Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1889-05-18
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34431794k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 137484 Nombre total de vues : 137484
Description : 18 mai 1889 18 mai 1889
Description : 1889/05/18 (Numéro 10239). 1889/05/18 (Numéro 10239).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Description : Collection numérique : France-Japon Collection numérique : France-Japon
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k232158q
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
un s'aoonne aux Bureaux du Journal, 5, BOULEVARD DES ITALIENS, A PARIS, et «ans tous les Bureaux ae Poste
SAMEDI 18 MAI 1889.
VINGT-NEUVIEME ANNEE. N" 10239.
̃PRiX DE L'ABOIEMENT
PARIS Trois mois, 1 »EPte DHM POSTALE lSfr.; 36 fr.; 72fr,
LES A1JQ?Î!\EMENTS DATENT DES ier ET 16 DE CHAQUE MOIS
\Jxx numéro (départements) 2O centimes.
ANNONCES MM. Lagramge, CERF ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
Adresse télégraphique TEMPS PARIS • .̃
PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS..7. Trois mois> *4fr- Six mois, 258 fr. Un an, 56 fr.
DÉ1»* 4 ALSACE-LORRAINE lTtr.; 34 fr.; 68 fr.
UHION POSTALE lSfr.; 36 fr.; 72^.
LES ABOKNEMÉNTS DATENT UES 1" ET 16 DE CHAQUE MOIS
Un numéro (à 3Paris) lo centimes.
Directeur politique Adrien Hébrard
La rédaction ne répond pas des articles communiqués
w BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS V
Adresse télégraphique TEMPS PABIS
PARIS, 17 MAI
BULLETIN DU JOUR
Les deux Chambres ont siégé hier. Le Sé-
nàt a abordé la discussion de la loi sur le re-
crutement de l'armée qui lui est revenue de
la Chambre avec des modifications graves.
Après avoir prononcé l'urgence, il a, sur
l'article 21, par 157 voix contre 79, maintenu,
malgré M. Constans, ministre de l'intérieur,
le système des dispenses de droit, contraire-
ment au vote de la Chambre qui a rejeté les
exonérations de jure.
La Chambre a continué la discussion gé-
nérale du budget de 1890 et entendu la fin du
discours de M. Amagat et la réponse de
M. Burdeau, rapporteur général.
L'Exposition continue à préoccuper assez
vivement les pays étrangers. En Allemagne,
on discute fort et ferme sur la participation
de certains artistes, sujets de Guillaume II,
qui ont envoyé au Champ de Mars toiles et
statues.
Une feuille officieuse, les Nouvelles politi-
ques de Berlin, s'est donné pour tâche de trai-
tera fond ce sujet. Prenant à partie la Gazelle
nationale, qui avait déclaré que les artistes al-
lemands obéissaient à un instinct légitime
en quêtant des récompenses françaises qui
leur ouvriraient des marchés nouveaux
«Egoïsme naturel, s'écrie ce journal dans un
bel élan d'idéalisme désintéressé, nous appe-
lons cela un impudent amour du gain »
^^Puis il déclare que l'Allemagne n'a pas à
suivre l'exemple des autres- nations sur ce
point, et cela, nous cueillons au passage
cette fleur de bienveillance et de justice teu-
tones, parce que ces autres peuples « ont
été accueillis généralement, sinon toujours,
par la France avec courtoisie, voire avec cor-
dialité, tandis que l'on ne saurait où trouver,
non pas même un Allemand, mais simple-
ment une œuvre allemande qui, depuis vingt
ans, ait été traitée en France avec justice,
sans parler de bon vouloir ».
Cette phrase est typique. La presse d'ou-
tre-Rhin se crée une France de fantaisie,
puis elle l'attaque avec fureur. Prétendre
qu'il n'est pas d'oeuvre allemande qui ait
reçu depuis vingt ans en France un accueil
bienveillant ou même juste, c'est fausser de
parti pris la réalité.
L'érudition française, reconstituée depuis
vingt ans, toute pénétrée des méthodes scien-
tifiques modernes qu'elle marie aux qualités
lumineuses de notre langue et de notre race,
a fait largement leur part dans tous les do-
maines aux maîtres de l'érudition allemande.
Pas une oeuvre essentielle, non pas même
un mémoire important ne parait dans les pu-
blications de la librairie allemande, dans les
revues, voire dans les programmes des uni-
versités, des gymnases ou des Realschulen.,
qu'il ne soit signalé, analysé, commenté.
En fait d'art, il plaît auxchauvins allemands
de ne parler que des manifestations ridicules
de la rue contre Wagner ils ne tiennent nul
compte du fait que nulle part le fanatisme
wagnérien ne s'est plus propagé qu'ici,
qu'une école littéraire qui prétend, à en croire
le manifeste de l'un des siens, être la Littéra-?
titre de tout à l'heure, invoque le maitre de
Bayreuth comme l'un de ses dieux et qu'une
Revue même porte ce nom soi-disaot honni.
Les Nouvelles de Berlin tâchent dft faire
peur à MM. Liebermann, Kûhl, Frédéric de
Uhde, au comte de Kalkreuth de l'accueil
qui les attend chez les « Welches barbares ».
Un coup d'ceil jeté sur les critiques du Salon
déjà parues leur auraient appris avec quelle
générosité d'appréciation l'œuvre de M. de
Uhde, par exemple, a été saluée en France.
Il fut un temps où la muraille dé Chine
d'un chauvinisme béat et ignorant séparait
la France ou du moins une partie de la
France du reste du monde intellectuel.
Aujourd'hui, au contraire, si la France court
un danger, c'est de se laisser trop envahir,
c'est de trop livrer à tous les vents de doctri-
ne et d'art son génie clair, radieux et pur.
L'Allemagne, enivrée de sa fortune militaire,
risque fort, par compensation, d'échanger le
cosmopolitisme intellectuel des Gœthe, des
Schiller, des Humboldt et des Schopenhauer
contre les dédains ignorants d'un panteuto-
nisme étroit. L'attitude d'une partie de la
presse prussienne à propos de l'Exposition
montre assez que ce danger n'est pas chi-
mérique..
M. John Morley n'«st pas seulement le
lieutenant de M. Gladstone. C'est un homme
de lettres éminent, dont les études sur le
dix-huitième siècle français sont des œuvres
du premier mérite.
Il lui appartenait, au double titre de libéral
ïFjEmjLJLjaxoiv ou «TEMPë»;
DU 18 MAI 1889 [13]
1 1 1
UN CASQUE
̃̃-̃̃•• X– (Suite.)
Il fallut donc chercher ailleurs. L'hôtel de
l'avenue Blaise Pascal avait abrité déjà tant de
réunions dévotes et mondaines, que la prési-
dente des malcontents s'était vue contrainte de
remplacer deux fois le tapis de son escalier,
sali comme un paillasson de ministère. Elle en
avait assez, redoutait pour ses aubussons les
fondants écrasés, le punch répandu, et procla-
mait qu'en livrant encore sa maison elle sem-
blerait confisquer à son profit les mérites des
âmes charitables.
Bavot s'arrachait les cheveux, quand Mlles
ûeFourniquet se décidèrent à offrir leurs salons,
leurs grands salons Louis XIV en enfilade, où
des portraits emperruqués garnissaient les
panneaux.
Et sous l'œil des cavaliers à feutres gris, des
parlementaires rébarbatifs, des beaux sei-
gneurs galants, les pupazzi, les paniers de la
pêche au son, les roues de loterie, les comp-
toirs à thé et à champagne s'installèrent. Au
milien de ces apprêts bruyants, Mlles Herminie
et Pctronille de Fourniquet circulaient à pas
comptés. Elles s'avançaient, revêches et majes-
tueuses comme une paire de grands carros-
siers enrênés trop court. Tout Mauves les con-
naissait, et les vieillards se souvenaient encore
d'un père Fourniquet très avare qui avait ja-
dis servi dans les écuries du comte de Pro-
vonce. FI avait émigré avec les coffres à avoine
de Son Altesse; il avait épousé, de l'autre côté
du Rhin, la neuvième fille d'un garde-chasse et,
PcpioductJcn Jnto«iite.
et de littérateur également distingué, de pro-
noncer le jugement, au nom de l'Angleterre
moderne, sur l'attitude maussade que lord
Salisbury a cru devoir adopter à l'égard du
centenaire de la Révolution française. C'est
ce qu'il a fait avant-hier soir, au début d'un
éloquent discours prononcé à Shoreditch.
Nous nous reprocherions de ne pas met-
tre sous les yeux de nos lecteurs ce passage
réconfortant:
« J'espère, a dit M. Morley, qu'il n'a pas
échappé à votre attention, que l'ambassadeur
anglais a été rappelé de Paris de peur qu'on
ne pût croire qu'il sympathisait avec la Ré-
volution française. Je ne crois pas que jamais
acte de folie plus énorme ait été commis. Il y
a cent ans que, commo l'a dit un de nos poè-
tes « La France, dans son courroux a re-
» dressé sa taille géante, Et avec un ser-
» ment qui a retenti sur la terre, dans l'air et
» dans la mer, A frappé le sol de son pied
» et juré qu'elle serait libre. »
« II est heureux pour l'Europe qu'elle l'ait
fait. »
« Etmaintenantnotregouvernements'ima-
gine qu'il peut traiter de haut en bas {snub)
la Révolution française!. Eh bien, Napoléon
Bonaparte n'a pas eu beaucoup de nobles
paroles il en a eu beaucoup d'ignobles
mais quand un traité lui a été soumis qui
contenait une clause reconnaissant la Répu-
blique française, il a dit cette noble parole
« Effacez cet article. Qui ne voit pas la Répu-
» blique française est comme qui ne voit pas
» le soleil! » Et il en est ainsi encore aujour-
d'hui. »
«Il est particulièrement étrange de voir te-
nir cette conduite, alors que George III et
M. Pitt, qui étaient de leur temps des tories
passablement convaincus, n'ont jamais songé
à croire que les événements de 1789 méritas-
sent condamnation. N'est-ce pas une chose
honteuse que notre gouvernement se soit
abaissé à cet acte mesquin par complaisance,
je suppose, pour le prince de Bismarck?
»Si ces représailles historiques deviennent
l'usage, l'empereur d'Allemagne aura un
casiis belli contre nous, parce que nos ancê-
tres ont décapité Charles Ier. »
Voilà un langage qui va droit au cœur de
la démocratie française.
̃gi*,
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps
Vienne, 17 mai, 8 h. 15.
Le prince de Montenegro, se rendant à Péters-
bourg avec le prince héritier, s'est arrêté ici.
Ils se sont rendus, hier après midi, au cloître des
Capucins pour déposer une couronne sur la tombe
do l'archiduc Rodolphe.
Le prince Nicolas a reçu la visite du comte Kal-
noky et la lui a rendue au ministère des affaires
étrangères, où il est resté une demi-heure.
Aujourd'hui, le prince et son fils dîneront à
Schœnbrunn, chez l'empereur, en compagnie du
roi et de la reine de Danemark.
Vienne, 17 mai, 8 h. 35.
Dans la séance tenue hier à la Chambre des dé-
putés du Reichsj-ath, le comte Taaffe a répondu en
bloc aux différentes interpellations qui lui avaient
été adressées sur le congrès catholique, l'attitude
du gouvernement dans la grève des tramways et
l'antisémitisme.
..Voici le texte môme de la réponse du président
du ministère autrichien à l'interpellation relative à
la politique gouvernementale en présence du mou-
vement catholique
Le gouvernement n'avait aucune raison de faire des
déclarations ou de donner des explications à l'occa-
sion du congrès des catholiques, auquel n'ont assisté
que les personnes invitées, où il n'y avait pas, par
conséquent, de représentant du gouvernement et dont
les résolutions et en particulier la dépêche au pape
revendiquant pour le Saint-Siège le pouvoir temporel
n'ont été connues du gouvernement que par la voie
des journaux.
