fait exactement la même chose.
Sa musique, riante, facile, heureuse, pleine
d'élégance et de bonne grâce, ressemble à sa
vie. - v,:
S'il a travaillé, c'est par nécessité, plutôt
que par goût. Mais il est si bien doué que,
faisant un métier, il a voulu le faire mieux
que personne, et qu'il y a réussi.
Rossini, qui a" beaucoup d'esprit, et auquel
nn mot suffit pour exprimer une idée, disait
de lui, dès ses débnts: « Il fait de la petite
musique, soit ; mais il l'écrit en grand mu-
sicien. »
Il y a une très-grande analogie entre
M. Auber et son librettiste favori, M. Scribe.
Féconds tous deux, tous deux pleins d'ima-
gination, ils apportaient à l'œuvre commune
une part égale. Le musicien pourtant est supé-
rieur au poëte : il sait la musique; le poëte ne
savait pas le français.
J'ai dit que la nécessité nous avait donné
le plus fécond de, nos compositeurs.,
Rien de plus vrai. Lorsque ie père de
M. Auber mourut, ce qui resta de plus net de
sa succession, ce fut une veuve et deux en-
fants sans abri, et presque sans pain.
Le compositeur, déjà connu par des études
brillantes et quelques essais malheureux,
avait alors l'âge de tous les jeunes composi-
teurs, c'est-à-dire quarante ans. Il dut songer
à demander sérieusement des ressources à
son art. Il alla solliciter un poëme de Planard,
le librettiste en vogue. I
— Un'poëme ! s'écria Planard, dont la mo. |
déplie n'q;.i&mais eu la chance de passer en
proverbe^'lin -poëme ! Rien que cela ! Merci
bièâl -
. , M..ofî^ate^Chadeuil a raconté ces premiè-
res rela^siun peu tourmentées. f.
f ,Auber: flt., sa=cour à Planard, à Maie p'la-
/nard; à tous'les-Planard. Les P!anard habi-
taient Passy. C'était loin. N'importe ! Il par-
il s'efFmrait d'attendrir ses juges. Enfin les
Planard -de deuxième, ordre se firent ses auxi-
' liaires, et Planard Ier lui confia deux livrets
Le premier, le Testament et les nil/ets'
doux, tomba à plat. Le poëte voulut reprendre
le second.
— Je l'ai, répondit le musicien,"et je le
garde pour tenter de nouveau la fortune.. '
Cette fois, la fortune lui sourit.
Planard lui remit un troisième poë'rtïe,
celui d'Emma, Encore un succès.
Je cite textuellement M. ChadeuH :
tr Un matin, M. Auber reçut ce billet de
Scribe qu'il ne connaissait pas : a Monsieur,
voulez-vous me permettre de placer, dans
un vaudeville que j'écris en ce moment pour
le théâtre de Madame, votre ronde si jolie et
si justement populaire de In Bergère Châte-
laine? Je ne vous cacherai pas, monsieur, j
que je me sute engagé auprès de mon direc-
teur à faire réussir ma pièce, et que j'ai
compté pour cela sur votre charmante mu-
sique. » C'était flatteur.
Auber répondit : « Ma ronde est peu dé
chose, monsieur, et votre esprit peut se pas-
ser de mon faible secours. Mais si, avec la
permission que vous me demandez et dont
vous n'avez nul besoin, je pouvais vous prê-
ter la jolie voix et le joli visage de Mme Bou-
langer, je crois que nous ferions tous les deux
une bonne affaire. » Ces lettres échangées
furent le point de départ d'une collaboration
qui allait produire des enchantements, de-
puis Leicester jusqu'à la Cireassienne, en
passant par vingt succès... »
Nous en sommes au M<«'OM.
