Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-01-22
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 janvier 1868 22 janvier 1868
Description : 1868/01/22 (A3,N643). 1868/01/22 (A3,N643).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717645k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETIT PRESSE
l 1 1 5 cent. le numéro
' . _ 1 TOURNAI. QUOTIDIEN . 1
I
S cetrt. le iiisfâér®
ABONNEMENTS. — Trois mois. Six mois. Cn an.
Pans S fr. 9 fr. f 8 fr.
Départements.. ® fit S 9 ■ 1
Administrateur : E. Delsaox.
.
*
3me année. — MERCREDI 22 JANVIER. 1868. — Ah 643
Directeur- Proprié taire : J/.\,n Ii i N.
Réducteur en chef: A. uz JUlatiher Brag elonm-E.
Bureaux i» * a. b 01: n b m k k t : ?, rae'Spouoi.
ABMiNJSTHA'rtOîi : 13, vbce
PARIS, 21 JANVIER 1868.
LES DEUX BALS
Le bal des Allemands
Des diplomates, des banquiers, des com-
merçants, quelques grandes dames, une foule
de bourgeoises, dont la parure atteste la ri-
chesse , remplissent les salons du Grand-
hôtel.
, Le prix d'entrée du bnl est de' dix francs
pour une femme de quinze francs pour un
cavalier. Depuis un mois, un comité dont
: font partie Mme la princesse de Metternicti,
Mme la baronne de Rothschild et vingt autres
dames patronesses à la mode par leurs titres,
leur fortune, ou leur succès dans le monde,
s'est mis à l'œuvre. Tous les billets ont été
placés. La recette sera énorme. Tant mieux.
Cfar son emploi sera excellent.
Il s'agit d'assister les Allemands pauvres
■ que la misère a pousses à l'émigration et qui
n'ont pas trouvé en France l'aisance qu'ils
venaient y demander au travail.
Les Allemands s'acclimatent facilement à
I'aris,. quelques-uns même y font fortune;
mais la masse des emigrants est t?lle que les
misérables 'en forment toujours la majo-
. - rité. ~
Vous avez tous rencontré dans les gares de
. chemins de fer ces groupes désolés, composés
. du père; de la mère, quelquefois d'un aïalïtet
; toujours d'une demi-douzaine d'enfafi#.
mère, assise sur quelque mauvais , paquet
de. linge, allaite son, dernier-né, tandis que
les autres grouillent autour d'elle, et que le
" ; père, debout, la figure fatiguée, mais ferme
et douce, regarde devant lui, semblant jeter
sa patience saxonne en défi à la destinée.
/A Paris, ces gens-là logent à la Chapelle, à
la Villette, à Believille, à Ménilmontant.
Rien de lugubre, surtout pendant, l'hiver,
'comme ces ruches humaines dont les habi-
tants cherchent leur subsistance, par la pluie
• et le froid.
» «s
* »
Le 8 décembre 1850, le révérend père
Chable se dit qu'il sera le protecteur de ces
pauvres émigrés.
Des ressources, il sait qu'il n'en a pas, mais
Il sait aussi que la foi soulève les montagnes,
et qu'.en faisant appel au dévouement on est
jou ioîirs éç&yté..
i Un matinr de ,Pltn-t1R, il-avise
une vieille maison et la 10ue. Deux ouvriers
sont appelés, qui abattent les cloisons, et font
de l'intérieur une seule et vaste pièce. Cette
pièce sera la chapelle.
Bientôt,dans le voisinage.s'élèvent deux es-
pèces de hangars fermes ; l'un est une école
allemande de filles, l'autre une école alle-
, mande de garçons.
L'établissement fraternel gmndM. Les res-
sources lui font défaut. De nouvelles écoles
sont nécessaires. Malade, vieux, n'ayant plus
que le souffle, le père Chable part pour 1) Al-
lemagne. Il va de ville en ville, parlant des
exilés, quêtant pou:' eux. Au bout d'un an, il
revient avec trente-cinq mille francs. Des
écoles sont bâties ; mais l'œil éteint du père
Chable n'en distingue plus; les élèves. Il'
meurt de fatigue et d'épuisement.
