Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1910-08-29
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 29 août 1910 29 août 1910
Description : 1910/08/29 (Numéro 17957). 1910/08/29 (Numéro 17957).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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âieu vulgaire que la sentimentalité amollit «I
que le romanesque désarticule. Florence n'est
pas là cité de leurs petits émois et de leurs rê-
ves enfantins. Tandis que les femmes pous-
saient des cris en apercevant dans l'Arno, au
loin, sous les ponts, les dernières lueurs du so-
leil, je voyais mes amis les marchands, les
spéculateurs-sur les terrasses des vieux palais.
Ils avaient le droit, presque le devoir, de por-
ter des habits somptueux. Par la toute-puis-
sance de l'argent, ils. pouvaient franchement
aspirer à être les maîtres de cette ville. Elle n'é-
tait bien parée que parce qu'ils lui apportaient,
par leur savoir, leur dextérité, leur audace, des
fleuves d'or. On les redoutait, on les massacrait
parfois, mais on n'affectait pas de les tenir en
mépris. Ils donnaient à leur patrie des palais et
des chefs-d'œuvre, comme nous offrons un hôtel
ou un collier à des belles filles.
» Les sottes! Elles veulent ici un poète qui
leur murmure des vers obscurs, un érudit qui
leur raconte des histoires découvertes dans la
poussière des bibliothèques. Elles ne voient pas
c$ue cette ville est ma ville. C'est une cité de
banquiers rapaces. Aussi elle est en or quand
se couche le soleil, et quelques secondes plus
tard, ele paraît livide comme si elle tombait
en putréfaction. Car l'excès du luxe est proche
de la mort. Florence a le charme inquiétant de
Bruges qui fut aussi la gloire de marchands.
C'est Je cadavre d'une de nos maîtresses. Elle
fut complaisante à tous les caprices de nos
pères qui l'en récompensèrent généreusement.
Elle n'est plus; mais il y a encore des chefs-
d'œuvre comme subsistent autour d'une momie
des parures. »
La femme de chambre s'avança– imperti-
nente r
Madame fait dire à monsieur qu'il est
minuit et qu'elle désire dormir.
Il répondit
C'est bien!
Et quand la domestique se fut éloignée, il
se leva très vite
je vais subir des reproches, me confiait-il,
et je tremble un peu. Si ma femme vcras_ de-
mande demain de quoi nous avons parlé, dites-
lui que vous m'avez interrogé sur des valeurs.
Je ne voudrais pas lui paraître ridicule. Elle
est très gentille; elle n'aime pas que j'exprime
des idées sur l'art; elle sait que je n'y entends
rien. Je.n'ai pas reçu comme elle une brillante
éducation. Je ne suis que bachelier. Elle joue
•tfu piano, elle chante, elle peint. Elle a, comme
̃file dit, le sens de la beauté.
Il me serra la main et disparut dans l'ascen-
seur tandis que j'achevais de fumer mon cigare,
Nozière
CONSEILS GÉNÉRAUX
(SESSION D'AOUT)
Hérault. Le conseil, après une discussion
longue et animée, a adopté le vœu suivant
Considérant que la liberté consiste à tolérer chez
autrui l'affirmation d'idées contraires à ses convictions
propres; qu'il ne doit être porté atteinte à. une liberté
existante qu'en cas de nécessité nationale ou sociale
absolue; émet le vceu que le principe de la liberté
d'enseignement soit maintenu dans nos lois, et iné-
branlablement attaché aux principes de laïcité, que les
Chambres votent dans le plus bref délai les projets de
loi Doumergue destinés à défendre l'école publique
et laïque contre les attaques injustifiées de ses adver-
saires.
Une commission a été nommée pour étudier la
question du remboursement aux conseillers géné-
raux des frais que leur occasionne la session.
̃ Lozère. Un incident s'est produit hier en
séance entre M. Monestier, député, et M. Gaillar-
don, vice-président du conseil général, au sujet
d'un crédit de 200 francs accordé, en avril dernier,
pour un concours spécial de la race ovine. M. Gail-
lardon ayant accusé la commission d'organisation
de ce concours d'avoir « forfait à l'honneur», M. Mo-
nestier a déclaré qu'en qualité de président de cette
commission il avait le droit et le devoir de relever
l'outrage. M. Gaillardon a retiré l'expression et l'in-
cident a été clos.
Marne. Le préfet a fait hier un exposé des
travaux de la réunion privée qui avait eu lieu sous
ia présidence de M. Léon Bourgeois en vue de venir
en aide aux vignerons champenois. Les résolutions
arrêtées en principe par cette commission se résu-
ment ainsi
Les caisses de crédit agricole et viticole serontinvi-
tées à modifier leurs statuts de manière à leur permet-
tre de consentir des prêts à échéance de trois ans. Les
modifications de statuts en question ne s'appliqueront
qu'aux prêts à consentir aux viticulteurs.
Ces prêts devront être garantis par une garantie
collective, constituée au moyen d'une avance à verser
par le département à une ou plusieurs sociétés agri-
cOies et viticoles, afin de permettre à ces caisses d'ob-
tenir une augmentation des avances qui leur sont con-
cédées par l'Etat. La somme à avancer ainsi par le
département s'élèverait à 800,000 fr.
Les avances accordées par l'Etat aux caisses de
crédit sont quatre fois plus fortes que les sommes dont
disposent ces caisses. Celles-ci pourront donc obtenir
une nouvelle avance de 3,200,(00 fr. au moyen des
800,000 fr. du département. Elles disposeront ainsi d'une
somme de 4 millions de francs.
Les versements du département seront effectués au
fur et à mesure des demandes de prêts que les vigne-
rons adresseront à leurs caisses. Ces dernières fixeront
le montant des avances qu'elles solliciteront.
Les fonds seront obtenus au moyen d'un centime et
demi des douze centimes extraordinaires, lequel est
inemployé dans -le budget de 1911.
Malgré l'opposition de M. Margaine, député de
Sainte-Menehould, ces différentes résolutions furent
votées par Je conseil à l'unanimité moins une voix.
Le conseil adopta ensuite un vœu demandant au
Parlement de voter la bande de garantie et d'impo-
ser l'obligation aux négociants d'avoir des locaux
séparés pour loger le vin de Champagne.
NOUVELLES DU JOUR
On inaugurera, le 4 septembre, à Pont-de-Veyle
(Ain), sous la présidence de M. Emile Loubet et de
M. Louis Bar thou, le monument dû au statuaire
Paul Aube, que les amis et les compatriotes du
docteur Etienne Goujon, sénateur de l'Ain et maire
du 12e arrondissement de Paris, ont élevé à sa mé-
moire.
M. de Pardieu, inspecteur général des haras, est
nommé directeur des haras, en remplacement de
M. Hornez, décédé.
M. d'Heilhes, directeur au dépôt d'étalons de
Tarbes, est nommé inspecteur général des haras, et
affecté en cette qualité au 1er arrondissement.
M. Faraliccr, président de l'Association frater-
nelle des employés et ouvriers des chemins de fer
français, est nommé membre de la section perma-
.flente du comité consultatif des chemins de fer.
M. Adam, administrateur en chef de 2e classe des
colonies, est chargé des fonctions intérimaires de
lieutenant-gouverneur de l'Oubàngui-Chari-Tchad,
pendant la durée de l'absence du lieutenant-gouver-
neur titulaire.
MM. Oliveda, adjoint de 1" classe des affaires in-
digènes de l'Afrique occidentale française, et Hu-
bert, administrateur adjoint de lre classe des colo-
nies, sont nommés administrateurs de 3e classe des
colonies.
A propos de l'attribution à l'Assistance publique
de la fondation Marie-Thérèse qui était destinée à
venir en aide aux prêtres infirmes et malades du
diocèse de Paris, M. Ambroise Rendu, conseiller
municipal, écrit à M. Mesureur:
Monsieur le directeur général,
Une délibération du Conseil municipal, du 13 juillet
dernier, a demandé l'attribution de la fondation Marie-
Thérèse au service des « enfants assistés ».
Je ne vois pas très bien la corrélation entre une fon-
dation destinée aux vieux prêtres et le service des
enfants abandonnés.
Mais il n'importe. Comme je m'intéresse à-la maison
de Chateaubriand tout^spécialement, en ma qualité de
membre de son conseil, je viens vous prier de me dire
si l'Assistance publique entend conserver à la fonda-
tion, qui lui aura été attribuée, le caractère et la des-
tination qu'elle avait, du chef de son fondateur.
Un décret constitutif a reconnu ce caractère et cette
destination, et je pense bien que l'Assistance publique,
qui est chargée de faire respecter les volontés de ses
bienfaiteurs, même indirects, pourra donner une ré-
ponse formelle à ma question et m'évitera de la por-
ter à la tribune du Conseil municipal, au nom des bé-
néflciaires d'une œuvre qui doit survivre pour conti-
nuer le bien qu'elle a fait jusqu'ici.
Recevez, monsieur le directeur général, etc.
Le sixième congrès de l'Union des -sociétés de se-
cours mutuels de la Drôme a eu lieu aujourd'hui à
Nyons, sous la présidence de M. Emile Loubet.
M. Moulin, vice-président de l'Union des sociétés
mutuelles de la Drôme, a souhaité la bienvenue à
M. Loubelf, qui, affirmant sa ferveur mutualiste, a
rappelé ses premières luttes pour la République à
Nyons.
Le conseil de préfecture du Pas-de-Calais vient
«aanuler l'élection de M. Picot conseiller d'arrops-
dîssement de Saint-Omer. H a basé aa décision sur 1
le fait qu'une affiche, attribuée à M. Picot, atta-
quant l'honorabilité de son concurrent, le docteur
Alexandre, avait été placardée la nuit précédant
l'élection, et sur le -faible écart des voix entre les
deux concurrents.
On nous écrit de Nîmes
Un curieux incident vient de se produire dans le
parti socialiste à propos de l'indemnité de 500 fr. par
mois qui est allouée au maire de la ville.
Le maire ayant été élu député d'une circonscrip-
tion voisine et ayant donné sa démission, le pre-
mier adjoint faisant fonctions de maire jusqu'à
l'élection du prochain titulaire s'est cru autorisé à
toucher le montant de cette indemnité, Mais tel
n'est pas l'avis des autres adjoints socialistes qui
réclament le partage de cette somme à parts égales
entre tous les adjoints, chacun d'entre eux coopé-
rant, disent- ils, à assurer l'expédition des affaires
municipales.
LES DOLÉANCES DES INONDÉS'
A la suite de l'entretien entre M. Magny, directeur
des affaires départementales- à la préfecture do la ̃'
Seine, et entre les délégués du comité intercommu-
nal des inondés, le préfet de la -Seine a ratifié l'enga-
gement pris par M. Magny d'ouvrir en ce qui con-
cerne la distribution des secours dans; certains: ar-
rondissements et dans certaines communes, une
nouvelle enquête à laquelle pourront prendre paît
deux membres du comité appartenant à l'arrondisse"-
ment ou à la commune.
Tu"~mR~E~ou~'
Sophie Cottin
Dans l'aimable Bagnères-de-Bigorre, en présence
du maire et du député, et sans doute au son des fan-
fares locales, on a vanté aujourd'hui les vertus et
la vertu de Sophie Cottin, devant un bas-relief du
statuaire Escoula où elle apparaît « dans une pose
et une attitude méditative, pleine de grâce, un feuil-
let sur les genoux, un crayon dans une main ». C'est
du moins ainsi que M. Fernand de Cardaillac, pré-
sident de section au tribunal civil de la Seine qui
conçut et réalisa le projet touchant d'exhumer la
gloire de la romancière à qui nos aïeules vouèrent
un culte de lectrices attendries a déerit le monu-
ment. « Tout enfant, raconte-t-il, j'ai souvent joué
près de Bagnères, dans un vallon solitaire qui porte
encore le nom de celle qui vint jadis y chercher la
solitude et l'inspiration, YElysée-Cotlin. Sur le dé-
clin de sa vie, on. aime à revenir aux joies et aux
impressions de l'enfance. Aussi m'a-t-il pris la fan-
taisie de lire les romans, aujourd'hui démodés, do
celle qui fut célèbre en; son temps et qui fut en-
suite trop oubliée peut-être. »
« Oubliée », c'est l'épithète qui s'accole naturelle-
ment aujourd'hui au nom de Sophie Cottin.On peut
supposer même que plusieurs de ceux qui célèbrent
actuellement ses mérites ont renoncé à découvrir
sa littérature. Il n'est pas jusqu'à M. Laurent
Tailhade qui, chantant aux pieds de sa statue, n'ait
pu se garder de tendre vers elle ce laurier sin-
gulier
C'est un hommage exempt de faste que j'apporte,
Lecteur indigne, à cette Muse deux fois morte,
Dont un siècle d'oubli couronna le destin.™
Et le poète pamphlétaire dont la tmise: est
une Némésis qui aurait la grâce de Vénus ne
manque point d'assigner l'exemple de cette femme
de lettres « deux foîs morte » à la méditation de tels
de ses contemporains célèbres dont il ne peut pro-
noncer les noms sans médire.
Déjà en 1888, au cours d'une étude sur Mme Cot-
tin pendant la Terreur, que publia le Correspondant,
M. A. de 'Ganniers remarquait que parmi les gens
cultivés bien peu connaissaient cet auteur. Et pour-
tant il fut fameux, ainsi que l'attestent les nom-
breuses éditions de ses romans Claire dlAlbe,
Amélie, Mansfeld, Malvina, Malhilde, Elisabeth.
C'est une œuvre sentimentale et grave où, presque
toujours une femme lutte éperdument contre un
amour défendu. Plusieurs générations pleurèrent au
récit de ces combats intérieurs. Mais les yeux se
séchèrent vite de Mme Cottin et de Mlle de Scu-
déry, Sainte-Beuve a pu dire « Pas une oeuvre
d'elles qu'on puisse lire autrement que par curiosité,
pour savoir les modes de sensibilité de nos mères. »
Corinne, avec moins de stoïcisme, a conquis plus de
gloire.
Sophie perdit son père, un M. Risteau, directeur
de la Compagnie des Indes, peu de temps après sa
naissance que ses historiographes, après hésita-
tion, ont fixée à l'année 1770. Sa mère alors l'em-
mena à Tonneins, où elle-même était née, et lui lit
donner une éducation soignée. A vingt ans, Sophie
brillait par sa distinction et son esprit dans les sa-
lons de Bordeaux, où un banquier, M. Cottin, l'a-
perçut et la convoita. La mère souhaita le mariage
que désirait le banquier, homme d'âge, et docile, la
jeune fille obéit. Mme Cottin vécut à Paris, luxueu-
sement. Mais la Révolution vint et ce fut le désas-
tre. M. Cottin, dénoncé comme suspect, mourut d'é-
pouvante en l'instant où les gardes nationaux ve-
naient l'arrêter. Béfugiée à Champlan,près de Long-
jumeau, la jeune veuve attendit que s'apaisât l'o-
rage, en compagnie d'une parente et d'une amie.
C'est pendant ce séjour à Ohamplan qu'elle écri-
vit à un quinquagénaire, M. Gramagnac, notable
commerçant parisien, qui s'était épris d'elle, les
lettres publiées par M. A. de Ganniers, dans le Cor-
respondant de 1888. Le brave homme avait été
l'intime ami de feu Cottin. Veuf lui-même, il dé-
fendait les intérêts de la jeune femme, menacés par
les prétentions de la Convention. Il s'attendrit au
cours de cette procédure, et il eut le tort de le dire
à cette veuve de vingt-deux ans, quî ne lui répan-
dit qu'en pleurant son vieux mari, pour lequel on
ne se doutait pas qu'elle eût éprouvé tant d'amour.
Cette. correspondance présente la petite bour-
geoise lettrée sous un jour trouble certains de ses
admirateurs y trouvent à alimenter leur enthou-
siasme d'autres, tout en reconnaissant que la dame
avait du style, constatent qu'elle avaït de la ruse
aussi. L'excellent Gramagnac se voit chargé des
mille soins que réclament la veuve et ses amis..
Mais il aime, et discrètement, timidement, il im-
plore. Alors, après lui avoir donné mission de cher-
cher un appartement meublé, à Paris, et avant de
Te prier d'envoyer du. thé à Ghamplan, on lui dé-
coche, à propos d'un livre « Le désir, mais le dé-
sir timide la suivait en silence, dit l'abbé Raynal;
le seul honnête homme eût osé l'aimer, mais n'eût
pas osé le lui dire. Heureuse la femme digne d'un
pareil éloge! »
Quand le bonhomme se tient coi, on le ramène
par de douces paroles, où l'on joue du mot « ami-
tié » comme d'un éventail dans un galant entre-
tien, Se risque-t-il à nouveau, on vous le rabroue
éloquemment, avec de la philosophie, de la psy-
chologie, et toujours des invocations aux mânes
du mari défunt. Enfin, l'honnête marchand écrit
une lettre « raisonnable » et on lui donne en ré-
compense cet excellent morceau de composition
littéraire
« Quelle noble satisfaction j'éprouve en con-
templant la dignité de l'homme et sa supériorité
sur tout ce qui l'entoure! Tandis que toutes les
espèces vivantes n'ont que des plaisirs et qui s'é-
teignent dans les glaces de l'hiver, l'homme seul
aime toujours; les saisons n'influencent point son
âme, l'absence ni la mort ne la peuvent changer;
enfla, il n'appartient qu'à lui de sentir qu'une seule
vie ne peut suffire à deux attachements.
» Je sais qu'il est parmi nous des êtres dégra-
dés qui croient faire un meilleur choix en parta-
geant les sensations des animaux, et leur image me
fait penser que notre espèce se distingue des au-
tres en ce qu'elle a reçu le privilège de pouvoir se
dénaturer, mais s'il lui est permis de s'abaisser
jusqu'à la brute, il lui est donné de s'élever jus-
qu'aux anges, et je réserve ma. plus tendre estime
aux âmes en qui j'aperçois quelque trace do cette
grandeur. »
Longtemps après 1807, année où mourut Sophie
Cottin, M. Gramagnac ventait sa vertu et conservait
ses lettres comme un talisman, "̃'
Cette épistolière glacée garda-t-elle toujours
ce jugement sur les hommes et les animaux? C'est
sujet à controverse entre ses biographes. Les uns
veulent que àeux soupirants se soient suicidés
devant sa vertu impassible. D'autres ne le veulent
pas. Le Dictionnaire universel lui-même osa dire
« Elle a aimé, mais chose assez singulière, sans
avoir su inspirer une passion durable. » Et le nom
d'un amant était cité « le citoyen Amab. », à
qui, dans une lettre, elle adresse de « tendres re-
proches ».
M. A. de Ganniers ne croit pas au succès du « ei-
toyen Amab. o, mais il accorde cependant que la
« nature ardente et passionnée » de Sophie Cot-
tin, « l'exaltation de ses sentiments l'exposaient
plus qu'une autre à là chute, vis-à-vis d'un soupi-
rant qui eût su exploiter facilement ces qualités ».
Repose, désormais, dans le calmé vallon!
Voici l'ombre des pins, des sorbiers et des frênes*
Ton image y parait plus calme et plus sereine,
Sous le bandeau royal de ses grands cheveux blonds.
.Ma dit aujourd'hui M, Laurent Tailûaâe, :dans
cet « Elysêe-Cottîn «.deBagaères-de-Bigorae, tout
pavoisé et bruyant de joie populaire. Ah! quelles
douces larmes eût versées le patient M. Grama-
gnac, s'il avait été lài JEAN Leprang.
L'âge de la première communion
Le décret de la Sacrée Congrégation des Sacre-
ments sur la première communion commence à
susciter les commentaires les plus divers dans les
milieux catholiques français. La Croix, qui con-
seille « l'acceptation universlle complète et
joyeuse » de la nouvelle règle, reconnaît avoir reçu
des lettres dont les signataires disent de la ré.-
forme « Co n'est point seulement un désarroi,
c'est un grand malheur. »
Le désarroi se manifeste même dans les notes
publiées par les Semaires religieuses, quelque pru-
dence que leur caractère officiel les oblige à y met-
tre. Celle de Nancy notamment indique que des
mesures de transition seront nécessaires, et elle
suggère de combiner le régime actuel avec le ré-
gime nouveau
Pourquoi ne maintiendrait-on pas au même âge
qu'aujourd'hui la cérémonie actuelle de la communion
solennelle des enfants? Les communions précédentes.
faites avec plus d'intimité, en seraient la préparation
et cette cérémonie si populaire, si chère aux familles
et aux paroisses, serait un acte de foi public et impo-
sant à la présence réelle.
Le « renouvellement » pourrait être également main-
tenu on en rehausserait l'éclat par la distribution de
diplômes d'instruction religieuse, signés par Monsei-
gneur l'évêque, que mériteraient des examens passés,
devant une commission décanale sur un programme
déterminé par l'autorité diocésaine. Et d'autres di-
plômes, de degré supérieur, pourraient être obtenus,
après d'autres années de catéchisme de persévérance.
Mgr Chollet, évoque de Verdun, ajourne les rè-
gles d'action précise qu'il aura à formuler, les
prescriptions du décret n'obligeant guère « avant
la prochaine période pascale ». Il se borne à dire
que c'est au confesseur qu'appartient d'apprécier
les dispositions de l'enfant et de juger s'il est apte
à faire sa première communion.
M«r Gély, évêque de Mende, tout en constatant
que la réforme paraît « contrarier i~ nos usages de
France », s'en félicite comme d1 « un retour aux
traditions séculaires de l'Eglise »
Si nous donnons Notre-Seigneur aux enfants dès l'âge
de discrétion, tandis qu'ils sont dans toute leur can-
deur et innocence, Il les protégera Lui-même contre
les dangers des mauvais exemples et des mauvaises
écoles. Aussi le Saint-Père a-t-il voulu retoucher lui- j
même ce décret jusqu'au dernier moment, et c'est avec
une visible satisfaction qu'il l'a scellé de son autorité
suprême.
La Semaine religieuse de Cambrai rapporte que
chaque fois que l'un des évêques français soumet-
tait à Rome ses statuts diocésains et que Rome y
trouvait cette règle: « Communion des enfants a
l'âge de douze ans », elle avait soin d'y. ajouter
cette clause « Réserve faite du droit des en-
fants ».
L'organe de Mgr Delamaire ajoute éré dé uià
La première communion a bien dégénéré depuis son
institution relativement récente. Pour beaucoup elle est
devenue une fête mondaine où enfants et mères, même
dans les classes pauvres, rivalisent de luxe.
Pour les jeunes filles surtout, c'est comme une gré-
mière noce avec ses toilettes, ses banquets, ses pré-
sents, etc. Désormais, au lieu d'être le couronnement
de l'instruction religieuse, la première communion en
sera le principe à, l'âge de sept, huit ou neuf ans, selon
l'ouverture d'esprit- de chaque enfant. Vers douze ans
pourrait avoir lieu la délivrance solennelle d'un certi-
ficat d'instruction religieuse. Viendrait ensuite pour
toute la paroisse, les enfants en tête, la rénovation des
vœux du baptême et la consécration à la Très sainte
Vierge. ·
/Nous avons, il y a plusieurs jours, résumé les
doléances que la publication du décret provoque
dans les paroisses parisiennes, telles que nous les
avaient exposées un.certain nombre d'ecclésiasti-
ques. Elles se trouvent confirmées avec autorité
par une lettre que M. Desers, curé de Saint-Vin-
cent-de-Paul, envoie à VEclair. M. Desers en effet
n'a pas cessé depuis une quarantaine d'années de
s'occuper avec une particulière sollicitude des pre-
miers communiants, soit comme vicaire de Saint-
Louis d'Antin où il était en contact avec les jeunes
élèves du lycée Condorcet, soit à la tête de la pa-
roisse qu'il dirige. M. Desers ne nie pas que le dé-
cret soit « d'une logique admirable », mais il fait
remarquer « qu'il y a une logique, dont la marche
ne tient aucun compte des faits, qui ne voit que
son principe et le suit aveuglément. Cette logique-
là est connue. Dès qu'elle se trouve en rapports
avec la liberté humaine, elle aboutit d'ordinaire
aux conséquences les plus erronées ».
L'accusation de jansénisme appliquée à la pré-
paration lente et solide à la première communion
lui inspire cette réflexion
Est-ce que l'Eglise ne nous ordonne pas une prépa-
ration pour les grandes fêtes chrétiennes? Qu'est-ce
donc que l'Avent et le Carême? Et les anciennes caté-
chèses n'impliquaient-elles pas une préparation sé-
rieuse ? Pourquoi exclure systématiquement la prépa-
ration grave, lente de la première communion?
Au cours des déclarations qu'il a faites aux jour-
naux religieux, le cardinal Ferrata avait critiqué
les splendeurs extérieures qui détournent du prin-
cipal « toilettes, visites, festins », ajoutant ce-
pendant qu'il serait « loisible de faire des commu-
nions générales d'enfants » auxquelles on pourrait
« donner un très grand éclat ». Le curé de Saint-
Vincent-de-Paul répond
Ce qu'il redoute, à l'occasion des premières commu-
nions, se produira tout autant avec ces communions
générales. La mondanité des familles peu chrétiennes
s'y retrouvera, malgré tous les avis. Mais n'y a-t-il
donc, en ce monde, que des familles riches et mondai-
nes ? La majeure partie de nos premiers communiants
n'est-elle pas composée d'enfants pauvres? Pourquoi
leur retirer, à ces petits, la plus belle fête, la seule
fête, en somme, de l'enfance?
Etrange illogisme! On s'élève contre nos cérémo-
nies de première communion, comme si les cérémonies
religieuses n'étaient pas dans les traditions de l'Eglise.
Elles sont si bien dans la tradition que ce fut le pre-
mier acte des protestants de les supprimer. Où donc est
la logique de les maintenir pour les fêtes de l'Eglise, et
d'exclure de cette pieuse splendeur la fête de la pre-
mière communion, qui dans tant de pays d'ailleurs,
s'unit à la célébration de l'une des grandes fêtes da
l'année ?
M. Desers relève comme une preuve d'inexpé-
rience de l'apostolat des enfants, « trop évidente
pour être discutée », l'affirmation prêtee au cardi-
nal Ferrata « qu'il est aussi facile de préparer à la
première communion des enfants de sept ans que
des enfants plus âgés, et qu'il n'est pas plus diffi-
cile d'apprendre à des enfants de sept ans à dis-
tinguer le pain eucharistique du pain ordinaire ».
De quels enfants parle-t-on? demande le dis-
tingué curé de Saint-Vincent-de-Paul
Qu'adviendra-t-il des enfants de l'école laïque? Et
de ces enfants de la campagne, si matérialisés, dans
certaines régions ?,
Cette masse immense ne sera pas atteinte, ou du
moins elle ne sera pas pénétrée. A sept ans, on ne
pourra pas apprendre le nécessaire à ces enfants. Ils
n'arriveront pas à saisir la distinction du pain eucharis-
tique et du pain ordinaire, ou, du moins, pour la plu-
part, cette distinction leur apparaîtra comme celle qui
existe entre du pain qui est très blanc et tout petit,
et un autre pain qui est moins blanc et plus gros.
Et après, cette masse, ayant fait une première com-
munion hâtive, avec des impressions trop superficiel-
lès, nous échappera. 'Nous n'en reverrons que quelques
rares unités, II est topique le moyen qu'on nous sug-
gère pour instruire ensuite ces enfants appât des ré-
compenses, prix, etc: Tout cela sera inèffloace, et vrai-
ment ce sont de bien petits moyens.
Ils agiront auprès de quelques familles. Encore une
fois, la masse échappera voilà le côté douloureux de
la nouvelle législation. Les faits sont patents. La logi-
que aurait dû céder devant les faits.
Dans nos catéchismes, nous nous efforcions de don-
ner un fondement solide à la vie chrétienne de nos ca-
téchisés. Maintenant nous ne le pourrons plus. C'est là
ce qui nous angoisse.
M. Desers conclut, comme l'avaient fait les cu-
rés que nous avions interrogés, que l'application du
décrc4 amènera une régression fatale pour l'E-
glise. L'esprit du mal, seul, pourra se plaindre de
la nouvelle législation, a dit le cardinal Ferrata.
« Nous l'assurons, au contraire, termine M. Desers,
que l'esprit du mal se réjouira, car par la force
des choses nous ferons libéralement son jeu pour
l'aider à déchristianiser la France. »
Le renchérissement des vivres et la C. a. T.
La campagne que l'Union des syndicats de la Seine
veut mener contre le renchérissement des vivres a
débuté hier soir par un meeting tenu au restaurant
coopératif de la rue de Bretagne.
M. Savoie, secrétaire de l'Union et boulanger de
son état, a prononcé une violente diatribe contre
« les grands propriétaires accapareurs de blé », con-
tre « les agioteurs qui réalisent d'énormes bénéfices
sur le dos ou plutôt sur le ventre des travailleurs ».
Si le gouvernement levait les droits d'entrée pen-
dant quarante-huit heures seulement, la situation se-
rait immédiatement améliorée, et une bonne leçon
aurait été donnée aux accapareurs. Mais le gouverne-
ment ne sait sévir que contre les grévistes I
L'orateur a ensuite critiqué les décisions prises
par les restaurateurs et marchands de vins dans
leur meeting du cirque de l'avenue de La Motte-
Picquet: «Ce n'est pas la demi-portion qu'ils ont
supprimé, mais la portion entièro, a-t-il dit, car ils
ne servent plus sous le nom de portion que des
demi-portions. » T
M. Lefèvre, secrétaire général adjoint dela C.G.T.,
a déclaré que cette question du « ventre » devait
prendre le pas sur toutes les autres.
Le comité confédéral va, a-t-il déclaré, se réunir
jaardi aJto d'exaœinw le WPy?Q employer pour faire,
cesse? la fenusse des -denrées alimentaires. S'il n'y a 1
pas moyen d'obtenir de sanctions contre les affa meurs,
eh bien, nous aurons recours à l'action directe. S'il le
faut, nous irons chercher le grain dans les greniers e .1'
le vin dans les caves. Oui, occupons-nous d'abord de
manger, nous philosopherons ensuite 1
Il a conseillé à ses auditeurs de se grouper et de
s'organiser de façon à obtenir à la fois l'augmenta-
tion des salaires et la diminution des heures de tra-
vail °
L'augmentation des salaires vojts permettra de lais-
ser votre femme au logis au lieu de l'envoyer à l'ate-
lier. Et grâce à la diminution des heures de travail
vous pourrez aller manger chez vous la « popote »
que vous aura préparée votre compagne, au lieu d'al-
ler chez le « bistro »; car le « bistro », voilà l'ennemi! ¡
Cette déclaration fut accueillie par des applaudis-
sements prolongés. Et l'orateur, insistant sur ce
point, s'efforça de démontrer à ses auditeurs syndi-
calistes qu'ils faisaient la fortune des marchands de
vins « au détriment de leur santé et de leur porte-
monnaie ».
Apres plusieurs discours préconisant l'action di-
recte, on vota l'ordre du jour suivant
Les citoyens présents, affamés par les exploiteurs;
se rendant compte de la hausse anormale des ali-
ments et des loyers,
Protestent contre les fauteurs responsables de cette
hausse, notamment les gros et petits commerçants,
Déclarent être solidaires si les prix ne sont pas di-
minués et s'engagent à l'action violente, si besoin est,
voire même à descendre dans la rue pour obtenir sa-
tisfaction,
En conséquence, ils engagent la C. G. T. à pour-
suivre activement la campagne actuelle et passent à
l'ordre du jour.
A la sortie, qui fut un peu tumultueuse, on pro-
céda à quelques arrestations qui ne furent pas main-
tenues.
Agitation syndicaliste
LA « CHASSE AUX RENARDS » A MARGENCY
A Margeney, les magistrats du parquet de Pon-
toise ont poursuivi, durant toute la journée d'hier,
leur enquête sur les graves incidents qui se sont
déroulés au château de M. Le Roux.
Dans l'espoir de découvrir les revolvers ou les
douilles de cartouches que les grévistes auraient
pu abandonner après le siège du pavillon du jardi-
nier chef, et sur "l'ordre du juge d'instruction, on a
fauché une vaste étendue de pelouse dans le parc.
Mais cette opération n'a donné aucun résultat.
Après de nouveaux interrogatoires et de nouvelles
confrontations, le juge d'instruction a fait procéder
à l'arrestation de deux grévistes blessés Edouard
j Pavy, âgé de vingt-quatre ans, demeurant 13, rue
Saint-Jacques, à Montmorency, et Auguste Gorion,
âgé de vingt-cinq ans, demeurant également à
Montmorency. Tous les deux ont protesté violem-
ment contre les inculpations d'entraves à la 1iberté
du travail, de violences avec armes prohibées et de
violation de domicile reiefées contre eux.
Les deux prévenus ont été conduits sous une
i imposante escorte à la prison de Pontoise.
I 'Avant leur départ de Margency, les magistrats
furent priés par les syndicalistes de vérifier de pré-
tendues traces de plomb dans un mur de la rue de
l'Avenir, où affirmaient-ils, ils essuyèrent huit fois
le feu du jardinier chef Auclair.
Mais il est apparu que les menus trous existant
dans le mur étaient fort anciens et ne provenaient
pas de coups de fusil.
La grève n'a pas pris fin comme on l'espérait. Un
nouvel incident s'est produit à Groslay, jue de la
Station. Au nombre d'une quarantaine, des grévis-
tes détruisirent les matériaux d'un chantier et dé-
foncèrent un plafond d'une construction en cours.
Ils tentèrent ensuite d'envahir l'habitation voisine,
où se trouvait le propriétaire, M. Paul Gaurion.
Mais devant l'attitude résolue de ce dernier, ils
s'éloignèrent en chantant l'Internationale.
Le secrétaire de l'Union des syndicats de Seine-
et-Oise s'est rendu hier soir à Montmorency où il a
présidé une réunion privée dans laquelle on a discuté
sur l'opportunité dune manifestation de protes-
tation.
Des mesures de police importantes ont été prises.
LA CAMPAGNE DES PRÉPARATEURS EN PHARMACIE
Le comité d'action qui dirige la campagne des
préparateurs en pharmacie pour la fermeture des
officines à neuf heures du soir a fait afficher sur les
murs de Paris, et notamment dans le quartier du
Faubourg-Montmartre, des affiches anonymes et non
timbrées, où on vise en-termes injurieux et diffa-
matoires une pharmacie voisine des boulevards. Les
directeurs de cette pharmacie nous informent qu'ils
ont déposé une plainte au parquet contre les auteurs
de ce placard.
LES OUVRIERS SUR MÉTAUX
,Les différentes organisations parisiennes adhé-
rentes à la Fédération des ouvriers sur métaux ont
constitué un comité intersyndical qui a commencé,
par'un meeting tenu ce matin à la Bourse du tra-
vail, une campagne pour la diminution des heures
de travail.
Les délégués des fondeurs, des mécaniciens, des
ouvriers en instruments de précision, en instru-
ments de musique, des tourneurs en optique, etc.,
ont prononcé des discours où ils ont affirmé leur
volonté « d'obtenir par tous les moyens une jour-
née plus courte, plus de sécurité dans le travail, des
salaires plus élevés, en rapport avec la cherté de la
vie déterminée par les augmentations de toute na-
turè que font subir propriétaires et commerçants ».
Les assistants ont voté un ordre du jour par le-
quel ils « s'engagent à seconder les efforts du co-
mité intersyndical par une propagande intense et
individuelle pour attirer à l'organisation syndicale
les travailleurs des métaux qui jusqu'à ce jour n'ont
pas encore compris l'utilité du groupement profes-
sionnel ainsi que la propagande pour la réduction
des heures de travail et surtout pour la limitation
d'une durée maximum ».
LES CHEMINOTS
Notre correspondant particulier à Epernay nous
téléphone qu'une réunion a été tenue hier soir dans
cette localité par deb cheminots de la région.
M. Bidegarray, secrétaire du syndicat national, a
fait en termes violents le procès des compagnies. Il
a déclaré qu'un ultimatum serait envoyé aux com-
pagnies à la rentrée des Chambres.
Un ouvrier des ateliers d'Eoernay ayant voulu
prendre la parole et recommander la sagesse à ses
camarades, a été conspué et mis dans l'impossibilité
de continuer.
Un ordre du jour a été voté, où il est dit que
« toute conciliation est impossible avec les compa-
gnies, et que les cheminots sont décidés à quitter
le travail dès que le comité de grève donnera le si-
gnal ».
"FAITS DIVERS
Bureau central météorologique
Dimanche 28 août. La dépression signalée hier au
large de l'Irlande s'est avancée rapidement sur les
îles Britanniques et.l'ouest de la France le baromètre
marque 746 mm. à Blacksod-Point, 753 mm. à Brest
après une baisse de 10 mm. Une aire de pression rela-
tivement élevée couvre l'Europe centrale (Prague
764 mm.).
Le vent souffle du sud sur nos côtes de la Manche
et de l'Océan il est très fort en Bretagne.
Des pluies sont tombées sur les iles Britanniques
et l'Allemagne. _,»“ x
En France, on en signale seulement à Calais et à
Brest.
La température a légèrement baissé sur nos ré-
gions elle était ce matin de 5» à Arkangel,9° à Nancy,
10» à Limoges, 18° à Rome, 20» à Nice, 2a° à Laghouat.
On notait 7° au puy de Dôme et au mont Mounier,
5° au pic du Midi.
En France, des pluies orageuses sont probables avec
température assez élevée.
A Paris, hier, la température moyenne (14°) a été
supérieure de 2°8 à la normale (16°8).
A la tour Eiff el, température maximum 16»6, mini-
mum 12°2.
Observatoire municiyalLe ciel demeure nuageux et les vents, qui ont ré-
trogradé au sud-sud-est, soufflent ce matin avec une
vitesse voisine de 7 m. par seconde.
La température reste fraîche, les maxima d'hier sont
partout inférieurs à 20° et on note aujourd'hui des mi-
nima de 8° dans toute la banlieue sur la ville ils sont
de 11° °
La pression barométrique, en baisse depuis minuit,
accuse à midi 758 mm. 1.
Un souvenir des croisades» Le musée la-
pidaire de la ville de Nîmes vient de s'enrichir d'un
souvenir local et historique assez intéressant. C'est
une tombe remontant à l'époque des expéditions de
saint Louis en Terre-Sainte.
A cette époque les chevaliers français prenant part
à l'expédition avaient été rassemblés dans un camp
au bord de la mer, à quelques kilomètres d'Aigues-
Mortes. Quelques croisés moururent durant leur sé-
jour au camp et furent inhumés sur place. Par la
suite plusieurs de ces tombes disparurent, emportées
par la mer qui s'était avancée de quelques centaines
de mètres sur ce point de la côte.
L'une de ces tombes, constituée par un énorme
bloc de pierre portant l'écusson du défunt, aïait
résisté jusqu'ici aux assauts des vagues.
Le conservateur du musée de Nîmes, craignant t
qu'elle ne finisse par disparaître à son tour, yient 5
d'obtenir l'autorisation de la faire transporter au s
musée de Nimes, ou elle a pris place dans la galerie j
du moyen âge. c
Cette tombe, outre l'expédition qu'elle rappelle, a
l'avantage pour le musée d'être également un sou-
venir méridional, car l'écusson qui la décore est aux r
aimes pariantes un petit porc passant à gauche <
de la famille provençale des Porcelets, dont il ]
existe encore quelques descendants dans la région,
Un monument à. Gabriel Vicaire. A la
Clarté-Ploumanach (Côtes-du-Nord), on inaugure 1
aujourd'hui un médaillon du poète Gabriel Vicaire,
que modela le sculpteur René Lenoir. Gabriel Vi- 1
caire, tantôt rabelaisien, tantôt délicat et tendre, t
<:ima la Bretagne et le lui dit en chantant: Au.pays (
des ajoncs, exaltant la beauté de la terre et de la
mer bretonnes. 1
Le pays est en fête on chante et l'on dit des vers
devant le rocher ou s'encastre le médaillon. Mme l
Aimée Le Gall, « la mère Aimée », qui fut la bonne >
hôtesse du poète, devenu amer et découragé, pré- j
siie la cérémonie. Un grand dîner réunit ce soir, à 1
la Clarté, tous les Bretons des alentours. 1
Le drame de la rue de Meaux. Nous i
avons relaté les circonstances dana lesquelles un J
concierge de la rue de Meaux, M. Nicolas Harat,
avait été frappé de trois coups de couteau par un
do ses locataires, Maurice Fougeret, qui rentrait la
nuit en état d'ivresse. M. Harat est mort hier à
l'hôpital Saint-Louis où on lui avait fait subir l'opé-
ration de la laparotomie. Quant à son meurtrier, m-
terrogé par M. Guépet, juge d'instruction, il a dé-
claré qu'il était étendu sur le sol, terrassé par M.
Harat, quand, saisissant le poignet du concierge, il
s'aperçut que celui-ci était armé d'un couteau. C'est
alors qu'il se serait relevé et que, s'armant à son
tour, il aurait poignardé M. Harat.
Dynamiteur tué par sa bombet Le 15 août
dernier, à Saint-Sorlin (Drôme), un inconnu victime
d'un accident causé par une explosion, était pulvé-
risé dans des circonstances mystérieuses. L'en-
quête vient d'établir que la victime est un nommé
Henri Gabert, habitant à Lyon, rue Vauban. Il était
parti de cette ville emportant des bombes à renverse-
ment fabriquées par lui et au moyen desquelles il
voulait détruire la maison de son oncle habitant
Saint-Sorlin, qu'il accusait de l'avoir dépossédé d'un
héritage. Une de ces bombes éclata prématurément
et le dynamiteur fut tué.
Suicide d'un meurtrier. On mande de Bor-
deaux qu'un malfaiteur recherché pour meurtre au
cours d'une rixe, se voyant découvert chez des indi-
vidus qui le cachaient depuis plusieurs jours, tira
sur les agents de laf Sûreté sans les atteindre, puis
se logea une balle dans la tête. Il a été transporté
mourant à l'hôpital.
Un incendie a détruit, à Bourg-d'Oisans, huit
maisons appartenant à divers propriétaires.
Le feu a été allumé par deux enfants, les frères
Rey, âgés de dix et cinq ans, qui s'amusaient dans
une grange. Le plus jeune a été retiré grièvement
brûié.
Un sonneur de cloches foudroyé. Pen-
dant un orage, le sonneur de Ladepeyre (Aveyron),
Pierre Boudes, alors que les paysans tremblaient
pour leurs récoltes, monta au clocher pour tenter de
conjurer le danger en sonnant les cloches, suivant
un préjugé indéracinable dans nos campagnes. Il
ne les avait pas plus tôt lancées en volée que le son
cessa brusquement. L'imprudent avait été foudroyé.
Il laisse une veuve et cinq enfants dans le dénue-
ment.
Un seaudaïe à la salle de police. Do
notre correspondant particulier à Cherbourg
On n'a pas oublié les scandales qui se produisi-
rent l'année dernière dans les prisons du premier
dépôt des équipages de la flotte à Cherbourg: des
détenus avaient fait subir à de leurs compagnons
de cellule des outrages sur la nature desquels nous
ne pouvons insister.
Or ces faits scandaleux viennent de se renouve-
ler à la salle de police de la caserne du premier dé-
pot. On sait dans quelle promiscuité passent la nuit
les matelots punis disciplinairement ils sont en-
tassés dans un local exigu et couchés côte à côte
sur le lit de camp. L'autre nuit notamment il
s'est déroulé dans cette salle de police des scènes
abominables qui ont été révélées par un des hom-
mes punis. Cet homme, un jeune matelot, a raconté
qu'à peine entré dans le local où. il devait rester jus-
qu'au matin, il avait vu les plus anciens dea déte-
nus s'assembler uans un coin, et après une délibéra-
tion, décider de lui faire subir d'ignobles outrages.
Pour le forcer à se prêter à leur triste fantaisie et
pour le dissuader de les dénoncer, l'un des prison-
niers l'aurait menacé de lui planter son couteau dans
la gorge. Et le malheureux ainsi condamné aurait
servi de jouet à ces quinze codétenus dans les con-
ditions les plus répugnantes.
Hier matin, au sortir de cet enfer, malgré les me-
naces de mort dont il avait été l'objet, le jeune ma-
telot raconta ce qui s'était passé au premier maître
de semaine. Conauit devant le commandant, il con-
firma sa triste histoire et ajouta
Commandant, j'aime mieux mourir que de re-
tourner à la salle de police. On m'a menacé de mort
pour le cas où je dévoilerais les faits dont j'ai été la
victime. Eh bien, j'aime mieux être tué que de cou-
rir le risque de subir à nouveau les pires ou-
trages..
L'of licier consola le jeune marin et lui promit que
les coupables seraient châtiés et mis dorénavant
dans l'impossibilité de nuire.
Une enquête immédiatement ouverte a permis
d'établir que les faits révélés étaient exacts. Sept
anciens avaient tenu effectivement conseil et obligé
les huit autres détenus à s'associera leurs abomina-
bles pratiqnes sur la personne du jeune matelot
sans défense. Ces sept gredins ont été écroués à
la prison maritime en prévention de conseil de
guerre.
INFORMATIONS DIVERSES
Notre correspondant de Vichy nous télégraphie
« Miss Elkins est partie pour Paris. Son départ a
passé complètement inaperçu. Jai pu savoir que Mrs.
Elkins n'a pas accompagné sa fille,; elle est restée à
Vichy. Miss Elkins va à Paris attendre son père, puis
tous deux doivent revenir à Vichy rejoindre Mrs. El-
kins qui n'interrompt pas sa cure. »
livres 3stotj^te.atj:x:
Auguste Sabatier, critique littéraire
Auguste Sabatier était bien connu des lecteurs du
Temps comme écrivain politique, opposant aux so-
phismes des rhéteurs sa dialectique serrée et son
bon sens cévenol. Mais son œuvre littéraire leur
était moins familière. Dispersée dans les articles
hebdomadaires que Sabatier envoyait au Journal de
Genève, de 1873 à 1901, elle vient d'être étudiée par
M. Henry Dartigue en un livre excellent (1).
En tant que « critique littéraire », le doyen de la
faculté de théologie protestante de Paris ne se bor-
nait pas à. rendre compte des « nouveautés en
traçant quelques dessins plus ou moins pittoresques
sur la couverture des livres dont il parlait; pour lui,
la littérature, «'était toute la vie française de son
temps; il se l'assimilait avec une sympathie tou-
jours plus eompréhensive et plus avertie, et, par
l'entremise de ses « Lettres du Dimanche (2) » il en
transmettait le rayonnement à l'étranger.
Peut-être M. Dartigue, dans son étude si péné-
trante et si documentée, n'a-t-il pas assez insisté
sur cette fonction de messagère de l'esprit français,
qui constitue l'une des originalités de la critique
littéraire de Sabatier..Le souci de la vie morale
qui caractérise également ses jugements en litté-
rature ne provenait pas seulement de ses convic-
tions chrétiennes et protestantes, mais aussi de
l'ardent amour qu'il ressentait pour son pays. Il
l'avoue lui-même. «Ce souci moral, écrit-il dans la
préface aux « Lettres du Dimanche », procède
encore d'une autre source. Il naît d'un ardent amour
de la France. Deux choses me répugnent égale-
ment un patriotisme tapageur, haineux et intolé-
rant, qui s'imagine fortifier la patrie en y prêchant
la guerre civile, et un cosmopolitisme déclamatoire
qui remplace dans l'âme les sentiments chauds,
vivants et pratiques, par des abstractions creuses
et stériles. Il faudrait nous guérir de l'un sans ver-
ser dans l'autre, et c'est en aimant l'âme morale de
la France que nous y pourrions réussir. »
On accuse volontiers la critique littéraire influen-
cée par l'esprit protestant de se plaire à la prédica-
tion et de juger la valeur d'un roman ou d'une
poésie d'après son influence sur la volonté. Sabatier
prenait une attitude quelque peu différente. Il était
convaincu de la haute dignité de la pensée, humaine.
On est un mauvais ouvrier en littérature, disait-il
souvent, si on fait de sa pensée ou de la pensée des
autres un simple amusement, si on la réduit à un
plaisir d'épicurien dont une vaine curiosité est le mo-
bile et la fin. La doctrine contenue dans un livre ou
l'action qu'elle exerce sont de moindre importance
que la source même d'où elle jaillit, que la qualité
intellectuelle et morale de l'écrivain» Aussi, tandis
que d'autres, remarque justement M. Dartigue, bor-
nent leur ambition à la recherche de quelque belle
forme nouvelle, et se montrent entièrement satis-
faits et comme cela est naturel 1 quand ils ont
> rencontré une idée ingénieuse ou un vers mélo-
dieux, Sabatier se met surtout en quête de la per-
1 (1) Auguste Sabatier, critique littéraire, d'après sa cor-
s respondance au Journal de Genève, par Henry Dartigue,
i avec une préface de M- Jean Aicard, de l'Académie
française. Paris, Fischbacher.
(2) Un grand nombre de ces « Lettres ont été re-
cueillies en un volume par les soins daM. Frank-
Puaux. Bureaux de lajletme chrétienne, 83. boulevard
Arago.
sonnalité de l'écrivain, s'efforce de saisir, dan»;
son œuvre, ses pensées les plus secrètes et lesp'ktf.
solitaires, et se réjouit s'il découvre un » lxomme ».:
Nul n'a plus souvent répété, sous une forme oup
sous une autre, le mot de Pascal à propos de Mo*
taigne. Une oeuvre était belle à ses yeux quand elï|
révélait une âme sincère ou candide, tout entière bi±:
chacune de ses pensées, quelles que fussent cas
pensées, toujours présente derrière le mot, et le ju-;
geant. La qualité qu'il estimait le plus dans un;
livre, c'était la sincérité, « qui n'est autre chose que
le nom moral de la vérité ».
Il semble donc que ce soit dans la conscience
même de l'écrivain qu'il pose et résout la question
toujours si controversée de la moralité des œuvres,
d'art. On affirme couramment qu'est dangereuse
toute œuvre qui affaiblit la volonté ou excite une
passion malsaine. Sabatier répondait qu'à ce point
de vue « la question ne comporte aucune réponse,
puisqu'un livre réputé mauvais peut avoir de bon-
nes conséquences pour tel lecteur et qu'un autre
livre réputé bon en aura de mauvaises pour tel au-
tre. Il s'agit de savoir à quel motif l'auteur obéit
dans le choix de son sujet et dans la manière dont
il le traite. S'il est un homme vraiment moral, il ne
fera pas un mauvais livre, même en parlant de cho-
ses hideuses; s'il n'est pas moral intérieurement e%
devant Dieu, il ne fera pas un bon livre, môme en
prêchant la vertu et le renoncement ».
La thèse ne manque pas de vraisemblance, mate
la preuve est difiicîle à faire.
Nous ne pouvons songer, dans cette courte notiee,
à caractériser plus longuement les jugements litté-i
raires de l'auteur de l'Esquisse d'une philosophie de'
la religion. Rappelons seulement que la littérature
n'étant nullement pour lui un surplus, ou un « reste »,
mais embrassant les manifestations multiples de la
vie, il n'est pas de sujet on histoire, en philosophie,
en politique, en religion, aussi bien que -dans la
poésie et le roman, que sa critique littéraire n'ait
souligné d'un trait précis ou n'ait enveloppé d'une
pénétrante lumière. De tous les critiques, ses de«
vanciers, il préférait Edmond Scherer; peut-être
est-ce à lui qu'il ressemblait le plus, par ses fortes
études classiques et théologiques, par l'absolue
liberté et l'universalité de son esprit; mais il était
un Scherer moins intransigeant.
Toutes ses « Lettres du Dimanche », qui ne repré-
sentaient pourtant, comme il le disait lui-même,
que l' « écume de son travail », devraient être re-
cueillies. Il existe des «lundis» illustres et des
« samedis du plus grand mérite. Les « dimanches »
de Sabatier ne le céderaient pas en intérêt aux autres
jours de la semaine. Us révéleraient un aspect in-
suffisamment .connu de notre esprit français, je
veux dire la compréhension de toutes les formes et
de toutes les idées, jointe au respect religieux d»
la conscience et de la vie. J.-Emile Roberty.
(
SFOTLT
AÉRONAUTIQUE
LE MEETING D'AVIATION DE LA BAIE DE SEINE'
(De notre correspondant)
Le Havre, 28 août.
La journée d'hier, qui au point de vue sportif fut
des plus intéressantes, a failli se changer vers le
soir en une journée de deuil. Un des concurrents
les plus sympathiques, le jeune aviateur Lega-
gneux, a fait en effet vers la fin de l'après-midi,
une chute terrible et dans des conditions telles que
beaucoup la crurent mortelle.
Il volait à une hauteur d'environ 15 mètres, quand
un cri s'éleva dans la foule Legagneux arrivait
droit sur un pylône, dont il n'était plus qu'à quel-*
ques mètres. Deux ou trois secondes passèrent, puis
ce fut le choc. Tandis que l'aile gauche du biplan
s'écrasait contre l'obstacle, l'appareil fit un panaché
complet et s'abattit sur le sol.
Ce fut aussitôt la ruée du public vers le lieu dç
l'accident, tandis que les commissaires du pylôna-
fatal s'empressaient déjà auprès de l'aviateur.
Sous les débris de son biplan, Legagneux gisait
inanimé au front, au-dessus de l'œil 'droit, il portait
une profonde blessure; son visage ruisselait da
sang. La chute avait été si brutale, l'aviateur pa-
paissait si touché qu'on crut qu'il avait été tué sur
le coup. Fort heureusement, il n'en était rien et
quelques minutes après son effroyable chute, Lega-
gneux reprenait connaissance. Peu après, à l'ambu-
lance de la Croix-Rouge, où il reçut des soins em-
pressés, le jeune aviateur retrouvait l'usage de la
parole.
Il eh profita pour expliquer les conditions dans
lesquelles s'était produit son accident
« Au moment où j'allais commencer mon virage,
» dit-il, je sentis ma commande de gouvernail ma
» lâcher. Il n'y avait rien à faire et je me rendis
» parfaitement compte que j'allais me briser contre
̃ le pylône. Ce fut 'bref. Je ressentis un choc vio-
» lent, puis un coup terrible sur la tête et je m'éva-
» nouis. En revenant à moi, tout à l'heure, je ne
» savais même plus que j'étais au Havre. »
Les dernières nouvelles sont rassurantes et: on
pense que le blessé sera sur pied dans une quinzaine
de jours.
Il eût été regrettable qu'une aussi belle journée
fût gâtée par un accident grave. Les vols furent en
effet nombreux et intéressants. Au cours de la ma-
tinée se disputèrent les éliminatoires du Grand-Prix
sur 20 kilomètres. Le vent soufflait à ce moment à;
20 et 40 kilomètres à l'heure, ce qui nous permit,
d'assister à des vols impressionnants des meilleurs;
aviateurs. Morane, Aubrun, Leblanc, Latham et
Kuller ont magnifiquement défendu leurs chances.
Morane fut le plus vite. Deux furent malheureux,.
Busson et Audemars. Busson cassa une roue. Aude-
mars fit une chute sans gravité.
L'après-midi fut aussi très occupé. Latham, La-
dougne, Kuller, Thomas, Morane, Barrier, Simon,
Picard, Wiencziers, de Feure, Darioli, Aubrun, Pff-
trowsky, Marcel Hanriot, Martin Bouvier, Barra,
Martinet, Molon, Chassagne s'élevèrent tour à tour,
totalisant des kilomètres ou effectuant des essais en
hauteur.
La fin de la réunion fut superbe; il y eut en piste
par instants dix appareils à la fois. Le vol le plus
long fut accomnli par Legagneux, qui a couvert
188 kilomètres les plus beaux par Morane, Aubrun,
et Latham, qui montèrent très haut, le premier S
1,130 mètres.
Les résultats officiels de la journée sont les sui-?
vants
Grand-prix de la hauteur. ler Morane (monoplan)
1,130 mètres 2° Hanriot (monoplan), 382 mètres.
Prix du Premier départ. -Hanriot (monoplan).
Prix de la Vitesse (10 kilomètres). Aubrun (mono-
plan), 7' 28" 3/5.
Totalisation des distances. 1" Legagqeux (biplan),
188 kilomètres 2e Latham (monoplan), 132 kilomètres.
Prix de la Plus grande distance en un vol. Latham
(monoplan), 112 kilomètres.
Totalisation des. vols de la journée. Legagneux
(biplan), 188 kilomètres; Latham (monoplan),. 132 kil.;
Simon (monoplan), 118 kil. Barra (biplan), 58 kil.; Au-
brun (monoplan), 56 kil. etc.
Totalisation générale. Simon (monoplan) 3o6 kilo-
mètres, Legagneux (biplan), 274 kil.; Mamet (mono-
plan), 240 kil. Barra (biplan), 190 kil. Latham (rnonaj?
plan), 154 kil. etc.
CHUTE MORTELLE D'UN AVIATEUR HOLLANDAIS
Un aviateur hollandais, M. de Maasdyck, a fait
hier à Arnhem (Hollande) une chute mortelle au cours,
d'une exhibition qu'il eflectuait sur le terrain d'avia-
tion de cette ville.
Le malheureux aviateur évoluait à une altitude de
400 mètres environ, quand brusquement son biplan
piqua de l'avant et vint s'écraser sur le sol.
Lorsqu'on eut dégagé l'infortuné pilote des dé-
bris sous lesquels il gisait, il avait cessé de vivre,
tué net, la fracassée par le moteur. L'essence
contenue dans le réservoir de l'appareil s'était ré-'
Dandue sur lui.
Bien qu'il ait été impossible d'établir les causes
de l'accident, on pense généralement qu'il est dû 8L
une panne subite du moteur.
LA DEUXIÈME EXPOSITION INTERNATIONALE
DE LOCOMOTION AÉRIENNE
Ainsi que nous l'annoncions ces jours derniers, la
création de sections scientifiques et artistiques à 1 expo-
sition internationale de locomotion aérienne, a permis la
concours à cette manifestation-dé tous ceux qui mtéres;
sent dans une branche quelconque au progrès de lidéa
aéronautique et de la locomotion aérienne.
C'est ainsi que nous apprenons que le comité de la
section rétrospective vient d'être composé comme suit
M. Jules Armengaud jeune, ingénieur conseil, ancieri
élève de Polytechnique.
M. Paul Renard, commandant du génie.
M. Albert Becq, ancien élève de Polytechnique, in-
génieur conseil, directeur de la Lumière électrique.
Cette exposition de la section rétrospective occupera
quelques-unes des salles du premier étage du Grand
l'11a19.
On y verra également dans une autre classe les ob-
jets dart, les peintures, sculptures et gravures se ratj
tachant à l'aviation et à l'aérostation. Cette classe est,
présidée par M. Paul Tissandier.
AU-DESSUS DE PARIS EN AÉROPLANE
L'aviateur Bielovucie a effectué hier un vol au-des*
sus de Paris.
Partant du terrain de manœuvres d'Issyles-Mouîi-
neaux à 6 h. 20 du soir, il s'élevait rapidement et pi-
quait droit sur la tour Eiffel qu'il doublait à 6 h. t8 m,
32 s. Il passait à environ 150 mètres au-dessus du dra-
peau qui flotte sur la tour et regagnait le terrain d'Issy
où il atterrissait à 6 h. 35.
Son altitude moyenne a été de 450 à 500 mètres.
UNE COURSE D'AÉROPLANES DE FRANCE EN ANGLETERRE
On annonce que M. Perron, maire de Boulogne-sur-
Mer, vient d'engager des pourparlers avec la munici-
palité de Folkestone, dans le but d'organiser une grande
course d'aéroplanes. ̃ •
Cette épreuve, qui sera parait-il dotée de prix impor-
tants se disputera de Boulogne à Folkestone. Les pi-
lotes devront enlever à leur bord un passager.
Les conditions définitives du règlement seront trô.S;.
prochainement établies, et aussitôt rendus publi-,
que». r
.~rWa. e~mlr~am9,W^·i~®
VCEILLET du ROY w.&S.V1i£££L.r«.:i ï
âieu vulgaire que la sentimentalité amollit «I
que le romanesque désarticule. Florence n'est
pas là cité de leurs petits émois et de leurs rê-
ves enfantins. Tandis que les femmes pous-
saient des cris en apercevant dans l'Arno, au
loin, sous les ponts, les dernières lueurs du so-
leil, je voyais mes amis les marchands, les
spéculateurs-sur les terrasses des vieux palais.
Ils avaient le droit, presque le devoir, de por-
ter des habits somptueux. Par la toute-puis-
sance de l'argent, ils. pouvaient franchement
aspirer à être les maîtres de cette ville. Elle n'é-
tait bien parée que parce qu'ils lui apportaient,
par leur savoir, leur dextérité, leur audace, des
fleuves d'or. On les redoutait, on les massacrait
parfois, mais on n'affectait pas de les tenir en
mépris. Ils donnaient à leur patrie des palais et
des chefs-d'œuvre, comme nous offrons un hôtel
ou un collier à des belles filles.
» Les sottes! Elles veulent ici un poète qui
leur murmure des vers obscurs, un érudit qui
leur raconte des histoires découvertes dans la
poussière des bibliothèques. Elles ne voient pas
c$ue cette ville est ma ville. C'est une cité de
banquiers rapaces. Aussi elle est en or quand
se couche le soleil, et quelques secondes plus
tard, ele paraît livide comme si elle tombait
en putréfaction. Car l'excès du luxe est proche
de la mort. Florence a le charme inquiétant de
Bruges qui fut aussi la gloire de marchands.
C'est Je cadavre d'une de nos maîtresses. Elle
fut complaisante à tous les caprices de nos
pères qui l'en récompensèrent généreusement.
Elle n'est plus; mais il y a encore des chefs-
d'œuvre comme subsistent autour d'une momie
des parures. »
La femme de chambre s'avança– imperti-
nente r
Madame fait dire à monsieur qu'il est
minuit et qu'elle désire dormir.
Il répondit
C'est bien!
Et quand la domestique se fut éloignée, il
se leva très vite
je vais subir des reproches, me confiait-il,
et je tremble un peu. Si ma femme vcras_ de-
mande demain de quoi nous avons parlé, dites-
lui que vous m'avez interrogé sur des valeurs.
Je ne voudrais pas lui paraître ridicule. Elle
est très gentille; elle n'aime pas que j'exprime
des idées sur l'art; elle sait que je n'y entends
rien. Je.n'ai pas reçu comme elle une brillante
éducation. Je ne suis que bachelier. Elle joue
•tfu piano, elle chante, elle peint. Elle a, comme
̃file dit, le sens de la beauté.
Il me serra la main et disparut dans l'ascen-
seur tandis que j'achevais de fumer mon cigare,
Nozière
CONSEILS GÉNÉRAUX
(SESSION D'AOUT)
Hérault. Le conseil, après une discussion
longue et animée, a adopté le vœu suivant
Considérant que la liberté consiste à tolérer chez
autrui l'affirmation d'idées contraires à ses convictions
propres; qu'il ne doit être porté atteinte à. une liberté
existante qu'en cas de nécessité nationale ou sociale
absolue; émet le vceu que le principe de la liberté
d'enseignement soit maintenu dans nos lois, et iné-
branlablement attaché aux principes de laïcité, que les
Chambres votent dans le plus bref délai les projets de
loi Doumergue destinés à défendre l'école publique
et laïque contre les attaques injustifiées de ses adver-
saires.
Une commission a été nommée pour étudier la
question du remboursement aux conseillers géné-
raux des frais que leur occasionne la session.
̃ Lozère. Un incident s'est produit hier en
séance entre M. Monestier, député, et M. Gaillar-
don, vice-président du conseil général, au sujet
d'un crédit de 200 francs accordé, en avril dernier,
pour un concours spécial de la race ovine. M. Gail-
lardon ayant accusé la commission d'organisation
de ce concours d'avoir « forfait à l'honneur», M. Mo-
nestier a déclaré qu'en qualité de président de cette
commission il avait le droit et le devoir de relever
l'outrage. M. Gaillardon a retiré l'expression et l'in-
cident a été clos.
Marne. Le préfet a fait hier un exposé des
travaux de la réunion privée qui avait eu lieu sous
ia présidence de M. Léon Bourgeois en vue de venir
en aide aux vignerons champenois. Les résolutions
arrêtées en principe par cette commission se résu-
ment ainsi
Les caisses de crédit agricole et viticole serontinvi-
tées à modifier leurs statuts de manière à leur permet-
tre de consentir des prêts à échéance de trois ans. Les
modifications de statuts en question ne s'appliqueront
qu'aux prêts à consentir aux viticulteurs.
Ces prêts devront être garantis par une garantie
collective, constituée au moyen d'une avance à verser
par le département à une ou plusieurs sociétés agri-
cOies et viticoles, afin de permettre à ces caisses d'ob-
tenir une augmentation des avances qui leur sont con-
cédées par l'Etat. La somme à avancer ainsi par le
département s'élèverait à 800,000 fr.
Les avances accordées par l'Etat aux caisses de
crédit sont quatre fois plus fortes que les sommes dont
disposent ces caisses. Celles-ci pourront donc obtenir
une nouvelle avance de 3,200,(00 fr. au moyen des
800,000 fr. du département. Elles disposeront ainsi d'une
somme de 4 millions de francs.
Les versements du département seront effectués au
fur et à mesure des demandes de prêts que les vigne-
rons adresseront à leurs caisses. Ces dernières fixeront
le montant des avances qu'elles solliciteront.
Les fonds seront obtenus au moyen d'un centime et
demi des douze centimes extraordinaires, lequel est
inemployé dans -le budget de 1911.
Malgré l'opposition de M. Margaine, député de
Sainte-Menehould, ces différentes résolutions furent
votées par Je conseil à l'unanimité moins une voix.
Le conseil adopta ensuite un vœu demandant au
Parlement de voter la bande de garantie et d'impo-
ser l'obligation aux négociants d'avoir des locaux
séparés pour loger le vin de Champagne.
NOUVELLES DU JOUR
On inaugurera, le 4 septembre, à Pont-de-Veyle
(Ain), sous la présidence de M. Emile Loubet et de
M. Louis Bar thou, le monument dû au statuaire
Paul Aube, que les amis et les compatriotes du
docteur Etienne Goujon, sénateur de l'Ain et maire
du 12e arrondissement de Paris, ont élevé à sa mé-
moire.
M. de Pardieu, inspecteur général des haras, est
nommé directeur des haras, en remplacement de
M. Hornez, décédé.
M. d'Heilhes, directeur au dépôt d'étalons de
Tarbes, est nommé inspecteur général des haras, et
affecté en cette qualité au 1er arrondissement.
M. Faraliccr, président de l'Association frater-
nelle des employés et ouvriers des chemins de fer
français, est nommé membre de la section perma-
.flente du comité consultatif des chemins de fer.
M. Adam, administrateur en chef de 2e classe des
colonies, est chargé des fonctions intérimaires de
lieutenant-gouverneur de l'Oubàngui-Chari-Tchad,
pendant la durée de l'absence du lieutenant-gouver-
neur titulaire.
MM. Oliveda, adjoint de 1" classe des affaires in-
digènes de l'Afrique occidentale française, et Hu-
bert, administrateur adjoint de lre classe des colo-
nies, sont nommés administrateurs de 3e classe des
colonies.
A propos de l'attribution à l'Assistance publique
de la fondation Marie-Thérèse qui était destinée à
venir en aide aux prêtres infirmes et malades du
diocèse de Paris, M. Ambroise Rendu, conseiller
municipal, écrit à M. Mesureur:
Monsieur le directeur général,
Une délibération du Conseil municipal, du 13 juillet
dernier, a demandé l'attribution de la fondation Marie-
Thérèse au service des « enfants assistés ».
Je ne vois pas très bien la corrélation entre une fon-
dation destinée aux vieux prêtres et le service des
enfants abandonnés.
Mais il n'importe. Comme je m'intéresse à-la maison
de Chateaubriand tout^spécialement, en ma qualité de
membre de son conseil, je viens vous prier de me dire
si l'Assistance publique entend conserver à la fonda-
tion, qui lui aura été attribuée, le caractère et la des-
tination qu'elle avait, du chef de son fondateur.
Un décret constitutif a reconnu ce caractère et cette
destination, et je pense bien que l'Assistance publique,
qui est chargée de faire respecter les volontés de ses
bienfaiteurs, même indirects, pourra donner une ré-
ponse formelle à ma question et m'évitera de la por-
ter à la tribune du Conseil municipal, au nom des bé-
néflciaires d'une œuvre qui doit survivre pour conti-
nuer le bien qu'elle a fait jusqu'ici.
Recevez, monsieur le directeur général, etc.
Le sixième congrès de l'Union des -sociétés de se-
cours mutuels de la Drôme a eu lieu aujourd'hui à
Nyons, sous la présidence de M. Emile Loubet.
M. Moulin, vice-président de l'Union des sociétés
mutuelles de la Drôme, a souhaité la bienvenue à
M. Loubelf, qui, affirmant sa ferveur mutualiste, a
rappelé ses premières luttes pour la République à
Nyons.
Le conseil de préfecture du Pas-de-Calais vient
«aanuler l'élection de M. Picot conseiller d'arrops-
dîssement de Saint-Omer. H a basé aa décision sur 1
le fait qu'une affiche, attribuée à M. Picot, atta-
quant l'honorabilité de son concurrent, le docteur
Alexandre, avait été placardée la nuit précédant
l'élection, et sur le -faible écart des voix entre les
deux concurrents.
On nous écrit de Nîmes
Un curieux incident vient de se produire dans le
parti socialiste à propos de l'indemnité de 500 fr. par
mois qui est allouée au maire de la ville.
Le maire ayant été élu député d'une circonscrip-
tion voisine et ayant donné sa démission, le pre-
mier adjoint faisant fonctions de maire jusqu'à
l'élection du prochain titulaire s'est cru autorisé à
toucher le montant de cette indemnité, Mais tel
n'est pas l'avis des autres adjoints socialistes qui
réclament le partage de cette somme à parts égales
entre tous les adjoints, chacun d'entre eux coopé-
rant, disent- ils, à assurer l'expédition des affaires
municipales.
LES DOLÉANCES DES INONDÉS'
A la suite de l'entretien entre M. Magny, directeur
des affaires départementales- à la préfecture do la ̃'
Seine, et entre les délégués du comité intercommu-
nal des inondés, le préfet de la -Seine a ratifié l'enga-
gement pris par M. Magny d'ouvrir en ce qui con-
cerne la distribution des secours dans; certains: ar-
rondissements et dans certaines communes, une
nouvelle enquête à laquelle pourront prendre paît
deux membres du comité appartenant à l'arrondisse"-
ment ou à la commune.
Tu"~mR~E~ou~'
Sophie Cottin
Dans l'aimable Bagnères-de-Bigorre, en présence
du maire et du député, et sans doute au son des fan-
fares locales, on a vanté aujourd'hui les vertus et
la vertu de Sophie Cottin, devant un bas-relief du
statuaire Escoula où elle apparaît « dans une pose
et une attitude méditative, pleine de grâce, un feuil-
let sur les genoux, un crayon dans une main ». C'est
du moins ainsi que M. Fernand de Cardaillac, pré-
sident de section au tribunal civil de la Seine qui
conçut et réalisa le projet touchant d'exhumer la
gloire de la romancière à qui nos aïeules vouèrent
un culte de lectrices attendries a déerit le monu-
ment. « Tout enfant, raconte-t-il, j'ai souvent joué
près de Bagnères, dans un vallon solitaire qui porte
encore le nom de celle qui vint jadis y chercher la
solitude et l'inspiration, YElysée-Cotlin. Sur le dé-
clin de sa vie, on. aime à revenir aux joies et aux
impressions de l'enfance. Aussi m'a-t-il pris la fan-
taisie de lire les romans, aujourd'hui démodés, do
celle qui fut célèbre en; son temps et qui fut en-
suite trop oubliée peut-être. »
« Oubliée », c'est l'épithète qui s'accole naturelle-
ment aujourd'hui au nom de Sophie Cottin.On peut
supposer même que plusieurs de ceux qui célèbrent
actuellement ses mérites ont renoncé à découvrir
sa littérature. Il n'est pas jusqu'à M. Laurent
Tailhade qui, chantant aux pieds de sa statue, n'ait
pu se garder de tendre vers elle ce laurier sin-
gulier
C'est un hommage exempt de faste que j'apporte,
Lecteur indigne, à cette Muse deux fois morte,
Dont un siècle d'oubli couronna le destin.™
Et le poète pamphlétaire dont la tmise: est
une Némésis qui aurait la grâce de Vénus ne
manque point d'assigner l'exemple de cette femme
de lettres « deux foîs morte » à la méditation de tels
de ses contemporains célèbres dont il ne peut pro-
noncer les noms sans médire.
Déjà en 1888, au cours d'une étude sur Mme Cot-
tin pendant la Terreur, que publia le Correspondant,
M. A. de 'Ganniers remarquait que parmi les gens
cultivés bien peu connaissaient cet auteur. Et pour-
tant il fut fameux, ainsi que l'attestent les nom-
breuses éditions de ses romans Claire dlAlbe,
Amélie, Mansfeld, Malvina, Malhilde, Elisabeth.
C'est une œuvre sentimentale et grave où, presque
toujours une femme lutte éperdument contre un
amour défendu. Plusieurs générations pleurèrent au
récit de ces combats intérieurs. Mais les yeux se
séchèrent vite de Mme Cottin et de Mlle de Scu-
déry, Sainte-Beuve a pu dire « Pas une oeuvre
d'elles qu'on puisse lire autrement que par curiosité,
pour savoir les modes de sensibilité de nos mères. »
Corinne, avec moins de stoïcisme, a conquis plus de
gloire.
Sophie perdit son père, un M. Risteau, directeur
de la Compagnie des Indes, peu de temps après sa
naissance que ses historiographes, après hésita-
tion, ont fixée à l'année 1770. Sa mère alors l'em-
mena à Tonneins, où elle-même était née, et lui lit
donner une éducation soignée. A vingt ans, Sophie
brillait par sa distinction et son esprit dans les sa-
lons de Bordeaux, où un banquier, M. Cottin, l'a-
perçut et la convoita. La mère souhaita le mariage
que désirait le banquier, homme d'âge, et docile, la
jeune fille obéit. Mme Cottin vécut à Paris, luxueu-
sement. Mais la Révolution vint et ce fut le désas-
tre. M. Cottin, dénoncé comme suspect, mourut d'é-
pouvante en l'instant où les gardes nationaux ve-
naient l'arrêter. Béfugiée à Champlan,près de Long-
jumeau, la jeune veuve attendit que s'apaisât l'o-
rage, en compagnie d'une parente et d'une amie.
C'est pendant ce séjour à Ohamplan qu'elle écri-
vit à un quinquagénaire, M. Gramagnac, notable
commerçant parisien, qui s'était épris d'elle, les
lettres publiées par M. A. de Ganniers, dans le Cor-
respondant de 1888. Le brave homme avait été
l'intime ami de feu Cottin. Veuf lui-même, il dé-
fendait les intérêts de la jeune femme, menacés par
les prétentions de la Convention. Il s'attendrit au
cours de cette procédure, et il eut le tort de le dire
à cette veuve de vingt-deux ans, quî ne lui répan-
dit qu'en pleurant son vieux mari, pour lequel on
ne se doutait pas qu'elle eût éprouvé tant d'amour.
Cette. correspondance présente la petite bour-
geoise lettrée sous un jour trouble certains de ses
admirateurs y trouvent à alimenter leur enthou-
siasme d'autres, tout en reconnaissant que la dame
avait du style, constatent qu'elle avaït de la ruse
aussi. L'excellent Gramagnac se voit chargé des
mille soins que réclament la veuve et ses amis..
Mais il aime, et discrètement, timidement, il im-
plore. Alors, après lui avoir donné mission de cher-
cher un appartement meublé, à Paris, et avant de
Te prier d'envoyer du. thé à Ghamplan, on lui dé-
coche, à propos d'un livre « Le désir, mais le dé-
sir timide la suivait en silence, dit l'abbé Raynal;
le seul honnête homme eût osé l'aimer, mais n'eût
pas osé le lui dire. Heureuse la femme digne d'un
pareil éloge! »
Quand le bonhomme se tient coi, on le ramène
par de douces paroles, où l'on joue du mot « ami-
tié » comme d'un éventail dans un galant entre-
tien, Se risque-t-il à nouveau, on vous le rabroue
éloquemment, avec de la philosophie, de la psy-
chologie, et toujours des invocations aux mânes
du mari défunt. Enfin, l'honnête marchand écrit
une lettre « raisonnable » et on lui donne en ré-
compense cet excellent morceau de composition
littéraire
« Quelle noble satisfaction j'éprouve en con-
templant la dignité de l'homme et sa supériorité
sur tout ce qui l'entoure! Tandis que toutes les
espèces vivantes n'ont que des plaisirs et qui s'é-
teignent dans les glaces de l'hiver, l'homme seul
aime toujours; les saisons n'influencent point son
âme, l'absence ni la mort ne la peuvent changer;
enfla, il n'appartient qu'à lui de sentir qu'une seule
vie ne peut suffire à deux attachements.
» Je sais qu'il est parmi nous des êtres dégra-
dés qui croient faire un meilleur choix en parta-
geant les sensations des animaux, et leur image me
fait penser que notre espèce se distingue des au-
tres en ce qu'elle a reçu le privilège de pouvoir se
dénaturer, mais s'il lui est permis de s'abaisser
jusqu'à la brute, il lui est donné de s'élever jus-
qu'aux anges, et je réserve ma. plus tendre estime
aux âmes en qui j'aperçois quelque trace do cette
grandeur. »
Longtemps après 1807, année où mourut Sophie
Cottin, M. Gramagnac ventait sa vertu et conservait
ses lettres comme un talisman, "̃'
Cette épistolière glacée garda-t-elle toujours
ce jugement sur les hommes et les animaux? C'est
sujet à controverse entre ses biographes. Les uns
veulent que àeux soupirants se soient suicidés
devant sa vertu impassible. D'autres ne le veulent
pas. Le Dictionnaire universel lui-même osa dire
« Elle a aimé, mais chose assez singulière, sans
avoir su inspirer une passion durable. » Et le nom
d'un amant était cité « le citoyen Amab. », à
qui, dans une lettre, elle adresse de « tendres re-
proches ».
M. A. de Ganniers ne croit pas au succès du « ei-
toyen Amab. o, mais il accorde cependant que la
« nature ardente et passionnée » de Sophie Cot-
tin, « l'exaltation de ses sentiments l'exposaient
plus qu'une autre à là chute, vis-à-vis d'un soupi-
rant qui eût su exploiter facilement ces qualités ».
Repose, désormais, dans le calmé vallon!
Voici l'ombre des pins, des sorbiers et des frênes*
Ton image y parait plus calme et plus sereine,
Sous le bandeau royal de ses grands cheveux blonds.
.Ma dit aujourd'hui M, Laurent Tailûaâe, :dans
cet « Elysêe-Cottîn «.deBagaères-de-Bigorae, tout
pavoisé et bruyant de joie populaire. Ah! quelles
douces larmes eût versées le patient M. Grama-
gnac, s'il avait été lài JEAN Leprang.
L'âge de la première communion
Le décret de la Sacrée Congrégation des Sacre-
ments sur la première communion commence à
susciter les commentaires les plus divers dans les
milieux catholiques français. La Croix, qui con-
seille « l'acceptation universlle complète et
joyeuse » de la nouvelle règle, reconnaît avoir reçu
des lettres dont les signataires disent de la ré.-
forme « Co n'est point seulement un désarroi,
c'est un grand malheur. »
Le désarroi se manifeste même dans les notes
publiées par les Semaires religieuses, quelque pru-
dence que leur caractère officiel les oblige à y met-
tre. Celle de Nancy notamment indique que des
mesures de transition seront nécessaires, et elle
suggère de combiner le régime actuel avec le ré-
gime nouveau
Pourquoi ne maintiendrait-on pas au même âge
qu'aujourd'hui la cérémonie actuelle de la communion
solennelle des enfants? Les communions précédentes.
faites avec plus d'intimité, en seraient la préparation
et cette cérémonie si populaire, si chère aux familles
et aux paroisses, serait un acte de foi public et impo-
sant à la présence réelle.
Le « renouvellement » pourrait être également main-
tenu on en rehausserait l'éclat par la distribution de
diplômes d'instruction religieuse, signés par Monsei-
gneur l'évêque, que mériteraient des examens passés,
devant une commission décanale sur un programme
déterminé par l'autorité diocésaine. Et d'autres di-
plômes, de degré supérieur, pourraient être obtenus,
après d'autres années de catéchisme de persévérance.
Mgr Chollet, évoque de Verdun, ajourne les rè-
gles d'action précise qu'il aura à formuler, les
prescriptions du décret n'obligeant guère « avant
la prochaine période pascale ». Il se borne à dire
que c'est au confesseur qu'appartient d'apprécier
les dispositions de l'enfant et de juger s'il est apte
à faire sa première communion.
M«r Gély, évêque de Mende, tout en constatant
que la réforme paraît « contrarier i~ nos usages de
France », s'en félicite comme d1 « un retour aux
traditions séculaires de l'Eglise »
Si nous donnons Notre-Seigneur aux enfants dès l'âge
de discrétion, tandis qu'ils sont dans toute leur can-
deur et innocence, Il les protégera Lui-même contre
les dangers des mauvais exemples et des mauvaises
écoles. Aussi le Saint-Père a-t-il voulu retoucher lui- j
même ce décret jusqu'au dernier moment, et c'est avec
une visible satisfaction qu'il l'a scellé de son autorité
suprême.
La Semaine religieuse de Cambrai rapporte que
chaque fois que l'un des évêques français soumet-
tait à Rome ses statuts diocésains et que Rome y
trouvait cette règle: « Communion des enfants a
l'âge de douze ans », elle avait soin d'y. ajouter
cette clause « Réserve faite du droit des en-
fants ».
L'organe de Mgr Delamaire ajoute éré dé uià
La première communion a bien dégénéré depuis son
institution relativement récente. Pour beaucoup elle est
devenue une fête mondaine où enfants et mères, même
dans les classes pauvres, rivalisent de luxe.
Pour les jeunes filles surtout, c'est comme une gré-
mière noce avec ses toilettes, ses banquets, ses pré-
sents, etc. Désormais, au lieu d'être le couronnement
de l'instruction religieuse, la première communion en
sera le principe à, l'âge de sept, huit ou neuf ans, selon
l'ouverture d'esprit- de chaque enfant. Vers douze ans
pourrait avoir lieu la délivrance solennelle d'un certi-
ficat d'instruction religieuse. Viendrait ensuite pour
toute la paroisse, les enfants en tête, la rénovation des
vœux du baptême et la consécration à la Très sainte
Vierge. ·
/Nous avons, il y a plusieurs jours, résumé les
doléances que la publication du décret provoque
dans les paroisses parisiennes, telles que nous les
avaient exposées un.certain nombre d'ecclésiasti-
ques. Elles se trouvent confirmées avec autorité
par une lettre que M. Desers, curé de Saint-Vin-
cent-de-Paul, envoie à VEclair. M. Desers en effet
n'a pas cessé depuis une quarantaine d'années de
s'occuper avec une particulière sollicitude des pre-
miers communiants, soit comme vicaire de Saint-
Louis d'Antin où il était en contact avec les jeunes
élèves du lycée Condorcet, soit à la tête de la pa-
roisse qu'il dirige. M. Desers ne nie pas que le dé-
cret soit « d'une logique admirable », mais il fait
remarquer « qu'il y a une logique, dont la marche
ne tient aucun compte des faits, qui ne voit que
son principe et le suit aveuglément. Cette logique-
là est connue. Dès qu'elle se trouve en rapports
avec la liberté humaine, elle aboutit d'ordinaire
aux conséquences les plus erronées ».
L'accusation de jansénisme appliquée à la pré-
paration lente et solide à la première communion
lui inspire cette réflexion
Est-ce que l'Eglise ne nous ordonne pas une prépa-
ration pour les grandes fêtes chrétiennes? Qu'est-ce
donc que l'Avent et le Carême? Et les anciennes caté-
chèses n'impliquaient-elles pas une préparation sé-
rieuse ? Pourquoi exclure systématiquement la prépa-
ration grave, lente de la première communion?
Au cours des déclarations qu'il a faites aux jour-
naux religieux, le cardinal Ferrata avait critiqué
les splendeurs extérieures qui détournent du prin-
cipal « toilettes, visites, festins », ajoutant ce-
pendant qu'il serait « loisible de faire des commu-
nions générales d'enfants » auxquelles on pourrait
« donner un très grand éclat ». Le curé de Saint-
Vincent-de-Paul répond
Ce qu'il redoute, à l'occasion des premières commu-
nions, se produira tout autant avec ces communions
générales. La mondanité des familles peu chrétiennes
s'y retrouvera, malgré tous les avis. Mais n'y a-t-il
donc, en ce monde, que des familles riches et mondai-
nes ? La majeure partie de nos premiers communiants
n'est-elle pas composée d'enfants pauvres? Pourquoi
leur retirer, à ces petits, la plus belle fête, la seule
fête, en somme, de l'enfance?
Etrange illogisme! On s'élève contre nos cérémo-
nies de première communion, comme si les cérémonies
religieuses n'étaient pas dans les traditions de l'Eglise.
Elles sont si bien dans la tradition que ce fut le pre-
mier acte des protestants de les supprimer. Où donc est
la logique de les maintenir pour les fêtes de l'Eglise, et
d'exclure de cette pieuse splendeur la fête de la pre-
mière communion, qui dans tant de pays d'ailleurs,
s'unit à la célébration de l'une des grandes fêtes da
l'année ?
M. Desers relève comme une preuve d'inexpé-
rience de l'apostolat des enfants, « trop évidente
pour être discutée », l'affirmation prêtee au cardi-
nal Ferrata « qu'il est aussi facile de préparer à la
première communion des enfants de sept ans que
des enfants plus âgés, et qu'il n'est pas plus diffi-
cile d'apprendre à des enfants de sept ans à dis-
tinguer le pain eucharistique du pain ordinaire ».
De quels enfants parle-t-on? demande le dis-
tingué curé de Saint-Vincent-de-Paul
Qu'adviendra-t-il des enfants de l'école laïque? Et
de ces enfants de la campagne, si matérialisés, dans
certaines régions ?,
Cette masse immense ne sera pas atteinte, ou du
moins elle ne sera pas pénétrée. A sept ans, on ne
pourra pas apprendre le nécessaire à ces enfants. Ils
n'arriveront pas à saisir la distinction du pain eucharis-
tique et du pain ordinaire, ou, du moins, pour la plu-
part, cette distinction leur apparaîtra comme celle qui
existe entre du pain qui est très blanc et tout petit,
et un autre pain qui est moins blanc et plus gros.
Et après, cette masse, ayant fait une première com-
munion hâtive, avec des impressions trop superficiel-
lès, nous échappera. 'Nous n'en reverrons que quelques
rares unités, II est topique le moyen qu'on nous sug-
gère pour instruire ensuite ces enfants appât des ré-
compenses, prix, etc: Tout cela sera inèffloace, et vrai-
ment ce sont de bien petits moyens.
Ils agiront auprès de quelques familles. Encore une
fois, la masse échappera voilà le côté douloureux de
la nouvelle législation. Les faits sont patents. La logi-
que aurait dû céder devant les faits.
Dans nos catéchismes, nous nous efforcions de don-
ner un fondement solide à la vie chrétienne de nos ca-
téchisés. Maintenant nous ne le pourrons plus. C'est là
ce qui nous angoisse.
M. Desers conclut, comme l'avaient fait les cu-
rés que nous avions interrogés, que l'application du
décrc4 amènera une régression fatale pour l'E-
glise. L'esprit du mal, seul, pourra se plaindre de
la nouvelle législation, a dit le cardinal Ferrata.
« Nous l'assurons, au contraire, termine M. Desers,
que l'esprit du mal se réjouira, car par la force
des choses nous ferons libéralement son jeu pour
l'aider à déchristianiser la France. »
Le renchérissement des vivres et la C. a. T.
La campagne que l'Union des syndicats de la Seine
veut mener contre le renchérissement des vivres a
débuté hier soir par un meeting tenu au restaurant
coopératif de la rue de Bretagne.
M. Savoie, secrétaire de l'Union et boulanger de
son état, a prononcé une violente diatribe contre
« les grands propriétaires accapareurs de blé », con-
tre « les agioteurs qui réalisent d'énormes bénéfices
sur le dos ou plutôt sur le ventre des travailleurs ».
Si le gouvernement levait les droits d'entrée pen-
dant quarante-huit heures seulement, la situation se-
rait immédiatement améliorée, et une bonne leçon
aurait été donnée aux accapareurs. Mais le gouverne-
ment ne sait sévir que contre les grévistes I
L'orateur a ensuite critiqué les décisions prises
par les restaurateurs et marchands de vins dans
leur meeting du cirque de l'avenue de La Motte-
Picquet: «Ce n'est pas la demi-portion qu'ils ont
supprimé, mais la portion entièro, a-t-il dit, car ils
ne servent plus sous le nom de portion que des
demi-portions. » T
M. Lefèvre, secrétaire général adjoint dela C.G.T.,
a déclaré que cette question du « ventre » devait
prendre le pas sur toutes les autres.
Le comité confédéral va, a-t-il déclaré, se réunir
jaardi aJto d'exaœinw le WPy?Q employer pour faire,
cesse? la fenusse des -denrées alimentaires. S'il n'y a 1
pas moyen d'obtenir de sanctions contre les affa meurs,
eh bien, nous aurons recours à l'action directe. S'il le
faut, nous irons chercher le grain dans les greniers e .1'
le vin dans les caves. Oui, occupons-nous d'abord de
manger, nous philosopherons ensuite 1
Il a conseillé à ses auditeurs de se grouper et de
s'organiser de façon à obtenir à la fois l'augmenta-
tion des salaires et la diminution des heures de tra-
vail °
L'augmentation des salaires vojts permettra de lais-
ser votre femme au logis au lieu de l'envoyer à l'ate-
lier. Et grâce à la diminution des heures de travail
vous pourrez aller manger chez vous la « popote »
que vous aura préparée votre compagne, au lieu d'al-
ler chez le « bistro »; car le « bistro », voilà l'ennemi! ¡
Cette déclaration fut accueillie par des applaudis-
sements prolongés. Et l'orateur, insistant sur ce
point, s'efforça de démontrer à ses auditeurs syndi-
calistes qu'ils faisaient la fortune des marchands de
vins « au détriment de leur santé et de leur porte-
monnaie ».
Apres plusieurs discours préconisant l'action di-
recte, on vota l'ordre du jour suivant
Les citoyens présents, affamés par les exploiteurs;
se rendant compte de la hausse anormale des ali-
ments et des loyers,
Protestent contre les fauteurs responsables de cette
hausse, notamment les gros et petits commerçants,
Déclarent être solidaires si les prix ne sont pas di-
minués et s'engagent à l'action violente, si besoin est,
voire même à descendre dans la rue pour obtenir sa-
tisfaction,
En conséquence, ils engagent la C. G. T. à pour-
suivre activement la campagne actuelle et passent à
l'ordre du jour.
A la sortie, qui fut un peu tumultueuse, on pro-
céda à quelques arrestations qui ne furent pas main-
tenues.
Agitation syndicaliste
LA « CHASSE AUX RENARDS » A MARGENCY
A Margeney, les magistrats du parquet de Pon-
toise ont poursuivi, durant toute la journée d'hier,
leur enquête sur les graves incidents qui se sont
déroulés au château de M. Le Roux.
Dans l'espoir de découvrir les revolvers ou les
douilles de cartouches que les grévistes auraient
pu abandonner après le siège du pavillon du jardi-
nier chef, et sur "l'ordre du juge d'instruction, on a
fauché une vaste étendue de pelouse dans le parc.
Mais cette opération n'a donné aucun résultat.
Après de nouveaux interrogatoires et de nouvelles
confrontations, le juge d'instruction a fait procéder
à l'arrestation de deux grévistes blessés Edouard
j Pavy, âgé de vingt-quatre ans, demeurant 13, rue
Saint-Jacques, à Montmorency, et Auguste Gorion,
âgé de vingt-cinq ans, demeurant également à
Montmorency. Tous les deux ont protesté violem-
ment contre les inculpations d'entraves à la 1iberté
du travail, de violences avec armes prohibées et de
violation de domicile reiefées contre eux.
Les deux prévenus ont été conduits sous une
i imposante escorte à la prison de Pontoise.
I 'Avant leur départ de Margency, les magistrats
furent priés par les syndicalistes de vérifier de pré-
tendues traces de plomb dans un mur de la rue de
l'Avenir, où affirmaient-ils, ils essuyèrent huit fois
le feu du jardinier chef Auclair.
Mais il est apparu que les menus trous existant
dans le mur étaient fort anciens et ne provenaient
pas de coups de fusil.
La grève n'a pas pris fin comme on l'espérait. Un
nouvel incident s'est produit à Groslay, jue de la
Station. Au nombre d'une quarantaine, des grévis-
tes détruisirent les matériaux d'un chantier et dé-
foncèrent un plafond d'une construction en cours.
Ils tentèrent ensuite d'envahir l'habitation voisine,
où se trouvait le propriétaire, M. Paul Gaurion.
Mais devant l'attitude résolue de ce dernier, ils
s'éloignèrent en chantant l'Internationale.
Le secrétaire de l'Union des syndicats de Seine-
et-Oise s'est rendu hier soir à Montmorency où il a
présidé une réunion privée dans laquelle on a discuté
sur l'opportunité dune manifestation de protes-
tation.
Des mesures de police importantes ont été prises.
LA CAMPAGNE DES PRÉPARATEURS EN PHARMACIE
Le comité d'action qui dirige la campagne des
préparateurs en pharmacie pour la fermeture des
officines à neuf heures du soir a fait afficher sur les
murs de Paris, et notamment dans le quartier du
Faubourg-Montmartre, des affiches anonymes et non
timbrées, où on vise en-termes injurieux et diffa-
matoires une pharmacie voisine des boulevards. Les
directeurs de cette pharmacie nous informent qu'ils
ont déposé une plainte au parquet contre les auteurs
de ce placard.
LES OUVRIERS SUR MÉTAUX
,Les différentes organisations parisiennes adhé-
rentes à la Fédération des ouvriers sur métaux ont
constitué un comité intersyndical qui a commencé,
par'un meeting tenu ce matin à la Bourse du tra-
vail, une campagne pour la diminution des heures
de travail.
Les délégués des fondeurs, des mécaniciens, des
ouvriers en instruments de précision, en instru-
ments de musique, des tourneurs en optique, etc.,
ont prononcé des discours où ils ont affirmé leur
volonté « d'obtenir par tous les moyens une jour-
née plus courte, plus de sécurité dans le travail, des
salaires plus élevés, en rapport avec la cherté de la
vie déterminée par les augmentations de toute na-
turè que font subir propriétaires et commerçants ».
Les assistants ont voté un ordre du jour par le-
quel ils « s'engagent à seconder les efforts du co-
mité intersyndical par une propagande intense et
individuelle pour attirer à l'organisation syndicale
les travailleurs des métaux qui jusqu'à ce jour n'ont
pas encore compris l'utilité du groupement profes-
sionnel ainsi que la propagande pour la réduction
des heures de travail et surtout pour la limitation
d'une durée maximum ».
LES CHEMINOTS
Notre correspondant particulier à Epernay nous
téléphone qu'une réunion a été tenue hier soir dans
cette localité par deb cheminots de la région.
M. Bidegarray, secrétaire du syndicat national, a
fait en termes violents le procès des compagnies. Il
a déclaré qu'un ultimatum serait envoyé aux com-
pagnies à la rentrée des Chambres.
Un ouvrier des ateliers d'Eoernay ayant voulu
prendre la parole et recommander la sagesse à ses
camarades, a été conspué et mis dans l'impossibilité
de continuer.
Un ordre du jour a été voté, où il est dit que
« toute conciliation est impossible avec les compa-
gnies, et que les cheminots sont décidés à quitter
le travail dès que le comité de grève donnera le si-
gnal ».
"FAITS DIVERS
Bureau central météorologique
Dimanche 28 août. La dépression signalée hier au
large de l'Irlande s'est avancée rapidement sur les
îles Britanniques et.l'ouest de la France le baromètre
marque 746 mm. à Blacksod-Point, 753 mm. à Brest
après une baisse de 10 mm. Une aire de pression rela-
tivement élevée couvre l'Europe centrale (Prague
764 mm.).
Le vent souffle du sud sur nos côtes de la Manche
et de l'Océan il est très fort en Bretagne.
Des pluies sont tombées sur les iles Britanniques
et l'Allemagne. _,»“ x
En France, on en signale seulement à Calais et à
Brest.
La température a légèrement baissé sur nos ré-
gions elle était ce matin de 5» à Arkangel,9° à Nancy,
10» à Limoges, 18° à Rome, 20» à Nice, 2a° à Laghouat.
On notait 7° au puy de Dôme et au mont Mounier,
5° au pic du Midi.
En France, des pluies orageuses sont probables avec
température assez élevée.
A Paris, hier, la température moyenne (14°) a été
supérieure de 2°8 à la normale (16°8).
A la tour Eiff el, température maximum 16»6, mini-
mum 12°2.
Observatoire municiyal
trogradé au sud-sud-est, soufflent ce matin avec une
vitesse voisine de 7 m. par seconde.
La température reste fraîche, les maxima d'hier sont
partout inférieurs à 20° et on note aujourd'hui des mi-
nima de 8° dans toute la banlieue sur la ville ils sont
de 11° °
La pression barométrique, en baisse depuis minuit,
accuse à midi 758 mm. 1.
Un souvenir des croisades» Le musée la-
pidaire de la ville de Nîmes vient de s'enrichir d'un
souvenir local et historique assez intéressant. C'est
une tombe remontant à l'époque des expéditions de
saint Louis en Terre-Sainte.
A cette époque les chevaliers français prenant part
à l'expédition avaient été rassemblés dans un camp
au bord de la mer, à quelques kilomètres d'Aigues-
Mortes. Quelques croisés moururent durant leur sé-
jour au camp et furent inhumés sur place. Par la
suite plusieurs de ces tombes disparurent, emportées
par la mer qui s'était avancée de quelques centaines
de mètres sur ce point de la côte.
L'une de ces tombes, constituée par un énorme
bloc de pierre portant l'écusson du défunt, aïait
résisté jusqu'ici aux assauts des vagues.
Le conservateur du musée de Nîmes, craignant t
qu'elle ne finisse par disparaître à son tour, yient 5
d'obtenir l'autorisation de la faire transporter au s
musée de Nimes, ou elle a pris place dans la galerie j
du moyen âge. c
Cette tombe, outre l'expédition qu'elle rappelle, a
l'avantage pour le musée d'être également un sou-
venir méridional, car l'écusson qui la décore est aux r
aimes pariantes un petit porc passant à gauche <
de la famille provençale des Porcelets, dont il ]
existe encore quelques descendants dans la région,
Un monument à. Gabriel Vicaire. A la
Clarté-Ploumanach (Côtes-du-Nord), on inaugure 1
aujourd'hui un médaillon du poète Gabriel Vicaire,
que modela le sculpteur René Lenoir. Gabriel Vi- 1
caire, tantôt rabelaisien, tantôt délicat et tendre, t
<:ima la Bretagne et le lui dit en chantant: Au.pays (
des ajoncs, exaltant la beauté de la terre et de la
mer bretonnes. 1
Le pays est en fête on chante et l'on dit des vers
devant le rocher ou s'encastre le médaillon. Mme l
Aimée Le Gall, « la mère Aimée », qui fut la bonne >
hôtesse du poète, devenu amer et découragé, pré- j
siie la cérémonie. Un grand dîner réunit ce soir, à 1
la Clarté, tous les Bretons des alentours. 1
Le drame de la rue de Meaux. Nous i
avons relaté les circonstances dana lesquelles un J
concierge de la rue de Meaux, M. Nicolas Harat,
avait été frappé de trois coups de couteau par un
do ses locataires, Maurice Fougeret, qui rentrait la
nuit en état d'ivresse. M. Harat est mort hier à
l'hôpital Saint-Louis où on lui avait fait subir l'opé-
ration de la laparotomie. Quant à son meurtrier, m-
terrogé par M. Guépet, juge d'instruction, il a dé-
claré qu'il était étendu sur le sol, terrassé par M.
Harat, quand, saisissant le poignet du concierge, il
s'aperçut que celui-ci était armé d'un couteau. C'est
alors qu'il se serait relevé et que, s'armant à son
tour, il aurait poignardé M. Harat.
Dynamiteur tué par sa bombet Le 15 août
dernier, à Saint-Sorlin (Drôme), un inconnu victime
d'un accident causé par une explosion, était pulvé-
risé dans des circonstances mystérieuses. L'en-
quête vient d'établir que la victime est un nommé
Henri Gabert, habitant à Lyon, rue Vauban. Il était
parti de cette ville emportant des bombes à renverse-
ment fabriquées par lui et au moyen desquelles il
voulait détruire la maison de son oncle habitant
Saint-Sorlin, qu'il accusait de l'avoir dépossédé d'un
héritage. Une de ces bombes éclata prématurément
et le dynamiteur fut tué.
Suicide d'un meurtrier. On mande de Bor-
deaux qu'un malfaiteur recherché pour meurtre au
cours d'une rixe, se voyant découvert chez des indi-
vidus qui le cachaient depuis plusieurs jours, tira
sur les agents de laf Sûreté sans les atteindre, puis
se logea une balle dans la tête. Il a été transporté
mourant à l'hôpital.
Un incendie a détruit, à Bourg-d'Oisans, huit
maisons appartenant à divers propriétaires.
Le feu a été allumé par deux enfants, les frères
Rey, âgés de dix et cinq ans, qui s'amusaient dans
une grange. Le plus jeune a été retiré grièvement
brûié.
Un sonneur de cloches foudroyé. Pen-
dant un orage, le sonneur de Ladepeyre (Aveyron),
Pierre Boudes, alors que les paysans tremblaient
pour leurs récoltes, monta au clocher pour tenter de
conjurer le danger en sonnant les cloches, suivant
un préjugé indéracinable dans nos campagnes. Il
ne les avait pas plus tôt lancées en volée que le son
cessa brusquement. L'imprudent avait été foudroyé.
Il laisse une veuve et cinq enfants dans le dénue-
ment.
Un seaudaïe à la salle de police. Do
notre correspondant particulier à Cherbourg
On n'a pas oublié les scandales qui se produisi-
rent l'année dernière dans les prisons du premier
dépôt des équipages de la flotte à Cherbourg: des
détenus avaient fait subir à de leurs compagnons
de cellule des outrages sur la nature desquels nous
ne pouvons insister.
Or ces faits scandaleux viennent de se renouve-
ler à la salle de police de la caserne du premier dé-
pot. On sait dans quelle promiscuité passent la nuit
les matelots punis disciplinairement ils sont en-
tassés dans un local exigu et couchés côte à côte
sur le lit de camp. L'autre nuit notamment il
s'est déroulé dans cette salle de police des scènes
abominables qui ont été révélées par un des hom-
mes punis. Cet homme, un jeune matelot, a raconté
qu'à peine entré dans le local où. il devait rester jus-
qu'au matin, il avait vu les plus anciens dea déte-
nus s'assembler uans un coin, et après une délibéra-
tion, décider de lui faire subir d'ignobles outrages.
Pour le forcer à se prêter à leur triste fantaisie et
pour le dissuader de les dénoncer, l'un des prison-
niers l'aurait menacé de lui planter son couteau dans
la gorge. Et le malheureux ainsi condamné aurait
servi de jouet à ces quinze codétenus dans les con-
ditions les plus répugnantes.
Hier matin, au sortir de cet enfer, malgré les me-
naces de mort dont il avait été l'objet, le jeune ma-
telot raconta ce qui s'était passé au premier maître
de semaine. Conauit devant le commandant, il con-
firma sa triste histoire et ajouta
Commandant, j'aime mieux mourir que de re-
tourner à la salle de police. On m'a menacé de mort
pour le cas où je dévoilerais les faits dont j'ai été la
victime. Eh bien, j'aime mieux être tué que de cou-
rir le risque de subir à nouveau les pires ou-
trages..
L'of licier consola le jeune marin et lui promit que
les coupables seraient châtiés et mis dorénavant
dans l'impossibilité de nuire.
Une enquête immédiatement ouverte a permis
d'établir que les faits révélés étaient exacts. Sept
anciens avaient tenu effectivement conseil et obligé
les huit autres détenus à s'associera leurs abomina-
bles pratiqnes sur la personne du jeune matelot
sans défense. Ces sept gredins ont été écroués à
la prison maritime en prévention de conseil de
guerre.
INFORMATIONS DIVERSES
Notre correspondant de Vichy nous télégraphie
« Miss Elkins est partie pour Paris. Son départ a
passé complètement inaperçu. Jai pu savoir que Mrs.
Elkins n'a pas accompagné sa fille,; elle est restée à
Vichy. Miss Elkins va à Paris attendre son père, puis
tous deux doivent revenir à Vichy rejoindre Mrs. El-
kins qui n'interrompt pas sa cure. »
livres 3stotj^te.atj:x:
Auguste Sabatier, critique littéraire
Auguste Sabatier était bien connu des lecteurs du
Temps comme écrivain politique, opposant aux so-
phismes des rhéteurs sa dialectique serrée et son
bon sens cévenol. Mais son œuvre littéraire leur
était moins familière. Dispersée dans les articles
hebdomadaires que Sabatier envoyait au Journal de
Genève, de 1873 à 1901, elle vient d'être étudiée par
M. Henry Dartigue en un livre excellent (1).
En tant que « critique littéraire », le doyen de la
faculté de théologie protestante de Paris ne se bor-
nait pas à. rendre compte des « nouveautés en
traçant quelques dessins plus ou moins pittoresques
sur la couverture des livres dont il parlait; pour lui,
la littérature, «'était toute la vie française de son
temps; il se l'assimilait avec une sympathie tou-
jours plus eompréhensive et plus avertie, et, par
l'entremise de ses « Lettres du Dimanche (2) » il en
transmettait le rayonnement à l'étranger.
Peut-être M. Dartigue, dans son étude si péné-
trante et si documentée, n'a-t-il pas assez insisté
sur cette fonction de messagère de l'esprit français,
qui constitue l'une des originalités de la critique
littéraire de Sabatier..Le souci de la vie morale
qui caractérise également ses jugements en litté-
rature ne provenait pas seulement de ses convic-
tions chrétiennes et protestantes, mais aussi de
l'ardent amour qu'il ressentait pour son pays. Il
l'avoue lui-même. «Ce souci moral, écrit-il dans la
préface aux « Lettres du Dimanche », procède
encore d'une autre source. Il naît d'un ardent amour
de la France. Deux choses me répugnent égale-
ment un patriotisme tapageur, haineux et intolé-
rant, qui s'imagine fortifier la patrie en y prêchant
la guerre civile, et un cosmopolitisme déclamatoire
qui remplace dans l'âme les sentiments chauds,
vivants et pratiques, par des abstractions creuses
et stériles. Il faudrait nous guérir de l'un sans ver-
ser dans l'autre, et c'est en aimant l'âme morale de
la France que nous y pourrions réussir. »
On accuse volontiers la critique littéraire influen-
cée par l'esprit protestant de se plaire à la prédica-
tion et de juger la valeur d'un roman ou d'une
poésie d'après son influence sur la volonté. Sabatier
prenait une attitude quelque peu différente. Il était
convaincu de la haute dignité de la pensée, humaine.
On est un mauvais ouvrier en littérature, disait-il
souvent, si on fait de sa pensée ou de la pensée des
autres un simple amusement, si on la réduit à un
plaisir d'épicurien dont une vaine curiosité est le mo-
bile et la fin. La doctrine contenue dans un livre ou
l'action qu'elle exerce sont de moindre importance
que la source même d'où elle jaillit, que la qualité
intellectuelle et morale de l'écrivain» Aussi, tandis
que d'autres, remarque justement M. Dartigue, bor-
nent leur ambition à la recherche de quelque belle
forme nouvelle, et se montrent entièrement satis-
faits et comme cela est naturel 1 quand ils ont
> rencontré une idée ingénieuse ou un vers mélo-
dieux, Sabatier se met surtout en quête de la per-
1 (1) Auguste Sabatier, critique littéraire, d'après sa cor-
s respondance au Journal de Genève, par Henry Dartigue,
i avec une préface de M- Jean Aicard, de l'Académie
française. Paris, Fischbacher.
(2) Un grand nombre de ces « Lettres ont été re-
cueillies en un volume par les soins daM. Frank-
Puaux. Bureaux de lajletme chrétienne, 83. boulevard
Arago.
sonnalité de l'écrivain, s'efforce de saisir, dan»;
son œuvre, ses pensées les plus secrètes et lesp'ktf.
solitaires, et se réjouit s'il découvre un » lxomme ».:
Nul n'a plus souvent répété, sous une forme oup
sous une autre, le mot de Pascal à propos de Mo*
taigne. Une oeuvre était belle à ses yeux quand elï|
révélait une âme sincère ou candide, tout entière bi±:
chacune de ses pensées, quelles que fussent cas
pensées, toujours présente derrière le mot, et le ju-;
geant. La qualité qu'il estimait le plus dans un;
livre, c'était la sincérité, « qui n'est autre chose que
le nom moral de la vérité ».
Il semble donc que ce soit dans la conscience
même de l'écrivain qu'il pose et résout la question
toujours si controversée de la moralité des œuvres,
d'art. On affirme couramment qu'est dangereuse
toute œuvre qui affaiblit la volonté ou excite une
passion malsaine. Sabatier répondait qu'à ce point
de vue « la question ne comporte aucune réponse,
puisqu'un livre réputé mauvais peut avoir de bon-
nes conséquences pour tel lecteur et qu'un autre
livre réputé bon en aura de mauvaises pour tel au-
tre. Il s'agit de savoir à quel motif l'auteur obéit
dans le choix de son sujet et dans la manière dont
il le traite. S'il est un homme vraiment moral, il ne
fera pas un mauvais livre, même en parlant de cho-
ses hideuses; s'il n'est pas moral intérieurement e%
devant Dieu, il ne fera pas un bon livre, môme en
prêchant la vertu et le renoncement ».
La thèse ne manque pas de vraisemblance, mate
la preuve est difiicîle à faire.
Nous ne pouvons songer, dans cette courte notiee,
à caractériser plus longuement les jugements litté-i
raires de l'auteur de l'Esquisse d'une philosophie de'
la religion. Rappelons seulement que la littérature
n'étant nullement pour lui un surplus, ou un « reste »,
mais embrassant les manifestations multiples de la
vie, il n'est pas de sujet on histoire, en philosophie,
en politique, en religion, aussi bien que -dans la
poésie et le roman, que sa critique littéraire n'ait
souligné d'un trait précis ou n'ait enveloppé d'une
pénétrante lumière. De tous les critiques, ses de«
vanciers, il préférait Edmond Scherer; peut-être
est-ce à lui qu'il ressemblait le plus, par ses fortes
études classiques et théologiques, par l'absolue
liberté et l'universalité de son esprit; mais il était
un Scherer moins intransigeant.
Toutes ses « Lettres du Dimanche », qui ne repré-
sentaient pourtant, comme il le disait lui-même,
que l' « écume de son travail », devraient être re-
cueillies. Il existe des «lundis» illustres et des
« samedis du plus grand mérite. Les « dimanches »
de Sabatier ne le céderaient pas en intérêt aux autres
jours de la semaine. Us révéleraient un aspect in-
suffisamment .connu de notre esprit français, je
veux dire la compréhension de toutes les formes et
de toutes les idées, jointe au respect religieux d»
la conscience et de la vie. J.-Emile Roberty.
(
SFOTLT
AÉRONAUTIQUE
LE MEETING D'AVIATION DE LA BAIE DE SEINE'
(De notre correspondant)
Le Havre, 28 août.
La journée d'hier, qui au point de vue sportif fut
des plus intéressantes, a failli se changer vers le
soir en une journée de deuil. Un des concurrents
les plus sympathiques, le jeune aviateur Lega-
gneux, a fait en effet vers la fin de l'après-midi,
une chute terrible et dans des conditions telles que
beaucoup la crurent mortelle.
Il volait à une hauteur d'environ 15 mètres, quand
un cri s'éleva dans la foule Legagneux arrivait
droit sur un pylône, dont il n'était plus qu'à quel-*
ques mètres. Deux ou trois secondes passèrent, puis
ce fut le choc. Tandis que l'aile gauche du biplan
s'écrasait contre l'obstacle, l'appareil fit un panaché
complet et s'abattit sur le sol.
Ce fut aussitôt la ruée du public vers le lieu dç
l'accident, tandis que les commissaires du pylôna-
fatal s'empressaient déjà auprès de l'aviateur.
Sous les débris de son biplan, Legagneux gisait
inanimé au front, au-dessus de l'œil 'droit, il portait
une profonde blessure; son visage ruisselait da
sang. La chute avait été si brutale, l'aviateur pa-
paissait si touché qu'on crut qu'il avait été tué sur
le coup. Fort heureusement, il n'en était rien et
quelques minutes après son effroyable chute, Lega-
gneux reprenait connaissance. Peu après, à l'ambu-
lance de la Croix-Rouge, où il reçut des soins em-
pressés, le jeune aviateur retrouvait l'usage de la
parole.
Il eh profita pour expliquer les conditions dans
lesquelles s'était produit son accident
« Au moment où j'allais commencer mon virage,
» dit-il, je sentis ma commande de gouvernail ma
» lâcher. Il n'y avait rien à faire et je me rendis
» parfaitement compte que j'allais me briser contre
̃ le pylône. Ce fut 'bref. Je ressentis un choc vio-
» lent, puis un coup terrible sur la tête et je m'éva-
» nouis. En revenant à moi, tout à l'heure, je ne
» savais même plus que j'étais au Havre. »
Les dernières nouvelles sont rassurantes et: on
pense que le blessé sera sur pied dans une quinzaine
de jours.
Il eût été regrettable qu'une aussi belle journée
fût gâtée par un accident grave. Les vols furent en
effet nombreux et intéressants. Au cours de la ma-
tinée se disputèrent les éliminatoires du Grand-Prix
sur 20 kilomètres. Le vent soufflait à ce moment à;
20 et 40 kilomètres à l'heure, ce qui nous permit,
d'assister à des vols impressionnants des meilleurs;
aviateurs. Morane, Aubrun, Leblanc, Latham et
Kuller ont magnifiquement défendu leurs chances.
Morane fut le plus vite. Deux furent malheureux,.
Busson et Audemars. Busson cassa une roue. Aude-
mars fit une chute sans gravité.
L'après-midi fut aussi très occupé. Latham, La-
dougne, Kuller, Thomas, Morane, Barrier, Simon,
Picard, Wiencziers, de Feure, Darioli, Aubrun, Pff-
trowsky, Marcel Hanriot, Martin Bouvier, Barra,
Martinet, Molon, Chassagne s'élevèrent tour à tour,
totalisant des kilomètres ou effectuant des essais en
hauteur.
La fin de la réunion fut superbe; il y eut en piste
par instants dix appareils à la fois. Le vol le plus
long fut accomnli par Legagneux, qui a couvert
188 kilomètres les plus beaux par Morane, Aubrun,
et Latham, qui montèrent très haut, le premier S
1,130 mètres.
Les résultats officiels de la journée sont les sui-?
vants
Grand-prix de la hauteur. ler Morane (monoplan)
1,130 mètres 2° Hanriot (monoplan), 382 mètres.
Prix du Premier départ. -Hanriot (monoplan).
Prix de la Vitesse (10 kilomètres). Aubrun (mono-
plan), 7' 28" 3/5.
Totalisation des distances. 1" Legagqeux (biplan),
188 kilomètres 2e Latham (monoplan), 132 kilomètres.
Prix de la Plus grande distance en un vol. Latham
(monoplan), 112 kilomètres.
Totalisation des. vols de la journée. Legagneux
(biplan), 188 kilomètres; Latham (monoplan),. 132 kil.;
Simon (monoplan), 118 kil. Barra (biplan), 58 kil.; Au-
brun (monoplan), 56 kil. etc.
Totalisation générale. Simon (monoplan) 3o6 kilo-
mètres, Legagneux (biplan), 274 kil.; Mamet (mono-
plan), 240 kil. Barra (biplan), 190 kil. Latham (rnonaj?
plan), 154 kil. etc.
CHUTE MORTELLE D'UN AVIATEUR HOLLANDAIS
Un aviateur hollandais, M. de Maasdyck, a fait
hier à Arnhem (Hollande) une chute mortelle au cours,
d'une exhibition qu'il eflectuait sur le terrain d'avia-
tion de cette ville.
Le malheureux aviateur évoluait à une altitude de
400 mètres environ, quand brusquement son biplan
piqua de l'avant et vint s'écraser sur le sol.
Lorsqu'on eut dégagé l'infortuné pilote des dé-
bris sous lesquels il gisait, il avait cessé de vivre,
tué net, la fracassée par le moteur. L'essence
contenue dans le réservoir de l'appareil s'était ré-'
Dandue sur lui.
Bien qu'il ait été impossible d'établir les causes
de l'accident, on pense généralement qu'il est dû 8L
une panne subite du moteur.
LA DEUXIÈME EXPOSITION INTERNATIONALE
DE LOCOMOTION AÉRIENNE
Ainsi que nous l'annoncions ces jours derniers, la
création de sections scientifiques et artistiques à 1 expo-
sition internationale de locomotion aérienne, a permis la
concours à cette manifestation-dé tous ceux qui mtéres;
sent dans une branche quelconque au progrès de lidéa
aéronautique et de la locomotion aérienne.
C'est ainsi que nous apprenons que le comité de la
section rétrospective vient d'être composé comme suit
M. Jules Armengaud jeune, ingénieur conseil, ancieri
élève de Polytechnique.
M. Paul Renard, commandant du génie.
M. Albert Becq, ancien élève de Polytechnique, in-
génieur conseil, directeur de la Lumière électrique.
Cette exposition de la section rétrospective occupera
quelques-unes des salles du premier étage du Grand
l'11a19.
On y verra également dans une autre classe les ob-
jets dart, les peintures, sculptures et gravures se ratj
tachant à l'aviation et à l'aérostation. Cette classe est,
présidée par M. Paul Tissandier.
AU-DESSUS DE PARIS EN AÉROPLANE
L'aviateur Bielovucie a effectué hier un vol au-des*
sus de Paris.
Partant du terrain de manœuvres d'Issyles-Mouîi-
neaux à 6 h. 20 du soir, il s'élevait rapidement et pi-
quait droit sur la tour Eiffel qu'il doublait à 6 h. t8 m,
32 s. Il passait à environ 150 mètres au-dessus du dra-
peau qui flotte sur la tour et regagnait le terrain d'Issy
où il atterrissait à 6 h. 35.
Son altitude moyenne a été de 450 à 500 mètres.
UNE COURSE D'AÉROPLANES DE FRANCE EN ANGLETERRE
On annonce que M. Perron, maire de Boulogne-sur-
Mer, vient d'engager des pourparlers avec la munici-
palité de Folkestone, dans le but d'organiser une grande
course d'aéroplanes. ̃ •
Cette épreuve, qui sera parait-il dotée de prix impor-
tants se disputera de Boulogne à Folkestone. Les pi-
lotes devront enlever à leur bord un passager.
Les conditions définitives du règlement seront trô.S;.
prochainement établies, et aussitôt rendus publi-,
que». r
.~rWa. e~mlr~am9,W^·i~®
VCEILLET du ROY w.&S.V1i£££L.r«.:i ï
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