Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1874-03-04
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 04 mars 1874 04 mars 1874
Description : 1874/03/04 (Numéro 63). 1874/03/04 (Numéro 63).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
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Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
LE FIGARO MERCREDI 4 MARS 1874
veur, déplace la majorité du conseil général,
et ôte les chances au député radical, M. Le-
père, d'en être réélu président.
Dans le même canton de Saint-Sauveur, M.
Labbé, maire, conservateur, a été élu hier
conseiller d'arrondissement.
«~ Pau, 1er mars. Des dépêches de
source carliste annoncent la*, reddition de
Bilbao. (Agence Havas.)
Perpignan, 2 mars, 7 h. 55 soir.
L'archiduc Albert d'Autriche, accompagné du
généralet du préfet, visitent Port-Vendrës.
La vente du XIXe Siècle est interdite
sur la voie publique.
ALGER, 2 mars, 6 h. 40 soir. Cette
nuit, la Corse, bateau de la Compagnie Va-
lery, venant de Marseille, a perdu son second
maître, Tavera, père de trois enfants, em-
porté par un coup de mer. Les recherches
faites pendant deux heures ont été inutiles
pour le retrouver.
Très gros temps annoncé par l'observatoire
d'Alger trombes d'eau.
Tarascon, 2 mars. Le train omni-
bus n° 28, parti de Marseille hier, à 10 h. 35
du soir, a déraillé près de Graveron, entre
Tarascon et Avignon, vers deux heures du
matin.
Sept personnes ont été blessées, mais une
seule, grièvement.
La cause du déraillement n'est pas encore
connue.
~~» Lyon, 1er mars, 8 h. 10 soir. Des
perquisitions domiciliaires se rapportant à'
l'affairé -Gàhêû-Lyon (fournitures militaires
au gouvernement du 4 septembre et tenta-
tives de corruption envers des fonctionnaires)
ont été opérées sur l'ordre de M. Guoz, juge
d'instruction, notamment chez un tailleur
demeurant sur le quai de Pierre-Scise, où on
a saisi des pièces compromettantes.
Cent ouvrières de l'atelier Chapelle,
fllateur à Tournon, se-sont mises en grève,
demandant une augmentation de salaire.
~» Hier, à deux heures du matin, la po-
lice a fait une descente dans un tripot igno-
ble, appelé le Chalet, situé aux Charpennes.
Elle a saisi lea cartes, les enjeux, et dressé
procès-verbal contre cinquante-deux joueurs.
Nice, 2 mars, 1 l'-hi .45 matin. Hier,
à une heuredu matin, incendie et explosion
à la fabrique d'huile, appartenant à M. Mar-
chessaux, au Magnan. Pas d'accidents. Perte
de 40,000 francs. Le maire de Nice, le secré-
taire général* de la préfecture étaient pré-
sents.
1 Londres, 28 février.– Le nouveau
Parlement se réunit, comme vous savez,
jeudi prochain, 5 mars.
La cérémonie d'ouverture, datant du moyen
âge, est assez curieuse pour être racontée. Elle
commence à la Chambre des lords, où les
membres de la Chambre des communes, ap-
pelés par « le Bâton noir », se réunissent sous
la surveillance du sergent-ès-armes et du
clerc de la Chambre. Dans l'absence certaine
de la reine, ils seront recus par une commis-
sion des Lords, en robes Parlâtes et chapeaux
à claques, qui communiqueront, par la bou-
che du Lord chancelier, l'adresse 'suivante
Nous sommes commandés par S. M. la Reine
de vous faire savoir qu'aussitôt le serment
de fidélité prêté par les deux Chambres, elle
vous expliquera les raisons qui ont provo-
qué votre réunion; et, vu la nécessité do
nommer en premier lieu un président de la
Chambre des communes, Sa majesté veut que
cette électionait lieu dores et déjà. » Aussi-
tôt, les « fidèles Communes se retirent,
nomment leur président et reviennent le len-
• demain, dans le même ordre, à la Chambre
des lords.
Le nouveau président fait part à leurs Sei-
gneuries de son élection dans les termes sui-
vants « Je me présente devant vos Seigneu-
ries en toute humilité, et je me soumets pour
l'approbation gracieuse de sa Majesté Le
lord chancelier signifie au président que le
choix de ses collègues est agrée par le sou-
verain, et, avec force salutations et compli-
ments, le président se retire. Alors seule-
ment, commence l'opération du serment de
fidélité, qui, pour les 652 membres, dure qua-
tre jours au moins. Cela fait, la Chambre des
Communes se rend de nouveau chez les lords
où le chancelier lit le discours d'ouverture.
Mais comme les membres du nouveau minis-
tère, qut siègent à la Chambre des Commu-
nes, doivent se présenter à leurs colléges
électoraux pour être ré-nommés, les affaires
ne pourront guère être entreprises avant la
fin du mois de mars. Tout fait prévoir que la
session de cette année sera fort calme. Le
parti libéral est très divisé, et on ne s'at-
tend pas à ce que M. Gladstone prendra part
aux débats. Ses médecins lui recommandent
un repos absolu de quelques mois.
Auguste Maroade.
BOITE AUX LETTRES
Notre collaborateur judiciaire, M. Fer-
nand de Rodays, a reçu la lettre sui-
vante
Monsieur,
La personne qui vous a communiqué le ju-
gement du tribunal de Saint-Omer dans une
affaire qui m'intéresse, a surpris votre bonne
foi en ne vous donnant pas le texte complet
de l'arrêt. Vous me saurez gré, j'en suis con-
vaineu, monsieur, de vous mettreà même do
FcnilIctDn du FIGARO da 4 Mars
LES NUITS SANGLANTES
Les persécutions de madame de Chau-
desaigues avaient cessé, depuis un jour
où, abordée par la baronne, Marianne
avait eu assez de force pour supporter le
choc et lui avait tenu ce langage
Chère madame, je suis malade; le
mot mariage m'est odieux; je n'en sau-
rais expliquer les causes, mais cela est
ainsi. Ma tante vous porte de l'intérêt,
adressez-vous à elle, et prenez pitié
d'une femme qui, comme moi, ne saurait
s'occuper des intérêts d'autrui, étant
complètement absorbée par ce qui se
passe en elle de douloureux et d'inex-
plicable.
Il y avait un mois que cette petite
scène avait eu lieu, et la baronne en
boudait encore madame de Montravert.
Mais qu'importait à Marianne ? Elle ne
redoutait plus la présence de madame de
Chaudesaigues, n'ayant plus à craindre
ses confidences, et, depuis lors, sa quié-
tude n'avait plus été troublée.
M. de Mornant possédait les plus beaux
jardins de Biarritz, où pourtant il y en a
de fort beaux.
C'était dans ceë jardins que devait
avoir lieu la fête de nuit.
Marianne, pour faire honneur à M. de
Mornant, avait résolu de se faire très
.belle.
Il s'agît, d'abord, de savoir si elle se
mettrait en noir ou en blanc.
Après de nombreux conciliabules avec
madame Barberine et mademoiselle Jo-
jséphine, il fut décidé que la duchesse se
mettrait en blanc.
ie choitx de l'étoffe ûs la robe ÎQmba
faire acte de justice en vous adressant sous ce
pli la fin des considérants des juges.
Vous vous arrêtez à cette phrase
« Il n'a fait que devancer le double événe-
ment, qui bientôt s'est réalisé, la conversion
du Soir à un autre culte. »
La phrase continue ainsi
« Et l'honorable retraite d'Hector Pessard,
» se séparant résolument d'un journal qui ne
̃» représentait plus les idées à la défense des-
» quelles il a- voué son talent et tous ses
» efforts ,»
« Considérant que s'il est vrai qu'Hector
» Pessard n'a point été diffamé personnelle-
» ment et individuellement, il l'est encore
» qu'il n'a éprouvé aucun préjudice, car il
» n'attribue pas sans doute à l'article ou plu-
» tôt à l'entrefilets dont il se plaint, le veto
» mis à l'apparition de son journal le Jour et.
la lettre d'Atticus, dans laquelle il est parlé
» de lui, n'a point empêché ses Lettres d'un in-
» tarait de faire leur chemin dans la presse
» départementale, dans le Pas-de-Calais
» comme dans l'Anjou peut-être et d'y ob-
» tenir tout le succès qu'elles peuvent mé-
» riter. »
Par ces motifs, etc.
Je compte sur votre obligeance, monsieur,
pour placer sous les yeux de vos lecteurs
les lignes qui précèdent et je vous prie d'a-
gréer, avec mes remercîments, l'assurance
de ma considération la plus distinguée.
HECTOR PESSARD.
A monsieur le directeur du Figaro.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous prier d'insérer, en
réponse à l'article publié par le Rappel sous
le titre le Testament de M. Michelet, dans le
numéro du 3 mars 1874, la lettre suivante
« Monsieur Auguste Vacquerie,
« Ma qualité de tuteur des héritiers de M.
Michelet (car personnellement je ne puis y
avoir aucun intérêt) m'ihterdit de traiter
avec vous des questions de famille. Mais je
regrette que vous ayez publié le testament
de M. Michelet à l'insu de ses héritiers
» Vous avez pu remarquer qu'il contenait
beaucoup de clauses privées qui n'appartien-
nent pas à la publicité. -r Et je suis surpris
aussi que vous ne paraissiez point avoir fait
attention à la clause impérative, par laquelle
M. Michelet fait un devoir de l'inhumer sans
cérémonie religieuse au cimetière le plus
voisin du lieu de son décès.
» J'espère, monsieur, que vous ne conti-
nuerez pas une publicité aussi regrettable,
inspirée par des sentiments hostiles à la jeune
famille de M. Michelet, qui compte une mi-
neure et un absent.
» Recevez, etc. »
Veuillez agréer, monsieur le directeur,
l'assurance do mes sentiments très distin-
gués.
A. POtLLAIN-DUMESNIL.
Paris. 3 mars 1874.
4.
COMITÉ DES FOURNEAUX ÉCONOMIQUES
Sous le patronage
DE MADAME LA- MARÉCHALE DE MAC-MAHON
Paris, le 2 mars 1874.
Aujourd'hui, 2 mars, le Comité a mis en
circulation 200,000 bons de pain, viande
bouillon ou légumes pour être délivrés gra-
tuitement, pendant une semaine, aux ouvriers
sans ouvrage, dans 45 fourneaux économi-
ques, et il s'apprête à en augmenter succes-
sivement le nombre.
Il va être établi, dans chaque arrondisse-
ment, des dépôts où les bons seront vendus
10 centimes aux personnes qui voudront les
distribuer elles-mêmes.
Grâce au concours de la Société philantro-
pique, de celle de Saint-Vincent-de-Paul et
de la direction de l'Assistance publique, au-
cune dépense n'a été faite pour la construc-
tion des fourneaux et les irais de premier
établissement tout l'argent remis au Comité
sera donc employé en secours.
Mais les besoins révélés par les recherches
sont beaucoup plus grands qu'on ne le sup-
posait d'abord, et, malgré la générosité avec
laquelle il a été répondu à son appel et le
chiffre élevé de la souscription, il a besoin
que la charité ne s'arrête pas pour qu'elle a
puisse atteindre son but et que, pendant la
crise dont les ouvriers sont les victimes, per-
sonne né soit exposé à souffrir de la faim.
Dès a présent on peut acheter des bons
Chez M^de Benque, trésorier, rue Radzi-
vill,2; 1
Chez M. le marquis de Biencourt, secrétai-
re, rue Saint-Dominique, 67;
Et aux bureaux des-journaux qui en font la
demande.
Nous rappelons à. nos lecteurs jjue le prix
d'abonnement au Figaro est, pour les dé-
partements, de 16 fr. 50 pour trois mois,
33 fr. pour six mois, et 66 /r* pour un an.
sur la mousseline des Indes, qui n'était
pas incompatible avec un deuil dé neuf
mois.
La robe serait garnie de grands volants
au bas desquels il n'y aurait qu'un grand
ourlet; le corsage devait avoir des bas-
ques pareilles, et serait retenu autour
de la taille par une ceinture de crêpe,
dont un gros nœud, avec de longs bouts j
frangés, devait occuper tout un côté.
Pour la coiffure, il fut convenu que les
cheveux de la duchesse seraient relevés,
après avoir été bouclés, par une bride de
crêpe noir, retenu sur le derrière de la
tête par un nœud de perles fines, le deuil
ne comportant pas d'autres bijoux.
Le jour solennel arriva.
Le soir, la maison et les jardins du
gentilhomme béarnais étaient illuminés
de la façon là plus merveilleuse.
Quand Marianne et madame de Char-
vallon entrèrent chez M. de Mornant, un
grand nombre d'invités s'y trouvaient déj à
réunis M. de Villehaut-d'Avron était de
ce nombre,
La duchesse fut trouvée adorable les
habitués des soirées de M. de Mornant ne
l'ayant vue que sous ses vêtements noirs,
s'extasièrent de la manière admirable
dont le blanc relevait sa beauté.
Lorsque le premier moment de surprise
fut passé, et que la duchesse eut remer-
cié toutes les personnes qui vinrent la
complimenter, le marquis lui offrit son
bras et la conduisit dans les jardins,
faire un tour sous les grands arbres, du
milieu desquels des lanternes de cou-
leur répandaient des lueurs' fantasti-
ques.
Le jeune homme, cédant aux entraîne-
ments de son cœur, avait décidé qu'il
n'attendrait pas au lendemain pour de-
mander à Marianne, dont il était sûr d'ê-
tre aimé, si elle voulait l'agréer pour
prétendant et lui laisser espérer que, si-
tôt après son deuil j elle l'accepterait
pour époux.
En présence de la jeunesse de Ma-
rianne, il s'était plus d'une fois demandé
si c'était à §Il£ op ,à madame de Char-
28
PARIS M JOUR LE .101 li
Les journaux se préoccupent unique-
ment des élections et de la signification
qu'elles comportent. L'impression n'est
pas absolument décourageante, et il nous
semble que la Gazette de France a raison
quand elle voit dans l'inflme majorité
obtenue par les républicains une preuve
que la France n'est pas aussi enthousiaste
de la République qu'on le prétend.
Si l'on ne veut considérer que les oppo-
sants et les abstenants, il est bien évident
que, même en ne tenant compte que de la
volonté exprimée du plus grand nombre, la
majorité réelle n'est nullement républicaine,
que tout au moins les forces s'équilibrent.
C'est donc ailleurs que dans les incessantes
fluctuations des majorités électorales qu'il
faut aller chercher les éléments d'une solu-
tion définitive. Loin de prouver quoi que ce
soit en faveur de la République, les élections
qui-viennent d'avoir lieu n'établissent claire-
ment qu'une chose> l'absurdité, l'immoralité
de ce système de la souveraineté du peuple
qui fait dépendre l'avenir et les destinées
d'un grand pays comme la France de minori-
tés de trois ou quatre mille voix.
Où commence peut-être le paradoxe,
c'est quand on soutient que les candidats
vaincus auraient gagné à -afficher plus
nettement leurs préférences. Ici, chacun
tire la couverture à soi. Si M. de Beau-
champ s'était déclaré impérialiste, s'é-
crie le Gaulois, il aurait été nommé. Si
M. de Billiotti avait arboré le drapeau
blanc, reprend l' Union, il n'eût pas suc-
combé.
Il est extrêmement difficile de jauger
la valeur de ces prétentions-là.
La Presse a fait œuvre utile en recher-
chant dans les déclarations passées de
M. Ledru-Rollin ce qu'il veut et ce qu'il
représente. Il a refusé de publier une
nouvelle profession de foi; on est donc
forcé de s'en tenir à ses anciennes décla-
rations, et de rechercher quelles doctri-
nes il préconisait.
Le avril 1848,M.Ledru-Rollin écrivait aux
commissaires de la République
« Nous touchons aux élections. Ce qui fait
la grandeur du .mandat du représentant, c'est
qu'il investit celui qui en est revêtu du pou-
voir souverain d'interpréter et de traduire l'in-
térêt et la volonté de tous.
» Or, celui-là seul en usera dignement qui
ne reculera devant aucune des conséquences
du triple dogme de la liberté, de l'égalité, de
la fraternité.
» De là découlent
» L'abolition de tout privilège;
» La répartition de l'impôt en raison de la
fortune
» Un droit proportionnel et progressif sur
les successions;
» Le plus complet développement de l'ins-
titution du jury;
» Une magistrature librement élue.
> Le service militaire pesant également
sur tous;
» Une éducation gratuite et égale pour
tous i
» L'instrument du travail assuré à tous
» La reconstruction démocratique de l'in-
dustrie et du crédit;
L'association volontaire partout substituée
aux impulsions désordonnées de l'égoïsme. »
Nous voilà en plein socialisme. M. Le-
dru-Rollin n'a pas changé; de son propre
aveu, il n'a rien appris, rien oublié, mais
comme en réalité les opinions et les expé-
dients dont il est le champion ne peuvent
jamais réunir plus de soixante ou qua-
tre-vingt voix dans l'Assemblée, il J1 y a
pas à s'inquiéter outre mesure de sa ré
surrection.
Dans le Soir, M. Villetard réunit quel-
ques chiffres dont l'ensemble démontre
très clairement les progrès évidents de
l'idée conservatrice, c'est-à-dire du sep-
tennat et de la trêve loyalèment pra-
tiquée.
Aux élections partielles d'octobre dernier,
l'opposition obtenait dans la Haute-Garonne,
70,000 vtix contre 31,000; dans la Loire,
61,000 contre 25,000 dans la Nièvre, 40,000
contre 28,000; dans le Puy-de-Dôme, le
parti conservateur n'avait même pas de can-
idat.
Le 16 novembre, l'opposition écrasait les
conservateurs par plus de 42,000 voix contre
moins de 18,000 dans l'Aube, et par 83,000
contre 48,000 dans la Seine-Inférieure.
Le 14 décembre, les majorités obtenues
partout par l'opposition étaient moins fou-
droyantes elles étaient encore formidables
57,000 voixcontre 38,000 dans Seine-et-Oise;
60,000 contre 40,000 dans le Finistère 36,000
contre 25,000 dans l'Aude.
Dans les quatre élections qui ont eu
lieu depuis le 1" janvier, l'écart est
presque insignifiant et les conservateurs
ont résisté avec un ensemble qui permet
de beaucoup espérer pour l'avenir.
**# Au moment où M. Guizot est frap-
pé si cruellement de la perte dey sa fille,
vallon qu'il devait s'adresser d'abord pour
solliciter sa main mais, en réfléchissant
plus mûrement, il s'était dit que Ma-
rianne était madame de Montravert,
qu'elle portait le deuil d'un mari, et qu'il
né pouvait agir autrement avec elle que
vis-à-vis d'une veuve.
Donc, M. de Villehaut-d'Avron était
j bien résolu à traiter ce soir-là avec la
duchesse elle-même, la question. de'ma-
riage..
Dans ce but, il la conduisit sous un
bouquet d'arbres hauts et touffus, au pied
[ desquels se trouvaient quelques sièges
de jonc.
Jl la fit asseoir sur- un de ces sièges,
prit place à ses côtés, et, s'emparant de
l'une de ses mains, qu'elle lui abandonna
sans aucune résistance;
Oh 1 Marianne! ma chère bien-ai-
mée, mon adorée Marianne, laissez-inoi
croire qu'un jour prochain viendra où
nous ne nous séparerons plus, et que vous
j le voulez bien 1
| A ces mots, Marianne se sentit toute
troublée, et ces mêmes frayeurs que ma-
dame de Chaudesaigues avait le malheu-
reux don de faire naître en elle commen-
cèrent à l'envahir.
Sur le sable des allées, où se jouaient
des tons étranges et multiples, les bran-
ches des arbres, agitées par la brise du
soir, lui parurent tracer des tableaux
menaçants; bientôt la couleur rouge des
lanternes, qui était dominante, lui fai-
sant illusion, lui représenta le canapé et
les rideaux rouges de M. de Montravert;
puis, l'hallucination devenant plus in-
tense, à chaque angle sombre, au détour
de chaque allée, au pied des massifs de
fleurs, dont la cîme éclairée rendait le
bas plus noir encore, sur les bancs du
jardin, dans l'épaisseur du feuillage, au
tronc des vieux arbres, partout elle le vit
lui, grimaçant d'une façon hideuse, tel
qu'elle l'avait aperçu dans la matinée
fîu 3 décembre
Le ftiarqufs, bien qu'il eut senti, dès le
premier moment, trembler la main de
Marianne, ne pouvait se douter de ce
madame de Witt, la Revue des Deux-Mondes
publie une étude de lui sur feu M. Vitet.
Il y a trouvé l'occasion de .dire son mot
sur l'état présent de la France et l'on re-
marquera l'appui que cet esprit éminent:
apporte au septennat, sans préjudice de
ce que nous réserve l'avenir. M., Guizot
se demande si la France approche d'une
solution définitive et conclut dans les
termes que voici
Nous avons tenté la solution monarchique
par la réconciliation et l'union des deuxbran-
ches de la maison royale. Cette combinaison
a échoué. M. le comte de Chambord n'a pas
voulu en accepter les conditions nationales.
Nous sommes rentrés dans la combinaison
républicaine, mais en lui maintenant son ca-
ractère provisoire; c'est pour sept ans seule-
ment que la majorité de l'Assemblée natio-
nale a remis à la loyauté de M. le maréchal
de Mac-Mahon le soin de maintenir l'ordre en
France sans y proclamer définitivement la ré-
publique.
Quand le maréchal aura accompli son sep-
tennat, nous nous retrouverons en face de la
même question, monarchique ou républi-
caine, ou mêlée peut-être de ces deux carac-
tères, comme au dix-septième siècle chez les
Hollandais, quand ils ont fait du stathoudérat
une institution permanente de la république
des Provinces-Unies. Je n'ai garde de prédire
laquelle de ces deux combinaisons prévau-
dra tout ce qu'on peut affirmer aujourd'hui,
c'est que nous ne sommes pas sortis de l'état
provisoire seulement, nous avons pris le
temps de la réflexion pour en sortir et un peu
plus d'expérience des diverses combinaisons
par lesquelles nous pourrions en sortir. Notre
habileté n'a pas fait plus de progrès, et ma
prévoyance ne va pas plus loin.
# Le discours académique de M. 01-
livier prend les proportions d'un événe-
ment. Nous avons déjà indiqué sur quoi
porte le débat l'éloge de l'empire par le
nouvel académicien et les-objections de
M. Guizot qui, si nous avons bonne mé-
moire, n'a pas nui à son élection.
Je comprends, a dit M. Guizot, que vous
rappeliez avec éloge les tentatives de Napo-
léon III pour arriver à l'établissement de
l'Empire libéral; c'est une entreprise à la-
quelle vous avez prêté votre concours, et
que vous devez en conséquence apprécier
d'une manière favorable.
» Mais glorifier sans réserve le régime qui
a été imposé à la France depuis 1851, c'est
vous mettre en contradiction avec vous-
même
» Vanter la politique extérieure qui a ame-
né la catastrophe de 1870, qui nous a infligé
de si cruels désastres, qui nous a enlevé l'Al-
sace et une partie de la Lorraine, c'est vous
mettre en contradiction avec la raison, avec
le, bon sens, avec l'histoire »
M. Emile Ollivier a maintenu son discours
sans vouloir en changer un mot
Les membres do la commission se sont mon-
trés surpris et blessés de cette persistance, et
M. Guizot s'est rendu l'interprète de leurs
sentiments en s'écriant
« Monsieur, on pourrait vous pardonner
d'avoir le cœur léger; mais avoir l'esprit
aussMéger que le cœur, c'est trop!,» »
M. Emile Ollivier a répondu en ren-
dant à sa phrase fameuse le sens gram-
matical qu'il lui a toujours attribué, pen-
sons-nous. Cœur léger voulait dire cœur
résolu, sans reproches, et non point cœur
indifférent ou joyeux.
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, devant
l'Académie réunie, M. d'Haussonville doit
demander ou l'atténuation de certains
passages du discours ou l'ajournement
de la réception.
Si nous sommes bien informés, dit la Presse,
que les relations académiques de M. Marius
Topin doivent tenir au courant de l'incident,
M. d'IIaussonville invoquera, comme précé-
dent, ce qui s'est passé sous l'Empire au mo-
ment de la réception de son illustre beau-
père, le duc de Broglie, père du duc actuel.
Son discours renfermait à la fois une justifi-
cation fort habile du 18 Brumaire et une con-
damnation sévère du 2 Décembre. Sur la de-
mande de M. Nisard, si nous ne nous trom-
pons pas. tout ce qui avait trait au 2 décem-
bre fut sacrifié et supprimé.
On parlait hier au soir beaucoup d'un vif
mécontentement éprouvé par certains mem-
bres du gouvernement et du désir manifesté
par eux d'intervenir et de faire interdire la
réception.
Nous croyons devoir mettre le public en
garde contre ces bruits fort exagérés. L'Aca-
démie française, c'est son droit, c'est son
honneur, doit conserver une indépendance
complète. C'est à elle seule qu'il appartient
de décider ce qui convient aussi à la dignité
de celui qu'elle a librement appelé dans son
sein au moment où l'Empire entrait dans une
phase libérale.
Si un profane comme nous avait voix
au chapitre, il nous semble que l'Acadé-
mie ferait bien d'accepter le discours de
M. Ollivier tel quel. N'oublions point que
son élection fut, de la part de l'Institut,
une avance très marquée, trop marquée
peut:êtré, au gouvernement impérial
c'était presque un gage de réconciliation.
Les événements postérieurs onj dû mo-
difier les impressions de bien des Acadé-
miciens, mais rien ne peut empêcher que
la nomination ait été faite et- que l'Aca-
qui se passait en elle, et assignant à son
émotion une toute autre cause, il con-
tinua a
Qui donc, je vous le demande, pour-
rait vous aimer ainsi quo je ,vous aime? î
A qui votre amour pourrait-il donner
une joie et un bonheur pareils à ceux
que j'éprouve? Quel est l'homme qui,
mieux que moi, saurait vous comprendre
et yous admirer autant que vous en êtes
digne ? Croyez-moi, mon adorée, Dieu,
en me faisant pour vous, vous a faite
pour moi nous sommes unis de par sa
volonté immuable; ni les circonstances,
ni les choses, ni les hommes ne peuvent
nous séparer! l
Marianne regardait toujours sous les
arbres, dans les branches, dans les om-
bres mouvantes qui allaient se dépla-
cant, et toujours, partout, ses regards se
heurtaient à l'horrible spectre du duc.
Peu à peu, sa respiration devenait plus
lente, ses yeux' perdaient de la clair-
yoyance, sa raison s'égarait davantage e\
le cadavre allait grossissant.
Elle commençait à appeler tout bas sa
tante, et instinctivement, pensant à la
çb-'anoinesse, elle se peiicha çjavaiitage
véi-s le mawjuîs, pressa)!t convulsivement
ses mains, et finit par laisser tomber sa
tête sur son épaule.
Se méprenant encore sur la véritable I
cause qui faisait ainsi s'abandonner la
jeune femme, M. de Villebaut-d/Avron
lui disait
Merci, Marianne Vous avez pitié de
moi, vous êtes bonne! Jamais, croyez-
moi bien, vous n'aurez à vous repentir
de m'avoir laissé vous adorer Vous
me permettez, n'est-ce pas, de faire part
de nos projets à madame de Charvallon?
Vous voulez bien m'autoriser à lui de-
mander votre main ? Reposez-vous sur
moi du soin d'arranger toute chose pour
l'époque où notre mariage pourra se
faire d'ici là, laissez-moi vous dire crue
je vous aime, et j'attendrai avec patience
fet résignation' Vheùre ou vous voudrez
bien quitter le nom -du duc de Montra-
démie ait distingué l'orateur seulement
le jour où il était ministre.
Il faudrait donc prendre son parti en
braves, d'autant mieux que M. Ollivier
s'honore par sa fidélité, quand même on
la jugerait intempestive.
#*# Le Figaro a signalé hier le dénoû-
ment de cet insupportable procès Tich-
borne qui a occupé cent quatre-vingt-
sept audiences. Le lord-chief justice a
trouvé précisément dans ces conditions
de durée, exceptionnelle une fiche de
consolation.
Messieurs, a-t-il dit aux jurés, je regrette
beaucoup toute la perte de temps que vous
ont occasionnée les longueurs de ce procès. Je
suis moi-même bien fatigué, mais nous avons
tous du moins cette consolation que nos noms
sont à jamais célèbres dans l'histoire des an-
nales judiciaires du Royaume-Uni, comme
ayant figuré au cours des débats de la cause
célèbre la plus extraordinaire du siècle.
L'accusé a entendu avec sang-froid la
sentence qui le déclarait faussaire et
usurpateur du titre et du nom des Tich-
borne il a serré la main de son défen-
seur et a suivi le chef, des huissiers en
prison. On sait que, pour alimenter son
pouff colossal, le faux Roger Tichborne
avait émis un emprunt dont les titres
ont été couverts très facilement en An-
gleterre. f. m.
-= 4,
Injustices et Abus
LOUIS XVI
Ceci n'est point une question politique,
mais simplement une question de conve-
nances.
Voici le fait. <
Il est certain que Louis XVI, qui fut le
plus honnête homme de son royaume, et
que la France, par la voix de ses repré-
sentants, proclama le restaurateur de
la*liberté, » il est certain, disons-
nous, que Louis XVI fut assassiné par
ces trois mots Liberté, Egalité, Frater-
nité, aidés de quelques Français.
On sait, d'autre part, qu'en souvenir de
cette monstrueùse«injustice,»Louis XVIII
et Charles X ont élevé un monument
qui est connu sous le nom de « Chapelle
expiatoire, » qui existe encore aujour-
d'hui, et qui se trouve dans un square,
entre la rue Pasquier et celle d'Anjou-
Saint-Honoré.
1830, 1848 l'insurrection de Juin
le 4 Septembre et même la Commune ont
respecté ce monument, plus heureux,
sous ca rapport, que la glorieuse colonne
impériale, c'est-à-dire qu'aucune de
ces révolutions ou insurrections politi-
ques ne l'a démoli ni pétrolé.
Mais il ne suffit pas, pour bien faire,
de respecter matériellement une chose
respectable, il faut la respecter morale-
ment.
C'est ce qu'on a complètement oublié
le jour où on a inscrit sur le fronton de
cette chapelle, les mots assassins de Li-
berté, Evglité, Fraternité.
Tout au moins eût-on dû ajouter à ces
trois mots ceux-ci ou la mort
C'eût été de la couleur historique et on
aurait pu comprendre.
Autrement, on ne peut y voir qu'une
plaisanterie si déplacée qu'elle prend
les proportions du plus inqualifiable ou-
trage. ̃
Nous espérons qu'il suffira de signaler
le fait pour que l'autorité actuelle, qui ne
l'avait sans doute pas remarqué, en fasse
prompte justice.
P. S. En réponse, à notre article du
2 mars, intitulé Errements postaux, un de nos
lecteurs nous écrit que nous avons été mal
renseignés en ce qui concerne la défense
d'expédier des journaux simplement ficelés,
avec adresse sur la marge.
Chaque jour, nous affirme-t-il, il envoie le
Figaro en province dans les conditions que
nous avons accusé la poste de ne point per-
mettre.
Dont acte. Reste ce que nous avons dit
relativement à l'expédition des livres.- e. f.
+_
INFORMATIONS
La Journée
Grand diner hier au ministère des af-
faires étrangères.
Nous citerons -parmi les convives
M. le comte de Paris, M. le duc de Ne-
mours, M. le prince de Joinville, M. 'le
duc d'Aumale, M. le comte d'Eu, M. le
duc de Chàrtres, M. le duc d'Alencon,
M. le duc de Penthièvre, M. le prince
Czartoryski, madame, la princesse Clé-
vert pour prendre celui du marquis de
Villehaut-d'Avron..
A ce mot de mariage et au nom de
M. de Montravert, Marianne éprouva une
commotion terrible ses oreilles bour-
donnèrent, son regard s'éteignit tout à
fait, ses dents claquèrent, ses muscles se
détendirent, et, poussant un cri rauque,
elle s'évanouit.
En sentant ce corps charmant qui s'af-
faissait sur lui, M- de ViUeh^ut-d'Avron
fut pris d'un jneflfable sentiment de ten-
dra pitié pour cet être faible dont il avait
mission d'assurer le bonheur.
Il prit madame de Montravert dans ses
bras, et/tournant la maison en suivant
les allées les plus désertes et les moins
éclairées, il là porta dans une petite
pièce du rçz-de-chaussée où Michel, qui
n'était jamais loin de son maltre, accou-
rut aussitôt.
Cours prévenir madame do Ghapval-
lon, lui dit le marquas, et cela, sans que
personne se doute qu'elle est appelée au-
près de sa nièce. Accompagne-la jus-
qu'ici, et ne perds pas une seconde.
Michel partit, et M. de Villehaut-d'A-
Yr-on, seul aveu Marianne, la soutenant
de ses deux bras, et ayant sa tête tou-
jours appuyée sur son épaule, lui parlait
doucement, lui disant de ces mots d'a-
mour qui, lui semblait-il, devaient péné-
trer jusqu'à son âme, en dépit de l'anéan-
tissement complet de son corps. Il la ber-
çait comme, une enfant malade, dont il
aurait voulu endormir la doulour.
En même temps, il se disait
Pauvre ehèz'e mignonne } Qu'elle est
délicate, et combien elle a besoin de mé-
nagements, de soins, d'affection et d'a-
mour Comme nous allons être heureux
quand il me sera permis de ne plus la
quitter, de la tenir ainsi dans mes br«s
et de la faire dormir sur mon ççpur
La chanoinesse arriva, préoédée de
Michel.
£;n voyant son enfant, pâle et sans vie,
aux bras de M. deVîllehaut-d;Avrftn,.son
premier soin fut de rassurer le m.arqu\8
sur l'état de Marianne, dont les synçay,è§
Emile Faure.
mentine, madame la duchesse de Char-
tres, madame la. princesse Gzartoryska,
madame la princesse Obrenovitch, M. le
duc de Broglie, le ministre du Brésil et
madame la vicomtesse d'Itajuba, M. le
comte et madame -la comtesse d'Haut-
poul, M. le marquis et madame la mar-
quise de Noailles, M. le marquis et ma-
dame la marquise de Trévise, le préfet
de police et madame Léon Renault, M. le
comte d'Haussonville, etc.
Le dîner a été suivi d'une brillante ré-
ception.
L ASSASSINAT DE LA RUE BLONDEL.
Hier a été commis, dans le centre de
Paris, rue Blondel, à deux pas du boule-
vard, un crime qui est appelé à prendre
place au premier rang des causes célè-
bres, par l'audace de son auteur et par
les circonstances tout particulièrement
horribles quil'entourent.
En voici le récit
Rue Blondel, n" 3, dans une maison de
sombre apparence, habitait depuis quel-
ques années une marchande à la toilette,
la veuve Pelissier. Vous dire vendait serait trop long, car elle vendait
de tout, depuis des dentelles d'Angle-
terre, depuis des brillants de prix, jus-
qu'à des chiffons sans forme. Elle recru-
tait beaucoup sa clientèle parmi les de-
moiselles de mœurs faciles qui abondent
dans ces parages. C'était, à tous les
points de vue, un type curieux que la
veuve Pelissier.
Levée dès cinq heures du matin, elle
s'occupait de balayer, épousseter et ran-
ger son capharnaum. A six heures, elle
allait chercher son déjeûner, un peu de
lait et de pain. Puis elle se plaçait -sur le
pas de sa porte, guettant les pratiques.
Elle avait un flair merveilleux pour dé-
couvrir les gens qui avaient besoin d'ar-
gent. Quand elle disait à un passant
Vendez-moi votre paletot, mon joli
garçon 1
Il était bien rare que le joli garçon
conservât son pardessus. Les trois quarts
du temps, il apportait son gilet le soir.
Tout le quartier connaissait la mère
Pélissier, et tous les pauvres gens des
rues circonvoisines avaient plus ou moins
passé par ses mains. On disait bien
quelque mal d'elle, mais, en somme, on
n'avait aucun fait spécial à liii repiô-
cher, sinon d'être un peu âpre au gain;
Or, hier matin, vers neuf heures, on
vit tout à coup le veuve. Pélissier s'élan-
cer, les bras levés, du seuil de sa bouti-
que et tomber toute sanglante, les pieds
sur le trottoir, les épaules en avant, sa
tête aux trois-quarts détachée ballottant
sur ses épaules, Deux ou trois crispa-
tions, et la malheureuse expira au milieu
d'une mare de sang. .̃••«. ,Z
On juge avec quelle rapidité se forma
un rassemblement énorme autour de la
vieille femme presque décapitée, dont le
sang continuait à jaillir par la section
du cou, rougissant le ruisseau dansle-
quel baignaient ses cheveux gris.
Pendant ce temps, l'assassin s'élançait
du côté du boulevard Sébastopol, et dis- v
paraissait avant que l'idée fût vernie à
personne de l'arrêter. Deux habitants de
la rue, les sieurs Gnffoult, charbonnier,
et Marent, cordonnier, l'ont, cependant
assez bien dévisagé pour pouvoir le> re-
connaître.
C'est, ont-ils dit, un jeune homme de
taille moyenne, aux cheveux coupés en
brosse, et porteur d'une fine moustache.
Il était vêtu d'un paletot marron, d'un
pantalon gris, et coiffé d'un chapeau
de soie à haute forme.
Depuis quelques jours, M. Marent l'a-
vait remarqué qui rôdait autour de la
boutique, s'approchant pour tâter et sou-
peser les étoffes pendues à la porte, et
regardant les bijoux à travers les vitri-
nes.
Dans la matinée de samedi, on l'avait
vu entrer et marchander des çiiemises
d'homme sans les acheter.
Voici ce qui résulte des constatations
faites' par M. Mahieu, commissaire de po-
lice du quartier.
La victime a eu la gorge tranchée à
laide d un rasoir lui appartenant. Il est
donc facile de reconstituer la scène qui
s'est passée. 7 H
L'assassin marchandé ce rasoir, et
le prenant tout ouvert des mains de la
veuve Pélissier, s'est jeté sur elle et lui
a porté un coup de gauche à droite, avec
une force extraordinaire. Madame Pelis-
sier devait lever la tête à ce moment;
cela résulte de l'examen de la blessure.
Il est donc probable qu'en marchandant
le rasoir, l'assassin appelait so'rf atten-
tion' au plafond, où pendent, entre pa-
renthèses, les objets les. plus hétérochr-
tes, robes de prix et perroquets empailiésk'
Il n'y a pas eu de lutte, car rien n\^t
ne lui inspiraientplus une grande fravpnr
tant elles s'étaient renouâtes de S
hélas sous yeux.
Elle fit ensuite respirer à la duchesse;
des sels qui la ranimèrent bien vite
Après avoir rouvert les yeux et r*.
connu sa tante, Marianne voulut sala
ver, mais ses forces la trahirent et elle
™£tîeZ: son Siég6 6n diSaht â'u»e
voix dolente
-Ma tante, ma tante, je ne peux bas
je n'ai pas la force, emporW moi
veux.m'en aller 1 J
vJ^han-oi?efse adressaa» marquis un
regard qui réclamait son aide.
M. de Villehaut-d'Avron prit de nou-
veau sa bien-aimée dans ses bras et
l'emporta au fond du jardin, jusqu'à une.
petite porte basse, en face de 'laquelle:
Michel avait ftit avancer la calèche dl-
madame de Gharvallon.
Le marquis déposa Marianne dan* la
voiture et revint sur le seuil de la petite
porte, où madame de Charvallon lui dit à
demi-voix u".
Je vous prié, monsieur, de vouloir
bien me venir voir dans la journée de.
demain; je pense que j'aurai à vous ap-
prendre des choses qui vous prouveront
que ma chère enfant est digne de Tinté-
rêt d un galant homme comme vous
Le marquis s'inclina, baisa la main de
la chanomesse et lui répondit •
J'aurai l'honneur de me.'présenter
chez vous demain, madame, puisque vous
voulez bien m'y inviter, et je vous rend",
dès à présent, mille actions de grâces
pour la bienveillance que vous me témoT i
gnez,
La chanoinesse salua, monta e» voi-
ture à côté do Marianne, à demi couchée
dans un des coins, et se fit reeonduire au
~~ât6&Ut
n~~r~a~ un-a
nu^a^^™11 **ssa^
donné fort à penser.
MIE D'AaHONNE^
/La suite à demain.)
veur, déplace la majorité du conseil général,
et ôte les chances au député radical, M. Le-
père, d'en être réélu président.
Dans le même canton de Saint-Sauveur, M.
Labbé, maire, conservateur, a été élu hier
conseiller d'arrondissement.
«~ Pau, 1er mars. Des dépêches de
source carliste annoncent la*, reddition de
Bilbao. (Agence Havas.)
Perpignan, 2 mars, 7 h. 55 soir.
L'archiduc Albert d'Autriche, accompagné du
généralet du préfet, visitent Port-Vendrës.
La vente du XIXe Siècle est interdite
sur la voie publique.
ALGER, 2 mars, 6 h. 40 soir. Cette
nuit, la Corse, bateau de la Compagnie Va-
lery, venant de Marseille, a perdu son second
maître, Tavera, père de trois enfants, em-
porté par un coup de mer. Les recherches
faites pendant deux heures ont été inutiles
pour le retrouver.
Très gros temps annoncé par l'observatoire
d'Alger trombes d'eau.
Tarascon, 2 mars. Le train omni-
bus n° 28, parti de Marseille hier, à 10 h. 35
du soir, a déraillé près de Graveron, entre
Tarascon et Avignon, vers deux heures du
matin.
Sept personnes ont été blessées, mais une
seule, grièvement.
La cause du déraillement n'est pas encore
connue.
~~» Lyon, 1er mars, 8 h. 10 soir. Des
perquisitions domiciliaires se rapportant à'
l'affairé -Gàhêû-Lyon (fournitures militaires
au gouvernement du 4 septembre et tenta-
tives de corruption envers des fonctionnaires)
ont été opérées sur l'ordre de M. Guoz, juge
d'instruction, notamment chez un tailleur
demeurant sur le quai de Pierre-Scise, où on
a saisi des pièces compromettantes.
Cent ouvrières de l'atelier Chapelle,
fllateur à Tournon, se-sont mises en grève,
demandant une augmentation de salaire.
~» Hier, à deux heures du matin, la po-
lice a fait une descente dans un tripot igno-
ble, appelé le Chalet, situé aux Charpennes.
Elle a saisi lea cartes, les enjeux, et dressé
procès-verbal contre cinquante-deux joueurs.
Nice, 2 mars, 1 l'-hi .45 matin. Hier,
à une heuredu matin, incendie et explosion
à la fabrique d'huile, appartenant à M. Mar-
chessaux, au Magnan. Pas d'accidents. Perte
de 40,000 francs. Le maire de Nice, le secré-
taire général* de la préfecture étaient pré-
sents.
1 Londres, 28 février.– Le nouveau
Parlement se réunit, comme vous savez,
jeudi prochain, 5 mars.
La cérémonie d'ouverture, datant du moyen
âge, est assez curieuse pour être racontée. Elle
commence à la Chambre des lords, où les
membres de la Chambre des communes, ap-
pelés par « le Bâton noir », se réunissent sous
la surveillance du sergent-ès-armes et du
clerc de la Chambre. Dans l'absence certaine
de la reine, ils seront recus par une commis-
sion des Lords, en robes Parlâtes et chapeaux
à claques, qui communiqueront, par la bou-
che du Lord chancelier, l'adresse 'suivante
Nous sommes commandés par S. M. la Reine
de vous faire savoir qu'aussitôt le serment
de fidélité prêté par les deux Chambres, elle
vous expliquera les raisons qui ont provo-
qué votre réunion; et, vu la nécessité do
nommer en premier lieu un président de la
Chambre des communes, Sa majesté veut que
cette électionait lieu dores et déjà. » Aussi-
tôt, les « fidèles Communes se retirent,
nomment leur président et reviennent le len-
• demain, dans le même ordre, à la Chambre
des lords.
Le nouveau président fait part à leurs Sei-
gneuries de son élection dans les termes sui-
vants « Je me présente devant vos Seigneu-
ries en toute humilité, et je me soumets pour
l'approbation gracieuse de sa Majesté Le
lord chancelier signifie au président que le
choix de ses collègues est agrée par le sou-
verain, et, avec force salutations et compli-
ments, le président se retire. Alors seule-
ment, commence l'opération du serment de
fidélité, qui, pour les 652 membres, dure qua-
tre jours au moins. Cela fait, la Chambre des
Communes se rend de nouveau chez les lords
où le chancelier lit le discours d'ouverture.
Mais comme les membres du nouveau minis-
tère, qut siègent à la Chambre des Commu-
nes, doivent se présenter à leurs colléges
électoraux pour être ré-nommés, les affaires
ne pourront guère être entreprises avant la
fin du mois de mars. Tout fait prévoir que la
session de cette année sera fort calme. Le
parti libéral est très divisé, et on ne s'at-
tend pas à ce que M. Gladstone prendra part
aux débats. Ses médecins lui recommandent
un repos absolu de quelques mois.
Auguste Maroade.
BOITE AUX LETTRES
Notre collaborateur judiciaire, M. Fer-
nand de Rodays, a reçu la lettre sui-
vante
Monsieur,
La personne qui vous a communiqué le ju-
gement du tribunal de Saint-Omer dans une
affaire qui m'intéresse, a surpris votre bonne
foi en ne vous donnant pas le texte complet
de l'arrêt. Vous me saurez gré, j'en suis con-
vaineu, monsieur, de vous mettreà même do
FcnilIctDn du FIGARO da 4 Mars
LES NUITS SANGLANTES
Les persécutions de madame de Chau-
desaigues avaient cessé, depuis un jour
où, abordée par la baronne, Marianne
avait eu assez de force pour supporter le
choc et lui avait tenu ce langage
Chère madame, je suis malade; le
mot mariage m'est odieux; je n'en sau-
rais expliquer les causes, mais cela est
ainsi. Ma tante vous porte de l'intérêt,
adressez-vous à elle, et prenez pitié
d'une femme qui, comme moi, ne saurait
s'occuper des intérêts d'autrui, étant
complètement absorbée par ce qui se
passe en elle de douloureux et d'inex-
plicable.
Il y avait un mois que cette petite
scène avait eu lieu, et la baronne en
boudait encore madame de Montravert.
Mais qu'importait à Marianne ? Elle ne
redoutait plus la présence de madame de
Chaudesaigues, n'ayant plus à craindre
ses confidences, et, depuis lors, sa quié-
tude n'avait plus été troublée.
M. de Mornant possédait les plus beaux
jardins de Biarritz, où pourtant il y en a
de fort beaux.
C'était dans ceë jardins que devait
avoir lieu la fête de nuit.
Marianne, pour faire honneur à M. de
Mornant, avait résolu de se faire très
.belle.
Il s'agît, d'abord, de savoir si elle se
mettrait en noir ou en blanc.
Après de nombreux conciliabules avec
madame Barberine et mademoiselle Jo-
jséphine, il fut décidé que la duchesse se
mettrait en blanc.
ie choitx de l'étoffe ûs la robe ÎQmba
faire acte de justice en vous adressant sous ce
pli la fin des considérants des juges.
Vous vous arrêtez à cette phrase
« Il n'a fait que devancer le double événe-
ment, qui bientôt s'est réalisé, la conversion
du Soir à un autre culte. »
La phrase continue ainsi
« Et l'honorable retraite d'Hector Pessard,
» se séparant résolument d'un journal qui ne
̃» représentait plus les idées à la défense des-
» quelles il a- voué son talent et tous ses
» efforts ,»
« Considérant que s'il est vrai qu'Hector
» Pessard n'a point été diffamé personnelle-
» ment et individuellement, il l'est encore
» qu'il n'a éprouvé aucun préjudice, car il
» n'attribue pas sans doute à l'article ou plu-
» tôt à l'entrefilets dont il se plaint, le veto
» mis à l'apparition de son journal le Jour et.
la lettre d'Atticus, dans laquelle il est parlé
» de lui, n'a point empêché ses Lettres d'un in-
» tarait de faire leur chemin dans la presse
» départementale, dans le Pas-de-Calais
» comme dans l'Anjou peut-être et d'y ob-
» tenir tout le succès qu'elles peuvent mé-
» riter. »
Par ces motifs, etc.
Je compte sur votre obligeance, monsieur,
pour placer sous les yeux de vos lecteurs
les lignes qui précèdent et je vous prie d'a-
gréer, avec mes remercîments, l'assurance
de ma considération la plus distinguée.
HECTOR PESSARD.
A monsieur le directeur du Figaro.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous prier d'insérer, en
réponse à l'article publié par le Rappel sous
le titre le Testament de M. Michelet, dans le
numéro du 3 mars 1874, la lettre suivante
« Monsieur Auguste Vacquerie,
« Ma qualité de tuteur des héritiers de M.
Michelet (car personnellement je ne puis y
avoir aucun intérêt) m'ihterdit de traiter
avec vous des questions de famille. Mais je
regrette que vous ayez publié le testament
de M. Michelet à l'insu de ses héritiers
» Vous avez pu remarquer qu'il contenait
beaucoup de clauses privées qui n'appartien-
nent pas à la publicité. -r Et je suis surpris
aussi que vous ne paraissiez point avoir fait
attention à la clause impérative, par laquelle
M. Michelet fait un devoir de l'inhumer sans
cérémonie religieuse au cimetière le plus
voisin du lieu de son décès.
» J'espère, monsieur, que vous ne conti-
nuerez pas une publicité aussi regrettable,
inspirée par des sentiments hostiles à la jeune
famille de M. Michelet, qui compte une mi-
neure et un absent.
» Recevez, etc. »
Veuillez agréer, monsieur le directeur,
l'assurance do mes sentiments très distin-
gués.
A. POtLLAIN-DUMESNIL.
Paris. 3 mars 1874.
4.
COMITÉ DES FOURNEAUX ÉCONOMIQUES
Sous le patronage
DE MADAME LA- MARÉCHALE DE MAC-MAHON
Paris, le 2 mars 1874.
Aujourd'hui, 2 mars, le Comité a mis en
circulation 200,000 bons de pain, viande
bouillon ou légumes pour être délivrés gra-
tuitement, pendant une semaine, aux ouvriers
sans ouvrage, dans 45 fourneaux économi-
ques, et il s'apprête à en augmenter succes-
sivement le nombre.
Il va être établi, dans chaque arrondisse-
ment, des dépôts où les bons seront vendus
10 centimes aux personnes qui voudront les
distribuer elles-mêmes.
Grâce au concours de la Société philantro-
pique, de celle de Saint-Vincent-de-Paul et
de la direction de l'Assistance publique, au-
cune dépense n'a été faite pour la construc-
tion des fourneaux et les irais de premier
établissement tout l'argent remis au Comité
sera donc employé en secours.
Mais les besoins révélés par les recherches
sont beaucoup plus grands qu'on ne le sup-
posait d'abord, et, malgré la générosité avec
laquelle il a été répondu à son appel et le
chiffre élevé de la souscription, il a besoin
que la charité ne s'arrête pas pour qu'elle a
puisse atteindre son but et que, pendant la
crise dont les ouvriers sont les victimes, per-
sonne né soit exposé à souffrir de la faim.
Dès a présent on peut acheter des bons
Chez M^de Benque, trésorier, rue Radzi-
vill,2; 1
Chez M. le marquis de Biencourt, secrétai-
re, rue Saint-Dominique, 67;
Et aux bureaux des-journaux qui en font la
demande.
Nous rappelons à. nos lecteurs jjue le prix
d'abonnement au Figaro est, pour les dé-
partements, de 16 fr. 50 pour trois mois,
33 fr. pour six mois, et 66 /r* pour un an.
sur la mousseline des Indes, qui n'était
pas incompatible avec un deuil dé neuf
mois.
La robe serait garnie de grands volants
au bas desquels il n'y aurait qu'un grand
ourlet; le corsage devait avoir des bas-
ques pareilles, et serait retenu autour
de la taille par une ceinture de crêpe,
dont un gros nœud, avec de longs bouts j
frangés, devait occuper tout un côté.
Pour la coiffure, il fut convenu que les
cheveux de la duchesse seraient relevés,
après avoir été bouclés, par une bride de
crêpe noir, retenu sur le derrière de la
tête par un nœud de perles fines, le deuil
ne comportant pas d'autres bijoux.
Le jour solennel arriva.
Le soir, la maison et les jardins du
gentilhomme béarnais étaient illuminés
de la façon là plus merveilleuse.
Quand Marianne et madame de Char-
vallon entrèrent chez M. de Mornant, un
grand nombre d'invités s'y trouvaient déj à
réunis M. de Villehaut-d'Avron était de
ce nombre,
La duchesse fut trouvée adorable les
habitués des soirées de M. de Mornant ne
l'ayant vue que sous ses vêtements noirs,
s'extasièrent de la manière admirable
dont le blanc relevait sa beauté.
Lorsque le premier moment de surprise
fut passé, et que la duchesse eut remer-
cié toutes les personnes qui vinrent la
complimenter, le marquis lui offrit son
bras et la conduisit dans les jardins,
faire un tour sous les grands arbres, du
milieu desquels des lanternes de cou-
leur répandaient des lueurs' fantasti-
ques.
Le jeune homme, cédant aux entraîne-
ments de son cœur, avait décidé qu'il
n'attendrait pas au lendemain pour de-
mander à Marianne, dont il était sûr d'ê-
tre aimé, si elle voulait l'agréer pour
prétendant et lui laisser espérer que, si-
tôt après son deuil j elle l'accepterait
pour époux.
En présence de la jeunesse de Ma-
rianne, il s'était plus d'une fois demandé
si c'était à §Il£ op ,à madame de Char-
28
PARIS M JOUR LE .101 li
Les journaux se préoccupent unique-
ment des élections et de la signification
qu'elles comportent. L'impression n'est
pas absolument décourageante, et il nous
semble que la Gazette de France a raison
quand elle voit dans l'inflme majorité
obtenue par les républicains une preuve
que la France n'est pas aussi enthousiaste
de la République qu'on le prétend.
Si l'on ne veut considérer que les oppo-
sants et les abstenants, il est bien évident
que, même en ne tenant compte que de la
volonté exprimée du plus grand nombre, la
majorité réelle n'est nullement républicaine,
que tout au moins les forces s'équilibrent.
C'est donc ailleurs que dans les incessantes
fluctuations des majorités électorales qu'il
faut aller chercher les éléments d'une solu-
tion définitive. Loin de prouver quoi que ce
soit en faveur de la République, les élections
qui-viennent d'avoir lieu n'établissent claire-
ment qu'une chose> l'absurdité, l'immoralité
de ce système de la souveraineté du peuple
qui fait dépendre l'avenir et les destinées
d'un grand pays comme la France de minori-
tés de trois ou quatre mille voix.
Où commence peut-être le paradoxe,
c'est quand on soutient que les candidats
vaincus auraient gagné à -afficher plus
nettement leurs préférences. Ici, chacun
tire la couverture à soi. Si M. de Beau-
champ s'était déclaré impérialiste, s'é-
crie le Gaulois, il aurait été nommé. Si
M. de Billiotti avait arboré le drapeau
blanc, reprend l' Union, il n'eût pas suc-
combé.
Il est extrêmement difficile de jauger
la valeur de ces prétentions-là.
La Presse a fait œuvre utile en recher-
chant dans les déclarations passées de
M. Ledru-Rollin ce qu'il veut et ce qu'il
représente. Il a refusé de publier une
nouvelle profession de foi; on est donc
forcé de s'en tenir à ses anciennes décla-
rations, et de rechercher quelles doctri-
nes il préconisait.
Le avril 1848,M.Ledru-Rollin écrivait aux
commissaires de la République
« Nous touchons aux élections. Ce qui fait
la grandeur du .mandat du représentant, c'est
qu'il investit celui qui en est revêtu du pou-
voir souverain d'interpréter et de traduire l'in-
térêt et la volonté de tous.
» Or, celui-là seul en usera dignement qui
ne reculera devant aucune des conséquences
du triple dogme de la liberté, de l'égalité, de
la fraternité.
» De là découlent
» L'abolition de tout privilège;
» La répartition de l'impôt en raison de la
fortune
» Un droit proportionnel et progressif sur
les successions;
» Le plus complet développement de l'ins-
titution du jury;
» Une magistrature librement élue.
> Le service militaire pesant également
sur tous;
» Une éducation gratuite et égale pour
tous i
» L'instrument du travail assuré à tous
» La reconstruction démocratique de l'in-
dustrie et du crédit;
L'association volontaire partout substituée
aux impulsions désordonnées de l'égoïsme. »
Nous voilà en plein socialisme. M. Le-
dru-Rollin n'a pas changé; de son propre
aveu, il n'a rien appris, rien oublié, mais
comme en réalité les opinions et les expé-
dients dont il est le champion ne peuvent
jamais réunir plus de soixante ou qua-
tre-vingt voix dans l'Assemblée, il J1 y a
pas à s'inquiéter outre mesure de sa ré
surrection.
Dans le Soir, M. Villetard réunit quel-
ques chiffres dont l'ensemble démontre
très clairement les progrès évidents de
l'idée conservatrice, c'est-à-dire du sep-
tennat et de la trêve loyalèment pra-
tiquée.
Aux élections partielles d'octobre dernier,
l'opposition obtenait dans la Haute-Garonne,
70,000 vtix contre 31,000; dans la Loire,
61,000 contre 25,000 dans la Nièvre, 40,000
contre 28,000; dans le Puy-de-Dôme, le
parti conservateur n'avait même pas de can-
idat.
Le 16 novembre, l'opposition écrasait les
conservateurs par plus de 42,000 voix contre
moins de 18,000 dans l'Aube, et par 83,000
contre 48,000 dans la Seine-Inférieure.
Le 14 décembre, les majorités obtenues
partout par l'opposition étaient moins fou-
droyantes elles étaient encore formidables
57,000 voixcontre 38,000 dans Seine-et-Oise;
60,000 contre 40,000 dans le Finistère 36,000
contre 25,000 dans l'Aude.
Dans les quatre élections qui ont eu
lieu depuis le 1" janvier, l'écart est
presque insignifiant et les conservateurs
ont résisté avec un ensemble qui permet
de beaucoup espérer pour l'avenir.
**# Au moment où M. Guizot est frap-
pé si cruellement de la perte dey sa fille,
vallon qu'il devait s'adresser d'abord pour
solliciter sa main mais, en réfléchissant
plus mûrement, il s'était dit que Ma-
rianne était madame de Montravert,
qu'elle portait le deuil d'un mari, et qu'il
né pouvait agir autrement avec elle que
vis-à-vis d'une veuve.
Donc, M. de Villehaut-d'Avron était
j bien résolu à traiter ce soir-là avec la
duchesse elle-même, la question. de'ma-
riage..
Dans ce but, il la conduisit sous un
bouquet d'arbres hauts et touffus, au pied
[ desquels se trouvaient quelques sièges
de jonc.
Jl la fit asseoir sur- un de ces sièges,
prit place à ses côtés, et, s'emparant de
l'une de ses mains, qu'elle lui abandonna
sans aucune résistance;
Oh 1 Marianne! ma chère bien-ai-
mée, mon adorée Marianne, laissez-inoi
croire qu'un jour prochain viendra où
nous ne nous séparerons plus, et que vous
j le voulez bien 1
| A ces mots, Marianne se sentit toute
troublée, et ces mêmes frayeurs que ma-
dame de Chaudesaigues avait le malheu-
reux don de faire naître en elle commen-
cèrent à l'envahir.
Sur le sable des allées, où se jouaient
des tons étranges et multiples, les bran-
ches des arbres, agitées par la brise du
soir, lui parurent tracer des tableaux
menaçants; bientôt la couleur rouge des
lanternes, qui était dominante, lui fai-
sant illusion, lui représenta le canapé et
les rideaux rouges de M. de Montravert;
puis, l'hallucination devenant plus in-
tense, à chaque angle sombre, au détour
de chaque allée, au pied des massifs de
fleurs, dont la cîme éclairée rendait le
bas plus noir encore, sur les bancs du
jardin, dans l'épaisseur du feuillage, au
tronc des vieux arbres, partout elle le vit
lui, grimaçant d'une façon hideuse, tel
qu'elle l'avait aperçu dans la matinée
fîu 3 décembre
Le ftiarqufs, bien qu'il eut senti, dès le
premier moment, trembler la main de
Marianne, ne pouvait se douter de ce
madame de Witt, la Revue des Deux-Mondes
publie une étude de lui sur feu M. Vitet.
Il y a trouvé l'occasion de .dire son mot
sur l'état présent de la France et l'on re-
marquera l'appui que cet esprit éminent:
apporte au septennat, sans préjudice de
ce que nous réserve l'avenir. M., Guizot
se demande si la France approche d'une
solution définitive et conclut dans les
termes que voici
Nous avons tenté la solution monarchique
par la réconciliation et l'union des deuxbran-
ches de la maison royale. Cette combinaison
a échoué. M. le comte de Chambord n'a pas
voulu en accepter les conditions nationales.
Nous sommes rentrés dans la combinaison
républicaine, mais en lui maintenant son ca-
ractère provisoire; c'est pour sept ans seule-
ment que la majorité de l'Assemblée natio-
nale a remis à la loyauté de M. le maréchal
de Mac-Mahon le soin de maintenir l'ordre en
France sans y proclamer définitivement la ré-
publique.
Quand le maréchal aura accompli son sep-
tennat, nous nous retrouverons en face de la
même question, monarchique ou républi-
caine, ou mêlée peut-être de ces deux carac-
tères, comme au dix-septième siècle chez les
Hollandais, quand ils ont fait du stathoudérat
une institution permanente de la république
des Provinces-Unies. Je n'ai garde de prédire
laquelle de ces deux combinaisons prévau-
dra tout ce qu'on peut affirmer aujourd'hui,
c'est que nous ne sommes pas sortis de l'état
provisoire seulement, nous avons pris le
temps de la réflexion pour en sortir et un peu
plus d'expérience des diverses combinaisons
par lesquelles nous pourrions en sortir. Notre
habileté n'a pas fait plus de progrès, et ma
prévoyance ne va pas plus loin.
# Le discours académique de M. 01-
livier prend les proportions d'un événe-
ment. Nous avons déjà indiqué sur quoi
porte le débat l'éloge de l'empire par le
nouvel académicien et les-objections de
M. Guizot qui, si nous avons bonne mé-
moire, n'a pas nui à son élection.
Je comprends, a dit M. Guizot, que vous
rappeliez avec éloge les tentatives de Napo-
léon III pour arriver à l'établissement de
l'Empire libéral; c'est une entreprise à la-
quelle vous avez prêté votre concours, et
que vous devez en conséquence apprécier
d'une manière favorable.
» Mais glorifier sans réserve le régime qui
a été imposé à la France depuis 1851, c'est
vous mettre en contradiction avec vous-
même
» Vanter la politique extérieure qui a ame-
né la catastrophe de 1870, qui nous a infligé
de si cruels désastres, qui nous a enlevé l'Al-
sace et une partie de la Lorraine, c'est vous
mettre en contradiction avec la raison, avec
le, bon sens, avec l'histoire »
M. Emile Ollivier a maintenu son discours
sans vouloir en changer un mot
Les membres do la commission se sont mon-
trés surpris et blessés de cette persistance, et
M. Guizot s'est rendu l'interprète de leurs
sentiments en s'écriant
« Monsieur, on pourrait vous pardonner
d'avoir le cœur léger; mais avoir l'esprit
aussMéger que le cœur, c'est trop!,» »
M. Emile Ollivier a répondu en ren-
dant à sa phrase fameuse le sens gram-
matical qu'il lui a toujours attribué, pen-
sons-nous. Cœur léger voulait dire cœur
résolu, sans reproches, et non point cœur
indifférent ou joyeux.
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, devant
l'Académie réunie, M. d'Haussonville doit
demander ou l'atténuation de certains
passages du discours ou l'ajournement
de la réception.
Si nous sommes bien informés, dit la Presse,
que les relations académiques de M. Marius
Topin doivent tenir au courant de l'incident,
M. d'IIaussonville invoquera, comme précé-
dent, ce qui s'est passé sous l'Empire au mo-
ment de la réception de son illustre beau-
père, le duc de Broglie, père du duc actuel.
Son discours renfermait à la fois une justifi-
cation fort habile du 18 Brumaire et une con-
damnation sévère du 2 Décembre. Sur la de-
mande de M. Nisard, si nous ne nous trom-
pons pas. tout ce qui avait trait au 2 décem-
bre fut sacrifié et supprimé.
On parlait hier au soir beaucoup d'un vif
mécontentement éprouvé par certains mem-
bres du gouvernement et du désir manifesté
par eux d'intervenir et de faire interdire la
réception.
Nous croyons devoir mettre le public en
garde contre ces bruits fort exagérés. L'Aca-
démie française, c'est son droit, c'est son
honneur, doit conserver une indépendance
complète. C'est à elle seule qu'il appartient
de décider ce qui convient aussi à la dignité
de celui qu'elle a librement appelé dans son
sein au moment où l'Empire entrait dans une
phase libérale.
Si un profane comme nous avait voix
au chapitre, il nous semble que l'Acadé-
mie ferait bien d'accepter le discours de
M. Ollivier tel quel. N'oublions point que
son élection fut, de la part de l'Institut,
une avance très marquée, trop marquée
peut:êtré, au gouvernement impérial
c'était presque un gage de réconciliation.
Les événements postérieurs onj dû mo-
difier les impressions de bien des Acadé-
miciens, mais rien ne peut empêcher que
la nomination ait été faite et- que l'Aca-
qui se passait en elle, et assignant à son
émotion une toute autre cause, il con-
tinua a
Qui donc, je vous le demande, pour-
rait vous aimer ainsi quo je ,vous aime? î
A qui votre amour pourrait-il donner
une joie et un bonheur pareils à ceux
que j'éprouve? Quel est l'homme qui,
mieux que moi, saurait vous comprendre
et yous admirer autant que vous en êtes
digne ? Croyez-moi, mon adorée, Dieu,
en me faisant pour vous, vous a faite
pour moi nous sommes unis de par sa
volonté immuable; ni les circonstances,
ni les choses, ni les hommes ne peuvent
nous séparer! l
Marianne regardait toujours sous les
arbres, dans les branches, dans les om-
bres mouvantes qui allaient se dépla-
cant, et toujours, partout, ses regards se
heurtaient à l'horrible spectre du duc.
Peu à peu, sa respiration devenait plus
lente, ses yeux' perdaient de la clair-
yoyance, sa raison s'égarait davantage e\
le cadavre allait grossissant.
Elle commençait à appeler tout bas sa
tante, et instinctivement, pensant à la
çb-'anoinesse, elle se peiicha çjavaiitage
véi-s le mawjuîs, pressa)!t convulsivement
ses mains, et finit par laisser tomber sa
tête sur son épaule.
Se méprenant encore sur la véritable I
cause qui faisait ainsi s'abandonner la
jeune femme, M. de Villebaut-d/Avron
lui disait
Merci, Marianne Vous avez pitié de
moi, vous êtes bonne! Jamais, croyez-
moi bien, vous n'aurez à vous repentir
de m'avoir laissé vous adorer Vous
me permettez, n'est-ce pas, de faire part
de nos projets à madame de Charvallon?
Vous voulez bien m'autoriser à lui de-
mander votre main ? Reposez-vous sur
moi du soin d'arranger toute chose pour
l'époque où notre mariage pourra se
faire d'ici là, laissez-moi vous dire crue
je vous aime, et j'attendrai avec patience
fet résignation' Vheùre ou vous voudrez
bien quitter le nom -du duc de Montra-
démie ait distingué l'orateur seulement
le jour où il était ministre.
Il faudrait donc prendre son parti en
braves, d'autant mieux que M. Ollivier
s'honore par sa fidélité, quand même on
la jugerait intempestive.
#*# Le Figaro a signalé hier le dénoû-
ment de cet insupportable procès Tich-
borne qui a occupé cent quatre-vingt-
sept audiences. Le lord-chief justice a
trouvé précisément dans ces conditions
de durée, exceptionnelle une fiche de
consolation.
Messieurs, a-t-il dit aux jurés, je regrette
beaucoup toute la perte de temps que vous
ont occasionnée les longueurs de ce procès. Je
suis moi-même bien fatigué, mais nous avons
tous du moins cette consolation que nos noms
sont à jamais célèbres dans l'histoire des an-
nales judiciaires du Royaume-Uni, comme
ayant figuré au cours des débats de la cause
célèbre la plus extraordinaire du siècle.
L'accusé a entendu avec sang-froid la
sentence qui le déclarait faussaire et
usurpateur du titre et du nom des Tich-
borne il a serré la main de son défen-
seur et a suivi le chef, des huissiers en
prison. On sait que, pour alimenter son
pouff colossal, le faux Roger Tichborne
avait émis un emprunt dont les titres
ont été couverts très facilement en An-
gleterre. f. m.
-= 4,
Injustices et Abus
LOUIS XVI
Ceci n'est point une question politique,
mais simplement une question de conve-
nances.
Voici le fait. <
Il est certain que Louis XVI, qui fut le
plus honnête homme de son royaume, et
que la France, par la voix de ses repré-
sentants, proclama le restaurateur de
la*liberté, » il est certain, disons-
nous, que Louis XVI fut assassiné par
ces trois mots Liberté, Egalité, Frater-
nité, aidés de quelques Français.
On sait, d'autre part, qu'en souvenir de
cette monstrueùse«injustice,»Louis XVIII
et Charles X ont élevé un monument
qui est connu sous le nom de « Chapelle
expiatoire, » qui existe encore aujour-
d'hui, et qui se trouve dans un square,
entre la rue Pasquier et celle d'Anjou-
Saint-Honoré.
1830, 1848 l'insurrection de Juin
le 4 Septembre et même la Commune ont
respecté ce monument, plus heureux,
sous ca rapport, que la glorieuse colonne
impériale, c'est-à-dire qu'aucune de
ces révolutions ou insurrections politi-
ques ne l'a démoli ni pétrolé.
Mais il ne suffit pas, pour bien faire,
de respecter matériellement une chose
respectable, il faut la respecter morale-
ment.
C'est ce qu'on a complètement oublié
le jour où on a inscrit sur le fronton de
cette chapelle, les mots assassins de Li-
berté, Evglité, Fraternité.
Tout au moins eût-on dû ajouter à ces
trois mots ceux-ci ou la mort
C'eût été de la couleur historique et on
aurait pu comprendre.
Autrement, on ne peut y voir qu'une
plaisanterie si déplacée qu'elle prend
les proportions du plus inqualifiable ou-
trage. ̃
Nous espérons qu'il suffira de signaler
le fait pour que l'autorité actuelle, qui ne
l'avait sans doute pas remarqué, en fasse
prompte justice.
P. S. En réponse, à notre article du
2 mars, intitulé Errements postaux, un de nos
lecteurs nous écrit que nous avons été mal
renseignés en ce qui concerne la défense
d'expédier des journaux simplement ficelés,
avec adresse sur la marge.
Chaque jour, nous affirme-t-il, il envoie le
Figaro en province dans les conditions que
nous avons accusé la poste de ne point per-
mettre.
Dont acte. Reste ce que nous avons dit
relativement à l'expédition des livres.- e. f.
+_
INFORMATIONS
La Journée
Grand diner hier au ministère des af-
faires étrangères.
Nous citerons -parmi les convives
M. le comte de Paris, M. le duc de Ne-
mours, M. le prince de Joinville, M. 'le
duc d'Aumale, M. le comte d'Eu, M. le
duc de Chàrtres, M. le duc d'Alencon,
M. le duc de Penthièvre, M. le prince
Czartoryski, madame, la princesse Clé-
vert pour prendre celui du marquis de
Villehaut-d'Avron..
A ce mot de mariage et au nom de
M. de Montravert, Marianne éprouva une
commotion terrible ses oreilles bour-
donnèrent, son regard s'éteignit tout à
fait, ses dents claquèrent, ses muscles se
détendirent, et, poussant un cri rauque,
elle s'évanouit.
En sentant ce corps charmant qui s'af-
faissait sur lui, M- de ViUeh^ut-d'Avron
fut pris d'un jneflfable sentiment de ten-
dra pitié pour cet être faible dont il avait
mission d'assurer le bonheur.
Il prit madame de Montravert dans ses
bras, et/tournant la maison en suivant
les allées les plus désertes et les moins
éclairées, il là porta dans une petite
pièce du rçz-de-chaussée où Michel, qui
n'était jamais loin de son maltre, accou-
rut aussitôt.
Cours prévenir madame do Ghapval-
lon, lui dit le marquas, et cela, sans que
personne se doute qu'elle est appelée au-
près de sa nièce. Accompagne-la jus-
qu'ici, et ne perds pas une seconde.
Michel partit, et M. de Villehaut-d'A-
Yr-on, seul aveu Marianne, la soutenant
de ses deux bras, et ayant sa tête tou-
jours appuyée sur son épaule, lui parlait
doucement, lui disant de ces mots d'a-
mour qui, lui semblait-il, devaient péné-
trer jusqu'à son âme, en dépit de l'anéan-
tissement complet de son corps. Il la ber-
çait comme, une enfant malade, dont il
aurait voulu endormir la doulour.
En même temps, il se disait
Pauvre ehèz'e mignonne } Qu'elle est
délicate, et combien elle a besoin de mé-
nagements, de soins, d'affection et d'a-
mour Comme nous allons être heureux
quand il me sera permis de ne plus la
quitter, de la tenir ainsi dans mes br«s
et de la faire dormir sur mon ççpur
La chanoinesse arriva, préoédée de
Michel.
£;n voyant son enfant, pâle et sans vie,
aux bras de M. deVîllehaut-d;Avrftn,.son
premier soin fut de rassurer le m.arqu\8
sur l'état de Marianne, dont les synçay,è§
Emile Faure.
mentine, madame la duchesse de Char-
tres, madame la. princesse Gzartoryska,
madame la princesse Obrenovitch, M. le
duc de Broglie, le ministre du Brésil et
madame la vicomtesse d'Itajuba, M. le
comte et madame -la comtesse d'Haut-
poul, M. le marquis et madame la mar-
quise de Noailles, M. le marquis et ma-
dame la marquise de Trévise, le préfet
de police et madame Léon Renault, M. le
comte d'Haussonville, etc.
Le dîner a été suivi d'une brillante ré-
ception.
L ASSASSINAT DE LA RUE BLONDEL.
Hier a été commis, dans le centre de
Paris, rue Blondel, à deux pas du boule-
vard, un crime qui est appelé à prendre
place au premier rang des causes célè-
bres, par l'audace de son auteur et par
les circonstances tout particulièrement
horribles quil'entourent.
En voici le récit
Rue Blondel, n" 3, dans une maison de
sombre apparence, habitait depuis quel-
ques années une marchande à la toilette,
la veuve Pelissier. Vous dire
de tout, depuis des dentelles d'Angle-
terre, depuis des brillants de prix, jus-
qu'à des chiffons sans forme. Elle recru-
tait beaucoup sa clientèle parmi les de-
moiselles de mœurs faciles qui abondent
dans ces parages. C'était, à tous les
points de vue, un type curieux que la
veuve Pelissier.
Levée dès cinq heures du matin, elle
s'occupait de balayer, épousseter et ran-
ger son capharnaum. A six heures, elle
allait chercher son déjeûner, un peu de
lait et de pain. Puis elle se plaçait -sur le
pas de sa porte, guettant les pratiques.
Elle avait un flair merveilleux pour dé-
couvrir les gens qui avaient besoin d'ar-
gent. Quand elle disait à un passant
Vendez-moi votre paletot, mon joli
garçon 1
Il était bien rare que le joli garçon
conservât son pardessus. Les trois quarts
du temps, il apportait son gilet le soir.
Tout le quartier connaissait la mère
Pélissier, et tous les pauvres gens des
rues circonvoisines avaient plus ou moins
passé par ses mains. On disait bien
quelque mal d'elle, mais, en somme, on
n'avait aucun fait spécial à liii repiô-
cher, sinon d'être un peu âpre au gain;
Or, hier matin, vers neuf heures, on
vit tout à coup le veuve. Pélissier s'élan-
cer, les bras levés, du seuil de sa bouti-
que et tomber toute sanglante, les pieds
sur le trottoir, les épaules en avant, sa
tête aux trois-quarts détachée ballottant
sur ses épaules, Deux ou trois crispa-
tions, et la malheureuse expira au milieu
d'une mare de sang. .̃••«. ,Z
On juge avec quelle rapidité se forma
un rassemblement énorme autour de la
vieille femme presque décapitée, dont le
sang continuait à jaillir par la section
du cou, rougissant le ruisseau dansle-
quel baignaient ses cheveux gris.
Pendant ce temps, l'assassin s'élançait
du côté du boulevard Sébastopol, et dis- v
paraissait avant que l'idée fût vernie à
personne de l'arrêter. Deux habitants de
la rue, les sieurs Gnffoult, charbonnier,
et Marent, cordonnier, l'ont, cependant
assez bien dévisagé pour pouvoir le> re-
connaître.
C'est, ont-ils dit, un jeune homme de
taille moyenne, aux cheveux coupés en
brosse, et porteur d'une fine moustache.
Il était vêtu d'un paletot marron, d'un
pantalon gris, et coiffé d'un chapeau
de soie à haute forme.
Depuis quelques jours, M. Marent l'a-
vait remarqué qui rôdait autour de la
boutique, s'approchant pour tâter et sou-
peser les étoffes pendues à la porte, et
regardant les bijoux à travers les vitri-
nes.
Dans la matinée de samedi, on l'avait
vu entrer et marchander des çiiemises
d'homme sans les acheter.
Voici ce qui résulte des constatations
faites' par M. Mahieu, commissaire de po-
lice du quartier.
La victime a eu la gorge tranchée à
laide d un rasoir lui appartenant. Il est
donc facile de reconstituer la scène qui
s'est passée. 7 H
L'assassin marchandé ce rasoir, et
le prenant tout ouvert des mains de la
veuve Pélissier, s'est jeté sur elle et lui
a porté un coup de gauche à droite, avec
une force extraordinaire. Madame Pelis-
sier devait lever la tête à ce moment;
cela résulte de l'examen de la blessure.
Il est donc probable qu'en marchandant
le rasoir, l'assassin appelait so'rf atten-
tion' au plafond, où pendent, entre pa-
renthèses, les objets les. plus hétérochr-
tes, robes de prix et perroquets empailiésk'
Il n'y a pas eu de lutte, car rien n\^t
ne lui inspiraientplus une grande fravpnr
tant elles s'étaient renouâtes de S
hélas sous yeux.
Elle fit ensuite respirer à la duchesse;
des sels qui la ranimèrent bien vite
Après avoir rouvert les yeux et r*.
connu sa tante, Marianne voulut sala
ver, mais ses forces la trahirent et elle
™£tîeZ: son Siég6 6n diSaht â'u»e
voix dolente
-Ma tante, ma tante, je ne peux bas
je n'ai pas la force, emporW moi
veux.m'en aller 1 J
vJ^han-oi?efse adressaa» marquis un
regard qui réclamait son aide.
M. de Villehaut-d'Avron prit de nou-
veau sa bien-aimée dans ses bras et
l'emporta au fond du jardin, jusqu'à une.
petite porte basse, en face de 'laquelle:
Michel avait ftit avancer la calèche dl-
madame de Gharvallon.
Le marquis déposa Marianne dan* la
voiture et revint sur le seuil de la petite
porte, où madame de Charvallon lui dit à
demi-voix u".
Je vous prié, monsieur, de vouloir
bien me venir voir dans la journée de.
demain; je pense que j'aurai à vous ap-
prendre des choses qui vous prouveront
que ma chère enfant est digne de Tinté-
rêt d un galant homme comme vous
Le marquis s'inclina, baisa la main de
la chanomesse et lui répondit •
J'aurai l'honneur de me.'présenter
chez vous demain, madame, puisque vous
voulez bien m'y inviter, et je vous rend",
dès à présent, mille actions de grâces
pour la bienveillance que vous me témoT i
gnez,
La chanoinesse salua, monta e» voi-
ture à côté do Marianne, à demi couchée
dans un des coins, et se fit reeonduire au
~~ât6&Ut
n~~r~a~ un-a
nu^a^^™11 **ssa^
donné fort à penser.
MIE D'AaHONNE^
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