La fable de cet opéra fut empruntée par
Scribe à Bachaumont, qui la tenait d'un
gazetier anglais à court de nouvelles, lequel
l'avait reçue d'un Strasbourgeois. Quoi qu'il
en soit» voici l anecdote primitive racontée 1
par M. '-Jouvin : Une nuit, le bourreau de j
Strasbourg entend frapper à sa porte ; il ou-
vre. Trois hommes masqué5,armés jusqu'aux !
de.nt-.,Iui ordonnent de les suivre. Un carrosse
attendait à la porte ; les quatre personnages !
s'y placent silencieusement, et les chevaux !
partent au grand trot, après que les trois j
< J^mmfU^iQ^squés ont préalablement bandé ;
les yeux -au. Samson des bords du Rhin. Au j
bout de deux heures, la voiture s'arrête: on !
descend, on monte un escalier. on est arrivé. !
Le bandeau est dénoué, et le bourreau se ■
trouve dans une g'I'ande' salle tendue de noir.
Au milieu est placé un billot également re-
couvert d'un drap noir, et auprès du billot
tout ce qu'il faut pour s'en servir. On intro-
duit une femme jeune et belle, couverte,
ainsi que ceux qui l'accompagnent, de longs
vêtements de deuil. Un homme d'un âge 1
mÚr, auquel tout le monde semble obéir, !
prend la jeune femme dans ses bras, la cou- ;
vre de baiser? et do larmes, et la livre à
l'exécuteur. Puis, l'homme à la hache fut
ramené chez lui avec les mêmes précautions !
mystérieuses qu'on avait prises pour l'en '
tirer.. j
Telle est l'historiette que Scribe ,intro- ¡
dnisit dans sa pièce. Quant a la partition, elle ;
! fut déclarée la meilleure d'Auber. On l'ap- j
! planditÍ tout rompre, et les orgues de Bar- j
barie s'en emparèrent en détail, pour répéter ;
ses mélodies aous nos croisées. j :
Fioi-ell,u, suivit de près le Maçon. Puis vint
la Muale>
La Muette, plus qu'aucun antre opéra,
| contribua à la fortune de M. Auber.
Un peu après 1830, Louis-Philippe fit man-
der le compositeur aux Tuileries.
i ( — Ah ! monsieur, lui dit-il, vous nous avez
été phis utile que vous ne sauriez le croire.
! — Comment cela, sire ?
— Toutes les révolutions se ressemblent,
monsieur Auber. Chanter celle de Naples ,
c'est provoquer celle de Paris. Que puis-je
faire pour vous être agréable?
— Sire, je ne suis pas ambitieux.
— J'ai l'intention de vous nommer direc-
teur des concerts de la cour.
Le compositeur s'inclina.
— Soyez tranquille, dit le roi, j'aurai de la i
mémoire.
Il en eut en effet. |
En 1835, la Légion d'honneur envoya à *
M. Auber la rosette d'officier, et, en 1847, la
croix de commandeur. Depuis 1842, l'auteur
de la Muette avait succédé à Chérubini, dans
la direction du Conservatoire.
J'emprunte ces derniers détails à M. Eu-
gène de Mirecourt, qui ne laissera pas sans
doute échapper cette occasion de réclamer
fer iourW111X.
Tout le monde, en France, connaît l'œuvre
de M. Auber. Qui n'a entendu un de ces
i opéras : Fra Diavolo, l'Ambassadrice, Haydée,
le Domino noir, les Diamants de la Couronne,
etc., etc.?
1 Tout le monde, à Paris, connaît l'homme.
, On rencontre partout cette petite taille droite
I et carrée, cette figure fine et froide, aux yeux
j sans regard, au sourire pâ,le, à l'air ennuyé.
Les jambes sont toujours en mouvement; la
- j masque est presque toujours immobile.
i Dans les salons, sur les boulevards, surtout
; dans les coulisses, le vieux maître est popu-
f laire. On admire son talent, et l'on répète ses
: mots comme ceux de Rossini.
; — Il est triste de vieillir, lui disait quel-
j qu'un.
— Oui, répondit-il; mais c'est encore le
seul moyen qu'on ait trouvé de vivré long-
temps.