Aujourd'hui, près de mille enfants alle-
mands se pressent dans les écoles, nouvelle-
ment établies rue'de Lafayetto, pour y Tece-
voir une éducation entièrement gratuite.
A l'école des garçons est attachée une so-
ciété de cinquante jeunes gens..
A l'école des filles est annexé un patronage
de plus de deux cents ouvrière., r
Pan5 chaque écoTeTTy a un, ouvroît ou la
jeune fille, sans place et sans /.pain, trouve uh
asile prôvMioiTjB; éî;i*n'tfàysil
Le dimanche,l'école serPdv- l^tt^de réunion
aux jeunes ouvriers allemand 'Es. viennent
là se reposer du travail de' la semaine/ en"
s'entretenant de leur pays, en en parlant la
langue, en en redisant les vieux airs. C'est'
une sorte de cercle, lé plus humble et lé plus
grand de tous; car, sur sa façade on pourrait
écrire le mot : Patrie.
II
Le bal des cuisiniers.
La cuisine est une gloire française.
Depuis la destruction de l'empire romain,
on ne savait plus manger. ' .. j
(Des cuisiniers, les uns avaient été massa-
crés^ansies palais de leurs maîtres, les au-
tres s'étaient enfuis. Ceux qui étaient restés
n'avaient pas été compris. Les soldats du
Nord se gorgeaient de viandes et de venaisons,
s'enivraient de -boissons fermentées, et, pour
témoigner 8-e leur joie au dessert, ils s'assas-
sinaient un peu.
( A^JL^Ép&leiie et leî-Lgue-de laJettaie,
revint le goût des plaisirs délicats. Notre cüi-
sine naquit.
Sous Louis XIV, et, plus tard sous la ré-
gence et Louis XV, cet art fit chez nous d'im-
menses progrès.
Quand, en 1813, les alliés arrivèrent en
France, comme quatorze siècles plus tôt les
barbares, Paris, pour les recevoir, se trans-
forma en un immense réfectoire.
j « 0;1 mangeait partout, dit Brillat-Savarin,"
Îhez les restaurateurs, chez les traiteurs, dans
îs cabarets, dans les cafés, dans les tavernes,
ims les échoppes et jusque dans les rues.
:Xes intrus mangeaient de tout : viandes, pois-
ions, gibier, truffes, pâtisseries, surtout nos
utruiis. Ils lmvaien t avec une. avidité égale à
I4eur appétit, et demandaient toujours les vins
tes plus chers, espérant y trouver des jouis-
sances inouïes.
!:l » Les observateurs superficiels ne savaient
! ijuè penser de cette mangetie 'sans fin et sans
îerme. Mais les vrais Français riaient, et se
frottaient les mains, en disant : — Les yoî1à
fous le charme, et ils vous auront reiidu ce
! ioir p!us d'écus que le trésor public ne leur
jîBn a comptés _ ce matin. a
! S .
Cet été, pendant l'Exposition, même af-
fluence encore. Une grande dame étrangère a
dit : f. Paris est le cabaret de l'Europe. » On a
voulu voir une injure dans cetle exclamation.
Au point de vue de la cuisine pure, c'est un
compliment.
11 y a, .en effet, chez nous une tradition qui
a survécu au renversement de toutes les tra-
ditious. 11 y a un art qui n'a fait que grandir
dans la décadence des arts, et qui, en dépit
des tentatives exotiques, est resté national par
excellence, c'est la tradition et l'art de la cui-
sine..
i Je vous parlais, il y a trois ou quatre mois,
du beau livre de Jules Gouffé. L'auteur, sans
remonter au déluge, cite toute une glorieuse
pléiade de cuisiniers modernes - : Loyer,
l'homme qui savait le mieux dresser une
grosse pièce de cuisine ; Drouhat, Léchard^
praticiens universels, traitant avec le. même,
talent supérieur toutes les parties ; Bernard, si
renommé- pour la délicatesse minutieuse de
«w^Tuft.-IVfals^ee sont là les contemporains
de Carême et les maîtres de- Jules Gouffé.
