Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1886-09-23
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 23 septembre 1886 23 septembre 1886
Description : 1886/09/23 (Numéro 9273). 1886/09/23 (Numéro 9273).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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JEUDI 23 SEPTEMBRE 1836.
VINGT SIXIÈME ANNÉE. N* 0273.
PRtX DE L'ABONNEMENT
«RIS. Trois mois, 14 fr. Six mois, 28 fr. Us an, 56 fr.
DÉP1» 4 ALSACE-LORRAINE 17 tt.] 34fr.; 68 fr.
UMIOM POSTALE lSfr.; 36 fr.; ^Sfr.;
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1er ET 16 DE CHAQUE MOIS
tin ïiTUixéro (départements) âO centimes.
ANNONCES MM. Lagrange, CERF ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
PRIX DE L'ABONNEMENT
j^IS Trois mois, 1 4 h. Six mois, 2 8 fr. Un an, 56 fr.
BfrbfiALSACE-LORR-AlNB 17fr.; 34 fr.; 68 fr.
CH10N POSTALE. lSfr.; 36 fr.; 72 fr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1" ET 16 DE CHAQUE MOIS
TJn numéro (à Paris) lo centimes.
Directeur politique Adrien Hébrard
La rédaction ne répond pas des articles comviuniqués
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
PARIS, 22 SEPTEMBRE
BULLETIN DU JOUR
Les manifestations de mécontentement
auxquelles donne lieu, en Autriche, la poli-
tique de l'Allemagne dans la question d'O-
rient, s'accentuent de plus en plus. Nous
avons résumé naguère les interpellations
que deux chefs de groupe à la Chambre des
députés hongroise ont l'intention d'adresser
au gouvernement à ce sujet. Dimanche, c'é-
tait le comte Apponyi, le leader du parti de
l'opposition modérée, qui, parlant devant ses
électeurs de Jassberenyi se prononçait
énergiquement contre l'entente austro-alle-
mande.
Examinant la situation actuelle en Europe,
le comte Apponyi a posé en principe que la
politique autrichienne a essentiellement pour
tâche d'empêcher la Russie de prendre pied
dans la presqu'île des Balkans et de s'en em-
parer. Dans ce but, l'Autriche doit travailler
à favoriser et à défendre l'indépendance des
petits Etats qui se forment dans la péninsule
et s'opposer surtout à ce que la Russie
les annexe. Or, ce qui vient de se produire
en Bulgarie est en contradiction directe avec
ces visées de l'Autriche.
tv Les événements récents, continue le comte
Apponyi, nous ont conduits à douter de l'ap-
pui de l'un des soutiens de notre monarchie
dans lesquels nous avions le plus confiance
notre alliance avec l'Allemagne. Ce serait
vouloir nous bercer d'une illusion volontaire
que de continuer à faire fond sur cette al-
liance. Car, dans les événements qui viennent
de se produire, et dans lesquels nos intérêts
vitaux sont menacés par les menées de la
Russie, la diplomatie allemande ne prend
pas notre parti; au contraire, elle travaille à
favoriser les tendances de la puissance du
Nord qui nous est hostile. L'Autriche en est
donc réduite à ne plus compter que sur ses
propres forces.
L'orateur conclut en demandant que le
gouvernement renonce à la politique d'en-
tente avec les deux empires inaugurée à
Skiernievice. Car cette politique, en favori-
sant l'expansion de la Russie, conduit fatale-
ment à la guerre.
Il ne semble pas que cette façon d'envisa-
ger l'attitude récente de l'Allemagne, qui se
répand de plus en plus en Autriche, émeuve
beaucoup la presse officieuse de Berlin. La
Gazette de l'Allemagne du Nord vient de pu-
blier une nouvelle apologie de la conduite du
chancelier dans la question bulgare. Cet ar-
ticle tient deux colonnes; il n'y est parlé
nulle part du mécontentement que peut
éprouver et qu'éprouve en effet l'Autriche-
ongrie de voir la Bulgarie, augmentée
de \a Roumélie, tomber entre les mains
de la Russie. Par contre, ce plaidoyer
foisonne en dénégations et. en démentis qui
tendraient à faire supposer que les événe-
ments de Sofia n'ont donné lieu à aucun
échange de vues entre les cabinets des trois
empires, que la Russie n'a obtenu aucun
succès diplomatique dans la principauté, que
le rétablissement du statu quo en Bulgarie,
tel qu'il existait avant l'année passée, ne
saurait être une cause d'inquiétude pour
aucun Etat européen. Il serait difficile de
vouloir donner plus maladroitement le chan-
ge, et il faut chercher ailleurs la vérité sur
la politique allemande de ces derniers temps.
Un journal de province, la Gazette du
Weser, nous paraît user de plus de franchise
et poser la situation actuelle en termes
fort nets. D'après cette feuille, la Russie
ayant voulu modifier la situation en Bulga-
rie, qu'il ne lui convenait plus de tolérer,
l'Allemagne s'est trouvée placée dans l'al-
ternative ou de consentir à cet acte ou d'in-
tervenir.. En. prenant ce dernier parti, elle
eût amené une guerre générale, dans la-
quelle l'appui de l'Autriche, mal préparée en
ce moment, n'aurait probablement pas pu
contre-balancer les forces de l'armée russe.
Dans cette conjoncture,le prince de Bismarck
s'est décidé à essayer de concilier les inté-
rêts de l'Autriche et de la Russie, prêt même
à livrer toute la péninsule des Balkans à
cette dernière, pourvu que ces sacrifices
évitent la guerre.
Cette politique est parfaitement intelligible
et même avantageuse à grands frais
pour l'Allemagne; mais, d'autre part, elle est
bien de nature à justifier toutes les inquiétu-
des de l'Autriche, où l'on continue à se de-
mander de plus belle quel profit cette puis-
sance retire de son entente avec l'empire
germanique.
Le bill Parnell a été rejeté hier à 95 voix
de majorité. Ce résultat était prévu. Malgré
le discours extrêmement modéré de M. Par-
nell et l'intervention fort habile de M. Glad-
stone, le gouvernement avait beau jeu, pour
refuser toute concession, de se retrancher
derrière l'enquête qu'il fait poursuivre en Ir-
lande. Lord Hartington a fermement appuyé
FEUILLETORf »O «TERHJP©»
DU 23 SEPTEMBRE 1886 (29)
LA GRANDE TONTINE
XXIV (Suite)
M. Carbuckle, naturellement désireux devoir
îette affaire se décider à l'avantage de sa pu-
pille, vit avec plaisir la proposition du vicomte,
car il valait mieux, indubitablement, assurer à
Mary cent mille francs de rente que risquer de
perdre le tout. Mais, en commun avec la plu-
part des gens de sa profession, il détestait par
dessus tout de se voir « route » en affaires, et
toutes les fois qu'on avait essayé de le faire il
avait mis un acharnement marquera punir l'of-
fenseur. La proposition de lord Lakington rela-
tive aux Pegram lui parut donc inacceptable.
Lakington en parle bien à son aise s'é-
criait-il. Mais pourquoi laisserai-je, moi Car-
huckie, dépouiller ma pupille d'une trentaine
de mille francs, quand il n'y a rien de plus aisé
que de faire rendre gorge aux filous?
