Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1866-09-22
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 septembre 1866 22 septembre 1866
Description : 1866/09/22 (N156). 1866/09/22 (N156).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717340g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
DÉPARTEMENTS
Neue avons plusieurs fois déjà donné la description
du fusil à aiguille dont nos troupes se trouveront pro- j
chainement pourvues.. ; !
Nous pouvons annoncer aujourd'hui, dit l'Etendard?, , j
que l'occasion de se faire une idée complète de cette
arme perfectionnée et de juger de la simplicité du mé-
t f eanisme est offerte à tous ceux qui voudront aller à
Versailles.
Les chasseurs à pied, dont un détachement est en ce
moment en garnison dans cette ville, ont en effet
échangé l'ancien fusil à piston contre le fusil à ai-
guille.
, On les voit monter la garde, l'arme au bras, reposant
Sur la poignée qui sert à ouvrir la culasse.
A la date du 20 septembre, ces militaires avaient re-
çu 390 fusils Chassepot, et ils en attendaient encore
d'autres.
Le Moniteur du Calvados rapporte un triste
accident de chasse arrivé dimanche dernier, dans
la plaine de Moyaux. M. Jules Hervieu, du Pin,
voulut désarmer son fusil; le coup partit et at-
teignit à la cuisse M. Gardio, de B'angy; celui-
ci tomba immédiatement. L'os était brisé, les
chairs broyées et lacérées. '
La victime fut portée à l'hospice, où plusieurs
médecins jugèrent l'amputation immédiate né-
cessaire ; il y fut procédé tout de suite.
Ce qu'il y a de curieux c'est que M Gardin
succomba ie lendemain, non des suites de l'am-
putation mais à une sorte d'empoisonnement
produit par la poudre.
Pendant la nuit du 15 au 16 septembre, des vols
sacrilèges ont été commis dans trois églises du diocèse
de Nancy; à Saint-Clément, Laronxe et Chenevières,
Dans les trois églises, les saintes hosties ont été re-
trouvées sur la nappe d'autel ; mais ciboires, calices,
ostensoirs et boîtes aux saintes huiles ont été partout
enlevés.
Pour Saint-Clément et Laronxe, les soustractions sont
évaluées à 4,200 fr. : nous ne connaissons pas encore
à combien se montent les pertes de Chenevières.
Les voleurs ont pénétré dans les églises en -forcan,
les barreaux et les fenêtres des sacristies.
Quatre individus avaient été remarqués dans la
journée : deux d'entre eux mendiaient, quoiqu'ils fus-
sent assez proprement mis; les deux autres ont .--ia-
miné attentivement l'église à l'extérieur et à l'inté- '
ieur. »
r -
* On écrit de Grenoble, le 18 septembre:
« Un incendie très-considérable, dont on ne connaît
pas encore bien la vraie cause, s'est déclaré dimanche
soir, entre hui.t et neuf heures, dans les bâtiments de la
fabrique de bonbons de M. Camel, aux Haras, près Gre-
noble.
» On affirme que l'assurance ne couvre malheureu-
sement les pertes qu'en partie.
» Bien plus malheureusement encore, plusieurs per-
sonnes ont été blessées, entre autres un militaire de la
garnison et un pompier. »
Samedi dernier, dit le Journal de la Marne, on
a. mis en état d'arrestation le sieur Picrrej'ean
ex-huissier, qui, pour échapper à une condam-
nation à quinze mois d'emprisonnement pro-
v noncée par défaut contre lui pour abus de con-
fiance, par le tribunal de Sainte-Menehould,
s'était enfui à l'étranger, et, malheureusement
pour lui, était revenu dans notre ville quelques
jours avant l'expiration du délai légal de pres-
cription.
Voici une petite histoire qui s'est passée aux portes
de Versailles, et qu'on pourrait appeler les mésaven-
tures d'un voleur : j
B... est ou plutôt a été garçon blanchisseur. Actuel-
. lement il vit de ses rentes, et s'est fait le Némorin de
la nommée Delaisse, jeune fille de 20 ans.
Un des jours de la semaine dernière, les deux tourte-
reaux se sentirent l'envie de faire un bon déjeuner. Ils
entrèrent chez un marchand de vin, à Viroflay, et firent
honneur à sa cuisine. Puis, profitant d'un moment où
leur hôte avait les talons tournes, ils décampèrent en
oubliant de payer la carte. Mais, pleins de reconnais-
sance pour celui qui les avait traités, ils emportèrent,
en souvenir, les petites cuillers qu'on leur avait ser-
vies avec le café.
Deux heures après, les deux .amants étaient dans les
bois de Meudon : deux bergers de Virgile 1 Mais une
idée belliqueuse passa tout à coup dans la cervelle de
B... Il avait un pistolet chargé dans sa poche ; il fixa
un morceau de papier à un tronc d'arbre et voulut
montrer son adresse à sa 'bien-aimée. Pan !... Les
plombs sifflent à travers les feuilles... Au même in-
stant, dans la direction du coup, un homme parait au
milieu des branches. Il trouve la plaisanterie mau-
vaise et s'avance,, les yeux flamboyants, en criant
à B... :
— Je t'arrête!... ■ • ■ -
B... le prend pour un garde, laisse tomber son arme
9t joue des jambes. La jeune fille s'évanouit. L'individu
se met à la poursuite du fuyard. Tableau.
Dans sa course précipitée, B... arrive dans Chaville,
serré do près par l'inconnu qui crie : Au voleur! Au
déiour de la rue paraît un tricorne. C'est un gendarme
qui vient de recevoir la plainte du marchand de vin
de Viroflay et qui ouvre paternellement ses bras au fu-
gitif. '
Quelque temps après, le gendarme, voulant calmer
sans doute les inquiétudes de l'Ariane abandonnée dans
les bois, allait à sa recherche et ne tardait pas à la re-
trouver encore nantie des cuillers à café que le déses-
poir lui avait fait oublier dans .sa poche,.
On vient de découvrir à Antibes une inscrip-
tion grecque ainsi conçue :
Je suis Terpon, ministre de l'auguste déesse Aphrodite.
Puisse Cypris" payer de retour ceux qui m'ont élevé cette "
pierre.
Ce petit monument épigraphique semblerait
confirmer l'idée déjà émise qu'un temple consa-
cré à Vénus existait jadis dans cette jolie petite
ville. ,
ÉTRANGER
A Liverpool; un grand banquet va être offert,
parait-il, au capitaine Anderson, commandant du'
Great-Eastern. Les journalistes de toutes les na-
tions seront conviés à cette fête du progrès. On
leur remettra à chacun un bout du câble télé
graphique, pouvant faire l'office d,e presse-papier.
Le brick RelÙmce vient de sombrer dans la Manche.
Deux hommes ont péri seuls. Il fut assailli par une
tempête, â quelques kilomètres de Nore, vendredi soir.
Le capitaine et les quatre hommes eurent à réunir tous
tours efforts pour détourner la barque des récifs. Mais à
peine étaient-ils sortis de ce passage, qu'un nouveau
coup de vent arrive, et le navire disparaît sous les
eaux.
Deux hommes, le capitaine et le cuisinier, furent en-
trainés. Tous deux, excepté le capitaine, reparurent sur
les flots. Le cuisinier put lutter contre la mer et périt.
Les autres furent recueillis par la Dingdom of Life, qui
les a ramenés à Londres.
On lit dans le Précurseur, d'Anvers, du'18 s
Un bien triste malheur est arrivé hier soir sur la li-
gne du chemin de fer entre Contich et Malines. Quel-
ques minutes avant le passage d'un convoi, un enfant
traversait la voie ferrée. Ungarde-barrière s'élança pour
le sauver ; malheureusement il fit une chute et tous les
deux furent atteints par la locomotive. L'enfant eut les
jambes coupées et le garde-barrière la tète séparée du
corps.
On lit dans un journal espagnol, El Principado
du 18: '
« Le wagon de la malle ayant pris feu, toute la cor-
respondance de Madrid pour Cadix, et les colonies a été
brûlée. La correspondance pour Cuba et Puerto-Rico a
été sauvée ; elle était dans des wagons éloignés de celui
de la malle. Il y avait dans le wagon de la malle -une
grande quantité d'argent qui a été mis en fusion par
les flammes. Un seul voyageur, qui, de Cadix, devait se
rendre à la Havane, a perdu ainsi un million de réaux.
Plusieurs employés du chemin de fer se sont brûlé les
mains en voulant éteindre le feu. Personne n'a péri. »
TRIBUNAUX
UN DRAME A L'AUDIENCE.
Avant-hier, à la fin de l'audience, le Tribunal cor-
rectionnel avait à juger une bande de petits voleurs, au
nombre de dix, parmi lesquels était désigné par eux,
comme leur chef, un jeune homme de vingt-deux ans,
Eugène-Jean Mège, ouvrier en pianos.
Quelques témoins avaient déjà été entendus; un der-
nier arrive à la barre, et sa déclaration est des plus
accablantes pour Mège.
Ce dernier, qui jusqu'alors était resté impassible, se
lève tout à coup et s'écrie : « Oh ! c'est trop fort 1 c'est
trop fort! cet homme ne répète que ce que cQs enfants
luifont dire ! '
M. LE PRÉSIDENT. — N'interrompez pas le témoin ;
vous parlerez à votre tour, vous aurez tout le temps
qu'il vous plaira pour vous défendre.
M&GE pâlissant et agitant ses bras. - C'est trop fort! Il
y a des choses qu'on ne peut entendre sans mourir de
douleur... Je suis innocent 1 Oh! les enfants l les mal-
heureux! les malheureux 1
En ce moment, sa langue s'embarrasse, il ne peut
plus articuler, et il tombe comme une masse sur son
banc, en proie à une violente attaque d'épilepsie.
On s'empresse autour de lui, on le transporte hors de
la salle, et l'audience est interrompue.
Un audiencier est envoyé pour s'enquérir de son
é'at. Un quart-d'heure après il revient, et annonce que
Mège a, repris ses sens, et qu'il demande à revenir. « En
mon absence, aurait-il dit, on me condamnerait, on ne
pourrait pas faire autrement. Quand je me serai dé-
rendu, il est impossible qu'on me condamne. Je veux
retourner à l'audience. »
Il est fait droit à sa demande, il reprend sa place
sur le banc, et les débats sont repris. '
M. le président, lui rappelle que tous ses coprévenus
l'accusent de les avoir excités à commettre des vois,
aux étalages des marchands , petits vols, il est vrai,
! mais fréquemment répétés; en un mot, qu'ils le dési-
gnent comme leur chef.
MÈGE, avec indignation : —Je vous en supplie, mon-
sieur le président, ne voyez pas en moi un coupable,
ne voyez qu'un malheureux. Quand vous connaîtrez
toute la grandeur de mon malheur, vous n'aurez plus
qne de la pitié pour moi. Je suis ébéniste en pianos,
bon ouvrier; jusqu'à l'année dernière, je pouvais ga-
gner et je gagnais 6 à 7 francs par jour, j'étais heu-
reux et je ne demandais pas d'autre existence. Vous
venez de voir l'attaque dont je viens d'être saisi ; je
suis épileptique. Cette affreuse maladie m'a fait fermer
tous les ateliers de ma profession. Celasse comprend :
je suis un embarras pour tout le monde, pour les ou-
vriers comme pour les patrons. Je me suis découragé,
et, pour vivre, j'ai pris le plus grossier, le plus dan-
gereux des métiers , je sers les maçons, au risque de
tomber à chaque heure du haut des échelles qu'il me
faut gravir tout le jour, et j'espère bien que cela ne
me manquera pas prochainement. (Profond sentiment
de pitié dans l'auditoire.)
M. LE PRÉSIDENT. — Ce que vous nous dites est fort
triste; nous voudrions croire à votre courage, à votre
résignation, mais malheureusement vous avez contre
vous un déplorable antécédent qui ne fortifie que trop
la prévention qui pèse aujourd'hui sur vous : vous
avez été condamné pour...
MÈGE, très^exalté.— Pour vol ! Oui, une fois, j'étais
bien jeune ; je suis jeune encore. On ne croit doue plus
au regret, au repentir, au remords qui suivent les mau-
vaises actions ! Je n'ai que vingt-deux ans, et je reste-
rai donc toujours un, voleur, parce que je l'ai été à dix-
sept ans! Ce n'est pas le passé que vous devez juger
en moi, c'est le présent. Eh bien, pour le présent, je
suis innocent ; il n'y a pas un seul témoin qui m'ac-
cuse ; ii n'y a que ces enfants ; ils se sont concertés en-
semble (je les ai entendus comploter) pour me
perdre et dans la pensée de se sauver. L'un d'eux leur
a dit que si tous accusaient un homme, eux, enfants,
seraient considérés comme entraînés par lui et forcés
de lui obéir. Tous sont entrés dans le projet, et vous
voyez qu'ils y persistent.
Je suis seul contre eux, mais je suis fort de mon in-
nocence ; je n'ai pas trempé dans leurs vols ; je ne lee
ai pas partagés, je n'ai ni donné de conseils ni fait de
menaces; on ne peut rien prouver contre moi, ét, par'
conséquent, je ne puis être condamné. Je n'ai contra
moi que ma première condamnation; si élle devait en
entraîner une seconde, je ne serais plus un coupable,
je serais une victime. ;
Le ton, à la fois ferme et digne, avec lequel Mege a
prononcé cette défense, son air ,de bonne foi, son mal-
heur exprimé en termes si simples et en même temps
si énergiques, ont éveillé dans l'auditoire les plus vives
sympathies.
Sur les conclusions conformes de M. l'avocat impé-
rial Vaney, qui, en quelques paroles pleines de bonté,
a déclaré que le délit à l'égard de Mège ne lui parais-
sait pas suffisamment établi, le tribunal a renvoyé le
malheureux ouvrier de la poursuite, sans dépens.
Parmi les autres prévenus, les uns ont été rendus A
leurs parents et les aùtres condamnés à quelques mois
, de prison ou à quelques années de correction.
< , (Gazelle des Tribunaux.) '
LA CUEILLETTE
On a beaucoup parlé, ces temps derniers, dit la
France, des lois du divorce en Amérique, et surtout
de la facilité avec. laquelle elles sont mises à exécution ,
dans l'Etat de l'Indiana.
L'Indiana est, en effet, le pays béni des époux fati-
gués les uns des autres. Six mois do séjour dans cet
heureux Etat suffisent pour obtenir un divorce, lorsque
la personne dont on veut se séparer habite une autre
partie de la république. Ainsi, un citoyen de l'Ohio,
du Kentucky ou du Missaoùri, qui en a assez de sa moi-
tié, va vivre six mois dans l'Indiana : on sait ce que
cela veut dire.
A ce sujet, la chronique mondaine de Was-
hington raconte une curieuse anecdote, dont le
héros n'est autre que le sénateur B..., une des
fortes tètes du congrès.
A l'époque des troubles du Kansas, M. B...
partit pour ce territoire, laissant sa femme dans
la capitale de l'Indiana, lieu de leur résidence.
Le sénateur s'occupait beaucoup de politique.
Il s'agissait de faire admettre le Kansas comme
Etat dans l'Union américaine, d'ajouter une étoile
de plus à la bannière fédérale.
Mme B... écrivit à son mari de revenir bien
vite.
— Je m'ennuie loin de vous, disait-elle.
— Patience, chère amie, répondit l'ambitieux
politique, je travaille à notre fortune.
Un an se passa ainsi. Enfin, un beau soir,
M. B... vint frapper à la porte de sa maison, dans
l'Indiana.
— C'est moi, belle adorée.
— Qui, vous ?
— Votre mari.
— Je n'ai plus de mari,
— Comment cela?
— Voyant que vous ne vouliez pas revenir, j'ai
demandé et obtenu un bill de divorce.
■— Mais...
— Retirez-vous, monsieur, il n'est pas conve-
nable qu'un étranger se présente chez une
femme honnête à l'heure qu'il est.
— Ingrate!
— Pas de récriminations !
— Moi qui venais déposer à vos pieds mon
titre de sénateur du Kansas.
— Sénateur ou non, sortez; je ne veux pas
être compromise.
La fureur dans l'âme, M. B... partit pour
LES VAUDOUX
LES CANNIBALES
DE SAINT-DOMINGUE
PAR
GUSTAVE AIMARD
\ Suite (1) <
Nous nous plaisons à croire pour l'honneur de
ces savants philanthropes que le sang que bu-
vaient les Romains et dans lequel ils se bai-
gnaient n'était pas du sang humain.
N'importe c'est une belle chose que la science, j
grâce à elle, tout peut non-seulement s'expli-
quer , mais encore s'innocenter.
Le gouvernement haïtien a sévi à plusieurs
reprises contre les Vaudoux ; Toussaint-Lou-
verture les poursuivit ; Dessalines les chassa
comme des bêtes fauves, les massacrant impi-
toyablement lorsqu'il pouvait les atteindre.
Nous ferons observer que, chaque fois que l'on
jugea à propos d'user de rigueurs envers cette
secte, ce fut toujours pour des motifs politiques,
parce que les Vaudoux favorisaient ou essayaient
de favoriser un compétiteur contre un autre, ou
tentaient de renverser le pouvoir établi, pour y
substituer une démagogie sanguinaire. Mais tant
M) Voir les'numéros parus depuis le 28 août.
qu'ils se bornèrent à exercer à huis-clos leurs
sorcelleries et leurs rapines, la justice jugea tou-
jours prudent de feindre d'ignorer ce qui se pas-
sait. Il ne fallut rien moins que les horribles at-
tentats que nous avons entrepris de raconter, et
qui éclatèrent comme un coup de foudre sur la
population haïtienne épouvantée, pour que le
gouvernement se décidât enfin à ouvrir les yeux
et à punir les coupables. Et encore ne le fit-il
qu'avec une extrême prudence, en essayant d'i-
soler les faits, de ne les imputer qu'à quelques
scélérats réunis par la cupidité et l'amour du
meurtre et du pillage, conduisant le procès de
façon à donner le change au monde civilisé, et
I ne consentan t qu'à son corps défendant à ce qu'un
compte rendu tronqué des débats effroyables de
cette affaire fût publié dans les journaux officiels
du pays. Et cela non-seulement à cause de la
terreur universelle que ces sectaires impies in-
spirent à toutes les classes de la société, mais
encore parce que le gouvernement est contraint
de s'avouer son impuissance à détruire le mal
dans sa racine.
Voilà quelle est la secte des Vaudoux. ».
Ainsi que M. Chauveliq l'avait promis, le soir
même il revint de Port-au-Prince.
L'agent de la police de sûreté procéda immé-
diatement, avec un empressement feint ou réel,
à la recherche des coupables ; mais ses efforts ne
furent pas couronnés de succès : aucun des in-
dividus soupçonnés ne tomba entre ses mains.
i Les soldats envoyés à la case de maman Roséïde
étaient revenus sans la ramener ; la vieille né- ■
gresse avait disparu, et, à la place de son ajoupa,
ils n'avaient plus trouvé qu'un monceau de
cendres.
M. Duvauchelle, prévenu par un second émis-
saire, était arrivé de Jérémie.
M. Jules Duvauchelle était ùn homme de
trente-six ans, aux traits énergiques et au ca-
ractère déterminé ; il adorait sa femme et sa
fille.
Tout le monde s'attendait aux éclats d'une
douleur terrible.
Il n'en fut rien. M. Duvauchelle ne jeta pas
un cri, ne proféra pas une plainte, ne versa pas
une larme ; son visage sembla de marbre. Pen-
dant une nuit tout entière, il demeura silen-
cieux et immobile au chevet de sa femme expi-
rée, tenant ses mains dans les siennes et les
yeux fixés sur e le, sans qu'il détournât une se-
conde ses regards.
Au lever du soleil, il imprima un baiser ardent
sur les lèvres de la morte, l'ensevelit de ses
propres mains, sans vouloir accepter aucun aide
étranger, et, ce dernier et suprême devoir accom-
pli, il ouvrit les portes au clergé, qui venait
prier pour l'âme de la malheureuse femme.
Le courage de M. Duvauchelle ne se démentit
pas un instant; il conduisit le deuil, marchant
seul et calme en apparence en tète du cortége,
vit d'un œil sec murer la porte du caveau ; puis,
après avoir congédié d'un geste les assistants qui
se retirèrent mornes et silencieux, il s'agenouilla
sur la terre, et, pendant une heure au moins, il
demeura la tète cachée dans ses mains.
Quel orage devait gronder dans les profon-
deurs secrètes de cette àme brisée par la dou-
leur ? .
Enfin, il se releva et jeta un cri d'appel.
Un cavalier parut, tenant un cheval en bride.
M. Duvaucheile se mit en selle, couvrit d'un
dernier regard la tombe de celle qu'il avait tant
aimée, et, enfonçant les éperons dans les flancs du
cheval qui hennit de douleur, il partit à fond de
train et disparut presque aussitôt dans les méan-
dres de la route, suivi par son domestique, jeune
noir d'une vingtaine d'année-, qui, moins stoïque
que son maitre, pleurait à chaudes larmes.
GUSTAVE AIMARD.
(La suite à denwin.)
VARIÉTÉS
Les Prussiens n'ont qu'à bien se tenir. Un chimiste
viennois , M, Léïnnelbroëk, vient de trouver le moyen
d'emmagasiner dans de petites capsules de verre des
étincelles électriques assez psissantes pour tuer un
homme, ce nouvel engin de destruction fait explosion
au moindre choc ; il est couvert d'une armature d'a-
cier affectant la forme comique qui lui permet d'entrer
dans les chairs.
Des expériences faites sur des bœufs et sur des che-
vaux ont parfaitement réussi. Tous ceux de ces animaux
qui ont été touchés sont tombés foudroyés.
Neue avons plusieurs fois déjà donné la description
du fusil à aiguille dont nos troupes se trouveront pro- j
chainement pourvues.. ; !
Nous pouvons annoncer aujourd'hui, dit l'Etendard?, , j
que l'occasion de se faire une idée complète de cette
arme perfectionnée et de juger de la simplicité du mé-
t f eanisme est offerte à tous ceux qui voudront aller à
Versailles.
Les chasseurs à pied, dont un détachement est en ce
moment en garnison dans cette ville, ont en effet
échangé l'ancien fusil à piston contre le fusil à ai-
guille.
, On les voit monter la garde, l'arme au bras, reposant
Sur la poignée qui sert à ouvrir la culasse.
A la date du 20 septembre, ces militaires avaient re-
çu 390 fusils Chassepot, et ils en attendaient encore
d'autres.
Le Moniteur du Calvados rapporte un triste
accident de chasse arrivé dimanche dernier, dans
la plaine de Moyaux. M. Jules Hervieu, du Pin,
voulut désarmer son fusil; le coup partit et at-
teignit à la cuisse M. Gardio, de B'angy; celui-
ci tomba immédiatement. L'os était brisé, les
chairs broyées et lacérées. '
La victime fut portée à l'hospice, où plusieurs
médecins jugèrent l'amputation immédiate né-
cessaire ; il y fut procédé tout de suite.
Ce qu'il y a de curieux c'est que M Gardin
succomba ie lendemain, non des suites de l'am-
putation mais à une sorte d'empoisonnement
produit par la poudre.
Pendant la nuit du 15 au 16 septembre, des vols
sacrilèges ont été commis dans trois églises du diocèse
de Nancy; à Saint-Clément, Laronxe et Chenevières,
Dans les trois églises, les saintes hosties ont été re-
trouvées sur la nappe d'autel ; mais ciboires, calices,
ostensoirs et boîtes aux saintes huiles ont été partout
enlevés.
Pour Saint-Clément et Laronxe, les soustractions sont
évaluées à 4,200 fr. : nous ne connaissons pas encore
à combien se montent les pertes de Chenevières.
Les voleurs ont pénétré dans les églises en -forcan,
les barreaux et les fenêtres des sacristies.
Quatre individus avaient été remarqués dans la
journée : deux d'entre eux mendiaient, quoiqu'ils fus-
sent assez proprement mis; les deux autres ont .--ia-
miné attentivement l'église à l'extérieur et à l'inté- '
ieur. »
r -
* On écrit de Grenoble, le 18 septembre:
« Un incendie très-considérable, dont on ne connaît
pas encore bien la vraie cause, s'est déclaré dimanche
soir, entre hui.t et neuf heures, dans les bâtiments de la
fabrique de bonbons de M. Camel, aux Haras, près Gre-
noble.
» On affirme que l'assurance ne couvre malheureu-
sement les pertes qu'en partie.
» Bien plus malheureusement encore, plusieurs per-
sonnes ont été blessées, entre autres un militaire de la
garnison et un pompier. »
Samedi dernier, dit le Journal de la Marne, on
a. mis en état d'arrestation le sieur Picrrej'ean
ex-huissier, qui, pour échapper à une condam-
nation à quinze mois d'emprisonnement pro-
v noncée par défaut contre lui pour abus de con-
fiance, par le tribunal de Sainte-Menehould,
s'était enfui à l'étranger, et, malheureusement
pour lui, était revenu dans notre ville quelques
jours avant l'expiration du délai légal de pres-
cription.
Voici une petite histoire qui s'est passée aux portes
de Versailles, et qu'on pourrait appeler les mésaven-
tures d'un voleur : j
B... est ou plutôt a été garçon blanchisseur. Actuel-
. lement il vit de ses rentes, et s'est fait le Némorin de
la nommée Delaisse, jeune fille de 20 ans.
Un des jours de la semaine dernière, les deux tourte-
reaux se sentirent l'envie de faire un bon déjeuner. Ils
entrèrent chez un marchand de vin, à Viroflay, et firent
honneur à sa cuisine. Puis, profitant d'un moment où
leur hôte avait les talons tournes, ils décampèrent en
oubliant de payer la carte. Mais, pleins de reconnais-
sance pour celui qui les avait traités, ils emportèrent,
en souvenir, les petites cuillers qu'on leur avait ser-
vies avec le café.
Deux heures après, les deux .amants étaient dans les
bois de Meudon : deux bergers de Virgile 1 Mais une
idée belliqueuse passa tout à coup dans la cervelle de
B... Il avait un pistolet chargé dans sa poche ; il fixa
un morceau de papier à un tronc d'arbre et voulut
montrer son adresse à sa 'bien-aimée. Pan !... Les
plombs sifflent à travers les feuilles... Au même in-
stant, dans la direction du coup, un homme parait au
milieu des branches. Il trouve la plaisanterie mau-
vaise et s'avance,, les yeux flamboyants, en criant
à B... :
— Je t'arrête!... ■ • ■ -
B... le prend pour un garde, laisse tomber son arme
9t joue des jambes. La jeune fille s'évanouit. L'individu
se met à la poursuite du fuyard. Tableau.
Dans sa course précipitée, B... arrive dans Chaville,
serré do près par l'inconnu qui crie : Au voleur! Au
déiour de la rue paraît un tricorne. C'est un gendarme
qui vient de recevoir la plainte du marchand de vin
de Viroflay et qui ouvre paternellement ses bras au fu-
gitif. '
Quelque temps après, le gendarme, voulant calmer
sans doute les inquiétudes de l'Ariane abandonnée dans
les bois, allait à sa recherche et ne tardait pas à la re-
trouver encore nantie des cuillers à café que le déses-
poir lui avait fait oublier dans .sa poche,.
On vient de découvrir à Antibes une inscrip-
tion grecque ainsi conçue :
Je suis Terpon, ministre de l'auguste déesse Aphrodite.
Puisse Cypris" payer de retour ceux qui m'ont élevé cette "
pierre.
Ce petit monument épigraphique semblerait
confirmer l'idée déjà émise qu'un temple consa-
cré à Vénus existait jadis dans cette jolie petite
ville. ,
ÉTRANGER
A Liverpool; un grand banquet va être offert,
parait-il, au capitaine Anderson, commandant du'
Great-Eastern. Les journalistes de toutes les na-
tions seront conviés à cette fête du progrès. On
leur remettra à chacun un bout du câble télé
graphique, pouvant faire l'office d,e presse-papier.
Le brick RelÙmce vient de sombrer dans la Manche.
Deux hommes ont péri seuls. Il fut assailli par une
tempête, â quelques kilomètres de Nore, vendredi soir.
Le capitaine et les quatre hommes eurent à réunir tous
tours efforts pour détourner la barque des récifs. Mais à
peine étaient-ils sortis de ce passage, qu'un nouveau
coup de vent arrive, et le navire disparaît sous les
eaux.
Deux hommes, le capitaine et le cuisinier, furent en-
trainés. Tous deux, excepté le capitaine, reparurent sur
les flots. Le cuisinier put lutter contre la mer et périt.
Les autres furent recueillis par la Dingdom of Life, qui
les a ramenés à Londres.
On lit dans le Précurseur, d'Anvers, du'18 s
Un bien triste malheur est arrivé hier soir sur la li-
gne du chemin de fer entre Contich et Malines. Quel-
ques minutes avant le passage d'un convoi, un enfant
traversait la voie ferrée. Ungarde-barrière s'élança pour
le sauver ; malheureusement il fit une chute et tous les
deux furent atteints par la locomotive. L'enfant eut les
jambes coupées et le garde-barrière la tète séparée du
corps.
On lit dans un journal espagnol, El Principado
du 18: '
« Le wagon de la malle ayant pris feu, toute la cor-
respondance de Madrid pour Cadix, et les colonies a été
brûlée. La correspondance pour Cuba et Puerto-Rico a
été sauvée ; elle était dans des wagons éloignés de celui
de la malle. Il y avait dans le wagon de la malle -une
grande quantité d'argent qui a été mis en fusion par
les flammes. Un seul voyageur, qui, de Cadix, devait se
rendre à la Havane, a perdu ainsi un million de réaux.
Plusieurs employés du chemin de fer se sont brûlé les
mains en voulant éteindre le feu. Personne n'a péri. »
TRIBUNAUX
UN DRAME A L'AUDIENCE.
Avant-hier, à la fin de l'audience, le Tribunal cor-
rectionnel avait à juger une bande de petits voleurs, au
nombre de dix, parmi lesquels était désigné par eux,
comme leur chef, un jeune homme de vingt-deux ans,
Eugène-Jean Mège, ouvrier en pianos.
Quelques témoins avaient déjà été entendus; un der-
nier arrive à la barre, et sa déclaration est des plus
accablantes pour Mège.
Ce dernier, qui jusqu'alors était resté impassible, se
lève tout à coup et s'écrie : « Oh ! c'est trop fort 1 c'est
trop fort! cet homme ne répète que ce que cQs enfants
luifont dire ! '
M. LE PRÉSIDENT. — N'interrompez pas le témoin ;
vous parlerez à votre tour, vous aurez tout le temps
qu'il vous plaira pour vous défendre.
M&GE pâlissant et agitant ses bras. - C'est trop fort! Il
y a des choses qu'on ne peut entendre sans mourir de
douleur... Je suis innocent 1 Oh! les enfants l les mal-
heureux! les malheureux 1
En ce moment, sa langue s'embarrasse, il ne peut
plus articuler, et il tombe comme une masse sur son
banc, en proie à une violente attaque d'épilepsie.
On s'empresse autour de lui, on le transporte hors de
la salle, et l'audience est interrompue.
Un audiencier est envoyé pour s'enquérir de son
é'at. Un quart-d'heure après il revient, et annonce que
Mège a, repris ses sens, et qu'il demande à revenir. « En
mon absence, aurait-il dit, on me condamnerait, on ne
pourrait pas faire autrement. Quand je me serai dé-
rendu, il est impossible qu'on me condamne. Je veux
retourner à l'audience. »
Il est fait droit à sa demande, il reprend sa place
sur le banc, et les débats sont repris. '
M. le président, lui rappelle que tous ses coprévenus
l'accusent de les avoir excités à commettre des vois,
aux étalages des marchands , petits vols, il est vrai,
! mais fréquemment répétés; en un mot, qu'ils le dési-
gnent comme leur chef.
MÈGE, avec indignation : —Je vous en supplie, mon-
sieur le président, ne voyez pas en moi un coupable,
ne voyez qu'un malheureux. Quand vous connaîtrez
toute la grandeur de mon malheur, vous n'aurez plus
qne de la pitié pour moi. Je suis ébéniste en pianos,
bon ouvrier; jusqu'à l'année dernière, je pouvais ga-
gner et je gagnais 6 à 7 francs par jour, j'étais heu-
reux et je ne demandais pas d'autre existence. Vous
venez de voir l'attaque dont je viens d'être saisi ; je
suis épileptique. Cette affreuse maladie m'a fait fermer
tous les ateliers de ma profession. Celasse comprend :
je suis un embarras pour tout le monde, pour les ou-
vriers comme pour les patrons. Je me suis découragé,
et, pour vivre, j'ai pris le plus grossier, le plus dan-
gereux des métiers , je sers les maçons, au risque de
tomber à chaque heure du haut des échelles qu'il me
faut gravir tout le jour, et j'espère bien que cela ne
me manquera pas prochainement. (Profond sentiment
de pitié dans l'auditoire.)
M. LE PRÉSIDENT. — Ce que vous nous dites est fort
triste; nous voudrions croire à votre courage, à votre
résignation, mais malheureusement vous avez contre
vous un déplorable antécédent qui ne fortifie que trop
la prévention qui pèse aujourd'hui sur vous : vous
avez été condamné pour...
MÈGE, très^exalté.— Pour vol ! Oui, une fois, j'étais
bien jeune ; je suis jeune encore. On ne croit doue plus
au regret, au repentir, au remords qui suivent les mau-
vaises actions ! Je n'ai que vingt-deux ans, et je reste-
rai donc toujours un, voleur, parce que je l'ai été à dix-
sept ans! Ce n'est pas le passé que vous devez juger
en moi, c'est le présent. Eh bien, pour le présent, je
suis innocent ; il n'y a pas un seul témoin qui m'ac-
cuse ; ii n'y a que ces enfants ; ils se sont concertés en-
semble (je les ai entendus comploter) pour me
perdre et dans la pensée de se sauver. L'un d'eux leur
a dit que si tous accusaient un homme, eux, enfants,
seraient considérés comme entraînés par lui et forcés
de lui obéir. Tous sont entrés dans le projet, et vous
voyez qu'ils y persistent.
Je suis seul contre eux, mais je suis fort de mon in-
nocence ; je n'ai pas trempé dans leurs vols ; je ne lee
ai pas partagés, je n'ai ni donné de conseils ni fait de
menaces; on ne peut rien prouver contre moi, ét, par'
conséquent, je ne puis être condamné. Je n'ai contra
moi que ma première condamnation; si élle devait en
entraîner une seconde, je ne serais plus un coupable,
je serais une victime. ;
Le ton, à la fois ferme et digne, avec lequel Mege a
prononcé cette défense, son air ,de bonne foi, son mal-
heur exprimé en termes si simples et en même temps
si énergiques, ont éveillé dans l'auditoire les plus vives
sympathies.
Sur les conclusions conformes de M. l'avocat impé-
rial Vaney, qui, en quelques paroles pleines de bonté,
a déclaré que le délit à l'égard de Mège ne lui parais-
sait pas suffisamment établi, le tribunal a renvoyé le
malheureux ouvrier de la poursuite, sans dépens.
Parmi les autres prévenus, les uns ont été rendus A
leurs parents et les aùtres condamnés à quelques mois
, de prison ou à quelques années de correction.
< , (Gazelle des Tribunaux.) '
LA CUEILLETTE
On a beaucoup parlé, ces temps derniers, dit la
France, des lois du divorce en Amérique, et surtout
de la facilité avec. laquelle elles sont mises à exécution ,
dans l'Etat de l'Indiana.
L'Indiana est, en effet, le pays béni des époux fati-
gués les uns des autres. Six mois do séjour dans cet
heureux Etat suffisent pour obtenir un divorce, lorsque
la personne dont on veut se séparer habite une autre
partie de la république. Ainsi, un citoyen de l'Ohio,
du Kentucky ou du Missaoùri, qui en a assez de sa moi-
tié, va vivre six mois dans l'Indiana : on sait ce que
cela veut dire.
A ce sujet, la chronique mondaine de Was-
hington raconte une curieuse anecdote, dont le
héros n'est autre que le sénateur B..., une des
fortes tètes du congrès.
A l'époque des troubles du Kansas, M. B...
partit pour ce territoire, laissant sa femme dans
la capitale de l'Indiana, lieu de leur résidence.
Le sénateur s'occupait beaucoup de politique.
Il s'agissait de faire admettre le Kansas comme
Etat dans l'Union américaine, d'ajouter une étoile
de plus à la bannière fédérale.
Mme B... écrivit à son mari de revenir bien
vite.
— Je m'ennuie loin de vous, disait-elle.
— Patience, chère amie, répondit l'ambitieux
politique, je travaille à notre fortune.
Un an se passa ainsi. Enfin, un beau soir,
M. B... vint frapper à la porte de sa maison, dans
l'Indiana.
— C'est moi, belle adorée.
— Qui, vous ?
— Votre mari.
— Je n'ai plus de mari,
— Comment cela?
— Voyant que vous ne vouliez pas revenir, j'ai
demandé et obtenu un bill de divorce.
■— Mais...
— Retirez-vous, monsieur, il n'est pas conve-
nable qu'un étranger se présente chez une
femme honnête à l'heure qu'il est.
— Ingrate!
— Pas de récriminations !
— Moi qui venais déposer à vos pieds mon
titre de sénateur du Kansas.
— Sénateur ou non, sortez; je ne veux pas
être compromise.
La fureur dans l'âme, M. B... partit pour
LES VAUDOUX
LES CANNIBALES
DE SAINT-DOMINGUE
PAR
GUSTAVE AIMARD
\ Suite (1) <
Nous nous plaisons à croire pour l'honneur de
ces savants philanthropes que le sang que bu-
vaient les Romains et dans lequel ils se bai-
gnaient n'était pas du sang humain.
N'importe c'est une belle chose que la science, j
grâce à elle, tout peut non-seulement s'expli-
quer , mais encore s'innocenter.
Le gouvernement haïtien a sévi à plusieurs
reprises contre les Vaudoux ; Toussaint-Lou-
verture les poursuivit ; Dessalines les chassa
comme des bêtes fauves, les massacrant impi-
toyablement lorsqu'il pouvait les atteindre.
Nous ferons observer que, chaque fois que l'on
jugea à propos d'user de rigueurs envers cette
secte, ce fut toujours pour des motifs politiques,
parce que les Vaudoux favorisaient ou essayaient
de favoriser un compétiteur contre un autre, ou
tentaient de renverser le pouvoir établi, pour y
substituer une démagogie sanguinaire. Mais tant
M) Voir les'numéros parus depuis le 28 août.
qu'ils se bornèrent à exercer à huis-clos leurs
sorcelleries et leurs rapines, la justice jugea tou-
jours prudent de feindre d'ignorer ce qui se pas-
sait. Il ne fallut rien moins que les horribles at-
tentats que nous avons entrepris de raconter, et
qui éclatèrent comme un coup de foudre sur la
population haïtienne épouvantée, pour que le
gouvernement se décidât enfin à ouvrir les yeux
et à punir les coupables. Et encore ne le fit-il
qu'avec une extrême prudence, en essayant d'i-
soler les faits, de ne les imputer qu'à quelques
scélérats réunis par la cupidité et l'amour du
meurtre et du pillage, conduisant le procès de
façon à donner le change au monde civilisé, et
I ne consentan t qu'à son corps défendant à ce qu'un
compte rendu tronqué des débats effroyables de
cette affaire fût publié dans les journaux officiels
du pays. Et cela non-seulement à cause de la
terreur universelle que ces sectaires impies in-
spirent à toutes les classes de la société, mais
encore parce que le gouvernement est contraint
de s'avouer son impuissance à détruire le mal
dans sa racine.
Voilà quelle est la secte des Vaudoux. ».
Ainsi que M. Chauveliq l'avait promis, le soir
même il revint de Port-au-Prince.
L'agent de la police de sûreté procéda immé-
diatement, avec un empressement feint ou réel,
à la recherche des coupables ; mais ses efforts ne
furent pas couronnés de succès : aucun des in-
dividus soupçonnés ne tomba entre ses mains.
i Les soldats envoyés à la case de maman Roséïde
étaient revenus sans la ramener ; la vieille né- ■
gresse avait disparu, et, à la place de son ajoupa,
ils n'avaient plus trouvé qu'un monceau de
cendres.
M. Duvauchelle, prévenu par un second émis-
saire, était arrivé de Jérémie.
M. Jules Duvauchelle était ùn homme de
trente-six ans, aux traits énergiques et au ca-
ractère déterminé ; il adorait sa femme et sa
fille.
Tout le monde s'attendait aux éclats d'une
douleur terrible.
Il n'en fut rien. M. Duvauchelle ne jeta pas
un cri, ne proféra pas une plainte, ne versa pas
une larme ; son visage sembla de marbre. Pen-
dant une nuit tout entière, il demeura silen-
cieux et immobile au chevet de sa femme expi-
rée, tenant ses mains dans les siennes et les
yeux fixés sur e le, sans qu'il détournât une se-
conde ses regards.
Au lever du soleil, il imprima un baiser ardent
sur les lèvres de la morte, l'ensevelit de ses
propres mains, sans vouloir accepter aucun aide
étranger, et, ce dernier et suprême devoir accom-
pli, il ouvrit les portes au clergé, qui venait
prier pour l'âme de la malheureuse femme.
Le courage de M. Duvauchelle ne se démentit
pas un instant; il conduisit le deuil, marchant
seul et calme en apparence en tète du cortége,
vit d'un œil sec murer la porte du caveau ; puis,
après avoir congédié d'un geste les assistants qui
se retirèrent mornes et silencieux, il s'agenouilla
sur la terre, et, pendant une heure au moins, il
demeura la tète cachée dans ses mains.
Quel orage devait gronder dans les profon-
deurs secrètes de cette àme brisée par la dou-
leur ? .
Enfin, il se releva et jeta un cri d'appel.
Un cavalier parut, tenant un cheval en bride.
M. Duvaucheile se mit en selle, couvrit d'un
dernier regard la tombe de celle qu'il avait tant
aimée, et, enfonçant les éperons dans les flancs du
cheval qui hennit de douleur, il partit à fond de
train et disparut presque aussitôt dans les méan-
dres de la route, suivi par son domestique, jeune
noir d'une vingtaine d'année-, qui, moins stoïque
que son maitre, pleurait à chaudes larmes.
GUSTAVE AIMARD.
(La suite à denwin.)
VARIÉTÉS
Les Prussiens n'ont qu'à bien se tenir. Un chimiste
viennois , M, Léïnnelbroëk, vient de trouver le moyen
d'emmagasiner dans de petites capsules de verre des
étincelles électriques assez psissantes pour tuer un
homme, ce nouvel engin de destruction fait explosion
au moindre choc ; il est couvert d'une armature d'a-
cier affectant la forme comique qui lui permet d'entrer
dans les chairs.
Des expériences faites sur des bœufs et sur des che-
vaux ont parfaitement réussi. Tous ceux de ces animaux
qui ont été touchés sont tombés foudroyés.
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