~à
Une autre fois, quelqu'un enlevait un che-
blanc du collet de son habit.
— Oh! dit M. Auber en souriant, j'aurai
TÏËM près d'un vieillard.
...... •- t
Il a'défini ainsi 111 musique de l'avenir par
M. Richard Wagner :
— C'est du Berlioz, moins la mélodie.
ils sont une demi-douzaine comme cela, à
Paris, jeunes dans leur vieillesse, que leurs
croyances n'ont jamais embarrassés, qui ins-
" pirent plus de sympathie que de respect, mais
auxquels on pardonne tout, parcé qu'ils ont
un grancf talent et parce que leur œuvre est
belle.
M. Auber est toujours directeur du Conser-
vatoire.
En 1861, il a été fait grand officier de la
! Légion d'honneur par Napoléon III.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
UN MOULIN SANS EAU
XXXIII
N , 99
L'Irlandaise avait longuement causé, dans la
jhambrette du clocher, avec l'homme gris, et,
sans doutc,- elle savait ce qui allait se passer,
car elle ne- fit aucune objection et monta dans
le cab à quatre places que Shoking, qui était
allé en avant, eut bientôt découvert.
Voir ic numéro du 22 novembre,
— A Hampsteadt! cria l'homme gris au
'cocher.
L'enfant ne demanda rien non plus.
N'était-il pas avec sa mère et avec l'homme
qui l'avait sauvé du moulin ?
D'ailleurs, cet enfant était presque un
homme, — il l'avait prouvé déjà.
Le courage, le raisonnement, ces deux qua-
lités essentiellement viriles, avaient chez lui
devancé les années.
Ralph avait vu pour la, première fois l'homme
gris dans la prison de la cour de police de Kil-
burn.
Tout ce que cet homme, qui lui avait parlé
le cher idiome de son pays, lui avait prédit, s'é-
tait réalisé.
Ralph avait donc confiance dans l'homme gris
comme dans sa mère, et lorsque celui-ci lui dit.
tandis que la voiture roulait :
— Mon petit Ralph, seras-tu bien obéis-
sant?
— Oh! oui, monsieur, répondit-i!.
— Feras-tu tout ce que je voudrai?
— Oui, monsieur.
Le cab traversa de nouveau Waterloo Bridge,
remonta les beaux quartiers jusqu'à-? llotbç>-rn -1
street Pt prit la route d'Hampsteadt.
— Est-ce que nous retournons chç? mis-'.t'ess
Fartoche? demanda Shckin-,:
: Ce nom fit tressaillir îa mère et t'enfant.
| Cependant, aucune crainte ne se peignit sur
leur visage.
. - Non, répondit l'homme gris. Nous allons
simplement à sa maison de campagne.
Shoking crut avoir mal entendu,
— Est-ce que vous avez une maison de cam-
pagne à Hampsteadt. ma!'rc? llemanda-t-il.
Ce ri'est pas moi.
— Qui donc. alors ?
r- C'est toi.
— Moi? rit Shoking :;ltq¡{J,tit.
— Toi-même, mon (:j¡('r,.
,- Maitre, replût SllOking. je sui:, habitué à
vous voir faire des mi-acles, niais il en ezt que
Dieu lui-même, je crois, ne saurait faire.
— Bali ! fit l'homme gris.
— Non-seulement je n'ai pas de maison de
campagne, mais encore je n'aurai pas de domi-
cile dans Londres demain, car ma dernière se-
maine payée à mon boarding^oxi>ïr&' demain,
et...
Shoking s'arrêta.
— Et? fit l'homme gris, en sonnant.
— Et je. n'ai plus d'argent, balbutia Sh&king,
en baissant la tête.
— Comment, dit l'homme gels, q'a! se plut à
prendre un fcir sévère, tu as déj\ fY'l't'ns:' lC3
dix livres de lord v
La tête de Shoking retomba presque au milieu
de sa poitrine.