Malheureusement, les délais qu'il apporta
ainsi aux négociations furent aussi funestes
aux intérêts qu'il avait à cœur qu'ils furent fa-
vorables à ceux du vicomte. Quelques jours se
passèrent en pourparlers. Il fut impossible d'a-
mener M. Carbuckle à composition son devoir
était de recouvrer l'argent de sa cliente, il n'a-
vait pas à s'occuper de considérations senti-
mentales impossible de le tirer de là. Lord
Lakington était au désespoir.
Nous ne pouvons pourtant pas lui en vou-
ioir 1 disait Jack. Personne ne supporterait
sans de bonnes raisons la'perte d'une somme
aussi importante. Le procès sera désagréable
pour nous; mais rappelons-nous que, pour miss
Chichester c'est une considération de second
ordre.
Cependant il advint que lorsque Mary fut
wnsujtée, cette jeune personne tranch- la dif-
uculté avec une grande désinvolture.
es conservateurs. Sir Michaël Hicks-Beach
a exposé le peint de vue du gouvernement
et annoncé l'intention d'user à l'égard de la
nation irlandaise d'un svstème contraire à la
méthode timorée si infructueusement appli-
quée parles libéraux. Cependant le secrétaire
pour l'Irlande, tout en protestant de sa déter-
mination à ne pas acheter le maintien de l'or-
dre par une politique de faiblesse et d'indul-
gence, a annoncé que le Parlement serait
peut-être appelé à traiter la question irlan-
daise plus tôt que le gouvernement ne l'avait
annoncé. C'est là la seule promesse que le
parti nationaliste et libéral a pu obtenir de
ses adversaires.
«fc»
BÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps
':̃̃̃ Vienne, 22 septembre, 9 heures.
Le gouvernement hongrois ne répondra aux in-
terpellations de MM. Horwath et Daniel Iranyi que
la semaine prochaine. M. Tisza veut conférer à ce
sujet avec M. de Kalnoky.
Vendredi, tous les membres du ministère autri-
chien se rendront à Pest pour délibérer avec les
ministres hongrois sur les questions qui seront
soumises aux Délégations. Les décisions prises
seront soumises à l'empereur, qui fixera la date de
la convocation des Délégations.
Budapest, 22 septembre, 8 h. 30.
Le ministre roumain M. Stourdza est en ce mo-
ment à Pest, où il confère longuement avec M.
Tisza et le ministre du commerce M. Szechenyi,
au sujet du traité de commerce entre les deux
pays. ̃̃•̃- ̃̃̃̃
Bade, 22 septembre, 8 h. 40.
Les bruits inquiétants qui ont couru sur la santé
de l'empereur Guillaume sont dénués de tout fon-
dement. Chaque jour il fait sa promenade en voi-
ture. Hier, il a déjeuné au château grand-ducal,
et le soir il a réuni chez lui, à la villa Messmer,
où il est descendu comme d'habitude, une nom-
breuse société.
Belgrade, 22 septembre, 7 h. 50.
Le roi Milan est attendu la semaine prochaine à
Belgrade.
La Haye, 22 septembre, 8 h. 15.
Le roi a nommé une commission chargée de
faire une enquête sur la situation de l'agriculture
et de formuler des propositions pour son dévelop-
pement. tse;,vfce Ilavas)
(Service Havas)
Londres, 22 septembre.
Le roi de Portugal est parti ce matin pour Plymouth,
où il s'embarquera pour retourner directement à Lis-
bonne.
.•>.
On a pu lire, dans les correspondances qui
nous ont été adressées de Limoges, le compte
rendu détaillé des manœuvres du 12° corps
d'armée. Comme il arrive ordinairement en
pareil cas, le spectateur de ces grandes so-
lennités militaires n'est pas enclin à juger
les efforts déployés de part et d'autre, ni à
apprécier les résultats obtenus, encore moins
à signaler les lacunes de l'organisation d'en-
semble de notre armée. L'aspect des troupes
ravit jusqu'aux plus indifférents et le bruit
du canon trouble jusqu'aux plus sceptiques.
Aussi l'attention de nos correspondants a-
t-elle été surtout dirigée vers les détails de la
vie militaire; avec d'innombrables Français
accourus surle théâtre de cette petite guerre,
ils ont admiré la précision des mouvements,
la vigueur des troupiers, l'entrain et l'esprit
d'initiative des officiers. Et comment eussent-
ils fait une restriction, formulé une critique,
alors que les applaudissements éclataient de
toutes parts et que la vue du drapeau provo-
quait les plus touchantes manifestations d'un
patriotisme toujours facile à émouvoir?
Ceux qui suivent de loin les manoeuvres
qui ont lieu chaque année aiment à profiter
de cette occasion pour dresser l'état des ré-
formes accomplies, de celles que l'intérêt de
la défense nationale exige et de celles aussi
dont les manœuvres elles-mêmes ont dé-
montré l'urgence. Une armée qui demeure
stationnaire est condamnée d'avance à avoir
le dessous, quelle que soit d'ailleurs le ca-
ractère de la lutte où elle sera engagée.
Nulle part plus que dans le domaine de l'art
militaire l'activité humaine ne s'est donné
libre carrière, multipliant les découvertes
ingénieuses, les transformations inattendues.
Aussi les budgets de la guerre, en tous pays,
vont-ils en croissant chaque jour et doit-on
se demander, non sans une certaine curio-
sité mélangée d'inquiétude, où l'on s'arrê-
tera dans cette voie qui paraît sans issue.
Les manœuvres elles-mêmes coûtent fort
cher, non seulement au budget de l'Etat,
mais à la nation entière; l'appel des réser-
vistes est une très lourde charge pour les po-
pulations, qui sont obligées d'interrompre
certains travaux; l'industrie et l'agriculture
sont également atteintes dans leurs intérêts.
Aussi ne faut-il pas être surpris que des pro-
testations se soient élevées, et que certains
organes de la presse aient réclamé la sup-
pression des convocations annuelles de la ré-
serve et de l'armée territoriale. Nous avons
jugé inutile d'entamer une polémique à ce
sujet; le rappel sous les drapeaux, à des in-
Mon cher tuteur, s'écria-t-elle, je ne veux
pas entendre parler de ce procès, et je donne-
rais de bon cœur une somme plus importante
pour empêcher que le misérable engagement
de cette chère Béatrice lui puisse être jeté au
visage. D'ailleurs, cent mille livres de rente se-
raient pour moi une fortune fabuleuse et, en
tout cas, bien plus considérable qu'il ne faut. Je
ne saurais vraiment pas comment dépenser un
tel revenu! 1
Hum, fit l'avocat, c'est une chose qui s'ap-
prend vile, croyez-moi.
Peu importe, dit Mary en riant. J'ai fait
répondre il y a quelques jours à lord Laking-
ton que j'étais prête à entrer avec lui dans tel
arrangement qui lui paraîtrait convenable. De
grâce, ne le tenez pas davantage en suspens.
Faites préparer sans retard les pièces ou actes
nécessaires, comme il vous plaira de les appe-
ler, et finissons-en. A propos, voyez-vous quel-
quefois M. Ringwood?
Rarement depuis quelque temps. Peut-
être est-il occupé. occupé à préparer pour
vous son mémoire de frais, miss Mary! Je
crains bien que vous n'ayez de terribles comp-
tes à lui rendre 1.
C'est vous, naturellement, monsieur Car-
buckle, qui réglerez cela. Tout ce que je puis
dire, c'est que je vous prie de donner les yeux
fermés ce qu'il demandera.
Bah! je plaisantais, enfant: Ringwood a
certainement travaillé ferme pour vous servir;
mais il serait aussi blessé que moi-même à l'i-
dée d'être payé par. vous
Mais comment, alors, puis-je m'acquitter
envers lui? s'écria Mary.
