Titre : Journal des débats politiques et littéraires
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1878-02-01
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Description : 01 février 1878 01 février 1878
Description : 1878/02/01. 1878/02/01.
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Description : Collection numérique : Histoire diplomatique :... Collection numérique : Histoire diplomatique : IIe République - Second Empire (1848-1870)
Description : Collection numérique : Histoire diplomatique :... Collection numérique : Histoire diplomatique : IIIe République (1870-1914)
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
-.TERbREN'rrtyHER
ON S'ABONNE
me des Prêtres-Samt-Germain-l'Auxerrois, 17.
PRIX. I»E I/ABOflfafEMBJ'trff
Un an. Six mois,. Trois moi*.
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Paris. 72 fr. 36.fr." 18 fr.
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Parla, an numéro SO cent*
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nev?spapers office, 17, Gresham street, G. P. <} •
8BM: Veffarîr, Eiavtea et C\ 1, Finch laneCornhili'
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A Bruxelles, à V'Offle* de p&blidU, 46, rue de la
Madeleine, dans las kiosques et dans les bi-
blîotJi«aaes des eares de;chen>taB- de fer beieea
A Vatparaiso (Ghili), chez M. Orestes L. Toroéro.
n L ||< ti ,| ni .11 '̃! » ~ur «-J^-JT» f"»7^^ ^T'' '*|W"l*WlTiOKliKlWWfWil^iriïlW»ij^^
-̃̃̃̃ '•"̃ ̃̃̃-•̃̃̃̃-̃̃̃ • ÉDITION DE PARIS. "̃̃̃ ̃ "̃̃ •̃ ̃'• ̃•i-
l -I ̃ •••̃̃̃•̃. ̃• '• ̃ ̃- ̃ ̃ ̃
Blum
VENDREBÏ 1er FÉVRIER
< -̃̃ ̃̃ 1878.
̃"̃ '•- ON S'ABONNE
en Belgique, en Italie,
dans le Luxembourg, en Turquie,
•n Suisse, en Syrie, en Roumanie et dans les
̃̃̃ régences du Maroc et de la Tunisie,
en Chine et au Japon,
ta moyen d'une valeur payable à Paris ou de
̃ûandats-poste, soit internationaux, soit françai*
en Allemagne, en Autriche, en Russie,
et dans tous les pays du Nord
ches tous les directeurs de postes;
et dans tous les autres pays,
par l'envoi d'une valeur payable à Paris.
Les anf jces sont reçues
C&8S 8133. ^ttrachoy, &a£ïH« et C«,
8, place de la Bourse,
«t 'au bureau du iOCBWAïii
«lleadoïveat toujours Strs agréées par la rédaction.
Les souscripteurs dont l'àbonnemetit
expire le 31 janvier sont priés de le
renouveler s'ils ne veulent pas éprouver
de retard dans l'envoi du Journal.
PARIS
JEUDI 51 JANVIER
Tous les journaux toutes les dépê-
ches, toutes les correspondances qui nous
viennent d'Autriche semblent indiquer
de la part du gouvernement austro-,
hongrois une attitude plus ferme et plus
résolue. Il n'est plus douteux qu'une
Note très catégorique a été adres-
sée de Vienne à Saint-Pétersbourg. Ce
que l'on sait des conditions de paix
que la Russie a proposées sans les
communiquer nulle part d'une manière
officielle et sans permettre qu'elles fus-
sent enfin signées par la Porte, a provo-
qué une inquiétude d'autant plus vive
qu'on s'attend' à voir la Russie exiger
bientôt plus encore qu'elle ne demande
aujourd'hui. L'émotion a élé partout
très profonde, mais surtout à Vienne;
une correspondance que nous publions
plus loin porte les signes de cette in-
quiétude un peu tardive, mais bien na-
turelle. Le comte Andrassy n'a pas
cessé de répéter, depuis l'origine des évé-
nemens, qu'il se réservait de faire en-
tendre la voix de l'Autriche au moment
dé la paix, et il espérait sans doute
que l'opinion du cabinet de Vienne se
produirait d'autant plus facilement qu'elle
serait interrogée et consultée par l'allié
de Saint-Pétersbourg. N'est-ce pas là ce
que signifiait l'alliance des trois empires
dont il a été si souvent question? Celte al-
liance, la presse officieuse de Vienne
en parlait sur un ton vraiment épique.
L'Autriche devait y trouver la garantie et
la sauvegarde de tous ses intérêts;
elle avait la promesse de l'Allemagne,
elle croyait avoir mieux encore du
côté de la Rassie, une parole d'hon-
neur très formelle. Ces pompeux di'lh'y-1
rambes n'étaient-ils pas la manifestation
d'une entente vraiment cordiale, et le ré-
sultat de l'entente cordiale ne devait-il
pas être un accord préalable des trois
puissances sur toutes les questions qui
intéressaient l'une d'entre elles? L'Au-
triche l'avait compris de la sorte; aussi
pa. pu rprise a-t-elle été grande et sa dé-
ception cruelle lorsqu'elle a vu que la
Kussie la tenait à distance de ses opéra-
tions diplomatiques à l'instar de telle
autre puissance européenne. M. de Novi-
koff à Vienne s'est borné, comme le
courte Schoùvaloff à Londres à faire
connaître les grands linéamens des
conditions russes. Pour en venir au
fait, il ne- paraît pas que le comte An-
drassy ait été mieux instruit des intentions
de la Russie que lord Beaconsficld, et il
ne paraît pas que. lord Beacohsfîeld l'ait
été mieux que le premier journaliste venu
» qui. aurait pris la peine de lire assidûment
les dépêches. Nous, pour notre compte, ne
pouvons-nous pas nous vanter d'avoir été
aussi bien informés que la plupart des ca-
binets européens, et d'avoir compris aussi
gromptement de quoi il s'agissait en
Orient?
L'Autriche pourtant l'a enfin compris.
Nous ne savons pas au juste ce qui peut
lui rester de confiance dans l'alliance des
trois empires, mais certainement cette
confiance est diminuée. L' Autriche se re-
tourne du côté de r Angleterre; peut-être
n'y a-t-il de sa paît qu'une velléité ou
même un jeu diplomatique, mais notre
devoir de chroniqueurs est de signaler
un fait aussi apparent. Un membre de
la Chambre des Communes ayant de-
mandé au gouvernement s'il était
vrai qu'une alliance offensive et dé-
fensive existât entre les trois empires
pflur partager la Turquie, sir Stafford
Nortchote a répondu « Eu ce qui con-
cerne l'une au moins des trois puissan-
ces, j'ai de fortes raisons pour douter d'un
pareil arrangement. Les négociations qui,
vont suivre, pendant les mois ou les se-
maines prochaines, démontreront proba-
blement si. ces puissances agissent de
concert ou non. On voit par là q"ue l'An-
gleterre a pris très au sérieux la con-
version ,oj le retour de l'Autriche à
l'ancien droit européen, et les discours
des ministres anglais portent des mar-
ques nombreuses de cette conviction.
Les journaux aussi croient à cette con-
version de l'Autriche et l'encouragent.
Le Thnes lui-même écrit de,s phra-
ses couinie celle-ci « Nos intérêts,
bien qu'ils soient au total très im-
.portans, sont très éloignés d'êlce aussi
graves que ceux de J'Autriche. -Les
conditions russes impliquent pour elle
une perturbation complète de l'équi-
libre politique sur la frontière de l'Est, un
renversement absolu des arrangemens
qui •smbftist aient jusqu'aujourd'hui par
rapport à la grande voie tluviale de l'Al-
lemagne du Sud vers l'Orient' Le Da-
nube est pour l'Autriche ce que la Ta-
mise est pour l'Angleterre méridionale,
et l'établissement de la domination
russe à l'embouchure de ce fleuve,
ou ce qui serait la même chose
dans le Bosphore et les Dardanelles, res-
semblerait parfaitement à l'occupation
par la Fracce ou par l'Allemagne de Cha-
tham'ou.de Gravesend. » Voilà, certes, «n
jugement empirique sur les affaires autri-
chiennes mais est-il erroné, ou même exa-
géré ? N'est-il pas, au contraire, d'une
rigoureuse exactitude? R
Nous avons dit bien souvent les périls
que l'œuvre tentée par la Russie fait courir
à l'Autriche nous les avons énumérés
analysés; mais, ce qu'il est impossibled'em-
brasser dans toutes ses conséquences,
c'est jusqu'où peut aller l'ambition des
petites puissances qui ont pris à la guerre
une part heureuse on malheureuse, et qui
se livrent au délire d'une imagination sur-
excitée. Une dépêche de Seralin n'an-
nonçait-elle pas hier que la, Serbie, la
triste Serbie, demandait le viiayet de
Kossovo, c'est-à-dire toute la Vieille
Serbie, un territoire à peu près égal
à celui qu'elle occupe aujourd'hui;
plus le pachalyk de Widdin Nisch
Sofia, etc. l'administration, de la Bos-
nie enfin une indemnité de guerre
pour singer jusqu'au bout les grands mo-
dèles ? Chacun des petits princes d'Orient
fait en ce moment le rêve de Pichrocole.
Tout cela a un nom, c'est l'esprit révolu-
tionnaire à outrance, et il est naturel que
l'Autriche s'émeuve, de sentir à ses
portes ce souffle empesté qu'elle retient
si difficilement chez elle. Tout l'invite
donc àprendre des précautions énergiques,
et nous ne. sommes pas surpris qu'un
journal comme le Pester Lloyd prêche
l'entrée de l'armée autrichienne en Rou-
manie et en Serbie. L'Autriche, en ef-
fet, a raison de se sentir forte nar le
bienfait de la géographie. Elle a une
armée considérable, et il ne tient
qu'à elle de placer celte armée
sur les derrières des Russes, c'est-
à-dire de renverser par ses pieds d'ar-
gile le colosse de la puissance moscovite.
-Qui retient l'Autriche? Sans doute la
crainte de l'Allemagne l'Allemagne peut
lui faire autant de mal qu'elle peut en faire
elle-même à la Russie. Ici se présente un
grand problème nous n'avons pas les élé-
mens pour le résoudre, et il faudrait une
audace dont la diplomatie autrichienne
serait peut-être incapable. Que ferait l'Al-
lemagne si l'Autriche, prenait hardiment
ides positions militaires en Serbie, en
Roumanie, ou seulement en Transylvanie?
L'Allemagne est non seulement l'alliée,
mais l'amie sincère de la Russie; elle lui
a promis sa neutralité et, autant que pos-
sible, celle des autres; elle a fait beaucoup
pour lui assurer Timmobilitédel' Autriche
mais il est imppssible que l'Allemagne
elle-même, malgré lé concours moral
qu'elle ne marchande pas à la Russie,
ne fasse pas quelques réflexions pénibles
sur les résultats éventuels de la guerre.
Quoi M. de Bismarck, ce grand homme
dont le génie impose à l'Europe entière,
n'aurait formé l'empire allemand que pour
servir de préparation à l'envahissement,
de la puissance russe et pour frayer
les voies à un empire slave qui serait
nécessairement l'ennemi futur de rem-
pire germanique Celte politique ressem-
blerait si fort à celle de Napoléon III, qu'on
hésite à en croire M. de Bismarck capable.
En Allemagne, les esprits sont partagés,
divisés comme partout; mais M. de Bis-
marck est homme à discerner où est le
bon parti. Il y a d'ailleurs, de l'autre côté
du Rhin, une opinion considérable qui s'é-
pouvâute des progrès de la Russie au point
de vue des intérêts germaniques. On ne se
dissimule pas que l'Allemagne est soli-
daire de l'Autriche en Orient; c'est par
l'Autriche que la civilisation allemande,
grâce à l'amabilité d'une race plus
douce, coule et se rénand le' lontr
du Danube jusqu'en Or jent. De tout
temps la conscience allemande a été pé-
nétrée de cette vérité; et M. de Bis-
marck lui-niême ne déclarait-il pas, il.
y a un an, que son amitié pour la Russie
n'irait pas jusqu'à lui sacrifier les intérêts
vitaux de l'Autriche? A Vienne, on n'a pas
oublié ces paroles mais, depuis, l'altitude
énigmafique de l'Allemagne, le silence
de sphinx gardé par le grand-chancelier
n'ont pas peu contribué à augmenter
'l'indécision des esprits et les obscurités
de la situation. L'opposition de M. de Bis-
marck, ou du moins la répugnance
qu'il, montre à l'idée d'un Congrès est
une nouvelle cause d'hésitation. Que
sortira -l- il de tout cela? Il est
difficile de le dire, puisque les élémens
mêmes du problème sont sujets à se mo-
difier comme les senlimens humains,
les passions, les opinions mobiles d'un
pays, et la politique instable de mi-
nistres irrésolus. Les Russes seuls sa-
vent bien ce qu'ils veulent et où ils
vont. De deux choses Tune ou ils
iront à Constantinople, ou ils profiteront
de la panique qui règne dans la ville, de la
terreur dont le Sérail est envahi, pour
faire signer au derniermoment par la Porte
les conditions les plus dures. La Porte est
capable de tout sacrifier dans l'état d'af-
folement où elle est tombée, et de se
présenter ensuite au Congrès, s'il ?o
réunit, les mains liées par des engage-
mens absolus. Voilà donc la politique
russe aller jusqu'au bout par les armes,
ou par la diplomatie, suivant que l'atti-
tude de l'Europe l'obligera à se servir de
l'un ou de l'autre moyen. Quelle sera
cette attitude de l'Europe ? On l'ignore.
Jusqu'à quel point l'Angleterre peut-elle
compter sur l'Autriche, et celle-ci sur
l'Angleterre" Les në-gecialioiic. en effet, l
1
sont aujourd'hui entre Vienne et Londres,
et entre ces deux villes et Saint-Péters-
bourg. Quelle est enfin la politique de l'Al-
lemagne, si même elle en a une bien ar-
rêtée ? Telles sont les questions qui do-
minent la question générale. Mais ces
questions elles-mêmes, nous ne pouvons
que les poser.
BOURSE DE PARIS •
Q
CjôÉare le 30 le 31 Haw«««. Baisse.
8 @/0
Comptaat. 73 40 73 80 4C
Fin couar. 73 to 73 50
# f ©/©
Comptant 103 70 101 30
©/•
Comptant 110 .lie 30 30
Fin cour. 109 91 110.27 12 32 12
PETITE! BO0RSE DU SOIR.
Emprunt S 0/0 110 fr. 32 1/2, lil 1/4, -56 1/4.
3 0/0. 73 fc 83', 74 fr., 73 fr. 92 1/2. J2.
Italien 73 fr. 73, 74 fr., 73 fr. ̃97*
Egyptiennes 6 0/0.. 150 fr., 150 fr. 62.
Chemins égyptiens. 263 fr. 12.
5 0/0 turc. 9 fr. 20, 25, 1i>, 20.
Hongrois G 0/0 78 5/8,7/8.
Russe. 8"i 11/ 10. 7/3.
Florins (or) 6i 8/8, 63.
Nous recevons de nos correspondant parti-
culiers les dépêches suivantes
1 « Vienne, le 31 janvier, soir.
» ues aernieres Qémarcnes du cabinet de
Vienne ont été couronnées d'un plein suc-
cès. La réponse de la Russie est arrivée
aujourd'hui. La Russie déciare formelle-
ment reconnaitre que tous les amngemens
antérieurs et ultérieurs conclus entre elle et
la Turquie, et touchant les intérêts euro-
péens, doivent être considérés comme non ave-
nus tant que l'Europe n'y a pa3 donné son as-
sentiment. En même temps la Russie ad-
met que les conditions proposées par elle
sont à modifier. Le cabinet russe approuve
pleinement dans sa déclaration le point de vue
clair et précis auquel s'est placé la cabinet
de Vienne, et son désir légitime de voir les
conditions do paix définitives arrêtées par
l'aréopage européen. ..1
» A la suite de cette déclaration, il est t
presque -certain qu'il y aura un Congrès: on
croit même que «'est à Visnne qu'il se
tiendra. »
« Berlin, le 31 janvier, midju,
«Parmi les transactions proposées par le
cabinet de Vienne à celui de Saint-Péters-
bourg, il est question d'une occupation mixte
ou neutre de la Bulgarie.
.» Ou croit généralement qu'afin de désin-
téresser l'Angleterre et d'isoler l'Autriche, la
Russie pourra consentir au maintien du
statu quo pour les détroits, se réservant de
soulever la question plus tard, quand le dé-
veloppement de sa flotte lui permettra de la
résoudre à son gré.
» La Norddeutsche Allgemeine Z&ilung con-
teste l'exactitude des déclarations de sir Staf-
ford Northcoto, notamment en ce qui con-
cerne les intentions de l'Autriche, lesquelles
ont pu être inexactement interprétées auprès
du cabinet anglais.
» Les avis restent partagés sur la question
de savoir jusqu'à quel point l'Autriche doit
compter sur l'appui do l'Allemagne. La Nord-
deutsche Allgemeine Zcitung affirme que l'al-
liance des trois empereurs eal inébranlable et
que la confiance mutuelle entre les trois souve-
rains est entière. La National Zeitv.ng avoue,
au contraire, son scepticisme à cet égard. Elle
considère que l'Autriche est plus iutéresséé
encore que l'Angleterre à l'existence de
la Turquie. « Lo sort de la Turquie, dit-elle,
» dépend d'une parole énergique prononcée
» à propos, et pareilh'roent l'aveoir de l'Au-
'» triche et son rôle futur en Orient. Puisse
» cette dernière puissance ne pas justifier
» une fois de. plus le mot de Napoléon « Ces
» Messieurs de Vienne sont toujours eu re-
» tard ou d'une idée, ou d'une année, ou
» d'une armée! »
» On continue ici à se montrer peu favora-
ble à l'idôô d'une Conférence. »
Télégraphie privée.
(Service télégraphique de l'agence Havas.)
Berlin, le 31 janvier.
L'empereur a reçu aujourd'hui, à trois heures
et demie de l'après-midi, le nouvel ambassadeur
extraordinaire et plénipotentiaire de France,
M. le comte de Saint- Vallier, qui lui a remis les
lettres du Président de la république française
qui l'accréditent près la cour-dé Berlin. M. hj mi-
nistre d'Etat de Bùlow assistait à cette cérémo-
nie en qualité de représentant du ministère des
affaires étrangères. On remarquait en outre,
parmi les personnes présentes, M. de Rœder.
vice-grand-maître des cérémonies et introducteur
des ambassadeurs, la maréchal de la cour, le
comte de Goltz, aide de camp général de l'empe-
reur, le comte de Lehndorf et M. de Lindequist,
aides de camp de S. M.
L'ambassadeur de France et lès autres mem-
bres de l'ambassade ont été conduits au palais
dans trois voitures de- gala de la. cour par M. le
baron de Rosenberg, maître des cérémonies.
Aussitôt après l'audience de l'empereur, l'am-
bassadeur a été conduit chez l'impératrice, qui
était entourée de ses chambellans et des dames
de la cour.
̃ Vienne, le 31 janvier.
La Presse publie les renseignemens suivans
« L'ambassadeur d'Autriche près le gouverne-
ment russe a remis hier au prince Gortchakoff
la Note du-cabinet de Vienne, qui est ainsi con-
çue
« L'Autriche ne conteste uulleineut le droit
que la Turquie a de conclura des traités dans son
propre intérêt; mais elle est forcée de considérer
les arrangemens pris à Kesanlyk comme nuls, en
taut qu'ils modifient les traités actuellement en
vigueur et atteignent les intérêts autrichiens,
jusqu'à ce que de nouveaux arrangemens aient
été conclus avec les puissances signataires. »
La Nouvelle Presse libre apprend qu« M. le
*omte Andrassy a fait des démarches eu vue
d'une résistance commune de l'Europe à ia po-
litique pernicieuse de la Rassie,' et a proposé la
convocation d'une Conférence" qui siégerait à
Vienne pour discuter et régler tous les points
des condition* de paix qui. touchent aux intérêts
généraux de l'Europe.
Le Fremdewblatl publie. comme la Presse, le
texte de la Note adressée par l'Autriche à la
Russie.
Vienne, le 3t janvier..
La réponse du prince Gortchakoff à la Note du
cooits An-iras:^ dit qpie la soSuttïn- des irues- I
Uons qui touchent aux intérêts européens sera
soumise a*la sanction de l'Europe.. Tout est sub-
ordonné à un Congrès auquel le prince de Bis-
marck est opposé.
Vienne, le 31 janvier.
L'intention que l'on a de provoquer une Con-
férence en vue de régler un certain nombre de
points des préliminaires de paix qui touchent aux
questions internationales commence à se manifes-
ter d une façon plus positive. Il paraît aussi que
la Russie n'esfpas opposée en principe à la con-
vocation do cette Conlôrenco.
Cologne, le 31 janvier.
On télégraphie de Vienne, le 31, à la Gazelle de
Cologne:
« Dans la Note qu'il a adressée au gouverne-
ment russe, le comte Andrassy se plaint de ce
que la Russie se dispose Ix aller au delà des ar-
rangemens conclus à Conslanlinople et à Berlin,
et de tous ceux auxquels avait (tonné lieu l'al-
liance des trois empereurs. Il déclare qu-j la
fixa lion de la frontière serbe et monténégrine re-
garde aussi l'Autriche, et que l'uli possidetis est
une base inacceptable pour cette puissance.
» Le comte Andrassy ajoute qu'il ne faut pas
que la Russie obtienne de fait des droits de sou-
veraineté sur lo Danube, ou s'établisse d'une ma-
nière durable au delà des Balkans, sous prétexte
de prendre une garantie.
» II dit que le règlement de la situation de la
Bulgarie ne regarde pas exclusivement, la Russie,
et déclare que, si la réponse de la Russie n'est
pas claire et satisfaisante, il enverra aux puis-
sances garantes une circulaire dans, laquelle il
42& inviteraà se réunir dans une Conférence pour
régler la situation de. la presqu'île des Balkans et
réviser le traité de Paris. »
Bruxelles, le 31 janvier, 5 h. 20 m. soir.
r Indépendance belge publie la dépêche suivante,
datée de Vienne le 3u janvier
«La réponse de la Russie à la Note autrichienne
est arrivée.
» La Russie reconnaît que les stipulations pré-
sentes ou futures, entre la Russie et la Turquie,
peuvent être modifiées et ne seront définitives
qu après avoir été sanctionnées par les puissan-
ces.
» La Russie accepte donc complétement la
politique du cabinet austro-honcrois. »
Saint-Pétersbourg, le 31 janvier.
A la suite de la déclaration faite par sir Staf-
ford Northcole à la Chambre des Communes, le
2S janvier, la presse a parlé, par erreur, de dé-
marches communes de l'Angleterre et de l'Au-
triche à Saint-Pétersbourg. Le Daily Telegraph
va jusqu'à dire que des Notes identiques ont été
envoyées ici par l'Autriche et l'Angleterre.
Aucune Note de ce genre n'a été rpçue par le
gouvernement russe, et l'attitude de l'Angleterre
ejt celle de l'Autriche ne concordent m dans la forme
ni dans le fond. Un échange d'opinions cordial
et conforme aux circonstances a lieu actuellement
entre les cabinets de Saint-Pétersbourg et de
Vienne, et les récentes déclarations de M. le
comte Andrassy concernant les préHminaiwîs de
paix n'ollrent pas d'autre caractère. L'attitude
de l'Autriche est celle d'une puissance amie.
Tous les désirs que l'Autriche exprime ici sont
accueillis avec la prévenance qu'impliquent les
relations personnelles des deux souverains. Le
gouvernement russe est tout disposé à régler
d'un commun accord les qr estions qui touchent
aux intérêts communs des deux pays.
Saint-Pétersbourg, le 31 janvier.
Les journaux de Saint-Péiersbourg déclarent
que 1 on donnerait au Congrès un caractère sin-
gulier si les autro-i puissances, se conformant
aux intentions de l'Angleterre, voulaient augmen-
ter leurs forces militaires en vue de cet événement
Ils ajoutent qu'une forêt de baïonnettes n'est pas
une chose désirable au moment d'un Congrès.
L'article du Golos, qui a été signalé à l'étran-
ger par une dépêche, n'est que l'expression
d une opinion personnelle et repose en beaucoup
de points sur des malentendus.
Londres, lo 31 janvier.
On télégraphie de Berlin, le 31 janvier, à la Pal
Mail Gazette:
« Les duTérends qui divisent en ce moment
l'Autriche et la Russie sont tellement sérieux,
que l'empereur Guillaume a cru devoir interve-
nir personnellement entre le czar et' l'empereur
d'Autriche, les conjurant de se souvenir des prin-
cipes sur lesquels s'était fondée l'alliance des
trois empereurs {Dreikaiserbimd) et de ne point
rompre cotte alliance.
» On assure que, tout en agissant amicalement
envers la Russie, le gouvernement allemand ap-
puie les intérêts de 1 Autriche. »
ANGLETERRE.
Londres, le" 31 janvier.
Un meeting qui devait avoir lieu à l'hôtel de
Cannon street. dans la Cité, n'a pu se réunir, les
conservateurs ayant .fait irruption dans la salle
de la réunion. Des scènes tumultueuses s'en sont
suivies.
Les députés du Borne RvJers ont résolu do ne
pas participer au vote relatif aux crédits supp !é-
mentaires.
Londres, le 31 janvier, soir.
A la suite de la tentative faite pour tenir un
meeting libéral à Cannon street, un autre mee-
tmg a' été tenu a Guildhall, sous la présidence
du lord-maire. Environ «,000 personnes y assi-
staient. t.
Le meeting avait pour but de soutenir la poli-
tique du gouvernement M. Palmer, gouverneur
de la Banque d'Angleterre, et M. Ritchie. ont dé-
claré que ceux qui font croire à la Russie quo le
peuple- anglais est divisé et ne défendrait pas
ses intérêts sont les vrais promoteurs.de la guerre
Avant de se séparer, les assistans ont adopté,
au -milieu d'un crand enthousiasme et de chants
patriotiques, la Résolution suivante
« Le meeting désire sincèrement la paix si elle
peut être maintenue, tout en sauvegardant l'hon-
neur et les intérêts du Royaume-Uni. Le meeting
croit que la cause de la paix et les intérêts an-
glais seront mieux assurés en soutenant la poli-
tique du gouvernement. »
Une députation a porté immédiatement cette
Résolution au gouvernement dans le Parlement.
La députalion a été reçue par lord Manners maî-
tre général des postes, qui a déclaré, que la Réso-
lution du meeting exprime exactement les senti-
mens du gouvernement, qui est reconnaissant de
ce témoignage de la Cité de Londres.
chambre des lords. Séance du Si janvier.
lord Derhy, répondant à lord Stratheden et
Campbell, déclare qu'il n'a jamais dit que, dans
aucune circonstance présumable, il ne ingerail
convenable et opportun l'exercice du droit d'en-
voyer la flotte à Constantinople. Il peut surgir des
éventualités dans lesquelles l'expédition de la
flotte pourrait être décidée utilement sans mettre
le moins du monde en danger la paix générale
mais, au contraire, en sauvegardant les intérêts de
1 humanité et en assurant le maintien de la paix
Lord Derby, répondant à lord Stanhope. déclare
qu'il a justement vu le comte Schouvaloff il y
a deux heures. L'ambassadeur de Russie était,
comme lui, sans informations relativement à la
conclusion de l'armistice.
Lord Derby avait pris connaissance d'une com-
munication du prince Gortchakoff au prince
^Pl1.011^'0*1* dans laquelle le premier avouait la
difficulté ou il était d'expliquer les retards qui
ont eu heu pour la conclusion de l'armistice
La Turquie, d'un autre côté, aouvoyé à ses plé-
nipotentiaires, il y a plus d'une semaine, des in-
structions leur enjoignant d'accepter les condi-
tions russes. Aucune nouvelle n'est parvenue
depuis à la Sublime-Porte. Les retards en ques-
tion ne sauraient donc être reprochas à la Tur-
quie.
Lord Derby peut déclarer, sans hésitation,
qu aucune proposition n'a été faite par la Russie
dans le but de soumettre à une sanction diplo-
matique l'occupation de Constantinople par les
1 Busses..
Aucune proposition n'a clé foito t-our une-oo-
cvpation mixte.
ciu&inRK des communes.– Séance du Si janvier.
Sir Stafford Nortlicote répond à M. Chaplin
qu'aux dernières dates les renseignemens reçus
au sujet de l'armistice portent qu'il n'est pas en-
core signé. Il est exact que les Russes avancent
toujours dans la direction du Sud. Le chancelier
de l'Echiquier ignore si le gouvernement russe
adhère encore aux conditions indiquées dans la
dépêche de lord Derby du 6 mai dernier.
Le docteur Kenealy annonce qu'il demandera
demain si la triple alliance des empereurs est
complétement rétablie.
M. Jenkhis posera également demain une ques-
tion pour savoir si une partie du crédit que le
gouvernement demande a déjà été dépensée.
M. Sonrke répond à M. Chaplin que les com-
munications télégraphiques entre Constantinople
et Andrinople étaient encore ouvertes le 20 jan-
vier Mais on a appris, ce matin, que les fils
étaient coupés entre Constantinople et Gallipoli.
Sir Stafford Norlhcote, répondant à M. Ashley,
dit. que la correspondance relative aux lettres de
M. Gladstone à Negropontis sera placée sous les
yeux de la Chambre et parlera d'elle-même.
M. BotirAe, interrogé par M. Hay, répond que le
gouvernement s'est mis en communication avec
Constantinople, pour savoir combien de person-
nes dans cette ville ont droit à Ja protection de
l'Angleterre.
M. Forster développe un amendement ainsi
conçu
« La Chambre, informée par lo discours de la
reine que les conditions auxquelles était attachée
la neutralité de l'Angleterre n'ont pas été en-
freintes, et n'ayant pas reçu de renseignemens
suttisans pour justifier une déviation de la ligne
politique de neutralité et de paix, ne voit pas de
motifs pour augmenter les charges du pays par le
vote de crédits inutiles. »
L'honorable membre soutient qu'à Son avis
rien encore ne justifie le crédit demandé (Àp-
plaudis^emens sur les bancs de l'Opposition.)
M. Forster dit que le caractère des crédits de-
mandés est tel, qu'on ne peut leur trouver un
précédent. En 1870, le budget supplémentaire de-
mandé par le gouvernement indiquait clairement
le but qu'on avait en vue. Celui-ci n'est purement
et t simplement destiné qu'à être mis en avant comme
une menace à laprochaine Conférence.Rien dans les
conditions de la paix ne justiiïe l'attitude mé-
finnlu ~Tn hA nnlninnnn · elino nn w,nm.t T\.I'}C"
danger les intérêts britanniques, et la demande
de la Russie relativement aux Dardanelles est
naturelle et digne d'être prise en considération
par l'Europe.
Les derniers événemens peuvent avoir ébranlé
la confiance des ministériels, mais certainement ils
n'ont1 pas accru celle de l'Opposition dans le
gouvernement. On comprend que le gouverne-
ment envoie, la flotte aux Dardanelles pour y pro-
téger la personne et les biens des sujets anglais;
mais, en lui donnant pour mission de maintenir
la liberté de la navigation dans le détroit, il viole
ouvertement la neutralité.
On fi paru désirer que le gouvernement se pré-
sente à la Conférence avec l'appui unanime de la
nation. Cela pourrait être si l'on se contente de
-défendre clairement les intérêts distincts de l'An-
gleterre, notamment la route de l'Inde et l'inté-
grité de l'Egypte.
L'occupation permanente de Constantinople
affecte plus les intérêts de l'Autriche que ceux
de l'Angleterre ma;s le gouvernement doit
être soutenu s'il s'efforce d'empêcher cette occu-
pation et l'exclusivité du passage des Dardanelles.
'̃ Un bon gouvernement européen en Turquie
serait encore une chose utile aux intérêts an-
glais: mais.jusqu'à présent, on ne voit pas qu'au-
cun de ces intérêts soit sérieusement menacé.
M. Cross, sous-sècrétaire, d'Etat de l'intérieur,
répond.
La phase dans laquelle est entrée la
guerre d'Orient depuis l'occupation d'An-
drinople par l'armée russe et sa marche
sur Constantinople, phase à la fois diplo-
matique et militaire, a naturellement rap-
pelé l'attention sur des événemens d'une
autre époque qui, sauf quelques particu-
larités et quelques divergences de détail,
présentent dans leur ensemble une re-
marquable analogie avec ceux que nous
voyons se dérouler sous nos yeux. Nous
voulons parler des péripéties de toute
sorte qui ont précédé le traité d'Andri-
nople de 1829, auquel on a tant de fois
fait allusion dans ces derniers temps.
Alors, comme aujourd'hui, le désaccord
des grandes' puissances, l'indifférence el
l'inaction des unes, l'hostilité sourde et
impuissante des autres ont favorisé la
politique habile et cauteleuse du cabinet
de Saint-Pétersbourg. Dès que les -choses
en furent venues au point où il ne s'a-
gissait plus que de jouer au plus fin, la
Russie eut recours à l'art consommé avec
lequel elle sait manier les chancelleries
1. 1 1 1
étrangères. Dans la circonstance que nous
rappelons, étant donné la situation cri-
tique où se trouvait son armée du Da-
nube, elle dut y déployer encore bien
plus de finesse et de ruse que n'en exige
en ce moment la supériorité incontestable
de ses armes. Si l'histoire est, selon l'ex-
pression de l'orateur latin, « la lumière
des temps, l'école de la vie, lux temporum,
magislra vitœ », on ne lira peut-être pas
sans intérêt une courte évocation d'un
passé qui offre avec le présent tant de
curieuses ressemblances.
La campagne de 1 828 n'avait pas entiè-
rement répondu aux espérances de la
Russie, ni à l'opinion qu'on s'était faite de
sa puissance ainsi que de la faiblesse de
la Turquie. En Asie, il est vrai, le maré-
chal Paskewitsch avait obtenu de brillans
succès, pris Kars et occupé toutlepacha-
lik d'Achalzik; mais, en Europe, l'armée
russe n'avait réussi qu'à s'emparer de
Varna par trahison. Non seulement elle
n'avait pas franchi, ni même atteint les
Balkans, mais elle avait échoué devant
Chournla et s'était vue forcée de lever le
siège de Silistrie. Aussi le cabinet de
Saint-Pétersbourg avait-il annoncé l'in-
tention d'entreprendre une seconde cam-
pagne pour laquelle il faisait d'immenses
préparatifs avec une ostentation qui avait
pour but de dissimuler la faiblesse réelle
de ses moyens. L'Europe s'y laissa pren-
dre et en conçut de vives alarmes. Dès
l'ouverture des hostilités, au printemps de
1829, une grande agitation se manifesta
en Angleterre. Le Times prêchait la guerre
contre la Russie, et le duc de Wellington
menaçait de, soumettre la situation de
l'Angleterre en Orient à l'examen du Con-
seil privé. Le prince de Metternich, qui di-
rigeait alors la politique du cabinet de
Vienne, avait essayé vainement de former
une quadruple alliance entre ^Autriche,
la France, la Grande-Bretagne et la Prusse,
pour imposer dans un Congrès la médiation
de ces puissances à la Russie et à la
Porte. Ce projet, auquel la France aurait
volontiers adhéré, avait été repoussé
très énergiquement par la Prusse, qui ne
dissimulait pas ses. sympathies pour le*
gouvernement, russe. Celui-ci avait d'ail-
leurs déclaré à M. de Metternich, par l'or-
gane de M. de Tatischeff, son ambassa-
deur à Vienne, que la Russie était prête
à tout subir plutôt que là honte d'un pa-
reil Congrès (janvier 1829),' La Porte n'y
répugnait pas moins. Le plan autrichien
fut donc abandonné.
Cependant l'armée d'invasion, comman-
dée par Diebitsch, avançait toujours elle
avait franchi les Balkans (juillet 1829)
mais elle s'affaiblissait à chaque pas et
elle ne devait arriver à Andrinople qu'é-
puisée et presque anéantie. 15,000 hom-.
mes à peine avaient pu atteindre les
murs de cette ville; le reste traînait
sur les chemins depuis le Danube jusqu'à
Ândriuôple ou remplissait les hôpitaux.
M. de Moltke, l'illustre chef actuel de
l'état-major prussien, qui accompagnait
l'armée russe dans 'cette campagne, ra-
conte que les soldats, en arrivant à l'hô-
pital, soDlTraient tellement du froid qu'ils
couchaient avec leurs bottes, et qu'en les
retirant on remarquait la gangrène à leurs
pieds complétement gelés. Heureux en-
core les soldats malades qui trouvaient
un abri Les provisions, et môme la
paille pour se coucher, manquaient totale-
.v"E t
uiciii. uca maiaues recevaient pour toute
literie un morceau de toile verte, coupée
dans les tentes abandonnées parles Turcs
à Andrinople. Après les premiers jours d'un
froid un peu rigoureux, les belles allées de
platanes plantés devant les casernes ser-
vant d'hôpitaux avaient disparu pour servir
de combustible à la portion valide comme
auxmalades de l'armée. A défaut de bois,
on alla jusqu'à déterrer les ossemensdes'
cadavres dans les cimetières pour se
chaufTer(l).
On ne peut rien ajouter à l'horreur d'un
pareil tableau, et il ne faut plus s'étonner
si la campagne de 1 829 a coûté aux Rus-
ses victorieux plus de 60,000 soldats. En
effet, sur les 80 ou 90,000 hommes dont
se composait leur armée au début de
cette seconde snnèe 15,000 valides à
peine repassèrent le Pruth l'année sui-
vante. Les succès des Russes, on peut le
dire sans exagération, furent achetés eçu
prix d'une armée entière; et si les Turcs
avaient fait une résistance assez éner-
gique pour rendre nécessaire une troi-
sième campagne, il est douteux que la
Russie eût pu mettre sur pied une "troi-
sième armée de soldats aguerris. Il fal-
lait donc qu'à tout prix la Russie sor-
tît de cette situation dangereuse. L'au-
dace de Diebitsch y contribua puissam-
ment en imprimant au gouvernement turc
une terreur fausse et exagérée. Mais déià
le salut avait été préparé d'autre part au
moyen d'une intrigue savamment ourdie
par la Prusse, intrigue à laquelle l'atti-
tude constante de l'Allemagne dans le
présent conflit prête un incontestable in-
térêt.
En réalité, malgré le fracas de ses dé-
monstrations militaires et l'assurance
dont ses diplomates faisaient étalage à •'
l'étranger, le cabinet de Saint-Péters-
bourg n'avait entrepris la campagne de
1829 que par point d'honneur et avec un
secret désir d'arriver à une prompte con-
clusion de la paix. Si cette campagne n'a-
vait pas dû produire plus de résultats «me
la précédente, la Russie aurait perdu tout
son prestige en Orient.' Le czar Nicolas
était surtout pénétré de ce sentiment.
Aussi, lorsqu'il se rendit à Berlin pour as-
sister au mariage du. prince Guillaume
de Prusse [11 juin 1829] (2), il mani-
festaau roi Frédéric-Guillaume III le désir
de déterminer la Porte à lui envoyer des
plénipotentiaires. pour entamer des négo-
ciations en vue de la paix. Il se serait
contenté de très petits avantages, quelles
que pussent être d'ailleurs les exigences
qu'il montrerait pour sauver l'honneur
des principes. A cette époque, Diebitsch
n'était pas encore en marche vers le Bal-
kan, et la plus forte partie de son armée
était retenue "devant Silistrie et devant
Chtfumla, Le roi de Prusse, qui répu-
gnait à toute guerre, entra immédiate-
ment dans les vues du czar, et tous deux
s'accordèrent à envoyer à Constantinople
un agent extraordinaire qui, tout en con-
servant le caractère extérieur d'ambassa-
deurprussien.s'emploierait efficacement en
faveur de la Russie. Leur choix se fixa sur
le baron de Mùffling, ardent admirateur
du czar, dont il reçut les instructions par
l'intermédiaire du roi. Le. général de Mùf-
fling était particulièrement désigné pour
cette mission. En 1827, il avait tracé un
plan de campagne pour les armées rus-
ses, et, au moment même où l'on recou-
rait à ses services, il insistait vivement
sur la nécessité de passer les Bal-
kans, comme le seul moyen d'obtenir la
paix, dont le, czar était. si désireux. Il a
lui-môme raconté les événemens aux-
quels il fut alors mêlé dans un ouvrage
intitulé Ans meinem Leben, publié en
4^1 ?™PZ£n'i dila Rvsïie c?nKe U Turquie e-A
18Î8-M9, par le baron de Moltke, major dans
1 etat-major prussien. Ouvrage publié en 1 845.
(2) Ce prince est l'empereur actuel d'Allema-
gne, qui épousa à cette époque la princesse Au-
^!?W«™de cha*-le5-Frédérie, grand-duc de'
â3xe-~vt!eimar,
ON S'ABONNE
me des Prêtres-Samt-Germain-l'Auxerrois, 17.
PRIX. I»E I/ABOflfafEMBJ'trff
Un an. Six mois,. Trois moi*.
Départemens. 80 fr. ̃ 40 fr. 20 fï. •
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blîotJi«aaes des eares de;chen>taB- de fer beieea
A Vatparaiso (Ghili), chez M. Orestes L. Toroéro.
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l -I ̃ •••̃̃̃•̃. ̃• '• ̃ ̃- ̃ ̃ ̃
Blum
VENDREBÏ 1er FÉVRIER
< -̃̃ ̃̃ 1878.
̃"̃ '•- ON S'ABONNE
en Belgique, en Italie,
dans le Luxembourg, en Turquie,
•n Suisse, en Syrie, en Roumanie et dans les
̃̃̃ régences du Maroc et de la Tunisie,
en Chine et au Japon,
ta moyen d'une valeur payable à Paris ou de
̃ûandats-poste, soit internationaux, soit françai*
en Allemagne, en Autriche, en Russie,
et dans tous les pays du Nord
ches tous les directeurs de postes;
et dans tous les autres pays,
par l'envoi d'une valeur payable à Paris.
Les anf jces sont reçues
C&8S 8133. ^ttrachoy, &a£ïH« et C«,
8, place de la Bourse,
«t 'au bureau du iOCBWAïii
«lleadoïveat toujours Strs agréées par la rédaction.
Les souscripteurs dont l'àbonnemetit
expire le 31 janvier sont priés de le
renouveler s'ils ne veulent pas éprouver
de retard dans l'envoi du Journal.
PARIS
JEUDI 51 JANVIER
Tous les journaux toutes les dépê-
ches, toutes les correspondances qui nous
viennent d'Autriche semblent indiquer
de la part du gouvernement austro-,
hongrois une attitude plus ferme et plus
résolue. Il n'est plus douteux qu'une
Note très catégorique a été adres-
sée de Vienne à Saint-Pétersbourg. Ce
que l'on sait des conditions de paix
que la Russie a proposées sans les
communiquer nulle part d'une manière
officielle et sans permettre qu'elles fus-
sent enfin signées par la Porte, a provo-
qué une inquiétude d'autant plus vive
qu'on s'attend' à voir la Russie exiger
bientôt plus encore qu'elle ne demande
aujourd'hui. L'émotion a élé partout
très profonde, mais surtout à Vienne;
une correspondance que nous publions
plus loin porte les signes de cette in-
quiétude un peu tardive, mais bien na-
turelle. Le comte Andrassy n'a pas
cessé de répéter, depuis l'origine des évé-
nemens, qu'il se réservait de faire en-
tendre la voix de l'Autriche au moment
dé la paix, et il espérait sans doute
que l'opinion du cabinet de Vienne se
produirait d'autant plus facilement qu'elle
serait interrogée et consultée par l'allié
de Saint-Pétersbourg. N'est-ce pas là ce
que signifiait l'alliance des trois empires
dont il a été si souvent question? Celte al-
liance, la presse officieuse de Vienne
en parlait sur un ton vraiment épique.
L'Autriche devait y trouver la garantie et
la sauvegarde de tous ses intérêts;
elle avait la promesse de l'Allemagne,
elle croyait avoir mieux encore du
côté de la Rassie, une parole d'hon-
neur très formelle. Ces pompeux di'lh'y-1
rambes n'étaient-ils pas la manifestation
d'une entente vraiment cordiale, et le ré-
sultat de l'entente cordiale ne devait-il
pas être un accord préalable des trois
puissances sur toutes les questions qui
intéressaient l'une d'entre elles? L'Au-
triche l'avait compris de la sorte; aussi
pa. pu rprise a-t-elle été grande et sa dé-
ception cruelle lorsqu'elle a vu que la
Kussie la tenait à distance de ses opéra-
tions diplomatiques à l'instar de telle
autre puissance européenne. M. de Novi-
koff à Vienne s'est borné, comme le
courte Schoùvaloff à Londres à faire
connaître les grands linéamens des
conditions russes. Pour en venir au
fait, il ne- paraît pas que le comte An-
drassy ait été mieux instruit des intentions
de la Russie que lord Beaconsficld, et il
ne paraît pas que. lord Beacohsfîeld l'ait
été mieux que le premier journaliste venu
» qui. aurait pris la peine de lire assidûment
les dépêches. Nous, pour notre compte, ne
pouvons-nous pas nous vanter d'avoir été
aussi bien informés que la plupart des ca-
binets européens, et d'avoir compris aussi
gromptement de quoi il s'agissait en
Orient?
L'Autriche pourtant l'a enfin compris.
Nous ne savons pas au juste ce qui peut
lui rester de confiance dans l'alliance des
trois empires, mais certainement cette
confiance est diminuée. L' Autriche se re-
tourne du côté de r Angleterre; peut-être
n'y a-t-il de sa paît qu'une velléité ou
même un jeu diplomatique, mais notre
devoir de chroniqueurs est de signaler
un fait aussi apparent. Un membre de
la Chambre des Communes ayant de-
mandé au gouvernement s'il était
vrai qu'une alliance offensive et dé-
fensive existât entre les trois empires
pflur partager la Turquie, sir Stafford
Nortchote a répondu « Eu ce qui con-
cerne l'une au moins des trois puissan-
ces, j'ai de fortes raisons pour douter d'un
pareil arrangement. Les négociations qui,
vont suivre, pendant les mois ou les se-
maines prochaines, démontreront proba-
blement si. ces puissances agissent de
concert ou non. On voit par là q"ue l'An-
gleterre a pris très au sérieux la con-
version ,oj le retour de l'Autriche à
l'ancien droit européen, et les discours
des ministres anglais portent des mar-
ques nombreuses de cette conviction.
Les journaux aussi croient à cette con-
version de l'Autriche et l'encouragent.
Le Thnes lui-même écrit de,s phra-
ses couinie celle-ci « Nos intérêts,
bien qu'ils soient au total très im-
.portans, sont très éloignés d'êlce aussi
graves que ceux de J'Autriche. -Les
conditions russes impliquent pour elle
une perturbation complète de l'équi-
libre politique sur la frontière de l'Est, un
renversement absolu des arrangemens
qui •smbftist aient jusqu'aujourd'hui par
rapport à la grande voie tluviale de l'Al-
lemagne du Sud vers l'Orient' Le Da-
nube est pour l'Autriche ce que la Ta-
mise est pour l'Angleterre méridionale,
et l'établissement de la domination
russe à l'embouchure de ce fleuve,
ou ce qui serait la même chose
dans le Bosphore et les Dardanelles, res-
semblerait parfaitement à l'occupation
par la Fracce ou par l'Allemagne de Cha-
tham'ou.de Gravesend. » Voilà, certes, «n
jugement empirique sur les affaires autri-
chiennes mais est-il erroné, ou même exa-
géré ? N'est-il pas, au contraire, d'une
rigoureuse exactitude? R
Nous avons dit bien souvent les périls
que l'œuvre tentée par la Russie fait courir
à l'Autriche nous les avons énumérés
analysés; mais, ce qu'il est impossibled'em-
brasser dans toutes ses conséquences,
c'est jusqu'où peut aller l'ambition des
petites puissances qui ont pris à la guerre
une part heureuse on malheureuse, et qui
se livrent au délire d'une imagination sur-
excitée. Une dépêche de Seralin n'an-
nonçait-elle pas hier que la, Serbie, la
triste Serbie, demandait le viiayet de
Kossovo, c'est-à-dire toute la Vieille
Serbie, un territoire à peu près égal
à celui qu'elle occupe aujourd'hui;
plus le pachalyk de Widdin Nisch
Sofia, etc. l'administration, de la Bos-
nie enfin une indemnité de guerre
pour singer jusqu'au bout les grands mo-
dèles ? Chacun des petits princes d'Orient
fait en ce moment le rêve de Pichrocole.
Tout cela a un nom, c'est l'esprit révolu-
tionnaire à outrance, et il est naturel que
l'Autriche s'émeuve, de sentir à ses
portes ce souffle empesté qu'elle retient
si difficilement chez elle. Tout l'invite
donc àprendre des précautions énergiques,
et nous ne. sommes pas surpris qu'un
journal comme le Pester Lloyd prêche
l'entrée de l'armée autrichienne en Rou-
manie et en Serbie. L'Autriche, en ef-
fet, a raison de se sentir forte nar le
bienfait de la géographie. Elle a une
armée considérable, et il ne tient
qu'à elle de placer celte armée
sur les derrières des Russes, c'est-
à-dire de renverser par ses pieds d'ar-
gile le colosse de la puissance moscovite.
-Qui retient l'Autriche? Sans doute la
crainte de l'Allemagne l'Allemagne peut
lui faire autant de mal qu'elle peut en faire
elle-même à la Russie. Ici se présente un
grand problème nous n'avons pas les élé-
mens pour le résoudre, et il faudrait une
audace dont la diplomatie autrichienne
serait peut-être incapable. Que ferait l'Al-
lemagne si l'Autriche, prenait hardiment
ides positions militaires en Serbie, en
Roumanie, ou seulement en Transylvanie?
L'Allemagne est non seulement l'alliée,
mais l'amie sincère de la Russie; elle lui
a promis sa neutralité et, autant que pos-
sible, celle des autres; elle a fait beaucoup
pour lui assurer Timmobilitédel' Autriche
mais il est imppssible que l'Allemagne
elle-même, malgré lé concours moral
qu'elle ne marchande pas à la Russie,
ne fasse pas quelques réflexions pénibles
sur les résultats éventuels de la guerre.
Quoi M. de Bismarck, ce grand homme
dont le génie impose à l'Europe entière,
n'aurait formé l'empire allemand que pour
servir de préparation à l'envahissement,
de la puissance russe et pour frayer
les voies à un empire slave qui serait
nécessairement l'ennemi futur de rem-
pire germanique Celte politique ressem-
blerait si fort à celle de Napoléon III, qu'on
hésite à en croire M. de Bismarck capable.
En Allemagne, les esprits sont partagés,
divisés comme partout; mais M. de Bis-
marck est homme à discerner où est le
bon parti. Il y a d'ailleurs, de l'autre côté
du Rhin, une opinion considérable qui s'é-
pouvâute des progrès de la Russie au point
de vue des intérêts germaniques. On ne se
dissimule pas que l'Allemagne est soli-
daire de l'Autriche en Orient; c'est par
l'Autriche que la civilisation allemande,
grâce à l'amabilité d'une race plus
douce, coule et se rénand le' lontr
du Danube jusqu'en Or jent. De tout
temps la conscience allemande a été pé-
nétrée de cette vérité; et M. de Bis-
marck lui-niême ne déclarait-il pas, il.
y a un an, que son amitié pour la Russie
n'irait pas jusqu'à lui sacrifier les intérêts
vitaux de l'Autriche? A Vienne, on n'a pas
oublié ces paroles mais, depuis, l'altitude
énigmafique de l'Allemagne, le silence
de sphinx gardé par le grand-chancelier
n'ont pas peu contribué à augmenter
'l'indécision des esprits et les obscurités
de la situation. L'opposition de M. de Bis-
marck, ou du moins la répugnance
qu'il, montre à l'idée d'un Congrès est
une nouvelle cause d'hésitation. Que
sortira -l- il de tout cela? Il est
difficile de le dire, puisque les élémens
mêmes du problème sont sujets à se mo-
difier comme les senlimens humains,
les passions, les opinions mobiles d'un
pays, et la politique instable de mi-
nistres irrésolus. Les Russes seuls sa-
vent bien ce qu'ils veulent et où ils
vont. De deux choses Tune ou ils
iront à Constantinople, ou ils profiteront
de la panique qui règne dans la ville, de la
terreur dont le Sérail est envahi, pour
faire signer au derniermoment par la Porte
les conditions les plus dures. La Porte est
capable de tout sacrifier dans l'état d'af-
folement où elle est tombée, et de se
présenter ensuite au Congrès, s'il ?o
réunit, les mains liées par des engage-
mens absolus. Voilà donc la politique
russe aller jusqu'au bout par les armes,
ou par la diplomatie, suivant que l'atti-
tude de l'Europe l'obligera à se servir de
l'un ou de l'autre moyen. Quelle sera
cette attitude de l'Europe ? On l'ignore.
Jusqu'à quel point l'Angleterre peut-elle
compter sur l'Autriche, et celle-ci sur
l'Angleterre" Les në-gecialioiic. en effet, l
1
sont aujourd'hui entre Vienne et Londres,
et entre ces deux villes et Saint-Péters-
bourg. Quelle est enfin la politique de l'Al-
lemagne, si même elle en a une bien ar-
rêtée ? Telles sont les questions qui do-
minent la question générale. Mais ces
questions elles-mêmes, nous ne pouvons
que les poser.
BOURSE DE PARIS •
Q
CjôÉare le 30 le 31 Haw«««. Baisse.
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Comptaat. 73 40 73 80 4C
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Comptant 110 .lie 30 30
Fin cour. 109 91 110.27 12 32 12
PETITE! BO0RSE DU SOIR.
Emprunt S 0/0 110 fr. 32 1/2, lil 1/4, -56 1/4.
3 0/0. 73 fc 83', 74 fr., 73 fr. 92 1/2. J2.
Italien 73 fr. 73, 74 fr., 73 fr. ̃97*
Egyptiennes 6 0/0.. 150 fr., 150 fr. 62.
Chemins égyptiens. 263 fr. 12.
5 0/0 turc. 9 fr. 20, 25, 1i>, 20.
Hongrois G 0/0 78 5/8,7/8.
Russe. 8"i 11/ 10. 7/3.
Florins (or) 6i 8/8, 63.
Nous recevons de nos correspondant parti-
culiers les dépêches suivantes
1 « Vienne, le 31 janvier, soir.
» ues aernieres Qémarcnes du cabinet de
Vienne ont été couronnées d'un plein suc-
cès. La réponse de la Russie est arrivée
aujourd'hui. La Russie déciare formelle-
ment reconnaitre que tous les amngemens
antérieurs et ultérieurs conclus entre elle et
la Turquie, et touchant les intérêts euro-
péens, doivent être considérés comme non ave-
nus tant que l'Europe n'y a pa3 donné son as-
sentiment. En même temps la Russie ad-
met que les conditions proposées par elle
sont à modifier. Le cabinet russe approuve
pleinement dans sa déclaration le point de vue
clair et précis auquel s'est placé la cabinet
de Vienne, et son désir légitime de voir les
conditions do paix définitives arrêtées par
l'aréopage européen. ..1
» A la suite de cette déclaration, il est t
presque -certain qu'il y aura un Congrès: on
croit même que «'est à Visnne qu'il se
tiendra. »
« Berlin, le 31 janvier, midju,
«Parmi les transactions proposées par le
cabinet de Vienne à celui de Saint-Péters-
bourg, il est question d'une occupation mixte
ou neutre de la Bulgarie.
.» Ou croit généralement qu'afin de désin-
téresser l'Angleterre et d'isoler l'Autriche, la
Russie pourra consentir au maintien du
statu quo pour les détroits, se réservant de
soulever la question plus tard, quand le dé-
veloppement de sa flotte lui permettra de la
résoudre à son gré.
» La Norddeutsche Allgemeine Z&ilung con-
teste l'exactitude des déclarations de sir Staf-
ford Northcoto, notamment en ce qui con-
cerne les intentions de l'Autriche, lesquelles
ont pu être inexactement interprétées auprès
du cabinet anglais.
» Les avis restent partagés sur la question
de savoir jusqu'à quel point l'Autriche doit
compter sur l'appui do l'Allemagne. La Nord-
deutsche Allgemeine Zcitung affirme que l'al-
liance des trois empereurs eal inébranlable et
que la confiance mutuelle entre les trois souve-
rains est entière. La National Zeitv.ng avoue,
au contraire, son scepticisme à cet égard. Elle
considère que l'Autriche est plus iutéresséé
encore que l'Angleterre à l'existence de
la Turquie. « Lo sort de la Turquie, dit-elle,
» dépend d'une parole énergique prononcée
» à propos, et pareilh'roent l'aveoir de l'Au-
'» triche et son rôle futur en Orient. Puisse
» cette dernière puissance ne pas justifier
» une fois de. plus le mot de Napoléon « Ces
» Messieurs de Vienne sont toujours eu re-
» tard ou d'une idée, ou d'une année, ou
» d'une armée! »
» On continue ici à se montrer peu favora-
ble à l'idôô d'une Conférence. »
Télégraphie privée.
(Service télégraphique de l'agence Havas.)
Berlin, le 31 janvier.
L'empereur a reçu aujourd'hui, à trois heures
et demie de l'après-midi, le nouvel ambassadeur
extraordinaire et plénipotentiaire de France,
M. le comte de Saint- Vallier, qui lui a remis les
lettres du Président de la république française
qui l'accréditent près la cour-dé Berlin. M. hj mi-
nistre d'Etat de Bùlow assistait à cette cérémo-
nie en qualité de représentant du ministère des
affaires étrangères. On remarquait en outre,
parmi les personnes présentes, M. de Rœder.
vice-grand-maître des cérémonies et introducteur
des ambassadeurs, la maréchal de la cour, le
comte de Goltz, aide de camp général de l'empe-
reur, le comte de Lehndorf et M. de Lindequist,
aides de camp de S. M.
L'ambassadeur de France et lès autres mem-
bres de l'ambassade ont été conduits au palais
dans trois voitures de- gala de la. cour par M. le
baron de Rosenberg, maître des cérémonies.
Aussitôt après l'audience de l'empereur, l'am-
bassadeur a été conduit chez l'impératrice, qui
était entourée de ses chambellans et des dames
de la cour.
̃ Vienne, le 31 janvier.
La Presse publie les renseignemens suivans
« L'ambassadeur d'Autriche près le gouverne-
ment russe a remis hier au prince Gortchakoff
la Note du-cabinet de Vienne, qui est ainsi con-
çue
« L'Autriche ne conteste uulleineut le droit
que la Turquie a de conclura des traités dans son
propre intérêt; mais elle est forcée de considérer
les arrangemens pris à Kesanlyk comme nuls, en
taut qu'ils modifient les traités actuellement en
vigueur et atteignent les intérêts autrichiens,
jusqu'à ce que de nouveaux arrangemens aient
été conclus avec les puissances signataires. »
La Nouvelle Presse libre apprend qu« M. le
*omte Andrassy a fait des démarches eu vue
d'une résistance commune de l'Europe à ia po-
litique pernicieuse de la Rassie,' et a proposé la
convocation d'une Conférence" qui siégerait à
Vienne pour discuter et régler tous les points
des condition* de paix qui. touchent aux intérêts
généraux de l'Europe.
Le Fremdewblatl publie. comme la Presse, le
texte de la Note adressée par l'Autriche à la
Russie.
Vienne, le 3t janvier..
La réponse du prince Gortchakoff à la Note du
cooits An-iras:^ dit qpie la soSuttïn- des irues- I
Uons qui touchent aux intérêts européens sera
soumise a*la sanction de l'Europe.. Tout est sub-
ordonné à un Congrès auquel le prince de Bis-
marck est opposé.
Vienne, le 31 janvier.
L'intention que l'on a de provoquer une Con-
férence en vue de régler un certain nombre de
points des préliminaires de paix qui touchent aux
questions internationales commence à se manifes-
ter d une façon plus positive. Il paraît aussi que
la Russie n'esfpas opposée en principe à la con-
vocation do cette Conlôrenco.
Cologne, le 31 janvier.
On télégraphie de Vienne, le 31, à la Gazelle de
Cologne:
« Dans la Note qu'il a adressée au gouverne-
ment russe, le comte Andrassy se plaint de ce
que la Russie se dispose Ix aller au delà des ar-
rangemens conclus à Conslanlinople et à Berlin,
et de tous ceux auxquels avait (tonné lieu l'al-
liance des trois empereurs. Il déclare qu-j la
fixa lion de la frontière serbe et monténégrine re-
garde aussi l'Autriche, et que l'uli possidetis est
une base inacceptable pour cette puissance.
» Le comte Andrassy ajoute qu'il ne faut pas
que la Russie obtienne de fait des droits de sou-
veraineté sur lo Danube, ou s'établisse d'une ma-
nière durable au delà des Balkans, sous prétexte
de prendre une garantie.
» II dit que le règlement de la situation de la
Bulgarie ne regarde pas exclusivement, la Russie,
et déclare que, si la réponse de la Russie n'est
pas claire et satisfaisante, il enverra aux puis-
sances garantes une circulaire dans, laquelle il
42& inviteraà se réunir dans une Conférence pour
régler la situation de. la presqu'île des Balkans et
réviser le traité de Paris. »
Bruxelles, le 31 janvier, 5 h. 20 m. soir.
r Indépendance belge publie la dépêche suivante,
datée de Vienne le 3u janvier
«La réponse de la Russie à la Note autrichienne
est arrivée.
» La Russie reconnaît que les stipulations pré-
sentes ou futures, entre la Russie et la Turquie,
peuvent être modifiées et ne seront définitives
qu après avoir été sanctionnées par les puissan-
ces.
» La Russie accepte donc complétement la
politique du cabinet austro-honcrois. »
Saint-Pétersbourg, le 31 janvier.
A la suite de la déclaration faite par sir Staf-
ford Northcole à la Chambre des Communes, le
2S janvier, la presse a parlé, par erreur, de dé-
marches communes de l'Angleterre et de l'Au-
triche à Saint-Pétersbourg. Le Daily Telegraph
va jusqu'à dire que des Notes identiques ont été
envoyées ici par l'Autriche et l'Angleterre.
Aucune Note de ce genre n'a été rpçue par le
gouvernement russe, et l'attitude de l'Angleterre
ejt celle de l'Autriche ne concordent m dans la forme
ni dans le fond. Un échange d'opinions cordial
et conforme aux circonstances a lieu actuellement
entre les cabinets de Saint-Pétersbourg et de
Vienne, et les récentes déclarations de M. le
comte Andrassy concernant les préHminaiwîs de
paix n'ollrent pas d'autre caractère. L'attitude
de l'Autriche est celle d'une puissance amie.
Tous les désirs que l'Autriche exprime ici sont
accueillis avec la prévenance qu'impliquent les
relations personnelles des deux souverains. Le
gouvernement russe est tout disposé à régler
d'un commun accord les qr estions qui touchent
aux intérêts communs des deux pays.
Saint-Pétersbourg, le 31 janvier.
Les journaux de Saint-Péiersbourg déclarent
que 1 on donnerait au Congrès un caractère sin-
gulier si les autro-i puissances, se conformant
aux intentions de l'Angleterre, voulaient augmen-
ter leurs forces militaires en vue de cet événement
Ils ajoutent qu'une forêt de baïonnettes n'est pas
une chose désirable au moment d'un Congrès.
L'article du Golos, qui a été signalé à l'étran-
ger par une dépêche, n'est que l'expression
d une opinion personnelle et repose en beaucoup
de points sur des malentendus.
Londres, lo 31 janvier.
On télégraphie de Berlin, le 31 janvier, à la Pal
Mail Gazette:
« Les duTérends qui divisent en ce moment
l'Autriche et la Russie sont tellement sérieux,
que l'empereur Guillaume a cru devoir interve-
nir personnellement entre le czar et' l'empereur
d'Autriche, les conjurant de se souvenir des prin-
cipes sur lesquels s'était fondée l'alliance des
trois empereurs {Dreikaiserbimd) et de ne point
rompre cotte alliance.
» On assure que, tout en agissant amicalement
envers la Russie, le gouvernement allemand ap-
puie les intérêts de 1 Autriche. »
ANGLETERRE.
Londres, le" 31 janvier.
Un meeting qui devait avoir lieu à l'hôtel de
Cannon street. dans la Cité, n'a pu se réunir, les
conservateurs ayant .fait irruption dans la salle
de la réunion. Des scènes tumultueuses s'en sont
suivies.
Les députés du Borne RvJers ont résolu do ne
pas participer au vote relatif aux crédits supp !é-
mentaires.
Londres, le 31 janvier, soir.
A la suite de la tentative faite pour tenir un
meeting libéral à Cannon street, un autre mee-
tmg a' été tenu a Guildhall, sous la présidence
du lord-maire. Environ «,000 personnes y assi-
staient. t.
Le meeting avait pour but de soutenir la poli-
tique du gouvernement M. Palmer, gouverneur
de la Banque d'Angleterre, et M. Ritchie. ont dé-
claré que ceux qui font croire à la Russie quo le
peuple- anglais est divisé et ne défendrait pas
ses intérêts sont les vrais promoteurs.de la guerre
Avant de se séparer, les assistans ont adopté,
au -milieu d'un crand enthousiasme et de chants
patriotiques, la Résolution suivante
« Le meeting désire sincèrement la paix si elle
peut être maintenue, tout en sauvegardant l'hon-
neur et les intérêts du Royaume-Uni. Le meeting
croit que la cause de la paix et les intérêts an-
glais seront mieux assurés en soutenant la poli-
tique du gouvernement. »
Une députation a porté immédiatement cette
Résolution au gouvernement dans le Parlement.
La députalion a été reçue par lord Manners maî-
tre général des postes, qui a déclaré, que la Réso-
lution du meeting exprime exactement les senti-
mens du gouvernement, qui est reconnaissant de
ce témoignage de la Cité de Londres.
chambre des lords. Séance du Si janvier.
lord Derhy, répondant à lord Stratheden et
Campbell, déclare qu'il n'a jamais dit que, dans
aucune circonstance présumable, il ne ingerail
convenable et opportun l'exercice du droit d'en-
voyer la flotte à Constantinople. Il peut surgir des
éventualités dans lesquelles l'expédition de la
flotte pourrait être décidée utilement sans mettre
le moins du monde en danger la paix générale
mais, au contraire, en sauvegardant les intérêts de
1 humanité et en assurant le maintien de la paix
Lord Derby, répondant à lord Stanhope. déclare
qu'il a justement vu le comte Schouvaloff il y
a deux heures. L'ambassadeur de Russie était,
comme lui, sans informations relativement à la
conclusion de l'armistice.
Lord Derby avait pris connaissance d'une com-
munication du prince Gortchakoff au prince
^Pl1.011^'0*1* dans laquelle le premier avouait la
difficulté ou il était d'expliquer les retards qui
ont eu heu pour la conclusion de l'armistice
La Turquie, d'un autre côté, aouvoyé à ses plé-
nipotentiaires, il y a plus d'une semaine, des in-
structions leur enjoignant d'accepter les condi-
tions russes. Aucune nouvelle n'est parvenue
depuis à la Sublime-Porte. Les retards en ques-
tion ne sauraient donc être reprochas à la Tur-
quie.
Lord Derby peut déclarer, sans hésitation,
qu aucune proposition n'a été faite par la Russie
dans le but de soumettre à une sanction diplo-
matique l'occupation de Constantinople par les
1 Busses..
Aucune proposition n'a clé foito t-our une-oo-
cvpation mixte.
ciu&inRK des communes.– Séance du Si janvier.
Sir Stafford Nortlicote répond à M. Chaplin
qu'aux dernières dates les renseignemens reçus
au sujet de l'armistice portent qu'il n'est pas en-
core signé. Il est exact que les Russes avancent
toujours dans la direction du Sud. Le chancelier
de l'Echiquier ignore si le gouvernement russe
adhère encore aux conditions indiquées dans la
dépêche de lord Derby du 6 mai dernier.
Le docteur Kenealy annonce qu'il demandera
demain si la triple alliance des empereurs est
complétement rétablie.
M. Jenkhis posera également demain une ques-
tion pour savoir si une partie du crédit que le
gouvernement demande a déjà été dépensée.
M. Sonrke répond à M. Chaplin que les com-
munications télégraphiques entre Constantinople
et Andrinople étaient encore ouvertes le 20 jan-
vier Mais on a appris, ce matin, que les fils
étaient coupés entre Constantinople et Gallipoli.
Sir Stafford Norlhcote, répondant à M. Ashley,
dit. que la correspondance relative aux lettres de
M. Gladstone à Negropontis sera placée sous les
yeux de la Chambre et parlera d'elle-même.
M. BotirAe, interrogé par M. Hay, répond que le
gouvernement s'est mis en communication avec
Constantinople, pour savoir combien de person-
nes dans cette ville ont droit à Ja protection de
l'Angleterre.
M. Forster développe un amendement ainsi
conçu
« La Chambre, informée par lo discours de la
reine que les conditions auxquelles était attachée
la neutralité de l'Angleterre n'ont pas été en-
freintes, et n'ayant pas reçu de renseignemens
suttisans pour justifier une déviation de la ligne
politique de neutralité et de paix, ne voit pas de
motifs pour augmenter les charges du pays par le
vote de crédits inutiles. »
L'honorable membre soutient qu'à Son avis
rien encore ne justifie le crédit demandé (Àp-
plaudis^emens sur les bancs de l'Opposition.)
M. Forster dit que le caractère des crédits de-
mandés est tel, qu'on ne peut leur trouver un
précédent. En 1870, le budget supplémentaire de-
mandé par le gouvernement indiquait clairement
le but qu'on avait en vue. Celui-ci n'est purement
et t simplement destiné qu'à être mis en avant comme
une menace à laprochaine Conférence.Rien dans les
conditions de la paix ne justiiïe l'attitude mé-
finnlu ~Tn hA nnlninnnn · elino nn w,nm.t T\.I'}C"
danger les intérêts britanniques, et la demande
de la Russie relativement aux Dardanelles est
naturelle et digne d'être prise en considération
par l'Europe.
Les derniers événemens peuvent avoir ébranlé
la confiance des ministériels, mais certainement ils
n'ont1 pas accru celle de l'Opposition dans le
gouvernement. On comprend que le gouverne-
ment envoie, la flotte aux Dardanelles pour y pro-
téger la personne et les biens des sujets anglais;
mais, en lui donnant pour mission de maintenir
la liberté de la navigation dans le détroit, il viole
ouvertement la neutralité.
On fi paru désirer que le gouvernement se pré-
sente à la Conférence avec l'appui unanime de la
nation. Cela pourrait être si l'on se contente de
-défendre clairement les intérêts distincts de l'An-
gleterre, notamment la route de l'Inde et l'inté-
grité de l'Egypte.
L'occupation permanente de Constantinople
affecte plus les intérêts de l'Autriche que ceux
de l'Angleterre ma;s le gouvernement doit
être soutenu s'il s'efforce d'empêcher cette occu-
pation et l'exclusivité du passage des Dardanelles.
'̃ Un bon gouvernement européen en Turquie
serait encore une chose utile aux intérêts an-
glais: mais.jusqu'à présent, on ne voit pas qu'au-
cun de ces intérêts soit sérieusement menacé.
M. Cross, sous-sècrétaire, d'Etat de l'intérieur,
répond.
La phase dans laquelle est entrée la
guerre d'Orient depuis l'occupation d'An-
drinople par l'armée russe et sa marche
sur Constantinople, phase à la fois diplo-
matique et militaire, a naturellement rap-
pelé l'attention sur des événemens d'une
autre époque qui, sauf quelques particu-
larités et quelques divergences de détail,
présentent dans leur ensemble une re-
marquable analogie avec ceux que nous
voyons se dérouler sous nos yeux. Nous
voulons parler des péripéties de toute
sorte qui ont précédé le traité d'Andri-
nople de 1829, auquel on a tant de fois
fait allusion dans ces derniers temps.
Alors, comme aujourd'hui, le désaccord
des grandes' puissances, l'indifférence el
l'inaction des unes, l'hostilité sourde et
impuissante des autres ont favorisé la
politique habile et cauteleuse du cabinet
de Saint-Pétersbourg. Dès que les -choses
en furent venues au point où il ne s'a-
gissait plus que de jouer au plus fin, la
Russie eut recours à l'art consommé avec
lequel elle sait manier les chancelleries
1. 1 1 1
étrangères. Dans la circonstance que nous
rappelons, étant donné la situation cri-
tique où se trouvait son armée du Da-
nube, elle dut y déployer encore bien
plus de finesse et de ruse que n'en exige
en ce moment la supériorité incontestable
de ses armes. Si l'histoire est, selon l'ex-
pression de l'orateur latin, « la lumière
des temps, l'école de la vie, lux temporum,
magislra vitœ », on ne lira peut-être pas
sans intérêt une courte évocation d'un
passé qui offre avec le présent tant de
curieuses ressemblances.
La campagne de 1 828 n'avait pas entiè-
rement répondu aux espérances de la
Russie, ni à l'opinion qu'on s'était faite de
sa puissance ainsi que de la faiblesse de
la Turquie. En Asie, il est vrai, le maré-
chal Paskewitsch avait obtenu de brillans
succès, pris Kars et occupé toutlepacha-
lik d'Achalzik; mais, en Europe, l'armée
russe n'avait réussi qu'à s'emparer de
Varna par trahison. Non seulement elle
n'avait pas franchi, ni même atteint les
Balkans, mais elle avait échoué devant
Chournla et s'était vue forcée de lever le
siège de Silistrie. Aussi le cabinet de
Saint-Pétersbourg avait-il annoncé l'in-
tention d'entreprendre une seconde cam-
pagne pour laquelle il faisait d'immenses
préparatifs avec une ostentation qui avait
pour but de dissimuler la faiblesse réelle
de ses moyens. L'Europe s'y laissa pren-
dre et en conçut de vives alarmes. Dès
l'ouverture des hostilités, au printemps de
1829, une grande agitation se manifesta
en Angleterre. Le Times prêchait la guerre
contre la Russie, et le duc de Wellington
menaçait de, soumettre la situation de
l'Angleterre en Orient à l'examen du Con-
seil privé. Le prince de Metternich, qui di-
rigeait alors la politique du cabinet de
Vienne, avait essayé vainement de former
une quadruple alliance entre ^Autriche,
la France, la Grande-Bretagne et la Prusse,
pour imposer dans un Congrès la médiation
de ces puissances à la Russie et à la
Porte. Ce projet, auquel la France aurait
volontiers adhéré, avait été repoussé
très énergiquement par la Prusse, qui ne
dissimulait pas ses. sympathies pour le*
gouvernement, russe. Celui-ci avait d'ail-
leurs déclaré à M. de Metternich, par l'or-
gane de M. de Tatischeff, son ambassa-
deur à Vienne, que la Russie était prête
à tout subir plutôt que là honte d'un pa-
reil Congrès (janvier 1829),' La Porte n'y
répugnait pas moins. Le plan autrichien
fut donc abandonné.
Cependant l'armée d'invasion, comman-
dée par Diebitsch, avançait toujours elle
avait franchi les Balkans (juillet 1829)
mais elle s'affaiblissait à chaque pas et
elle ne devait arriver à Andrinople qu'é-
puisée et presque anéantie. 15,000 hom-.
mes à peine avaient pu atteindre les
murs de cette ville; le reste traînait
sur les chemins depuis le Danube jusqu'à
Ândriuôple ou remplissait les hôpitaux.
M. de Moltke, l'illustre chef actuel de
l'état-major prussien, qui accompagnait
l'armée russe dans 'cette campagne, ra-
conte que les soldats, en arrivant à l'hô-
pital, soDlTraient tellement du froid qu'ils
couchaient avec leurs bottes, et qu'en les
retirant on remarquait la gangrène à leurs
pieds complétement gelés. Heureux en-
core les soldats malades qui trouvaient
un abri Les provisions, et môme la
paille pour se coucher, manquaient totale-
.v"E t
uiciii. uca maiaues recevaient pour toute
literie un morceau de toile verte, coupée
dans les tentes abandonnées parles Turcs
à Andrinople. Après les premiers jours d'un
froid un peu rigoureux, les belles allées de
platanes plantés devant les casernes ser-
vant d'hôpitaux avaient disparu pour servir
de combustible à la portion valide comme
auxmalades de l'armée. A défaut de bois,
on alla jusqu'à déterrer les ossemensdes'
cadavres dans les cimetières pour se
chaufTer(l).
On ne peut rien ajouter à l'horreur d'un
pareil tableau, et il ne faut plus s'étonner
si la campagne de 1 829 a coûté aux Rus-
ses victorieux plus de 60,000 soldats. En
effet, sur les 80 ou 90,000 hommes dont
se composait leur armée au début de
cette seconde snnèe 15,000 valides à
peine repassèrent le Pruth l'année sui-
vante. Les succès des Russes, on peut le
dire sans exagération, furent achetés eçu
prix d'une armée entière; et si les Turcs
avaient fait une résistance assez éner-
gique pour rendre nécessaire une troi-
sième campagne, il est douteux que la
Russie eût pu mettre sur pied une "troi-
sième armée de soldats aguerris. Il fal-
lait donc qu'à tout prix la Russie sor-
tît de cette situation dangereuse. L'au-
dace de Diebitsch y contribua puissam-
ment en imprimant au gouvernement turc
une terreur fausse et exagérée. Mais déià
le salut avait été préparé d'autre part au
moyen d'une intrigue savamment ourdie
par la Prusse, intrigue à laquelle l'atti-
tude constante de l'Allemagne dans le
présent conflit prête un incontestable in-
térêt.
En réalité, malgré le fracas de ses dé-
monstrations militaires et l'assurance
dont ses diplomates faisaient étalage à •'
l'étranger, le cabinet de Saint-Péters-
bourg n'avait entrepris la campagne de
1829 que par point d'honneur et avec un
secret désir d'arriver à une prompte con-
clusion de la paix. Si cette campagne n'a-
vait pas dû produire plus de résultats «me
la précédente, la Russie aurait perdu tout
son prestige en Orient.' Le czar Nicolas
était surtout pénétré de ce sentiment.
Aussi, lorsqu'il se rendit à Berlin pour as-
sister au mariage du. prince Guillaume
de Prusse [11 juin 1829] (2), il mani-
festaau roi Frédéric-Guillaume III le désir
de déterminer la Porte à lui envoyer des
plénipotentiaires. pour entamer des négo-
ciations en vue de la paix. Il se serait
contenté de très petits avantages, quelles
que pussent être d'ailleurs les exigences
qu'il montrerait pour sauver l'honneur
des principes. A cette époque, Diebitsch
n'était pas encore en marche vers le Bal-
kan, et la plus forte partie de son armée
était retenue "devant Silistrie et devant
Chtfumla, Le roi de Prusse, qui répu-
gnait à toute guerre, entra immédiate-
ment dans les vues du czar, et tous deux
s'accordèrent à envoyer à Constantinople
un agent extraordinaire qui, tout en con-
servant le caractère extérieur d'ambassa-
deurprussien.s'emploierait efficacement en
faveur de la Russie. Leur choix se fixa sur
le baron de Mùffling, ardent admirateur
du czar, dont il reçut les instructions par
l'intermédiaire du roi. Le. général de Mùf-
fling était particulièrement désigné pour
cette mission. En 1827, il avait tracé un
plan de campagne pour les armées rus-
ses, et, au moment même où l'on recou-
rait à ses services, il insistait vivement
sur la nécessité de passer les Bal-
kans, comme le seul moyen d'obtenir la
paix, dont le, czar était. si désireux. Il a
lui-môme raconté les événemens aux-
quels il fut alors mêlé dans un ouvrage
intitulé Ans meinem Leben, publié en
4^1 ?™PZ£n'i dila Rvsïie c?nKe U Turquie e-A
18Î8-M9, par le baron de Moltke, major dans
1 etat-major prussien. Ouvrage publié en 1 845.
(2) Ce prince est l'empereur actuel d'Allema-
gne, qui épousa à cette époque la princesse Au-
^!?W«™de cha*-le5-Frédérie, grand-duc de'
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