Le prince Liechtenstein C'est exact 1
Les personnes qui ont participé à ce congrès, re-
prend le comte Taaffe, n'ont, en eft'et, fait usage que
du droit d'exprimer librement leur opinion, qui leur
est garanti par les lois; le gouvernement n'a aucune
prise sur ces opinions.
D'autre part, les discours tenus dans une réunion
privée ne peuvent avoir aucune influence sur la poli-
tique extérieure de l'empire austro-hongrois, laquelle
n'est guidée que par le soin des intérêts do la monar-
chie.
En ce qui concerne, en particulier, nos relations
d'étroite amitié avec l'Italie, le ministre des affaires
étrangères responsable les a fait connaître à plu-
sieurs reprises et en lieu convenable, de manière à
dissiper tous les doutes.
Au sujet de la grève des tramways, le comte
Taaffe a raconté que le gouvernement s'est efforcé,
dès le début du mouvement, d'établir une entente
entre le personnel et la compagnie, mais qu'il a
trouvé si peu d'empressement auprès de la compa-
gnie qu'il a dû la menacer de la déchéance et de la
mise sous séquestre .de son matériel, si elle ne pré-
parait pas un nouveau règlement limitant la durée
des heures de travail et réglant la situation du per-
sonnel au point de vue de la caisse des retraites.
En réponse aux assertions contenues dans l'in-
terpellation de M. Vergani et relatives à la con-
v^rs 1815, était revenu au pays natal. Le roi
ayant négligé de récompenser son dévoue-
ment, il s'était tranquillement anobli de son
chef; puis, après qu'il eut, en 1829, marié M.
Florimond de Fourniquet à Mlle Prudence Pi-
gache, héritière d'un acquéreur de biens natio-
naux, il s'endormit dans le Seigneur et prit le
chemin du séjour bienheureux réservé aux
palefreniers des rois légitimes.
Mlles de Fourniquet naquirent, jumelles, de
l'union de Florimond et de Prudence; le jour
de leur entrée dans le monde soufflait une
aigre bise de mars, et leur premier cri ressem-
bla à un grincement. Elles crûrent en âpreté
et en sagesse, enterrèrent comme il convient
leurs nobles parents et commencèrent une exi-
stence digne de l'illustration de leur race. Elles
ne se marièrent pas, car il ne restaitqu'un Mont-
morency et, pour lui éviter l'embarras du choix,
elles ne le firent point solliciter. Elles avaient
trouvé dans la succession une vaste maison louée
àunépicierengros: elles en expulsèrent, moyen-
nant un royal dédit, les denrées coloniales et
la firent tapisser d'aïeux triés sur le volet;
ceux-ci, avec la philosophie ordinaire des por-
traits d'ancêtres, ne parurent point trop sur-
pris de se voir assemblés chez les petites-filles
du père Fourniquet. Elles donnèrent une ver-
rière à leur paroisse, firent célébrer chaque an-
née, le 16 septembre, une messe pour le repos
de l'âme de Louis XVIII, et, en toute occasion,
elles ne manquèrent point de témoigner au
Dieu de leurs pères la considération la plus dis-
tinguée.
Mais si le Créateur n'avait qu'à se louer de
leurs procédés, il en était autrement des créa-
tures, Peu de gens pouvaient se vanter d'avoir
obtenu une de ces révérences cérémonieuses
dont elles possédaient le secret. Généralement
elles vous tournaient le dos avec une majesté
suprême, ou bien vous détaillaient des bottes
au chapeau. Mauves en était fier comme Rouen
de la Gargouille, comme Tarascon de la Taras-
que.
Mme Le Febvre, si enchantée qu'elle fût de
loger sa ducasse, ne pouvait se défendre d'un
sentiment de terreur à la pensée de cette inva-
sion de profanes dans le sanctuaire. Elle re-
doutait vaguement quelque cataclysme et
qu au contact de la « cohue », comme les deux
sœurs appelaient la société de Mauves, il ne se
produisît un éclat.
Cependant elles en usèrent avec la présidente
duite du gouvernement envers les antisémites, le
président du conseil déclare que le gouvernement
accorde la môme protection à toutes les confessions
religieuses reconnues par la loi, et qu'il s'opposera `
énergiquement à toute tentative contraire à ce prin-
cipe.
Au reste, ajoute le comte Taaffe, il appartient aux
citoyens de se montrer une déférence et une tolé-
rance réciproques, lorsqu'ils sont séparés par des di-
vergences de vues sur le terrain de la religion ou sur
celui de la politique; c'est ce que réclame notre état
de civilisation.
Les déclarations du comte Taaffe démentant toute,
complaisance à l'égard des antisémites ont été ac-
cueillies avec faveur par les fractions libérales.
La Chambre des députés du Réichsrath s'est sé-
parée jusqu'à l'automne, après avoir nommé les
membres de la Délégation autrichienne.
Rome, 17 mai, 9 h. 40.
M. Imbriani a demandé à interpeller M. Crispi
sur la conduite du consul italien à Trieste, qui se
montrerait plus Autrichien qu'Italien. M. Piccoli,
président du conseil des notaires à Trieste, ayant
eu occasion ces jours derniers d'aller au consulat,
fit, dans une conversation absolument privée, des
déclarations de dévouement à la cause italienne,
ajoutant que tous les notaires triestins avaient les
mômes sentiments. Deux jours après, M. Piccoli
fut appelé au tribunal, recevait de vifs reproches
et était menacé d'un procès en haute trahison. Le
président lui montra un rapport du consul italien
racontant toute sa conversation. C'est sur ces faits
que M. Imbriani interpelle le ministre.
Le ministre de la guerre a décidé qu'on rempla-
cerait les grandes manœuvres de l'automne par un
essai de mobilisation de 100,000 hommes de la mi-
lice mobile. Jusqu'à présent, les soldats de la milice
mobile étaient simplement enrôlés dans les régi-
ments actifs. Cette année, ils devront former des
bataillons et des régiments spéciaux. La dépense
prévue est de 10 millions.
Madrid, 17 mai, 9 heures. -•»•
Avant la séance, hier, M. Sagasta alla trouver M.
Martos, le président de la Chambre, qui ne lui dis-
simula pas ses ressentiments contre plusieurs mi-
nistres ni son intention d'appuyer l'impôt sur la
rente et les propositions protectionnistes. M. Mar-
tos veut forcer M. Sagasta à se retirer et à lui lais-
ser la direction du parti libéral. Mais, hier, au pa-
lais, dans son entrevue avec la reine, M. Sagasta
a reçu une nouvelle assurance qu'il avait la con-
fiance de la souveraine, qui semble disposée à le
soutenir jusqu'au moment où les divisions du parti
libéral la forceraient à appeler M. Canovas et les
conservateurs, selon la pratique constitutionnelle.
Beaucoup de libéraux pensent que la dissolution
des Cortôs serait l'unique remède capable de faire
cesser les divisions des libéraux.
Madrid, 17 mai, 9 h. 30.
Hier, à la séance de la Chambre, M. Gamazo, le
chef des libéraux protectionnistes, a exposé l'oppor-
tunité de l'élévation des droits sur les céréales
étrangères et la réduction des impôts pesant sur
l'agriculture. Il croit qu'il est urgent de créer un im-
pôt sur le revenu et sur les coupons de la dette de
l'Etat. Il a terminé en déclarant que son opinion
était partagée par MM. Cassola, Lopez Domin-
guez, Navarro Rodrigo, Montero Rios, Alonso Mar-
tinez.
Le ministre des finances a repoussé l'élévation
des tarifs sur les blés et l'établissement d'un impôt
sur les coupons de la dette.
M. Canovas est intervenu dans le débat et a dé-
claré que les conservateurs, en principe, étaient
partisans d'un impôt sur le revenu et d'un impôt
sur les coupons de la dette « Ces idées font, a-t-il
dit, partie de la politique financière et économique
des protectionnistes, opposée entièrement à. cellede
M. Sagasta. » (Seruice IlauasJ w
(Service Ilavas)
Alger, 17 mai.
A!g;er, 17 mai.
Le conseil général d'Alger a voté un crédit de 10,000
francs destiné a subventionner- les délégations ou-
vrières qui se rendent à l'Exposition universelle.
i^aa–
La critique des finances de la République
n'a pas, jusqu'à présent, inspiré des considé-
rations bien nouvelles à l'opposition. A part
l'amusant paradoxe de M. de Lamarzelle sur
l'état florissant du Trésor royal à la veille de
la Révolution, on ne nous a guère servi que
les redites habituelles le pays est accablé
d'impôts; le budget est en déficit de cinq à
six cents millions; les dépenses ont été aug-
mentées d'une façon effroyable; la Républi-
que ne vit que d'emprunts et d'expédients;
bref, ce régime est l'abomination de la déso-
lation. Conclusion que les électeurs le chan-
gent au plus vite!
Il est une réplique toute naturelle, nous
en convenons qui ne manque jamais c'est
celle-ci l'opposition est mal venue à se
plaindre l'acte d'accusation, qu'elle prétend
dresser, se retourne contre elle; il n'est pas
une dépense, pas un emprunt, pas une sup-
pression de recettes, qu'elle n'ait votés; la
situation financière actuelle est son œuvre,
tout autant que celle des républicains. Nous
disons que cette réplique est toute naturelle
et même on ne peut se défendre d'une cer-
taine indignation contre ces gens qui se dra-
pent dans leur vertu farouche et qui se sont
faits les complices de tous les actes qu'ils
signalent aujourd'hui comme des fautes.
Mais qu'on ne se fasse pas d'illusion si, à
la tribune de la Chambre, une telle réponse
est d'un effet certain, elle demeure, pour la
des malcontents de la façon la plus courtoise,
se bornant à lui faire remarquer que Monsei-
gneur lui-même les avait priées de se dévouer
à l'œuvre des cercles catholiques et qu'elles
n'eussent point, à moins, ouvert leurs portes.
Puis, à la nomenclature des zélateurs et des
patronnesses, elles firent la moue, n'y trouvant
pas de blason à suffire, et tout en agrémentant
leurs assurances de sourires vinaigrés, elles se
dirent ravies de connaître les petites bourgeoi-
ses restées dans leurs bons principes.
Henriette devait vendre à la ducasse; mais
son père avait exigé qu'elle vînt se montrer à
la kermesse pour ne pas faire de tort à sa
réélection du conseil général et ne pas don-
ner, en se cachant, créance aux on-dit malveil-
lants.
Les deux fêtes avaient été fixées au 30 octo-
bre. Ce jour-là, vers midi, M. et Mme Sauvain
conduisirent leur fille ch'ez Mlles de Fourni-
quet. Depuis le matin, Mme Le Febvre était en
permanence sur le champ de bataille, présen-
tant aux deux jumelles les directeurs des ma-
rionnettes, les préposés aux petits chevaux, les
vendeuses, au fur et à mesure des entrées. Ba-
vot, chaudement appuyé par un grand-vicaire,
ne devait venir qu'à quatre heures, ayant jus-
que-là les repus à surveiller en jouant son
rôle de Décapité parlant. Il avait gardé le per-
sonnage du Déficit pour le moment où la foule
affluerait, donnant ainsi la préférence aux
malcontents; mais, en revanche, il avait com-
biné avec le repus l'exhibition de la tête cou-
pée de façon à attirer tous les visiteurs à la
kermesse dès le début de la journée, ce qui
en affirmerait immédiatement le succès.
Mlles de Fourniquet accueillirent les Sau-
vain avec l'impolitesse la plus noble. L'une
d'elles daigna interpeller Henriette « Petite,
vous vendez?. quoi? » L'autre, les coudes au
corps, les yeux vagues, saluait comme une
reine qui ne voit que des foules et pour qui l'in-
dividu n'existe pas; un salut qui est à la fois
un accueil et un congé.