Ah! je n'en sais rien. Il vous le dira lui-
même C'est un garçon audacieux, et on ne
peut pas savoir jusqu'où iront ses préten-
tions Adieu.
Miss Chichester avait médité plus d'une
fois sur la persistance que Ringwood met-
tait à l'éviter. Fidèle à la résolution qu'il
avait prise, il n'était pas revenu à Victoria
Road depuis l'expédition de Portsmouth. Quel-
que temps auparavant, Mary s'était crue par-
faitement autorisée à le considérer comme un
admirateur capable de devenir un prétendant
sur le plus léger encouragement. Elle eom-
tervalles déterminés, des anciens soldats est
tellement nécessaire au maintien de la cohé-
sion de nos forces militaires que toute dis-
sertation serait en l'espèce bien inopportune,
surtout si l'on ajoute que la loi de 1872 en-
combre l'armée active e^Sà, réserve de
300,000 jeunes gens environ qui n'ont jamais
servi que pendant deux périodes de vingt-
huit jours.
Mais, aujourd'hui, ce n'est pas l'institu-
tion des vingt-huit et des treize jours que
l'on vise; c'est aux grandes manœuvres que
l'on s'en prend c'est leur utilité que l'on
conteste. A qui profitent-elles, dit-on, ces
manœuvres où chacun marche vers un but
parfaitement déterminé, suivant des chemins
dont il connalt les moindres détours, où le
combat n'est qu'un vain simulacre, où les
arbitres ont fort à faire pour désigner le
vainqueur et le vaincu? En un mot, on pré-
tend que l'imprévu ne joue aucun rôle aux
manœuvres d'automne, alors qu'il est réel-
ment tout à la guerre.
Ces objections avaient une certaine valeur,
quand on réglait jusque dans les détails les
plus insignifiants l'action des régiments,
que l'on indiquait même l'heure de la ren-
contre et celle de la cessation du feu, on in-
terdisait du même coup toute initiative aux
généraux. Les manœuvres n'étaient plus
alors que des exercices de garnison; elles
n'étaient plus l'image, même affaiblie, de la
guerre, l'école où se forment les chefs d'ar-
mée, où les officiers subalternes complètent
leur instruction.
Aussi le ministre de la guerre avait-il
prescrit que, cette année, les généraux fus-
sent laissés tout à fait libres de leurs mou-
vements on leur ordonnait simplement de
s'emparer d'une ville, d'une région ou d'ar-
rêter les progrès d'une armée d'invasion. Le
programme était élémentaire; quant à son
exécution, toujours très compliquée, il ap-
partenait aux seuls généraux de l'assurer à
leur gré et sous leur responsabilité person-
nelle.
Cette modification radicale n'a pas désar-
mé les détracteurs des manœuvres d'au-
tomne ils ont prétendu que le spectacle des
fautes commises par des généraux était nui-
sible au respect de la discipline. Voilà, en
vérité, une étrange façon. de raisonner. Tan-
tôt, dit-on, les généraux sont soumis à une
sujétion intolérable et se meuvent dans un
cadre trop étroit; tantôt, au contraire, ils
jouissent d'une indépendance dangereuse. Et
sur quelle autorité s'appuie-t-on pour étayer
cette thèse risquée? Sur l'autorité des écri-
vains militaires de l'Allemagne, sur celle de
Frédéric II, le souverain qui créa les manœu-
vres et qui, de 1745 à 1756, entraîna ses trou-
pes en leur faisant exécuter sans relâche les
opérations les plus compliquées de la guerre.
Il est parfaitement exact qu'après la mort
de Frédéric II les manœuvres de l'armée
prussienne dégénérèrent peu à peu en repré-
sentations militaires auxquelles étaient con-
viés les généraux des nations étrangères.
Aussi le général Bronsart de Schellendorf
s'exprime-t-il en ces termes « On sacrifia
» tout au coup d'œil, et c'est ainsi que furent
» préparés les désastres de 1806. » Et il
ajoute Le résultat des manœuvres de 1745
». est bien connu elles eurent pour consé-
» quence l'issue des batailles de la guerre de
» Sept Ans, qui, livrées presque toutes con-
» tre un ennemi supérieur en nombre, se ter-
» minèrent presque toutes à l'avantage des
» armes prussiennes. »
Quant aux revues qui ont clos les manœu-
vres, non seulement à Bordeaux et'à Limo-
ges, mais dans tous nos corps d'armée, elles
nous semblent presque aussi indispensables
que les manœuvres elles-mêmes. Les réser-
vistes et les soldats ont gaiement supporté
des fatigues parfois excessives; ils ont ap-
pris à marcher sans se plaindre; ils ont aussi
fraternisé, ils se sont retrouvés, anciens et
jeunes soldats, et c'est cette union intime de
l'armée et de sa réserve qu'il faut favoriser
à tout prix. Eh bien, le réserviste est fier
d'avoir été passé en revue; que le soleil soit
brûlant ou que la pluie tombe, il tient à défi-
ler devant son général. N'est-ce donc rien
que l'esprit militaire?
iM«grn.–
M. le docteur Chautemps, conseiller muni-
cipal, adresse à la Justice une lettre pour dé-
fendre l'attitude de la commission de contrôle
du Laboratoire, dont il est le président, dans
la question des bières salicylées. Contre quels
adversaires la commission a-t-elle donc à se
défendre? Contre certains organes de la presse
radicale la plus avancée. Voilà qui est presque
incroyable, mais qui n'est, hélas! quetrop vrai.
Il semblerait que les feuilles radicales dussent
prendre en main plus que les autres les inté-
rêts des petites gens, qui n'ont pas les moyens
de se mettre à l'abri de la falsification des ali-
ments et des boissons en payant très cher des
produits authentiques. Les gens riches ou
seulement aisés pourraient, à la rigueur, se
passer des services du Laboratoire municipal,
et même des sévérités de la loi contre les diver-
ses formes de la fraude alimentaire. Mais si le
mençait à penser qu'elle s'était trompée et
que ce qu'elle avait pris pour un sentiment sé-
rieux n'était que la fantaisie d'un instant. Cette
réflexion lui était pénible. Sans qu'elle eût
donné son cœur avant qu'il lui fût demandé,
elle avait certainement beaucoup pensé à Ronald
Ringwood, et elle se sentait fort indignée qu'il
eût cessé si aisément de s'occuper d'elle..
Je voudrais le revoir, pensait-elle avec im-
patience. Quand ce ne serait que pour bien me
convaincre combien j'ai été folle de penser qu'il
s'occupait de moi 1
Miss Chichester ne devait pas tarder long-
temps à voir ce souhait satisfait. Un matin,
Ronald Ringwood fit irruption chez M. Car-
buckle, l'air agité, un papier rose à la main.
C'est trop de mauvaise chance s'écria-t-il.
Voici un télégramme de l'asile de Portsmouth
qui m'annonce la mort de Térence Finnigan!
Voyez « Mort à huit heures et demie ce ma-
tin détails par lettre. »
Et cette convention entre lord Lakington et
miss Chichester qui n'est pas encore signée! l
Penser qu'elle perd cent mille livres de rente
pour un simple relard!
C'esttrès fâcheux, dit Carbuckle. Mais Mary
est la personne du monde qui prendra le moins
à cœur une affaire de ce genre. Quel coup de
filet pour le noble vicomte! Le voilà en pos-
session du capital entier de la tontine! Je
sais bien une chose, par exemple, c'est que je
n'abandonne pas ces trente mille francs à Pe-
gram C'était bon quand Mary était une héritière;
mais j'aurai à lui faire entendre cette fois que
les gens pauvres ne peuvent pas et ne doivent
pas se laisser voler ainsi. Il faudra même que
j'aille la voir à cet effet. Et, le diable, c'est que
j'ai des affaires jusqu'au cou et que je ne sais
où prendre le temps. Il est inutile de vous prier
d'y aller à ma place, j'imagine?.
J'irai si cela peut vous faire plaisir, répli-
qua tranquillement Ronald.
M. Carbuckle ouvrit de grands yeux.
Fort bien! dit-il, allez porter ces nouvelles
à miss Chichosler. Si vous ne la trouvez pas
« belle joueuse », j'en serai très surpris.
Quel que puisse être parfois l'aveuglement
du sexe fort, sur l'état des affections des jeunes
personnes qui les louchent de près, la partie
féminine de la famille est plus perspicace. Mary
Laboratoire est utile à quelqu'un, s'il y a une
catégorie d'individus au profit desquels la loi
fait bien de sévir, c'est évidemment la masse
des ouvriers pauvres, clientèle politique ordi-
naire de la presse ultrajradicale. Pourtant, dès
qu'une question comme celle du mouillage ou
celle. de la bière salicylée vient à se poser, on
peut être sûr de trouver nombre d'organes de
cette presse du côté des empoisonneurs publics.
Il y a, malheureusement pour ces journaux,
une trop bonne raison de leur étrange langage.
Cette raison, il faut bien la dire c'est la
crainte de s'aliéner un personnage qui joue
dans les élections un rôle décisif le marchand
de vin, le cabaretier. Evidemment, on se dit
qu'à approuver. les enquêtes préservatrices du
Laboratoire ou à admettre la législation actuelle
du mouillage on risque de perdre la bienveil
lance du marchand de vin, qui se vengera à la
prochaine élection municipale ou législative.
Oui, tel est le calcul inavouable, mais facile à
saisir, des gens qui se font chaque jour les
complices des pires attentats à la santé publi-
que. Entre leur influence dans certains milieux
et la vie de leurs concitoyens ils n'hésitent
pas. Le cabaretier versera à ses clients du vin
qui n'aura de vin que le nom et de la bière sa-
licylée les clieni s en pâtiront, qu'importe, si
c'est là le prix dont il faut payer le succès d'une
liste électorale dans les arrondissements les
plus populeux? Vive le salicylate 1 car, le sali-
cylate permis, c'est le cabaretier conquis, et le
cabaretier, c'est l'électeur 1
Il y a quelque chose de plus scandaleux enco-
re que l'attitude des personnes auxquelles nous
faisons allusion c'est la sottise du public, la
sottise de l'électeur, qui se livre ainsi corps et
âme, qui boit allègrement du salicylate, qui
donne son vote en échange et qui se fâche
quand on fait mine de le défendre. On a écrit
souvent que le peuple de Paris était le plus
spirituel du monde. Il y parait bien, en vérité 1
Mais, après tout, tous les goûts sont, comme
on dit, dans la nature. La femme de Sganarelle
aimait à être battue si les ouvriers de Paris
aiment à être empoisonnés, cela les regarde.
L'INSURRECTION MILITAIRE A MADRID
(Dépêches de notre correspondant particulier)
• Madrid, 22 septembre, 8 h. 30.
La reine est rentrée hier à Madrid. La foule, sur
son passage dans les rues, lui a fait un accueil
bienveillant. A la gare, le monde officiel a éLéplus
enthousiaste. Elle doit assister aujourd'hui au con-
seil des ministres et retourner demain à la Granja,
où sont restés, avec l'infante Isabelle, le jeune roi
et les princesses. La reine n'a reçu personne, quoi-
que le maréchal Martinez Campos et plusieurs au-
tres généraux fussent au palais.
M. Sagasta a réuni les ministres dès son arrivée
à Madrid. Il a été décidé qu'on continuerait la po-
litique libérale, mais qu'on agirait avec une ri-
gueur inflexible contre les chefs du mouvement
révolutionnaire.
Madrid, 22 septembre, 9 heures.
La poursuite des insurgés continue activement.
Les prisonniers déclarent qu'ils ont tué plusieurs
sergents qui les avaient entraînés à la révolte. Ils
disent aussi que le général-brigadier Villacanipa
est blessé et qu'avec deux autres officiers il s'est
réfugié dans les carrières de Colmenar. Les trou-
pes surveillent cette localité.
Jusqu'à présent on a arrêté 30 civils, 3 officiers,
7 sergents, 140 fantassins et 106 cavaliers. Tous ont
été écroués dans les prisons militaires, où fonc-
tionnent les conseils de guerre dont les arrêts ne
seront. connus qu'après le départ de la reine pour
la Granja.
Madrid, 22 septembre, 9 h. 10.
D'après les dépêches officielles, les insurgés ont
opposé une certaine résistance aux troupes en-
voyées à leur poursuite.
Plusieurs engagements ont eu lieu et près
d'Aranjuez trois officiers auraient été tués.
A Madrid, on a arrêté cinquante-sept civils et
plusieurs officiers en retraite. Il parait que l'in-
struction a établi que les militaires furent les
les principaux agents du mouvement, mais qu'ils
avaient été trompés par des civils, qui leur ont
fait croire que le soulèvement serait général.
De nombreuses arrestations, parmi les républi-
cains avancés, ont eu lieu à Saragosse, Valladolid,
Léon, Valence et Barcelone.
La cérémonie des obsèques du général Velarde
et du colonel Mirasol a été imposante. La reine a
envoyé deux couronnes. Les ministres, les princi-
pales autorités, les notabilités de tous les par-
tis et une foule immense ont assisté à l'enterre-
ment.
On dit que la reine a exprimé aux généraux Pa-
via et Jovellar le désir de visiter avec eux les ca-
sernes.
Madrid, 22 septembre, 9 heures 30.
Il paraît certain maintenant que le chef du mou
vement a été le brigadier Villacampa, qui avait
déjà pris part à une conspiration et qui avait été
admis à l'amnistie accordée récemment par la
reine régente. Il avait été réintégré dans son
grade.
La majorité de la presse conseille au gouverne-
ment la clémence pour les simples soldats, victi-
mes des conseils de leurs chefs.
Hier, dans la nuit, quinze nouvelles arrestations
de républicains avancés ont eu lieu à Madrid.
Les ministres ont conseillé à la reine de rester
dans la capitale, mais de renoncer à la visite des
casernes.
L'instruction a établi que le mouvement ne de-
vait éclater que le 22 septembre, mais que, par la
faute du régiment de Garellano, il fut avancé de
quelques jours.
Chichester était une nature énergique et con-
centrée. Elle ne se répandait pas en confiden-
ces, et jamais, croyait-elle, elle n'avait donné
le moindre signe de l'intérêt particulier qu'elle
portait à Ronald Ringwood. Malgré tout cela,
Béatrice avait pénétré le secret de son amie, et
sa conviction bien assise était que si le jeune
avocat se mettait jamais aux pieds de Mary, il
ne solliciterait pas en vain.
Aussi ne put-elle réprimer un mouvement de
curiosité quand elle entendit annoncer M. Ring-
wood. La première fois qu'elle l'avait vu, Mary
n'était pas encor pour elle l'intime amie qu'elle
était devenue depuis elle se dit avec satisfac-
tion qu'elle allait pouvoir juger avec certitude
de la justesse de ses conjectures. Mary, de son
côté, eut une vague intuition que cette entre-
vue ne serait pas sans influence sur son sort.
Mais ce fut au tour de mistress Lyme Wre-
gis elle-même d'éprouver quelque curiosité
lorsque, après avoir échangé avec elle quelques
phrases de bienvenue, M. Ringwood s'adressa
a miss Chichester
J'ai le regret, dit-il, de vous apprendre
que je vous apporte une fâcheuse nouvelle. Si
mistress Lyme Wregis veut bien le permettre,
c'est à vous seule que je voudrais la communi-
quer d'abord.
Certainement, certainement, dit la vieille
dame. Mary, ma chère, conduisez M. Ring-
wood dans le petit salon, et. attendez un peu,
ma petite vous savez que Béatrice et moi som-
mes prêtes à sympathiser avec vous, n'est-ce
pas ?.
Mary se contenta de remercier sa vieille amie
par un regard éloquent.
Rien de fâcheux n'est arrivé à M. Car-
buckle ? s'écria-t-elle aussitôt qu'elle se trouva
seule avec Ronald.
Non, Dieu merci, ma mauvaise nouvelle a
rapport à la grande tontine, miss Chichester.
J'ai reçu par le télégraphe la nouvelle de la
mort de Finnigan.
Pauvre Térence 1 dit la jeune fille. Il avait
toujours été fidèle à mon père et à nous!
Sa fin a été très douce, poursuivit Ro-
nald, et vu l'état où il était on ne peut regret-
ter pour lui qu'il ait cessé d'exister. Mais vous
paraissez oublier qu'à sa vie étaient attachés
vos droits à la tontine. Les négociations pour
(Service Havas)
Madrid, 21 septembre.
La Correspondencia, journal ministériel, publie une dé-
pêche du commandant militaire d'Aranjuez annonçant
qu'il est informé par le commandant de gendarmerie
de Chinchon de la présence à Colmenar de Oreja de
200 insurgés commandés par un général de brigade.
Le commandant de gendarmerie de Morata télégra-
phie de son côté que les insurgés ont été dispersés et
ont laissé 38 prisonniers, dont 36 soldats d'infanterie
et deux de cavalerie; les autres ont fui vers Villarejo,
Suivant l'Imparcial, journal ministériel, le nombre
des so'dats de cavalerie insurgés à Colmenar serait de
85 et non de 200.
Dix insurgés se sont rendus aux autorités du village
de Villaverde, près Madrid.
Madrid, 21 septembre.
Une dépêche officielle confirme que les insurgés ont
été battus à Morata 38 d'entre eux ont été faits pri-
sonniers.
Le Correo, journal ministériel, dit qu'il ne reste plus
que 10 cavaliers insurgés, qui se sont réfugiés dans les
bois de Tolède.
Madrid, 21 septembre.
Un étudiant en médecine, accusé d'avoir tiré un coup
de revolver sur le général Velarde, a été arrêté.
LES ÉVÉNEMENTS EN BULGARIE
[Dépêches de nos correspondants particuliers)
Sofia, 21 septembre, 4 h. 30 soir.
L'ukase convoquant la grande Assemblée natio-
nale sera publié samedi. Le gouvernement compte
que 500 députés sur 600 soutiendront sa politique.
Sofia, 21 septembre, 7 h. 10 soir.
Le consul russe a refusé d'accepter la réponse
que le gouvernement de la régence a faite à la
note russe, bien qu'on y promette que le procès
des conjurés sera retardé jusqu'à l'arrivée du gé-
néral Kaulbars. MM. Karavelof et Radoslavof se
sont rendus au consulat pour obtenir que l'on re-
vienne sur ce refus. Leur démarche ne peut avoir
de succès, car il est certain que le représentant de
la Russie a des instructions précises et qu'il cher-
chera à établir que la Bulgarie est sous la dépen-
dance complète de la Russie.
Le gouvernement russe dei*ande aussi que la
convocation de la grande Assemblée nalionale soit
différée. ̃•
(Service Havas)
Sofia, 21 septembre.
Il y a eu dans la journée un nouvel entretien des mi-
nistres avec le consul de Russie au sujet de la nouvelle
rédaction de la note. Le gouvernement bulgare n'a pas
encore fait savoir s'il acceptait les termes de cette mo-
dification.
On ne pense pas que cette affaire puisse amener une
crise aiguë immédiatement, mais elle aggrave encore
la tension des rapports.
La Russie croit toujours constater dans les faits et
gestes du gouvernement bulgare un mauvais vouloir à
son égard.
Ce qui est vrai, c'est qu'une opinion assez répandue
soutient que le gouvernement ne doit pas manifester
d'animosité contre la Russie, mais conserver dans ses
actes la plus grande indépendance possible. D'après
cette opinion, il ne faudrait donc pas montrer trop de
condescendance envers la Russie.
L'opinion contraire, qui n'a pas encore prévalu, sou-
tient que l'on devrait faire les premiers. pas dans la
voie d'un accord avec la Russie.
Ce qui accroit le désaccord, c'est qu'à tort ou à raison
la Russie prétend que le gouvernement actuel s'inspire
toujours des conseils de l'Angleterre, qui sont naturel-
lement contraires aux vues de la Russie. Mais on croit
plutôt que l'Angleterre ne jouit plus d'un grand crédit
et, dans certains milieux bulgares on se montre même
sceptique à l'égard de l'appui de l'Angleterre, dont l'effi-
cacité, d'après eux, ne vaut pas les dangers que pour-
rait courir l'avenir du pays si l'on prêtait l'oreille à ses
conseils.
On suit ici attentivement la politique de l'Autriche,
qui semble très hésitante. On remarque que dans l'af-
faire de la note dont il est question plus haut elle ne
s'est pas jointe à l'Allemagne et à la Russie.
L'impression qui domine dans les cercles diplomati-
ques est que cette série d'incidents peut aboutir à de
graves complications.
AFFAIRES COLONIALES
Tonkin
Nous recevons du cabinet de M. le résident gé-
néral en Annam et au Tonkin communication de
la note suivante
Hanoï, 12 août 1886.
Le journal le Temps a publié, à la date du 25 juin, re-
lativement à une adjudication pour un service de cor-
respondances fluviales qui devait avoir lieu le 20 juil-
let dernier, une note blâmant le choix de cette date
comme prématurée, puisqu'elle empêchait les indus-
tries françaises de prendre part à l'adjudication, et ac-
cusant l'administration ou de routine ou d'insouciance
coupable à l'égard des intérêts français.
L'administration du protectorat ne peut accepter en
cette circonstance ni l'un ni l'autre reproche, pour les
raisons suivantes
Les intérêts français sont représentés au Tonkin par
des maisons considérables, à même de satisfaire, sur
tous les points, au programme tracé par le cahier des
charges de l'adjudication. Ces maisons sont notamment
les suivantes Roques, Ulysse- Pila, Claparède, De-
nis frères deBordeaux, les Messageries maritimes, les
Chantiers de la Loire, la Banque maritime, la Banque
de l'Indo-Chine.
Les intérêts du protectorat exigeaient que cette ad-
judication eût lieu à très courte échéance. C'est, en ef-
fet, l'administration qui fait encore actuellement, à ses
frais, le service de la poste, du transport des voyageurs,
des troupes, du matériel, etc. Le tarif et la subvention
payés à l'industrie privée pour faire le même ser-
vice devaient amener une grosse réduction sur les dé-
penses.