-Voici la jeune cuisine : MM. Paul Pasquier,
Charles et Léon Canivet, Paul Dessoliers,
Got, Bernard fils, Cogèrie, lUadelain, Amédé«
Bain, Hippolyte et Alphonse Gouffé,..
Vous le voyez, le drapeau est bien porté.
En 184-0, MM. les' Cuisiniers de Paris on
fondé une Société de secours mutuels, dans
laquelle ils ont'fraternellement admis les
pâtissiers et les garçons de tuisine. Bientôt
la Société mutuelle s'est accrue .d'une caisse
de retraite.. L'année dernière, cette caisse
servait, vingt-et-une pensions.
Mais ce qu'il y a de plus touchant dans
' l'institution, c'est l'adoption des orphelins.
Depuis dix ans, MM. les cuisiniers donnent
j un bal chaque année. Or, savez-vous à quoi
! est destiné le produit de ce bal? A subvenir
aux frais d'éducation d:un pauvre petit en- •-
fant. Trente orphelins, depuis dix ans, ont
reçu cinq cents francs par an chacun des
amis de leur père devenus pour eux une se-
conde famille.
Le capital social est. aujourd'hui de deux
cent soixante mille six cent sept francs, qui
se subdivisent ainsi:
Caisse courante, Fr. YS
Caisse, de'retraite, 131,220
Caisse des orphelins actuels, 6,550
Caisse des orphelins à venir, 6,201
Fonds disponibles, 112,088
Obligations de la ville de Paris, 4,40a
Total égal, . * 260,607
Je regrette vivement de n'avoir pu aller
hier au bal de MM. les cuisiniers: on doit
s'amuser beaucoup entre artistes, lorsqu'on a ~
tant d'argent et qu'on fait tant de bien.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
UN MOULIN SANS EAU
XIII
iNo 74
Ainsi donc M. Barder le gardien-chef de
Cold-bath-field, obéissait à l'homme gris.
Pourquoi ?
C'est que M. Dardel éiait affilié à cette vaste
et mystérieuse association qu'on appelle les fe-
e. Voir le numéro du 22 novembre
nians et qui rêvent l'émancipation de l'Irlande.
Comment cette association sieSL-t'lle formée?
Mystère?
Les membres se, connaissent rarement entre
eux. Ce n'est qu'à un signe particulier, à un mot
mystique, à un geste, qu'un frère eu détresse
est reconnu par d'autres frères.
- Avant de laisser aller le petit Ralph à Cald.
hath-field, l'homme gris était redevenu pour-une
heure le lord Cornhill qui i'a'sai'. une si jolie
collection de crimes curieux.
Muni d'une carte spéciale délivrée à Scotland-
yard, il s'était présenté à Bath square et avait
demandé à visiter la prison.
Il avait inspecté minutieusement l'infirmerie,
les salles de correction, la partie cellulaire et les
cuisines, mais il n'avait pas vuu'iu voir le mou-
lin, disant qu'il conservait ce spec -acle pour une
deuxième visite.
f Ce que cherchait le prétendu lord Cornhill,
I c'étaient ses complices dans la prison, car il y
I a des fenians partout, dans les administrations
t publiques et même parmi les policemen, comme
; on a pu le voir le soir où l'homme gris avait voulu
visiter Suzannah l'Irlandaise.
Il s'était promené de salle en salie, épiant un
regard, hasardant un geste, et, tout à coup, il
i avait Yu un homme tressaillir. -
Cet homme était celui-là même qui lui servait
de guide et lui expliquait complaisammant cha-
que chose.
C'était 'M. Bardel,le gaidien-chef.
Alors l\homme gris profita d'un moment où
ils se trouvaient seuls dans un couloir cellulaire
êt il lui fit ce signe partjculer qui annoncait un j
chef de l'association. ;
M. Bardel s'inclina humblement et dit :
— Parlez, maître, j'obéirai.