— Dame! fit-il, j'ai cru que ça ne finirait ja-
mais, et je suis allé un peu vite, ^
— Après cela, ditl'homme gris, un mort
plus besoin de domicile.
— Comment un mort?
— Sans doute.
— Mais je suis bien vivant? dit. Shoking.
— Je te prouverai tout à l'heure, non-sftle..,
ment que tu os mort et qu'il n'y a plus de-Shft-
king en ce moïlde, mais encore...
— Ah! par Saint-George, s'écria Shoki?og,
je suis crédule, maître, mais pas à ce peint*'..
— Attends, ta verras.
Shoking regarda Thonante gris avec véri-
table inquiétude.
On passait alors auprès d'un reverh&.re et sa
lueur tombait d'aplomb sur le visage,
— Bbn ! dit celui. ci, souriant \&qi.ours, tu te
demandes si je ne suis pas fou.., /
Shoking ne répondit pas. /
— Et si au lieu de me suivre, à Hampsteadt,
tu ne ferais pas mieux de rur; conduire à Bed-
lam ?
— Dame! fit naïvement Sbjking.
— Eh bion ! un pou de patience, mon cher,
et tu verras que ce que je t'ai tt~*~ tst la
pure vérité
5 ml îe numéro
. JOURNAL - QUOTIDIEN '
5 cent. le numéro
i
Abo:»*S2MENTS — mis mois. s, :1 mois, Un aa...
l'ahs ! a e 9 fr. AS fr. -
Département?.. , . & il et, .., ...
Administrateur: Ë. D KL s AUX. :
f t:
3" année. — DIMANCHE.^ FEVRIER 1868. - No 668
Directeur-Propriétaire : i A N K 1 N.
Rédacteur en chef : A. DE BALATHIER ï3RAGEi,ONSf E.
BUREAUX d'abonnement : 9, rue Drouot,
---------- ADHl:,(ISTRA'fION : 13, place Breda. 1 ,
PARIS, 15 FEVRIER 1868.
FIGURES DE LA SEMAINE
AUBER
Ce soir, l'Opéra-Comique donnrnTiTfVtf-
mier jour de bonheur de M. Auber.
L'auteur du nouvel opéra a quatre-vingt-
quatre ans; il faisait des romances sous le
Directoire.
C'est une gloire toute française. Parisien
par excellence, M. Auber n'a jamais quitté
Paris. Dans sa jeunesse, fils d'un riche corn--
merçant, il montait à cheval, fréquentait les
coulisses, et menait la vie de la fashion.
Vieillard, il fait exactement la même chose.
Sa musique, riante, facile, heureuse, pleine
d'élégance et de bonne grâce, ressemble à sa
vie. - v,:
S'il a travaillé, c'est par nécessité, plutôt
que par goût. Mais il est si bien doué que,
faisant un métier, il a voulu le faire mieux
que personne, et qu'il y a réussi.
Rossini, qui a" beaucoup d'esprit, et auquel
nn mot suffit pour exprimer une idée, disait
de lui, dès ses débnts: « Il fait de la petite
musique, soit ; mais il l'écrit en grand mu-
sicien. »
Il y a une très-grande analogie entre
M. Auber et son librettiste favori, M. Scribe.
Féconds tous deux, tous deux pleins d'ima-
gination, ils apportaient à l'œuvre commune
une part égale. Le musicien pourtant est supé-
rieur au poëte : il sait la musique; le poëte ne
savait pas le français.
J'ai dit que la nécessité nous avait donné
le plus fécond de, nos compositeurs.,
Rien de plus vrai. Lorsque ie père de
M. Auber mourut, ce qui resta de plus net de
sa succession, ce fut une veuve et deux en-
fants sans abri, et presque sans pain.
