Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-06-30
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 30 juin 1890 30 juin 1890
Description : 1890/06/30 (Numéro 10646). 1890/06/30 (Numéro 10646).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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LUNDI 30 JUIN 1890
TRENTIÈME ANNEE. N° 10546.
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Un numéro (départements) 3O centimes^
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(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
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UNION POSTALE. lSfr.; i 36 fr.; 72 fr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1« ET 16 DE CHAQUE MOIS
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J Le TEMPS accepte des abonnements au
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moyennant 0,20 c. par numéro à expédier
en France ou à l'étranger.
:.5raa- {• ̃- '̃ •̃ v&éwS®H**î* m^ 5r-<- • ̃
PARIS, 29 JUIN Jf
BULLETIN DU JOUR
Après sept mois de délibérations, souvent
interrompues ou embarrassées par de gros-
ses difficultés, la conférence de Bruxelles
vient d'arrêter les derniers articles de son
acte général.
« Mettre un terme aux crimes et aux dévas-
tations qu'engendre la traite des esclaves
africains, protéger efficacement les popula-
tions aborigènes de l'Afrique et assurer à ce
vaste continent les bienfaits de la paix et de
la civilisation », tel était, aux termes mêmes
du préambule de l'acte général, le program-
me moral de la conférence.
Le préciser en un projet, concilier les in-
térêts parfois divergents des puissances, res-
pecter leurs indépendances et leurs tradi-
tions tout en trouvant des mesures quelque
îpeu efficaces, telle était la tâche assurément
délicate de cette conférence dans laquelle
piégeaient, à côté des envoyés des Etats eu-
ropéens et chrétiens, les représentants de
l'empereur des Ottomans, du chah de Perse
st du sultan de Zanzibar. Ce rapprochement
seul disait assez l'un des obstacles, et non le
moindre, à une entente efficace et sans ar-
rière-pensée.
Entre la croix et le croissant, entre l'Euro-
péen chrétien ou philanthrope et le maho-
métan pour lequel l'esclavage tient à l'orga-
nisation domestique et trouve dans les pré-
cep tes religieux sa légitimation, une entente
était-elle possible ? Elle existe sur le papier.
« Les puissances contractantes dont les insti-
tutions comportent l'esclavage domestique.
s'engagent à prohiber l'importation des es-
claves. La surveillance la plus sévère possible
sera organisée par elles. Tout esclave JTigi-
{ tif arrivant à la frontière d'une de ces puis-
sances sera réputé libre et aura le droit de
réclamer des autorités compétentes des let-
tres d'affranchissement. Toute vente d'es-
clave sera considérée comme nulle et non
avenue, etc. » Bref, on est d'accord sur tous
les principes. Quant au sultan de Zanzibar
̃particulièrement, il dépendra surtout de
a Angleterre que les dispositions auxquelles
jl souscrit ne restent pas lettre morte.
V Carathéodori-Effendi, ministre de Turquie
à Bruxelles et premier plénipotentiaire à la
ponférence, en a, de son côté, référé au sul-
tan. La réponse préliminaire de Constanti-
nople est favorable, mais réservée. L'Alle-
,'inagne et l'Angleterre se sont chargées d'ex-
pliquer à Abdul-Hamid II que les articles
concernant les pays où l'esclavage domesti-
que est en vigueur n'empiètent ni sur ses
/prérogatives ni sur les traditions et les
mœurs de l'islam. Ces deux puissances se
.flattent d'amener le sultan à leur point de
vue. Donc tout est en bonne voie..
¥ D'autres difficultés non moins sérieuses
que ces divergences de vues entre Européens
.et musulmans ont été tournées. C'étaient, en
^première ligne, les scrupules de l'Angle-
kerre manufacturière et commerçante, des ex-
portateurs allemands et hollandais, contre
.^l'importation des armes à feu et de l'eau-de-
ivie. Il y a, on le sait, dans le civilisateur
;anglais et allemand, deux hommes qui se
givrent un rude combat, l'évangéliste et le
;négociant. L'évangéliste est tempérant et
|humain. Il rêve la conquête des cœurs et
des esprits, une bible à la main; il abhorre
|les poisons et les armes d'enfer. Pour le
inégociant, les affaires sont les affaires, et si
liés nègres ont du goût pour l'eau-de-vie qui
les rend fous et les fusils avec lesquels ils
/se tuent les uns les autres, cela les regarde.
•lia fallu appointer ces différends intimes,
concilier les principes avec les intérêts.
L'acte général y est arrivé par une série
de dispositions ingénieuses interdiction de
l'importation des armes à feu, surtout à ca-
nons rayés et à Isystèmes perfectionnés, éta-
blissement d'entrepôts d'armes plus inof-
fensives, tels que fusils à pierre, qui seront
déli vrées seulement par lesfonctionnaires des
divers Etats possesseurs ou protecteurs, les
régions où sévit la traite étant toujours ex-
clues prohibitions analogues des spiri-
itueux dans les pays où ils n'ont pas encore
^pénétré; ailleurs, établissement d'un droit
•(d'importation qui pourra être élevé dans trois
FEUILLETON DU f&tVMpB
r>`-- DU S0 JUIN 1890 ,̃' ̃*
CHRONIQUE THÉÂTRALE
̃ à
l'Hippodrome, Jeanne d'Arc, légende mimée en trois
tableaux, musique de M. Widor. La Jeanne d'Arc
de M. Joseph Fabre et le Capitaine Fracasse de M.
Emile Bergerat. Au Théâtre-Mixte, le Florentin,
comédie en un acte et en vers de La Fontaine et
Champmeslé; Pierrot et la lune, comédie lyrique en
un acte, de M. Marc Legrand, musique de M. Si-
lnonet.
La plupart des théâtres ferment à cette date
fatale du 30 juin. Quelques-uns cependant
annoncent l'intention de rester ouverts tout
l'été, comme l'Opéra et la Comédie-Française.
JJe leur sais bon gré de tenter cette expérience.
Qe suis convaincu qu'on finira par s'apercevoir
qu'en juillet et en août il n'y a rien de plus
frais, pour des gens que leur métier retient à
Paris, qu'une salle de théâtre où les rayons du
soleil n'ont pas pénétré de la journée. C'est une
Bave, qui ne s'échauffait autrefois le soir, que
parce qu'on y allumait du gaz. Avec la lu-
:mière électrique, qui éclaire sans dégager de
•chaleur, les théâtres ont la fraîcheur d'un ap-
partement dont les persiennes ont été closes
toute la journée.
Il faudra seulement que les directeurs inaugu-
rent un mobilier d'été. Pourquoi s'obstinent-ils
à ce velours qui est si échauffant? Est-il donc
impossible d'avoir des sièges cannés? Je ne
sais-, mais il me semble que, même en hiver,
̃ils seraient plus propres et plus commodes.
'Pour l'été au moins, la réforme est indispen-
sable. Si les directeurs veulent lutter contre le
^préjugé et attirer chez eux un publie d'été, il
faut qu'ils lui donnent toutes ses aises.
C'est un fait qu'on ne saurait nier: si les Pa-
risiens fuient leur ville dans les mois chauds,
c'est précisément en juillet, août et septembre
que les provinciaux et les étrangers viennent
faire un tour à .Paris. Ils sont enchantés de
ans, si l'expérience a prouvé qu'il est insuf-
fisant. U
Les objections élevées par la France con-
tre le droit de visite des navires soupçonnés
d'abuser des pavillons européens pour trans-
porter des esclaves d'Afrique en Asie, n'é-
taient pas du tout, comme on l'a insinué peu
justement, une opposition de pur amour-
propre. Notre diplomatie avait, sur ce point,
des traditions à sauvegarder. Dès qu'une
proposition acceptable a été faite, on a trou-
vé dans les représentants français toute pré-
venance pour la faire aboutir.
Le droit de visite sera limité aux navires
d'un tonnage inférieur à 500 tonneaux et
dans une zone dont la délimitation prévient
tout essai abusif de visite des navires dans
les eaux d'Europe. De plus la visite se ré-
duira essentiellement à la vérification des
papiers de bord. En cas d'irrégularité ou de
doute, le navire suspect sera déféré aux au-
torités consulaires de la puissance dont il
porte le pavillon, et qui sera juge de la
loyauté de la cargaison. Des dispositions
très détaillées arrêtent les conditions à rem-
plir par les navires indigènes d'Afrique pour
avoir le droit de porter pavillon européen et
empêchent autant que possible les embar-
quements d'esclaves sous couleur d'enrôle-
ment librement consenti.
D'autres chapitres donnent les moyens de
poursuivre également la traite sur les routes
de terre, de la saisir à ses points d'aboutis-
sement, de la prévenir à ses lieux d'origine.
Surveillance des caravanes en marche et à
l'arrivée, sérieuse organisation administra-
tive dans les pays occupés parles puissances
européennes, stations fortement occupées,
s'appuyant les unes sur les autres, reliées
entre elles par des routes commodes et sur-
tout par le télégraphe, le chemin de fer et les
bateaux à vapeur, tels sont les principaux
moyens adoptés et recommandés par la con-
férence.
Ce programme peut être efficace, encore
que les mailles de ce filet de surveillance
soient bien larges, m-"me au lendemain du
partage africain qui met côte à côte trois
puissances civilisées l'Angleterre, l'Alle-
magne et l'Etat du Congo. Ce programme
est surtout un programme d'avenir. Actuel-
lement il ne peut empêcher ni la contrebande
d'hommes et de munitions, ni, hélas! les
mœurs africaines qui font du vaincu, dans
les luttes quotidiennes entre tribus, la chose
du vainqueur.
On peut espérer qu'avec du temps, de la
persévérance, de l'argent et point de jalousie
internationale, le fléau de la traite sera cir-
conscrit d'abord, puis diminué; nous ne di-
sons pas supprimé. Quant à la conférence de
Bruxelles elle a montré tout ce qu'elle pou-
vait beaucoup d'habileté théorique et de
bonne volonté sincère.
»
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTIcr'UERS DU Temps
'̃̃̃ Sofia, 29 juin, 8 h. 15.
Avant de quitter Sofia le prince Ferdinand, cédant
aux instances de M. Stamboulof et se prononçant
sur la demande en grâce présentée par le conseil de
guerre, a ratifié la sentence de mort de Panitza. Le
premier usage que M. Stamboulof a fait des pouvoirs
extraordinaires dont il a été investi par suite du dé-
part du prince a été d'ordonner l'exécution de Pa-
nitza.
Celui-ci a été averti avant-hier qu'il devait se pré-
parer à la mort et qu'il devait prendre ses dernières
dispositions. Panitza a écouté avec beaucoup de
sang-froid cette communication qui lui a été faite
par un de ses juges. Il a écrit plusieurs lettres et a
eu une courte entrevue avec quelques membres de
sa famille.
L'exécution a eu lieu le samedi matin vers sept
heures, sur une place aux environs de Sofia. Pa-
nitza y a été conduit dans un fiacre fermé, sous la
garde d'un gendarme. Il a fumé pendant tout le
trajet. Cinq régiments étaient sous les armes dans
la plaine de l'exécution. Ils étaient commandés par
le colonel Moutkourof. Un détachement de 21 hom-
mes formait le peloton d'exécution.
Panitza, qui s'est conduit très courageusement, a
écouté pendant quelques instants les exhortations
d'un pope, puis, sur le signal de l'officier, le pelo-
ton a fait feu. Panitza est tombé percé de balles en
criant « Vive la Bulgarie » La mort a été instan-
tanée.
C'est dans la soirée seulement que le télégraphe
bulgare a accepté et expédié les dépêches relatant
l'exécution.
Berlin, 29 juin, 8 h. 35.
Le Reichstag a voté en troisième lecture les cré-
dits militaires. Il a ensuite discuté le crédit pour
l'augmentation des traitements des fonctionnaires.
Malgré l'intervention de M. de Maltzahn, secré-
taire d'Etat à l'office du Trésor, et celle du ministre
de la guerre, le Reichstag a repoussé l'augmenta-
tion des traitements des officiers, ainsi que sa com-
mission le lui avait proposé, et n'a adopté que l'aug-
trouver quelques salles de spectacle ouvertes.
