UT FIGARO «-* LUNDI 20 AVRIL. 1874
TÉLÉGRAMMES & CORRESPONDANCES
Nantes, 17 avril. Le conseil général eu
aujourd'hui une séance très orageuse qui
avait attiré un nombreux public. Il s'agissait
de la validation de l'élection de M. "de la
Brosse, nommé tout récemment conseiller
général dans le canton de la Chapelle-sur-
Erdre. •
Le rapport, tout en concluant à la valida-
tion de l'élection, contenait l'expression d'un
blâme contre le changement d'un maire du
canton. Deux des membres radicaux du con-
seil, M. LaisantetM. Rousse, le premier capi-
taine d'artillerie, le second juge au tribunal,
ont vivement attaqué le préfet, en l'accusant
d'intervention électorale et en insistant dans
le sens du blâme proposé par le rapport.
M. Lavedan s'est cloquemment défendu. Il
exposé les faits de la manière la plus victo-
rieuse, et il a réclamé avec unû grande éner-
gie, non seulement la validation de l'élection,
mais encore la suppression de toute formule
de blâme ou de regret dans le rapport. Le
succès de l'honorable fonctionnaire a été si
vif qu'au scrutin les membres do l'opposition
n'ont pas voté, et satisfaction complète a été
"donnée au préfet par 36 votants sur M mem-
bres présents.
Brest, 17 avril. Le conseil muni-
cipal et la chambre de commerce se sont réu-
nis hier, soir pour aviser aux moyens de ve-
nir en aide aux naufragés de V Amérique. Une
souscription est organisée en ville.
Le capitaine Roussan est parti hier pour
Paris par le train-poste de deux .heures du
soir.
Les communards déportés ou inter-
nés sont en train de faire des leurs
Un cotre, affecté au service colonial de la
Nouvelle-Calédonie, a été, il y a déjà quelque
temps, enlevé par des déportés, qui s y sont
installés et ont piqué au large.
On n'a plus jamais entendu parler ni du
côtre, ni de son singulier équipage.
Deux- autres déportés embarquent sur le
navire do l'Etat, le Calvados; Rochefort et
cinq de ses amis s'enfuient. Enfin, à Brest,
plusieurs internés au dépôt do Quélern, vien-
nent de tromper la surveillance des gardiens
et de prendre la clef des champs. ̃
Tout cela est fort triste.
Bastia, 18 avril, midi 15 m. La
frégate Cêrès est arrivée hier, ayant à bord le
40° de ligne qui doit tenir garnison ici. La
Cérès repart aujourd'hui, avec le 61° de ligne
qui doit rester à Toulon.
Fort peu de nouvelles du théâtre de la
guerre en Espagne. Le mauvais temps, disent
les dépêches, a été cause delà longue suspen-
sion des hostilités.
D'autre, part on annonce qu'elles repren-
dront mercredi ou jeudi.
̃- «.
PARIS AU JOUR LE JOUR
Le patriotisme, la dignité dans la dé-
faite, font un devoir à la presse française
de ne'point longuement insister sur le
nouveau discours de M. le feld-maré-
chal de Moltke, discours qui a certaine-
ment décidé le Reichstag allemand à
voter la loi militaire. Comme la pre-
mière fois, le grand tacticien a agité le
spectre français devant ses concitoyens.
Un point particulièrement mérite d'être
mis en lumière.
M. de Moltke félicite l'armée alleman-
de de n'avoir pas prolongé de huit ou
quinze jours le siège de Paris, ce qui lui
eût permis de faire mourir de faim deux
millions d'hommes, de femmes, de vieil-
lards et d'enfants. Cette constatation
autorise M. de Moltke à conclure que
l'Allemagne n'a pas abusé de sa « force
dans cette guerre ».
Il est impossible de ne pas faire remar-
quer qufîceschoses atroces à froid sont di-
tes en plein dix-neuvième siècle, au
moment où le progrès, au dire des ini-
tiés, paraît avoir atteint son apogée.
«% Avant-hier était cité à compa-
raître devant le tribudal prussien sié-
geant à Saverne, Mgr Joseph Foulon,
evêque de Nancy et de Toul. L'autorité
prussienne lui demandait compte d'un
mandement du 26 juillet 1873, préten-
dant que ce prélat relève de la juridic-
tion de l'empire allemand pour la por-
tion de territoire dont la France a con-
senti la cession. Mgr de Nancy. répondait
que le traité de Francfort n'a pu modi-
lier les dispositions contenues dans le
Concordat, et il a fait défaut. On sera pro-
bablement curieux de connaître les pas-
sages du mandement incriminé qui ont
motivé les susceptibilités de la justice
allemande.
« Aujourd'hui que les armées étrangères
ont enfin quitté le territoire de ce diocèse et
qu'elles s'apprêtent à évacuer les derniers
postes qu'elles retiennent en France, il est
permis, non point sans doute de se livrer à la
joie, souvenir de la Patrie mutilée et de
l'Eglise eu deuil nous interdira longtemps un
sentiment de cette nature, mais du moins
d'accomplir enfin les solennités religieuses
différées jusqu'à ce jour et de porter à Sion
nos douleurs, nos vœux et nos indomptables
espérances. »
Feuilleton du FIGARO du 20 Avril
LES NUITS SANGLANTES
La Verduret, en ce moment, était lé-
gèrement allumée par le petit vin blanc,
et se sentait en verve de déployer tous
ses moyens.
Allons-y gaiement, fit-elle
Verduret, pas de bêtises, tusais! re-
commanda Juliette; c'est sérieux
Sois tranquille, ma chère nièce
Quand la Verduret se fera rouler par
quelqu'un, c'est que ce personnage se
sera levé plus matin qu'elle.
S'agit pas de se lever matin, Ver-.
duret.
Faut arriver à l'heure, n'est-ce pas?
Eh bien, tu vas voir si je sais travailler!- !̃
Je vais à l'hôtel de ta sœur. abhorrée,
je vais y demander poliment Philippe,
sous un prétexte qui me passera dans la
cervelle pendant le chemin, et qui arri-
vera en maturité au moment où je dé-
barquerai rue de Seine.
La Verduret partit aussitôt. Elle prit
le chemin de fer, et, arrivée à la gare
Saint-Lazare, elle monta dans une voi-
ture, qui la conduisit, en moins d'un
quart d'heure, devant l'hôtel Gharvallôn.
Elle souleva le heurtoir de la porte co-
chère et le laissa retomber bruyamment,
après s'être composé un visage expri-
mant la plus profonde affliction.
Ah! mon Dieu! ah! mon Dieu! gôi-
gnit-elle, en s'adressant au suisse qui
« Et quel temps plus prospère pour- de-
mander a Dieu ses grâces après une guerre
formidable qui a désolé notre chèro Lorraine
et une paix désastreuse qui l'a mutilée au
lendemain du. départ des soldats étrangers
qui foulaient depuis trois ans notre sol, qu'il
sera à propos de mêler aux chants de la déli-
vrance les prières du repentir et de se pros-
terner dans la douleur, afin de se relever dans
l'espérance! A côté des bannières de Nancy,
marcheront, douloureux souvenir, celles de
nos deux sœurs, Metz et Strasbourg. »
En terminant, le prélat engageait -ses
diocésains à prier pour l'Eglise et pour
la Patrie.
Pour la Patrie, afin que ramenée à Dieu par
l'excès même «de ses malheurs, elle trouve
dans l'amertume de ses humiliations un aver-
tissement à ne pas tomber dans les fautes qui
les lui ont values pour la Patrie, afin qu'elle.
mérite de voir bientôt se lever sur elle des
jours meilleurs, et que les revendications
qu'elle désire, elle se les assure d'abord par
sa foi pour la Patrie, afin que les cruelles, sé-
̃ parafions que lui a imposées la guerre ne,
soient pas sans espoir, et que des sommets de
Sion l'horizon ne soit pas à jamais borné par
une frontière.
On voit qu'il était difficile d'allier plus
de modération à une plus grande éleva-
tion de langage.
»% La petite note de V Agence Havas
que nous avons publiée hier suscite un
débat assez curieux.
Paris-Journal avait dit que cette noté
visait la Gazette de France. Les journaux
légitimistes prétendent au contraire
qu'elle s'adresse tant au Français qu'à la
Presse. Ce dernier journal avait dit en
effet
Tandis que le Français, interprétant la
pensée de il. le duc de B'roqlie, se servait "des
avances du Journal des Débats pour détermi-
ner la droite à demeurer fidèle a la cause du
24 Mai, la Presse, reproduisant plutôt la pen-
sée de la présidence, indiquait au centre gau-
che à quelles conditions et sur quel terrain
un accord pouvait se faire.
D'autre part, le Français précisant la
question comme nous l'avons déjà fait
hier, estime que la discussion portera là-
la rentrée de l'Assemblée sur la manière
d'organiser les pouvoirs, de telle sorte e
qu'ils ne surviventpoint au maréchal. Ce
journal ajoute qu'on semble avoir renon-
cé dans l extrème droite à toute tenta-
tive de mettre un autre gouvernement^
la place de celui du maréchal.
.Lire dans la Vie parisienne un réci
émouvant de tempête, le Canot de l'ami-
ral. Lire aussi les notes sur les Améri-
cains, les Américaines et l'Amérique.
C'est une sorte de chant alterné sur les
• vices et les vertus du Nouveau-Monde,
un exposé assez impartial du pour et du
contre. Nous avons souvent parlé du
contre parlons un peu du pour il s'agit
de. l'étonnante décision qui est le. carac-
tère distinctif de l'Américain.
J'étais, il y a quelques années, dans une
petite ville maritime des Etats-Unis. La veille,
quelques bateaux avaient ri par un gros
temps faute de moyens de secours assez
prompts. On eh causait sur la jetée lorsqu un
Yankee, tout en mâchonnant son tabac de la
Virginie, propose, entre deux jets de salive
noirâtre, de fonder une société de sauvetage.
Il tire un carnet de sa poche et s'inscrit lui-
même pour cent mille francs. Le soir même,
la Société était organisée, les statuts rédigés;
l'or afflua en masse, et peu de temps après les
bateaux sauveteurs étaient lancés à la mer au
milieu des rudes hourras de la population.
Ceci n'est qu'un fait presque insignifiant, et je
ne l'aurais pas .relaté- s'il ne devait prouver
que, mémo dans les affaires d'utilité ou de
charité, les Américains apportent unoj déci-
sion énergique et prompte, qui est là force de
leur caractère et la base de leur prospérité.
L'Américain sait voyager, je parle de ce-
lui que ses affaires obligent à un grand dé-
placement. II ne so charge pas do bagages
inutiles son linge? il l'achètera au fur et
mesure de ses besoins. Quand ses bottes se-
ront usées, il emploiera le même système. Il
voyage sur des chemins de fer d'une étendue
énorme, la plupart établis sur une seule voie
et n'ayant qu'une seule classe. Les wagons
^ontiennont un grand nombre de personnes
et vous passez de l'un à l'autre sur une pas-
serelle qui les relie. On boit de l'eau fraîche, 1
on mange des pommes, le ticket au chapeau, 1
afin d'éviter la demande do l'employé qui, 1
ainsi, d'un coup d'œil, s'assure que vous êtes ]
en règle, et si, par hasard, vous ne l'êtes (
pas, on vous laissera tranquillement conti- i
nuer votre voyage, sans vous prendre pour <
un malfaiteur. J'ai vu un pauvre homme par-
tir do Saint-Louis, pour un trajet de plus de
quatre cents lieues, sans un sou dans sa
poche. Quand on lui demandait son billet, il i
se contentait de répondre « Appelé à Alba- c
ny, par dépêche télégraphique, je suis obligé t
de m'y rendre et je n'ai pas d'argent. AU
rigth! disait l'employé d'une voix gutturale,
et il passait, laissant le pauvre voyageur tran-
quille.
En somme, il est fort possible que
les voyageurs, forcés de voir vite, aient
été frappés spécialement par les étran-
getés qui sautent aux yeux et aient né-, 1
gligé la connaissance intime des choses, r
On sait que Mme de Metternich est à p
Paris en ce moment. On sera bien aise
sans doute de connaître, toujours d'après s
la Vie Parisienne, le costume de cette
grande dame qui fut la reine de la L
mode, n n
Augusto Marcade.
se tenait sur le pas de sa porte pour voir
quel était le personnage qui s'annonçait
avec tant de fracas ah Seigneur, mon
bon monsieur Est-ce ici que demeure
un jeune homme du nom de Philippe ?
Il nous a dit qu'il servait dans un grand
hôtel, chez des gens de la plus haute
considération, où qu'il y avait une veuve;
et une religieuse; mais je suis si trou-
blée de ce qui lui arrive, à ce pauvre
enfant, que j'en ai quasiment perdu la
mémoire et que je suis bien capable
d'être venue frapper où il ne fallait pas.
Tout en débitant ce chapelet, tante
Verduret était entrée dans la pièce où
était le suisse, et s'était laissée tomber
sur un fauteuil, comme une personne
qui n'en peut plus. Elle avait en même
temps sorti de sa poche un mouchoir à
carreaux avec lequel elle se barbouillait
consciencieusement la figure de tabac,
sous prétexte d'essuyer des larmes qui
devaient, pour la circonstance, couler de
ses yeux ridés et boursouflés.
Philippe ? un aide de cuisine, n'est-
ce pas? un brave petit garçon, bien re-
ligieux, mais qui n'est pas malin du
tout? interrogea le suisse, touché de la
douleur de cette pauvre femme.
Oui, monsieur, oui, c'est parfaite-
ment cela. Ah le pauvre garçon, sa mère
est à l'agonie Elle demande à le voir
avant de mourir, et voilà pourquoi, moi
qui suis sa voisine et sa vieille amie, je
suis vite accourue dans un fiacre, mon-
sieur dans un fiacre que j'ai payé de
mes deniers, tant la chose presse, et tant
je serais désespérée que le pauvre cher
enfant perdit sa mère sans avoir pu l'em-
brasser
C'est d'un bon cœur, madame, ce
que vous avez fait là, dit le suisse; aussi
ie vais prévenir immédiatement le jeune
homme, afin qu'il puisse partir avec
vous et qu'il ne perde pas un moment.
6G
Voici sa toilette. Une robe de barége noir à
plissés, mélangée de faille noire. La tunique
en faille noire relevée par un large ruban de
moire qui formait sur le côté de longs pans
flottants Cette taille ravissante vous savez
que certaines personnes ont do l'esprit jusque
dans le dos serrée dans une casaque à basf
que ronde et col.lante, en sicilienne noire cou-
verte de broderies et de soutache, avec petite
bande de fourrure sombre autour. Chapeau
de dentelle noire paré de plissés de crêpe lisse
une rose thé derrière au milieu d'un nid de
crêpe lisse et quelques boutons de rosés de-
vant. -̃ •
Autres détails de toilette exclusive-
ment dédiés aux dames. Les messieurs
ne doivent s'occuper de ces choses, que
plus tard. quand on leur présente la
facture.
Deux toilettes vraiment de printemps, cel-
les-là.: *̃♦*
L'une, une robe réséda, le devant tout
froncé en long et venant au-delà des hanches
se joindre à cinq'gros plis vert bronze, qui
font la traîne. Une aumonière -bronze, ainsi
quo le collet, les revers et les parements des,
manches sur un corsage réséda.
L'autre, un grand tablier de crêpe de Chine
à raies mates et claires, alternant. Sur les
raies transparentes, une broderie de jais allant
en serpentant; tout autour du tablier, un pe-
tit volant de faille noire et par-dessus, une
dentelle de jais un grand nœud de ceinture
attache le tablier par derrière sur un jupon à
volants plissés.
La mode est aux tabliers, même pour gran-
des soirées ils sont en «achemiro sur des ju-
pes de faille; c'est très drapant, très collant,
très dessinant. Ce que l!on veut, c'est de voir
la femme presque sans jupons, traînant après
elle sa robe comme un ornement.
C'est très joli, cette forme de tablier, mais
il ne faut pas l'exagérer ni le trop serrer, car
on ne peut plus s'asseoir que sur le bord d'un
fauteuil, ce qui est gênant pour soi et même
pour ceux qui vous regardent.
On s'emprisonne aussi les épaules dans une
petite écharpe qui croise sur là poitrine,
passe de chaque côté dans une boucle de
jais, et s'attache sur les hanches.
Jais blanc ou jais noir, on on mot partout.
f. m. ̃̃•̃ ̃ .•;•̃̃̃.
Injustices et Abus
PAUVRES ̃ PLAIDEURS •
Le Droit nous apprend que le 15 courant,
vers midi et demi, a l'audience de la 2° cham-
bre du tribunal civil de la Seine, et, après les
plaidoiries de deux affaires, aucun avocat n'é-
tant plus présent à la barre, le tribunal a pro-
cédé à un second appel des causes retenues
au début de l'audience, puis, en l'absence de
toute réponse, a rendu, après délibéré, httit
jugements supprimant un nombre égal d'af-
faires du rôle.
Chacun de ces jugements est ainsi motivé
« Attendu qu'aucun des avoués ni personne
pour eux ne s'est présenté à l'appel de la cause,
non plus qu'au' cours de l'audience, bien que
l'affaire vint une des premières au rôle des
plaidoiries •
» Vu les art. 29, 09 et 73 du décret du 30
mars 1808;
» Ordonne que ladite affaire sera retirée du
rôle;
» Dit qu'elle n'y sera rétablie que confor-
mément aux dispositions finales de l'art. 29
» Condamne les avsués conjointement aux
dépens dit présent jugement. »
Voilà donc seize plaideurs au moins, qui
attendaient probablement avec la plus vivo
impatience la solution de leur procès et qui
la voient remise à une époque ^indéterminée
Tout cela par la faute de leurs avoués qui
en seront quittes pour payer les frais insigni-
fiants d'un jugement formant fort pou de
rôles.
Le tribunal a; certes, frappé très légalement
les avoués déserteurs do leur cause, mais
il les a frappés, nous oserons le dire, pres-
qu'exclusivcment sur lo dos de leurs clients.
Or, le ministère de l'avoué étant forcé, ces
clients n'en pouvaient mais
Il est vrai qu'il leur reste la ressource de
poursuivre leurs avoués.
Au lieu d'un procès, ils en auront doux
Richo affaire
Il y a là dessous un abus grave, que tout
le monde connaît au Palais.
C'est que MM. les avoués sont depuis un
temps immémorial dans l'usage de confier
toutes leurs affaires à deux ou trois avocats,
leurs foudatairos, qui so trouvent dans l'im-
possibilité matérielle, eu égard au nombre de
chambres du tribunal do la Seine, d'être en
même temps à toutes, à moins d'avoir le don
d'ubiquité, co.qu'ils sont loin d'avoir prouvé,
Le remède ?
Nous ne le voyons pas.
Il y aurait, peut-être, un palliatif. Ce se-
rait que, désormais, chaque plaideur, au lieu
de donner à l'avoué une provision, en exigeât
une de lui.
̃ ».j
INFORMATIONS
Vingt-cinq naufragés du paquebot
l'Amérique sont arrivés de Brest hier
matin à quatre heures à la garé Mont-
parnasse.
On en attendait plusieurs autres hier
soir, à onze heures.
Un grand nombre.d'amis et de parents
les attendaient, prévenus par une affiche
que l'administration des chemins de >fer
Voulez-vous prendre quelque chose en
attendant, ajouta-t-il, plein dé commisé-
ration ? Vous paraissez bien émotionnée
et bien fatiguée ?
Ah monsieur, que vous êtes bon!
Je vous remercie mille fois, et j'accepte
la moindre des choses, rien que pour me
soutenir un peu, car depuis ce matin, je
suis debout auprès du lit de la malade et
je n'ai pas eu le temps de manger le
moindre petit morceau de n'importe
quoi.
Le suisse déboucha rapidement une
bouteille dé vin vieux, en versa un demi
verre et l'offrit à celle qu'il croyait1 être
une de ces honnêtes, pauvres et coura.
geuses femmes dontPhilippe lui avait si
souvent parlé comme étant les amies de
sa mère.1 Il reboucha ensuite soigneuse-
ment la bouteille et pria la bonne femme
de vouloir bien l'accepter pour arroser
son repas du Soir, présumant qu'elle au-
rait encore la charité de no pas aban-
donner la mère de l'aide de cuisine, tant
qu'elle aurait besoin de ses services.
Et, même morte, monsieur, et mê-
me morte, fit avec chaleur la commère,
je la veillerai, car elle n'a pas de plus
vieille connaissance que moi dans le
quartier.
Et la Verduret se remit à sangloter de
plus belle!
Philippe, averti, accourut aussitôt.
Sa mère à l'agonie, qui le voulait voir
avant de trépasser, cela lui parut telle-
ment louche, qu'il crut d'abord à quel-
que communication de Paterne, et, com-
me tout ce qui touchait au dépositaire
de son argent ne pouvait faire autre-
ment que le vivement intéresser, il ac-
courut en proie à une émotion qu'il n'a-
vait pas la peine de feindre.
Oh mon cher petit, s'écria la Ver.
duret en lui sautant au cou, elle t'appelle
à cor et à cris, ta pauvre brave mère.
de l'Ouest- avait fait placarder dans la
gare.
SUITE DE L'AFFAIRE MARKARIANTZ
Se rappele-t-on la femme Finsterer,
la bonne de Nazar-Àga, celle enfin par
qui Markariantz fit la connaissance de
Mlle X. dont il* briguait la main ? 1
Cette femme Finsterer, non-seulement
lui servait d'entremetteuse et de recé-
leuse, mais encore était la complice or-
dinaire de Markariantz.
M. Maçé, commissaire de police aux
délégations judiciaires et spécialement
chargé de l'affaire Markariantz, crut de-
voir la mettre en état d'arrestation. Elle
fut envoyée à Saint-Lazare, où elle tom-
ba malade, ce qui explique pourquoi son
affaire n'a pas encore été jugée.
Aujourd'hui, la femme Finsterer va
mieux, et l'on pense qu'elle pourra com-
paraître aux assises daus quinze jours,
pour vols par salariée et autres nom-
breux vols au préjudice de différentes
personnes.
La femme Duchâteau, dbntj'ai raconté
hier l'épouvantable crime, va être trans-
férée à l'hôpital de la'Salpêtrière, où M.
le docteur Legrand du Saulle va exami-
ner son état mental.- Nous ferons con-
naître, demain, le résultat de cet exa-
men.
La femme Duchâteau n'est.pas, comme
on pourrait le croire, le moins du monde
exaltée depuis son forfait. Elle se montre
très calme, au contraire, et répète qu'elle
a bien fait en envoyant ses deux enfants
rejoindre au ciel son mari et sonpremier
fils.
Elle veut les rejoindre à son tour, et
persiste dans l'idée de se laisser mourir
de faim.. Depuis son arrestation elle a
refusé toute nourriture elle boit à cha-
que instant, d'un seul trait, de grands
serres d'eau, comme pour calmer une
fièvre violente, fièvre sans symptômes
extérieurs.
L'enterrement des deux petites victi-
mes a eu lieu hier; presque toute la po-
pulation de Montreuil les a accompagnées
au cimetière. Le pauvre grand père avait
voulu conduire le deuil, et c'était grand
pitié que de le voir marcher avec peine,
chancelant et sanglotant.
La grand'mère, brisée par la douleur,
était restée à la maison. • ̃̃
Emile Faure.
Une importante arrestation.
La police de sûreté vient de cueillir
un sieur Berrux, qui, sous la Commune,
était lieutenant des vengeurs de Flou-
rens.
Sous le siége, Berrux faisait partie du
174° bataillon commandé par Flourens,
qui envahit l'Hôtel de Ville, au 31 octo-
bro Berrux, qui était alors sergent, se
précipita, avec une dizaine de gredins
de son bataillon, dans les appartements
occupes jadis par M. Haussmann, et là,
crottés, débraillés, embaumant le vin et
le cervelas, ils saccagèrent tous les meu-
bles.
Berrux se coucha tout habillé dans le
lit du baron Haussmann, et au boul, '1,
de dix minutes il ronflait à poings fer-
més.
Son sommeil ne tarda pas à être désa-
gréablement troublé par les gardes na-
tionaux de l'ordre qui le réveillèrent à
coups de crosse et le firent prisonnier.
La Commune avait récompensé la con-
duite de Berrux en le nommant lieute-
nant.
Il a été arrêté sur le boulevard de Bel-
leville et écroué au dépôt.
Parmi les nombreux suicides dont on
nous apporte la liste chaque jour, il en
est qui nous émeuvent tout particulière-
ment ceux des enfants et des vieil-
lards.
Quitter la vie quand on a subi toutes
les luttes, quand on a connu tous les
plaisirs, toutes les peines, quand rien ne
devrait plus vous y étonner, vous y af-
fecter, nous semble incompréhensible.
Et pourtant, rien de plus fréquent que
les suicides de vieillards.
Hier encore, à onze heures du matin,
les concierges de la maison portant le
n° 12, rue Saint-Georges, ont trouvé
pendue au-dessus de son lit, dans l'ap-
partement qu'elle occupait une de leurs
locataires, Mme veuve Mallet, âgée de
soixante ans.
La mort remontait à trois jour* f
Mme Mallet était dans une situation
aisée, et rien ne pouvait faire supposer
une pareille détermination. On croit
pourtant pouvoir attribuer ce suicide à
des chagrins de famille.
ENCORE UN MYSTÈRE
Nous avonsparlé, ilyaquelquesjburs,
do la mort mystérieuse d*un jeune
homme, d'un extérieur très distingué,
Et tandis qu'elle l'embrassait avec dé-
sespoir elle lui glissait en même temps
à l'oreille
Beaucousin et sa belle amie t'at-
tendent à Asnières. IL y a pour toi un
bon coup à faire. Viens vite.
-J'ai une voiture à la porte, dit-elle
ensuite à haute voix. Nous allons être
tout de suite rendus auprès de la chère
femme!'
Je cours demander la permission à
M. Benoist, fit alors le jeune homme, et,'
en même temps, le prier de me donner
quelque argent d'avance sur mon mois,
au cas où on en aurait besoin.
Il traversa la cour en courant et arriva
à la cuisine, le visage bouleversé, les
yeux baignés de larmes, la voix étouffée
par les sanglots.
M. Benoist fut profondément ému de
la douleur de son protégé, quand il en
connut la cause. Il s'empressa de bourrer
un panier de vins vieux, de viandes
froides, de gâteaux, de confitures, de
café, de thé, de sucre, de rhum, à l'in-
tention de la malade et des personnes
amies qui la veillaient et soignaient.
Il lui donna aussi vingt-cinq francs, à
compte sur ses gages, et ce fut ainsi
lesté que Bel-Amour s'en vint rejoindre
la Verduret, déjà remontée en voiture et
l'attendant.
De qui est l'invention de la mère à
l'agonie, demanda Philippe à la vieille
femme, sitôt qu'ils furent en route ?
De moi seule, dit la Verduret avec
un triomphant sourire
Eh, bien! la Verduret, pour ton
heureuse invention et pour ta peine, je
vais te donner une bouteille dé rhum, et
du fameux, encore Tu as très bien ar-
rangé cette affaire et elle me sera utile
de plus d'une façon. Bien sûr que sœur
Monique, à qui je vais raconter mon
malheur, pas plus tard que demain ma-
qui a été retire de la Seine au-dessus du
pont de l'Aima.- Nous avons dit qu'un
coup de feu, paraissant avoir été tiré de
haut en bas, avait du ci user la mort
avant l'immersion.
L'auptosie a prouvé la justesse de nos
renseignements en effet, la balle entrée
par le haut de la région temporale gau-
che, a été trouvée derrière l'os de l'o-
reille' droite, contre lequel elle s'est
aplatie.
Il y a donc de grandes présomptions
pour que cette mort soit le résultat d'un
crime.
Mais ce n'est là qu'une partie du mys-
tère. Voici qui devient plus curieux.
En tenant compte du nom de Ronn,
inscrit sur les cartes trouvées sur le dé-
funt, il y a tout lieu de supposer qu'il est
Anglais. Or, sa mort se trouve préci-
sément remonter au jour précis de la
disparition d'une jeune Anglaise de dis-
tinction, miss L. dont, par un motif de
discrétion bien compréhensible nous
devons taire momentanément le nom.
Cette jeune fille était en France depuis
quelque temps,. et devait quitter Paris ce
jour-là pour retourner en Angleterre. Le
jour du départ, elle disparut et depuis
ce moment sa famille la recherche en
vain.
Est-ce une simple coïncidence?.
N'est-il pas à craindre plutôt qu'entre
les deux jeunes gens existât une liaison
fatale, un amour contrarié, et qu'en pré-
sence d'une séparation forcée, les deux
amoureux se soient résolus a un sui-
cide ? C'est une question que nous n'o-
sons résoudre et nous préferons espérer
que les recherches de la famille L.
aboutiront à un meilleur résultat.
Vous savez, il ne faut pas rire .de l'his-
toire que je vais vous conter ci-dessous,
vu qu'au fond c'est extrêmement drama-
tique. Avant de tourner une situation au
ridicule, il faut alleraufond des choses.
Aller au fond des choses C'est préci-
sément ce qu'a fait l'héroïne de ma triste
anecdote, Mme Mouchy, laquelle de-
meure 14, rue de la Gaîte bien que con-
cierge, Mme Mouchy est un peu rêveuse,
et elle songeait hier tout debout. A quoi ?
Je l'ignore. Probablement son esprit s'é-
garait dans le pays du bleu, où les pro-
priétaires tirent le cordon aux portiers.
Tout à coup. floue!
Ceci exprime le désastre de Mme Mou-
chy, qui venait de poser le pied dans un
trou, et de tomber dans le vide.
Quand je dis dans le vide, je m'ex-
prime mal. Ce n'était pas le vide qu'il y
avait dans le trou. (Jetait autre chose.
Le ? travailleurs nocturnes avaient accom-
pli là leur œuvre ténébreuse la nuit pré-
cédente, et la rêveuse Mme Mouchy ne
s'était pas aperçue qu'ils avaient oublié
de reboucher la fosse.
On avait entendu floue! Ce floue fut
suivi de clapotements, puis d'un grand
cri. C'était Mme Mouchy qui appelait au
secours. On l'a retirée 'de là très contu-
sionnée, et dans quel état!
Encore une qui ne rêvera plus!
J'ai reçu hier, au Figaro, la visite de
l'homme à la fourchette, M. L* Il sem-
blait parfaitement se porter.
J'ai causé un quart d'heure avec lui, et
il m'a montré la position exacte que la
fourchette occupe en ce moment dans
son côté gauche. Elle ne le fait pas souf-
frir cependant, depuis deux jours, il a
des coliques intermittentes et un peu de
fièvre.
Pouvez-vous manger facilement?
lui ai-je demandé.
Parfaitement. Seulement, je man-
ge peu à la fois, et je fais plusieurs repas
par jour, chacun d'eux très léger.
Il m'a dit ensuite qu'il avait repris son
travail accoutumé, et que son plus grand
désir était de voir son affaire oubliee. Je
lui ai presque promis de ne plus parler
de lui à partir d'aujourd'hui.
Il n'est pas absolument impossible
que je manque à ma parole.
J'ai trouvé hier à mon adresse, dans
la boîte du journal, l'aphorisme suii
vant:
« II y a une grande ressemblance entre
les enfants et les vieilles chemises. Pour
les deux, on a besoin de maître d'école, »
Inutile de vous dire, n'est-ce pas, que
je n'attribue cela ni à Pascal, ni à Malo-
branche, ni même à La Rochefoucault ?
Gaston Vassy.
Les obsèques de M. Eugène- Lavenant,
maire d'Arcueil, décédé hier, auront lieu
lundi 20 courant à onze heures à l'église
d'Arcueil.
La famille prie ceux de ses parents et
amis qui n'auraient pas reçu de lettre, de
considérer le présent avis comme invita-
tion. g. v.
tin, me fera donner par la chanoinesse
et par la marquise de quoi subvenir aux
frais d'enterrement de la pauvre mère
que je vais avoir la douleur de perdre
cette nuit. Sans compter qu'il va falloir
m'habiller de deuil, de la tète aux pieds,
comme un fils profondément désolé, et
qu'on ne laissera pas cette charge à un
malheureux de ma sorte. Cette excel-
lente sœur Monique ne le permettrait
certainement pas? D'autre part, puis-
que tu as décidé dans ta sagesse que ma
mère mourait cette, nuit, c'est bien le
moins que ta nièce me donne quelqu'ar-
gent pour me consoler de cette irrépara-
le perte
Gomme ça, tu vas recevoir de toutes
mains, dit la Verduret avec admiration?
C'est pas bête, cela, sais- tu ?
C'est le seul moyen que rien ne
vous échappe, ma chère madame Ver-
duret, répondit sentencieusement Phi-
lippe, en sortant de son panier la bou-
teille promise et la donnant à la Verdu-
ret, qui s'empressa de la fourrer dans sa
poche.
̃–• Ça doit être joliment du bon, ce li-
quide-là, reprit l'ivrognesse, car des
gens comme tes patrons, ça ne doit boire
que des qualités supérieures. Ça me
remettra ma pauvre vieille estomac,
ajouta-t-elle aussi, tu vois, je la cache,
ma bouteille, parce que si ces galvau-
deux de Beaucousin et de Juliette met-
taient la main dessus, ils se feraient un
punch, rien que pour s'amuser à le voir
flamber, et cela ne me profiterait pas.-
M'est avis aussi que tu ne ferais pas mal
de laisser ton panier chez quelqu'un
avant dé les rejoindre. Ces gens-là,
vois-tUj seraient capables de te faire de
mauvaises blagues, comme de casser tes
bouteilles sur ton sucre, par exemple.
Depuis que Juliette s'est remise avec
Les obsèques de Mademoiselle Marie dé'
Werbrouck, décédée to 17 avril 1874 à l'àge
de 32 ans, en son domicile rue Saint-Georges.
5, auront lieu le lundi 20 courant à midi très
précis à l'église Notre-Dàme-de-Lorette.
Sa famille prie ses nombreux amis qui n'au-
raient pas reçu de' lettre do faire-part de' con-
sidérer le présent, avis comme une invitation..
y A rnopos DE
LA BELLE AU BOIS DORMANT
Perrault,, qui fut de l'Académie fran-
çaise, a écrit un conte ravissant intitulé
la le au Bois dormant.
D'un coup de baguette magique, une
fée de passage plonge dans un sommeil
séculaire une jeune châtelaine, ses vas-
saux, ses servantes, ses écuyers et ses
pages.
.Perrault né nous dit pas si ce somme
un peu prolongé fut un plaisir pour la
belle qui le subit; et si les rêvés joyeux
visitèrent sa couche princière.
Le sommeil est comme ces'vieilles
bouteilles poudreuses, dont il faut sa-
vourer- le contenu à petits coups. et en y
revenant souvent.
Cette fable de Perrault m'est venue à
l'esprit en songeant aux progrès de ce
siècle, r v
C'est à croire que la fée a laissé tbm-
ber sa baguette dans le laboratoire da
nos savants modernes, et que l'un d'eux
plus favorisé, plus heureux, plus patient,
a su trouver au fond du creuset le secret
du sommeil.
Le palais de la Belle au Bois dèriïïmt
n'est plus une fable, une fiction. <
La baguette de l'enchanteresse est un
simple flacon; une ou deux cuillerées
du liquide suffisent pour opérer le pro-
dige..
C'est lA Simn lïp. CKlnrnl 'iJa Vrillât
L'effet est magique, le résultat mer.
i veilleux, et cependant le prodige est
tout naturel: il émane de la science.
Qui ne s'est écrié, en sa vie, à l'heure
s ou les paupières alourdies se ferment,
̃ où le front se courbe, où la' pensée s'ar-
• rôte
Ah que c'est bon de dormir
Quelle félicité immense il y a dans
cette exclamation, après les fatigues
d'une journée de labeur ou les lassitudes
d'une journée de plaisirs
Oh insomnie de la fièvre, de la mala-
die, du travail, qui pourra te vaincre ?
Lorsque la douleur, la maladie,- ou un
malaise passager même, nous tient
éveillé sur notre couche, lorsque l'insom.
nie causée par la fièvre, l'inquiétude mo-
rale ou le trouble physique ont chassé de
notre chevet le sommeil doux et tran-
quille, avec quelle ivresse on accueille
les symptômes do son retour.
On l'appelle, on le prie; on le supplie
on essaye de se tromper soi-même en
fermant les yeux.
Mais la pensée, en éveil dans le cer-
veau fatigué, s'agite et se démène éper-
due, ajoutant ses excitations nouvelles à
celles de la fièvre;
Ah! qu'il ferait bon dormir! •
Eh bien comme Prométhée osa bra-
ver un jour le feu du ciel, la Science mo-
derne a dérobé au sommeil son secret.
Depuis longtemps, en thérapeutique,
on possède des agents, des antî-spasmo-
diques qui affaiblissent ou éteignent la
sensibilité et suppriment.la douleur.
Le pavot, l'opium, la belladone, la
morphine, etc., employés suivant les af-
fections, sont les moyens tout naturels
de livrer le malade aux bons soins de
Morphée.
Mais souvent Morphée, à qui on a
forcé la main, se venge en envoyant au
malade des rêves enfiévrés, des halluci.
nations baroques, des lourdeurs ner-
veuses.
Aujourd'hui le problème est résolu..
Morphée est aux ordres de la science.
« On a mis le sommeil en flacons »,
comme l'a si ingénieusement dit un de
nos confrères.
Et rien n'est plus juste.
Après l'absorption de la dose' 'voulue
c'est un singulier phénomène que de
sentir le sommeil S'étendre doucement,
en quelque sorte comme une gaze légère,
sur les yeux appesantis et sur le cerveau
fatigué.
La respiration est régulière, le som-
meil est venu, sans troubles, sans ma-
laise, sans rêves.
C'est la nature qui a laissé surprendre
son secret, car au réveil, ni lourdeur, ni
fatigue, ni douleur d'aucune sorte n'ac-
cusent le bienfaisant Chloral.
Le malade, au contraire, a, dans ce
sommeil, réparé ses forces, retrouvé- 1%
courage qui allait l'abandonner.
Oui, le soulagement apporté par ce re-
pos favorise admirablement la guérison
générale.
Et voilà comment le proverbe popu-
laire a raison •-
Le bien vient en dormant." <
TlMOTHÉE TlUMM.
Beaucousin, elle devient canaille que
c'en est dégoûtant
Merci du conseil, répondit Philippe,
mais c'était 'mon intention de faire
comme vous me le dites. Je suis un gar.
çon d'ordre, moi, et je n'aime point à
exposer ce qui vaut de rargent,.surtout
quand cela m'appartient.
Philippe, en effet, remit, en descen-,
dant de voiture, son panier au comptoir,
en priant qu'on voulut bien le lui gar-
der jusqu'à son départ. -•
Il monta ensuite, avec la Verduret,
auprès de ceux qui l'avaient fait appe-
ler.
Tiens! te voilà donc tout'-de'mèmé',
mauvais coucheur, lui dit Beaucousin;
je n'osais pas espérer ton aimable visite.
Pourtant, quant on m'envoie une
estafette comme la Verduret et que l'on
fait appel à mon amour filial, il n'est
guère possible de résister, fit Philippe.
Quel amour filial? demanda Beau-
cousin, et de quoi diable nous parles.
tu là!
Ca nous regarde nous deux, la Ver-
duret et moi, et tu n'as pas besoin d'en
savoir plus long qu'on ne t'en dit sur ce
sujet, répondit dédaigneusement L'aide
de cuisine. ..•̃•.
Ne perdons pas de temps en paroles
inutiles, s'empressa de dire Juliette, qui
ne voulait pas voir les choses s'enveni-
mer entre Philippe et Beaucousin. J'ai
besoin de toi, Bel-Amour, et tu sais que
je suis femme à payer largement les ser-
vices que l'on me rend.
BDÉ D'AGHONNE.
(La suite à demain.)
TÉLÉGRAMMES & CORRESPONDANCES
Nantes, 17 avril. Le conseil général eu
aujourd'hui une séance très orageuse qui
avait attiré un nombreux public. Il s'agissait
de la validation de l'élection de M. "de la
Brosse, nommé tout récemment conseiller
général dans le canton de la Chapelle-sur-
Erdre. •
Le rapport, tout en concluant à la valida-
tion de l'élection, contenait l'expression d'un
blâme contre le changement d'un maire du
canton. Deux des membres radicaux du con-
seil, M. LaisantetM. Rousse, le premier capi-
taine d'artillerie, le second juge au tribunal,
ont vivement attaqué le préfet, en l'accusant
d'intervention électorale et en insistant dans
le sens du blâme proposé par le rapport.
M. Lavedan s'est cloquemment défendu. Il
exposé les faits de la manière la plus victo-
rieuse, et il a réclamé avec unû grande éner-
gie, non seulement la validation de l'élection,
mais encore la suppression de toute formule
de blâme ou de regret dans le rapport. Le
succès de l'honorable fonctionnaire a été si
vif qu'au scrutin les membres do l'opposition
n'ont pas voté, et satisfaction complète a été
"donnée au préfet par 36 votants sur M mem-
bres présents.
Brest, 17 avril. Le conseil muni-
cipal et la chambre de commerce se sont réu-
nis hier, soir pour aviser aux moyens de ve-
nir en aide aux naufragés de V Amérique. Une
souscription est organisée en ville.
Le capitaine Roussan est parti hier pour
Paris par le train-poste de deux .heures du
soir.
Les communards déportés ou inter-
nés sont en train de faire des leurs
Un cotre, affecté au service colonial de la
Nouvelle-Calédonie, a été, il y a déjà quelque
temps, enlevé par des déportés, qui s y sont
installés et ont piqué au large.
On n'a plus jamais entendu parler ni du
côtre, ni de son singulier équipage.
Deux- autres déportés embarquent sur le
navire do l'Etat, le Calvados; Rochefort et
cinq de ses amis s'enfuient. Enfin, à Brest,
plusieurs internés au dépôt do Quélern, vien-
nent de tromper la surveillance des gardiens
et de prendre la clef des champs. ̃
Tout cela est fort triste.
Bastia, 18 avril, midi 15 m. La
frégate Cêrès est arrivée hier, ayant à bord le
40° de ligne qui doit tenir garnison ici. La
Cérès repart aujourd'hui, avec le 61° de ligne
qui doit rester à Toulon.
Fort peu de nouvelles du théâtre de la
guerre en Espagne. Le mauvais temps, disent
les dépêches, a été cause delà longue suspen-
sion des hostilités.
D'autre, part on annonce qu'elles repren-
dront mercredi ou jeudi.
̃- «.
PARIS AU JOUR LE JOUR
Le patriotisme, la dignité dans la dé-
faite, font un devoir à la presse française
de ne'point longuement insister sur le
nouveau discours de M. le feld-maré-
chal de Moltke, discours qui a certaine-
ment décidé le Reichstag allemand à
voter la loi militaire. Comme la pre-
mière fois, le grand tacticien a agité le
spectre français devant ses concitoyens.
Un point particulièrement mérite d'être
mis en lumière.
M. de Moltke félicite l'armée alleman-
de de n'avoir pas prolongé de huit ou
quinze jours le siège de Paris, ce qui lui
eût permis de faire mourir de faim deux
millions d'hommes, de femmes, de vieil-
lards et d'enfants. Cette constatation
autorise M. de Moltke à conclure que
l'Allemagne n'a pas abusé de sa « force
dans cette guerre ».
Il est impossible de ne pas faire remar-
quer qufîceschoses atroces à froid sont di-
tes en plein dix-neuvième siècle, au
moment où le progrès, au dire des ini-
tiés, paraît avoir atteint son apogée.
«% Avant-hier était cité à compa-
raître devant le tribudal prussien sié-
geant à Saverne, Mgr Joseph Foulon,
evêque de Nancy et de Toul. L'autorité
prussienne lui demandait compte d'un
mandement du 26 juillet 1873, préten-
dant que ce prélat relève de la juridic-
tion de l'empire allemand pour la por-
tion de territoire dont la France a con-
senti la cession. Mgr de Nancy. répondait
que le traité de Francfort n'a pu modi-
lier les dispositions contenues dans le
Concordat, et il a fait défaut. On sera pro-
bablement curieux de connaître les pas-
sages du mandement incriminé qui ont
motivé les susceptibilités de la justice
allemande.
« Aujourd'hui que les armées étrangères
ont enfin quitté le territoire de ce diocèse et
qu'elles s'apprêtent à évacuer les derniers
postes qu'elles retiennent en France, il est
permis, non point sans doute de se livrer à la
joie, souvenir de la Patrie mutilée et de
l'Eglise eu deuil nous interdira longtemps un
sentiment de cette nature, mais du moins
d'accomplir enfin les solennités religieuses
différées jusqu'à ce jour et de porter à Sion
nos douleurs, nos vœux et nos indomptables
espérances. »
Feuilleton du FIGARO du 20 Avril
LES NUITS SANGLANTES
La Verduret, en ce moment, était lé-
gèrement allumée par le petit vin blanc,
et se sentait en verve de déployer tous
ses moyens.
Allons-y gaiement, fit-elle
Verduret, pas de bêtises, tusais! re-
commanda Juliette; c'est sérieux
Sois tranquille, ma chère nièce
Quand la Verduret se fera rouler par
quelqu'un, c'est que ce personnage se
sera levé plus matin qu'elle.
S'agit pas de se lever matin, Ver-.
duret.
Faut arriver à l'heure, n'est-ce pas?
Eh bien, tu vas voir si je sais travailler!- !̃
Je vais à l'hôtel de ta sœur. abhorrée,
je vais y demander poliment Philippe,
sous un prétexte qui me passera dans la
cervelle pendant le chemin, et qui arri-
vera en maturité au moment où je dé-
barquerai rue de Seine.
La Verduret partit aussitôt. Elle prit
le chemin de fer, et, arrivée à la gare
Saint-Lazare, elle monta dans une voi-
ture, qui la conduisit, en moins d'un
quart d'heure, devant l'hôtel Gharvallôn.
Elle souleva le heurtoir de la porte co-
chère et le laissa retomber bruyamment,
après s'être composé un visage expri-
mant la plus profonde affliction.
Ah! mon Dieu! ah! mon Dieu! gôi-
gnit-elle, en s'adressant au suisse qui
« Et quel temps plus prospère pour- de-
mander a Dieu ses grâces après une guerre
formidable qui a désolé notre chèro Lorraine
et une paix désastreuse qui l'a mutilée au
lendemain du. départ des soldats étrangers
qui foulaient depuis trois ans notre sol, qu'il
sera à propos de mêler aux chants de la déli-
vrance les prières du repentir et de se pros-
terner dans la douleur, afin de se relever dans
l'espérance! A côté des bannières de Nancy,
marcheront, douloureux souvenir, celles de
nos deux sœurs, Metz et Strasbourg. »
En terminant, le prélat engageait -ses
diocésains à prier pour l'Eglise et pour
la Patrie.
Pour la Patrie, afin que ramenée à Dieu par
l'excès même «de ses malheurs, elle trouve
dans l'amertume de ses humiliations un aver-
tissement à ne pas tomber dans les fautes qui
les lui ont values pour la Patrie, afin qu'elle.
mérite de voir bientôt se lever sur elle des
jours meilleurs, et que les revendications
qu'elle désire, elle se les assure d'abord par
sa foi pour la Patrie, afin que les cruelles, sé-
̃ parafions que lui a imposées la guerre ne,
soient pas sans espoir, et que des sommets de
Sion l'horizon ne soit pas à jamais borné par
une frontière.
On voit qu'il était difficile d'allier plus
de modération à une plus grande éleva-
tion de langage.
»% La petite note de V Agence Havas
que nous avons publiée hier suscite un
débat assez curieux.
Paris-Journal avait dit que cette noté
visait la Gazette de France. Les journaux
légitimistes prétendent au contraire
qu'elle s'adresse tant au Français qu'à la
Presse. Ce dernier journal avait dit en
effet
Tandis que le Français, interprétant la
pensée de il. le duc de B'roqlie, se servait "des
avances du Journal des Débats pour détermi-
ner la droite à demeurer fidèle a la cause du
24 Mai, la Presse, reproduisant plutôt la pen-
sée de la présidence, indiquait au centre gau-
che à quelles conditions et sur quel terrain
un accord pouvait se faire.
D'autre part, le Français précisant la
question comme nous l'avons déjà fait
hier, estime que la discussion portera là-
la rentrée de l'Assemblée sur la manière
d'organiser les pouvoirs, de telle sorte e
qu'ils ne surviventpoint au maréchal. Ce
journal ajoute qu'on semble avoir renon-
cé dans l extrème droite à toute tenta-
tive de mettre un autre gouvernement^
la place de celui du maréchal.
.Lire dans la Vie parisienne un réci
émouvant de tempête, le Canot de l'ami-
ral. Lire aussi les notes sur les Améri-
cains, les Américaines et l'Amérique.
C'est une sorte de chant alterné sur les
• vices et les vertus du Nouveau-Monde,
un exposé assez impartial du pour et du
contre. Nous avons souvent parlé du
contre parlons un peu du pour il s'agit
de. l'étonnante décision qui est le. carac-
tère distinctif de l'Américain.
J'étais, il y a quelques années, dans une
petite ville maritime des Etats-Unis. La veille,
quelques bateaux avaient ri par un gros
temps faute de moyens de secours assez
prompts. On eh causait sur la jetée lorsqu un
Yankee, tout en mâchonnant son tabac de la
Virginie, propose, entre deux jets de salive
noirâtre, de fonder une société de sauvetage.
Il tire un carnet de sa poche et s'inscrit lui-
même pour cent mille francs. Le soir même,
la Société était organisée, les statuts rédigés;
l'or afflua en masse, et peu de temps après les
bateaux sauveteurs étaient lancés à la mer au
milieu des rudes hourras de la population.
Ceci n'est qu'un fait presque insignifiant, et je
ne l'aurais pas .relaté- s'il ne devait prouver
que, mémo dans les affaires d'utilité ou de
charité, les Américains apportent unoj déci-
sion énergique et prompte, qui est là force de
leur caractère et la base de leur prospérité.
L'Américain sait voyager, je parle de ce-
lui que ses affaires obligent à un grand dé-
placement. II ne so charge pas do bagages
inutiles son linge? il l'achètera au fur et
mesure de ses besoins. Quand ses bottes se-
ront usées, il emploiera le même système. Il
voyage sur des chemins de fer d'une étendue
énorme, la plupart établis sur une seule voie
et n'ayant qu'une seule classe. Les wagons
^ontiennont un grand nombre de personnes
et vous passez de l'un à l'autre sur une pas-
serelle qui les relie. On boit de l'eau fraîche, 1
on mange des pommes, le ticket au chapeau, 1
afin d'éviter la demande do l'employé qui, 1
ainsi, d'un coup d'œil, s'assure que vous êtes ]
en règle, et si, par hasard, vous ne l'êtes (
pas, on vous laissera tranquillement conti- i
nuer votre voyage, sans vous prendre pour <
un malfaiteur. J'ai vu un pauvre homme par-
tir do Saint-Louis, pour un trajet de plus de
quatre cents lieues, sans un sou dans sa
poche. Quand on lui demandait son billet, il i
se contentait de répondre « Appelé à Alba- c
ny, par dépêche télégraphique, je suis obligé t
de m'y rendre et je n'ai pas d'argent. AU
rigth! disait l'employé d'une voix gutturale,
et il passait, laissant le pauvre voyageur tran-
quille.
En somme, il est fort possible que
les voyageurs, forcés de voir vite, aient
été frappés spécialement par les étran-
getés qui sautent aux yeux et aient né-, 1
gligé la connaissance intime des choses, r
On sait que Mme de Metternich est à p
Paris en ce moment. On sera bien aise
sans doute de connaître, toujours d'après s
la Vie Parisienne, le costume de cette
grande dame qui fut la reine de la L
mode, n n
Augusto Marcade.
se tenait sur le pas de sa porte pour voir
quel était le personnage qui s'annonçait
avec tant de fracas ah Seigneur, mon
bon monsieur Est-ce ici que demeure
un jeune homme du nom de Philippe ?
Il nous a dit qu'il servait dans un grand
hôtel, chez des gens de la plus haute
considération, où qu'il y avait une veuve;
et une religieuse; mais je suis si trou-
blée de ce qui lui arrive, à ce pauvre
enfant, que j'en ai quasiment perdu la
mémoire et que je suis bien capable
d'être venue frapper où il ne fallait pas.
Tout en débitant ce chapelet, tante
Verduret était entrée dans la pièce où
était le suisse, et s'était laissée tomber
sur un fauteuil, comme une personne
qui n'en peut plus. Elle avait en même
temps sorti de sa poche un mouchoir à
carreaux avec lequel elle se barbouillait
consciencieusement la figure de tabac,
sous prétexte d'essuyer des larmes qui
devaient, pour la circonstance, couler de
ses yeux ridés et boursouflés.
Philippe ? un aide de cuisine, n'est-
ce pas? un brave petit garçon, bien re-
ligieux, mais qui n'est pas malin du
tout? interrogea le suisse, touché de la
douleur de cette pauvre femme.
Oui, monsieur, oui, c'est parfaite-
ment cela. Ah le pauvre garçon, sa mère
est à l'agonie Elle demande à le voir
avant de mourir, et voilà pourquoi, moi
qui suis sa voisine et sa vieille amie, je
suis vite accourue dans un fiacre, mon-
sieur dans un fiacre que j'ai payé de
mes deniers, tant la chose presse, et tant
je serais désespérée que le pauvre cher
enfant perdit sa mère sans avoir pu l'em-
brasser
C'est d'un bon cœur, madame, ce
que vous avez fait là, dit le suisse; aussi
ie vais prévenir immédiatement le jeune
homme, afin qu'il puisse partir avec
vous et qu'il ne perde pas un moment.
6G
Voici sa toilette. Une robe de barége noir à
plissés, mélangée de faille noire. La tunique
en faille noire relevée par un large ruban de
moire qui formait sur le côté de longs pans
flottants Cette taille ravissante vous savez
que certaines personnes ont do l'esprit jusque
dans le dos serrée dans une casaque à basf
que ronde et col.lante, en sicilienne noire cou-
verte de broderies et de soutache, avec petite
bande de fourrure sombre autour. Chapeau
de dentelle noire paré de plissés de crêpe lisse
une rose thé derrière au milieu d'un nid de
crêpe lisse et quelques boutons de rosés de-
vant. -̃ •
Autres détails de toilette exclusive-
ment dédiés aux dames. Les messieurs
ne doivent s'occuper de ces choses, que
plus tard. quand on leur présente la
facture.
Deux toilettes vraiment de printemps, cel-
les-là.: *̃♦*
L'une, une robe réséda, le devant tout
froncé en long et venant au-delà des hanches
se joindre à cinq'gros plis vert bronze, qui
font la traîne. Une aumonière -bronze, ainsi
quo le collet, les revers et les parements des,
manches sur un corsage réséda.
L'autre, un grand tablier de crêpe de Chine
à raies mates et claires, alternant. Sur les
raies transparentes, une broderie de jais allant
en serpentant; tout autour du tablier, un pe-
tit volant de faille noire et par-dessus, une
dentelle de jais un grand nœud de ceinture
attache le tablier par derrière sur un jupon à
volants plissés.
La mode est aux tabliers, même pour gran-
des soirées ils sont en «achemiro sur des ju-
pes de faille; c'est très drapant, très collant,
très dessinant. Ce que l!on veut, c'est de voir
la femme presque sans jupons, traînant après
elle sa robe comme un ornement.
C'est très joli, cette forme de tablier, mais
il ne faut pas l'exagérer ni le trop serrer, car
on ne peut plus s'asseoir que sur le bord d'un
fauteuil, ce qui est gênant pour soi et même
pour ceux qui vous regardent.
On s'emprisonne aussi les épaules dans une
petite écharpe qui croise sur là poitrine,
passe de chaque côté dans une boucle de
jais, et s'attache sur les hanches.
Jais blanc ou jais noir, on on mot partout.
f. m. ̃̃•̃ ̃ .•;•̃̃̃.
Injustices et Abus
PAUVRES ̃ PLAIDEURS •
Le Droit nous apprend que le 15 courant,
vers midi et demi, a l'audience de la 2° cham-
bre du tribunal civil de la Seine, et, après les
plaidoiries de deux affaires, aucun avocat n'é-
tant plus présent à la barre, le tribunal a pro-
cédé à un second appel des causes retenues
au début de l'audience, puis, en l'absence de
toute réponse, a rendu, après délibéré, httit
jugements supprimant un nombre égal d'af-
faires du rôle.
Chacun de ces jugements est ainsi motivé
« Attendu qu'aucun des avoués ni personne
pour eux ne s'est présenté à l'appel de la cause,
non plus qu'au' cours de l'audience, bien que
l'affaire vint une des premières au rôle des
plaidoiries •
» Vu les art. 29, 09 et 73 du décret du 30
mars 1808;
» Ordonne que ladite affaire sera retirée du
rôle;
» Dit qu'elle n'y sera rétablie que confor-
mément aux dispositions finales de l'art. 29
» Condamne les avsués conjointement aux
dépens dit présent jugement. »
Voilà donc seize plaideurs au moins, qui
attendaient probablement avec la plus vivo
impatience la solution de leur procès et qui
la voient remise à une époque ^indéterminée
Tout cela par la faute de leurs avoués qui
en seront quittes pour payer les frais insigni-
fiants d'un jugement formant fort pou de
rôles.
Le tribunal a; certes, frappé très légalement
les avoués déserteurs do leur cause, mais
il les a frappés, nous oserons le dire, pres-
qu'exclusivcment sur lo dos de leurs clients.
Or, le ministère de l'avoué étant forcé, ces
clients n'en pouvaient mais
Il est vrai qu'il leur reste la ressource de
poursuivre leurs avoués.
Au lieu d'un procès, ils en auront doux
Richo affaire
Il y a là dessous un abus grave, que tout
le monde connaît au Palais.
C'est que MM. les avoués sont depuis un
temps immémorial dans l'usage de confier
toutes leurs affaires à deux ou trois avocats,
leurs foudatairos, qui so trouvent dans l'im-
possibilité matérielle, eu égard au nombre de
chambres du tribunal do la Seine, d'être en
même temps à toutes, à moins d'avoir le don
d'ubiquité, co.qu'ils sont loin d'avoir prouvé,
Le remède ?
Nous ne le voyons pas.
Il y aurait, peut-être, un palliatif. Ce se-
rait que, désormais, chaque plaideur, au lieu
de donner à l'avoué une provision, en exigeât
une de lui.
̃ ».j
INFORMATIONS
Vingt-cinq naufragés du paquebot
l'Amérique sont arrivés de Brest hier
matin à quatre heures à la garé Mont-
parnasse.
On en attendait plusieurs autres hier
soir, à onze heures.
Un grand nombre.d'amis et de parents
les attendaient, prévenus par une affiche
que l'administration des chemins de >fer
Voulez-vous prendre quelque chose en
attendant, ajouta-t-il, plein dé commisé-
ration ? Vous paraissez bien émotionnée
et bien fatiguée ?
Ah monsieur, que vous êtes bon!
Je vous remercie mille fois, et j'accepte
la moindre des choses, rien que pour me
soutenir un peu, car depuis ce matin, je
suis debout auprès du lit de la malade et
je n'ai pas eu le temps de manger le
moindre petit morceau de n'importe
quoi.
Le suisse déboucha rapidement une
bouteille dé vin vieux, en versa un demi
verre et l'offrit à celle qu'il croyait1 être
une de ces honnêtes, pauvres et coura.
geuses femmes dontPhilippe lui avait si
souvent parlé comme étant les amies de
sa mère.1 Il reboucha ensuite soigneuse-
ment la bouteille et pria la bonne femme
de vouloir bien l'accepter pour arroser
son repas du Soir, présumant qu'elle au-
rait encore la charité de no pas aban-
donner la mère de l'aide de cuisine, tant
qu'elle aurait besoin de ses services.
Et, même morte, monsieur, et mê-
me morte, fit avec chaleur la commère,
je la veillerai, car elle n'a pas de plus
vieille connaissance que moi dans le
quartier.
Et la Verduret se remit à sangloter de
plus belle!
Philippe, averti, accourut aussitôt.
Sa mère à l'agonie, qui le voulait voir
avant de trépasser, cela lui parut telle-
ment louche, qu'il crut d'abord à quel-
que communication de Paterne, et, com-
me tout ce qui touchait au dépositaire
de son argent ne pouvait faire autre-
ment que le vivement intéresser, il ac-
courut en proie à une émotion qu'il n'a-
vait pas la peine de feindre.
Oh mon cher petit, s'écria la Ver.
duret en lui sautant au cou, elle t'appelle
à cor et à cris, ta pauvre brave mère.
de l'Ouest- avait fait placarder dans la
gare.
SUITE DE L'AFFAIRE MARKARIANTZ
Se rappele-t-on la femme Finsterer,
la bonne de Nazar-Àga, celle enfin par
qui Markariantz fit la connaissance de
Mlle X. dont il* briguait la main ? 1
Cette femme Finsterer, non-seulement
lui servait d'entremetteuse et de recé-
leuse, mais encore était la complice or-
dinaire de Markariantz.
M. Maçé, commissaire de police aux
délégations judiciaires et spécialement
chargé de l'affaire Markariantz, crut de-
voir la mettre en état d'arrestation. Elle
fut envoyée à Saint-Lazare, où elle tom-
ba malade, ce qui explique pourquoi son
affaire n'a pas encore été jugée.
Aujourd'hui, la femme Finsterer va
mieux, et l'on pense qu'elle pourra com-
paraître aux assises daus quinze jours,
pour vols par salariée et autres nom-
breux vols au préjudice de différentes
personnes.
La femme Duchâteau, dbntj'ai raconté
hier l'épouvantable crime, va être trans-
férée à l'hôpital de la'Salpêtrière, où M.
le docteur Legrand du Saulle va exami-
ner son état mental.- Nous ferons con-
naître, demain, le résultat de cet exa-
men.
La femme Duchâteau n'est.pas, comme
on pourrait le croire, le moins du monde
exaltée depuis son forfait. Elle se montre
très calme, au contraire, et répète qu'elle
a bien fait en envoyant ses deux enfants
rejoindre au ciel son mari et sonpremier
fils.
Elle veut les rejoindre à son tour, et
persiste dans l'idée de se laisser mourir
de faim.. Depuis son arrestation elle a
refusé toute nourriture elle boit à cha-
que instant, d'un seul trait, de grands
serres d'eau, comme pour calmer une
fièvre violente, fièvre sans symptômes
extérieurs.
L'enterrement des deux petites victi-
mes a eu lieu hier; presque toute la po-
pulation de Montreuil les a accompagnées
au cimetière. Le pauvre grand père avait
voulu conduire le deuil, et c'était grand
pitié que de le voir marcher avec peine,
chancelant et sanglotant.
La grand'mère, brisée par la douleur,
était restée à la maison. • ̃̃
Emile Faure.
Une importante arrestation.
La police de sûreté vient de cueillir
un sieur Berrux, qui, sous la Commune,
était lieutenant des vengeurs de Flou-
rens.
Sous le siége, Berrux faisait partie du
174° bataillon commandé par Flourens,
qui envahit l'Hôtel de Ville, au 31 octo-
bro Berrux, qui était alors sergent, se
précipita, avec une dizaine de gredins
de son bataillon, dans les appartements
occupes jadis par M. Haussmann, et là,
crottés, débraillés, embaumant le vin et
le cervelas, ils saccagèrent tous les meu-
bles.
Berrux se coucha tout habillé dans le
lit du baron Haussmann, et au boul, '1,
de dix minutes il ronflait à poings fer-
més.
Son sommeil ne tarda pas à être désa-
gréablement troublé par les gardes na-
tionaux de l'ordre qui le réveillèrent à
coups de crosse et le firent prisonnier.
La Commune avait récompensé la con-
duite de Berrux en le nommant lieute-
nant.
Il a été arrêté sur le boulevard de Bel-
leville et écroué au dépôt.
Parmi les nombreux suicides dont on
nous apporte la liste chaque jour, il en
est qui nous émeuvent tout particulière-
ment ceux des enfants et des vieil-
lards.
Quitter la vie quand on a subi toutes
les luttes, quand on a connu tous les
plaisirs, toutes les peines, quand rien ne
devrait plus vous y étonner, vous y af-
fecter, nous semble incompréhensible.
Et pourtant, rien de plus fréquent que
les suicides de vieillards.
Hier encore, à onze heures du matin,
les concierges de la maison portant le
n° 12, rue Saint-Georges, ont trouvé
pendue au-dessus de son lit, dans l'ap-
partement qu'elle occupait une de leurs
locataires, Mme veuve Mallet, âgée de
soixante ans.
La mort remontait à trois jour* f
Mme Mallet était dans une situation
aisée, et rien ne pouvait faire supposer
une pareille détermination. On croit
pourtant pouvoir attribuer ce suicide à
des chagrins de famille.
ENCORE UN MYSTÈRE
Nous avonsparlé, ilyaquelquesjburs,
do la mort mystérieuse d*un jeune
homme, d'un extérieur très distingué,
Et tandis qu'elle l'embrassait avec dé-
sespoir elle lui glissait en même temps
à l'oreille
Beaucousin et sa belle amie t'at-
tendent à Asnières. IL y a pour toi un
bon coup à faire. Viens vite.
-J'ai une voiture à la porte, dit-elle
ensuite à haute voix. Nous allons être
tout de suite rendus auprès de la chère
femme!'
Je cours demander la permission à
M. Benoist, fit alors le jeune homme, et,'
en même temps, le prier de me donner
quelque argent d'avance sur mon mois,
au cas où on en aurait besoin.
Il traversa la cour en courant et arriva
à la cuisine, le visage bouleversé, les
yeux baignés de larmes, la voix étouffée
par les sanglots.
M. Benoist fut profondément ému de
la douleur de son protégé, quand il en
connut la cause. Il s'empressa de bourrer
un panier de vins vieux, de viandes
froides, de gâteaux, de confitures, de
café, de thé, de sucre, de rhum, à l'in-
tention de la malade et des personnes
amies qui la veillaient et soignaient.
Il lui donna aussi vingt-cinq francs, à
compte sur ses gages, et ce fut ainsi
lesté que Bel-Amour s'en vint rejoindre
la Verduret, déjà remontée en voiture et
l'attendant.
De qui est l'invention de la mère à
l'agonie, demanda Philippe à la vieille
femme, sitôt qu'ils furent en route ?
De moi seule, dit la Verduret avec
un triomphant sourire
Eh, bien! la Verduret, pour ton
heureuse invention et pour ta peine, je
vais te donner une bouteille dé rhum, et
du fameux, encore Tu as très bien ar-
rangé cette affaire et elle me sera utile
de plus d'une façon. Bien sûr que sœur
Monique, à qui je vais raconter mon
malheur, pas plus tard que demain ma-
qui a été retire de la Seine au-dessus du
pont de l'Aima.- Nous avons dit qu'un
coup de feu, paraissant avoir été tiré de
haut en bas, avait du ci user la mort
avant l'immersion.
L'auptosie a prouvé la justesse de nos
renseignements en effet, la balle entrée
par le haut de la région temporale gau-
che, a été trouvée derrière l'os de l'o-
reille' droite, contre lequel elle s'est
aplatie.
Il y a donc de grandes présomptions
pour que cette mort soit le résultat d'un
crime.
Mais ce n'est là qu'une partie du mys-
tère. Voici qui devient plus curieux.
En tenant compte du nom de Ronn,
inscrit sur les cartes trouvées sur le dé-
funt, il y a tout lieu de supposer qu'il est
Anglais. Or, sa mort se trouve préci-
sément remonter au jour précis de la
disparition d'une jeune Anglaise de dis-
tinction, miss L. dont, par un motif de
discrétion bien compréhensible nous
devons taire momentanément le nom.
Cette jeune fille était en France depuis
quelque temps,. et devait quitter Paris ce
jour-là pour retourner en Angleterre. Le
jour du départ, elle disparut et depuis
ce moment sa famille la recherche en
vain.
Est-ce une simple coïncidence?.
N'est-il pas à craindre plutôt qu'entre
les deux jeunes gens existât une liaison
fatale, un amour contrarié, et qu'en pré-
sence d'une séparation forcée, les deux
amoureux se soient résolus a un sui-
cide ? C'est une question que nous n'o-
sons résoudre et nous préferons espérer
que les recherches de la famille L.
aboutiront à un meilleur résultat.
Vous savez, il ne faut pas rire .de l'his-
toire que je vais vous conter ci-dessous,
vu qu'au fond c'est extrêmement drama-
tique. Avant de tourner une situation au
ridicule, il faut alleraufond des choses.
Aller au fond des choses C'est préci-
sément ce qu'a fait l'héroïne de ma triste
anecdote, Mme Mouchy, laquelle de-
meure 14, rue de la Gaîte bien que con-
cierge, Mme Mouchy est un peu rêveuse,
et elle songeait hier tout debout. A quoi ?
Je l'ignore. Probablement son esprit s'é-
garait dans le pays du bleu, où les pro-
priétaires tirent le cordon aux portiers.
Tout à coup. floue!
Ceci exprime le désastre de Mme Mou-
chy, qui venait de poser le pied dans un
trou, et de tomber dans le vide.
Quand je dis dans le vide, je m'ex-
prime mal. Ce n'était pas le vide qu'il y
avait dans le trou. (Jetait autre chose.
Le ? travailleurs nocturnes avaient accom-
pli là leur œuvre ténébreuse la nuit pré-
cédente, et la rêveuse Mme Mouchy ne
s'était pas aperçue qu'ils avaient oublié
de reboucher la fosse.
On avait entendu floue! Ce floue fut
suivi de clapotements, puis d'un grand
cri. C'était Mme Mouchy qui appelait au
secours. On l'a retirée 'de là très contu-
sionnée, et dans quel état!
Encore une qui ne rêvera plus!
J'ai reçu hier, au Figaro, la visite de
l'homme à la fourchette, M. L* Il sem-
blait parfaitement se porter.
J'ai causé un quart d'heure avec lui, et
il m'a montré la position exacte que la
fourchette occupe en ce moment dans
son côté gauche. Elle ne le fait pas souf-
frir cependant, depuis deux jours, il a
des coliques intermittentes et un peu de
fièvre.
Pouvez-vous manger facilement?
lui ai-je demandé.
Parfaitement. Seulement, je man-
ge peu à la fois, et je fais plusieurs repas
par jour, chacun d'eux très léger.
Il m'a dit ensuite qu'il avait repris son
travail accoutumé, et que son plus grand
désir était de voir son affaire oubliee. Je
lui ai presque promis de ne plus parler
de lui à partir d'aujourd'hui.
Il n'est pas absolument impossible
que je manque à ma parole.
J'ai trouvé hier à mon adresse, dans
la boîte du journal, l'aphorisme suii
vant:
« II y a une grande ressemblance entre
les enfants et les vieilles chemises. Pour
les deux, on a besoin de maître d'école, »
Inutile de vous dire, n'est-ce pas, que
je n'attribue cela ni à Pascal, ni à Malo-
branche, ni même à La Rochefoucault ?
Gaston Vassy.
Les obsèques de M. Eugène- Lavenant,
maire d'Arcueil, décédé hier, auront lieu
lundi 20 courant à onze heures à l'église
d'Arcueil.
La famille prie ceux de ses parents et
amis qui n'auraient pas reçu de lettre, de
considérer le présent avis comme invita-
tion. g. v.
tin, me fera donner par la chanoinesse
et par la marquise de quoi subvenir aux
frais d'enterrement de la pauvre mère
que je vais avoir la douleur de perdre
cette nuit. Sans compter qu'il va falloir
m'habiller de deuil, de la tète aux pieds,
comme un fils profondément désolé, et
qu'on ne laissera pas cette charge à un
malheureux de ma sorte. Cette excel-
lente sœur Monique ne le permettrait
certainement pas? D'autre part, puis-
que tu as décidé dans ta sagesse que ma
mère mourait cette, nuit, c'est bien le
moins que ta nièce me donne quelqu'ar-
gent pour me consoler de cette irrépara-
le perte
Gomme ça, tu vas recevoir de toutes
mains, dit la Verduret avec admiration?
C'est pas bête, cela, sais- tu ?
C'est le seul moyen que rien ne
vous échappe, ma chère madame Ver-
duret, répondit sentencieusement Phi-
lippe, en sortant de son panier la bou-
teille promise et la donnant à la Verdu-
ret, qui s'empressa de la fourrer dans sa
poche.
̃–• Ça doit être joliment du bon, ce li-
quide-là, reprit l'ivrognesse, car des
gens comme tes patrons, ça ne doit boire
que des qualités supérieures. Ça me
remettra ma pauvre vieille estomac,
ajouta-t-elle aussi, tu vois, je la cache,
ma bouteille, parce que si ces galvau-
deux de Beaucousin et de Juliette met-
taient la main dessus, ils se feraient un
punch, rien que pour s'amuser à le voir
flamber, et cela ne me profiterait pas.-
M'est avis aussi que tu ne ferais pas mal
de laisser ton panier chez quelqu'un
avant dé les rejoindre. Ces gens-là,
vois-tUj seraient capables de te faire de
mauvaises blagues, comme de casser tes
bouteilles sur ton sucre, par exemple.
Depuis que Juliette s'est remise avec
Les obsèques de Mademoiselle Marie dé'
Werbrouck, décédée to 17 avril 1874 à l'àge
de 32 ans, en son domicile rue Saint-Georges.
5, auront lieu le lundi 20 courant à midi très
précis à l'église Notre-Dàme-de-Lorette.
Sa famille prie ses nombreux amis qui n'au-
raient pas reçu de' lettre do faire-part de' con-
sidérer le présent, avis comme une invitation..
y A rnopos DE
LA BELLE AU BOIS DORMANT
Perrault,, qui fut de l'Académie fran-
çaise, a écrit un conte ravissant intitulé
la le au Bois dormant.
D'un coup de baguette magique, une
fée de passage plonge dans un sommeil
séculaire une jeune châtelaine, ses vas-
saux, ses servantes, ses écuyers et ses
pages.
.Perrault né nous dit pas si ce somme
un peu prolongé fut un plaisir pour la
belle qui le subit; et si les rêvés joyeux
visitèrent sa couche princière.
Le sommeil est comme ces'vieilles
bouteilles poudreuses, dont il faut sa-
vourer- le contenu à petits coups. et en y
revenant souvent.
Cette fable de Perrault m'est venue à
l'esprit en songeant aux progrès de ce
siècle, r v
C'est à croire que la fée a laissé tbm-
ber sa baguette dans le laboratoire da
nos savants modernes, et que l'un d'eux
plus favorisé, plus heureux, plus patient,
a su trouver au fond du creuset le secret
du sommeil.
Le palais de la Belle au Bois dèriïïmt
n'est plus une fable, une fiction. <
La baguette de l'enchanteresse est un
simple flacon; une ou deux cuillerées
du liquide suffisent pour opérer le pro-
dige..
C'est lA Simn lïp. CKlnrnl 'iJa Vrillât
L'effet est magique, le résultat mer.
i veilleux, et cependant le prodige est
tout naturel: il émane de la science.
Qui ne s'est écrié, en sa vie, à l'heure
s ou les paupières alourdies se ferment,
̃ où le front se courbe, où la' pensée s'ar-
• rôte
Ah que c'est bon de dormir
Quelle félicité immense il y a dans
cette exclamation, après les fatigues
d'une journée de labeur ou les lassitudes
d'une journée de plaisirs
Oh insomnie de la fièvre, de la mala-
die, du travail, qui pourra te vaincre ?
Lorsque la douleur, la maladie,- ou un
malaise passager même, nous tient
éveillé sur notre couche, lorsque l'insom.
nie causée par la fièvre, l'inquiétude mo-
rale ou le trouble physique ont chassé de
notre chevet le sommeil doux et tran-
quille, avec quelle ivresse on accueille
les symptômes do son retour.
On l'appelle, on le prie; on le supplie
on essaye de se tromper soi-même en
fermant les yeux.
Mais la pensée, en éveil dans le cer-
veau fatigué, s'agite et se démène éper-
due, ajoutant ses excitations nouvelles à
celles de la fièvre;
Ah! qu'il ferait bon dormir! •
Eh bien comme Prométhée osa bra-
ver un jour le feu du ciel, la Science mo-
derne a dérobé au sommeil son secret.
Depuis longtemps, en thérapeutique,
on possède des agents, des antî-spasmo-
diques qui affaiblissent ou éteignent la
sensibilité et suppriment.la douleur.
Le pavot, l'opium, la belladone, la
morphine, etc., employés suivant les af-
fections, sont les moyens tout naturels
de livrer le malade aux bons soins de
Morphée.
Mais souvent Morphée, à qui on a
forcé la main, se venge en envoyant au
malade des rêves enfiévrés, des halluci.
nations baroques, des lourdeurs ner-
veuses.
Aujourd'hui le problème est résolu..
Morphée est aux ordres de la science.
« On a mis le sommeil en flacons »,
comme l'a si ingénieusement dit un de
nos confrères.
Et rien n'est plus juste.
Après l'absorption de la dose' 'voulue
c'est un singulier phénomène que de
sentir le sommeil S'étendre doucement,
en quelque sorte comme une gaze légère,
sur les yeux appesantis et sur le cerveau
fatigué.
La respiration est régulière, le som-
meil est venu, sans troubles, sans ma-
laise, sans rêves.
C'est la nature qui a laissé surprendre
son secret, car au réveil, ni lourdeur, ni
fatigue, ni douleur d'aucune sorte n'ac-
cusent le bienfaisant Chloral.
Le malade, au contraire, a, dans ce
sommeil, réparé ses forces, retrouvé- 1%
courage qui allait l'abandonner.
Oui, le soulagement apporté par ce re-
pos favorise admirablement la guérison
générale.
Et voilà comment le proverbe popu-
laire a raison •-
Le bien vient en dormant." <
TlMOTHÉE TlUMM.
Beaucousin, elle devient canaille que
c'en est dégoûtant
Merci du conseil, répondit Philippe,
mais c'était 'mon intention de faire
comme vous me le dites. Je suis un gar.
çon d'ordre, moi, et je n'aime point à
exposer ce qui vaut de rargent,.surtout
quand cela m'appartient.
Philippe, en effet, remit, en descen-,
dant de voiture, son panier au comptoir,
en priant qu'on voulut bien le lui gar-
der jusqu'à son départ. -•
Il monta ensuite, avec la Verduret,
auprès de ceux qui l'avaient fait appe-
ler.
Tiens! te voilà donc tout'-de'mèmé',
mauvais coucheur, lui dit Beaucousin;
je n'osais pas espérer ton aimable visite.
Pourtant, quant on m'envoie une
estafette comme la Verduret et que l'on
fait appel à mon amour filial, il n'est
guère possible de résister, fit Philippe.
Quel amour filial? demanda Beau-
cousin, et de quoi diable nous parles.
tu là!
Ca nous regarde nous deux, la Ver-
duret et moi, et tu n'as pas besoin d'en
savoir plus long qu'on ne t'en dit sur ce
sujet, répondit dédaigneusement L'aide
de cuisine. ..•̃•.
Ne perdons pas de temps en paroles
inutiles, s'empressa de dire Juliette, qui
ne voulait pas voir les choses s'enveni-
mer entre Philippe et Beaucousin. J'ai
besoin de toi, Bel-Amour, et tu sais que
je suis femme à payer largement les ser-
vices que l'on me rend.
BDÉ D'AGHONNE.
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