Mme Le Febvre installa sa petite amie au
comptoir à thé. Les premiers visiteurs arrivaient
et, dans l'escalier monumental, les fourreaux
de sabre de la cavalerie battaient le rebord des
marches. Othon de Macqueville, Guignot du
Pigeonnier, une douzaine de hobereaux firent
leur entrée avec Saint-Sylvain et Pierre.
Qu'il était pâle, le pauvre Pierre, et comme
sous sa froideur de commande se cachait une
masse du pays, lettre morte. Les gouverne-
ments portent seuls le poids des erreurs
commises; jamais les minorités n'en seront
rendues responsables, quelque part qu'elles
y aient eue. L'opposition le sait bien. Elle se
fie là-dessus.
Aussi y a-t-il, dans le discours qu'a pro-
noncé hier le rapporteur général du budget,
toute une partie, et non la moins brillante,
qui ne gênera pas beaucoup les adversaires
de la République. M. Burdeau a eu la pa-
tience de récapituler toutes les augmenta-
tions de dépenses votées par les droites, les
dégrèvements décidés par elles, les proposi-
tions de dépenses nouvelles ou de dégrève-
ments supplémentaires émanées de leur ini-
tiative il a montré que jamais finances pu-
bliques n'avaient été en proie à plus d'insou-
ciance du lendemain. Rien de plus exact;
seulement qu'a fait la majorité? Qu'a-t-elle
su prévoir? Qu'a-t-elle su empêcher? De-
vant le pays, voilà les seules questions qui
importent; le reste n'est que vanité.
Les dépenses ordinaires de l'Etat ont été
sensiblement réduites dans ces dernières an-
nées c'est le point sur lequel on devrait in-
sister tout d'abord. La politique des écono-
mies est devenue une réalité. Qu'on se rap-
pelle le budget de M. Rouvier des réduc-
tions de dépenses furent décidées comme on
n'en avait pas encore vu jusqu'alors. Econo-
mies sur le papier? On l'avait soutenu. Mais
les faits ont répondu les crédits supplé-
mentaires, cette plaie des budgets d'autrefois,
ont à peu près disparu. Ainsi que l'a fait
remarquer M. Burdeau, c'est à peine s'ils
égalent maintenant les annulations de cré-
dits..De sorte qua, tout à la fois, on a réduit
Ies tfèpon ses effectives- et serré de plus près
les chiffres des dépenses utiles. Le budget
est-devenu plus sévère et plus vrai.
On'a, en même temps, fait rentrer dans le
budget ordinaire toutes les dépenses extraor-
dinaires, sauf celles de la guerre. En d'au-
tres termes, on paye à l'aide d'impôts ce qui
était imputé, auparavant, au compte de l'cm-
prunt ce qui équivaut à amortir immédiate-
ment ces dépenses. N'est-ce rien que cette
réforme? Si elle n'avait pas été accomplie,
les dépenses extraordinaires des travaux
publics et de la marine seraient alimentées
au moyen de ressources demandées à l'em-
pruntf le budget ordinaire serait allégé d'au-
tant les économies apparaîtraient beaucoup
mieux. Mais on voulut arrêter les emprunts;
l'opposition tient-elle compte de cet effort?
C'est le même esprit de prévoyance et de sa-
gesse qui fit conclure avec les grandes com-
pagnies de chemins de fer les conventions
de 1883 l'Etat a su enrayer et ses dépenses,
et ses emprunts. Voilà la vérité, dégagée de
tout parti pris.
Assurément, si l'on veut comparer le coût
des services publics en 1889 ou 1890 aux dé-
penses correspondantes de 1876, comme l'a
fait M. Amagat, on constate de nombreux
relèvements. Si M. Amagat avait daigné
faire remonter plus haut ses recherches his-
toriques, il eût abouti à des différences plus
marquées encore. M. Burdeau le lui a dit,
'et son observation restera. Que, dans les
augmentations survenues depuis 1876, il
'n'y ^it eu aucune dépense de luxe/aucun
frais superflu, ce n'est pas nous qui songe-
rons à le soutenir; le succès avec lequel ont
été réalisées les économies faites depuis deux
ans témoigne, dans une certaine mesure, de
l'exagération des dépenses antérieures. Mais
quelle a été la cause déterminante de la pro-
gression des dépenses publiques ? C'est cette
évolution générale de la richesse publique,
en vertu de laquelle toutes les valeurs se mo-
difient. Elle a été rarement plus marquée que
dans les années qui ont suivi l'avènement de
la République. Tous les petits traitements, ou
presque tous, sont devenus trop petits. Il a
fallu les relever pour conserver leur ancienne
proportionnalité dans l'ensemble du prix des
choses. C'était une nécessité bien plus éco-
nomique ou même sociale que politique. Il ne
dépendait pas du gouvernement de s'y sous-
traire. Tous les Etats, quelle que soit la for-
me de leur gouvernement, l'ont subie. M. Fé-
lix Faure, qui a consacré à cette question
une étude remarquable, a cité des chiffres
auxquels on ne répliquera rien.
D'autre part, si, depuis 1876, les dépenses
de l'Etat se sont accrues, avec quelles res-
sources la République a-t-elle donc fait face
è. ces inévitables accroissements de charges?
Quels impôts nouveaux a-t-elle donc créés ?
Des impôts? La République en a supprimé
pour trois cents millions. Ses dépenses nou-
velles, elle y a fait face par l'emploi des plus-
values produites par le développement nor-
mal de la richesse nationale.
Voilà ce qui, dans ce pays de bon sens,
frappera tous les esprits impartiaux. La Ré-
publique, dit l'opposition, c est la ruine, c'est
la misère. Et que répondent les faits? Ceci
émotion qui l'étranglait I C'était la première
fois qu'il allait revoir Henriette son regard
fouillait les groupes, il écrasait les pieds de
ses voisins, il accrochait ses éperons à mollet-
tes sans pointes dans de vénérables cotillons.
Saint-Sylvain lui soufflait à l'oreille
Tiens-toi donc, grosse bête c'est le cin-
quième acte.
Non je ne peux pas. je ne pourrai pas,
répétait Pierre; je suis ridicule. on me re-
garde. je vais tout gâter. adieu 1
Et avant que Saint-Sylvain fût revenu de sa
surprise, il disparut.
Guignot du Pigeonnier, qui, par principes, re-
tardait un peu sur son siècle, avisa M. Sau-
vain et, jouant des coudes, vint l'entretenir de
ce mariage dont chacun parlait. Saisissant le
marchand de bois par un bouton de sa redin-
gote, il l'entraîna dans un petit salon écarté,
où trônaient Mlles de Fourniquet,
Venez, mon cher, je veux m'en expliquer
avec vous devant ces demoiselles.
M. Sauvain s'attendait aux compliments or-
dinaires il préparait déjà sa réponse habituelle,
sa bonne réponse péremptoire qui mettait fin
aux congratulations mais le ton de Guignot le
dérouta. Celui-là ne le félicitait pas n'avait-il
donc point pris au sérieux la grande nouvelle ? 2
Et M. Sauvain, quoi qu'il en eût, éprouva une
sorte de dépit.
Guignot était fort apprécié des jumelles
comme possédant la confiance des princes.
Pour elles, il parlait d'or; aussi hochèrent-elles
le menton quand il leur dit, en montrant son
prisonnier:
Voici un traître.
Permettez, fit timidement M. Sauvain.
Un traître et je le répète. Lorsqu'on a vo-
tre situation, votre fortune, vos opinions, on
ne laisse pas faire un aussi sot mariage.
Les deux sœurs poussèrent un petit hennis-
sement approbatif.
Un aussi sot mariage, reprit Guignot le
galopin n'est même pas né.
Ah I permettez I
Il n'est pas né: laissez-lui prendre une fille
de rien. A quoi bon vos écus, si vous les jetez
à un Savarèze? A quoi bon vos opinions, si vos
écus n'aident pas la noblesse? Croyez-vous donc
que vous n'auriez pas plus d'honneur à faire
de votre fille une comtesse qu'une vilaine? 2
Permettez, sapristi!
Oh fi 1 il a juré, proférèrent les jumelles.
la ruine est si profonde, les souffrances sont
telles, que, malgré trois cents millions de.
dégrèvements, l'Etat peut subvenir sans im-
pôts nouveaux aux augmentations de dépen-
ses. Sous l'influence du krach, les'plus-va-
lues avaient temporairement disparu mais
les voici qui reparaissent, et porlant sur les
branches les plus diverses des recettes.
Reste le sophisme du déficit, prouvé par
l'existence des comptes parallèles au budget.
Nous l'avons, pour notre part, si souvent
percé à jour, que nous nous reprocherions
d'y revenir, au moins pour l'instant. Que l'on
daigne seulement considérer, pour en avoir
la valeur exacte, les écritures des sociétés
les plus honorables, les plus prospères, les
plus indiscutées qu'on prenne, par exem-
ple, la Compagnie du Nord elle aussi, elle
a des dépenses que ne couvrent pas ses re-
cettes d'exploitation peut-on raisonnable-
ment en conclure que son budget est en dé-
ficit et qu'elle distribue des dividendes fic-
tifs ? Voilà, pourtant, l'argument que l'oppo-
sition ressasse contre les finances républi-
caines dans tous ses discours, il se re-
trouve c'est son triomphe. Nous ne lui en
faisons pas nos compliments.
Elle aura beau faire l'évidence est plus
forte que tous les sophismes et que toutes
les passions. Le 3 0/0 français est aujour-
d'hui aux prix où la République a trouvé le
5 0/0 voilà ce que le régime actuel a fait du
crédit public. La rente française est aux plus
hauts prix qu'elle ait jamais atteints, et ces
prix sont la résultante des appréciations du
monde entier sur la situation des finances de
la France. Notre rente se négocie sur tous
les grands marchés; partout on peut en ven-
dre librement; que nos finances justifient la
centième partie des dires de l'opposition, et
l'on ne s'en fera pas faute. Elle est recher-
chée, cependant, et se rit de toutes ces atta-
ques. Nous ne voulons pas d'autre ven-
geance;
Le principal argument que font valoir les
républicains révisionnistes pour démontrer la
nécessité de changer la Constitution est que
celle-ci a été faite par des monarchistes pour
assurer le retour de la monarchie. C'est ce que
répète encore M. de Lanessan dans une lettre
adressée à un journal du matin pour justifier
la campagne de division et de dissidence répu-
blicaine récemment inaugurée à Mâcon, de
concert avec M. Millerand. « La Constitution
de 1875 est monarchique elle a été faite par
des monarchistes dans l'intérêt de la monar-
chie. » 11 y a longtemps que nous entendons ou
que nous'lisons cette « rengaine » mais, pour
avoir servi tour à tour à tous les intransi-
geants qui passent, elle n'en est pas devenue
plus juste ni plus vraie.
Pour savoir ce qu'il faut penser de cette af-
firmation véritablement usée aujourd'hui, il
suffit d'opposer à la lettre de M. de Lanessan
les récents articles de Y Autorité, dans lesquels
M. de Cassagnac énu-mérait avec beaucoup de
force et de logique les obstacles insurmonta-
bles et les délais nécessaires que, dans l'hypo-
thèse la plus favorable de deux triomphes suc-
cessifs des conservateurs aux élections législa-
tives, la Constitution républicaine opposait à
la- réalisation désespérances monarchiques. Il
calculait, en effet, qu'il fallait, au bas mot,
dix-huit mois pour que les monarchistes pus-
sent non pas mettre fin à la République, mais
la livrer- aux mains de M, Boulanger. Que M.
de Lanessan demande donc à M. de Cassa-
gnac et à ses amis impatients comme lui
s'ils estiment véritablement que la Constitu-
tion de 1875 a été faite par des monarchistes
dans l'intérêt de la monarchie. Croit-on sérieu-
sement que leur tâche de destruction ne serait
pas plus courte et plus facile, s'ils ne rencon-
traient pas devant eux un Sénat et un prési-
dent de la République chargés précisément,
aux heures de crise, de veiller au salut de
nos institutions libres! Ah que M. de Cassa-
gnac serait heureux de pouvoir, dès aujour-
d'hui, donner à la République une Constitution
autre que celle qu'elle a Comme il voudrait
bien n'avoir affaire qu'à une Chambre unique
et à un pouvoir exécutif décapité Ce n'est pas
dix-huit mois ni deux ou trois grandes victoi-
res électorales qu'il lui faudrait pour tout dé-
truire. Une seule lui suffirait. Tout serait fini
en vingt-quatre heures.