11 va sans dire qu'il sera bon de leur offrir des
spectacles appropriés à la capacité d'attention
dont on dispose en cette saison de détente uni-
verselle; mais ils peuvent être sûrs de faire de
l'argent avec une bonne afriche. Toutes les fois
qu'il y a eu, dans un théâtre, une pièce amu-
sante, le public y a couru, même en été. Rap-
pelez-vous l'aventure du Procès Vauradieux
qui emplit la salle du Vaudeville durant les
trois mois où le théâtre était fermé d'ordinaire
et dont le succès se prolongea très avant dans
'la saison d'hiver.
Quant tt nous, comme tous les ans, nous res-
terons a notre poste, aidant de la publicité du
journal tout directeur qui tiendra ses portes
ouvertes et hasardera du nouveau. Nous comp-
tons que la Comédie-Française ne nous lais-
sera pas chômer de reprises importantes, et
nous lui saurions gré d'y joindre quelques nou-
veautés. Qu'on réserve la saison bénie de
l'hiver aux Dumas, aux Sardou, aux Pailleron
et aux Meilhac, rien de mieux. Ces messieurs
peuvent dicter leurs conditions. Mais bien des
jeunes gens ne demanderaient pas mieux que
de faire leurs premières armes en juillet ou en
août.
En attendant, c'est dans un théâtre d'été, à
l'Hippodrome, que nous allons chercher la
nouveauté de la semaine. L'Hippodrome nous
a donné une légende mimée, la légende de
Jeanne d'Arc. Décidément Jeanne d'Arc est à
la mode. De tous côtés, des évoques quêtent
pour lui élever des monuments commémora-
tifs on poursuit en ce moment à Rome le
procès de sa béatification. Elle n'est encore
que bienheureuse à ce qu'il paraît; il reste
quelques années à attendre et quelques for-
malités à remplir pour qu'elle soit déclarée
sainte. Hier on inaugurait à Nancy la statue
de M. Frémiet, dont M. Osiris a fait ca-
deau à cette ville; voici qu'aujourd'hui
même nous apprenons que M. Larroumet, l'in-
telligent et actif directeur des beaux-arts, s'est
rendu àDomremy, pour yétablir, danslamaison
même de Jeanne d'Arc, qui sera restaurée aux
frais de l'administration, un musée où seront
réunis les principales œuvres de peinture ou de
sculpture consacrées par l'art français à la Pu-
celle. Orléans célèbre tous les ans, avec une
grande solennité, une fête dont Mgr Dupan-
loup avait pris l'initiative et dont il a laissé la
tradition à ses successeurs. Brochures et livres
pleuvent en ce moment, où des exégèses pas-
sionnés s'attachent au moindre détail de sa
vie et Rappliquent à çonfiemyer la légende.
mentation de traitement pour les fonctionnaires
civils.
Berlin, 29 juin, 8 h. 40.
Le général de Verdy du Vernois déclare à tout le
monde qu'il n'a jamais eu l'intention de donner sa
démission. Cependant la Gazette de l'Allenaagne du
Nord affirme, elle aussi, que le ministre de la guerre
va se retirer.
On dit bien que l'empereur a envoyé de Kiel des
félicitations au ministre, à propos du discours qu'il
a prononcé au Reichstag; mais en même temps on
prétend que le conflit entre le chef du grand état-
major, le général de Waldersee, et le ministre de la
guerre, est tel que l'un des deux doit se retirer.
Or le général de Waldersee est tout-puissant au-
près de l'empereur, et si quelqu'un doit céder, c'est
le général de Verdy du Vernois. C'est à propos des
révélations intempestives faites par le ministre de
la guerre dans la commission du Reichstag qu'au-
rait éclaté le conflit.
Berlin, 29 juin, 10 h.
Hier a eu lieu un banquet au Kaiserhof en l'hon-
neur du major deWissmann.200 députés et fonction-
naires y assistaient. M. de Wismann est entré don-
nant le bras à M. Windthorst. Le ministre de Bœtti-
cher a porté un toast à l'empereur. M. de Wissmann
a répondu et M.:Windthorst a bu à la santé de Mme
Wissmann mère.
Budapest, 29 juin, 9 h. 15.
La Délégation hongroise a clos, à son tour, sa
session. C'est M. de Kallay, ministre des finances
de l'empire, qui a adressé des remerciements et des
éloges aux délégués, au nom de l'empereur et au
nom du gouvernement.
M. Louis Tisza a prononcé un discours de
clôture dans lequel il a déclaré que la délégation
considérait l'existence de la triple alliance comme la
principale garantie du maintien de la paix. Il a
ajouté que la délégation a compris, en votant le
budget de l'armée, que la paix la plus coûteuse exi-
geait moins de sacrifices que la guerre la moins
chère.
M. Tisza a terminé en disant que tous les Hon-
grois étaient constamment prêts à se sacrifier pour
maintenir l'inviolabilité et le prestige du trône.
La session de la Délégation a ensuite été close au
milieu, de vivats enthousiastes.
(Service liavas)
Berne, 29 juin.
M. Frey, directeur international des télégraphes,
est mort ce matin des suites d'un catarrhe intestinal,
près de Bienne, où il se trouvait en congé de con-
valescence.
DERNIÈRE HEURE
Aujourd'hui, a eu lieu, au Trocadéro, la distribu-
tion des prix aux élèves de l'Association philotech-
nique de Paris pour l'instruction gratuite des adul-
tes. La séance était présidée par M. Bourgeois, mi-
nistre de l'instructisn publique, de retour de la vi-
site faite par lui à l'école de Cluny.
Deux allocutions sont prononcées par M. Jacques,
député de Paris et président de l'Association, puis,
par M. Bourgeois. p
Comparant l'Association philotechnique aux autres
sociétés d'enseignement populaire, le ministre féli-
cite le comité directeur de la large part qu'il donne
dans l'enseignement aux femmesetauxjeunes filles.
Puis, abordant la question des cours professionnels
et techniques, M. Bourgeois s'expr me ainsi
L'œuvre de l'enseignement public sera prochai-
nement terminée. L enseignement technique doit
être organisé par l'Etat, et dans des conditions pra-
tiques. Il ne faut pas songer à faire dans toute la
France un enseignement technique, professionnel,
uniforme qui s'applique à tous et par suite à per-
sonne.
Il faut le varier suivant chaque région, chaque
ville, pour que, de chaque école, puissent sortir des
hommes en état de largement gagner leur vie.
La théorie et la pratique ne sont pas des frères
ennemis; il faut à côté des praticiens placer des
professeurs théoriques qui féconderont, vivifieront
l'enseignement de leurs collègues.
Le pays a besoin que cette œuvre soit faite. Le
rapport de M. Siegfried, sur le budget du com-
merce, montre que le développement commercial et
industriel de la France depuis cinquante ans est
moins rapide que chez les peuples voisins.
C'est que l'enseignement technique est développé
en Allemagne et en Angleterre. Aussi est-il néces-
saire de le créer en France, et dans le délai le plus
court possible, si nous ne voulons pas nous laisser
distancer.
Ces choses, je me félicite de les dire au nom du
gouvernement de la République. Bientôt nous fe-
rons ce que fait l'Association philotechnique, mais
plus grandement, plus largement avec les ressour-
ces de l'Etat, du département et de la commune.
Diverses récompenses sont ensuite accordées à un
certain nombre de professeurs de l'Association. Sont
nommés officiers de l'instruction publique MM.
Daux, Ferrand, With. Officiers d'Académie MM.
Parent, Ménard, Peuvrez, Fontaine, Mlle Sauger,
Lacroix et Longueville.
On procède ensuite à la distribution des prix aux
élèves des cours. Le grand prix de l'Association
(prix du ministre), est accordé à M. Alexandre.
Les prix d'honneur offerts au nom du ministre de
l'instruction publique etdupréfet de la Seine, sont ob-
tenus par MM. Rigolet, Perdereau, Roche, Mlles
Gros, Beckpr, Daumont, Gibassier, Maubert, Sal-
vert, Albarède, Collinet, Brègre, Chevènement.
La distribution des récompenses aux élèves des
cours professionnels du syndicat général des chauf-
feurs et mécaniciens de France et d'Algérie a eu
lieu cette après-midi, à deux heures, à la mairie du
11e arrondissement, sous la présidence de M. Flo-
quet, assisté du lieutenant-colonel Chamoin, repré-
sentant le président de la République.
M. Floquet a félicité le syndicat de son attache-
ment à la République et a remis, au nom du mi-
nistre, les palmes d'officier de l'instruction publique
à M. Le Barazer, adjoint au maire du 4e arrondisse-
N'y en a-t-il pas un, en ces derniers temps,
M. Marin, qui a soutenu cette thèse pa-
radoxale que Jeanne a été un grand capi-
taine, toute pleine d'illuminations de génie
dans l'art de la guerre, et qu'on peut hardi-
ment la mettre à côté d'Annibal. de César et
de Napoléon Qui ne se souvient des beaux et
solides travaux de M. Joseph Fabre, un des
plus fervents amoureux de la gloire de Jeanne?
C'est lui qui a proposé, il y a quelques an-
nées, à la Chambre, dont il faisait partie,
de faire de l'anniversaire de naissance de
Jeanne, qui tombe en mai, la fête de la patrie,
fête qui pourrait être à la fois religieuse et na-
tionale, le clergé s'étant rallié à l'admiration
de celle qu'il avait brûlée autrefois. Il s'en
est fallu de bien peu que la proposition n'a-
boutît et ne fût votée. Vous pouvez être sûrs
qu'elle sera reprise et réunira un jour toutes les
voix. Il est incroyable comme un ces vingt
dernières années a monté la sympathie, l'en-
thousiasme, tranchons le mot, la dévotion du
peuple français pour la Pucelle. C'est aujour-
d'hui une espèce de culte.
Les désastres de 1870 sont-ils pour quelque
chose dans ce mouvement des esprits? Avons-
nous eu cette vague et obscure sensation que
ce qui nous avait manqué dans cette affreuse
guerre, c'est une grande figure, ranimant les
courages, les groupant autour d'elle, les lan-
çant il la victoire? Nos imaginations se sont-
elles émues et nos cœurs attendris à cette
idée, qui ne s'est pas nettement formulée,
mais qui n'en a été que plus puissante pour
être restée éparse, que Jeanne- une héroïque
et chaste jeune fille a été pour la France du
quatorzième siècle cette incarnation de la pa-
trie, cet ange du salut que nous aurions sou-
haité dans nos revers? Je ne m'explique pas
très bien ce renouveau de tendresse et d'admi-
ration pour Jeanne; mais le fait est constant,
indéniable. Sainte Geneviève n'est pas encore
déchue officiellement de son titre de patronne
d3 Paris, de protectrice de la France. Elle
baisse, cela est certain, dans l'opinion pu-
blique. Jeanne monte elle a jadis soule-
vé le peuple ei l'a, malgré les clercs et les
politiques, entraîne sur ses pas la conquête
du royaume. C'est le peuple aujourd'hui qui,
d'un irrésistible élan, la pousse, en dépit des
premieres répugnances du clergé français et
italien, à la sainteté et à la gloire.
Pour mesurer le chemin parcouru, il suffit
d'une simple observation. Au dix-huitième
siècle, il n'y avait pas une duchesse qui n'eût,
traînant sur son boudoir, le poème de Voltaire
ment, celles d'officier d'académie à M. Jamct, pro-
fesseur, et le Mérite agricole à M. Odde.
A la suite du débat au conseil municipal qui, dans
sa séance d'avant-hier, a vote l'ordre du jour sur r
les pétitions contradictoires, demandant les unes
l'interdiction des courses de taureaux, les autres
l'autorisation de reprendre les exercices des pica-
dores, M. le préfet de police a décidé d'autoriser la'
reprise de ces exercices aux arènes de la rue Porgo-
lèse, aux conditions suivantes 1° les chevaux
seraient caparaçonnés et blindés 2° l'arène ne se-
rait pas divisé-e en deux parties.
'» ̃
Le Journal officiel de ce matin publie, com-
me nous l'annoncions hier, les résultats de
l'enquête de l'inspection des finances sur la
situation du Crédit foncier de France. Le
gouvernement ne s'est pas borné à présenter
un résumé de l'enquête et à formuler les
conclusions qu'elle lui a suggérées il a, de
plus, cru devoir saisir le public des pièces
elles-mêmes sur lesquelles il a établi son ju-
gement c'est, d'une part, le rapport de l'in-
spection, et, de l'autre, la réponse qu'y a op-
posée M. Christophle.
Nous sera-t-il permis de regretter, tout
d'abord, que ces pièces aient été ainsi divul-
guées ? L'inspection des finances reçoit, cha-
que jour, en vertu de ses fonctions, des mis-
sions délicates; si elle réussit à les remplir,
c'est, on peut le dire, grâce à l'absolue sécu-
rité d'esprit, à la pleine indépendance dont
jouissent ses représentants. Mais dans quelle
situation morale se trouveraient-ils, à quelles
hésitations légitimes ne seraient-ils pas en
proie, s'il venait à être admis que leurs rap-
ports ne constituent plus des documents es-
sentiellement con6dentiels ? Si le secret pro-
fessionnel ne devait plus les protéger, s'ils se
sentaient découverts par le gouvernement, il
leur faudrait désormais des âmes de héros
pour ne pas songer à prendre certaines pré-
cautions. Ils ne pensaient qu'à voir la vérité
sur les hommes et sur les choses, et à la
dire. Ne craint-on pas de les amener à avoir
d'autres soucis ?
Il est avec le ciel des accommodements.
Il n'en était pas avec l'inspection des fi-
nances elle planait à des hauteurs qui la
rendaient inaccessible aux préoccupations
vulgaires. Le gouvernement a voulu avant
tout rendre éclatantes son impartialité, sa
confiance dans le sentiment public; par ce
temps de calomnies faciles et de publicité à
outrance, il a tenu à ce qu'on ne pût pas le
soupçonner de rien cacher. Il n'y avait rien
à dissimuler, et le gouvernement a fait mieux
que l'affirmer il le montre. Mais, au risque
d'affronter certaines défiances et même des
injures qui eussent alors été pour lui un hon-
neur, il eût dû, ce nous semble, peser davan-
tage les inconvénients que nous signalons.
Espérons, du moins, que, ces observations
aidant, la publication que nous estimons si
fâcheuse en principe ne pourra pas être in-
voquée comme un précédent.
En fait, elle fournit aux décisions arrêtées
par le gouvernement un appui dont il serait
difficile de contester la force. Qu'on mette
en parallèle les observations de l'inspection
des finances et celles du gouverneur du Cré-
dit foncier, et l'on devra, en toute impartialité,
reconnaître qu'il était impossible de conclure
autrement qu'on ne l'a fait. Le débat le plus
grave porte sur l'interprétation des statuts.
En aucun cas, dit l'inspection des finances,
le Crédit foncier ne doit consentir de prêts
qui excèdent la moitié de la valeur des ga-
ges ou qui ne jouissent pas d'une première
hypothèque or, ces exigences ont été par-
fois mises en oubli. Cette interprétation des
statuts est inexacte, répond M. Christophle
le Crédit foncier a le libre usage de son capi-
tal et de ses réserves aucun gouvernement
ne lui a, jusqu'à ce jour, contesté cette li-
berté les tribunaux l'ont reconnue des ju-
risconsultes éminents la proclament; le re-
proche adressé au Crédit foncier est donc
sans fondement.
Les provisions devraient être fortifiées,
reprennent les inspecteurs; il serait utile
d'augmenter ces réserves or, on les dimi-
nue. Question de pure appréciation, réplique
M. Christophle. Ces provisions sont même
tout à fait facultatives. Vos frais de publicité
ne sont pas en rapport, disent les inspec-
teurs, avec les résultats obtenus; en outre,
ces frais grèvent, en partie, le compte des
emprunts clos, au lieu d'être imputés exclu-
sivement sur le compte de profits et pertes.
Notre écriture est la seule exacte, riposte
M. Christophle, c'est là seule conforme aux
usages; les emprunteurs n'en souffrent nul-
lement quant à savoir si ces frais nous pro-
fitent ou non, c'est une question que nous
sommes mieux à même de juger que per-
sonne. Vous avez fait des reports discuta-
bles, reprend l'inspection. Discutables? Il
et qui n'en fit ses délices. Personne aujour-
d'hui, pas même les plus incorrigibles lettrés,
n'oserait avouer qu'il en a lu un chant et qu'il
y a pris plaisir. J'incline à croire que c'est Mi-
chelet qui, le premier, a retourné les esprits
j'étais tout jeune, tout jeune, quand parut ce
merveilleux chapitre où il conte la légende de
Jeanne. Je me souviens encore de notre émo-
tion. A ce mot jeté dans la narration du sup-
plice de Jeanne :« dix mille hommes pleu-
raient, » nous fondîmes en larmes.
Croyez bien que le succès que vient d'obtenir,
à la Porte-Saint-Martin, la Jeanne d'Arc de M.
Barbier n'est dû qu'en partie à la beauté de la
pièce et à la célébrité de l'actrice qui la jouait.
C'est Jeanne qui, par la toute-puissance de son
nom, devenu sacré, a tiré le public au théâtre.
Les familles s'y sont rendues, comme en pèle-
rinage, pour faire leurs dévotions a la sainte.
Ce qui est plus extraordinaire, c'est que, si
j'en crois des lettres de Londres, le public an-
glais se trouve, vis-à-vis de Jeanne, dans une
disposition d'esprit analogue. Il se fait de l'au-
tre côté du détroit, en faveur de l'héroïne qui
a vaincu Talbot et qui a péri sur un bûcher
anglais, un revirement curieux d'opinion. On
la loue, on l'exalte: il semble qu'on veuille, en
allant écouter la pièce de notre compatriote,
faire pénitence d'un crime national. Jeanne,
qui a jadis battu ceux qu'elle appelait les God-
dems, est en train de les conquérir aujour-
d'hui.
Quand l'Hippodrome annonça qu'il allait don-
ner sa légende mimée de Jeanne d'Arc, il y eut
comme une fureur du public pour se procurer
des places. Jamais le théâtre n'avait vu pareil
empressement. Les journaux avaient conté au
public que Mgr Pagis, l'évêque qui s'en va la
bourse à la main à travers la France, quêtant
pour le monument de Vaucoulcurs, avait as-
sisté à la répétition générale et qu'il en avait
été très édifié. Le soir de la première, je n'y
ai pas vu d'éveque; mais, en revanche, quel-
ques prêtres en soutane, et j'ai même aidé l'un
d'entre eux à trouver le chemin du contrôle.
On a fait grand bruit de la mise en scène dé-
ployée par l'Hippodrome. N'était qu'il s'agît de
Jeanne d'Arc, l'effet général en est médiocre. Il
n'y a guère que le dernier tableau qui soit
vraiment très curieux. Mon collaborateur a
expliqué, le lendemain même ûc \a première,
le iT'io singulier à l'aide duquel on a pu repro- j
duire îUT une piste circulaire et nue la vieille
place de RouCn- Je n'y reviendrai pas tout ce
que je puis dire, £'^st que l'illusion est com- i
plète, et que dix mille SDtCtateurs ont battu des J
n'en est rien, réplique le gouverneur du Cré-
dit foncier; les statuts autorisent expressé-
ment cette nature d'opérations; un incident
fâcheux, l'affaire Bex, a pu survenir, il est
vrai, mais l'inspection elle-même n'a pas
insisté sur ce point il est donc jugé.
Mais le Crédit foncier n'est-il pas, d'une
façon générale, sorti, sinon de la lettre, au
moins de l'esprit de ses statuts? N'a-t-il pas
prêté les mains à la constitution de sociétés
nombreuses ? N'est-il pas intervenu dans
mainte et mainte émission? Et, ce qu'on eût
compris d'un établissement de crédit ordi-
naire, peut-on l'accepter de la part d'une
institution foncière, que la loi a cru devoir
entourer de tant de garanties? Le rapport de
l'inspection insiste vivement sur ces ques-
tions. Mais M. Christophle a beau jeu à rap-
peler que le Crédit foncier était loin de s'at-
tendre à un blàme pour les services qu'il a
rendus de la sorte: n'a-t-il pas toujours, en
eïet, agi, travaillé, au grand jour, et, le
plus souvent même, à l'instigation des
pouvoirs publics ? Dans ces opérations,
en est-il une seule qui ait affaibli le Crédit
foncier, diminué sa clientèle, ralenti ses prêts
hypothécaires? En un mot, la situation de
l'établissement, prise dans son ensemble,
comme il convient dans un examen de cette
importance, n'offre-t-elle pas toute sécurité à
l'épargne? Le Crédit foncier a-t-il, enfin, pé-
riclité ne s'est-il pas, au contraire, merveil-
leusement relevé sous son administration
actuelle? L'inspection ne le conteste pas.
Que subsiste-t-il, dès lors, de ses critiques ?
Voilà, brièvement esquissées, la thèse de
l'inspection et celle du gouverneur du Cré-
dit foncier. Après les avoir entendues l'une
et l'autre, il est manifeste qu'on ne pouvait
aboutir à une autre solution que celle qui l'a
tout naturellement emporté. De l'aveu de
l'inspection, la position du Crédit foncier est
intacte. Comme le fait remarquer à juste ti-
tre le rapport du ministre des finances au
président de la République, « c'est là, on
peut le dire, la constatation essentielle de
l'enquête, soit que l'on se place au point de
vue de l'autorité indispensable à un établisse-
ment de la nature du Crédit foncier, soit que
l'on songe aux épargnes dont il a fait emploi
et qui sont une partie si notable et si intéres-
sante de la fortune nationale ». L'institu-
tion du Crédit foncier sort de l'enquête
fortifiée. L'enquête n'aurait-elle eu que ce
résultat, on devrait s'applaudir de ce qu'elle
a été entreprise. Mais elle aura d'autres con-
séquences.
Le gouvernement a été d'avis, en effet, que,
pour l'avenir, le Crédit foncier aurait avan-
tagea se conformer, surplusieurs points, aux
observations de l'inspection des finances.
Ainsi, en ce qui concerne les prêts hypothé-
caires, le droit de prêter, avec les fonds du
capital-actions ou des réserves, plus de 500/0
de la valeur des gages, ou bien encore sur
deuxième hypothèque, ne devra plus être
invoqué. En second lieu, la question des
provisions devra être étudiée dans son en-
semble par l'administration du Crédit fon-
cier. Il s'ensuivra des modifications qui ne
peuvent, en somme, que profiter au crédit de
rétablissement.
Voilà pour la question de principe; quant
à la question de personne, l'administration
actuelle est couverte, pour le passé, dans
son interprétation des statuts et dans sa ges-
tion effective, par l'approbation formelle ou
tacite des ministres successifs qui ont eu la
charge de les surveiller; pour l'avenir, une
autre interprétation prévaut et doit avoir pour
conséquence une gestion différente. Le gou-
verneur n'a pas autre chose à faire que
de se conformer aux nouvelles indications
de son chef hiérarchique. Le jour où il y
manquerait, le gouvernement serait là pour
l'y ramener, et, si le gouvernement oubliait
ses devoirs, le Parlement a les moyens de
les lui rappeler. Tout est donc finalement
sauvegardé, et il nous semble que, dans ces
conditions, il n'y a plus qu'à passer, comme
on dit, à l'ordre du jour.
On sait avec quelle faveur l'opinion publique a ac-
cueilli l'installation du préfet de la Seine à l'Hôtel
de Ville. Quelques brouillons espéraient sans doute
voir le nouveau conseil municipal, aussitôt réuni,
protester violemment contre l'acte de fermeté du
gouvernement; mais les autonomistes ont eu le
bon sens de comprendre combien ils se feraient
de tort en s'insurgeant inutilement contre la loi,
et les friands de scandale en ont été pour leurs
frais d'excitations. Ils ont cependant essayé de
prendre, hier soir, leur revanche en convoquant à
un grand meeting d'indignation, salle des Mille-
Colonnes, tous les citoyens que l'énergie du cabinet
exaspère et que la demi-sagesse du conseil décon-
certe.