Le compositeur, déjà connu par des études
brillantes et quelques essais malheureux,
avait alors l'âge de tous les jeunes composi-
teurs, c'est-à-dire quarante ans. Il dut songer
à demander sérieusement des ressources à
son art. Il alla solliciter un poëme de Planard,
le librettiste en vogue. I
— Un'poëme ! s'écria Planard, dont la mo. |
déplie n'q;.i&mais eu la chance de passer en
proverbe^'lin -poëme ! Rien que cela ! Merci
bièâl -
. , M..ofî^ate^Chadeuil a raconté ces premiè-
res rela^siun peu tourmentées. f.
f ,Auber: flt., sa=cour à Planard, à Maie p'la-
/nard; à tous'les-Planard. Les P!anard habi-
taient Passy. C'était loin. N'importe ! Il par-
il s'efFmrait d'attendrir ses juges. Enfin les
Planard -de deuxième, ordre se firent ses auxi-
' liaires, et Planard Ier lui confia deux livrets
Le premier, le Testament et les nil/ets'
doux, tomba à plat. Le poëte voulut reprendre
le second.
— Je l'ai, répondit le musicien,"et je le
garde pour tenter de nouveau la fortune.. '
Cette fois, la fortune lui sourit.
Planard lui remit un troisième poë'rtïe,
celui d'Emma, Encore un succès.
Je cite textuellement M. ChadeuH :
tr Un matin, M. Auber reçut ce billet de
Scribe qu'il ne connaissait pas : a Monsieur,
voulez-vous me permettre de placer, dans
un vaudeville que j'écris en ce moment pour
le théâtre de Madame, votre ronde si jolie et
si justement populaire de In Bergère Châte-
laine? Je ne vous cacherai pas, monsieur, j
que je me sute engagé auprès de mon direc-
teur à faire réussir ma pièce, et que j'ai
compté pour cela sur votre charmante mu-
sique. » C'était flatteur.
Auber répondit : « Ma ronde est peu dé
chose, monsieur, et votre esprit peut se pas-
ser de mon faible secours. Mais si, avec la
permission que vous me demandez et dont
vous n'avez nul besoin, je pouvais vous prê-
ter la jolie voix et le joli visage de Mme Bou-
langer, je crois que nous ferions tous les deux
une bonne affaire. » Ces lettres échangées
furent le point de départ d'une collaboration
qui allait produire des enchantements, de-
puis Leicester jusqu'à la Cireassienne, en
passant par vingt succès... »
Nous en sommes au M<«'OM.
La fable de cet opéra fut empruntée par
Scribe à Bachaumont, qui la tenait d'un
gazetier anglais à court de nouvelles, lequel
l'avait reçue d'un Strasbourgeois. Quoi qu'il
en soit» voici l anecdote primitive racontée 1
par M. '-Jouvin : Une nuit, le bourreau de j
Strasbourg entend frapper à sa porte ; il ou-
vre. Trois hommes masqué5,armés jusqu'aux !
de.nt-.,Iui ordonnent de les suivre. Un carrosse
attendait à la porte ; les quatre personnages !
s'y placent silencieusement, et les chevaux !
partent au grand trot, après que les trois j
< J^mmfU^iQ^squés ont préalablement bandé ;
les yeux -au. Samson des bords du Rhin. Au j
bout de deux heures, la voiture s'arrête: on !
descend, on monte un escalier. on est arrivé. !
Le bandeau est dénoué, et le bourreau se ■
trouve dans une g'I'ande' salle tendue de noir.
Au milieu est placé un billot également re-
couvert d'un drap noir, et auprès du billot
tout ce qu'il faut pour s'en servir. On intro-
duit une femme jeune et belle, couverte,
ainsi que ceux qui l'accompagnent, de longs
vêtements de deuil. Un homme d'un âge 1
mÚr, auquel tout le monde semble obéir, !
prend la jeune femme dans ses bras, la cou- ;
vre de baiser? et do larmes, et la livre à
l'exécuteur. Puis, l'homme à la hache fut
ramené chez lui avec les mêmes précautions !
mystérieuses qu'on avait prises pour l'en '
tirer.. j
Telle est l'historiette que Scribe ,intro- ¡
dnisit dans sa pièce. Quant a la partition, elle ;
! fut déclarée la meilleure d'Auber. On l'ap- j
! planditÍ tout rompre, et les orgues de Bar- j
barie s'en emparèrent en détail, pour répéter ;
ses mélodies aous nos croisées. j :
Fioi-ell,u, suivit de près le Maçon. Puis vint
la Muale>
La Muette, plus qu'aucun antre opéra,
| contribua à la fortune de M. Auber.
Un peu après 1830, Louis-Philippe fit man-
der le compositeur aux Tuileries.
i ( — Ah ! monsieur, lui dit-il, vous nous avez
été phis utile que vous ne sauriez le croire.
! — Comment cela, sire ?
— Toutes les révolutions se ressemblent,
monsieur Auber. Chanter celle de Naples ,
c'est provoquer celle de Paris. Que puis-je
faire pour vous être agréable?
— Sire, je ne suis pas ambitieux.
— J'ai l'intention de vous nommer direc-
teur des concerts de la cour.
Le compositeur s'inclina.
— Soyez tranquille, dit le roi, j'aurai de la i
mémoire.
Il en eut en effet. |
En 1835, la Légion d'honneur envoya à *
M. Auber la rosette d'officier, et, en 1847, la
croix de commandeur. Depuis 1842, l'auteur
de la Muette avait succédé à Chérubini, dans
la direction du Conservatoire.
J'emprunte ces derniers détails à M. Eu-
gène de Mirecourt, qui ne laissera pas sans
doute échapper cette occasion de réclamer
fer iourW111X.
Tout le monde, en France, connaît l'œuvre
de M. Auber. Qui n'a entendu un de ces
i opéras : Fra Diavolo, l'Ambassadrice, Haydée,
le Domino noir, les Diamants de la Couronne,
etc., etc.?
1 Tout le monde, à Paris, connaît l'homme.
, On rencontre partout cette petite taille droite
I et carrée, cette figure fine et froide, aux yeux
j sans regard, au sourire pâ,le, à l'air ennuyé.
Les jambes sont toujours en mouvement; la
- j masque est presque toujours immobile.
i Dans les salons, sur les boulevards, surtout
; dans les coulisses, le vieux maître est popu-
f laire. On admire son talent, et l'on répète ses
: mots comme ceux de Rossini.
; — Il est triste de vieillir, lui disait quel-
j qu'un.
— Oui, répondit-il; mais c'est encore le
seul moyen qu'on ait trouvé de vivré long-
temps.
~à
Une autre fois, quelqu'un enlevait un che-
blanc du collet de son habit.
— Oh! dit M. Auber en souriant, j'aurai
TÏËM près d'un vieillard.
...... •- t
Il a'défini ainsi 111 musique de l'avenir par
M. Richard Wagner :
— C'est du Berlioz, moins la mélodie.
ils sont une demi-douzaine comme cela, à
Paris, jeunes dans leur vieillesse, que leurs
croyances n'ont jamais embarrassés, qui ins-
" pirent plus de sympathie que de respect, mais
auxquels on pardonne tout, parcé qu'ils ont
un grancf talent et parce que leur œuvre est
belle.
M. Auber est toujours directeur du Conser-
vatoire.
En 1861, il a été fait grand officier de la
! Légion d'honneur par Napoléon III.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
UN MOULIN SANS EAU
XXXIII
N , 99
L'Irlandaise avait longuement causé, dans la
jhambrette du clocher, avec l'homme gris, et,
sans doutc,- elle savait ce qui allait se passer,
car elle ne- fit aucune objection et monta dans
le cab à quatre places que Shoking, qui était
allé en avant, eut bientôt découvert.
Voir ic numéro du 22 novembre,
— A Hampsteadt! cria l'homme gris au
'cocher.
L'enfant ne demanda rien non plus.
N'était-il pas avec sa mère et avec l'homme
qui l'avait sauvé du moulin ?
D'ailleurs, cet enfant était presque un
homme, — il l'avait prouvé déjà.
Le courage, le raisonnement, ces deux qua-
lités essentiellement viriles, avaient chez lui
devancé les années.
Ralph avait vu pour la, première fois l'homme
gris dans la prison de la cour de police de Kil-
burn.
Tout ce que cet homme, qui lui avait parlé
le cher idiome de son pays, lui avait prédit, s'é-
tait réalisé.
Ralph avait donc confiance dans l'homme gris
comme dans sa mère, et lorsque celui-ci lui dit.
tandis que la voiture roulait :
— Mon petit Ralph, seras-tu bien obéis-
sant?
— Oh! oui, monsieur, répondit-i!.
— Feras-tu tout ce que je voudrai?
— Oui, monsieur.
Le cab traversa de nouveau Waterloo Bridge,
remonta les beaux quartiers jusqu'à-? llotbç>-rn -1
street Pt prit la route d'Hampsteadt.
— Est-ce que nous retournons chç? mis-'.t'ess
Fartoche? demanda Shckin-,:
: Ce nom fit tressaillir îa mère et t'enfant.
| Cependant, aucune crainte ne se peignit sur
leur visage.
. - Non, répondit l'homme gris. Nous allons
simplement à sa maison de campagne.
Shoking crut avoir mal entendu,
— Est-ce que vous avez une maison de cam-
pagne à Hampsteadt. ma!'rc? llemanda-t-il.
Ce ri'est pas moi.
— Qui donc. alors ?
r- C'est toi.
— Moi? rit Shoking :;ltq¡{J,tit.
— Toi-même, mon (:j¡('r,.
,- Maitre, replût SllOking. je sui:, habitué à
vous voir faire des mi-acles, niais il en ezt que
Dieu lui-même, je crois, ne saurait faire.
— Bali ! fit l'homme gris.
— Non-seulement je n'ai pas de maison de
campagne, mais encore je n'aurai pas de domi-
cile dans Londres demain, car ma dernière se-
maine payée à mon boarding^oxi>ïr&' demain,
et...
Shoking s'arrêta.
— Et? fit l'homme gris, en sonnant.
— Et je. n'ai plus d'argent, balbutia Sh&king,
en baissant la tête.
— Comment, dit l'homme gels, q'a! se plut à
prendre un fcir sévère, tu as déj\ fY'l't'ns:' lC3
dix livres de lord v
La tête de Shoking retomba presque au milieu
de sa poitrine.
— Dame! fit-il, j'ai cru que ça ne finirait ja-
mais, et je suis allé un peu vite, ^
— Après cela, ditl'homme gris, un mort
plus besoin de domicile.
— Comment un mort?
— Sans doute.
— Mais je suis bien vivant? dit. Shoking.
— Je te prouverai tout à l'heure, non-sftle..,
ment que tu os mort et qu'il n'y a plus de-Shft-
king en ce moïlde, mais encore...
— Ah! par Saint-George, s'écria Shoki?og,
je suis crédule, maître, mais pas à ce peint*'..
— Attends, ta verras.
Shoking regarda Thonante gris avec véri-
table inquiétude.
On passait alors auprès d'un reverh&.re et sa
lueur tombait d'aplomb sur le visage,
— Bbn ! dit celui. ci, souriant \&qi.ours, tu te
demandes si je ne suis pas fou.., /
Shoking ne répondit pas. /
— Et si au lieu de me suivre, à Hampsteadt,
tu ne ferais pas mieux de rur; conduire à Bed-
lam ?
— Dame! fit naïvement Sbjking.
— Eh bion ! un pou de patience, mon cher,
et tu verras que ce que je t'ai tt~*~ tst la
pure vérité
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 90.18%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 90.18%.
- Collections numériques similaires Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "BnPlCo00"
- Auteurs similaires Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "BnPlCo00"
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k4717670n/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k4717670n/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k4717670n/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k4717670n/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k4717670n
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k4717670n
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k4717670n/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest