Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1900-11-16
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 16 novembre 1900 16 novembre 1900
Description : 1900/11/16 (Numéro 320). 1900/11/16 (Numéro 320).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k285326k
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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il leur avait paru que la yoje cédait -sous
la locomotive, que celle-ci semblait s'en-
foncer dans le ballast. Et, aussitôt après
et sans qu'ils y.pussent rien compren-
dre, l'un et l'autre pétaient projetés en
arrière par un premier choc de la ma-
chine. Lancés dans le vidé, ils tombè-
rent dans un pré, dont l'herbe fraîche
amortit leur chute.
Et ils purent voir, en une minute ra-
pide," le tender escalader l'arrière de la
locomotive, barrer la voie, supporter le
choc du fourgon etdn wagon-restaurant,
immédiatement attaché derrière lui; le
wagon-restaurant se dresser contre' la
machine, et tous deux rouler' dans le
remblai, au milieu d'un tumulte ef-
froyable.
Les amarres des wagons .à la suite
s'étant heureusement trouvées rompues
par le choc, ceux-ci, qui composaient la
queue du, train, restèrent sur la voie.
Et ainsi se trouvèrent sains .et saufs
lesquatre voyageurs qui, moins.pressés
peut-être par l'appétit, n'avaient pas en-
core pénétré dans le wagon-restaurant
Faut-il conclure de tout ceci que la voie
encore en réparations, la vitesse peut-
être excessive, étant donné l'état de la
subs.truture .à cet endroit, sont peut-être
les causes de l'effroyable 'malheur? Ou
ne trouver.a-t.-Qn pas, au cours de l'en-
quête déjà commencée, qu'un affaisse-
ment du terrain, dû aux pluies des jours
derniers, a seul amené ledéraillement?.
Il est impossible aujourd'hui, en l'ab-
sence de nouvelles complètes et dans,
l'émotipn générale, de préciser ces dé-
tails techniques. Demain vos lecteurs
seront définitivement renseignés. Nous
ne voulons aujourd'hui que déplorer l'a-
bominable catastrophe, saluer les vie-?
times et envoyer aux familles, si cruelle-
ment frappées, nos condoléances émues
et l'expression de. notre sympathie at-
tristée. .̃
Les victimes
Parmi les morts se trouvent
M. Alfred Elster, vingt-quatre ans, at-
taché à l'ambassade du Pérou, en Italie;
M.André Cabeau, employé des Wa-
gons-Lits
Mme Maria Valehcoala, cinquante, ans,
femme de chambre de Mme la duchesse
de Ganevàro
M. Blanchard, ingénieur honoraire
des mines," demeurant rue Pascalis, à
Bruxelles
M. Arteaga, de Biarritz
Mme Dombrowski, de Kief
•Une dame de quarante ans environ,
dont l'identité n'a pu être établie. Cette
dame avait à l'annulaire de la main gau-
che quatre bagues et, dans la poche, une
montre en or portant le numéro 19359
Un monsieurd'ùne trentaine d'années,
cheveux châtains, bouclés, ayant sur lui
une. carte au nom d'André Lande, un
mouchoir portant l'initiale H, une mon-
tre portant le numéro 6403.
Se trouveraient également parmi les
morts, M. Canevaro, duc de Zoagli, mi-
nistre plénipotentiaire du Pérou en
France, et sa femme. D'après d'autres
renseignements, Mme la duchesse de
Zoagli ne serait que blessée; elle: aurait
les jambes brisées.
On cite encore l'ambassadeur italien,
chargé de notifier officiellement à la
Cour d'Espagne l'avènement du roi Vic-
tor^Einmanuel, mais tout permet de
supppser qu'une confusion s'est établie
avec M. Alfred Elstèr^doht le nom figure
plus haut. 1
Les morts ont -été placés dans une
maison proche.du théâtre de l'accident,
en attendant leur transport à Dax.
De Bayonne, des voitures ambulan-,
cières. militaires avaient été envoyées
sur les lieux de la catastrophe. La muni-
cipalité et le, sous-préfet ont attendu leur
rétour à la gare, et le médecin-major
a fait transporter les blessés qu'elles, ra-
menaient à l'hôpital militaire dé la ville.
̃ M. Dombrowski, de Kief, quoique
contusioriné sur diverses parties du corps
et ayant l'oreille droite décollée, a tenu à
accompagner jusqu'à Bordeaux-Saint-
Jean le cadavre de sa femme qui avait
été placé dans un train spécial .Le même
train à amené à Bordeaux M. Dubauloy,.
demeurant à Paris, qui est reparti pour
la capitale dans la soirée.
Le chauffeur, le mécanicien et trois
employés du wagon-restaurant, les
uns et les autres légèrement blessés,
sont arrivés à Bordeaux à huit heures
dans le train 4, qui avait près de deux
heures de xétard. Dans xe train se trou-
vait également M.. John. Mac Ewen
Ames, demeurant à Paris, rue Vivienne,
qui a continué son voyage dans là soirée.
Les gardes-freins, légèrement blessés,
ont été reconduits à Dax.
'̃̃' Aubertin.
̃ J±_ FABIS
La nouvelle de cette effroyable catas-
trophe n'a été connue à Paris que dans
la soirée. Les bureaux de la Compagnie
du Midi sur le réseau de laquelle elle
s'est produite étaient déjà fermés
lorsqu'arriva, à six heures et demie, à
l'adresse du directeur, M. Blagé, ihgé-
nieur en chef des ponts et chaussées, une
dépêche, de l'ingénieur de la section de
Dax, donnant les premiers détails.
Cette dépêche, déposée à quatre heures
quarante-cinq à Dax, était ainsi conçue
Le Sùd-Èxprëss a déraillé ce matin, en
pleine voie, eptre Saint-Geours et Saubusse.
Il'y treize rxiorts et une vingtaine de blessés.
Dégâts matériels considérables. Déblayement
pas terminé.
Chez le directeur
de la Compagnie'du Midi
M. Blagé vient de se mettre à table
quandnous lui faisons passer notre carte
par son valet de chambre. Il accourt
aussitôt, la mine attristée
Ah monsieur, quel affreux mal-
heur Il est à craindre que presque tous
les voyageurs que contenait le Sud-
Express ne soient morts ou blessés car,
en général, ce train n'en transporte
guère plus de quarante à cinquante. La
cause de cet accident est encore inex-
pliquée; Comme vous, j'en suis réduit
moi-même aux conjéctures. Il s'est pro-
duit en jàleine voie. Le train a-t-il dé-
raillé par excès de vitesse? Entre Saint-
Geours et Saubusse, la voie est en pente,
et il devait marcher alors à raison de
110 kilomètres à l'heure.
» Mais le Sud-Express roule à pareille e
vitesse la moyenne est de 100 kilomè-
tres à l'heure tous les jours, depuis
que la Compagnie des Wagons-Lits nous
a chargés de le mettre quotidiennement
en route, c'est-à-dire depuis un an. Et
jamais, jusqu'ici, rien netui était arrivé.»
Le directeur de la Compagnie du Midi
ajoute, mélancolique
̃̃– Faudra-t-il, dorénavant, ne |>Iu?
« marcher » du tout ÎLe-public veut al-
ler de plus en plus vite.
Puis, revenant à la cause déterminante
de l'accident:
Peut-être un- rail s'est-il cassé.
Tout est possible, malheureusement.
Comment expliquer que l'on ne
possède encore que si peu de renseigne-
ments sur ce qui s'est passé ?
Parce que l'accident s'est produit à
17 kilomètres de Dax, à 33 kilomètres de
Bayonne, et. à plusieurs kilomètres de
toute gare; que, d'autre part, avant de
songer à télégraphier, nos agents, comme
c'était leur devoir, ont dû s'occuper des
victimes, soigner les blessés, retirer les
morts, puis envoyer chercher du maté-
riel pour former un train de secours.
M. Blagé nous annonce enfin que M.
Glaser, sous-directeur de la Compagnie,
va se rendre sur le lieu de l'accident.
M. Glàser a, en effet, quitté Paris hier
soir, par le rapide de 10 h. 30.
A la gare d'Orléans
Le Sud-Express devait arriver à 8 h. 55
à la gare du quai d'Orsay. A huit heures
et demie, le chef de la gare fait épingler,
dans le hall d'arrivée, une affiche ainsi
libellée:
AVIS AU PUBLIC
Le, train no 100, da la section. d'Espagne à
Paris-Orsay, devant arriver normalement à
8 h. 55, est supprimé. Il est remplacé par un
train spécial dont nous ferons connaître la
marche.
Bientôt le hall se garnit de parents et
d'amis qui viennent attendre des voya-
geurs. Personne ne sait rien. L'affiche
est très petite. On ne la remarque pas
i tout d'abord. Mais voici qu'on l'a aper-
çue 'alors on l'entoure. Quelqu'un la lit
à haute voix, et l'inquiétude se'peint sur
tous les visages.
Qu'est-ce que cela signifie? se de-
mande-t-on.
On interroge les employés de la gare,
même les agents de l'octroi. Nul d'entre
eux ne peut fournir le moindre rensei-
ghement.
C'est tout à fait singulier, dit une
dame très élégante, ce train supprimé!
Pourtant, je suis sûre qu'il est parti.
Mon mari m'a, en effet, télégraphié ce
matin, d'Hendaye, pour me demander de
venir l'attendre à huit heures cinquante-
cinq.
Et cette dame tire la dépêche de son
portefeuille et la montre à ses voisins.
A neuf heures, un facteur de la Com-
pagnie épingle une nouvelle affiche sur
la muraille. Plus explicite plus angois-
sante aussi que la première. Elle est
ainsi conçue
AVIS AU PUBLIC
Le train no 100, de la section d'Irun, est
annoncé par la gare de Bordeaux comme de-
vant avoir un retard considérable par suite
d'un accident survenu entre Bayonne et Dax.
Les voyageurs en provenance du Midi arri-
veront par le train 20 à 5 h. 40 du matin.
Ceux de Bordeaux et en deçà arriveront
par un train spécial dont la marche sera an-
noncée ultérieurement.
Un accident! Ah mon Dieu mon
pauvre mari s'écrie la dame qui a reçu
une dépêche d'Hendaye.
Et s'écroulant sur une banquette voi-
sine, elle éclate en sanglots.
La note ne :dit pas s'il y a des vic-
times ?
Il paraît qu'il y en a, dit quelqu'un.
Le chef de gare vient de me le déclarer.
Des morts ?..
Oui, treize morts et une vingtaine
de blessés.
A-t-ori leurs noms?
On n'en connaît pas encore un seul.
Près de moi, un monsieur s'écrie, avec
des larmes dans la voix
Ma femme! ma pauvre femme 1
Sa douleur fait peine à voir. Je m'ef-
force de le rassurer
Ne seriez-vous pas, par hasard, le
docteur Legris?
Précisément.
Eh bien, il est arrivé, ici, tout à
l'heure, une dépêche à votre adresse. On
m'avait pris pour vous et on a voulu me
la remettre.
Et où est-elle, cette dépêche?
On a dû la déposer au bureau des
renseignements de la gare.
Nous y courons. Ce n'est pas une,
c'est deux dépêches qui attendent M. le
docteur Legris. Sa main tremble telle-
ment qu'il ne peut les ouvrir lui-même.
Il jette les yeux sur la première et
pousse un long soupir de délivrance.
Datée de Dax, elle ne contient que deux
mots, mais ils sont tout à fait rassurants:
«Sauvée. Tranquille.» a Dans la deuxième,
déposée à Bordeaux, Mme Legris an-
nonce à son mari son arrivée à Paris le
lendemain matin. s
Je retourne dans le hall. Il est neuf
heures et quart. On se presse toujours
autour de l'affiche de la Compagnie d'Or-
léans. Ceux qui avaient un être cher
dans le Sud-Express déraillé n'en peu-
vent détacher les yeux. Ils la relisent
pour la dixième, pour la vingtième fois,
voulant douter encore et ne pouvant se
décider à s'en aller, tandis que, sur la
banquette voisine, la dame dont le mari
a quitté Hendaye le matin continue à
pleurer silencieusement.
Parmi les voyageurs du Sud-Express
se trouvaient M. Canavero, duc de Zoa-
gli, ministre plénipotentiaire du Pérou
en France, Mme la duchesse de Zoagli,
sa femme, et leur neveu, M. Elster, at-
taché à la légation du Pérou en. Italie.
M. Giovannelli, secrétaire particulier
de M. Canevaro, et le colonel Althaus,
attaché militaire de la légation,"étaient
venus attendre ces voyageurs à la gare.
N'ayant reçu. aucune dépêche, ils mani-
festent les inquiétudes les plus vives.
L'enquête administrative
A la première nouvelle de l'accident,
M. Pierre Baudin, ministre des travaux
publics, a envoyé sur les lieux l'inspec-
teur général, directeur du contrôle du
Midi, avec mission de procéder à une en-
quête minutieuse sur ses causes et de lui
transmettre le plus tôt possible les ren-
seignements qu'il pourra recueillir.
Henri fetitjean.
H(JTE ROYArj
Le prince Georges de Grèce, amiral de
la marine hellénique et commissaire gé-
néral de l'ile de Crète, arrivera aujour-
d'hui, à cinq heures du soir.
Acoompagné du capitaine de vaisseau
Carpounis, son aide de camp, et de M;
Pappadiamantopoulos, son secrétaire
particulier, il descendra avec sa suite à
l'hôtel Gampbell, avenue Friedland, où il
a fait retenir rapparteme.nt occupe tout
dernièrement par LL. AA. II. le grand-
duc et la grande-duchesse Serge de
Russie.
Son Altesse Royale, âgée de trente et
un ans, est le second fils du roi des Hellè-
nes et de la grand-duchesse Olga Cons-
tantinovna.-
Très grand, robuste, vigoureux, il
rappelle d'une façon frappante le type
mâle des Romanoff. Son visage est orné
d'une moustache blonde etil a les mêmes
beaux yeux bleus que sa mère.
Des son enfance, le prince se fit re-
marquer par sa vive intelligence. Elevé
à l'Ecole navale d'Athènes, il compléta
son instruction à l'Ecole navale supé-
rieure de Copenhague, où il étudia tout
spécialement le service des torpilles.
Après de brillants examens, il fit le
tour du monde avec son cousin le Tsaré-
vitch, et ce fut lui qui, grâce à sa pré-
sence d'esprit et à sa force herculéenrie,
sauva la vie au futur empereur de Russie,
en assommant, d'un seul coup de bâton,
l'assassin japonais qui avait attenté à sa
vie..
De retour en Grèce, le prince fut
chargé de l'organisation du service des
torpilleurs. Peu après, il fut mis à la tête
d'une division de ces navires, envoyée
en Crète pour appuyer les opérations" de
l'armée d'occupation que commandait le
général Vassos.
Pendant la guerre contre la Turquie,
le prince Georges commanda la division
navale hellénique, mais il n'eut pas l'oc-
casion de livrer bataille à l'escadre tur-
que qui, par suite des ordres reçus, ne
franchit jamais les Dardanelles.
A la fin de l'insurrection crétoise,
lorsque la Russie, la France, l'Angleterre
et l'Italie après la retraite de l'Allema-
gne et de l'Autriche proclamèrent
l'autonomie de la Crète sous la suzerai-
neté de la Porte et sous l'administralion
d'un commissaire général, le prince
Georges fut choisi pour exercer pendant
trois ans ces hautes fonctions au nom
des quatre puissances intervenues.
Il prit le gouvernement de la Grète le
31 décembre 1898 et, dans cet espace
de moins de deux ans, il a su obtenir
des résultats inespérés.
Après le désarmement de la population
crétoise, il parvint à réconcilier les chré-
tiens et les musulmans divisés par des
haines et des luttes séculaires. Ayant
obtenu la complète pacification de l'île,
il créa l'administration civile, institua
des tribunaux pour que la justice fût
rendue dans toute sa liberté, fonda une
banque nationale, ouvrit des voies de
communication et organisa une gen-
darmerie locale afin de remplacer les for-
ces militaires des puissances étrangères.
L'accomplissement rapide de cette
œuvre qui a assuré aux Crétois les bien-
faits de la paix et de la civilisation a été
si étonnant que les puissances européen-
nes ont, à plusieurs reprises, félicité le
jeune prince, tout en lui donnant les té-
,moignages les plus flatteurs de leur
sympathie.
Et maintenant le prince Georges, dont
les pouvoirs de commissaire général vont
prendre fin dans un an, a entrepris un
voyage pour rendre compte de sa gestion
aux grandes puissances et pour leur si-
gnaler les mesures qui devront être pri-
ses ultérieurement pour couronner la
grande œuvre dont elles ont assumé Fini-
tiative.'
C'est ainsi que lé prince a été tout d'a-
bord passer quelques semaines à Yalta,
en Crimée, chez son cousin l'empereur
de Russie, qui a auprès de lui le comte
Lamsdorff, son ministre des affaires
étrangères.
De là il est allé en Angleterre. Descendu
au château .de Sandringham, chez son
oncle le> prince de Galles, il a eu l'occa-
sion de voir la reine d'Angleterre et de
conférer avec le marquis de Salisbury.
En arrivant à Paris, où il restera une
dizaine de jours, il aura l'honneur d'être
présenté au Président de la République
et s'entretiendra avec le président du
Conseil et le ministre des affaires étran-
gères.
En quittant la France, Son Altesse
Royale se rendra à Rome. Elle aura
ainsi visité les chefs d'Etat et les gouver-
nements des quatre puissances qui ont
donné leur garantie à l'autonomie cré-
toise.
On croit qu'après ces quatre visites
obigatoires le prince se rendra à Berlin
et à Vienne.
Ferrari.
LE DERNIER BANQUET
Nous en avons eu beaucoup, de ces
banquets, pendant six mois, et de très
aimables, de très brillants, de très cor-
diaux mais aucun, je crois, n'eut l'éclat
charmant et la grâce pittoresque de
celui-ci.
Les commissaires généraux étrangers
offraient au gouvernement, aupersonnel
supérieur de notre commissariat général
et.à quelques amisjeur dîner d'adieux; et
à cette dernière fête, ils avaient voulu un
cadre d'élégance inédite. C'est à l'un des
plus distingués architectes de l'Exposi-
tion, M. Masson-Détourbet, qui édifia la
section chinoise avec tant d'art et fut
chargé de l'installation des sections
étrangères, que les commissaires étran-
gér-s avaient confié la tâche d'inventer en
l'honneur de leurs hôtes un décor digne
d'eux. Et M.' Masson-Détourbet eut une
idée très simple, mais charmante et que
personne n'avait eue avant lui. Il fit de
la grande salle à manger de l'hôtel Conti-
nental une tonnelle.
Mais une tonnelle de,féerie, assez vaste
i pour contenir deux cents convives, et
sur les treillages verts de laquelle une
végétation de fleurs électriques mêlait
la polychromie de ses feux très doux
aux feuillages et aux bouquets de fleurs
naturelles répandus partout. Le lustre
central était de feuillages, de chrysan-,
thèmes et de roses; des orchidées étaient
répandues sur toutes les tables; on di-
nait dans un décorde fleurs illuminées.
A l'entrée des salons, les invités sont
reçus par Mme la princesse Tenicheff,
Mme Peek et Mme Emile Robert, assis-
tées des organisateurs de la fête le
prince Tenicheff, commissaire général-
de Russie; MM. Gustave Ador, commis-'
saire général de Suisse; Lewald, com-
rnissaire général adjoint d'Allemagne
Emile Robert, commissaire général ad-
joint de Belgique tvoodward, commis-
saire général adjoint des Etats-Unis, et
Per Lamm commissaire adjoint de
Suède.
Les commissariats étrangers sont tous
représentés.
Sont présents
Jtl&I. le docteur Richter} commissaire gené*.
rai de l'Allemagne; Schrader, commissaire
général d'Andorre, et Mme Schrader Exner,
commissaire général d'Autriche Beyer, com-
missaire adjoint d'Autriche, et Mme Ver-
cruysse, commissaire général de Belgique;
F. Robert, secrétaire général du commissa-
riat général belge, et Mme F. Robert Moser,
commissaire général de Bosnie-Herzégovine,
et Mme Moser; Dimitrow, commissaire gé-
néral de Bulgarie de La Fargue, commis-
saire général adjoint de Bulgarie; Vapereau,
commissaire général de Chine, et Mme; le
prince Min, président d'honneur du Comité
de la Corée Roulina,. président du Comité
impérial de la Corée le comte Mimerel,
commissaire général de la Corée; C. Michel-
sen, vice-président du Comité de Dane-
mark le docteur Rendon, commissaire gé-
néral de l'Equateur, et Mme S. Exc. le
duc de Sesto, commissaire général royal
d'Espagne; S, Exe. le marquis de Villalo-
bar, délégué royal d'Espagne S. Exc. J.-F.
Jimenez, directeur des beaux-arts d'Espagne
F.-W. Peck, commissaire général des Etats-
Unis, et Mme; B.-D. Woodward, commis-
saire général des Etats-Unis Fred. Brackett,
secrétaire général des Etats-Unis; colonel Je-
kyll, commissaire général de la Grande-Bre-
tagne Spearman, commissaire général ad-
joint de la Grande-Bretagne Sacilly, com-
missaire' général de la Gréée, et Mme; R.
Guérin, délégué de Guatemala Mangel, dé-
légué spécial de Guatemala de Miklos, com-
missaire général adjoint dé la Hongrie; de
Kazy, attaché au commissariat de la Hon-
grie de Navay, délégué du commissaire gé-
néral de la Hongrie Mantegazza, secrétaire
général d'Italie, et Mme Âdatci, commissaire
adjoint du Japon, et Mme; Renoite; secré-
taire général de Libéria, et Mme; T. Du-
treux, commissaire général du Luxembourg;
A. Dutreux, commissaire général adjoint du
Luxembourg; Muzèt, délégué général du Ma-
roc de Mier, commissaire général du Mexi-
que, et Mme Fernandez, adjoint au commis-
saire général du Mexique, et Mme Garcia
Torres, adjoint au commissaire général, et
Mme Hans, adjoint au commissaire général
du Mexique Depelley, commissaire général
de Monaco Nahmias, commissaire de Nica-
ragua, et Mme Christophersen, commissaire
général de Norvège) et Mlle Halversen, dé-
légué du commissaire général de Norvège, et
Mme de Mosenthal, commissaire général
d'Orange Mantelet, attaché au commissa-
riat d'Orange; baron M. Van Verduynen,
commissaire général des Pays-Bas ba-
ron Van Asbeck, commissaire délégué des
Pays-Bas, et Mme; Sanz, commissaire gé-
néral du Pérou, et Mme; général Kitabgi-
khan, commissaire général de la Perse, et
Mme; Eug. Henry, commissaire de la Perse;
F. R. Garcia, président du Comité du Por-
tugal vicomte de Faria, commissaire du Por-
tugal et Mme; D. C. Ollanesco, commissaire
général de. Roumanie, et Mme Coucou, com-
missaire spécial de Roumanie, et Mlle; A. Raf-
falovich, vice-président de la Commission im-
périale de Russie, et Mme; prince Ténicheff,
commissaire général de Russie, et Mme; de
Vouytch, commissaire général adjoint de
Russie Rouneberg, agent pour la Fin-
lande, et Mme; baron de Bellet, com-
missaire général de Saint-Marin Buc-
'quet, commissaire général adjoint de Saint-
ûVIarin Guardia, commissaire général de
Salvador, et Mme; Kapetanonitch, com-
missaire adjoint de la Serbie; Tedeschi, se-
crétaire général de la Serbie; Phya Suriya
Nuvatr, commissaire général de Siam, et
Mme; Gréhan, commissaire général adjoint
de Siam, et Mme J. Pierson délégué de la.
République sud-africaine; Thiel,, commis-
saire général de la Suède; PerLamm, adjoint'
de la Suéde, et Mme A. Duplan, commissaire
général adjoint de Suisse; E. Chesnel, secré-
taire général et délégué de Turquie, et Mme
Chesnel.
Tous les membres du gouvernement
se sont rendus à l'invitation des commis-
Isaires, à l'exception du ministre de la
ïmanhe, empêché. A huit heures, les;
portes s'ouvrent sur le décor fleuri où va `
se donner le dernier banquet de l'Expo-
sition, et c'est une exclamation de sur-
prise et de joie.
i M. Richter préside, ayant à sa .droite
Mme Waldeck-Rousseau, et à sa gauche
Mme Delcassé; en face.de lui, M. Gustave
JAdor, Les convives prennent place au-
tour de sept tables, perpendiculaires à
la table d'honneur. Au nombre des in-:
vités
Le général et Mme Dubois, M. et Mme
Combarieu, M. Crozier, M. et Mme Mollard,
le général et Mme Florentin, M. et Mme Lé-
pine, M. et Mme Dupré, le président de la
Chambre de commerce, le vice-président de
la Chambre de commerce, M. etMmeRoujon,
M. Alfred Picard, M. et Mme. Delaunay-Bel-
leville, M. Stéphane Dervillé, M. et Mme Char-
don, M. et Mme François Arago, MM. Bous,
quet, Defrance, M. et Mme Bouvard, M. et
Mme Ancelot, M. et Mme Resal, M. et Mme
Legrand, M. et Mme de Brévans, M. et Mme
Bourdon, M. et Mme Picou, M. et Mme Bon-
nier, M. et Mme Masson-Détourbet, MM.
Billotte, Renouard, F. de Rodays, François
Carnot, Ernest Carnot.
Les commissaires étrangers ont traité
leurs hôtes avec la plus élégante libéra-
lité. Chaque convive trouve à côté de
son couvert deux programmes luxueu-
sement illustrés celui de la soirée, et
celui du dîner sur lequel est imprimé,
son nom. Au centre de ce programme,
une gravure une vue de cette jolie rue
des Nations, où il n'y aura plus dans
deux jours que des maisons vides, et où
depuis hier résonnent les pioches des
démolisseurs! Autour de l'image, qua-
rante cartouches où s'inscrivent les
noms des quarante pays dont les dra-
peaux flottèrent au bord de la Seine
pendant six mois. Chaque convive reçoit
en outre une médaille d'argent d'Al-
phée Dubois, délicieusement gravée à
l'avers, une jeune femme assise, en.mé-
ditatibn devant un globe terrestre qu'elle
mesure du compas; au revers, dans un
encadrement de laurier, un génie ailé
portant un cartouche avec cette inscrip-
tion Soirée Radieux des commissaires
étrangers. 15 novembre 1900.
Chaque dame enfin reçoit, outre la mé-
daille d'Àlphée Dubois, un très joli éven-
tail-
Le menu
Huîtres de Colchester
Consommé royal à la Suédoise
Tortue claire aux perles du Japon
Truite de Dantzig sauce Victoria
Pommes de terre à l'Anglaise
Selle de chevreuil à la Viennoise
Poularde braisée aux truffes
Marquises au cherry brandy
Spooms au clicquot
Perdreaux ilanqués de cailles sur canapé
Salade
Parfait de foie gras au Champagne
Pointes d'asperges à la crème
Pèches à la Parisienne
Rocher de glace à la Sibérienne
Gâteaux génois ••-̃̃̃
Fruits et dessert
Tisane en carafes– Saint-Emilion Château-
Yqiiain 1891 Château-Gruaud-L,aroso 1881 r-
Chambertin 1874 Pommery Greno.
Invisible derrière les treillages fleuris,
l'orchestre de Desgranges exécute pen-
dant le repas un programme. interna-
tionale où figurent les noms de Beetho-
ven, de Tschaïkowsky, de Grieg, de. Go-
dard, de Raff, de Strauss, de Lalo, de
Mendelssohn, de Pedrotti, de Litolff, et
ce menu-là n'est pas moins goûté que
l'autre.. •
Dix heures. M. Richter, commissaire.
général d'Allemagne, s'est levé. Un
grand silence se fait. M. Richter, d'une
voix vibrante d'émotion, lit
Monsieur le président du Conseil,
Messieurs les ministres,
Mesdames,
Messieurs,
L'Exposition universelle de 1900 a fermé
ses portes. Une manifestation des plus gran-
dioses de l'activité humaine dans tous les
domaines de la vie intellectuelle et matérielle
a pris fin. Le but, visé par les hommes qui
lui avaient donné naissance, celui de pré-
senter à l'univers, dans un seul cadre, toutes
les acquisitions de l'esprit humain, la com-
plexité infinie de la vie moderne, a été atteint
de la manière la plus brillante. Tous les
peuples de la terre ont rivalisé d'ardeur et de
zèle pour assembler les trésors les plus pré-
cieux et les plus remarquables des temps an-
ciens et modernes, et il n'y a nul doute que
l'Exposition universelle de 1900 ait, tant par
son empreinte générale que par la valeur et
la perfection des objets exposés, dépassé de
beaucoup toutes ses devancières européennes
et extraeuropéennes.
A la veille de nous séparer, il nous reste un
grand et agréable devoir à remplir, celui de
remercier M. le Président de la Répu-
blique de l'intérêt qu'il n'a cessé de porter à
nos travaux pendant toute la durée de l'Ex-
position, et d'exprimer à M. le Président et à
Mme Loubet combien nous avons été hono-
rés et touchés de leur accueil particulière-
ment gracieux et des flatteuses attentions de
toute sor.te dont nous avons été l'objet. Au
nom de tous mes collègues, les commissaires
généraux étrangers, oserai-je vous prier, mon-
sieur le président du Conseil, de vous faire
l'interprété, auprès de M. le Président de la
République et de Mme Loubet,de notre pro-
fonde reconnaissance et de nos respectueux
hommages, et de leur dire le souvenir ineffa-
çable que nous emportons des pontés qu'ils
nous ont prodiguées.
Je vous propose de lever votre verre en
l'honneur de M. le Président de la Républi-
que et de Mme Loubet.
L'orchestre exécute la Marseillaise,
écoutée debout par toute l'assistance.
M. Richter continue :•
Les palais de l'Exposition universelle dis-
paraîtront, le grand ,Paris, dont nous avons
été les hôtes enchantés pendant plusieurs an-
nées, reprendra, sa vie régulière, mais éter-
nellement dureront pour chacun de nous les
relations personnelles qu'il nous a été donné
de nouer pendant cet espace de temps si im-
portant et plein de labeur.
Les noms des hommes qui ont conféré à
l'Exposition universelle le cachet de leur ca-
ractère et de leur esprit, resteront toujours
vivants dans notre mémoire. Nous tournons
nos regards vers M. Alfred Picard qui a ac-
compli une œuvre de travail pacifique,comme
le monde n'en aura jamais vu de plus grande
et de plus impressionnante. Nous contem-
plons ses collaborateurs, parmi lesquels M. le
président Delaunay-Belleville, directeur gé-
néral, mérite en particulier tous les remercie-
ments des commissires généraux étrangers.
Mais notre gratitude s'adresse principale-
ment au gouvernement français, à M. le pré-
sident du Sénat, à M. le président de la
Chambre des députés, à M. le président du
Conseil et à MM. les ministres qui, pendant
toute la durée de l'Exposition, ne se sont pas
lassés de nous accorder leur précieux soutien
,et de nous faciliter notre tâche avec la plus
grande prévenance, et c'est également à eux
que nous devons une hospitalité comme on
ne saurait l'imaginer plus brillante et plus
gracieuse.
De ces multiples relations d'affaires et de
société ont pris naissance des liens des plus
précieux qui, comme nous l'espérons et le
désirons, seront maintenus inébranlables éga-
lement après la clôture de l'Exposition. Ce
n'est pas sans une certaine mélancolie que
nous voyons approcher le terme dé notre
mission, et que nous devons nous séparer de
ces relations qui nous sont devenues chères
et du cercle de tous ces hommes éminents. Au
nom de tous mes collègues, je vous exprime
nos cordiaux et chaleureux remerciements; je
vous dis du fond du cœur « Merci! »
J'ose vous prier, mesdames et messieurs,
de lever vos verres, à la santé de M. le prési-
dent du Sénat, M. le président de la Chambre
des députés, M. le président du Conseil et de
MM. les ministres.
D'unanimes applaudissements sa-
luent le discours de l'éminent commis-
saire général, auquel le chef du goûver-
nement va répondre. Et c'est au milieu
d'une attention recueillie, presque émue,
de l'assemblée que M. Waldeck-Rous-
seau prend la parole
Monsieur le commissaire* général,
Le Président de la République sera très
touché des paroles si cordiales que vous ve-
nez de faire entendre, et il me sera tout par-
ticulièrement agréable d'être auprès de lui
votre interprète.
Les éloges que vous avez accordés à l'Ex-
position sont pour le gouvernement français
la plus précieuse des récompenses. Elle a été
notre grande préoccupation. Nous aimons
trop notre pays pour n'avoir pas souhaité
avec passion de voir un rayon nouveau s'a-
jouter à son auréole de gloire.
Nous avons aussi pensé et votre langage
prouve que nous n'étions pas dans l'erreur
que ses hôtes n'apprendraient point à le con-
naître sans en' même temps apprendre à l'ai-
mer.
L'œuvre qui vient de s'achever laissera t–
vous avez eu raison de le dire de grands
et profonds souvenirs. C'est la France qui a
pu la préparer. Elle n'oubliera pas que ce
sont les nations répondant à son appel qui'
lui ont permis de l'accomplir.
Paris vous a offert le cadre. Mais-dans son
décor merveilleux que de merveilles vous
avez entassées 1
Ces palais que vous avez élevés et qu'une
ingénieuse pensée avait réunis rappelaient à
quelques-uns, les grandes émotions éprouvées
en visitant vos capitales. Et ceux qui n'avaient
pas de tels souvenirs apprenaient à connaître
et à admirer l'infinie variété du génie hu-
main et l'affirmation constante des principes
supérieurs du beau.
Devant le spectacle offert par le prodigieux
développement de l'industrie, on ne savait s'il
convenait d'admirer davantage, ou l'origina-
lité puissante de chaque race et ses dons na-
turels, ou cette constante, pénétration des
idées, ce retentissement universel des décou-
vertes qui fait du progrès le trésor commun
des peuples et qui semble d'autant plus iné-
puisable qu'on y puise plus largement.
Nous verrons disparaître avec regret ces
édifices si nouveaux et cependant déjà si fami-
liers; c'est avec tristesse que nous verrons
s'éloigner des hôtes que notre hospitalité eût
souhaité de retenir.
Mais de l'Exposition il restera quelque
chose. Ce n'est jamais en vain que des hom-
mes se réunissent, mettent en commun l'i-
déal' lé plus haut, et lorsque l'œuvre qui les
a rassemblés est une œuvre de concorde,
elle survit à l'édifice qui lui avait été élevé.
C'est dans une pensée de reconnaissance,-
c'est dans une pensée de confiance en un
avenir fécond et pacifique, que je lève mon
verre à tous les visiteurs étrangers à l'Expo-
sition, et d'une façon plus spéciale à MM. les
commissaires généraux étrangers et à M. le
commissaire général Richter.
L'allocution du président du conseil,
plusieurs fois interrompue par des bra-
vos chaleureux s'achève dans une ova-
tion. Aucun autre toast n'est porté.
Et pendant que finit le "dernier banquet
de l'Exposition, une foule élégante d'in-
vités remplit les salons voisins. Les com-
missaires étrangers ont lancé plus de
quinze cents invitations à la çsoiréo, •
dont le programme est double.
Dans la sçlle des Fleurs, Desgranges d§
nouveau va diriger un concert où les
chœurs du Conservatoire seront applau-
dis à côté de son excellent orchestre, et
que suivront des danses espagnoles,,
Dans la .salle des Colonnes, on s'amuse
aux spectacles du cinématographe, tan-
dis que le brillant orchestre viennois, di-
rigé par Jean Muller, fait applaudir les
danses de Brahns et de Strauss.
La soirée d'hier aura été. une bonne
soirée. Un sentiment de mutuelle cbn-
fiance, de cordialité émue, de contente-
ment, où se mêlait unpeu de mélancolie,
rapprochait les uns des autres ces hom-
mes d'origines diverses que le hasard
d'une grande œuvre de paix fit amis, et
que la vie va reprendre, et de nouveau
disperser. Ces amitiés-là dureront-elles?
Le rêve de fraternité qu'elles ont en-
tretenu dans les âmes durera-t-il aussi?
On le voudrait on l'espère; mais
on n'en sait rien. Et, en attendant,
on se dit « adieu » ce qui est toujours
grave, et un peu triste au fond, en
dépit de la musique, des danses espa-
gnoles, et des fleurs qu'on répand sur
tout cela;
Emile Berr.
LA JOURNÉE
Vendredi 16 novembre •'
Sports Courses de chevaux, à Sain.t-Ouei}'
(une» heure et demie).
Premières A la Comédie-Française, Al~
kestis. A rOpéra-Comique, la Basoc he (re-
prise).
Le départ de la classe: Mise en. route du
reste du contingent de 1900. 1
Académie des inscriptions et bel les-lettres
Séance annuelle.
Banquet offert parles « Bleus de Bretagne »'̃
à Mme Clémence Royer, à l'occasion de sa
nomination dans l'ordre de la Légion d'hon-
neur (hôtel du Palais d'Orsay, nouvelle gare
d'Orléans, sept heures et demie).
Conférences de M. Léo Claretie «contre le
Scepticisme », (à l'Université populaire, 157,
faubourg Saint-Antoine, huit heures'et demie
du soir). De Mgr Le Nordez, évèque de
Dijon, sur « Bossuet » (école Massillon, cinq
heures).
Le Monde et 1~ ~°~
RENSEIGNEMENTS 'MONDAINS
S. Exc. Munir-bey, ambassadeur de Tur-
quie, est rentré hier à Paris et a repris la di-
rection des affaires.
Le Sultan, pour donner à son représentant
à Paris une marque nouvelle de sa haute
satisfaction, a remis à Munir-bey le grand
cordon du Medjidié avec plaque en brûlants.
MARIAGES
En l'église du Saint-Esprit de la rue Ro-'
quépine a été célébré hier, à deux heures de
Taprès-midi; au milieu d'une innombrable as-
sistance, le mariage de M, Maurice Chatilloni
avocat, avec Mlle Andrée-Suzanne Masson,
fille de l'inspecteur principal du Crédit foncier
de France, et de Mme Marcel Masson née
Batiau, la sœur de notre excellent confrère-
Gustave Batiau.
Les témoins étaient, pour le marié M. Ëmil'e''
Chatillon; capitaine instructeur au camp du,
Ruchard, son frère et. M. Refoulé, avoué .à.,
Orléans pour la mariée M. Gustave Batiau,'
et M. Meunier, directeur de l'Union générais.
du Nord..
La quête a été faite par Mlles Eva Brossé,'
Germaine Gallet, Marguerite et .Germaine
Queylard, accompagnées de MM. Lucien Ro-'
tival, Eugène Montet, Marius Brossé et Ray-
mond Privât. ;̃
La réception donnée chez M. Gustave Ba-
tiau, oncle de la charmante mariée, a été des-
plus brillantes.
Reconnu parmi les notabilités politiques et,
financières:
Le gouverneur du Crédit foncier ,et !Mme Mo-
rel, M. Mazerat, directeur général du Crédit
lyonnais M. Gauwain, premier sous-gouverneur"
du Crédit foncier; M. Cohstans, sénateur, am-
bassadeur de France à Constantinople M. Albert
Christophle, M. Gomot, sénateur, et Mme Gomot
MM. Rabier, René Brice, Arène, députés M. et
Mme Rouxel, M. et Mme Méliodon et Mlles Mé-'
liodon M. Rivaud, ancien préfet M. et Mme
Théry, et nombre de nos confrères de la presse
politique et financière.
Le temple de la rue Roquépine avait été
orné de superbes fleurs, ainsi que le bel ap-
partement des Champs-Elysées.
En l'église Saint-Michel des Batignolles'. *>
a été célébré, hier, le mariage de Mlle Lisbeth.
Carrière, fille du peintre éminent, avec M.
Delvolvé, professeur agrégé de l'Université,
secrétaire de l'Ecole internationale de l'Expo-
sition universelle. ̃
Une très nombreuse assistance, apparter
nant au monde artistique et littéraire, était.,
venue féliciter les nouveaux époux et le père
de la ravissante mariée. Parmi les assistants
M. et Mme Gabriel Séailles, Mme et Mlle F.
Raffaëlli, M. Jean Dolent, les sculpteurs Rodin,
Bartholomé, Devillez, etc., Mlles Séailles, Jean
Dolent, M. Gustave Geffroy, etc., qui sont venus
témoigner au maître peintre et a ses .enfants/
leur affection et leur sympathie,
Hier, en l'église de Neuilly-sur-Seine, on
a célébré le mariage de M. Albert Boussac,^
capitaine d'infanterie de marine, chevalier de
la Légion d'honneur, avec Mme veuve Çhar-
rïé-Solon. Témoins du marié MM. Noble-
maire, directeur de la Compagnie de Paris--
Lyon-Méditerranée, et Picard, naguère chef de
l'exploitation de la même Compagnie.
Dans une touchante allocution, le curé de'
Neuilly a rappelé les services rendus au pays
par le père du jeune officier, comme inspec-
teur général des télégraphes.
Le docteur E. Auscher, ancien chef de,
clinique à l'Hôtel-Dieu, est parti pour New-,
York où il doit épouser Mlle Lucie Blum, le
28 de ce mois.
M. Henry Chapus épousera prochaine-'
ment Mlle Clotilde Chaveton, fille de l'expert,
près le Tribunal de la Seine.
On a célébré avant-hier, à la. synago--
gue de Londres, le mariage de M, André
Fould, fils unique de feu M. Henri Fould, de
Paris, avec miss Elsa Stern, dernière fille de
M. et de Mme James Stem.
Les brides-maids, étaient misses Violet et
Suzan Stern, Yvonne de Sinçay, Anne La\v*
rence, Daisy Flower, de Gunzburg, Nesta
Fitzgerald, Elisabeth Fould et Alice Hardy.
M. Eugène Fould était le bestman.
',@MON
CHATEAUX V
Là. vicomtesse Robert de Lorgeril; vient
dé donner une charmante soirée artistique en
son château des Diablaires, dans l'Ille-et-
Vilaine. Au programme, .deu? pièces -(Jn
mari dçns du cototf, Mon /.smfLa première avait pour interprètes la châte»,
laine et le comte de Durfort; la secondé;"
Mlles de La Bigne et de Boishue, la comtesse'
de Durfort, le vicomte de Lorgeril etr M. de'
Kervers.
Tous ces amateurs mondains ont joué à
ravir leurs rôles et ont obtenu un très grand
succès. Très admirés les beaux costumes 1830,;
Au nombre des invités
Jtlarquis et marquise de Kernier, vicomte et
vicomtesse de Boishue, comte et comtesse de
Kergàrj.ou, marquis'. 'de Verdun, générai et com^"
tesse de Roincé, comte des Nétumières, comte et
comtesse de Guiton, comtesse et Mlle de Canisy,
M. Houitto de La Ches^aie, comtes Jacoués,
il leur avait paru que la yoje cédait -sous
la locomotive, que celle-ci semblait s'en-
foncer dans le ballast. Et, aussitôt après
et sans qu'ils y.pussent rien compren-
dre, l'un et l'autre pétaient projetés en
arrière par un premier choc de la ma-
chine. Lancés dans le vidé, ils tombè-
rent dans un pré, dont l'herbe fraîche
amortit leur chute.
Et ils purent voir, en une minute ra-
pide," le tender escalader l'arrière de la
locomotive, barrer la voie, supporter le
choc du fourgon etdn wagon-restaurant,
immédiatement attaché derrière lui; le
wagon-restaurant se dresser contre' la
machine, et tous deux rouler' dans le
remblai, au milieu d'un tumulte ef-
froyable.
Les amarres des wagons .à la suite
s'étant heureusement trouvées rompues
par le choc, ceux-ci, qui composaient la
queue du, train, restèrent sur la voie.
Et ainsi se trouvèrent sains .et saufs
lesquatre voyageurs qui, moins.pressés
peut-être par l'appétit, n'avaient pas en-
core pénétré dans le wagon-restaurant
Faut-il conclure de tout ceci que la voie
encore en réparations, la vitesse peut-
être excessive, étant donné l'état de la
subs.truture .à cet endroit, sont peut-être
les causes de l'effroyable 'malheur? Ou
ne trouver.a-t.-Qn pas, au cours de l'en-
quête déjà commencée, qu'un affaisse-
ment du terrain, dû aux pluies des jours
derniers, a seul amené ledéraillement?.
Il est impossible aujourd'hui, en l'ab-
sence de nouvelles complètes et dans,
l'émotipn générale, de préciser ces dé-
tails techniques. Demain vos lecteurs
seront définitivement renseignés. Nous
ne voulons aujourd'hui que déplorer l'a-
bominable catastrophe, saluer les vie-?
times et envoyer aux familles, si cruelle-
ment frappées, nos condoléances émues
et l'expression de. notre sympathie at-
tristée. .̃
Les victimes
Parmi les morts se trouvent
M. Alfred Elster, vingt-quatre ans, at-
taché à l'ambassade du Pérou, en Italie;
M.André Cabeau, employé des Wa-
gons-Lits
Mme Maria Valehcoala, cinquante, ans,
femme de chambre de Mme la duchesse
de Ganevàro
M. Blanchard, ingénieur honoraire
des mines," demeurant rue Pascalis, à
Bruxelles
M. Arteaga, de Biarritz
Mme Dombrowski, de Kief
•Une dame de quarante ans environ,
dont l'identité n'a pu être établie. Cette
dame avait à l'annulaire de la main gau-
che quatre bagues et, dans la poche, une
montre en or portant le numéro 19359
Un monsieurd'ùne trentaine d'années,
cheveux châtains, bouclés, ayant sur lui
une. carte au nom d'André Lande, un
mouchoir portant l'initiale H, une mon-
tre portant le numéro 6403.
Se trouveraient également parmi les
morts, M. Canevaro, duc de Zoagli, mi-
nistre plénipotentiaire du Pérou en
France, et sa femme. D'après d'autres
renseignements, Mme la duchesse de
Zoagli ne serait que blessée; elle: aurait
les jambes brisées.
On cite encore l'ambassadeur italien,
chargé de notifier officiellement à la
Cour d'Espagne l'avènement du roi Vic-
tor^Einmanuel, mais tout permet de
supppser qu'une confusion s'est établie
avec M. Alfred Elstèr^doht le nom figure
plus haut. 1
Les morts ont -été placés dans une
maison proche.du théâtre de l'accident,
en attendant leur transport à Dax.
De Bayonne, des voitures ambulan-,
cières. militaires avaient été envoyées
sur les lieux de la catastrophe. La muni-
cipalité et le, sous-préfet ont attendu leur
rétour à la gare, et le médecin-major
a fait transporter les blessés qu'elles, ra-
menaient à l'hôpital militaire dé la ville.
̃ M. Dombrowski, de Kief, quoique
contusioriné sur diverses parties du corps
et ayant l'oreille droite décollée, a tenu à
accompagner jusqu'à Bordeaux-Saint-
Jean le cadavre de sa femme qui avait
été placé dans un train spécial .Le même
train à amené à Bordeaux M. Dubauloy,.
demeurant à Paris, qui est reparti pour
la capitale dans la soirée.
Le chauffeur, le mécanicien et trois
employés du wagon-restaurant, les
uns et les autres légèrement blessés,
sont arrivés à Bordeaux à huit heures
dans le train 4, qui avait près de deux
heures de xétard. Dans xe train se trou-
vait également M.. John. Mac Ewen
Ames, demeurant à Paris, rue Vivienne,
qui a continué son voyage dans là soirée.
Les gardes-freins, légèrement blessés,
ont été reconduits à Dax.
'̃̃' Aubertin.
̃ J±_ FABIS
La nouvelle de cette effroyable catas-
trophe n'a été connue à Paris que dans
la soirée. Les bureaux de la Compagnie
du Midi sur le réseau de laquelle elle
s'est produite étaient déjà fermés
lorsqu'arriva, à six heures et demie, à
l'adresse du directeur, M. Blagé, ihgé-
nieur en chef des ponts et chaussées, une
dépêche, de l'ingénieur de la section de
Dax, donnant les premiers détails.
Cette dépêche, déposée à quatre heures
quarante-cinq à Dax, était ainsi conçue
Le Sùd-Èxprëss a déraillé ce matin, en
pleine voie, eptre Saint-Geours et Saubusse.
Il'y treize rxiorts et une vingtaine de blessés.
Dégâts matériels considérables. Déblayement
pas terminé.
Chez le directeur
de la Compagnie'du Midi
M. Blagé vient de se mettre à table
quandnous lui faisons passer notre carte
par son valet de chambre. Il accourt
aussitôt, la mine attristée
Ah monsieur, quel affreux mal-
heur Il est à craindre que presque tous
les voyageurs que contenait le Sud-
Express ne soient morts ou blessés car,
en général, ce train n'en transporte
guère plus de quarante à cinquante. La
cause de cet accident est encore inex-
pliquée; Comme vous, j'en suis réduit
moi-même aux conjéctures. Il s'est pro-
duit en jàleine voie. Le train a-t-il dé-
raillé par excès de vitesse? Entre Saint-
Geours et Saubusse, la voie est en pente,
et il devait marcher alors à raison de
110 kilomètres à l'heure.
» Mais le Sud-Express roule à pareille e
vitesse la moyenne est de 100 kilomè-
tres à l'heure tous les jours, depuis
que la Compagnie des Wagons-Lits nous
a chargés de le mettre quotidiennement
en route, c'est-à-dire depuis un an. Et
jamais, jusqu'ici, rien netui était arrivé.»
Le directeur de la Compagnie du Midi
ajoute, mélancolique
̃̃– Faudra-t-il, dorénavant, ne |>Iu?
« marcher » du tout ÎLe-public veut al-
ler de plus en plus vite.
Puis, revenant à la cause déterminante
de l'accident:
Peut-être un- rail s'est-il cassé.
Tout est possible, malheureusement.
Comment expliquer que l'on ne
possède encore que si peu de renseigne-
ments sur ce qui s'est passé ?
Parce que l'accident s'est produit à
17 kilomètres de Dax, à 33 kilomètres de
Bayonne, et. à plusieurs kilomètres de
toute gare; que, d'autre part, avant de
songer à télégraphier, nos agents, comme
c'était leur devoir, ont dû s'occuper des
victimes, soigner les blessés, retirer les
morts, puis envoyer chercher du maté-
riel pour former un train de secours.
M. Blagé nous annonce enfin que M.
Glaser, sous-directeur de la Compagnie,
va se rendre sur le lieu de l'accident.
M. Glàser a, en effet, quitté Paris hier
soir, par le rapide de 10 h. 30.
A la gare d'Orléans
Le Sud-Express devait arriver à 8 h. 55
à la gare du quai d'Orsay. A huit heures
et demie, le chef de la gare fait épingler,
dans le hall d'arrivée, une affiche ainsi
libellée:
AVIS AU PUBLIC
Le, train no 100, da la section. d'Espagne à
Paris-Orsay, devant arriver normalement à
8 h. 55, est supprimé. Il est remplacé par un
train spécial dont nous ferons connaître la
marche.
Bientôt le hall se garnit de parents et
d'amis qui viennent attendre des voya-
geurs. Personne ne sait rien. L'affiche
est très petite. On ne la remarque pas
i tout d'abord. Mais voici qu'on l'a aper-
çue 'alors on l'entoure. Quelqu'un la lit
à haute voix, et l'inquiétude se'peint sur
tous les visages.
Qu'est-ce que cela signifie? se de-
mande-t-on.
On interroge les employés de la gare,
même les agents de l'octroi. Nul d'entre
eux ne peut fournir le moindre rensei-
ghement.
C'est tout à fait singulier, dit une
dame très élégante, ce train supprimé!
Pourtant, je suis sûre qu'il est parti.
Mon mari m'a, en effet, télégraphié ce
matin, d'Hendaye, pour me demander de
venir l'attendre à huit heures cinquante-
cinq.
Et cette dame tire la dépêche de son
portefeuille et la montre à ses voisins.
A neuf heures, un facteur de la Com-
pagnie épingle une nouvelle affiche sur
la muraille. Plus explicite plus angois-
sante aussi que la première. Elle est
ainsi conçue
AVIS AU PUBLIC
Le train no 100, de la section d'Irun, est
annoncé par la gare de Bordeaux comme de-
vant avoir un retard considérable par suite
d'un accident survenu entre Bayonne et Dax.
Les voyageurs en provenance du Midi arri-
veront par le train 20 à 5 h. 40 du matin.
Ceux de Bordeaux et en deçà arriveront
par un train spécial dont la marche sera an-
noncée ultérieurement.
Un accident! Ah mon Dieu mon
pauvre mari s'écrie la dame qui a reçu
une dépêche d'Hendaye.
Et s'écroulant sur une banquette voi-
sine, elle éclate en sanglots.
La note ne :dit pas s'il y a des vic-
times ?
Il paraît qu'il y en a, dit quelqu'un.
Le chef de gare vient de me le déclarer.
Des morts ?..
Oui, treize morts et une vingtaine
de blessés.
A-t-ori leurs noms?
On n'en connaît pas encore un seul.
Près de moi, un monsieur s'écrie, avec
des larmes dans la voix
Ma femme! ma pauvre femme 1
Sa douleur fait peine à voir. Je m'ef-
force de le rassurer
Ne seriez-vous pas, par hasard, le
docteur Legris?
Précisément.
Eh bien, il est arrivé, ici, tout à
l'heure, une dépêche à votre adresse. On
m'avait pris pour vous et on a voulu me
la remettre.
Et où est-elle, cette dépêche?
On a dû la déposer au bureau des
renseignements de la gare.
Nous y courons. Ce n'est pas une,
c'est deux dépêches qui attendent M. le
docteur Legris. Sa main tremble telle-
ment qu'il ne peut les ouvrir lui-même.
Il jette les yeux sur la première et
pousse un long soupir de délivrance.
Datée de Dax, elle ne contient que deux
mots, mais ils sont tout à fait rassurants:
«Sauvée. Tranquille.» a Dans la deuxième,
déposée à Bordeaux, Mme Legris an-
nonce à son mari son arrivée à Paris le
lendemain matin. s
Je retourne dans le hall. Il est neuf
heures et quart. On se presse toujours
autour de l'affiche de la Compagnie d'Or-
léans. Ceux qui avaient un être cher
dans le Sud-Express déraillé n'en peu-
vent détacher les yeux. Ils la relisent
pour la dixième, pour la vingtième fois,
voulant douter encore et ne pouvant se
décider à s'en aller, tandis que, sur la
banquette voisine, la dame dont le mari
a quitté Hendaye le matin continue à
pleurer silencieusement.
Parmi les voyageurs du Sud-Express
se trouvaient M. Canavero, duc de Zoa-
gli, ministre plénipotentiaire du Pérou
en France, Mme la duchesse de Zoagli,
sa femme, et leur neveu, M. Elster, at-
taché à la légation du Pérou en. Italie.
M. Giovannelli, secrétaire particulier
de M. Canevaro, et le colonel Althaus,
attaché militaire de la légation,"étaient
venus attendre ces voyageurs à la gare.
N'ayant reçu. aucune dépêche, ils mani-
festent les inquiétudes les plus vives.
L'enquête administrative
A la première nouvelle de l'accident,
M. Pierre Baudin, ministre des travaux
publics, a envoyé sur les lieux l'inspec-
teur général, directeur du contrôle du
Midi, avec mission de procéder à une en-
quête minutieuse sur ses causes et de lui
transmettre le plus tôt possible les ren-
seignements qu'il pourra recueillir.
Henri fetitjean.
H(JTE ROYArj
Le prince Georges de Grèce, amiral de
la marine hellénique et commissaire gé-
néral de l'ile de Crète, arrivera aujour-
d'hui, à cinq heures du soir.
Acoompagné du capitaine de vaisseau
Carpounis, son aide de camp, et de M;
Pappadiamantopoulos, son secrétaire
particulier, il descendra avec sa suite à
l'hôtel Gampbell, avenue Friedland, où il
a fait retenir rapparteme.nt occupe tout
dernièrement par LL. AA. II. le grand-
duc et la grande-duchesse Serge de
Russie.
Son Altesse Royale, âgée de trente et
un ans, est le second fils du roi des Hellè-
nes et de la grand-duchesse Olga Cons-
tantinovna.-
Très grand, robuste, vigoureux, il
rappelle d'une façon frappante le type
mâle des Romanoff. Son visage est orné
d'une moustache blonde etil a les mêmes
beaux yeux bleus que sa mère.
Des son enfance, le prince se fit re-
marquer par sa vive intelligence. Elevé
à l'Ecole navale d'Athènes, il compléta
son instruction à l'Ecole navale supé-
rieure de Copenhague, où il étudia tout
spécialement le service des torpilles.
Après de brillants examens, il fit le
tour du monde avec son cousin le Tsaré-
vitch, et ce fut lui qui, grâce à sa pré-
sence d'esprit et à sa force herculéenrie,
sauva la vie au futur empereur de Russie,
en assommant, d'un seul coup de bâton,
l'assassin japonais qui avait attenté à sa
vie..
De retour en Grèce, le prince fut
chargé de l'organisation du service des
torpilleurs. Peu après, il fut mis à la tête
d'une division de ces navires, envoyée
en Crète pour appuyer les opérations" de
l'armée d'occupation que commandait le
général Vassos.
Pendant la guerre contre la Turquie,
le prince Georges commanda la division
navale hellénique, mais il n'eut pas l'oc-
casion de livrer bataille à l'escadre tur-
que qui, par suite des ordres reçus, ne
franchit jamais les Dardanelles.
A la fin de l'insurrection crétoise,
lorsque la Russie, la France, l'Angleterre
et l'Italie après la retraite de l'Allema-
gne et de l'Autriche proclamèrent
l'autonomie de la Crète sous la suzerai-
neté de la Porte et sous l'administralion
d'un commissaire général, le prince
Georges fut choisi pour exercer pendant
trois ans ces hautes fonctions au nom
des quatre puissances intervenues.
Il prit le gouvernement de la Grète le
31 décembre 1898 et, dans cet espace
de moins de deux ans, il a su obtenir
des résultats inespérés.
Après le désarmement de la population
crétoise, il parvint à réconcilier les chré-
tiens et les musulmans divisés par des
haines et des luttes séculaires. Ayant
obtenu la complète pacification de l'île,
il créa l'administration civile, institua
des tribunaux pour que la justice fût
rendue dans toute sa liberté, fonda une
banque nationale, ouvrit des voies de
communication et organisa une gen-
darmerie locale afin de remplacer les for-
ces militaires des puissances étrangères.
L'accomplissement rapide de cette
œuvre qui a assuré aux Crétois les bien-
faits de la paix et de la civilisation a été
si étonnant que les puissances européen-
nes ont, à plusieurs reprises, félicité le
jeune prince, tout en lui donnant les té-
,moignages les plus flatteurs de leur
sympathie.
Et maintenant le prince Georges, dont
les pouvoirs de commissaire général vont
prendre fin dans un an, a entrepris un
voyage pour rendre compte de sa gestion
aux grandes puissances et pour leur si-
gnaler les mesures qui devront être pri-
ses ultérieurement pour couronner la
grande œuvre dont elles ont assumé Fini-
tiative.'
C'est ainsi que lé prince a été tout d'a-
bord passer quelques semaines à Yalta,
en Crimée, chez son cousin l'empereur
de Russie, qui a auprès de lui le comte
Lamsdorff, son ministre des affaires
étrangères.
De là il est allé en Angleterre. Descendu
au château .de Sandringham, chez son
oncle le> prince de Galles, il a eu l'occa-
sion de voir la reine d'Angleterre et de
conférer avec le marquis de Salisbury.
En arrivant à Paris, où il restera une
dizaine de jours, il aura l'honneur d'être
présenté au Président de la République
et s'entretiendra avec le président du
Conseil et le ministre des affaires étran-
gères.
En quittant la France, Son Altesse
Royale se rendra à Rome. Elle aura
ainsi visité les chefs d'Etat et les gouver-
nements des quatre puissances qui ont
donné leur garantie à l'autonomie cré-
toise.
On croit qu'après ces quatre visites
obigatoires le prince se rendra à Berlin
et à Vienne.
Ferrari.
LE DERNIER BANQUET
Nous en avons eu beaucoup, de ces
banquets, pendant six mois, et de très
aimables, de très brillants, de très cor-
diaux mais aucun, je crois, n'eut l'éclat
charmant et la grâce pittoresque de
celui-ci.
Les commissaires généraux étrangers
offraient au gouvernement, aupersonnel
supérieur de notre commissariat général
et.à quelques amisjeur dîner d'adieux; et
à cette dernière fête, ils avaient voulu un
cadre d'élégance inédite. C'est à l'un des
plus distingués architectes de l'Exposi-
tion, M. Masson-Détourbet, qui édifia la
section chinoise avec tant d'art et fut
chargé de l'installation des sections
étrangères, que les commissaires étran-
gér-s avaient confié la tâche d'inventer en
l'honneur de leurs hôtes un décor digne
d'eux. Et M.' Masson-Détourbet eut une
idée très simple, mais charmante et que
personne n'avait eue avant lui. Il fit de
la grande salle à manger de l'hôtel Conti-
nental une tonnelle.
Mais une tonnelle de,féerie, assez vaste
i pour contenir deux cents convives, et
sur les treillages verts de laquelle une
végétation de fleurs électriques mêlait
la polychromie de ses feux très doux
aux feuillages et aux bouquets de fleurs
naturelles répandus partout. Le lustre
central était de feuillages, de chrysan-,
thèmes et de roses; des orchidées étaient
répandues sur toutes les tables; on di-
nait dans un décorde fleurs illuminées.
A l'entrée des salons, les invités sont
reçus par Mme la princesse Tenicheff,
Mme Peek et Mme Emile Robert, assis-
tées des organisateurs de la fête le
prince Tenicheff, commissaire général-
de Russie; MM. Gustave Ador, commis-'
saire général de Suisse; Lewald, com-
rnissaire général adjoint d'Allemagne
Emile Robert, commissaire général ad-
joint de Belgique tvoodward, commis-
saire général adjoint des Etats-Unis, et
Per Lamm commissaire adjoint de
Suède.
Les commissariats étrangers sont tous
représentés.
Sont présents
Jtl&I. le docteur Richter} commissaire gené*.
rai de l'Allemagne; Schrader, commissaire
général d'Andorre, et Mme Schrader Exner,
commissaire général d'Autriche Beyer, com-
missaire adjoint d'Autriche, et Mme Ver-
cruysse, commissaire général de Belgique;
F. Robert, secrétaire général du commissa-
riat général belge, et Mme F. Robert Moser,
commissaire général de Bosnie-Herzégovine,
et Mme Moser; Dimitrow, commissaire gé-
néral de Bulgarie de La Fargue, commis-
saire général adjoint de Bulgarie; Vapereau,
commissaire général de Chine, et Mme; le
prince Min, président d'honneur du Comité
de la Corée Roulina,. président du Comité
impérial de la Corée le comte Mimerel,
commissaire général de la Corée; C. Michel-
sen, vice-président du Comité de Dane-
mark le docteur Rendon, commissaire gé-
néral de l'Equateur, et Mme S. Exc. le
duc de Sesto, commissaire général royal
d'Espagne; S, Exe. le marquis de Villalo-
bar, délégué royal d'Espagne S. Exc. J.-F.
Jimenez, directeur des beaux-arts d'Espagne
F.-W. Peck, commissaire général des Etats-
Unis, et Mme; B.-D. Woodward, commis-
saire général des Etats-Unis Fred. Brackett,
secrétaire général des Etats-Unis; colonel Je-
kyll, commissaire général de la Grande-Bre-
tagne Spearman, commissaire général ad-
joint de la Grande-Bretagne Sacilly, com-
missaire' général de la Gréée, et Mme; R.
Guérin, délégué de Guatemala Mangel, dé-
légué spécial de Guatemala de Miklos, com-
missaire général adjoint dé la Hongrie; de
Kazy, attaché au commissariat de la Hon-
grie de Navay, délégué du commissaire gé-
néral de la Hongrie Mantegazza, secrétaire
général d'Italie, et Mme Âdatci, commissaire
adjoint du Japon, et Mme; Renoite; secré-
taire général de Libéria, et Mme; T. Du-
treux, commissaire général du Luxembourg;
A. Dutreux, commissaire général adjoint du
Luxembourg; Muzèt, délégué général du Ma-
roc de Mier, commissaire général du Mexi-
que, et Mme Fernandez, adjoint au commis-
saire général du Mexique, et Mme Garcia
Torres, adjoint au commissaire général, et
Mme Hans, adjoint au commissaire général
du Mexique Depelley, commissaire général
de Monaco Nahmias, commissaire de Nica-
ragua, et Mme Christophersen, commissaire
général de Norvège) et Mlle Halversen, dé-
légué du commissaire général de Norvège, et
Mme de Mosenthal, commissaire général
d'Orange Mantelet, attaché au commissa-
riat d'Orange; baron M. Van Verduynen,
commissaire général des Pays-Bas ba-
ron Van Asbeck, commissaire délégué des
Pays-Bas, et Mme; Sanz, commissaire gé-
néral du Pérou, et Mme; général Kitabgi-
khan, commissaire général de la Perse, et
Mme; Eug. Henry, commissaire de la Perse;
F. R. Garcia, président du Comité du Por-
tugal vicomte de Faria, commissaire du Por-
tugal et Mme; D. C. Ollanesco, commissaire
général de. Roumanie, et Mme Coucou, com-
missaire spécial de Roumanie, et Mlle; A. Raf-
falovich, vice-président de la Commission im-
périale de Russie, et Mme; prince Ténicheff,
commissaire général de Russie, et Mme; de
Vouytch, commissaire général adjoint de
Russie Rouneberg, agent pour la Fin-
lande, et Mme; baron de Bellet, com-
missaire général de Saint-Marin Buc-
'quet, commissaire général adjoint de Saint-
ûVIarin Guardia, commissaire général de
Salvador, et Mme; Kapetanonitch, com-
missaire adjoint de la Serbie; Tedeschi, se-
crétaire général de la Serbie; Phya Suriya
Nuvatr, commissaire général de Siam, et
Mme; Gréhan, commissaire général adjoint
de Siam, et Mme J. Pierson délégué de la.
République sud-africaine; Thiel,, commis-
saire général de la Suède; PerLamm, adjoint'
de la Suéde, et Mme A. Duplan, commissaire
général adjoint de Suisse; E. Chesnel, secré-
taire général et délégué de Turquie, et Mme
Chesnel.
Tous les membres du gouvernement
se sont rendus à l'invitation des commis-
Isaires, à l'exception du ministre de la
ïmanhe, empêché. A huit heures, les;
portes s'ouvrent sur le décor fleuri où va `
se donner le dernier banquet de l'Expo-
sition, et c'est une exclamation de sur-
prise et de joie.
i M. Richter préside, ayant à sa .droite
Mme Waldeck-Rousseau, et à sa gauche
Mme Delcassé; en face.de lui, M. Gustave
JAdor, Les convives prennent place au-
tour de sept tables, perpendiculaires à
la table d'honneur. Au nombre des in-:
vités
Le général et Mme Dubois, M. et Mme
Combarieu, M. Crozier, M. et Mme Mollard,
le général et Mme Florentin, M. et Mme Lé-
pine, M. et Mme Dupré, le président de la
Chambre de commerce, le vice-président de
la Chambre de commerce, M. etMmeRoujon,
M. Alfred Picard, M. et Mme. Delaunay-Bel-
leville, M. Stéphane Dervillé, M. et Mme Char-
don, M. et Mme François Arago, MM. Bous,
quet, Defrance, M. et Mme Bouvard, M. et
Mme Ancelot, M. et Mme Resal, M. et Mme
Legrand, M. et Mme de Brévans, M. et Mme
Bourdon, M. et Mme Picou, M. et Mme Bon-
nier, M. et Mme Masson-Détourbet, MM.
Billotte, Renouard, F. de Rodays, François
Carnot, Ernest Carnot.
Les commissaires étrangers ont traité
leurs hôtes avec la plus élégante libéra-
lité. Chaque convive trouve à côté de
son couvert deux programmes luxueu-
sement illustrés celui de la soirée, et
celui du dîner sur lequel est imprimé,
son nom. Au centre de ce programme,
une gravure une vue de cette jolie rue
des Nations, où il n'y aura plus dans
deux jours que des maisons vides, et où
depuis hier résonnent les pioches des
démolisseurs! Autour de l'image, qua-
rante cartouches où s'inscrivent les
noms des quarante pays dont les dra-
peaux flottèrent au bord de la Seine
pendant six mois. Chaque convive reçoit
en outre une médaille d'argent d'Al-
phée Dubois, délicieusement gravée à
l'avers, une jeune femme assise, en.mé-
ditatibn devant un globe terrestre qu'elle
mesure du compas; au revers, dans un
encadrement de laurier, un génie ailé
portant un cartouche avec cette inscrip-
tion Soirée Radieux des commissaires
étrangers. 15 novembre 1900.
Chaque dame enfin reçoit, outre la mé-
daille d'Àlphée Dubois, un très joli éven-
tail-
Le menu
Huîtres de Colchester
Consommé royal à la Suédoise
Tortue claire aux perles du Japon
Truite de Dantzig sauce Victoria
Pommes de terre à l'Anglaise
Selle de chevreuil à la Viennoise
Poularde braisée aux truffes
Marquises au cherry brandy
Spooms au clicquot
Perdreaux ilanqués de cailles sur canapé
Salade
Parfait de foie gras au Champagne
Pointes d'asperges à la crème
Pèches à la Parisienne
Rocher de glace à la Sibérienne
Gâteaux génois ••-̃̃̃
Fruits et dessert
Tisane en carafes– Saint-Emilion Château-
Yqiiain 1891 Château-Gruaud-L,aroso 1881 r-
Chambertin 1874 Pommery Greno.
Invisible derrière les treillages fleuris,
l'orchestre de Desgranges exécute pen-
dant le repas un programme. interna-
tionale où figurent les noms de Beetho-
ven, de Tschaïkowsky, de Grieg, de. Go-
dard, de Raff, de Strauss, de Lalo, de
Mendelssohn, de Pedrotti, de Litolff, et
ce menu-là n'est pas moins goûté que
l'autre.. •
Dix heures. M. Richter, commissaire.
général d'Allemagne, s'est levé. Un
grand silence se fait. M. Richter, d'une
voix vibrante d'émotion, lit
Monsieur le président du Conseil,
Messieurs les ministres,
Mesdames,
Messieurs,
L'Exposition universelle de 1900 a fermé
ses portes. Une manifestation des plus gran-
dioses de l'activité humaine dans tous les
domaines de la vie intellectuelle et matérielle
a pris fin. Le but, visé par les hommes qui
lui avaient donné naissance, celui de pré-
senter à l'univers, dans un seul cadre, toutes
les acquisitions de l'esprit humain, la com-
plexité infinie de la vie moderne, a été atteint
de la manière la plus brillante. Tous les
peuples de la terre ont rivalisé d'ardeur et de
zèle pour assembler les trésors les plus pré-
cieux et les plus remarquables des temps an-
ciens et modernes, et il n'y a nul doute que
l'Exposition universelle de 1900 ait, tant par
son empreinte générale que par la valeur et
la perfection des objets exposés, dépassé de
beaucoup toutes ses devancières européennes
et extraeuropéennes.
A la veille de nous séparer, il nous reste un
grand et agréable devoir à remplir, celui de
remercier M. le Président de la Répu-
blique de l'intérêt qu'il n'a cessé de porter à
nos travaux pendant toute la durée de l'Ex-
position, et d'exprimer à M. le Président et à
Mme Loubet combien nous avons été hono-
rés et touchés de leur accueil particulière-
ment gracieux et des flatteuses attentions de
toute sor.te dont nous avons été l'objet. Au
nom de tous mes collègues, les commissaires
généraux étrangers, oserai-je vous prier, mon-
sieur le président du Conseil, de vous faire
l'interprété, auprès de M. le Président de la
République et de Mme Loubet,de notre pro-
fonde reconnaissance et de nos respectueux
hommages, et de leur dire le souvenir ineffa-
çable que nous emportons des pontés qu'ils
nous ont prodiguées.
Je vous propose de lever votre verre en
l'honneur de M. le Président de la Républi-
que et de Mme Loubet.
L'orchestre exécute la Marseillaise,
écoutée debout par toute l'assistance.
M. Richter continue :•
Les palais de l'Exposition universelle dis-
paraîtront, le grand ,Paris, dont nous avons
été les hôtes enchantés pendant plusieurs an-
nées, reprendra, sa vie régulière, mais éter-
nellement dureront pour chacun de nous les
relations personnelles qu'il nous a été donné
de nouer pendant cet espace de temps si im-
portant et plein de labeur.
Les noms des hommes qui ont conféré à
l'Exposition universelle le cachet de leur ca-
ractère et de leur esprit, resteront toujours
vivants dans notre mémoire. Nous tournons
nos regards vers M. Alfred Picard qui a ac-
compli une œuvre de travail pacifique,comme
le monde n'en aura jamais vu de plus grande
et de plus impressionnante. Nous contem-
plons ses collaborateurs, parmi lesquels M. le
président Delaunay-Belleville, directeur gé-
néral, mérite en particulier tous les remercie-
ments des commissires généraux étrangers.
Mais notre gratitude s'adresse principale-
ment au gouvernement français, à M. le pré-
sident du Sénat, à M. le président de la
Chambre des députés, à M. le président du
Conseil et à MM. les ministres qui, pendant
toute la durée de l'Exposition, ne se sont pas
lassés de nous accorder leur précieux soutien
,et de nous faciliter notre tâche avec la plus
grande prévenance, et c'est également à eux
que nous devons une hospitalité comme on
ne saurait l'imaginer plus brillante et plus
gracieuse.
De ces multiples relations d'affaires et de
société ont pris naissance des liens des plus
précieux qui, comme nous l'espérons et le
désirons, seront maintenus inébranlables éga-
lement après la clôture de l'Exposition. Ce
n'est pas sans une certaine mélancolie que
nous voyons approcher le terme dé notre
mission, et que nous devons nous séparer de
ces relations qui nous sont devenues chères
et du cercle de tous ces hommes éminents. Au
nom de tous mes collègues, je vous exprime
nos cordiaux et chaleureux remerciements; je
vous dis du fond du cœur « Merci! »
J'ose vous prier, mesdames et messieurs,
de lever vos verres, à la santé de M. le prési-
dent du Sénat, M. le président de la Chambre
des députés, M. le président du Conseil et de
MM. les ministres.
D'unanimes applaudissements sa-
luent le discours de l'éminent commis-
saire général, auquel le chef du goûver-
nement va répondre. Et c'est au milieu
d'une attention recueillie, presque émue,
de l'assemblée que M. Waldeck-Rous-
seau prend la parole
Monsieur le commissaire* général,
Le Président de la République sera très
touché des paroles si cordiales que vous ve-
nez de faire entendre, et il me sera tout par-
ticulièrement agréable d'être auprès de lui
votre interprète.
Les éloges que vous avez accordés à l'Ex-
position sont pour le gouvernement français
la plus précieuse des récompenses. Elle a été
notre grande préoccupation. Nous aimons
trop notre pays pour n'avoir pas souhaité
avec passion de voir un rayon nouveau s'a-
jouter à son auréole de gloire.
Nous avons aussi pensé et votre langage
prouve que nous n'étions pas dans l'erreur
que ses hôtes n'apprendraient point à le con-
naître sans en' même temps apprendre à l'ai-
mer.
L'œuvre qui vient de s'achever laissera t–
vous avez eu raison de le dire de grands
et profonds souvenirs. C'est la France qui a
pu la préparer. Elle n'oubliera pas que ce
sont les nations répondant à son appel qui'
lui ont permis de l'accomplir.
Paris vous a offert le cadre. Mais-dans son
décor merveilleux que de merveilles vous
avez entassées 1
Ces palais que vous avez élevés et qu'une
ingénieuse pensée avait réunis rappelaient à
quelques-uns, les grandes émotions éprouvées
en visitant vos capitales. Et ceux qui n'avaient
pas de tels souvenirs apprenaient à connaître
et à admirer l'infinie variété du génie hu-
main et l'affirmation constante des principes
supérieurs du beau.
Devant le spectacle offert par le prodigieux
développement de l'industrie, on ne savait s'il
convenait d'admirer davantage, ou l'origina-
lité puissante de chaque race et ses dons na-
turels, ou cette constante, pénétration des
idées, ce retentissement universel des décou-
vertes qui fait du progrès le trésor commun
des peuples et qui semble d'autant plus iné-
puisable qu'on y puise plus largement.
Nous verrons disparaître avec regret ces
édifices si nouveaux et cependant déjà si fami-
liers; c'est avec tristesse que nous verrons
s'éloigner des hôtes que notre hospitalité eût
souhaité de retenir.
Mais de l'Exposition il restera quelque
chose. Ce n'est jamais en vain que des hom-
mes se réunissent, mettent en commun l'i-
déal' lé plus haut, et lorsque l'œuvre qui les
a rassemblés est une œuvre de concorde,
elle survit à l'édifice qui lui avait été élevé.
C'est dans une pensée de reconnaissance,-
c'est dans une pensée de confiance en un
avenir fécond et pacifique, que je lève mon
verre à tous les visiteurs étrangers à l'Expo-
sition, et d'une façon plus spéciale à MM. les
commissaires généraux étrangers et à M. le
commissaire général Richter.
L'allocution du président du conseil,
plusieurs fois interrompue par des bra-
vos chaleureux s'achève dans une ova-
tion. Aucun autre toast n'est porté.
Et pendant que finit le "dernier banquet
de l'Exposition, une foule élégante d'in-
vités remplit les salons voisins. Les com-
missaires étrangers ont lancé plus de
quinze cents invitations à la çsoiréo, •
dont le programme est double.
Dans la sçlle des Fleurs, Desgranges d§
nouveau va diriger un concert où les
chœurs du Conservatoire seront applau-
dis à côté de son excellent orchestre, et
que suivront des danses espagnoles,,
Dans la .salle des Colonnes, on s'amuse
aux spectacles du cinématographe, tan-
dis que le brillant orchestre viennois, di-
rigé par Jean Muller, fait applaudir les
danses de Brahns et de Strauss.
La soirée d'hier aura été. une bonne
soirée. Un sentiment de mutuelle cbn-
fiance, de cordialité émue, de contente-
ment, où se mêlait unpeu de mélancolie,
rapprochait les uns des autres ces hom-
mes d'origines diverses que le hasard
d'une grande œuvre de paix fit amis, et
que la vie va reprendre, et de nouveau
disperser. Ces amitiés-là dureront-elles?
Le rêve de fraternité qu'elles ont en-
tretenu dans les âmes durera-t-il aussi?
On le voudrait on l'espère; mais
on n'en sait rien. Et, en attendant,
on se dit « adieu » ce qui est toujours
grave, et un peu triste au fond, en
dépit de la musique, des danses espa-
gnoles, et des fleurs qu'on répand sur
tout cela;
Emile Berr.
LA JOURNÉE
Vendredi 16 novembre •'
Sports Courses de chevaux, à Sain.t-Ouei}'
(une» heure et demie).
Premières A la Comédie-Française, Al~
kestis. A rOpéra-Comique, la Basoc he (re-
prise).
Le départ de la classe: Mise en. route du
reste du contingent de 1900. 1
Académie des inscriptions et bel les-lettres
Séance annuelle.
Banquet offert parles « Bleus de Bretagne »'̃
à Mme Clémence Royer, à l'occasion de sa
nomination dans l'ordre de la Légion d'hon-
neur (hôtel du Palais d'Orsay, nouvelle gare
d'Orléans, sept heures et demie).
Conférences de M. Léo Claretie «contre le
Scepticisme », (à l'Université populaire, 157,
faubourg Saint-Antoine, huit heures'et demie
du soir). De Mgr Le Nordez, évèque de
Dijon, sur « Bossuet » (école Massillon, cinq
heures).
Le Monde et 1~ ~°~
RENSEIGNEMENTS 'MONDAINS
S. Exc. Munir-bey, ambassadeur de Tur-
quie, est rentré hier à Paris et a repris la di-
rection des affaires.
Le Sultan, pour donner à son représentant
à Paris une marque nouvelle de sa haute
satisfaction, a remis à Munir-bey le grand
cordon du Medjidié avec plaque en brûlants.
MARIAGES
En l'église du Saint-Esprit de la rue Ro-'
quépine a été célébré hier, à deux heures de
Taprès-midi; au milieu d'une innombrable as-
sistance, le mariage de M, Maurice Chatilloni
avocat, avec Mlle Andrée-Suzanne Masson,
fille de l'inspecteur principal du Crédit foncier
de France, et de Mme Marcel Masson née
Batiau, la sœur de notre excellent confrère-
Gustave Batiau.
Les témoins étaient, pour le marié M. Ëmil'e''
Chatillon; capitaine instructeur au camp du,
Ruchard, son frère et. M. Refoulé, avoué .à.,
Orléans pour la mariée M. Gustave Batiau,'
et M. Meunier, directeur de l'Union générais.
du Nord..
La quête a été faite par Mlles Eva Brossé,'
Germaine Gallet, Marguerite et .Germaine
Queylard, accompagnées de MM. Lucien Ro-'
tival, Eugène Montet, Marius Brossé et Ray-
mond Privât. ;̃
La réception donnée chez M. Gustave Ba-
tiau, oncle de la charmante mariée, a été des-
plus brillantes.
Reconnu parmi les notabilités politiques et,
financières:
Le gouverneur du Crédit foncier ,et !Mme Mo-
rel, M. Mazerat, directeur général du Crédit
lyonnais M. Gauwain, premier sous-gouverneur"
du Crédit foncier; M. Cohstans, sénateur, am-
bassadeur de France à Constantinople M. Albert
Christophle, M. Gomot, sénateur, et Mme Gomot
MM. Rabier, René Brice, Arène, députés M. et
Mme Rouxel, M. et Mme Méliodon et Mlles Mé-'
liodon M. Rivaud, ancien préfet M. et Mme
Théry, et nombre de nos confrères de la presse
politique et financière.
Le temple de la rue Roquépine avait été
orné de superbes fleurs, ainsi que le bel ap-
partement des Champs-Elysées.
En l'église Saint-Michel des Batignolles'. *>
a été célébré, hier, le mariage de Mlle Lisbeth.
Carrière, fille du peintre éminent, avec M.
Delvolvé, professeur agrégé de l'Université,
secrétaire de l'Ecole internationale de l'Expo-
sition universelle. ̃
Une très nombreuse assistance, apparter
nant au monde artistique et littéraire, était.,
venue féliciter les nouveaux époux et le père
de la ravissante mariée. Parmi les assistants
M. et Mme Gabriel Séailles, Mme et Mlle F.
Raffaëlli, M. Jean Dolent, les sculpteurs Rodin,
Bartholomé, Devillez, etc., Mlles Séailles, Jean
Dolent, M. Gustave Geffroy, etc., qui sont venus
témoigner au maître peintre et a ses .enfants/
leur affection et leur sympathie,
Hier, en l'église de Neuilly-sur-Seine, on
a célébré le mariage de M. Albert Boussac,^
capitaine d'infanterie de marine, chevalier de
la Légion d'honneur, avec Mme veuve Çhar-
rïé-Solon. Témoins du marié MM. Noble-
maire, directeur de la Compagnie de Paris--
Lyon-Méditerranée, et Picard, naguère chef de
l'exploitation de la même Compagnie.
Dans une touchante allocution, le curé de'
Neuilly a rappelé les services rendus au pays
par le père du jeune officier, comme inspec-
teur général des télégraphes.
Le docteur E. Auscher, ancien chef de,
clinique à l'Hôtel-Dieu, est parti pour New-,
York où il doit épouser Mlle Lucie Blum, le
28 de ce mois.
M. Henry Chapus épousera prochaine-'
ment Mlle Clotilde Chaveton, fille de l'expert,
près le Tribunal de la Seine.
On a célébré avant-hier, à la. synago--
gue de Londres, le mariage de M, André
Fould, fils unique de feu M. Henri Fould, de
Paris, avec miss Elsa Stern, dernière fille de
M. et de Mme James Stem.
Les brides-maids, étaient misses Violet et
Suzan Stern, Yvonne de Sinçay, Anne La\v*
rence, Daisy Flower, de Gunzburg, Nesta
Fitzgerald, Elisabeth Fould et Alice Hardy.
M. Eugène Fould était le bestman.
',@MON
CHATEAUX V
Là. vicomtesse Robert de Lorgeril; vient
dé donner une charmante soirée artistique en
son château des Diablaires, dans l'Ille-et-
Vilaine. Au programme, .deu? pièces -(Jn
mari dçns du cototf, Mon /.smf
laine et le comte de Durfort; la secondé;"
Mlles de La Bigne et de Boishue, la comtesse'
de Durfort, le vicomte de Lorgeril etr M. de'
Kervers.
Tous ces amateurs mondains ont joué à
ravir leurs rôles et ont obtenu un très grand
succès. Très admirés les beaux costumes 1830,;
Au nombre des invités
Jtlarquis et marquise de Kernier, vicomte et
vicomtesse de Boishue, comte et comtesse de
Kergàrj.ou, marquis'. 'de Verdun, générai et com^"
tesse de Roincé, comte des Nétumières, comte et
comtesse de Guiton, comtesse et Mlle de Canisy,
M. Houitto de La Ches^aie, comtes Jacoués,
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