Hélas de ce côté encore, douloureuse déception I
A peine deux ou trois des élus se sont-ils rendus à
mains; tant le décor était il la fois imprévu et
pittoresque. C'est à M. Houck que l'on doit cette
mise en scène amusante. M. Widor a écrit, pour
cette pantomime, une musique qui a sans
doute beaucoup de qualités, mais qui ne m'a
pas paru scénique, ou du moins qui n'a pas
l'air de l'être, étant donné l'immensité du vais-
seau, où s'espace l'action qu'elle doit accom-
pagner et traduire.
La légende mimée s'est terminée par un chant
militaire dont M. Dorchain a écrit les paroles,
qu'on n'a pas entendues malheureusement et
qui valaient de l'être. Les vers sont très colo-
rés je ne cite que le dernier couplet
Un jour-un jour que nous verrons-
L'olivier ceindra notre tête,
Et la lèvre d'or des clairons
N'aura plus que des chants de fête
Mais jusqu'à ce jour espéré,
Dans 'l allégresse ou les alarmes,
On entendra, rythme sacre,
Sonner la cadence des armes.
Je crains bien, quoi qu'en dise le poète, que
nous ne voyions jamais le jour où les clairons
no sonneront plus que pour les fêtes de la
paix. Mais le couplet n'en a pas moins une
fière allure, et le dernier vers eslj d'une sono-
rité admirable.
Verrons-nous un jour la Jeanne d'Ave de M.
Joseph Fabre a la Comédie-Française? Il y
compte bien il a su intéresser à sa cause
nombre d'honnêtes gens qu'a touchés la
sincérité de son ardent enthousiasme pour
l'héroïne. Il a écrit en tête du drame qu'il
vient, de publier en volume cette courte et mé-
lancolique préface
« Ce drame, longtemps choyé, est le couron-
nement de mes travaux sur Jeanne d'Arc. Si
une scène ne la recueille, il sera une voix 'per-
due. Mais il est la voix d'une âme, et il redit
.un nom, qui est le plus grand de la patrie. »
Il est la voix d'une âme 1 C'est le plus juste
éloge que Joseph Fabre pouvait faire de son
drame. Ce drame est une œuvre de foi et d'a-
mour. A quoi cela se reconnaît-il'? Je ne sau-
rais le dire; à tout et à rien. On se sent à me-
sure qu'on lit ce drame peu à peu pénétré de
cette idée que l'homme qui l'a écrit croit pieu-
sement à Jeanne et qu'il l'aime. Il a en lui la
naïveté de ces moines du moyen âge, qui met-
taient en scène ou la Passion ou quelque épi-
sode de la vie de la sainte Vierge. L'ouvrage
tient du mystère.
Aussi les meilleures parties sont-elles préci- ¡
sément celles où Jeanne n'est point mêlée aux I
discussions des politiques ou des hommes d%>>- ̃'
l'appel de la « Fédération des comités républicain!
socialistes » (?) et, quant aux électeurs, on en comp-
tait trois ou quatre cents au plus. En outre, la ma-
jorité de l'assistance ne devait avoir que vague-
ment conscience de l'objet de la réunion elle se
proposait, surtout, paraît-il, de « rigoler » forte-»
ment, la veille, d'un dimanche, en faisant le plus
de tapage possible. La fête; à cet égard, a été des
plus réussies, car la vigueur et l'entrain des gosierst
suppléait à leur nombre. Un orateur a même eu la
candeur de s'en étonner, déclarant qu'il n'aurait pas
cru entendre « des électeurs qui se disent républi-
cains brailler comme des ânes ». Inutile d'ajouter
qu'on l'a expulsé sur-le-champ.
M. Chassaing, député de la Seine, MM. Dubois et
Chauvière, conseillers municipaux, ont prononcé
tour à tour quelques mots sans parvenir à dominer
le tumulte et à « reprendre contact avec leurs élec-
teurs ». M. Chassaing ayant incidemment parlé du
général Boulanger et accusé les opportunistes d'a-
voir fait sa fortune, on s'est mis à crier, de tous les
coins de la salle « C'est vous C'est Clemenceau! »
L'auditoire semblait, d'ailleurs, particulièrement dé-
sireux de marquer son hostilité vis-à-vis des radi-
caux autonomistes c'est à dire des organisa-
teurs mêmes de la réunion. On a traité les
conseillers municipaux de « traîtres », de « ven-
dus », ou tout au moins de « naïfs », et dans
l'ordre du jour final on les a invités à délaisser la
politique pure pour s'occuper davantage des ques-
tions sociales. C'est ainsi que d'utiles leçons vien-
nent parfois de ceux dont on les attendrait le moins.
Ne suffit-il pas, en effet, de remplacer « questions.
sociales » par « questions municipales », pour que
le vœu des braillards de la salle des Mille-Colonnes
réponde très exactement à celui de la population pa-
risienne tout entière?
LE CRÉDIT FONCIER
Le Journal officiel publie ce matin les documents
que nous avons annoncés hier.
Voici d'abord le texte du rapport adressé par le
ministre des finances au président de la Repu-,
blique Paris, le 28 juin 1890.
Monsieur le président,
A la suite des déclarations faites par le gouverne-
ment le 8 mai dernier à la Chambre des députés, j'ai
chargé une commission composée d'inspecteurs dea
finances de procéder à une enquête, non seulement
sur les faits indiqués par la lettre de M. Lévêque,
sous-gouverneur démissionnaire, mars, en outre, et
d'une façon générale, sur la situation du Crédit fon-
cier.
La vérification a été commencée aussitôt. Poursui.
vie avec toute la rapidité compatible avec l'impor-
tance et la multiplicité des opérations sur lesquelles
elle devait porter, elle vient d'aboutir à un rapport
que m'a adressé M. l'inspecteur général Machart,
travail dont j'ai donné communication à l'administra-
tion du Crédit foncier, en l'invitant à me fournir ses
observations.
Bien qu'il s'agisse d'un établissement de crédit au-
quel le contrôle du gouvernement ne saurait enlever
son caractère privé, j'ai pensé, monsieur le président,
que, vu la gravité des intérêts en jeu et les préoccu-
pations éveillées dans l'opinion, il était nécessaire de
mettre immédiatement en pleine lumière les résultats
de l'enquête.
Ces résultats, j'ai l'honneur de vous les exposer icî
et je place sous vos yeux, à la suite du présent rap-
port, les documents eux-mêmes.
Des investigations auxquelles se sont livrés les
inspecteurs des finances il ressort en premier lieu
que la masse des prêts effectués par le Crédit foncier
est bien gagée et que la situation de l'établissement,
considérée dans son ensemble, justifie la confiance
dont il jouit. t.
Certaines évaluations d'immeubles ont bien été ju-
gées excessives d'autres sont signalées comme ayant
été faites sur plans dans des conditions qui permet-
taient difficilement d'apprécier la valeur et le revenu
des propriétés d'autre part, ainsi que le fait remar-
quer M. Christophle dans sa réponse, la crise immo-
bilière n'a pas été sans exercer sur les recouvre-
ments d'annuités une influence dont il est juste de
tenir compte.
Mais, ni cette crise, qui s'atténue d'ailleurs, ni les
irrégularités qui ont pu être relevées dans le service
des prêts, n'ont eu, en fait, pour conséquence, de l'a-
vis des inspecteurs, de compromettre le gage des
obligataires.
C'est là, on peut le dire, la constatation essentielle
de l'enquête, soit que l'on se place au point de vue
de l'autorité indispensable à un établissement de la
nature du Crédit foncier, soit que l'on songe aux
épargnes dont il a fait emploi et qui sont une partie
si notable et si intéressante de :la fortune nationale.
Une divergence d'opinion assez sérieuse s'est élevée
entre l'inspection des finances et l'administration du
Crédit foncier au sujet de l'interprétation d'une dis-
position des statuts
Le conseil d'administration estime qu'il a le droit
de régler comme il l'entend le placement du fonds so-
cial et des réserves; par suite, les règles applicables
aux prêts hypothécaires d'après le titre IV des sta-
tuts cesseraient d'être obligatoires lorsqu'il s'agit, non
de prêts faits avec des ressources provenant des em-
prunts, mais de prêts réalisés au moyen du capital-
actions ou des réserves.
En vertu de cette interprétation, à l'appui de la-
quelle M. le gouverneur Christophle m'a soumis ujie
consultation signée de MM. Barboux et Durier, le
Crédit foncier a consenti, au profit, notamment, d'un
certain nombre de sociétés qui s'occupent d'opéra-
tions concernant la propriété immobilière, des prêts
non conformes aux dispositions du titre IV précité.
L'inspection des finances considère, au contraire,
que les dispositions réglementant les prêts hypothé-
caires s'appliquent à tous ceux qui sont conaentis
par la société, quelle que soit l'origine des fonds.
Après avoir pris connaissance des arguments invo-
qués de part et d'autre, et sans prétendre trancher la
question de droit, je crois devoir me rallier à cette
dernière opinion qui, en même temps qu'elle me pa-
raît mieux fondée, a l'avantage d'augmenter encore
mes. Les deux premiers tableaux où nous est
représentée la jeune bergère, douteuse de sa
mission, interrogeant les voix, prise jour à jour
par la suggestion et s'abandonnant à l'extase;
les deux derniers, où elle est en prison, où elle
se croit un instant abandonnée de ses voix,
mais où, certaine d'avoir fait son devoir, elle
répond à ses juges et à ses bourreaux avec le
mélange si caractéristique de bon sens, de
'vaillante humeur et de mysticisme qu'a si spi-
rituellement fait remarquer Michelet, sont
d un effet puissant à la lecture, et j'imagine
qu'à la scène ils feraient aisément fondre une
salle en larmes.
11 y aurait, je crois, nombre de scènes à éla-
guer ou à retrancher dans le milieu du drame.
L'auteur, à mon sens, a voulu y mettre trop de
choses. Il a essayé de nous donner, sinon des
renseignements exacts, au moins des indica-
tions sommaires sur les passions rivales qui
s'agitaient autour de Jeanne. Ce serait là, en
effet, la matière d'un drame humain: mais
avec le tour qu'ont pris les choses, et c'est M.
Joseph Fabre qui a lui-même fortement contri-
bué à ce résultat, Jeanne ne peut pas plus être
le sujet d'un drame historique que la Passion;
on n'en peut et l'on n'en doit faire qu'une lé-
gende, et tout ce qui ne rentre pas dans le ca-
ractère sacré et mystique de la légende en doit
être retranché.
C'est à cette nécessité qui s'impose que faisait
allusion une des personnes de qui dépend l'ac-
ceptation de Jeanne d'Arc à laComédie-Françaisé,
quand elle me disait: « Voyez-vous! une Jeanne
d'Air en prose, cela n'est pas possible. Jeanne
d'Arc n'a plus le droit de parler la langue de M.
Jourdain. Il faut qu'elle s'exprime en vers, en
vers tels que pourraient les écrire, à défaut d'un
Victor Hugo, les Gabriel Vicaire ou les d'Ha-
raucourt. Le vers peut seul nous transporter
dans ces lointains reculés et mystiques où flotte,
nimbée de son auréole, l'image sacrée de
Jeanne. »
Cela est si vrai, disais-je, que Joseph Fa-
bre, sans peut-être s'en rendre compte, a dans
les interrogatoires du -dernier acte donné à
presque toutes les réponses de Jeanne le nom-
bre et là sonorité de l'alexandrin ?
« J'étais aux mains de Dieu une arme de
combat.
» Je leur disais allons 1 et j'allais la pre-
mière.
» Si nous n'ét">»" vaincus, je serais inno-
cente. è 1
,»;" révère les clercs mais n'obéis au'à
~teu.
LUNDI 30 JUIN 1890
TRENTIÈME ANNEE. N° 10546.
v PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS..7777. Trois mois, 14 fr. Sii mois, 28 fr. Bu an, 56feJ
DEP18 4 ALSACE-LORRAINE lVfr.; 34fr.; 68 hj
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LES ABONNEMENTS DATENT DES 1er ET 1G DE CHAQUE MOIS
Un numéro (départements) 3O centimes^
ANNONCES MM. LAGRANGE, CERF ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
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PAWS..777. Trois mois, 1 4 fr. Six mois, 28 fr. Un an, 56 fr.
»ÉPU & "àLSACE-LORRAIHS lVfr.; 34 fr.; 68 fr.
UNION POSTALE. lSfr.; i 36 fr.; 72 fr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1« ET 16 DE CHAQUE MOIS
Un. numéro (à Paris) 15 centimes.1
Directeur politique Adrien Hébrard
'La rédaction ne répond pas des articles communiqués
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
Adresse télégraphique TEMPS PARIS
J Le TEMPS accepte des abonnements au
numéro, partant de n'importe quelle date,
moyennant 0,20 c. par numéro à expédier
en France ou à l'étranger.
:.5raa- {• ̃- '̃ •̃ v&éwS®H**î* m^ 5r-<- • ̃
PARIS, 29 JUIN Jf
BULLETIN DU JOUR
Après sept mois de délibérations, souvent
interrompues ou embarrassées par de gros-
ses difficultés, la conférence de Bruxelles
vient d'arrêter les derniers articles de son
acte général.
« Mettre un terme aux crimes et aux dévas-
tations qu'engendre la traite des esclaves
africains, protéger efficacement les popula-
tions aborigènes de l'Afrique et assurer à ce
vaste continent les bienfaits de la paix et de
la civilisation », tel était, aux termes mêmes
du préambule de l'acte général, le program-
me moral de la conférence.
Le préciser en un projet, concilier les in-
térêts parfois divergents des puissances, res-
pecter leurs indépendances et leurs tradi-
tions tout en trouvant des mesures quelque
îpeu efficaces, telle était la tâche assurément
délicate de cette conférence dans laquelle
piégeaient, à côté des envoyés des Etats eu-
ropéens et chrétiens, les représentants de
l'empereur des Ottomans, du chah de Perse
st du sultan de Zanzibar. Ce rapprochement
seul disait assez l'un des obstacles, et non le
moindre, à une entente efficace et sans ar-
rière-pensée.
Entre la croix et le croissant, entre l'Euro-
péen chrétien ou philanthrope et le maho-
métan pour lequel l'esclavage tient à l'orga-
nisation domestique et trouve dans les pré-
cep tes religieux sa légitimation, une entente
était-elle possible ? Elle existe sur le papier.
« Les puissances contractantes dont les insti-
tutions comportent l'esclavage domestique.
s'engagent à prohiber l'importation des es-
claves. La surveillance la plus sévère possible
sera organisée par elles. Tout esclave JTigi-
{ tif arrivant à la frontière d'une de ces puis-
sances sera réputé libre et aura le droit de
réclamer des autorités compétentes des let-
tres d'affranchissement. Toute vente d'es-
clave sera considérée comme nulle et non
avenue, etc. » Bref, on est d'accord sur tous
les principes. Quant au sultan de Zanzibar
̃particulièrement, il dépendra surtout de
a Angleterre que les dispositions auxquelles
jl souscrit ne restent pas lettre morte.
V Carathéodori-Effendi, ministre de Turquie
à Bruxelles et premier plénipotentiaire à la
ponférence, en a, de son côté, référé au sul-
tan. La réponse préliminaire de Constanti-
nople est favorable, mais réservée. L'Alle-
,'inagne et l'Angleterre se sont chargées d'ex-
pliquer à Abdul-Hamid II que les articles
concernant les pays où l'esclavage domesti-
que est en vigueur n'empiètent ni sur ses
/prérogatives ni sur les traditions et les
mœurs de l'islam. Ces deux puissances se
.flattent d'amener le sultan à leur point de
vue. Donc tout est en bonne voie..
¥ D'autres difficultés non moins sérieuses
que ces divergences de vues entre Européens
.et musulmans ont été tournées. C'étaient, en
^première ligne, les scrupules de l'Angle-
kerre manufacturière et commerçante, des ex-
portateurs allemands et hollandais, contre
.^l'importation des armes à feu et de l'eau-de-
ivie. Il y a, on le sait, dans le civilisateur
;anglais et allemand, deux hommes qui se
givrent un rude combat, l'évangéliste et le
;négociant. L'évangéliste est tempérant et
|humain. Il rêve la conquête des cœurs et
des esprits, une bible à la main; il abhorre
|les poisons et les armes d'enfer. Pour le
inégociant, les affaires sont les affaires, et si
liés nègres ont du goût pour l'eau-de-vie qui
les rend fous et les fusils avec lesquels ils
/se tuent les uns les autres, cela les regarde.
•lia fallu appointer ces différends intimes,
concilier les principes avec les intérêts.
L'acte général y est arrivé par une série
de dispositions ingénieuses interdiction de
l'importation des armes à feu, surtout à ca-
nons rayés et à Isystèmes perfectionnés, éta-
blissement d'entrepôts d'armes plus inof-
fensives, tels que fusils à pierre, qui seront
déli vrées seulement par lesfonctionnaires des
divers Etats possesseurs ou protecteurs, les
régions où sévit la traite étant toujours ex-
clues prohibitions analogues des spiri-
itueux dans les pays où ils n'ont pas encore
^pénétré; ailleurs, établissement d'un droit
•(d'importation qui pourra être élevé dans trois
FEUILLETON DU f&tVMpB
r>`-- DU S0 JUIN 1890 ,̃' ̃*
CHRONIQUE THÉÂTRALE
̃ à
l'Hippodrome, Jeanne d'Arc, légende mimée en trois
tableaux, musique de M. Widor. La Jeanne d'Arc
de M. Joseph Fabre et le Capitaine Fracasse de M.
Emile Bergerat. Au Théâtre-Mixte, le Florentin,
comédie en un acte et en vers de La Fontaine et
Champmeslé; Pierrot et la lune, comédie lyrique en
un acte, de M. Marc Legrand, musique de M. Si-
lnonet.
La plupart des théâtres ferment à cette date
fatale du 30 juin. Quelques-uns cependant
annoncent l'intention de rester ouverts tout
l'été, comme l'Opéra et la Comédie-Française.
JJe leur sais bon gré de tenter cette expérience.
Qe suis convaincu qu'on finira par s'apercevoir
qu'en juillet et en août il n'y a rien de plus
frais, pour des gens que leur métier retient à
Paris, qu'une salle de théâtre où les rayons du
soleil n'ont pas pénétré de la journée. C'est une
Bave, qui ne s'échauffait autrefois le soir, que
parce qu'on y allumait du gaz. Avec la lu-
:mière électrique, qui éclaire sans dégager de
•chaleur, les théâtres ont la fraîcheur d'un ap-
partement dont les persiennes ont été closes
toute la journée.
Il faudra seulement que les directeurs inaugu-
rent un mobilier d'été. Pourquoi s'obstinent-ils
à ce velours qui est si échauffant? Est-il donc
impossible d'avoir des sièges cannés? Je ne
sais-, mais il me semble que, même en hiver,
̃ils seraient plus propres et plus commodes.
'Pour l'été au moins, la réforme est indispen-
sable. Si les directeurs veulent lutter contre le
^préjugé et attirer chez eux un publie d'été, il
faut qu'ils lui donnent toutes ses aises.
C'est un fait qu'on ne saurait nier: si les Pa-
risiens fuient leur ville dans les mois chauds,
c'est précisément en juillet, août et septembre
que les provinciaux et les étrangers viennent
faire un tour à .Paris. Ils sont enchantés de
ans, si l'expérience a prouvé qu'il est insuf-
fisant. U
Les objections élevées par la France con-
tre le droit de visite des navires soupçonnés
d'abuser des pavillons européens pour trans-
porter des esclaves d'Afrique en Asie, n'é-
taient pas du tout, comme on l'a insinué peu
justement, une opposition de pur amour-
propre. Notre diplomatie avait, sur ce point,
des traditions à sauvegarder. Dès qu'une
proposition acceptable a été faite, on a trou-
vé dans les représentants français toute pré-
venance pour la faire aboutir.
Le droit de visite sera limité aux navires
d'un tonnage inférieur à 500 tonneaux et
dans une zone dont la délimitation prévient
tout essai abusif de visite des navires dans
les eaux d'Europe. De plus la visite se ré-
duira essentiellement à la vérification des
papiers de bord. En cas d'irrégularité ou de
doute, le navire suspect sera déféré aux au-
torités consulaires de la puissance dont il
porte le pavillon, et qui sera juge de la
loyauté de la cargaison. Des dispositions
très détaillées arrêtent les conditions à rem-
plir par les navires indigènes d'Afrique pour
avoir le droit de porter pavillon européen et
empêchent autant que possible les embar-
quements d'esclaves sous couleur d'enrôle-
ment librement consenti.
D'autres chapitres donnent les moyens de
poursuivre également la traite sur les routes
de terre, de la saisir à ses points d'aboutis-
sement, de la prévenir à ses lieux d'origine.
Surveillance des caravanes en marche et à
l'arrivée, sérieuse organisation administra-
tive dans les pays occupés parles puissances
européennes, stations fortement occupées,
s'appuyant les unes sur les autres, reliées
entre elles par des routes commodes et sur-
tout par le télégraphe, le chemin de fer et les
bateaux à vapeur, tels sont les principaux
moyens adoptés et recommandés par la con-
férence.
Ce programme peut être efficace, encore
que les mailles de ce filet de surveillance
soient bien larges, m-"me au lendemain du
partage africain qui met côte à côte trois
puissances civilisées l'Angleterre, l'Alle-
magne et l'Etat du Congo. Ce programme
est surtout un programme d'avenir. Actuel-
lement il ne peut empêcher ni la contrebande
d'hommes et de munitions, ni, hélas! les
mœurs africaines qui font du vaincu, dans
les luttes quotidiennes entre tribus, la chose
du vainqueur.
On peut espérer qu'avec du temps, de la
persévérance, de l'argent et point de jalousie
internationale, le fléau de la traite sera cir-
conscrit d'abord, puis diminué; nous ne di-
sons pas supprimé. Quant à la conférence de
Bruxelles elle a montré tout ce qu'elle pou-
vait beaucoup d'habileté théorique et de
bonne volonté sincère.
»
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTIcr'UERS DU Temps
'̃̃̃ Sofia, 29 juin, 8 h. 15.
Avant de quitter Sofia le prince Ferdinand, cédant
aux instances de M. Stamboulof et se prononçant
sur la demande en grâce présentée par le conseil de
guerre, a ratifié la sentence de mort de Panitza. Le
premier usage que M. Stamboulof a fait des pouvoirs
extraordinaires dont il a été investi par suite du dé-
part du prince a été d'ordonner l'exécution de Pa-
nitza.
Celui-ci a été averti avant-hier qu'il devait se pré-
parer à la mort et qu'il devait prendre ses dernières
dispositions. Panitza a écouté avec beaucoup de
sang-froid cette communication qui lui a été faite
par un de ses juges. Il a écrit plusieurs lettres et a
eu une courte entrevue avec quelques membres de
sa famille.
L'exécution a eu lieu le samedi matin vers sept
heures, sur une place aux environs de Sofia. Pa-
nitza y a été conduit dans un fiacre fermé, sous la
garde d'un gendarme. Il a fumé pendant tout le
trajet. Cinq régiments étaient sous les armes dans
la plaine de l'exécution. Ils étaient commandés par
le colonel Moutkourof. Un détachement de 21 hom-
mes formait le peloton d'exécution.
Panitza, qui s'est conduit très courageusement, a
écouté pendant quelques instants les exhortations
d'un pope, puis, sur le signal de l'officier, le pelo-
ton a fait feu. Panitza est tombé percé de balles en
criant « Vive la Bulgarie » La mort a été instan-
tanée.
C'est dans la soirée seulement que le télégraphe
bulgare a accepté et expédié les dépêches relatant
l'exécution.
Berlin, 29 juin, 8 h. 35.
Le Reichstag a voté en troisième lecture les cré-
dits militaires. Il a ensuite discuté le crédit pour
l'augmentation des traitements des fonctionnaires.
Malgré l'intervention de M. de Maltzahn, secré-
taire d'Etat à l'office du Trésor, et celle du ministre
de la guerre, le Reichstag a repoussé l'augmenta-
tion des traitements des officiers, ainsi que sa com-
mission le lui avait proposé, et n'a adopté que l'aug-
trouver quelques salles de spectacle ouvertes.
11 va sans dire qu'il sera bon de leur offrir des
spectacles appropriés à la capacité d'attention
dont on dispose en cette saison de détente uni-
verselle; mais ils peuvent être sûrs de faire de
l'argent avec une bonne afriche. Toutes les fois
qu'il y a eu, dans un théâtre, une pièce amu-
sante, le public y a couru, même en été. Rap-
pelez-vous l'aventure du Procès Vauradieux
qui emplit la salle du Vaudeville durant les
trois mois où le théâtre était fermé d'ordinaire
et dont le succès se prolongea très avant dans
'la saison d'hiver.
Quant tt nous, comme tous les ans, nous res-
terons a notre poste, aidant de la publicité du
journal tout directeur qui tiendra ses portes
ouvertes et hasardera du nouveau. Nous comp-
tons que la Comédie-Française ne nous lais-
sera pas chômer de reprises importantes, et
nous lui saurions gré d'y joindre quelques nou-
veautés. Qu'on réserve la saison bénie de
l'hiver aux Dumas, aux Sardou, aux Pailleron
et aux Meilhac, rien de mieux. Ces messieurs
peuvent dicter leurs conditions. Mais bien des
jeunes gens ne demanderaient pas mieux que
de faire leurs premières armes en juillet ou en
août.
En attendant, c'est dans un théâtre d'été, à
l'Hippodrome, que nous allons chercher la
nouveauté de la semaine. L'Hippodrome nous
a donné une légende mimée, la légende de
Jeanne d'Arc. Décidément Jeanne d'Arc est à
la mode. De tous côtés, des évoques quêtent
pour lui élever des monuments commémora-
tifs on poursuit en ce moment à Rome le
procès de sa béatification. Elle n'est encore
que bienheureuse à ce qu'il paraît; il reste
quelques années à attendre et quelques for-
malités à remplir pour qu'elle soit déclarée
sainte. Hier on inaugurait à Nancy la statue
de M. Frémiet, dont M. Osiris a fait ca-
deau à cette ville; voici qu'aujourd'hui
même nous apprenons que M. Larroumet, l'in-
telligent et actif directeur des beaux-arts, s'est
rendu àDomremy, pour yétablir, danslamaison
même de Jeanne d'Arc, qui sera restaurée aux
frais de l'administration, un musée où seront
réunis les principales œuvres de peinture ou de
sculpture consacrées par l'art français à la Pu-
celle. Orléans célèbre tous les ans, avec une
grande solennité, une fête dont Mgr Dupan-
loup avait pris l'initiative et dont il a laissé la
tradition à ses successeurs. Brochures et livres
pleuvent en ce moment, où des exégèses pas-
sionnés s'attachent au moindre détail de sa
vie et Rappliquent à çonfiemyer la légende.
mentation de traitement pour les fonctionnaires
civils.
Berlin, 29 juin, 8 h. 40.
Le général de Verdy du Vernois déclare à tout le
monde qu'il n'a jamais eu l'intention de donner sa
démission. Cependant la Gazette de l'Allenaagne du
Nord affirme, elle aussi, que le ministre de la guerre
va se retirer.
On dit bien que l'empereur a envoyé de Kiel des
félicitations au ministre, à propos du discours qu'il
a prononcé au Reichstag; mais en même temps on
prétend que le conflit entre le chef du grand état-
major, le général de Waldersee, et le ministre de la
guerre, est tel que l'un des deux doit se retirer.
Or le général de Waldersee est tout-puissant au-
près de l'empereur, et si quelqu'un doit céder, c'est
le général de Verdy du Vernois. C'est à propos des
révélations intempestives faites par le ministre de
la guerre dans la commission du Reichstag qu'au-
rait éclaté le conflit.
Berlin, 29 juin, 10 h.
Hier a eu lieu un banquet au Kaiserhof en l'hon-
neur du major deWissmann.200 députés et fonction-
naires y assistaient. M. de Wismann est entré don-
nant le bras à M. Windthorst. Le ministre de Bœtti-
cher a porté un toast à l'empereur. M. de Wissmann
a répondu et M.:Windthorst a bu à la santé de Mme
Wissmann mère.
Budapest, 29 juin, 9 h. 15.
La Délégation hongroise a clos, à son tour, sa
session. C'est M. de Kallay, ministre des finances
de l'empire, qui a adressé des remerciements et des
éloges aux délégués, au nom de l'empereur et au
nom du gouvernement.
M. Louis Tisza a prononcé un discours de
clôture dans lequel il a déclaré que la délégation
considérait l'existence de la triple alliance comme la
principale garantie du maintien de la paix. Il a
ajouté que la délégation a compris, en votant le
budget de l'armée, que la paix la plus coûteuse exi-
geait moins de sacrifices que la guerre la moins
chère.
M. Tisza a terminé en disant que tous les Hon-
grois étaient constamment prêts à se sacrifier pour
maintenir l'inviolabilité et le prestige du trône.
La session de la Délégation a ensuite été close au
milieu, de vivats enthousiastes.
(Service liavas)
Berne, 29 juin.
M. Frey, directeur international des télégraphes,
est mort ce matin des suites d'un catarrhe intestinal,
près de Bienne, où il se trouvait en congé de con-
valescence.
DERNIÈRE HEURE
Aujourd'hui, a eu lieu, au Trocadéro, la distribu-
tion des prix aux élèves de l'Association philotech-
nique de Paris pour l'instruction gratuite des adul-
tes. La séance était présidée par M. Bourgeois, mi-
nistre de l'instructisn publique, de retour de la vi-
site faite par lui à l'école de Cluny.
Deux allocutions sont prononcées par M. Jacques,
député de Paris et président de l'Association, puis,
par M. Bourgeois. p
Comparant l'Association philotechnique aux autres
sociétés d'enseignement populaire, le ministre féli-
cite le comité directeur de la large part qu'il donne
dans l'enseignement aux femmesetauxjeunes filles.
Puis, abordant la question des cours professionnels
et techniques, M. Bourgeois s'expr me ainsi
L'œuvre de l'enseignement public sera prochai-
nement terminée. L enseignement technique doit
être organisé par l'Etat, et dans des conditions pra-
tiques. Il ne faut pas songer à faire dans toute la
France un enseignement technique, professionnel,
uniforme qui s'applique à tous et par suite à per-
sonne.
Il faut le varier suivant chaque région, chaque
ville, pour que, de chaque école, puissent sortir des
hommes en état de largement gagner leur vie.
La théorie et la pratique ne sont pas des frères
ennemis; il faut à côté des praticiens placer des
professeurs théoriques qui féconderont, vivifieront
l'enseignement de leurs collègues.
Le pays a besoin que cette œuvre soit faite. Le
rapport de M. Siegfried, sur le budget du com-
merce, montre que le développement commercial et
industriel de la France depuis cinquante ans est
moins rapide que chez les peuples voisins.
C'est que l'enseignement technique est développé
en Allemagne et en Angleterre. Aussi est-il néces-
saire de le créer en France, et dans le délai le plus
court possible, si nous ne voulons pas nous laisser
distancer.
Ces choses, je me félicite de les dire au nom du
gouvernement de la République. Bientôt nous fe-
rons ce que fait l'Association philotechnique, mais
plus grandement, plus largement avec les ressour-
ces de l'Etat, du département et de la commune.
Diverses récompenses sont ensuite accordées à un
certain nombre de professeurs de l'Association. Sont
nommés officiers de l'instruction publique MM.
Daux, Ferrand, With. Officiers d'Académie MM.
Parent, Ménard, Peuvrez, Fontaine, Mlle Sauger,
Lacroix et Longueville.
On procède ensuite à la distribution des prix aux
élèves des cours. Le grand prix de l'Association
(prix du ministre), est accordé à M. Alexandre.
Les prix d'honneur offerts au nom du ministre de
l'instruction publique etdupréfet de la Seine, sont ob-
tenus par MM. Rigolet, Perdereau, Roche, Mlles
Gros, Beckpr, Daumont, Gibassier, Maubert, Sal-
vert, Albarède, Collinet, Brègre, Chevènement.
La distribution des récompenses aux élèves des
cours professionnels du syndicat général des chauf-
feurs et mécaniciens de France et d'Algérie a eu
lieu cette après-midi, à deux heures, à la mairie du
11e arrondissement, sous la présidence de M. Flo-
quet, assisté du lieutenant-colonel Chamoin, repré-
sentant le président de la République.
M. Floquet a félicité le syndicat de son attache-
ment à la République et a remis, au nom du mi-
nistre, les palmes d'officier de l'instruction publique
à M. Le Barazer, adjoint au maire du 4e arrondisse-
N'y en a-t-il pas un, en ces derniers temps,
M. Marin, qui a soutenu cette thèse pa-
radoxale que Jeanne a été un grand capi-
taine, toute pleine d'illuminations de génie
dans l'art de la guerre, et qu'on peut hardi-
ment la mettre à côté d'Annibal. de César et
de Napoléon Qui ne se souvient des beaux et
solides travaux de M. Joseph Fabre, un des
plus fervents amoureux de la gloire de Jeanne?
C'est lui qui a proposé, il y a quelques an-
nées, à la Chambre, dont il faisait partie,
de faire de l'anniversaire de naissance de
Jeanne, qui tombe en mai, la fête de la patrie,
fête qui pourrait être à la fois religieuse et na-
tionale, le clergé s'étant rallié à l'admiration
de celle qu'il avait brûlée autrefois. Il s'en
est fallu de bien peu que la proposition n'a-
boutît et ne fût votée. Vous pouvez être sûrs
qu'elle sera reprise et réunira un jour toutes les
voix. Il est incroyable comme un ces vingt
dernières années a monté la sympathie, l'en-
thousiasme, tranchons le mot, la dévotion du
peuple français pour la Pucelle. C'est aujour-
d'hui une espèce de culte.
Les désastres de 1870 sont-ils pour quelque
chose dans ce mouvement des esprits? Avons-
nous eu cette vague et obscure sensation que
ce qui nous avait manqué dans cette affreuse
guerre, c'est une grande figure, ranimant les
courages, les groupant autour d'elle, les lan-
çant il la victoire? Nos imaginations se sont-
elles émues et nos cœurs attendris à cette
idée, qui ne s'est pas nettement formulée,
mais qui n'en a été que plus puissante pour
être restée éparse, que Jeanne- une héroïque
et chaste jeune fille a été pour la France du
quatorzième siècle cette incarnation de la pa-
trie, cet ange du salut que nous aurions sou-
haité dans nos revers? Je ne m'explique pas
très bien ce renouveau de tendresse et d'admi-
ration pour Jeanne; mais le fait est constant,
indéniable. Sainte Geneviève n'est pas encore
déchue officiellement de son titre de patronne
d3 Paris, de protectrice de la France. Elle
baisse, cela est certain, dans l'opinion pu-
blique. Jeanne monte elle a jadis soule-
vé le peuple ei l'a, malgré les clercs et les
politiques, entraîne sur ses pas la conquête
du royaume. C'est le peuple aujourd'hui qui,
d'un irrésistible élan, la pousse, en dépit des
premieres répugnances du clergé français et
italien, à la sainteté et à la gloire.
Pour mesurer le chemin parcouru, il suffit
d'une simple observation. Au dix-huitième
siècle, il n'y avait pas une duchesse qui n'eût,
traînant sur son boudoir, le poème de Voltaire
ment, celles d'officier d'académie à M. Jamct, pro-
fesseur, et le Mérite agricole à M. Odde.
A la suite du débat au conseil municipal qui, dans
sa séance d'avant-hier, a vote l'ordre du jour sur r
les pétitions contradictoires, demandant les unes
l'interdiction des courses de taureaux, les autres
l'autorisation de reprendre les exercices des pica-
dores, M. le préfet de police a décidé d'autoriser la'
reprise de ces exercices aux arènes de la rue Porgo-
lèse, aux conditions suivantes 1° les chevaux
seraient caparaçonnés et blindés 2° l'arène ne se-
rait pas divisé-e en deux parties.
'» ̃
Le Journal officiel de ce matin publie, com-
me nous l'annoncions hier, les résultats de
l'enquête de l'inspection des finances sur la
situation du Crédit foncier de France. Le
gouvernement ne s'est pas borné à présenter
un résumé de l'enquête et à formuler les
conclusions qu'elle lui a suggérées il a, de
plus, cru devoir saisir le public des pièces
elles-mêmes sur lesquelles il a établi son ju-
gement c'est, d'une part, le rapport de l'in-
spection, et, de l'autre, la réponse qu'y a op-
posée M. Christophle.
Nous sera-t-il permis de regretter, tout
d'abord, que ces pièces aient été ainsi divul-
guées ? L'inspection des finances reçoit, cha-
que jour, en vertu de ses fonctions, des mis-
sions délicates; si elle réussit à les remplir,
c'est, on peut le dire, grâce à l'absolue sécu-
rité d'esprit, à la pleine indépendance dont
jouissent ses représentants. Mais dans quelle
situation morale se trouveraient-ils, à quelles
hésitations légitimes ne seraient-ils pas en
proie, s'il venait à être admis que leurs rap-
ports ne constituent plus des documents es-
sentiellement con6dentiels ? Si le secret pro-
fessionnel ne devait plus les protéger, s'ils se
sentaient découverts par le gouvernement, il
leur faudrait désormais des âmes de héros
pour ne pas songer à prendre certaines pré-
cautions. Ils ne pensaient qu'à voir la vérité
sur les hommes et sur les choses, et à la
dire. Ne craint-on pas de les amener à avoir
d'autres soucis ?
Il est avec le ciel des accommodements.
Il n'en était pas avec l'inspection des fi-
nances elle planait à des hauteurs qui la
rendaient inaccessible aux préoccupations
vulgaires. Le gouvernement a voulu avant
tout rendre éclatantes son impartialité, sa
confiance dans le sentiment public; par ce
temps de calomnies faciles et de publicité à
outrance, il a tenu à ce qu'on ne pût pas le
soupçonner de rien cacher. Il n'y avait rien
à dissimuler, et le gouvernement a fait mieux
que l'affirmer il le montre. Mais, au risque
d'affronter certaines défiances et même des
injures qui eussent alors été pour lui un hon-
neur, il eût dû, ce nous semble, peser davan-
tage les inconvénients que nous signalons.
Espérons, du moins, que, ces observations
aidant, la publication que nous estimons si
fâcheuse en principe ne pourra pas être in-
voquée comme un précédent.
En fait, elle fournit aux décisions arrêtées
par le gouvernement un appui dont il serait
difficile de contester la force. Qu'on mette
en parallèle les observations de l'inspection
des finances et celles du gouverneur du Cré-
dit foncier, et l'on devra, en toute impartialité,
reconnaître qu'il était impossible de conclure
autrement qu'on ne l'a fait. Le débat le plus
grave porte sur l'interprétation des statuts.
En aucun cas, dit l'inspection des finances,
le Crédit foncier ne doit consentir de prêts
qui excèdent la moitié de la valeur des ga-
ges ou qui ne jouissent pas d'une première
hypothèque or, ces exigences ont été par-
fois mises en oubli. Cette interprétation des
statuts est inexacte, répond M. Christophle
le Crédit foncier a le libre usage de son capi-
tal et de ses réserves aucun gouvernement
ne lui a, jusqu'à ce jour, contesté cette li-
berté les tribunaux l'ont reconnue des ju-
risconsultes éminents la proclament; le re-
proche adressé au Crédit foncier est donc
sans fondement.
Les provisions devraient être fortifiées,
reprennent les inspecteurs; il serait utile
d'augmenter ces réserves or, on les dimi-
nue. Question de pure appréciation, réplique
M. Christophle. Ces provisions sont même
tout à fait facultatives. Vos frais de publicité
ne sont pas en rapport, disent les inspec-
teurs, avec les résultats obtenus; en outre,
ces frais grèvent, en partie, le compte des
emprunts clos, au lieu d'être imputés exclu-
sivement sur le compte de profits et pertes.
Notre écriture est la seule exacte, riposte
M. Christophle, c'est là seule conforme aux
usages; les emprunteurs n'en souffrent nul-
lement quant à savoir si ces frais nous pro-
fitent ou non, c'est une question que nous
sommes mieux à même de juger que per-
sonne. Vous avez fait des reports discuta-
bles, reprend l'inspection. Discutables? Il
et qui n'en fit ses délices. Personne aujour-
d'hui, pas même les plus incorrigibles lettrés,
n'oserait avouer qu'il en a lu un chant et qu'il
y a pris plaisir. J'incline à croire que c'est Mi-
chelet qui, le premier, a retourné les esprits
j'étais tout jeune, tout jeune, quand parut ce
merveilleux chapitre où il conte la légende de
Jeanne. Je me souviens encore de notre émo-
tion. A ce mot jeté dans la narration du sup-
plice de Jeanne :« dix mille hommes pleu-
raient, » nous fondîmes en larmes.
Croyez bien que le succès que vient d'obtenir,
à la Porte-Saint-Martin, la Jeanne d'Arc de M.
Barbier n'est dû qu'en partie à la beauté de la
pièce et à la célébrité de l'actrice qui la jouait.
C'est Jeanne qui, par la toute-puissance de son
nom, devenu sacré, a tiré le public au théâtre.
Les familles s'y sont rendues, comme en pèle-
rinage, pour faire leurs dévotions a la sainte.
Ce qui est plus extraordinaire, c'est que, si
j'en crois des lettres de Londres, le public an-
glais se trouve, vis-à-vis de Jeanne, dans une
disposition d'esprit analogue. Il se fait de l'au-
tre côté du détroit, en faveur de l'héroïne qui
a vaincu Talbot et qui a péri sur un bûcher
anglais, un revirement curieux d'opinion. On
la loue, on l'exalte: il semble qu'on veuille, en
allant écouter la pièce de notre compatriote,
faire pénitence d'un crime national. Jeanne,
qui a jadis battu ceux qu'elle appelait les God-
dems, est en train de les conquérir aujour-
d'hui.
Quand l'Hippodrome annonça qu'il allait don-
ner sa légende mimée de Jeanne d'Arc, il y eut
comme une fureur du public pour se procurer
des places. Jamais le théâtre n'avait vu pareil
empressement. Les journaux avaient conté au
public que Mgr Pagis, l'évêque qui s'en va la
bourse à la main à travers la France, quêtant
pour le monument de Vaucoulcurs, avait as-
sisté à la répétition générale et qu'il en avait
été très édifié. Le soir de la première, je n'y
ai pas vu d'éveque; mais, en revanche, quel-
ques prêtres en soutane, et j'ai même aidé l'un
d'entre eux à trouver le chemin du contrôle.
On a fait grand bruit de la mise en scène dé-
ployée par l'Hippodrome. N'était qu'il s'agît de
Jeanne d'Arc, l'effet général en est médiocre. Il
n'y a guère que le dernier tableau qui soit
vraiment très curieux. Mon collaborateur a
expliqué, le lendemain même ûc \a première,
le iT'io singulier à l'aide duquel on a pu repro- j
duire îUT une piste circulaire et nue la vieille
place de RouCn- Je n'y reviendrai pas tout ce
que je puis dire, £'^st que l'illusion est com- i
plète, et que dix mille SDtCtateurs ont battu des J
n'en est rien, réplique le gouverneur du Cré-
dit foncier; les statuts autorisent expressé-
ment cette nature d'opérations; un incident
fâcheux, l'affaire Bex, a pu survenir, il est
vrai, mais l'inspection elle-même n'a pas
insisté sur ce point il est donc jugé.
Mais le Crédit foncier n'est-il pas, d'une
façon générale, sorti, sinon de la lettre, au
moins de l'esprit de ses statuts? N'a-t-il pas
prêté les mains à la constitution de sociétés
nombreuses ? N'est-il pas intervenu dans
mainte et mainte émission? Et, ce qu'on eût
compris d'un établissement de crédit ordi-
naire, peut-on l'accepter de la part d'une
institution foncière, que la loi a cru devoir
entourer de tant de garanties? Le rapport de
l'inspection insiste vivement sur ces ques-
tions. Mais M. Christophle a beau jeu à rap-
peler que le Crédit foncier était loin de s'at-
tendre à un blàme pour les services qu'il a
rendus de la sorte: n'a-t-il pas toujours, en
eïet, agi, travaillé, au grand jour, et, le
plus souvent même, à l'instigation des
pouvoirs publics ? Dans ces opérations,
en est-il une seule qui ait affaibli le Crédit
foncier, diminué sa clientèle, ralenti ses prêts
hypothécaires? En un mot, la situation de
l'établissement, prise dans son ensemble,
comme il convient dans un examen de cette
importance, n'offre-t-elle pas toute sécurité à
l'épargne? Le Crédit foncier a-t-il, enfin, pé-
riclité ne s'est-il pas, au contraire, merveil-
leusement relevé sous son administration
actuelle? L'inspection ne le conteste pas.
Que subsiste-t-il, dès lors, de ses critiques ?
Voilà, brièvement esquissées, la thèse de
l'inspection et celle du gouverneur du Cré-
dit foncier. Après les avoir entendues l'une
et l'autre, il est manifeste qu'on ne pouvait
aboutir à une autre solution que celle qui l'a
tout naturellement emporté. De l'aveu de
l'inspection, la position du Crédit foncier est
intacte. Comme le fait remarquer à juste ti-
tre le rapport du ministre des finances au
président de la République, « c'est là, on
peut le dire, la constatation essentielle de
l'enquête, soit que l'on se place au point de
vue de l'autorité indispensable à un établisse-
ment de la nature du Crédit foncier, soit que
l'on songe aux épargnes dont il a fait emploi
et qui sont une partie si notable et si intéres-
sante de la fortune nationale ». L'institu-
tion du Crédit foncier sort de l'enquête
fortifiée. L'enquête n'aurait-elle eu que ce
résultat, on devrait s'applaudir de ce qu'elle
a été entreprise. Mais elle aura d'autres con-
séquences.
Le gouvernement a été d'avis, en effet, que,
pour l'avenir, le Crédit foncier aurait avan-
tagea se conformer, surplusieurs points, aux
observations de l'inspection des finances.
Ainsi, en ce qui concerne les prêts hypothé-
caires, le droit de prêter, avec les fonds du
capital-actions ou des réserves, plus de 500/0
de la valeur des gages, ou bien encore sur
deuxième hypothèque, ne devra plus être
invoqué. En second lieu, la question des
provisions devra être étudiée dans son en-
semble par l'administration du Crédit fon-
cier. Il s'ensuivra des modifications qui ne
peuvent, en somme, que profiter au crédit de
rétablissement.
Voilà pour la question de principe; quant
à la question de personne, l'administration
actuelle est couverte, pour le passé, dans
son interprétation des statuts et dans sa ges-
tion effective, par l'approbation formelle ou
tacite des ministres successifs qui ont eu la
charge de les surveiller; pour l'avenir, une
autre interprétation prévaut et doit avoir pour
conséquence une gestion différente. Le gou-
verneur n'a pas autre chose à faire que
de se conformer aux nouvelles indications
de son chef hiérarchique. Le jour où il y
manquerait, le gouvernement serait là pour
l'y ramener, et, si le gouvernement oubliait
ses devoirs, le Parlement a les moyens de
les lui rappeler. Tout est donc finalement
sauvegardé, et il nous semble que, dans ces
conditions, il n'y a plus qu'à passer, comme
on dit, à l'ordre du jour.
On sait avec quelle faveur l'opinion publique a ac-
cueilli l'installation du préfet de la Seine à l'Hôtel
de Ville. Quelques brouillons espéraient sans doute
voir le nouveau conseil municipal, aussitôt réuni,
protester violemment contre l'acte de fermeté du
gouvernement; mais les autonomistes ont eu le
bon sens de comprendre combien ils se feraient
de tort en s'insurgeant inutilement contre la loi,
et les friands de scandale en ont été pour leurs
frais d'excitations. Ils ont cependant essayé de
prendre, hier soir, leur revanche en convoquant à
un grand meeting d'indignation, salle des Mille-
Colonnes, tous les citoyens que l'énergie du cabinet
exaspère et que la demi-sagesse du conseil décon-
certe.
Hélas de ce côté encore, douloureuse déception I
A peine deux ou trois des élus se sont-ils rendus à
mains; tant le décor était il la fois imprévu et
pittoresque. C'est à M. Houck que l'on doit cette
mise en scène amusante. M. Widor a écrit, pour
cette pantomime, une musique qui a sans
doute beaucoup de qualités, mais qui ne m'a
pas paru scénique, ou du moins qui n'a pas
l'air de l'être, étant donné l'immensité du vais-
seau, où s'espace l'action qu'elle doit accom-
pagner et traduire.
La légende mimée s'est terminée par un chant
militaire dont M. Dorchain a écrit les paroles,
qu'on n'a pas entendues malheureusement et
qui valaient de l'être. Les vers sont très colo-
rés je ne cite que le dernier couplet
Un jour-un jour que nous verrons-
L'olivier ceindra notre tête,
Et la lèvre d'or des clairons
N'aura plus que des chants de fête
Mais jusqu'à ce jour espéré,
Dans 'l allégresse ou les alarmes,
On entendra, rythme sacre,
Sonner la cadence des armes.
Je crains bien, quoi qu'en dise le poète, que
nous ne voyions jamais le jour où les clairons
no sonneront plus que pour les fêtes de la
paix. Mais le couplet n'en a pas moins une
fière allure, et le dernier vers eslj d'une sono-
rité admirable.
Verrons-nous un jour la Jeanne d'Ave de M.
Joseph Fabre a la Comédie-Française? Il y
compte bien il a su intéresser à sa cause
nombre d'honnêtes gens qu'a touchés la
sincérité de son ardent enthousiasme pour
l'héroïne. Il a écrit en tête du drame qu'il
vient, de publier en volume cette courte et mé-
lancolique préface
« Ce drame, longtemps choyé, est le couron-
nement de mes travaux sur Jeanne d'Arc. Si
une scène ne la recueille, il sera une voix 'per-
due. Mais il est la voix d'une âme, et il redit
.un nom, qui est le plus grand de la patrie. »
Il est la voix d'une âme 1 C'est le plus juste
éloge que Joseph Fabre pouvait faire de son
drame. Ce drame est une œuvre de foi et d'a-
mour. A quoi cela se reconnaît-il'? Je ne sau-
rais le dire; à tout et à rien. On se sent à me-
sure qu'on lit ce drame peu à peu pénétré de
cette idée que l'homme qui l'a écrit croit pieu-
sement à Jeanne et qu'il l'aime. Il a en lui la
naïveté de ces moines du moyen âge, qui met-
taient en scène ou la Passion ou quelque épi-
sode de la vie de la sainte Vierge. L'ouvrage
tient du mystère.
Aussi les meilleures parties sont-elles préci- ¡
sément celles où Jeanne n'est point mêlée aux I
discussions des politiques ou des hommes d%>>- ̃'
l'appel de la « Fédération des comités républicain!
socialistes » (?) et, quant aux électeurs, on en comp-
tait trois ou quatre cents au plus. En outre, la ma-
jorité de l'assistance ne devait avoir que vague-
ment conscience de l'objet de la réunion elle se
proposait, surtout, paraît-il, de « rigoler » forte-»
ment, la veille, d'un dimanche, en faisant le plus
de tapage possible. La fête; à cet égard, a été des
plus réussies, car la vigueur et l'entrain des gosierst
suppléait à leur nombre. Un orateur a même eu la
candeur de s'en étonner, déclarant qu'il n'aurait pas
cru entendre « des électeurs qui se disent républi-
cains brailler comme des ânes ». Inutile d'ajouter
qu'on l'a expulsé sur-le-champ.
M. Chassaing, député de la Seine, MM. Dubois et
Chauvière, conseillers municipaux, ont prononcé
tour à tour quelques mots sans parvenir à dominer
le tumulte et à « reprendre contact avec leurs élec-
teurs ». M. Chassaing ayant incidemment parlé du
général Boulanger et accusé les opportunistes d'a-
voir fait sa fortune, on s'est mis à crier, de tous les
coins de la salle « C'est vous C'est Clemenceau! »
L'auditoire semblait, d'ailleurs, particulièrement dé-
sireux de marquer son hostilité vis-à-vis des radi-
caux autonomistes c'est à dire des organisa-
teurs mêmes de la réunion. On a traité les
conseillers municipaux de « traîtres », de « ven-
dus », ou tout au moins de « naïfs », et dans
l'ordre du jour final on les a invités à délaisser la
politique pure pour s'occuper davantage des ques-
tions sociales. C'est ainsi que d'utiles leçons vien-
nent parfois de ceux dont on les attendrait le moins.
Ne suffit-il pas, en effet, de remplacer « questions.
sociales » par « questions municipales », pour que
le vœu des braillards de la salle des Mille-Colonnes
réponde très exactement à celui de la population pa-
risienne tout entière?
LE CRÉDIT FONCIER
Le Journal officiel publie ce matin les documents
que nous avons annoncés hier.
Voici d'abord le texte du rapport adressé par le
ministre des finances au président de la Repu-,
blique Paris, le 28 juin 1890.
Monsieur le président,
A la suite des déclarations faites par le gouverne-
ment le 8 mai dernier à la Chambre des députés, j'ai
chargé une commission composée d'inspecteurs dea
finances de procéder à une enquête, non seulement
sur les faits indiqués par la lettre de M. Lévêque,
sous-gouverneur démissionnaire, mars, en outre, et
d'une façon générale, sur la situation du Crédit fon-
cier.
La vérification a été commencée aussitôt. Poursui.
vie avec toute la rapidité compatible avec l'impor-
tance et la multiplicité des opérations sur lesquelles
elle devait porter, elle vient d'aboutir à un rapport
que m'a adressé M. l'inspecteur général Machart,
travail dont j'ai donné communication à l'administra-
tion du Crédit foncier, en l'invitant à me fournir ses
observations.
Bien qu'il s'agisse d'un établissement de crédit au-
quel le contrôle du gouvernement ne saurait enlever
son caractère privé, j'ai pensé, monsieur le président,
que, vu la gravité des intérêts en jeu et les préoccu-
pations éveillées dans l'opinion, il était nécessaire de
mettre immédiatement en pleine lumière les résultats
de l'enquête.
Ces résultats, j'ai l'honneur de vous les exposer icî
et je place sous vos yeux, à la suite du présent rap-
port, les documents eux-mêmes.
Des investigations auxquelles se sont livrés les
inspecteurs des finances il ressort en premier lieu
que la masse des prêts effectués par le Crédit foncier
est bien gagée et que la situation de l'établissement,
considérée dans son ensemble, justifie la confiance
dont il jouit. t.
Certaines évaluations d'immeubles ont bien été ju-
gées excessives d'autres sont signalées comme ayant
été faites sur plans dans des conditions qui permet-
taient difficilement d'apprécier la valeur et le revenu
des propriétés d'autre part, ainsi que le fait remar-
quer M. Christophle dans sa réponse, la crise immo-
bilière n'a pas été sans exercer sur les recouvre-
ments d'annuités une influence dont il est juste de
tenir compte.
Mais, ni cette crise, qui s'atténue d'ailleurs, ni les
irrégularités qui ont pu être relevées dans le service
des prêts, n'ont eu, en fait, pour conséquence, de l'a-
vis des inspecteurs, de compromettre le gage des
obligataires.
C'est là, on peut le dire, la constatation essentielle
de l'enquête, soit que l'on se place au point de vue
de l'autorité indispensable à un établissement de la
nature du Crédit foncier, soit que l'on songe aux
épargnes dont il a fait emploi et qui sont une partie
si notable et si intéressante de :la fortune nationale.
Une divergence d'opinion assez sérieuse s'est élevée
entre l'inspection des finances et l'administration du
Crédit foncier au sujet de l'interprétation d'une dis-
position des statuts
Le conseil d'administration estime qu'il a le droit
de régler comme il l'entend le placement du fonds so-
cial et des réserves; par suite, les règles applicables
aux prêts hypothécaires d'après le titre IV des sta-
tuts cesseraient d'être obligatoires lorsqu'il s'agit, non
de prêts faits avec des ressources provenant des em-
prunts, mais de prêts réalisés au moyen du capital-
actions ou des réserves.
En vertu de cette interprétation, à l'appui de la-
quelle M. le gouverneur Christophle m'a soumis ujie
consultation signée de MM. Barboux et Durier, le
Crédit foncier a consenti, au profit, notamment, d'un
certain nombre de sociétés qui s'occupent d'opéra-
tions concernant la propriété immobilière, des prêts
non conformes aux dispositions du titre IV précité.
L'inspection des finances considère, au contraire,
que les dispositions réglementant les prêts hypothé-
caires s'appliquent à tous ceux qui sont conaentis
par la société, quelle que soit l'origine des fonds.
Après avoir pris connaissance des arguments invo-
qués de part et d'autre, et sans prétendre trancher la
question de droit, je crois devoir me rallier à cette
dernière opinion qui, en même temps qu'elle me pa-
raît mieux fondée, a l'avantage d'augmenter encore
mes. Les deux premiers tableaux où nous est
représentée la jeune bergère, douteuse de sa
mission, interrogeant les voix, prise jour à jour
par la suggestion et s'abandonnant à l'extase;
les deux derniers, où elle est en prison, où elle
se croit un instant abandonnée de ses voix,
mais où, certaine d'avoir fait son devoir, elle
répond à ses juges et à ses bourreaux avec le
mélange si caractéristique de bon sens, de
'vaillante humeur et de mysticisme qu'a si spi-
rituellement fait remarquer Michelet, sont
d un effet puissant à la lecture, et j'imagine
qu'à la scène ils feraient aisément fondre une
salle en larmes.
11 y aurait, je crois, nombre de scènes à éla-
guer ou à retrancher dans le milieu du drame.
L'auteur, à mon sens, a voulu y mettre trop de
choses. Il a essayé de nous donner, sinon des
renseignements exacts, au moins des indica-
tions sommaires sur les passions rivales qui
s'agitaient autour de Jeanne. Ce serait là, en
effet, la matière d'un drame humain: mais
avec le tour qu'ont pris les choses, et c'est M.
Joseph Fabre qui a lui-même fortement contri-
bué à ce résultat, Jeanne ne peut pas plus être
le sujet d'un drame historique que la Passion;
on n'en peut et l'on n'en doit faire qu'une lé-
gende, et tout ce qui ne rentre pas dans le ca-
ractère sacré et mystique de la légende en doit
être retranché.
C'est à cette nécessité qui s'impose que faisait
allusion une des personnes de qui dépend l'ac-
ceptation de Jeanne d'Arc à laComédie-Françaisé,
quand elle me disait: « Voyez-vous! une Jeanne
d'Air en prose, cela n'est pas possible. Jeanne
d'Arc n'a plus le droit de parler la langue de M.
Jourdain. Il faut qu'elle s'exprime en vers, en
vers tels que pourraient les écrire, à défaut d'un
Victor Hugo, les Gabriel Vicaire ou les d'Ha-
raucourt. Le vers peut seul nous transporter
dans ces lointains reculés et mystiques où flotte,
nimbée de son auréole, l'image sacrée de
Jeanne. »
Cela est si vrai, disais-je, que Joseph Fa-
bre, sans peut-être s'en rendre compte, a dans
les interrogatoires du -dernier acte donné à
presque toutes les réponses de Jeanne le nom-
bre et là sonorité de l'alexandrin ?
« J'étais aux mains de Dieu une arme de
combat.
» Je leur disais allons 1 et j'allais la pre-
mière.
» Si nous n'ét">»" vaincus, je serais inno-
cente. è 1
,»;" révère les clercs mais n'obéis au'à
~teu.
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