'— Quand je' serai parti, dit rapidement
l'homme gris, \ous trouverez un prétexte pour
sortir et vous viendrez me rejoindre à Queen's
justice, dans une heure.
— J'y serai, répondit M. Bardel avec soumis-
sion.
Une heure après, en effet, non plus lord
Cornhill, mais l'homme gris, car le mystérieux
personnage , avait repris son costume ordinaire,
était dans la taverne de la justice de la reine.
Aller se rafraîchir à Queen's tavern n'était
pas sortir de Bath square. t
Les guichetiers n'avaient besoin pour cela que
du bon vouloir de master Pin qui, étant lui-
même toujours altéré, comprenait que ses col-
lègues eussent soif.
A Queen's tavern, il était résulté de la conver-
vation de l'homme gris et de master Bardel que
* AQ dernier était le seul fenian de Bath éwua?6- I
Néanmoins, si on parvenait à faire admettre.
Ralph à l'infirmerie, master Bardel croyait une
'évasion possible.
On le voit, le gardien-chef avait compté sans
le terrible docteur et il venait rendre compte à
l'homme gris, dans cette taverne d'Holborn, le
lendemain de l'incarcération de Rd.lph,de l'avor-
tement de leur commune espérance.
— Ainsi, disait l'homme gris, vous n'avci
personne à Bath square.
— Personne. -
— Pas même un prisonnier?
— Non.
— Mais le portier-consigne?...
Il a ruiné l'Irlande. Il tient si fort à si
place qu'il nous livrerait tous, s'il le pouvait.
— Et quel moyen avez-vous d'introduire les
ouvriers libres dans le treadmill?
» — Voici, dit M. Bardel : le treadmill a quatre
cylindres.
— Je sais cela.
— L'essieu de chacun est enchâssé dans un
gros mur, et l'un de ces gros murs est crevassé.
Si on arrêtait trop brusquement la machine, il
'pourrait se faire que le mur cédât et s écroulàt.
— Mais comment arrêter la machine bras£MJ#*
^
ment? ,
,
— C'est faéil.....
S \ToyOKR* .
l 1 1 5 cent. le numéro
' . _ 1 TOURNAI. QUOTIDIEN . 1
I
S cetrt. le iiisfâér®
ABONNEMENTS. — Trois mois. Six mois. Cn an.
Pans S fr. 9 fr. f 8 fr.
Départements.. ® fit S 9 ■ 1
Administrateur : E. Delsaox.
.
*
3me année. — MERCREDI 22 JANVIER. 1868. — Ah 643
Directeur- Proprié taire : J/.\,n Ii i N.
Réducteur en chef: A. uz JUlatiher Brag elonm-E.
Bureaux i» * a. b 01: n b m k k t : ?, rae'Spouoi.
ABMiNJSTHA'rtOîi : 13, vbce
PARIS, 21 JANVIER 1868.
LES DEUX BALS
Le bal des Allemands
Des diplomates, des banquiers, des com-
merçants, quelques grandes dames, une foule
de bourgeoises, dont la parure atteste la ri-
chesse , remplissent les salons du Grand-
hôtel.
, Le prix d'entrée du bnl est de' dix francs
pour une femme de quinze francs pour un
cavalier. Depuis un mois, un comité dont
: font partie Mme la princesse de Metternicti,
Mme la baronne de Rothschild et vingt autres
dames patronesses à la mode par leurs titres,
leur fortune, ou leur succès dans le monde,
s'est mis à l'œuvre. Tous les billets ont été
placés. La recette sera énorme. Tant mieux.
Cfar son emploi sera excellent.
Il s'agit d'assister les Allemands pauvres
■ que la misère a pousses à l'émigration et qui
n'ont pas trouvé en France l'aisance qu'ils
venaient y demander au travail.
Les Allemands s'acclimatent facilement à
I'aris,. quelques-uns même y font fortune;
mais la masse des emigrants est t?lle que les
misérables 'en forment toujours la majo-
. - rité. ~
Vous avez tous rencontré dans les gares de
. chemins de fer ces groupes désolés, composés
. du père; de la mère, quelquefois d'un aïalïtet
; toujours d'une demi-douzaine d'enfafi#.
mère, assise sur quelque mauvais , paquet
de. linge, allaite son, dernier-né, tandis que
les autres grouillent autour d'elle, et que le
" ; père, debout, la figure fatiguée, mais ferme
et douce, regarde devant lui, semblant jeter
sa patience saxonne en défi à la destinée.
/A Paris, ces gens-là logent à la Chapelle, à
la Villette, à Believille, à Ménilmontant.
Rien de lugubre, surtout pendant, l'hiver,
'comme ces ruches humaines dont les habi-
tants cherchent leur subsistance, par la pluie
• et le froid.
» «s
* »
Le 8 décembre 1850, le révérend père
Chable se dit qu'il sera le protecteur de ces
pauvres émigrés.
Des ressources, il sait qu'il n'en a pas, mais
Il sait aussi que la foi soulève les montagnes,
et qu'.en faisant appel au dévouement on est
jou ioîirs éç&yté..
i Un matinr de ,Pltn-t1R, il-avise
une vieille maison et la 10ue. Deux ouvriers
sont appelés, qui abattent les cloisons, et font
de l'intérieur une seule et vaste pièce. Cette
pièce sera la chapelle.
Bientôt,dans le voisinage.s'élèvent deux es-
pèces de hangars fermes ; l'un est une école
allemande de filles, l'autre une école alle-
, mande de garçons.
L'établissement fraternel gmndM. Les res-
sources lui font défaut. De nouvelles écoles
sont nécessaires. Malade, vieux, n'ayant plus
que le souffle, le père Chable part pour 1) Al-
lemagne. Il va de ville en ville, parlant des
exilés, quêtant pou:' eux. Au bout d'un an, il
revient avec trente-cinq mille francs. Des
écoles sont bâties ; mais l'œil éteint du père
Chable n'en distingue plus; les élèves. Il'
meurt de fatigue et d'épuisement.
Aujourd'hui, près de mille enfants alle-
mands se pressent dans les écoles, nouvelle-
ment établies rue'de Lafayetto, pour y Tece-
voir une éducation entièrement gratuite.
A l'école des garçons est attachée une so-
ciété de cinquante jeunes gens..
A l'école des filles est annexé un patronage
de plus de deux cents ouvrière., r
Pan5 chaque écoTeTTy a un, ouvroît ou la
jeune fille, sans place et sans /.pain, trouve uh
asile prôvMioiTjB; éî;i*n'tfàysil
Le dimanche,l'école serPdv- l^tt^de réunion
aux jeunes ouvriers allemand 'Es. viennent
là se reposer du travail de' la semaine/ en"
s'entretenant de leur pays, en en parlant la
langue, en en redisant les vieux airs. C'est'
une sorte de cercle, lé plus humble et lé plus
grand de tous; car, sur sa façade on pourrait
écrire le mot : Patrie.
II
Le bal des cuisiniers.
La cuisine est une gloire française.
Depuis la destruction de l'empire romain,
on ne savait plus manger. ' .. j
(Des cuisiniers, les uns avaient été massa-
crés^ansies palais de leurs maîtres, les au-
tres s'étaient enfuis. Ceux qui étaient restés
n'avaient pas été compris. Les soldats du
Nord se gorgeaient de viandes et de venaisons,
s'enivraient de -boissons fermentées, et, pour
témoigner 8-e leur joie au dessert, ils s'assas-
sinaient un peu.
( A^JL^Ép&leiie et leî-Lgue-de laJettaie,
revint le goût des plaisirs délicats. Notre cüi-
sine naquit.
Sous Louis XIV, et, plus tard sous la ré-
gence et Louis XV, cet art fit chez nous d'im-
menses progrès.
Quand, en 1813, les alliés arrivèrent en
France, comme quatorze siècles plus tôt les
barbares, Paris, pour les recevoir, se trans-
forma en un immense réfectoire.
j « 0;1 mangeait partout, dit Brillat-Savarin,"
Îhez les restaurateurs, chez les traiteurs, dans
îs cabarets, dans les cafés, dans les tavernes,
ims les échoppes et jusque dans les rues.
:Xes intrus mangeaient de tout : viandes, pois-
ions, gibier, truffes, pâtisseries, surtout nos
utruiis. Ils lmvaien t avec une. avidité égale à
I4eur appétit, et demandaient toujours les vins
tes plus chers, espérant y trouver des jouis-
sances inouïes.
!:l » Les observateurs superficiels ne savaient
! ijuè penser de cette mangetie 'sans fin et sans
îerme. Mais les vrais Français riaient, et se
frottaient les mains, en disant : — Les yoî1à
fous le charme, et ils vous auront reiidu ce
! ioir p!us d'écus que le trésor public ne leur
jîBn a comptés _ ce matin. a
! S .
Cet été, pendant l'Exposition, même af-
fluence encore. Une grande dame étrangère a
dit : f. Paris est le cabaret de l'Europe. » On a
voulu voir une injure dans cetle exclamation.
Au point de vue de la cuisine pure, c'est un
compliment.
11 y a, .en effet, chez nous une tradition qui
a survécu au renversement de toutes les tra-
ditious. 11 y a un art qui n'a fait que grandir
dans la décadence des arts, et qui, en dépit
des tentatives exotiques, est resté national par
excellence, c'est la tradition et l'art de la cui-
sine..
i Je vous parlais, il y a trois ou quatre mois,
du beau livre de Jules Gouffé. L'auteur, sans
remonter au déluge, cite toute une glorieuse
pléiade de cuisiniers modernes - : Loyer,
l'homme qui savait le mieux dresser une
grosse pièce de cuisine ; Drouhat, Léchard^
praticiens universels, traitant avec le. même,
talent supérieur toutes les parties ; Bernard, si
renommé- pour la délicatesse minutieuse de
«w^Tuft.-IVfals^ee sont là les contemporains
de Carême et les maîtres de- Jules Gouffé.
-Voici la jeune cuisine : MM. Paul Pasquier,
Charles et Léon Canivet, Paul Dessoliers,
Got, Bernard fils, Cogèrie, lUadelain, Amédé«
Bain, Hippolyte et Alphonse Gouffé,..
Vous le voyez, le drapeau est bien porté.
En 184-0, MM. les' Cuisiniers de Paris on
fondé une Société de secours mutuels, dans
laquelle ils ont'fraternellement admis les
pâtissiers et les garçons de tuisine. Bientôt
la Société mutuelle s'est accrue .d'une caisse
de retraite.. L'année dernière, cette caisse
servait, vingt-et-une pensions.
Mais ce qu'il y a de plus touchant dans
' l'institution, c'est l'adoption des orphelins.
Depuis dix ans, MM. les cuisiniers donnent
j un bal chaque année. Or, savez-vous à quoi
! est destiné le produit de ce bal? A subvenir
aux frais d'éducation d:un pauvre petit en- •-
fant. Trente orphelins, depuis dix ans, ont
reçu cinq cents francs par an chacun des
amis de leur père devenus pour eux une se-
conde famille.
Le capital social est. aujourd'hui de deux
cent soixante mille six cent sept francs, qui
se subdivisent ainsi:
Caisse courante, Fr. YS
Caisse, de'retraite, 131,220
Caisse des orphelins actuels, 6,550
Caisse des orphelins à venir, 6,201
Fonds disponibles, 112,088
Obligations de la ville de Paris, 4,40a
Total égal, . * 260,607
Je regrette vivement de n'avoir pu aller
hier au bal de MM. les cuisiniers: on doit
s'amuser beaucoup entre artistes, lorsqu'on a ~
tant d'argent et qu'on fait tant de bien.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
UN MOULIN SANS EAU
XIII
iNo 74
Ainsi donc M. Barder le gardien-chef de
Cold-bath-field, obéissait à l'homme gris.
Pourquoi ?
C'est que M. Dardel éiait affilié à cette vaste
et mystérieuse association qu'on appelle les fe-
e. Voir le numéro du 22 novembre
nians et qui rêvent l'émancipation de l'Irlande.
Comment cette association sieSL-t'lle formée?
Mystère?
Les membres se, connaissent rarement entre
eux. Ce n'est qu'à un signe particulier, à un mot
mystique, à un geste, qu'un frère eu détresse
est reconnu par d'autres frères.
- Avant de laisser aller le petit Ralph à Cald.
hath-field, l'homme gris était redevenu pour-une
heure le lord Cornhill qui i'a'sai'. une si jolie
collection de crimes curieux.
Muni d'une carte spéciale délivrée à Scotland-
yard, il s'était présenté à Bath square et avait
demandé à visiter la prison.
Il avait inspecté minutieusement l'infirmerie,
les salles de correction, la partie cellulaire et les
cuisines, mais il n'avait pas vuu'iu voir le mou-
lin, disant qu'il conservait ce spec -acle pour une
deuxième visite.
f Ce que cherchait le prétendu lord Cornhill,
I c'étaient ses complices dans la prison, car il y
I a des fenians partout, dans les administrations
t publiques et même parmi les policemen, comme
; on a pu le voir le soir où l'homme gris avait voulu
visiter Suzannah l'Irlandaise.
Il s'était promené de salle en salie, épiant un
regard, hasardant un geste, et, tout à coup, il
i avait Yu un homme tressaillir. -
Cet homme était celui-là même qui lui servait
de guide et lui expliquait complaisammant cha-
que chose.
C'était 'M. Bardel,le gaidien-chef.
Alors l\homme gris profita d'un moment où
ils se trouvaient seuls dans un couloir cellulaire
êt il lui fit ce signe partjculer qui annoncait un j
chef de l'association. ;
M. Bardel s'inclina humblement et dit :
— Parlez, maître, j'obéirai.
'— Quand je' serai parti, dit rapidement
l'homme gris, \ous trouverez un prétexte pour
sortir et vous viendrez me rejoindre à Queen's
justice, dans une heure.
— J'y serai, répondit M. Bardel avec soumis-
sion.
Une heure après, en effet, non plus lord
Cornhill, mais l'homme gris, car le mystérieux
personnage , avait repris son costume ordinaire,
était dans la taverne de la justice de la reine.
Aller se rafraîchir à Queen's tavern n'était
pas sortir de Bath square. t
Les guichetiers n'avaient besoin pour cela que
du bon vouloir de master Pin qui, étant lui-
même toujours altéré, comprenait que ses col-
lègues eussent soif.
A Queen's tavern, il était résulté de la conver-
vation de l'homme gris et de master Bardel que
* AQ dernier était le seul fenian de Bath éwua?6- I
Néanmoins, si on parvenait à faire admettre.
Ralph à l'infirmerie, master Bardel croyait une
'évasion possible.
On le voit, le gardien-chef avait compté sans
le terrible docteur et il venait rendre compte à
l'homme gris, dans cette taverne d'Holborn, le
lendemain de l'incarcération de Rd.lph,de l'avor-
tement de leur commune espérance.
— Ainsi, disait l'homme gris, vous n'avci
personne à Bath square.
— Personne. -
— Pas même un prisonnier?
— Non.
— Mais le portier-consigne?...
Il a ruiné l'Irlande. Il tient si fort à si
place qu'il nous livrerait tous, s'il le pouvait.
— Et quel moyen avez-vous d'introduire les
ouvriers libres dans le treadmill?
» — Voici, dit M. Bardel : le treadmill a quatre
cylindres.
— Je sais cela.
— L'essieu de chacun est enchâssé dans un
gros mur, et l'un de ces gros murs est crevassé.
Si on arrêtait trop brusquement la machine, il
'pourrait se faire que le mur cédât et s écroulàt.
— Mais comment arrêter la machine bras£MJ#*
^
ment? ,
,
— C'est faéil.....
S \ToyOKR* .
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