La vérité, c'est que la Constitution de 1875,
loin d'avoir été faite pour assurer la restaura-
tion d'un trône, a été faite, au contraire, avec
l'intention très consciente et très résolue de pré-
venir et d'empêcher, autant qu'une Constitution
le peut faire, le retour du pouvoir personnel et
les coups d'Etat. Tout a été calculé dans ce des-
sein la création d'une seconde Chambre, le
droit de dissolution, la nomination du chef du
pouvoir exécutif par le Congrès et non par le
suffrage universel immédiat, la responsabilité
ministérielle couvrant celle du président, tout
a été conçu et adopté pour donner à la Répu-
blique les moyens de pouvoir traverser des
temps de crise qu'il faut bien prévoir, sans y
sombrer tout entière. Les monarchistes con-
vaincus de l'Assemblée nationale ont voté con-
tre cette Constitution. Ce sont les républicains
qui l'ont fait triompher avec le concours des
libéraux parlementaires qui, ne pouvant faire
Mon cher, vous êtes peuple, continua
Guignot, je ne vous en fais point un crime, on
ne choisit pas ses parents.
Mlles de Fourniquet tressaillirent, Guignot
sourit dans sa barbe.
On ne choisit pas ses parents, mais on
choisit son gendre, et quand on est ce que
vous êtes.
On se paye au moins un petit vidame dé-
cavé, interrompit M. Sauvain qui s'échauffait.
Mon cher, prononça sèchement Guignot,
vous vous oubliez. Il se peut qu'un vidame
vous fasse l'honneur de rechercher votre al-
liance, quoique au fond je n'ose l'espérer.
pour vous. Quant à ce jeune homme, un Sava-
rèze tout court, c'est l'affaire d'un repu encom-
bré de filles laides à marier. Oui, il est bien
pensant: je sais, je sais, il a gagné cela dans
la fréquentation des personnes titrées, mais,
que diable il pue-la roture-. On consent par
grâce à recevoir ces garçons-là célibataires,
leur uniforme est leur blason, on fermera sa
porte au couple bourgeois.
M. Sauvain leva les épaules
Me prenez-vous pour un duc et pair et ma
femme pour une duchesse que vous consentez
à nous regarder, monsieur Guignot, et pensez-
vous que votre pigeonnier force la considéra-
tion des gens.
Mlles de Fourniquet s'enfuirent avec d'aigres
piaillements d'horreur. Guignot piqué, voyant
qu'on commençait à faire cercle, essaya sans
succès d'arrêter le marchand de bois qui conti-
nua du haut de sa tête
-Parbleu, vous m'amusez, Guignot, on ju-
rerait à vous écouter que vos aïeux furent aux
Croisades.
Certes oui, et j'en ai la preuve.
Ils étaient dans les infirmiers, murmura
une voix à l'oreille de M. Sauvain.
Celui-ci se retourna et reconnut Saint-Syl-
vain, il lui saisit le poignet.
Dites-nous, monsieur de Saint-Sylvain, si
votre ami Savarèze n'est pas aussi gentilhomme
que n'importe qui.
Plus que beaucoup, répondit l'officier en
saluant le fils des Croisés.
Dites-nous s'il n'a pas autant de cœur
qu'un baron.
-Bien davantage, et sans peine, puisque les
barons sont tous banquiers.
N'est-il pas aimé, apprécié, estimé de
ceux qui le connaissent t
là monarchie, ont voulu du moins sauver danif
ce pays les principes essentiels de tout gouver-:
nement libre.
Aussi bien voyons-nous sans surprise tour
ceux qui veulent détruire la République ou met-
tre la main sur elle s'unir contre cette consti-
tution qui rend véritablement la citadelle im-
prenable et en demander la revision immé-
diate. Boulangistes, royalistes, bonapartistes
sont dans leur rôle. Ceux qui n'y sont pas et
nous étonnent toujours, ce sont des républi-
cains sincères et libéraux, comme M. de Lanes-
san, qui croient de bonne politique, à l'heure
actuelle, de joindre leurs efforts aux leurs et de
travailler au démantèlement de la forteresse
pour en rendre l'accès plus facile aux ennemis
qui l'assiègent.
,fT~
LA LOI SUR 1/ ARMÉE AU SÉNAT
Les vingt-deux premiers articles de la loi sur
le recrutement ont été votés dans la séance
d'hier. Le Sénat a rejeté l'adjonction au con-
seil de revision d'un capitaine « pris dans une
autre arme que celle d'où provient le comman-
dant de recrutement » et cela pour de bonnes
raisons la compétence du capitaine en matière
d'aptitudes physiques est fort discutable, l'avis
du médecin militaire suffit à éclairer le conseil
de revision, enfin cette innovation entraînerait
une dépense supplémentaire estimée par le mi-
nistre de la guerre à 80,000 fr. La modification
apportée au texte originel du projet de la
Chambre n'était vraiment pas heureuse. La
Chambre le comprendra et ratifiera la décision
du Sénat.
La discussion sur l'article relatif aux dispen<
ses a occupé la meilleure partie de la séance.
L'intervention de M. le ministre de l'intérieur,
à défaut de celle de M. le ministre de la guerre.
lié par des déclarations antérieures alors qu'il,
était président de la commission sénatoriale,
était annoncée des la veille. Il ne fallait pas,
pour cela, s'atténdre à la production de nou-
veaux éléments d'appréciation. Tout a été dit
sur la question des dispenses de droit et il ne
pouvait se faire que des redites. M. Constans a
compris, il est vrai, l'impossibilité d'échapper
à cette situation. Aussi s'est-il efforcé, dès le
début, de sortir du domaine technique et de
se placer sur le terrain politique. Il a soutenu
cette thèse que la Chambre avait fait un pre-
mier pas dans la voie de la conciliation en ac-
cordant la division du contingent en deux por.
tions et que le Sénat devait faire l'autre. en re-
nonçant aux dispenses de droit. On lui a objecté
que la concession première venait du Sénat qui
avait admis le principe du service effectif pour
tous et transformé ladispenseentière en dispensa
relative. Il a été contraint par cette réplique à se
renfermer dans la discussion du principe môme
des dispenses de droit. Nous avons donc enten-
du rééditer avec talent l'historiette du fils de
veuve riche se livrant aux débordements de ses
passions, doublant le chagrin de sa mère, avec
l'inévitable comparaison de la vertu du jeune
pauvre, soutien effectif de sa mère abandon-
née. Après le ministre, un orateur a renchéri
sur le thème de rigueur et affirmé qne presque
tous les fils de veuves riches tournaient mal.
A ce compte, il faudrait classer le paupérisme
parmi les éléments de civilisation et de mora-
lisation. C'est une thèse un peu fantaisiste l
Il est à remarquer que tous les orateurs op-
posés au maintien des dispenses de droit, lors-
qu'ils ont abordé le côté moral, n'ont pas man-
qué de perdre de vue le. motif et la cause de la
dispense. Le sophisme aurait-il les mêmes con-
séquences que le vertige ? C'est à le croire.
Car le dernier paragraphe de l'art. 21 ne per-
met pas d'équivoque sur l'intention du législa-
teur. Il est stipulé dans ce paragraphe que la
dispense n'est pas accordée aux enfants illégi-
times, ce qui prouve surabondamment que la
dispense est accordée à la famille et non à l'ap-
pelé. S'il en était autrement, l'exception ne se-
rait pas maintenue, les enfants illégitimes
étant absolument irresponsables des condi-
tions de leur naissance.
M. le rapporteur de la commission sénato-
riale aurait probablement circonscrit le débat
dans des limites plus étroites s'il avait particu-
lièrement insisté sur la difficulté, au point de
vue pratique, de renoncer au maintien des dis-
penses de droit. Tous les ans, de 40 à 45,000
jeunes gens bénéficient de la dispense en vertu
de l'article 17 de la loi de 1872. Cette donnée sta-
tistique a sa valeur. Admettons en effet et
nous serons larges que 33 0/0 de cette caté-
gorie d'appelés soient dans une position de for-
tune ne rendant pas indispensable leur pré-
sence-au foyer familial, le conseil de revision
aurait inévitablement à instruire 30,000 deman-
des La nouvelle loi accordant la dispense con-
ditionnelle à 5 0/0 du contingent incorporé, il
aurait, de ce chef, 7 à 8,000 autres dossiers à
examiner. Son travail serait quintuplé. Le con-
seil de revision ne pourrait faire face a pareille
besogne sans subir de profondes modifications.
Le Sénat a donc fait preuve de sens pratique
en se refusant à sacrifier l'article 21 à la de-
mande de M. le ministre de l'intérieur. Il a
fait preuve de sollicitude à l'égard des humbles
en prenant en considération un amendement
de M. de Carné sur l'article 22 ayant pour ob-
jet d'élever de 1 à 2 0/0 le chiffre des dispenses
à accorder aux soutiens de famille après la se-
conde année de service.
En somme, très bonne séance et dont les ré-
sultats sont acquis, l'urgence ayant été votéo
au début de la séance.
De tous. sauf des sots ou des entêtés.
-Vous auriez une fille, la lui donneriez-
vous ?
Oh! pas à lui, je la garde pour son fils,
c'est déjà entendu.
-Ne fait-il pas aussi bonne figure dans le
monde qu'un vicomte de pacotille?
Meilleure figure, monsieur Sauvain, car il
est simple comme un vrai prince.
A-t-il un nom vulgaire et inacceptable?
Peuh 1 Xaintrailles s'appelait Poton, c'est
bien pis.
Alors, laissez-nous tranquilles, dit Gui-
gnot, et faites à votre tête. Vous n'êtes qu'ur.
repu et tout l'honneur sera pour vous s'il veut
bien épouser votre fille.
Les hobereaux, aux écoutes, éclatèrent de
rire à la porte du peti salon.
S'il veut bien. s'il veut bien, bégaya M.
Sauvain, c'est-à-dire si je consens.
Et vous consentiriez à une pareille vilenie,
interrompit le plus bête et le plus marmiteux
des gentillâtres, cela sentirait l'épicier et l'hom-
me de peu.
Il se fit un grand silence, et M. Sauvain, très
pâle, articula lentement
J'y consens, et je vous devrai mon gendre,
messieurs.
Alors s'éleva un bourdonnement, un brou-
haha qui vint troubler Henriette et sa mère au
comptoir à thé, pendant qu'avec un tapage de
ferraille tout à fait martial Saint-Sylvain se pré-
cipitait dans l'escalier.
La famille Sauvain opéra sa retraite digne-
ment et en bon ordre sous un feu croisé de ro-
gards dédaigneux. Le marchand de bois du
Nord se rendit seul à la préfecture pour excu-
ser l'absence de sa femme et de sa fille. Le soir
Mme Le Febvre vint officiellement demander
pour Pierre la main d'Henriette; elle annonça
aussi sa démission de présidente des malcon-
tents et l'avènement au fauteuil de Mllellermi-
nie de Fourniquet.
Mlle Pétronille, dégelant à l'improvistc, avait
si chaudement félicité Guignot, lui avait fait dd
telles déclarations d'estime, de sympathie et
û'affection qu'on avait tiré de là toutes sortes
de* co\?cms'ons extraordinaires.
:̃̃̃ '«H/ ̃̃̃̃'• ̃ ̃̃
<• ̃̃̃ HENRI ALLAIS.
SAMEDI 18 MAI 1889.
VINGT-NEUVIEME ANNEE. N" 10239.
̃PRiX DE L'ABOIEMENT
PARIS Trois mois, 1
LES A1JQ?Î!\EMENTS DATENT DES ier ET 16 DE CHAQUE MOIS
\Jxx numéro (départements) 2O centimes.
ANNONCES MM. Lagramge, CERF ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
Adresse télégraphique TEMPS PARIS • .̃
PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS..7. Trois mois> *4fr- Six mois, 258 fr. Un an, 56 fr.
DÉ1»* 4 ALSACE-LORRAINE lTtr.; 34 fr.; 68 fr.
UHION POSTALE lSfr.; 36 fr.; 72^.
LES ABOKNEMÉNTS DATENT UES 1" ET 16 DE CHAQUE MOIS
Un numéro (à 3Paris) lo centimes.
Directeur politique Adrien Hébrard
La rédaction ne répond pas des articles communiqués
w BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS V
Adresse télégraphique TEMPS PABIS
PARIS, 17 MAI
BULLETIN DU JOUR
Les deux Chambres ont siégé hier. Le Sé-
nàt a abordé la discussion de la loi sur le re-
crutement de l'armée qui lui est revenue de
la Chambre avec des modifications graves.
Après avoir prononcé l'urgence, il a, sur
l'article 21, par 157 voix contre 79, maintenu,
malgré M. Constans, ministre de l'intérieur,
le système des dispenses de droit, contraire-
ment au vote de la Chambre qui a rejeté les
exonérations de jure.
La Chambre a continué la discussion gé-
nérale du budget de 1890 et entendu la fin du
discours de M. Amagat et la réponse de
M. Burdeau, rapporteur général.
L'Exposition continue à préoccuper assez
vivement les pays étrangers. En Allemagne,
on discute fort et ferme sur la participation
de certains artistes, sujets de Guillaume II,
qui ont envoyé au Champ de Mars toiles et
statues.
Une feuille officieuse, les Nouvelles politi-
ques de Berlin, s'est donné pour tâche de trai-
tera fond ce sujet. Prenant à partie la Gazelle
nationale, qui avait déclaré que les artistes al-
lemands obéissaient à un instinct légitime
en quêtant des récompenses françaises qui
leur ouvriraient des marchés nouveaux
«Egoïsme naturel, s'écrie ce journal dans un
bel élan d'idéalisme désintéressé, nous appe-
lons cela un impudent amour du gain »
^^Puis il déclare que l'Allemagne n'a pas à
suivre l'exemple des autres- nations sur ce
point, et cela, nous cueillons au passage
cette fleur de bienveillance et de justice teu-
tones, parce que ces autres peuples « ont
été accueillis généralement, sinon toujours,
par la France avec courtoisie, voire avec cor-
dialité, tandis que l'on ne saurait où trouver,
non pas même un Allemand, mais simple-
ment une œuvre allemande qui, depuis vingt
ans, ait été traitée en France avec justice,
sans parler de bon vouloir ».
Cette phrase est typique. La presse d'ou-
tre-Rhin se crée une France de fantaisie,
puis elle l'attaque avec fureur. Prétendre
qu'il n'est pas d'oeuvre allemande qui ait
reçu depuis vingt ans en France un accueil
bienveillant ou même juste, c'est fausser de
parti pris la réalité.
L'érudition française, reconstituée depuis
vingt ans, toute pénétrée des méthodes scien-
tifiques modernes qu'elle marie aux qualités
lumineuses de notre langue et de notre race,
a fait largement leur part dans tous les do-
maines aux maîtres de l'érudition allemande.
Pas une oeuvre essentielle, non pas même
un mémoire important ne parait dans les pu-
blications de la librairie allemande, dans les
revues, voire dans les programmes des uni-
versités, des gymnases ou des Realschulen.,
qu'il ne soit signalé, analysé, commenté.
En fait d'art, il plaît auxchauvins allemands
de ne parler que des manifestations ridicules
de la rue contre Wagner ils ne tiennent nul
compte du fait que nulle part le fanatisme
wagnérien ne s'est plus propagé qu'ici,
qu'une école littéraire qui prétend, à en croire
le manifeste de l'un des siens, être la Littéra-?
titre de tout à l'heure, invoque le maitre de
Bayreuth comme l'un de ses dieux et qu'une
Revue même porte ce nom soi-disaot honni.
Les Nouvelles de Berlin tâchent dft faire
peur à MM. Liebermann, Kûhl, Frédéric de
Uhde, au comte de Kalkreuth de l'accueil
qui les attend chez les « Welches barbares ».
Un coup d'ceil jeté sur les critiques du Salon
déjà parues leur auraient appris avec quelle
générosité d'appréciation l'œuvre de M. de
Uhde, par exemple, a été saluée en France.
Il fut un temps où la muraille dé Chine
d'un chauvinisme béat et ignorant séparait
la France ou du moins une partie de la
France du reste du monde intellectuel.
Aujourd'hui, au contraire, si la France court
un danger, c'est de se laisser trop envahir,
c'est de trop livrer à tous les vents de doctri-
ne et d'art son génie clair, radieux et pur.
L'Allemagne, enivrée de sa fortune militaire,
risque fort, par compensation, d'échanger le
cosmopolitisme intellectuel des Gœthe, des
Schiller, des Humboldt et des Schopenhauer
contre les dédains ignorants d'un panteuto-
nisme étroit. L'attitude d'une partie de la
presse prussienne à propos de l'Exposition
montre assez que ce danger n'est pas chi-
mérique..
M. John Morley n'«st pas seulement le
lieutenant de M. Gladstone. C'est un homme
de lettres éminent, dont les études sur le
dix-huitième siècle français sont des œuvres
du premier mérite.
Il lui appartenait, au double titre de libéral
ïFjEmjLJLjaxoiv ou «TEMPë»;
DU 18 MAI 1889 [13]
1 1 1
UN CASQUE
̃̃-̃̃•• X– (Suite.)
Il fallut donc chercher ailleurs. L'hôtel de
l'avenue Blaise Pascal avait abrité déjà tant de
réunions dévotes et mondaines, que la prési-
dente des malcontents s'était vue contrainte de
remplacer deux fois le tapis de son escalier,
sali comme un paillasson de ministère. Elle en
avait assez, redoutait pour ses aubussons les
fondants écrasés, le punch répandu, et procla-
mait qu'en livrant encore sa maison elle sem-
blerait confisquer à son profit les mérites des
âmes charitables.
Bavot s'arrachait les cheveux, quand Mlles
ûeFourniquet se décidèrent à offrir leurs salons,
leurs grands salons Louis XIV en enfilade, où
des portraits emperruqués garnissaient les
panneaux.
Et sous l'œil des cavaliers à feutres gris, des
parlementaires rébarbatifs, des beaux sei-
gneurs galants, les pupazzi, les paniers de la
pêche au son, les roues de loterie, les comp-
toirs à thé et à champagne s'installèrent. Au
milien de ces apprêts bruyants, Mlles Herminie
et Pctronille de Fourniquet circulaient à pas
comptés. Elles s'avançaient, revêches et majes-
tueuses comme une paire de grands carros-
siers enrênés trop court. Tout Mauves les con-
naissait, et les vieillards se souvenaient encore
d'un père Fourniquet très avare qui avait ja-
dis servi dans les écuries du comte de Pro-
vonce. FI avait émigré avec les coffres à avoine
de Son Altesse; il avait épousé, de l'autre côté
du Rhin, la neuvième fille d'un garde-chasse et,
PcpioductJcn Jnto«iite.
et de littérateur également distingué, de pro-
noncer le jugement, au nom de l'Angleterre
moderne, sur l'attitude maussade que lord
Salisbury a cru devoir adopter à l'égard du
centenaire de la Révolution française. C'est
ce qu'il a fait avant-hier soir, au début d'un
éloquent discours prononcé à Shoreditch.
Nous nous reprocherions de ne pas met-
tre sous les yeux de nos lecteurs ce passage
réconfortant:
« J'espère, a dit M. Morley, qu'il n'a pas
échappé à votre attention, que l'ambassadeur
anglais a été rappelé de Paris de peur qu'on
ne pût croire qu'il sympathisait avec la Ré-
volution française. Je ne crois pas que jamais
acte de folie plus énorme ait été commis. Il y
a cent ans que, commo l'a dit un de nos poè-
tes « La France, dans son courroux a re-
» dressé sa taille géante, Et avec un ser-
» ment qui a retenti sur la terre, dans l'air et
» dans la mer, A frappé le sol de son pied
» et juré qu'elle serait libre. »
« II est heureux pour l'Europe qu'elle l'ait
fait. »
« Etmaintenantnotregouvernements'ima-
gine qu'il peut traiter de haut en bas {snub)
la Révolution française!. Eh bien, Napoléon
Bonaparte n'a pas eu beaucoup de nobles
paroles il en a eu beaucoup d'ignobles
mais quand un traité lui a été soumis qui
contenait une clause reconnaissant la Répu-
blique française, il a dit cette noble parole
« Effacez cet article. Qui ne voit pas la Répu-
» blique française est comme qui ne voit pas
» le soleil! » Et il en est ainsi encore aujour-
d'hui. »
«Il est particulièrement étrange de voir te-
nir cette conduite, alors que George III et
M. Pitt, qui étaient de leur temps des tories
passablement convaincus, n'ont jamais songé
à croire que les événements de 1789 méritas-
sent condamnation. N'est-ce pas une chose
honteuse que notre gouvernement se soit
abaissé à cet acte mesquin par complaisance,
je suppose, pour le prince de Bismarck?
»Si ces représailles historiques deviennent
l'usage, l'empereur d'Allemagne aura un
casiis belli contre nous, parce que nos ancê-
tres ont décapité Charles Ier. »
Voilà un langage qui va droit au cœur de
la démocratie française.
̃gi*,
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps
Vienne, 17 mai, 8 h. 15.
Le prince de Montenegro, se rendant à Péters-
bourg avec le prince héritier, s'est arrêté ici.
Ils se sont rendus, hier après midi, au cloître des
Capucins pour déposer une couronne sur la tombe
do l'archiduc Rodolphe.
Le prince Nicolas a reçu la visite du comte Kal-
noky et la lui a rendue au ministère des affaires
étrangères, où il est resté une demi-heure.
Aujourd'hui, le prince et son fils dîneront à
Schœnbrunn, chez l'empereur, en compagnie du
roi et de la reine de Danemark.
Vienne, 17 mai, 8 h. 35.
Dans la séance tenue hier à la Chambre des dé-
putés du Reichsj-ath, le comte Taaffe a répondu en
bloc aux différentes interpellations qui lui avaient
été adressées sur le congrès catholique, l'attitude
du gouvernement dans la grève des tramways et
l'antisémitisme.
..Voici le texte môme de la réponse du président
du ministère autrichien à l'interpellation relative à
la politique gouvernementale en présence du mou-
vement catholique
Le gouvernement n'avait aucune raison de faire des
déclarations ou de donner des explications à l'occa-
sion du congrès des catholiques, auquel n'ont assisté
que les personnes invitées, où il n'y avait pas, par
conséquent, de représentant du gouvernement et dont
les résolutions et en particulier la dépêche au pape
revendiquant pour le Saint-Siège le pouvoir temporel
n'ont été connues du gouvernement que par la voie
des journaux.
Le prince Liechtenstein C'est exact 1
Les personnes qui ont participé à ce congrès, re-
prend le comte Taaffe, n'ont, en eft'et, fait usage que
du droit d'exprimer librement leur opinion, qui leur
est garanti par les lois; le gouvernement n'a aucune
prise sur ces opinions.
D'autre part, les discours tenus dans une réunion
privée ne peuvent avoir aucune influence sur la poli-
tique extérieure de l'empire austro-hongrois, laquelle
n'est guidée que par le soin des intérêts do la monar-
chie.
En ce qui concerne, en particulier, nos relations
d'étroite amitié avec l'Italie, le ministre des affaires
étrangères responsable les a fait connaître à plu-
sieurs reprises et en lieu convenable, de manière à
dissiper tous les doutes.
Au sujet de la grève des tramways, le comte
Taaffe a raconté que le gouvernement s'est efforcé,
dès le début du mouvement, d'établir une entente
entre le personnel et la compagnie, mais qu'il a
trouvé si peu d'empressement auprès de la compa-
gnie qu'il a dû la menacer de la déchéance et de la
mise sous séquestre .de son matériel, si elle ne pré-
parait pas un nouveau règlement limitant la durée
des heures de travail et réglant la situation du per-
sonnel au point de vue de la caisse des retraites.
En réponse aux assertions contenues dans l'in-
terpellation de M. Vergani et relatives à la con-
v^rs 1815, était revenu au pays natal. Le roi
ayant négligé de récompenser son dévoue-
ment, il s'était tranquillement anobli de son
chef; puis, après qu'il eut, en 1829, marié M.
Florimond de Fourniquet à Mlle Prudence Pi-
gache, héritière d'un acquéreur de biens natio-
naux, il s'endormit dans le Seigneur et prit le
chemin du séjour bienheureux réservé aux
palefreniers des rois légitimes.
Mlles de Fourniquet naquirent, jumelles, de
l'union de Florimond et de Prudence; le jour
de leur entrée dans le monde soufflait une
aigre bise de mars, et leur premier cri ressem-
bla à un grincement. Elles crûrent en âpreté
et en sagesse, enterrèrent comme il convient
leurs nobles parents et commencèrent une exi-
stence digne de l'illustration de leur race. Elles
ne se marièrent pas, car il ne restaitqu'un Mont-
morency et, pour lui éviter l'embarras du choix,
elles ne le firent point solliciter. Elles avaient
trouvé dans la succession une vaste maison louée
àunépicierengros: elles en expulsèrent, moyen-
nant un royal dédit, les denrées coloniales et
la firent tapisser d'aïeux triés sur le volet;
ceux-ci, avec la philosophie ordinaire des por-
traits d'ancêtres, ne parurent point trop sur-
pris de se voir assemblés chez les petites-filles
du père Fourniquet. Elles donnèrent une ver-
rière à leur paroisse, firent célébrer chaque an-
née, le 16 septembre, une messe pour le repos
de l'âme de Louis XVIII, et, en toute occasion,
elles ne manquèrent point de témoigner au
Dieu de leurs pères la considération la plus dis-
tinguée.
Mais si le Créateur n'avait qu'à se louer de
leurs procédés, il en était autrement des créa-
tures, Peu de gens pouvaient se vanter d'avoir
obtenu une de ces révérences cérémonieuses
dont elles possédaient le secret. Généralement
elles vous tournaient le dos avec une majesté
suprême, ou bien vous détaillaient des bottes
au chapeau. Mauves en était fier comme Rouen
de la Gargouille, comme Tarascon de la Taras-
que.
Mme Le Febvre, si enchantée qu'elle fût de
loger sa ducasse, ne pouvait se défendre d'un
sentiment de terreur à la pensée de cette inva-
sion de profanes dans le sanctuaire. Elle re-
doutait vaguement quelque cataclysme et
qu au contact de la « cohue », comme les deux
sœurs appelaient la société de Mauves, il ne se
produisît un éclat.
Cependant elles en usèrent avec la présidente
duite du gouvernement envers les antisémites, le
président du conseil déclare que le gouvernement
accorde la môme protection à toutes les confessions
religieuses reconnues par la loi, et qu'il s'opposera `
énergiquement à toute tentative contraire à ce prin-
cipe.
Au reste, ajoute le comte Taaffe, il appartient aux
citoyens de se montrer une déférence et une tolé-
rance réciproques, lorsqu'ils sont séparés par des di-
vergences de vues sur le terrain de la religion ou sur
celui de la politique; c'est ce que réclame notre état
de civilisation.
Les déclarations du comte Taaffe démentant toute,
complaisance à l'égard des antisémites ont été ac-
cueillies avec faveur par les fractions libérales.
La Chambre des députés du Réichsrath s'est sé-
parée jusqu'à l'automne, après avoir nommé les
membres de la Délégation autrichienne.
Rome, 17 mai, 9 h. 40.
M. Imbriani a demandé à interpeller M. Crispi
sur la conduite du consul italien à Trieste, qui se
montrerait plus Autrichien qu'Italien. M. Piccoli,
président du conseil des notaires à Trieste, ayant
eu occasion ces jours derniers d'aller au consulat,
fit, dans une conversation absolument privée, des
déclarations de dévouement à la cause italienne,
ajoutant que tous les notaires triestins avaient les
mômes sentiments. Deux jours après, M. Piccoli
fut appelé au tribunal, recevait de vifs reproches
et était menacé d'un procès en haute trahison. Le
président lui montra un rapport du consul italien
racontant toute sa conversation. C'est sur ces faits
que M. Imbriani interpelle le ministre.
Le ministre de la guerre a décidé qu'on rempla-
cerait les grandes manœuvres de l'automne par un
essai de mobilisation de 100,000 hommes de la mi-
lice mobile. Jusqu'à présent, les soldats de la milice
mobile étaient simplement enrôlés dans les régi-
ments actifs. Cette année, ils devront former des
bataillons et des régiments spéciaux. La dépense
prévue est de 10 millions.
Madrid, 17 mai, 9 heures. -•»•
Avant la séance, hier, M. Sagasta alla trouver M.
Martos, le président de la Chambre, qui ne lui dis-
simula pas ses ressentiments contre plusieurs mi-
nistres ni son intention d'appuyer l'impôt sur la
rente et les propositions protectionnistes. M. Mar-
tos veut forcer M. Sagasta à se retirer et à lui lais-
ser la direction du parti libéral. Mais, hier, au pa-
lais, dans son entrevue avec la reine, M. Sagasta
a reçu une nouvelle assurance qu'il avait la con-
fiance de la souveraine, qui semble disposée à le
soutenir jusqu'au moment où les divisions du parti
libéral la forceraient à appeler M. Canovas et les
conservateurs, selon la pratique constitutionnelle.
Beaucoup de libéraux pensent que la dissolution
des Cortôs serait l'unique remède capable de faire
cesser les divisions des libéraux.
Madrid, 17 mai, 9 h. 30.
Hier, à la séance de la Chambre, M. Gamazo, le
chef des libéraux protectionnistes, a exposé l'oppor-
tunité de l'élévation des droits sur les céréales
étrangères et la réduction des impôts pesant sur
l'agriculture. Il croit qu'il est urgent de créer un im-
pôt sur le revenu et sur les coupons de la dette de
l'Etat. Il a terminé en déclarant que son opinion
était partagée par MM. Cassola, Lopez Domin-
guez, Navarro Rodrigo, Montero Rios, Alonso Mar-
tinez.
Le ministre des finances a repoussé l'élévation
des tarifs sur les blés et l'établissement d'un impôt
sur les coupons de la dette.
M. Canovas est intervenu dans le débat et a dé-
claré que les conservateurs, en principe, étaient
partisans d'un impôt sur le revenu et d'un impôt
sur les coupons de la dette « Ces idées font, a-t-il
dit, partie de la politique financière et économique
des protectionnistes, opposée entièrement à. cellede
M. Sagasta. » (Seruice IlauasJ w
(Service Ilavas)
Alger, 17 mai.
A!g;er, 17 mai.
Le conseil général d'Alger a voté un crédit de 10,000
francs destiné a subventionner- les délégations ou-
vrières qui se rendent à l'Exposition universelle.
i^aa–
La critique des finances de la République
n'a pas, jusqu'à présent, inspiré des considé-
rations bien nouvelles à l'opposition. A part
l'amusant paradoxe de M. de Lamarzelle sur
l'état florissant du Trésor royal à la veille de
la Révolution, on ne nous a guère servi que
les redites habituelles le pays est accablé
d'impôts; le budget est en déficit de cinq à
six cents millions; les dépenses ont été aug-
mentées d'une façon effroyable; la Républi-
que ne vit que d'emprunts et d'expédients;
bref, ce régime est l'abomination de la déso-
lation. Conclusion que les électeurs le chan-
gent au plus vite!
Il est une réplique toute naturelle, nous
en convenons qui ne manque jamais c'est
celle-ci l'opposition est mal venue à se
plaindre l'acte d'accusation, qu'elle prétend
dresser, se retourne contre elle; il n'est pas
une dépense, pas un emprunt, pas une sup-
pression de recettes, qu'elle n'ait votés; la
situation financière actuelle est son œuvre,
tout autant que celle des républicains. Nous
disons que cette réplique est toute naturelle
et même on ne peut se défendre d'une cer-
taine indignation contre ces gens qui se dra-
pent dans leur vertu farouche et qui se sont
faits les complices de tous les actes qu'ils
signalent aujourd'hui comme des fautes.
Mais qu'on ne se fasse pas d'illusion si, à
la tribune de la Chambre, une telle réponse
est d'un effet certain, elle demeure, pour la
des malcontents de la façon la plus courtoise,
se bornant à lui faire remarquer que Monsei-
gneur lui-même les avait priées de se dévouer
à l'œuvre des cercles catholiques et qu'elles
n'eussent point, à moins, ouvert leurs portes.
Puis, à la nomenclature des zélateurs et des
patronnesses, elles firent la moue, n'y trouvant
pas de blason à suffire, et tout en agrémentant
leurs assurances de sourires vinaigrés, elles se
dirent ravies de connaître les petites bourgeoi-
ses restées dans leurs bons principes.
Henriette devait vendre à la ducasse; mais
son père avait exigé qu'elle vînt se montrer à
la kermesse pour ne pas faire de tort à sa
réélection du conseil général et ne pas don-
ner, en se cachant, créance aux on-dit malveil-
lants.
Les deux fêtes avaient été fixées au 30 octo-
bre. Ce jour-là, vers midi, M. et Mme Sauvain
conduisirent leur fille ch'ez Mlles de Fourni-
quet. Depuis le matin, Mme Le Febvre était en
permanence sur le champ de bataille, présen-
tant aux deux jumelles les directeurs des ma-
rionnettes, les préposés aux petits chevaux, les
vendeuses, au fur et à mesure des entrées. Ba-
vot, chaudement appuyé par un grand-vicaire,
ne devait venir qu'à quatre heures, ayant jus-
que-là les repus à surveiller en jouant son
rôle de Décapité parlant. Il avait gardé le per-
sonnage du Déficit pour le moment où la foule
affluerait, donnant ainsi la préférence aux
malcontents; mais, en revanche, il avait com-
biné avec le repus l'exhibition de la tête cou-
pée de façon à attirer tous les visiteurs à la
kermesse dès le début de la journée, ce qui
en affirmerait immédiatement le succès.
Mlles de Fourniquet accueillirent les Sau-
vain avec l'impolitesse la plus noble. L'une
d'elles daigna interpeller Henriette « Petite,
vous vendez?. quoi? » L'autre, les coudes au
corps, les yeux vagues, saluait comme une
reine qui ne voit que des foules et pour qui l'in-
dividu n'existe pas; un salut qui est à la fois
un accueil et un congé.
Mme Le Febvre installa sa petite amie au
comptoir à thé. Les premiers visiteurs arrivaient
et, dans l'escalier monumental, les fourreaux
de sabre de la cavalerie battaient le rebord des
marches. Othon de Macqueville, Guignot du
Pigeonnier, une douzaine de hobereaux firent
leur entrée avec Saint-Sylvain et Pierre.
Qu'il était pâle, le pauvre Pierre, et comme
sous sa froideur de commande se cachait une
masse du pays, lettre morte. Les gouverne-
ments portent seuls le poids des erreurs
commises; jamais les minorités n'en seront
rendues responsables, quelque part qu'elles
y aient eue. L'opposition le sait bien. Elle se
fie là-dessus.
Aussi y a-t-il, dans le discours qu'a pro-
noncé hier le rapporteur général du budget,
toute une partie, et non la moins brillante,
qui ne gênera pas beaucoup les adversaires
de la République. M. Burdeau a eu la pa-
tience de récapituler toutes les augmenta-
tions de dépenses votées par les droites, les
dégrèvements décidés par elles, les proposi-
tions de dépenses nouvelles ou de dégrève-
ments supplémentaires émanées de leur ini-
tiative il a montré que jamais finances pu-
bliques n'avaient été en proie à plus d'insou-
ciance du lendemain. Rien de plus exact;
seulement qu'a fait la majorité? Qu'a-t-elle
su prévoir? Qu'a-t-elle su empêcher? De-
vant le pays, voilà les seules questions qui
importent; le reste n'est que vanité.
Les dépenses ordinaires de l'Etat ont été
sensiblement réduites dans ces dernières an-
nées c'est le point sur lequel on devrait in-
sister tout d'abord. La politique des écono-
mies est devenue une réalité. Qu'on se rap-
pelle le budget de M. Rouvier des réduc-
tions de dépenses furent décidées comme on
n'en avait pas encore vu jusqu'alors. Econo-
mies sur le papier? On l'avait soutenu. Mais
les faits ont répondu les crédits supplé-
mentaires, cette plaie des budgets d'autrefois,
ont à peu près disparu. Ainsi que l'a fait
remarquer M. Burdeau, c'est à peine s'ils
égalent maintenant les annulations de cré-
dits..De sorte qua, tout à la fois, on a réduit
Ies tfèpon ses effectives- et serré de plus près
les chiffres des dépenses utiles. Le budget
est-devenu plus sévère et plus vrai.
On'a, en même temps, fait rentrer dans le
budget ordinaire toutes les dépenses extraor-
dinaires, sauf celles de la guerre. En d'au-
tres termes, on paye à l'aide d'impôts ce qui
était imputé, auparavant, au compte de l'cm-
prunt ce qui équivaut à amortir immédiate-
ment ces dépenses. N'est-ce rien que cette
réforme? Si elle n'avait pas été accomplie,
les dépenses extraordinaires des travaux
publics et de la marine seraient alimentées
au moyen de ressources demandées à l'em-
pruntf le budget ordinaire serait allégé d'au-
tant les économies apparaîtraient beaucoup
mieux. Mais on voulut arrêter les emprunts;
l'opposition tient-elle compte de cet effort?
C'est le même esprit de prévoyance et de sa-
gesse qui fit conclure avec les grandes com-
pagnies de chemins de fer les conventions
de 1883 l'Etat a su enrayer et ses dépenses,
et ses emprunts. Voilà la vérité, dégagée de
tout parti pris.
Assurément, si l'on veut comparer le coût
des services publics en 1889 ou 1890 aux dé-
penses correspondantes de 1876, comme l'a
fait M. Amagat, on constate de nombreux
relèvements. Si M. Amagat avait daigné
faire remonter plus haut ses recherches his-
toriques, il eût abouti à des différences plus
marquées encore. M. Burdeau le lui a dit,
'et son observation restera. Que, dans les
augmentations survenues depuis 1876, il
'n'y ^it eu aucune dépense de luxe/aucun
frais superflu, ce n'est pas nous qui songe-
rons à le soutenir; le succès avec lequel ont
été réalisées les économies faites depuis deux
ans témoigne, dans une certaine mesure, de
l'exagération des dépenses antérieures. Mais
quelle a été la cause déterminante de la pro-
gression des dépenses publiques ? C'est cette
évolution générale de la richesse publique,
en vertu de laquelle toutes les valeurs se mo-
difient. Elle a été rarement plus marquée que
dans les années qui ont suivi l'avènement de
la République. Tous les petits traitements, ou
presque tous, sont devenus trop petits. Il a
fallu les relever pour conserver leur ancienne
proportionnalité dans l'ensemble du prix des
choses. C'était une nécessité bien plus éco-
nomique ou même sociale que politique. Il ne
dépendait pas du gouvernement de s'y sous-
traire. Tous les Etats, quelle que soit la for-
me de leur gouvernement, l'ont subie. M. Fé-
lix Faure, qui a consacré à cette question
une étude remarquable, a cité des chiffres
auxquels on ne répliquera rien.
D'autre part, si, depuis 1876, les dépenses
de l'Etat se sont accrues, avec quelles res-
sources la République a-t-elle donc fait face
è. ces inévitables accroissements de charges?
Quels impôts nouveaux a-t-elle donc créés ?
Des impôts? La République en a supprimé
pour trois cents millions. Ses dépenses nou-
velles, elle y a fait face par l'emploi des plus-
values produites par le développement nor-
mal de la richesse nationale.
Voilà ce qui, dans ce pays de bon sens,
frappera tous les esprits impartiaux. La Ré-
publique, dit l'opposition, c est la ruine, c'est
la misère. Et que répondent les faits? Ceci
émotion qui l'étranglait I C'était la première
fois qu'il allait revoir Henriette son regard
fouillait les groupes, il écrasait les pieds de
ses voisins, il accrochait ses éperons à mollet-
tes sans pointes dans de vénérables cotillons.
Saint-Sylvain lui soufflait à l'oreille
Tiens-toi donc, grosse bête c'est le cin-
quième acte.
Non je ne peux pas. je ne pourrai pas,
répétait Pierre; je suis ridicule. on me re-
garde. je vais tout gâter. adieu 1
Et avant que Saint-Sylvain fût revenu de sa
surprise, il disparut.
Guignot du Pigeonnier, qui, par principes, re-
tardait un peu sur son siècle, avisa M. Sau-
vain et, jouant des coudes, vint l'entretenir de
ce mariage dont chacun parlait. Saisissant le
marchand de bois par un bouton de sa redin-
gote, il l'entraîna dans un petit salon écarté,
où trônaient Mlles de Fourniquet,
Venez, mon cher, je veux m'en expliquer
avec vous devant ces demoiselles.
M. Sauvain s'attendait aux compliments or-
dinaires il préparait déjà sa réponse habituelle,
sa bonne réponse péremptoire qui mettait fin
aux congratulations mais le ton de Guignot le
dérouta. Celui-là ne le félicitait pas n'avait-il
donc point pris au sérieux la grande nouvelle ? 2
Et M. Sauvain, quoi qu'il en eût, éprouva une
sorte de dépit.
Guignot était fort apprécié des jumelles
comme possédant la confiance des princes.
Pour elles, il parlait d'or; aussi hochèrent-elles
le menton quand il leur dit, en montrant son
prisonnier:
Voici un traître.
Permettez, fit timidement M. Sauvain.
Un traître et je le répète. Lorsqu'on a vo-
tre situation, votre fortune, vos opinions, on
ne laisse pas faire un aussi sot mariage.
Les deux sœurs poussèrent un petit hennis-
sement approbatif.
Un aussi sot mariage, reprit Guignot le
galopin n'est même pas né.
Ah I permettez I
Il n'est pas né: laissez-lui prendre une fille
de rien. A quoi bon vos écus, si vous les jetez
à un Savarèze? A quoi bon vos opinions, si vos
écus n'aident pas la noblesse? Croyez-vous donc
que vous n'auriez pas plus d'honneur à faire
de votre fille une comtesse qu'une vilaine? 2
Permettez, sapristi!
Oh fi 1 il a juré, proférèrent les jumelles.
la ruine est si profonde, les souffrances sont
telles, que, malgré trois cents millions de.
dégrèvements, l'Etat peut subvenir sans im-
pôts nouveaux aux augmentations de dépen-
ses. Sous l'influence du krach, les'plus-va-
lues avaient temporairement disparu mais
les voici qui reparaissent, et porlant sur les
branches les plus diverses des recettes.
Reste le sophisme du déficit, prouvé par
l'existence des comptes parallèles au budget.
Nous l'avons, pour notre part, si souvent
percé à jour, que nous nous reprocherions
d'y revenir, au moins pour l'instant. Que l'on
daigne seulement considérer, pour en avoir
la valeur exacte, les écritures des sociétés
les plus honorables, les plus prospères, les
plus indiscutées qu'on prenne, par exem-
ple, la Compagnie du Nord elle aussi, elle
a des dépenses que ne couvrent pas ses re-
cettes d'exploitation peut-on raisonnable-
ment en conclure que son budget est en dé-
ficit et qu'elle distribue des dividendes fic-
tifs ? Voilà, pourtant, l'argument que l'oppo-
sition ressasse contre les finances républi-
caines dans tous ses discours, il se re-
trouve c'est son triomphe. Nous ne lui en
faisons pas nos compliments.
Elle aura beau faire l'évidence est plus
forte que tous les sophismes et que toutes
les passions. Le 3 0/0 français est aujour-
d'hui aux prix où la République a trouvé le
5 0/0 voilà ce que le régime actuel a fait du
crédit public. La rente française est aux plus
hauts prix qu'elle ait jamais atteints, et ces
prix sont la résultante des appréciations du
monde entier sur la situation des finances de
la France. Notre rente se négocie sur tous
les grands marchés; partout on peut en ven-
dre librement; que nos finances justifient la
centième partie des dires de l'opposition, et
l'on ne s'en fera pas faute. Elle est recher-
chée, cependant, et se rit de toutes ces atta-
ques. Nous ne voulons pas d'autre ven-
geance;
Le principal argument que font valoir les
républicains révisionnistes pour démontrer la
nécessité de changer la Constitution est que
celle-ci a été faite par des monarchistes pour
assurer le retour de la monarchie. C'est ce que
répète encore M. de Lanessan dans une lettre
adressée à un journal du matin pour justifier
la campagne de division et de dissidence répu-
blicaine récemment inaugurée à Mâcon, de
concert avec M. Millerand. « La Constitution
de 1875 est monarchique elle a été faite par
des monarchistes dans l'intérêt de la monar-
chie. » 11 y a longtemps que nous entendons ou
que nous'lisons cette « rengaine » mais, pour
avoir servi tour à tour à tous les intransi-
geants qui passent, elle n'en est pas devenue
plus juste ni plus vraie.
Pour savoir ce qu'il faut penser de cette af-
firmation véritablement usée aujourd'hui, il
suffit d'opposer à la lettre de M. de Lanessan
les récents articles de Y Autorité, dans lesquels
M. de Cassagnac énu-mérait avec beaucoup de
force et de logique les obstacles insurmonta-
bles et les délais nécessaires que, dans l'hypo-
thèse la plus favorable de deux triomphes suc-
cessifs des conservateurs aux élections législa-
tives, la Constitution républicaine opposait à
la- réalisation désespérances monarchiques. Il
calculait, en effet, qu'il fallait, au bas mot,
dix-huit mois pour que les monarchistes pus-
sent non pas mettre fin à la République, mais
la livrer- aux mains de M, Boulanger. Que M.
de Lanessan demande donc à M. de Cassa-
gnac et à ses amis impatients comme lui
s'ils estiment véritablement que la Constitu-
tion de 1875 a été faite par des monarchistes
dans l'intérêt de la monarchie. Croit-on sérieu-
sement que leur tâche de destruction ne serait
pas plus courte et plus facile, s'ils ne rencon-
traient pas devant eux un Sénat et un prési-
dent de la République chargés précisément,
aux heures de crise, de veiller au salut de
nos institutions libres! Ah que M. de Cassa-
gnac serait heureux de pouvoir, dès aujour-
d'hui, donner à la République une Constitution
autre que celle qu'elle a Comme il voudrait
bien n'avoir affaire qu'à une Chambre unique
et à un pouvoir exécutif décapité Ce n'est pas
dix-huit mois ni deux ou trois grandes victoi-
res électorales qu'il lui faudrait pour tout dé-
truire. Une seule lui suffirait. Tout serait fini
en vingt-quatre heures.
La vérité, c'est que la Constitution de 1875,
loin d'avoir été faite pour assurer la restaura-
tion d'un trône, a été faite, au contraire, avec
l'intention très consciente et très résolue de pré-
venir et d'empêcher, autant qu'une Constitution
le peut faire, le retour du pouvoir personnel et
les coups d'Etat. Tout a été calculé dans ce des-
sein la création d'une seconde Chambre, le
droit de dissolution, la nomination du chef du
pouvoir exécutif par le Congrès et non par le
suffrage universel immédiat, la responsabilité
ministérielle couvrant celle du président, tout
a été conçu et adopté pour donner à la Répu-
blique les moyens de pouvoir traverser des
temps de crise qu'il faut bien prévoir, sans y
sombrer tout entière. Les monarchistes con-
vaincus de l'Assemblée nationale ont voté con-
tre cette Constitution. Ce sont les républicains
qui l'ont fait triompher avec le concours des
libéraux parlementaires qui, ne pouvant faire
Mon cher, vous êtes peuple, continua
Guignot, je ne vous en fais point un crime, on
ne choisit pas ses parents.
Mlles de Fourniquet tressaillirent, Guignot
sourit dans sa barbe.
On ne choisit pas ses parents, mais on
choisit son gendre, et quand on est ce que
vous êtes.
On se paye au moins un petit vidame dé-
cavé, interrompit M. Sauvain qui s'échauffait.
Mon cher, prononça sèchement Guignot,
vous vous oubliez. Il se peut qu'un vidame
vous fasse l'honneur de rechercher votre al-
liance, quoique au fond je n'ose l'espérer.
pour vous. Quant à ce jeune homme, un Sava-
rèze tout court, c'est l'affaire d'un repu encom-
bré de filles laides à marier. Oui, il est bien
pensant: je sais, je sais, il a gagné cela dans
la fréquentation des personnes titrées, mais,
que diable il pue-la roture-. On consent par
grâce à recevoir ces garçons-là célibataires,
leur uniforme est leur blason, on fermera sa
porte au couple bourgeois.
M. Sauvain leva les épaules
Me prenez-vous pour un duc et pair et ma
femme pour une duchesse que vous consentez
à nous regarder, monsieur Guignot, et pensez-
vous que votre pigeonnier force la considéra-
tion des gens.
Mlles de Fourniquet s'enfuirent avec d'aigres
piaillements d'horreur. Guignot piqué, voyant
qu'on commençait à faire cercle, essaya sans
succès d'arrêter le marchand de bois qui conti-
nua du haut de sa tête
-Parbleu, vous m'amusez, Guignot, on ju-
rerait à vous écouter que vos aïeux furent aux
Croisades.
Certes oui, et j'en ai la preuve.
Ils étaient dans les infirmiers, murmura
une voix à l'oreille de M. Sauvain.
Celui-ci se retourna et reconnut Saint-Syl-
vain, il lui saisit le poignet.
Dites-nous, monsieur de Saint-Sylvain, si
votre ami Savarèze n'est pas aussi gentilhomme
que n'importe qui.
Plus que beaucoup, répondit l'officier en
saluant le fils des Croisés.
Dites-nous s'il n'a pas autant de cœur
qu'un baron.
-Bien davantage, et sans peine, puisque les
barons sont tous banquiers.
N'est-il pas aimé, apprécié, estimé de
ceux qui le connaissent t
là monarchie, ont voulu du moins sauver danif
ce pays les principes essentiels de tout gouver-:
nement libre.
Aussi bien voyons-nous sans surprise tour
ceux qui veulent détruire la République ou met-
tre la main sur elle s'unir contre cette consti-
tution qui rend véritablement la citadelle im-
prenable et en demander la revision immé-
diate. Boulangistes, royalistes, bonapartistes
sont dans leur rôle. Ceux qui n'y sont pas et
nous étonnent toujours, ce sont des républi-
cains sincères et libéraux, comme M. de Lanes-
san, qui croient de bonne politique, à l'heure
actuelle, de joindre leurs efforts aux leurs et de
travailler au démantèlement de la forteresse
pour en rendre l'accès plus facile aux ennemis
qui l'assiègent.
,fT~
LA LOI SUR 1/ ARMÉE AU SÉNAT
Les vingt-deux premiers articles de la loi sur
le recrutement ont été votés dans la séance
d'hier. Le Sénat a rejeté l'adjonction au con-
seil de revision d'un capitaine « pris dans une
autre arme que celle d'où provient le comman-
dant de recrutement » et cela pour de bonnes
raisons la compétence du capitaine en matière
d'aptitudes physiques est fort discutable, l'avis
du médecin militaire suffit à éclairer le conseil
de revision, enfin cette innovation entraînerait
une dépense supplémentaire estimée par le mi-
nistre de la guerre à 80,000 fr. La modification
apportée au texte originel du projet de la
Chambre n'était vraiment pas heureuse. La
Chambre le comprendra et ratifiera la décision
du Sénat.
La discussion sur l'article relatif aux dispen<
ses a occupé la meilleure partie de la séance.
L'intervention de M. le ministre de l'intérieur,
à défaut de celle de M. le ministre de la guerre.
lié par des déclarations antérieures alors qu'il,
était président de la commission sénatoriale,
était annoncée des la veille. Il ne fallait pas,
pour cela, s'atténdre à la production de nou-
veaux éléments d'appréciation. Tout a été dit
sur la question des dispenses de droit et il ne
pouvait se faire que des redites. M. Constans a
compris, il est vrai, l'impossibilité d'échapper
à cette situation. Aussi s'est-il efforcé, dès le
début, de sortir du domaine technique et de
se placer sur le terrain politique. Il a soutenu
cette thèse que la Chambre avait fait un pre-
mier pas dans la voie de la conciliation en ac-
cordant la division du contingent en deux por.
tions et que le Sénat devait faire l'autre. en re-
nonçant aux dispenses de droit. On lui a objecté
que la concession première venait du Sénat qui
avait admis le principe du service effectif pour
tous et transformé ladispenseentière en dispensa
relative. Il a été contraint par cette réplique à se
renfermer dans la discussion du principe môme
des dispenses de droit. Nous avons donc enten-
du rééditer avec talent l'historiette du fils de
veuve riche se livrant aux débordements de ses
passions, doublant le chagrin de sa mère, avec
l'inévitable comparaison de la vertu du jeune
pauvre, soutien effectif de sa mère abandon-
née. Après le ministre, un orateur a renchéri
sur le thème de rigueur et affirmé qne presque
tous les fils de veuves riches tournaient mal.
A ce compte, il faudrait classer le paupérisme
parmi les éléments de civilisation et de mora-
lisation. C'est une thèse un peu fantaisiste l
Il est à remarquer que tous les orateurs op-
posés au maintien des dispenses de droit, lors-
qu'ils ont abordé le côté moral, n'ont pas man-
qué de perdre de vue le. motif et la cause de la
dispense. Le sophisme aurait-il les mêmes con-
séquences que le vertige ? C'est à le croire.
Car le dernier paragraphe de l'art. 21 ne per-
met pas d'équivoque sur l'intention du législa-
teur. Il est stipulé dans ce paragraphe que la
dispense n'est pas accordée aux enfants illégi-
times, ce qui prouve surabondamment que la
dispense est accordée à la famille et non à l'ap-
pelé. S'il en était autrement, l'exception ne se-
rait pas maintenue, les enfants illégitimes
étant absolument irresponsables des condi-
tions de leur naissance.
M. le rapporteur de la commission sénato-
riale aurait probablement circonscrit le débat
dans des limites plus étroites s'il avait particu-
lièrement insisté sur la difficulté, au point de
vue pratique, de renoncer au maintien des dis-
penses de droit. Tous les ans, de 40 à 45,000
jeunes gens bénéficient de la dispense en vertu
de l'article 17 de la loi de 1872. Cette donnée sta-
tistique a sa valeur. Admettons en effet et
nous serons larges que 33 0/0 de cette caté-
gorie d'appelés soient dans une position de for-
tune ne rendant pas indispensable leur pré-
sence-au foyer familial, le conseil de revision
aurait inévitablement à instruire 30,000 deman-
des La nouvelle loi accordant la dispense con-
ditionnelle à 5 0/0 du contingent incorporé, il
aurait, de ce chef, 7 à 8,000 autres dossiers à
examiner. Son travail serait quintuplé. Le con-
seil de revision ne pourrait faire face a pareille
besogne sans subir de profondes modifications.
Le Sénat a donc fait preuve de sens pratique
en se refusant à sacrifier l'article 21 à la de-
mande de M. le ministre de l'intérieur. Il a
fait preuve de sollicitude à l'égard des humbles
en prenant en considération un amendement
de M. de Carné sur l'article 22 ayant pour ob-
jet d'élever de 1 à 2 0/0 le chiffre des dispenses
à accorder aux soutiens de famille après la se-
conde année de service.
En somme, très bonne séance et dont les ré-
sultats sont acquis, l'urgence ayant été votéo
au début de la séance.
De tous. sauf des sots ou des entêtés.
-Vous auriez une fille, la lui donneriez-
vous ?
Oh! pas à lui, je la garde pour son fils,
c'est déjà entendu.
-Ne fait-il pas aussi bonne figure dans le
monde qu'un vicomte de pacotille?
Meilleure figure, monsieur Sauvain, car il
est simple comme un vrai prince.
A-t-il un nom vulgaire et inacceptable?
Peuh 1 Xaintrailles s'appelait Poton, c'est
bien pis.
Alors, laissez-nous tranquilles, dit Gui-
gnot, et faites à votre tête. Vous n'êtes qu'ur.
repu et tout l'honneur sera pour vous s'il veut
bien épouser votre fille.
Les hobereaux, aux écoutes, éclatèrent de
rire à la porte du peti salon.
S'il veut bien. s'il veut bien, bégaya M.
Sauvain, c'est-à-dire si je consens.
Et vous consentiriez à une pareille vilenie,
interrompit le plus bête et le plus marmiteux
des gentillâtres, cela sentirait l'épicier et l'hom-
me de peu.
Il se fit un grand silence, et M. Sauvain, très
pâle, articula lentement
J'y consens, et je vous devrai mon gendre,
messieurs.
Alors s'éleva un bourdonnement, un brou-
haha qui vint troubler Henriette et sa mère au
comptoir à thé, pendant qu'avec un tapage de
ferraille tout à fait martial Saint-Sylvain se pré-
cipitait dans l'escalier.
La famille Sauvain opéra sa retraite digne-
ment et en bon ordre sous un feu croisé de ro-
gards dédaigneux. Le marchand de bois du
Nord se rendit seul à la préfecture pour excu-
ser l'absence de sa femme et de sa fille. Le soir
Mme Le Febvre vint officiellement demander
pour Pierre la main d'Henriette; elle annonça
aussi sa démission de présidente des malcon-
tents et l'avènement au fauteuil de Mllellermi-
nie de Fourniquet.
Mlle Pétronille, dégelant à l'improvistc, avait
si chaudement félicité Guignot, lui avait fait dd
telles déclarations d'estime, de sympathie et
û'affection qu'on avait tiré de là toutes sortes
de* co\?cms'ons extraordinaires.
:̃̃̃ '«H/ ̃̃̃̃'• ̃ ̃̃
<• ̃̃̃ HENRI ALLAIS.
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 67.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 67.5%.
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k232158q/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k232158q/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k232158q/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k232158q/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k232158q
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k232158q
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k232158q/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest