Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1867-12-26
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 26 décembre 1867 26 décembre 1867
Description : 1867/12/26 (A2,N616). 1867/12/26 (A2,N616).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717618p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
LA PETITE PRESSE
• lOURNA'L:.) quotidien
1$ cent. te numéro
5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mOiS. Six mois.. 'Cn an.
Paris 5 fr. 9 fr. 1 fr. -
Départements.. 8 t 1 Us 9
Administrateur ! E. , J) EL S A. U 1.. '
g» année, — JEUDI ac DECEMBRE <867. — NO 616
Directeur-Proprtëtaire : JAN NIN.
Rédacteur en chef : A. DE BALATHIEII BRAGELONNS
BORÉAUX D 'ABori KEMSENT : 9, rue DPOuot.
ADMINISTRATION : 13, .place Breda.
La Presse illustrée journal hebdoma-
daire à 10 centimes, est vendue 5 cen-
times seulement à toute personne qui,
achète la Petite Presse le samedi à Paris
et le dimanche en province.
PARIS, 25 DÉCEMBRE 1867.
NOEL
1. En ces jours-là un édit de César-Auguste
ordonna qu'on fil le dénombrement des habi-
tants de toute la terre.
2. Ce premier dénombrement fut fait par
Cyrinus, gouverneur de Syrie.
3. Et tous allaient se faire inscrire, chacun
dans sa ville.
4. Joseph aussi partit de Nazareth, Ville de
Galilée , et monta en Judée, dans la ville de
David, appelée Bethléem, parce qu'il était de
la maison et de la famille de David,
5. Pour se faire inscrire avec Marie , son
épouse, qui était grosse.
6. Or, il arriva qu'étant là, le temps où elle
devait accoucher s'accomplit.
7. Et elle enfanta son fils premier-né, et
l'enveloppa de langes , et le coucha dans une
crèche ; parce qu'il n'y avait point de place
pour eux dans l'hôtellerie.
Tel est le simple récit de Sailnt-Luc. Ajou~
tez-y la légende, les bergers quittant leurs
pâturages pour venir adorer le nouveau-né ;
les rois arrivant du nord et du midi, les
mains pleines de présents magnifiques ; les
petits et les grands également prosternés de-
vant la crèche où repose un petit enfant que
réchauffent l'haleine d'un âne et celle d'un
bœuf...
Cette légende, les siècles l'ont consacrée.
Parmi les poëmes religieux et populaires, ce
sont les Noëls qui dominent. Presque tous
sont pleins de simplicité, de vérité et de
'grâce. M. l'abbé Rastier, maître de chapelle
de la cathédrale de Tours, a noté quelques-
uns de ces vieux airs. Notre ami Hadol les a
illustrés, et, de cette collaboration, est sorti
un album, dont un poëte , M. Aimé Mauduit,
a fait la préface :
« Comme les chants antiques de la Grèce,
dit -il, comme les poëmes du nord , les Noëls
ne sont pas l'œuvre d'un seul, ils sont ll'oeuvre
de tous. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'ils
ont pris naissance dans les campagnes, à
l'ombre des chaumières. Un pâtre qui con-
duisait ses troupeaux dans la plaine, ou quel-
que laboureur, devenu poëte tout à coup à la
vue des merveilles de Dieu, en composait
d'ordinaire les premières strophes. Le soir
venu, il les chantait à la veillée, sur un air
déjà existant, ou bien sur un air nouveau
qu'il improvisait au fur et à mesure, en l'a-
daptant de son mieux aux paroles. D'autres
strophes s'ajoutaient successivement aux an- j
tiennes ; chacun apportait sa pierre à l'édi- !
fice... Le Noël était un cher dépôt que l'on se
transmettait de génération en génération, un
ami qui était de toutes les fêtes. Les mères
le murmuraient autour'des berceaux; les
jeunes filles le fredonnaient en filant leur
quenouille ; les aïeules, au coin du feu, l'ap-
prenaient de leur voix chevrotante aux petits
enfants... Puis, dans la nuit du joyeux avé-
nement , quand les cloches sonnaient à toute
volée , ils partaient tous pour le village voi-
sin ; et, par les sentiers couverts de neige, à
là clarté de l'étoile qui guida les mages, ils I
cheminaient lentement, gais et graves à la
fois, chantant ce Noël aimé, œuvre des ancê-
tres, dont la dernière strophe venait mourir
sur le seuil de l'église... P'
Il faut citer quelques-unes de ces strophes
naïves.
| Joseph et Marie cherchent une auberge
dans Bethléem ; ils frappent tour à tour à
la porte du Grand-Dauphin , de la Rose-
Rouge , des Trois-Couronnes , des Trois-
petits-Paniers, de la Table-Ronde. Il n'y a
de place nulle part. Les voyageurs riches ont
j tout pris. Enfin, on arrive à la porte d'un
cabaret obscur. Joseph s'adresse à l'hôtesse :
1 En attendant,, madame, '
1 : Qu'autre part j'ai veu,
; : ; Permettez que ma femme
1 . ;* "• ' ' - Ici repose uu peu...
.N' /: ■ : L'HÙTESSE. • ,
Très-volontiers, ma mie,
I, ' Mettez-vous sur ce banc :
Monsieur, voyez la Pie
Ou bien le cheval-Blanc.
t.'HÔTESSE, à la sainte Vierge'. '•
Excusez ma pensée, '
Je ne puis la cacher,
Vous êtes avancée .
Et prête d'accoucher.
LA SAINTE TIEUGE.
• - Je n'attends plus que l'heure,
Non, je n'ai plus le temps ;
Et ainsi je demeure
' A A la merci des gens. '
..... L'HÔTE, appelant sa femme.
; ; Viendras-tu, bab illarde ?
" -■ ' ' Veux-tu passer la nuit? "
Te faut-iî mettre en garde ' ■
Sur la porte à minuit ?
L'HÔTESSE.
; - < ' C'est mon mari qui crie, •
Il faut me retirer ;
l; : .. Hélas ! je suis marrie, ...
. , , Qu'il faut nous séparer. , ..
La porte se referme et les pauvres pèlerins
sont forcés de s'abriter dans une étable aux
environs du bourg..
C'est dans cette étable que Jésus vient au
monde. Aussitôt une grande joie se manifeste
dans tout le pays :
On entend partout carillon
- < ■ Sur les monts de Judée, ■
Annoncant du roi de Sion
En terre l'arrivée,
Que nous a produit, ce dit-on,
La vierge e-t mère du poupon, '
Environ l'heure de miauit,
Bénorli."
Sans lui le monde aurait péri, -5
Mon ami.
Hâtons-nous d'aller voir l'enfant
. , Couché dans une grange, ;
. v .. Son petit corps de, froid tremblant,
' Sans drapeau, ni sans lange-,
Elle n'a pas le moindre haillon
La vierge et mère du poupon.
Le bœuf et ]';''TIG près de lui,
Bénoni,
Du grand froid le mettent à l'abri,
Cher ami , .
Autre Noël tourangeau.
Quand Dieu naquit à. Noël
Dedans la Judée,
On vit ce jour solennel
La joie inondée ;
E n'était petit ni grand ' '•
Qui n'apportât son préseut, <
Et n'o, n'o, n'o, n'o, " •;
■ Et frit, frit, frit, fri.t,
Et n'o, n'o, et ne frit,
Et.n'offrit sans cesse
Toute sa richesse.
, , L'un apportait un agneau ,
Avecque grand zèle,
L'autre, un peu de lait nouveau "
Dedans une écuelle ;
Tel, sous ses pauvres habits,
Cachait un,peu de pain bis,
Pour la, la, la la,
; Pour la Sain, Sain, Sain,
Pour kt, la, pour la Sain,
Pour la Sainte-Vierge
Et Joseph concierge.
Chaque année Noël fait éclore de nouveaux
cantiques et de nouvelles chansons.
Une de nos lectrices, une jeune femme qui
signe Diane de Lorris ses premiers vers, nous
envoie son Noël.
En voici les premières strophes :
Les lauriers sont, coupés, et les blancheurs du givre '
Succèdent 'aux blancheurs neigeuses dit porhnïier. '
Adieu les chaudes nuits où c'est si bon de vivre !
Adieu, dans les grands be.is, la chanson du ramier!
Ce n'est plus le printemps, ni l'été qui rayonne.
Non. Pas même l'automne et sa mâle beauté.
C'est l'hiver rigoureux sous lequel on frissonne,
Qui rend plus douloureuse encor la pauvreté.
Pourtant nous oublions toute humaine tristesse,
Quand le jour de Noël se lève radieux.
De l'ange et du. chrétien la commune allégresse
Dit : Pardon sur la terre et gloire dans les deux 1 1
A minuit, dans l'église, on allume les cierges;
L'orgue religieux répand ses doux accents,
Tandis' que des autels des sainto:,,'et des vierges
S'élève en blancs flocons la vapeur de l'encens.
Mais qu'il fait froid dehors, et que la rue e t sombrer
Aussi, près du foyer; où chante le grillon,
Oubliant les frissons et les terreurs de l'ombre,
On va joyeusement fêter le réveillon.
Je vous ai dit, l'année dernière, les vieilles
coutumes françaises de la Noël. C'est surtout
dans les pays du Nord que cette fête est solen-
nellement célébrée. Relisez l'Angleterre et la
Vie anglaise d'Alphonse Esquiros... ,
On se prépare au Christmas plusieurs
semaines à l'avance. D'immenses troupeaux
d?oies s'acheminent gravement du nord de
l'Angleterre, par toutes les routes, vers la ville
de Londres.'Les grands bœufs annoncer*! leur
arrivée sur les chemins de fer oii îêS bateaux
par de sombres beuglements. Les étaligus
de viande s'amoncèlent en pyramides devant
l'échoppe des bouchers. C'est surtout le soir,
dans les quartiers populeux de Londres , par
ROCAMBOLE
mess=""No 47 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
PREMIÈRE PARTIE
L'ENFANT PERDU
VII
Occùp.ons'-nous maintenant un moment de
monsieur Thomas Elgin, et pénétrons dans le
bureau qu'il avait à Londres, en'retrogradant
de quelques heures.
M. Thomas Elgia sortait de la banque où il
avait pris une somme de deux mille livres, pour
Voir le numéro du 22 novembre.
les éventualités de son petit commerce, lequel
allait aussi bien le dimanche que les autres
Jours.
Puis, avant de prendre l'omnibus qui devait
le conduire à Eilburn-square, il avait donné
Tendez-vous' à un petit bourgeois de ses amis,
avec lequel il passait volontiers ses soirées, soit
à lArgyll-roomst, -apit à l'Alhambra.
: Enfin, il s'était;, souvenu qu'il avait oublié de
répondre à .deux de ses correspondants de
DubÍin et, au lieu de retourner à son domicile
privé, il avait passe par son bureau, une sorte
d'échoppe située au fond d'un passage dans
Oxford-street.
j — Jé dînerai une'deim-heirre plus tard,'s'était-
il dit; mais il faut que j'écrive ce 30ir, car la
poste ne part pas le dimanche. -
Tandis qu'après avoir mis, en homme soi-
gneux qu'il, était, ses manches de -lustrine, il
taillait sa plume auprès d'un petit poêle où
brûlait un maigre feu de .coke, il entendit frap-
per à la porte.
— En trez! dit-il sans se déranger.
Mais à peine la porte se fut-elle ouverte que
monsieur Thomas Elgin se leva vivement, per-
dit Son air arrogant et hautain, ôta vivement
son chapeau et salua avec une politesse obsé-
quieuse.
; Le personnage qui venait de franchir le seuil
dfe l'ignoble boutique de l'usurier, était un hom-
me de haute mine, entièrement vêtu de noir,
jeune encore, mais complètement chauve, et
dont l'œil bleu accusait une énergique volonté.
— Vous ne m'attendiez peut-être pas, M. El -
gin ? dit-il. - ' • -
; — En effet, Votre Honneur, j'étais loin de
supposer... Je ne croyais pas...
— M. Thomas Elgin; dit l'inconnu, je n'ai
pas le temps de causer longuement avec vous.
Nous irons donc vite en besogne, si vous le
voulez bien.
— J'attends que Votre Honneur daigne m'ex-
pliquer...
— Vous avez fait arrêter l'abbé Samuel?
— Oui, Votre Honneur.
— C'est bien, mais ce n'est pas assez...
Thomas Elgin regarda son visiteur..
• - L'abbé Samuel n'a pu célébrer la messe à
F „mt-Grilles le vingt-six octobre.
— Il a été arrêté à six heures du matin.
— Et un grand danger qui menaçait la cause
;ue je sers et que vous servez, par cela même,
a été évité, poursuivit l'homme vêtu de noir.
Quatre hommes dangereux pour l'Angleterre,
que cette cérémonie religieuse devait réunir, le
cherchent inutilement dans Londres et ne peu-
vent le retrouver.
Nous, au contraire, nous avons les yeux sur
eux et ils ne nous échapperont pas.
— Ah ! fit Thomas Elgin.
. — L'un d'eux, reprit le visiteur, a été volé en
débarquant à Liverpool. Il venait d'Amérique
et était muni d'une lettre de crédit sur la mai-
son de banque Davis-Humphrey et Cos.
La lettre de crédit ayant disparu avec son
portefeuille, il se trouve sans ressources. Un
de nos émissaires, qui le suit nuit et jour, lui a
persuadé de s'adresser à vous ; et demain di-
manche, il ira frapper à la porte de votre maison,
dans Kilburn square. Il vous demandera mille •
livres pour un mois, vous lui en offrirez trois
mille..
— Trois mille livres ! exclama M. Thomas
EIÎ,i'n' ; mais, Votre Honneur, cette somme....
— Vous ne l'avez pas sur vous?
— Non, mon argent est à la Banque, et la
Banque est fermée jusqu'à lur:di. -
— Aussi, dit l'inconnu en souriant, je vous
l'apporte.
Il déboutonna sa redingote noire, tira de sa
poche un portefeuille et de ce portefeuille une
poignée de bank-notes qu'il étala devant
M. Thomas Elgin en lui disant :
•— Comptez.
L'usurier prit l'argent et le mit, à son tour,
dans sa poche.
— C'est là tout ce que j'avais à vous dire
pour le moment, dit l'inconnu. Bonsoir, M. El-
gin.
— Je suis votre serviteur très-humble, Votre
Honneur, dit l'usurier, qui reconduisît son visi-
teur avec une politesse servile.
— Hé! hé ! se dit M. Thomas Elgin, jamais
je n'aurai eu cinq mille livres chez moi, dans
Kilburn square; il faudra, ce soir, prendre
quelques petites précautions. Et il sauta daDI
• lOURNA'L:.) quotidien
1$ cent. te numéro
5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mOiS. Six mois.. 'Cn an.
Paris 5 fr. 9 fr. 1 fr. -
Départements.. 8 t 1 Us 9
Administrateur ! E. , J) EL S A. U 1.. '
g» année, — JEUDI ac DECEMBRE <867. — NO 616
Directeur-Proprtëtaire : JAN NIN.
Rédacteur en chef : A. DE BALATHIEII BRAGELONNS
BORÉAUX D 'ABori KEMSENT : 9, rue DPOuot.
ADMINISTRATION : 13, .place Breda.
La Presse illustrée journal hebdoma-
daire à 10 centimes, est vendue 5 cen-
times seulement à toute personne qui,
achète la Petite Presse le samedi à Paris
et le dimanche en province.
PARIS, 25 DÉCEMBRE 1867.
NOEL
1. En ces jours-là un édit de César-Auguste
ordonna qu'on fil le dénombrement des habi-
tants de toute la terre.
2. Ce premier dénombrement fut fait par
Cyrinus, gouverneur de Syrie.
3. Et tous allaient se faire inscrire, chacun
dans sa ville.
4. Joseph aussi partit de Nazareth, Ville de
Galilée , et monta en Judée, dans la ville de
David, appelée Bethléem, parce qu'il était de
la maison et de la famille de David,
5. Pour se faire inscrire avec Marie , son
épouse, qui était grosse.
6. Or, il arriva qu'étant là, le temps où elle
devait accoucher s'accomplit.
7. Et elle enfanta son fils premier-né, et
l'enveloppa de langes , et le coucha dans une
crèche ; parce qu'il n'y avait point de place
pour eux dans l'hôtellerie.
Tel est le simple récit de Sailnt-Luc. Ajou~
tez-y la légende, les bergers quittant leurs
pâturages pour venir adorer le nouveau-né ;
les rois arrivant du nord et du midi, les
mains pleines de présents magnifiques ; les
petits et les grands également prosternés de-
vant la crèche où repose un petit enfant que
réchauffent l'haleine d'un âne et celle d'un
bœuf...
Cette légende, les siècles l'ont consacrée.
Parmi les poëmes religieux et populaires, ce
sont les Noëls qui dominent. Presque tous
sont pleins de simplicité, de vérité et de
'grâce. M. l'abbé Rastier, maître de chapelle
de la cathédrale de Tours, a noté quelques-
uns de ces vieux airs. Notre ami Hadol les a
illustrés, et, de cette collaboration, est sorti
un album, dont un poëte , M. Aimé Mauduit,
a fait la préface :
« Comme les chants antiques de la Grèce,
dit -il, comme les poëmes du nord , les Noëls
ne sont pas l'œuvre d'un seul, ils sont ll'oeuvre
de tous. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'ils
ont pris naissance dans les campagnes, à
l'ombre des chaumières. Un pâtre qui con-
duisait ses troupeaux dans la plaine, ou quel-
que laboureur, devenu poëte tout à coup à la
vue des merveilles de Dieu, en composait
d'ordinaire les premières strophes. Le soir
venu, il les chantait à la veillée, sur un air
déjà existant, ou bien sur un air nouveau
qu'il improvisait au fur et à mesure, en l'a-
daptant de son mieux aux paroles. D'autres
strophes s'ajoutaient successivement aux an- j
tiennes ; chacun apportait sa pierre à l'édi- !
fice... Le Noël était un cher dépôt que l'on se
transmettait de génération en génération, un
ami qui était de toutes les fêtes. Les mères
le murmuraient autour'des berceaux; les
jeunes filles le fredonnaient en filant leur
quenouille ; les aïeules, au coin du feu, l'ap-
prenaient de leur voix chevrotante aux petits
enfants... Puis, dans la nuit du joyeux avé-
nement , quand les cloches sonnaient à toute
volée , ils partaient tous pour le village voi-
sin ; et, par les sentiers couverts de neige, à
là clarté de l'étoile qui guida les mages, ils I
cheminaient lentement, gais et graves à la
fois, chantant ce Noël aimé, œuvre des ancê-
tres, dont la dernière strophe venait mourir
sur le seuil de l'église... P'
Il faut citer quelques-unes de ces strophes
naïves.
| Joseph et Marie cherchent une auberge
dans Bethléem ; ils frappent tour à tour à
la porte du Grand-Dauphin , de la Rose-
Rouge , des Trois-Couronnes , des Trois-
petits-Paniers, de la Table-Ronde. Il n'y a
de place nulle part. Les voyageurs riches ont
j tout pris. Enfin, on arrive à la porte d'un
cabaret obscur. Joseph s'adresse à l'hôtesse :
1 En attendant,, madame, '
1 : Qu'autre part j'ai veu,
; : ; Permettez que ma femme
1 . ;* "• ' ' - Ici repose uu peu...
.N' /: ■ : L'HÙTESSE. • ,
Très-volontiers, ma mie,
I, ' Mettez-vous sur ce banc :
Monsieur, voyez la Pie
Ou bien le cheval-Blanc.
t.'HÔTESSE, à la sainte Vierge'. '•
Excusez ma pensée, '
Je ne puis la cacher,
Vous êtes avancée .
Et prête d'accoucher.
LA SAINTE TIEUGE.
• - Je n'attends plus que l'heure,
Non, je n'ai plus le temps ;
Et ainsi je demeure
' A A la merci des gens. '
..... L'HÔTE, appelant sa femme.
; ; Viendras-tu, bab illarde ?
" -■ ' ' Veux-tu passer la nuit? "
Te faut-iî mettre en garde ' ■
Sur la porte à minuit ?
L'HÔTESSE.
; - < ' C'est mon mari qui crie, •
Il faut me retirer ;
l; : .. Hélas ! je suis marrie, ...
. , , Qu'il faut nous séparer. , ..
La porte se referme et les pauvres pèlerins
sont forcés de s'abriter dans une étable aux
environs du bourg..
C'est dans cette étable que Jésus vient au
monde. Aussitôt une grande joie se manifeste
dans tout le pays :
On entend partout carillon
- < ■ Sur les monts de Judée, ■
Annoncant du roi de Sion
En terre l'arrivée,
Que nous a produit, ce dit-on,
La vierge e-t mère du poupon, '
Environ l'heure de miauit,
Bénorli."
Sans lui le monde aurait péri, -5
Mon ami.
Hâtons-nous d'aller voir l'enfant
. , Couché dans une grange, ;
. v .. Son petit corps de, froid tremblant,
' Sans drapeau, ni sans lange-,
Elle n'a pas le moindre haillon
La vierge et mère du poupon.
Le bœuf et ]';''TIG près de lui,
Bénoni,
Du grand froid le mettent à l'abri,
Cher ami , .
Autre Noël tourangeau.
Quand Dieu naquit à. Noël
Dedans la Judée,
On vit ce jour solennel
La joie inondée ;
E n'était petit ni grand ' '•
Qui n'apportât son préseut, <
Et n'o, n'o, n'o, n'o, " •;
■ Et frit, frit, frit, fri.t,
Et n'o, n'o, et ne frit,
Et.n'offrit sans cesse
Toute sa richesse.
, , L'un apportait un agneau ,
Avecque grand zèle,
L'autre, un peu de lait nouveau "
Dedans une écuelle ;
Tel, sous ses pauvres habits,
Cachait un,peu de pain bis,
Pour la, la, la la,
; Pour la Sain, Sain, Sain,
Pour kt, la, pour la Sain,
Pour la Sainte-Vierge
Et Joseph concierge.
Chaque année Noël fait éclore de nouveaux
cantiques et de nouvelles chansons.
Une de nos lectrices, une jeune femme qui
signe Diane de Lorris ses premiers vers, nous
envoie son Noël.
En voici les premières strophes :
Les lauriers sont, coupés, et les blancheurs du givre '
Succèdent 'aux blancheurs neigeuses dit porhnïier. '
Adieu les chaudes nuits où c'est si bon de vivre !
Adieu, dans les grands be.is, la chanson du ramier!
Ce n'est plus le printemps, ni l'été qui rayonne.
Non. Pas même l'automne et sa mâle beauté.
C'est l'hiver rigoureux sous lequel on frissonne,
Qui rend plus douloureuse encor la pauvreté.
Pourtant nous oublions toute humaine tristesse,
Quand le jour de Noël se lève radieux.
De l'ange et du. chrétien la commune allégresse
Dit : Pardon sur la terre et gloire dans les deux 1 1
A minuit, dans l'église, on allume les cierges;
L'orgue religieux répand ses doux accents,
Tandis' que des autels des sainto:,,'et des vierges
S'élève en blancs flocons la vapeur de l'encens.
Mais qu'il fait froid dehors, et que la rue e t sombrer
Aussi, près du foyer; où chante le grillon,
Oubliant les frissons et les terreurs de l'ombre,
On va joyeusement fêter le réveillon.
Je vous ai dit, l'année dernière, les vieilles
coutumes françaises de la Noël. C'est surtout
dans les pays du Nord que cette fête est solen-
nellement célébrée. Relisez l'Angleterre et la
Vie anglaise d'Alphonse Esquiros... ,
On se prépare au Christmas plusieurs
semaines à l'avance. D'immenses troupeaux
d?oies s'acheminent gravement du nord de
l'Angleterre, par toutes les routes, vers la ville
de Londres.'Les grands bœufs annoncer*! leur
arrivée sur les chemins de fer oii îêS bateaux
par de sombres beuglements. Les étaligus
de viande s'amoncèlent en pyramides devant
l'échoppe des bouchers. C'est surtout le soir,
dans les quartiers populeux de Londres , par
ROCAMBOLE
mess=""No 47 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
PREMIÈRE PARTIE
L'ENFANT PERDU
VII
Occùp.ons'-nous maintenant un moment de
monsieur Thomas Elgin, et pénétrons dans le
bureau qu'il avait à Londres, en'retrogradant
de quelques heures.
M. Thomas Elgia sortait de la banque où il
avait pris une somme de deux mille livres, pour
Voir le numéro du 22 novembre.
les éventualités de son petit commerce, lequel
allait aussi bien le dimanche que les autres
Jours.
Puis, avant de prendre l'omnibus qui devait
le conduire à Eilburn-square, il avait donné
Tendez-vous' à un petit bourgeois de ses amis,
avec lequel il passait volontiers ses soirées, soit
à lArgyll-roomst, -apit à l'Alhambra.
: Enfin, il s'était;, souvenu qu'il avait oublié de
répondre à .deux de ses correspondants de
DubÍin et, au lieu de retourner à son domicile
privé, il avait passe par son bureau, une sorte
d'échoppe située au fond d'un passage dans
Oxford-street.
j — Jé dînerai une'deim-heirre plus tard,'s'était-
il dit; mais il faut que j'écrive ce 30ir, car la
poste ne part pas le dimanche. -
Tandis qu'après avoir mis, en homme soi-
gneux qu'il, était, ses manches de -lustrine, il
taillait sa plume auprès d'un petit poêle où
brûlait un maigre feu de .coke, il entendit frap-
per à la porte.
— En trez! dit-il sans se déranger.
Mais à peine la porte se fut-elle ouverte que
monsieur Thomas Elgin se leva vivement, per-
dit Son air arrogant et hautain, ôta vivement
son chapeau et salua avec une politesse obsé-
quieuse.
; Le personnage qui venait de franchir le seuil
dfe l'ignoble boutique de l'usurier, était un hom-
me de haute mine, entièrement vêtu de noir,
jeune encore, mais complètement chauve, et
dont l'œil bleu accusait une énergique volonté.
— Vous ne m'attendiez peut-être pas, M. El -
gin ? dit-il. - ' • -
; — En effet, Votre Honneur, j'étais loin de
supposer... Je ne croyais pas...
— M. Thomas Elgin; dit l'inconnu, je n'ai
pas le temps de causer longuement avec vous.
Nous irons donc vite en besogne, si vous le
voulez bien.
— J'attends que Votre Honneur daigne m'ex-
pliquer...
— Vous avez fait arrêter l'abbé Samuel?
— Oui, Votre Honneur.
— C'est bien, mais ce n'est pas assez...
Thomas Elgin regarda son visiteur..
• - L'abbé Samuel n'a pu célébrer la messe à
F „mt-Grilles le vingt-six octobre.
— Il a été arrêté à six heures du matin.
— Et un grand danger qui menaçait la cause
;ue je sers et que vous servez, par cela même,
a été évité, poursuivit l'homme vêtu de noir.
Quatre hommes dangereux pour l'Angleterre,
que cette cérémonie religieuse devait réunir, le
cherchent inutilement dans Londres et ne peu-
vent le retrouver.
Nous, au contraire, nous avons les yeux sur
eux et ils ne nous échapperont pas.
— Ah ! fit Thomas Elgin.
. — L'un d'eux, reprit le visiteur, a été volé en
débarquant à Liverpool. Il venait d'Amérique
et était muni d'une lettre de crédit sur la mai-
son de banque Davis-Humphrey et Cos.
La lettre de crédit ayant disparu avec son
portefeuille, il se trouve sans ressources. Un
de nos émissaires, qui le suit nuit et jour, lui a
persuadé de s'adresser à vous ; et demain di-
manche, il ira frapper à la porte de votre maison,
dans Kilburn square. Il vous demandera mille •
livres pour un mois, vous lui en offrirez trois
mille..
— Trois mille livres ! exclama M. Thomas
EIÎ,i'n' ; mais, Votre Honneur, cette somme....
— Vous ne l'avez pas sur vous?
— Non, mon argent est à la Banque, et la
Banque est fermée jusqu'à lur:di. -
— Aussi, dit l'inconnu en souriant, je vous
l'apporte.
Il déboutonna sa redingote noire, tira de sa
poche un portefeuille et de ce portefeuille une
poignée de bank-notes qu'il étala devant
M. Thomas Elgin en lui disant :
•— Comptez.
L'usurier prit l'argent et le mit, à son tour,
dans sa poche.
— C'est là tout ce que j'avais à vous dire
pour le moment, dit l'inconnu. Bonsoir, M. El-
gin.
— Je suis votre serviteur très-humble, Votre
Honneur, dit l'usurier, qui reconduisît son visi-
teur avec une politesse servile.
— Hé! hé ! se dit M. Thomas Elgin, jamais
je n'aurai eu cinq mille livres chez moi, dans
Kilburn square; il faudra, ce soir, prendre
quelques petites précautions. Et il sauta daDI
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