Enfin, il avait paru équitable, au moins pour cette
première adjudication, d'offrir des avantages aux mai-
sons françaises qui avaient eu confiance dès le premier
jour dans le Tonkin et y avaient fondé de grands éta-
le. partage que nous avions entamées avec lord
Lakington n'étaient malheureusement pas ter-
minées. L'acte n'est pas signé. Il est par consé-
quent sans valeur.
Je vois, dit Mary avec calme. Lord La-
kington a droit à la totalité de la somme, et ma
fortune s'en va en fumée.
C'est comme vous le dites, et je ne saurais
vous exprimer le regret que j'en ai.
Merci. Je ne dirai pas que je suis insensi-
ble à la perte de cent mille francs de rente; i
mais rappelez-vous que je ne les ai jamais eus,
et qu'il y a un mois à peine je n'avais jamais
pensé à la possibilité de les avoir. Il n'y a donc
rien de véritablement changé dans ma posi-
tion. Mais je ne pourrai jamais assez vous re-
mercier de toute la peine que vous vous êtes
donnée pour ma tante d'abord, pour moi en-
suite, ni assez m'excuser de vous avoir fait
perdre tant de temps.
Ce temps ne sera pas tout à fait perdu,
j'espère, dit Ringwood. Ainsi que M. Carbue-
kle me l'a déclaré -en apprenant la nouvelle,
maintenant que vous avez perdu une fortune
vous ne pouvez guère abandonner votre créan-
ce, et nous recouvrerons pour vous ce que M.
Pegram vous a frauduleusement soustrait.
Je vous prie sérieusement de dire à mon
tuteur que je ne consentirai jamais à ce qu'on
fasse des poursuites, dit Mary. U serait impos-
sible d'éviter de traîner devant le public les
noms de lord Lakington et de sa fille, et, sa-
chant combien Béatrice craint un pareil éclat,
je ne le voudrais pas pour tout l'or du monde.
J'avais espéré m'entendre avec M. Carbuckle,
ajouta Mary en souriant, pour voir s'il y aurait
un dédommagement possible de toutes les pei-
nes et de tout le temps que vous nous avez
consacré. Mais maintenant que me voilà rede-
venue pauvre, je n'ai plus à vous offrir que
mes remerciements sincères.
Elle se dirigeait vers la porte.
Un instant, s'il vous plait, miss Chiches-
ter. s'écria Ronald. J'ai encore autre chose à
vous dire. Depuis que je vous connais, je vous
aime. Ma plus haute ambition serait de vous
nommer ma femme. J'ai attendu pour vous
le dire que vous fussiez en possession des faits
que vous ignoriez et que la question de votre
fortune fût résolue. "Faut-il vous l'avouer?.
blissements. Il convient d'ajouter que pouvaient seule»
ment intervenir sérieusement dans cette adjudication
des maisons ayant déjà au Tonkin des intérêts et un
établissement car l'adjudicataire est chargé de faire
face immédiatement à un service provisoire. Il aurait
été à craindre, en attendant trop longtemps, que des
spéculateurs sans consistance l'emportassent à l'adju-
dication, au grand détriment du protectorat, qui, dix
mois après, n'aurait pas eu son service prêt, on des ac-
tionnaires, dont la déconvenue aurait singulièrement
nui à la réputation du Tonkin, réputation qu'il faut mé-
nager ou, pour mieux dire, refaire.
Nous comprenons parfaitement les raisons qu'a-
vait et qu'a encore le protectorat il organiser la
service des transports dans le plus bref délai; et si
nous avons émis quelques critiques, c'est parce
que nous savions que plusieurs maisons françai.
ses établies au Tonkin ne pouvaient prendre part
à l'adjudication, dont elles étaient avisées télégra
phiquement par leurs agents à Hanoï et à Haï-
phong. On ne nous démentira pas quand nous di-
rons qu'il était impossible à Paris d'avoir le cahiei
des charges à temps pour faire les études et sou-
missionner d'une façon sérieuse.
L'importance des services concédés était ï,6ïfa
qu'il nous semblait bon, dans l'intérêt du Trésor,
de ne pas traiter cette affaire avec précipitation,
et un ou deux mois de délai n'eussent pas été d6
trop pour permettre d'étudier à fond les condi-
tions du service.
Et nous avions raison de regretter la décision
prise, car les personnes qui ont soumissionné ayant
eu de grandes exigences, supérieures aux prévi-
sions de l'administration du protectorat, au der-
nier courrier les services n'étaient pas encore con-
cédés. Il est possible que si d'autres concurrents
il y en avait de très sérieux avaient eu le temps
de faire leurs études et leurs propositions, le pro-
tectorat aurait réglé cette question importante,
qui reste toujours à l'état de projet.
L'agence Havas nous communique la dépêche
suivante
Marseille, 21 septembre.
On assure que depuis que le marquis Tseng a remit
ses pouvoirs d'ambassadeur de Chine à Londres à son
successeur, ni lui ni son entourage n'ont discuté avec
personne les affaires d'Annam ou du Cambodge.
Le marquis Tseng vit à Marseille dans une retraite
absolue. Il est retenu ici par une grave maladie de sok
jeune fils, dont il ne quitte pas le chevet, et est lui-
même indisposé.
Actes officiels
M. le commissaire général de la marine Laurenl
est admis à faire valoir ses droits à la retraite.
Sont nommés aux commandements suivants
Du vaisseau à voiles le Fontenoy, le capitaine de
vaisseau Conneau;
De la frégate l'Alceste, le capitaine de frégate
Gourgas;
Du transport l'Isère, le lieutenant de vaisseau
Goez.
Les lieutenants de vaisseau de Gantès et Baehme
sont nommés à des commandements de torpil-
leurs.
Le ministre de la marine prepare un projet "de
loi qui abrogera le décret d'après lequel les ma-
rins du commerce sont embarqués sur des navires
de l'Etat à titre de mesure disciplinaire.
L'amiral Aube pense avec raison, et nous parta-
geons en cela sa façon de voir, que le service à
bord des bâtiments de l'Etat doit être considért
comme un honneur et non comme une peine.
LETTRES DE MADAGASCAR
(De noire correspondant particulier)
Tananarive, 12 août.
Ce Mariavel (1) est un type curieux. On affirme
que, pendant la guerre, il était chef d'une bande de
voleurs dont la spécialité était de piller les maisons
de ses compatriotes qui étaient à l'armée. Il est la
terreur de Tananarive; continuellement ivre, il
parcourt les rues de la capitale accompagné d'une
bande d'esclaves, bousculant et frappant les pas-
sants, sans distinction d'âge et de sexe. Dès qu'on
l'aperçoit, on fuit comme devant un chien en-.
ragé.
Lundi dernier, son premier aide de camp, un
13° honneur, ayant voulu le faire rentrer chez lui,
a été rossé d'importance en pleine rue par ce fou
furieux, qui a complété ses hauts faits en renver*
sant la lampe du docteur de la légation, qu'un do-
meslique allait faire remplir.
Mais cette fois mal lui en,prit; titubant sur ses
jambes, il a perdu l'équilibre et a été mordre ls
poussière.
Malheur aux femmes qui plaisent à ce forcené.
Celles qui attirent ses regards sont forcées d'ac-
cepter ses faveurs, sinon il les fait battre par ses
esclaves. Et c'est l" moindre des châtiments; par-
fois il leur fait couper les oreilles, parfois aussi i!
lance sur elles. ses chiens et ses offiuiers sur ls
place d'Andahalo.
Tel est l'homme auquel les missionnaires indé-
pendants sont parvenus, dans l'intérêt de leur in-
fluence, à faire accorder la survivance de la charge
de premier ministre. Cela promet pour l'avenir.
Quand de pareils désordres peuvent se produire
impunément dans une ville de quatre-vingt millf
âmes, ne doit-on pas convenir que la sécuriU
n'existe ni pour les indigènes, ni même pour les
Européens ? Le sort de chacun dépend des caprices
du dictateur ou de ses séides.
On se trompe él rangement en s'imaginant que
les Malgaches possèdent un commencement de ci-
vilisation et que le christianisme a corrigé leurs
mœurs. Si les exécutions sommaires sont suppri-
mées, elles sont remplacées par l'empoisonnement
et l'assassinat. La débauche la plus hideuse s'a-
brite derrière les pratiques étroites d'une religior.
formaliste et intolérante, mais elle n'a pas dimi-
(1) Nous rappelons que nous avons détaché hier dt
cette lettre le récit de l'incident soulevé par ce Ma>
riavel, le fils du premier ministre, et pour lequel tout.
satisfaction a été donnée à M. Le Myre de Vilers.
Même si j'avais eu l'honneur d'être agréé, l'ap.
préhension de ce que vous auriez pu penser en
découvrant que j'avais toujours connu l'avenir
brillant qui vous était peut-être ouvert aurait
empoisonné ma joie! Et pour n'avoir pas la
faiblesse de succomber, je me jurai de rester
éloigné de vous tant que l'issue de la loterie
resterait douteuse. J'aurais osé vous demander
votre main, même si vous aviez été une riche
héritière; au moins n'y. aurait-il eu rien de
louche là-dedans. Mais, quel que soit votre
arrêt, vous serez sûre au moins que mes mo-
tifs ne sont point mercenaires. Mary, voulez-
vous m'aimer?. dites-le moi; voulez-vous de-
venir ma femme?
Je sais à peine ce que je veux 1 répondit la
jeune fille d'une voix mal assurée. Vous me
prenez tout à fait par surprise. Mais croyez que
personne ne pourrait admirer plus que moi la
délicatesse de votre conduite. Et c'est bien ce
qui me fait hésiter. Car ce n'est pas assez que
votre femme vous aime, monsieur Ringwood, Il
fautqu'elle ne se sente pas trop indigne de par-
tager votre vie et de marcher côte à côte avec
vous dans la carrière qui vous est sûrement ré-
servée. Vous me laisserez quelques heures de
réflexion, n'est-ce pas?. Demain, je vous ré-
pondrai.
C'est plus que je n'avais osé estpérer, dit
Ronald en portant la main de Mary à ses lè-
vres.
Il est à peine nécessaire de dire qu'un double
mariage vint bientôt servir de conclusion à
l'histoire de la grande tontine. Mais ce qui mé-
rite d'être noté, c'est que lord Lakington, sur
les instances pressantes de son neveu et de sa
fille, assura cent mille francs à miss Chiches-
ter comme présent de noces et à titre de corn.
pensation pour la créance qu'elle abandonnait
si généreusement aux Pegram. Le vicomte mon-
trant dans son âge mûr une tendance mar-
quée à l'économie des biens de ce monde, se.
lon l'habitude des prodigues réformés, unQ
telle générosité devenait de sa part tout à fa'i
exemplaire: il n'est que juste de lui en laisser
l'honneur.
FIN
D'après HAWLEY SMART.
JEUDI 23 SEPTEMBRE 1836.
VINGT SIXIÈME ANNÉE. N* 0273.
PRtX DE L'ABONNEMENT
«RIS. Trois mois, 14 fr. Six mois, 28 fr. Us an, 56 fr.
DÉP1» 4 ALSACE-LORRAINE 17 tt.] 34fr.; 68 fr.
UMIOM POSTALE lSfr.; 36 fr.; ^Sfr.;
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1er ET 16 DE CHAQUE MOIS
tin ïiTUixéro (départements) âO centimes.
ANNONCES MM. Lagrange, CERF ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
PRIX DE L'ABONNEMENT
j^IS Trois mois, 1 4 h. Six mois, 2 8 fr. Un an, 56 fr.
BfrbfiALSACE-LORR-AlNB 17fr.; 34 fr.; 68 fr.
CH10N POSTALE. lSfr.; 36 fr.; 72 fr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1" ET 16 DE CHAQUE MOIS
TJn numéro (à Paris) lo centimes.
Directeur politique Adrien Hébrard
La rédaction ne répond pas des articles comviuniqués
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
PARIS, 22 SEPTEMBRE
BULLETIN DU JOUR
Les manifestations de mécontentement
auxquelles donne lieu, en Autriche, la poli-
tique de l'Allemagne dans la question d'O-
rient, s'accentuent de plus en plus. Nous
avons résumé naguère les interpellations
que deux chefs de groupe à la Chambre des
députés hongroise ont l'intention d'adresser
au gouvernement à ce sujet. Dimanche, c'é-
tait le comte Apponyi, le leader du parti de
l'opposition modérée, qui, parlant devant ses
électeurs de Jassberenyi se prononçait
énergiquement contre l'entente austro-alle-
mande.
Examinant la situation actuelle en Europe,
le comte Apponyi a posé en principe que la
politique autrichienne a essentiellement pour
tâche d'empêcher la Russie de prendre pied
dans la presqu'île des Balkans et de s'en em-
parer. Dans ce but, l'Autriche doit travailler
à favoriser et à défendre l'indépendance des
petits Etats qui se forment dans la péninsule
et s'opposer surtout à ce que la Russie
les annexe. Or, ce qui vient de se produire
en Bulgarie est en contradiction directe avec
ces visées de l'Autriche.
tv Les événements récents, continue le comte
Apponyi, nous ont conduits à douter de l'ap-
pui de l'un des soutiens de notre monarchie
dans lesquels nous avions le plus confiance
notre alliance avec l'Allemagne. Ce serait
vouloir nous bercer d'une illusion volontaire
que de continuer à faire fond sur cette al-
liance. Car, dans les événements qui viennent
de se produire, et dans lesquels nos intérêts
vitaux sont menacés par les menées de la
Russie, la diplomatie allemande ne prend
pas notre parti; au contraire, elle travaille à
favoriser les tendances de la puissance du
Nord qui nous est hostile. L'Autriche en est
donc réduite à ne plus compter que sur ses
propres forces.
L'orateur conclut en demandant que le
gouvernement renonce à la politique d'en-
tente avec les deux empires inaugurée à
Skiernievice. Car cette politique, en favori-
sant l'expansion de la Russie, conduit fatale-
ment à la guerre.
Il ne semble pas que cette façon d'envisa-
ger l'attitude récente de l'Allemagne, qui se
répand de plus en plus en Autriche, émeuve
beaucoup la presse officieuse de Berlin. La
Gazette de l'Allemagne du Nord vient de pu-
blier une nouvelle apologie de la conduite du
chancelier dans la question bulgare. Cet ar-
ticle tient deux colonnes; il n'y est parlé
nulle part du mécontentement que peut
éprouver et qu'éprouve en effet l'Autriche-
ongrie de voir la Bulgarie, augmentée
de \a Roumélie, tomber entre les mains
de la Russie. Par contre, ce plaidoyer
foisonne en dénégations et. en démentis qui
tendraient à faire supposer que les événe-
ments de Sofia n'ont donné lieu à aucun
échange de vues entre les cabinets des trois
empires, que la Russie n'a obtenu aucun
succès diplomatique dans la principauté, que
le rétablissement du statu quo en Bulgarie,
tel qu'il existait avant l'année passée, ne
saurait être une cause d'inquiétude pour
aucun Etat européen. Il serait difficile de
vouloir donner plus maladroitement le chan-
ge, et il faut chercher ailleurs la vérité sur
la politique allemande de ces derniers temps.
Un journal de province, la Gazette du
Weser, nous paraît user de plus de franchise
et poser la situation actuelle en termes
fort nets. D'après cette feuille, la Russie
ayant voulu modifier la situation en Bulga-
rie, qu'il ne lui convenait plus de tolérer,
l'Allemagne s'est trouvée placée dans l'al-
ternative ou de consentir à cet acte ou d'in-
tervenir.. En. prenant ce dernier parti, elle
eût amené une guerre générale, dans la-
quelle l'appui de l'Autriche, mal préparée en
ce moment, n'aurait probablement pas pu
contre-balancer les forces de l'armée russe.
Dans cette conjoncture,le prince de Bismarck
s'est décidé à essayer de concilier les inté-
rêts de l'Autriche et de la Russie, prêt même
à livrer toute la péninsule des Balkans à
cette dernière, pourvu que ces sacrifices
évitent la guerre.
Cette politique est parfaitement intelligible
et même avantageuse à grands frais
pour l'Allemagne; mais, d'autre part, elle est
bien de nature à justifier toutes les inquiétu-
des de l'Autriche, où l'on continue à se de-
mander de plus belle quel profit cette puis-
sance retire de son entente avec l'empire
germanique.
Le bill Parnell a été rejeté hier à 95 voix
de majorité. Ce résultat était prévu. Malgré
le discours extrêmement modéré de M. Par-
nell et l'intervention fort habile de M. Glad-
stone, le gouvernement avait beau jeu, pour
refuser toute concession, de se retrancher
derrière l'enquête qu'il fait poursuivre en Ir-
lande. Lord Hartington a fermement appuyé
FEUILLETORf »O «TERHJP©»
DU 23 SEPTEMBRE 1886 (29)
LA GRANDE TONTINE
XXIV (Suite)
M. Carbuckle, naturellement désireux devoir
îette affaire se décider à l'avantage de sa pu-
pille, vit avec plaisir la proposition du vicomte,
car il valait mieux, indubitablement, assurer à
Mary cent mille francs de rente que risquer de
perdre le tout. Mais, en commun avec la plu-
part des gens de sa profession, il détestait par
dessus tout de se voir « route » en affaires, et
toutes les fois qu'on avait essayé de le faire il
avait mis un acharnement marquera punir l'of-
fenseur. La proposition de lord Lakington rela-
tive aux Pegram lui parut donc inacceptable.
Lakington en parle bien à son aise s'é-
criait-il. Mais pourquoi laisserai-je, moi Car-
huckie, dépouiller ma pupille d'une trentaine
de mille francs, quand il n'y a rien de plus aisé
que de faire rendre gorge aux filous?
Malheureusement, les délais qu'il apporta
ainsi aux négociations furent aussi funestes
aux intérêts qu'il avait à cœur qu'ils furent fa-
vorables à ceux du vicomte. Quelques jours se
passèrent en pourparlers. Il fut impossible d'a-
mener M. Carbuckle à composition son devoir
était de recouvrer l'argent de sa cliente, il n'a-
vait pas à s'occuper de considérations senti-
mentales impossible de le tirer de là. Lord
Lakington était au désespoir.
Nous ne pouvons pourtant pas lui en vou-
ioir 1 disait Jack. Personne ne supporterait
sans de bonnes raisons la'perte d'une somme
aussi importante. Le procès sera désagréable
pour nous; mais rappelons-nous que, pour miss
Chichester c'est une considération de second
ordre.
Cependant il advint que lorsque Mary fut
wnsujtée, cette jeune personne tranch- la dif-
uculté avec une grande désinvolture.
es conservateurs. Sir Michaël Hicks-Beach
a exposé le peint de vue du gouvernement
et annoncé l'intention d'user à l'égard de la
nation irlandaise d'un svstème contraire à la
méthode timorée si infructueusement appli-
quée parles libéraux. Cependant le secrétaire
pour l'Irlande, tout en protestant de sa déter-
mination à ne pas acheter le maintien de l'or-
dre par une politique de faiblesse et d'indul-
gence, a annoncé que le Parlement serait
peut-être appelé à traiter la question irlan-
daise plus tôt que le gouvernement ne l'avait
annoncé. C'est là la seule promesse que le
parti nationaliste et libéral a pu obtenir de
ses adversaires.
«fc»
BÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps
':̃̃̃ Vienne, 22 septembre, 9 heures.
Le gouvernement hongrois ne répondra aux in-
terpellations de MM. Horwath et Daniel Iranyi que
la semaine prochaine. M. Tisza veut conférer à ce
sujet avec M. de Kalnoky.
Vendredi, tous les membres du ministère autri-
chien se rendront à Pest pour délibérer avec les
ministres hongrois sur les questions qui seront
soumises aux Délégations. Les décisions prises
seront soumises à l'empereur, qui fixera la date de
la convocation des Délégations.
Budapest, 22 septembre, 8 h. 30.
Le ministre roumain M. Stourdza est en ce mo-
ment à Pest, où il confère longuement avec M.
Tisza et le ministre du commerce M. Szechenyi,
au sujet du traité de commerce entre les deux
pays. ̃̃•̃- ̃̃̃̃
Bade, 22 septembre, 8 h. 40.
Les bruits inquiétants qui ont couru sur la santé
de l'empereur Guillaume sont dénués de tout fon-
dement. Chaque jour il fait sa promenade en voi-
ture. Hier, il a déjeuné au château grand-ducal,
et le soir il a réuni chez lui, à la villa Messmer,
où il est descendu comme d'habitude, une nom-
breuse société.
Belgrade, 22 septembre, 7 h. 50.
Le roi Milan est attendu la semaine prochaine à
Belgrade.
La Haye, 22 septembre, 8 h. 15.
Le roi a nommé une commission chargée de
faire une enquête sur la situation de l'agriculture
et de formuler des propositions pour son dévelop-
pement. tse;,vfce Ilavas)
(Service Havas)
Londres, 22 septembre.
Le roi de Portugal est parti ce matin pour Plymouth,
où il s'embarquera pour retourner directement à Lis-
bonne.
.•>.
On a pu lire, dans les correspondances qui
nous ont été adressées de Limoges, le compte
rendu détaillé des manœuvres du 12° corps
d'armée. Comme il arrive ordinairement en
pareil cas, le spectateur de ces grandes so-
lennités militaires n'est pas enclin à juger
les efforts déployés de part et d'autre, ni à
apprécier les résultats obtenus, encore moins
à signaler les lacunes de l'organisation d'en-
semble de notre armée. L'aspect des troupes
ravit jusqu'aux plus indifférents et le bruit
du canon trouble jusqu'aux plus sceptiques.
Aussi l'attention de nos correspondants a-
t-elle été surtout dirigée vers les détails de la
vie militaire; avec d'innombrables Français
accourus surle théâtre de cette petite guerre,
ils ont admiré la précision des mouvements,
la vigueur des troupiers, l'entrain et l'esprit
d'initiative des officiers. Et comment eussent-
ils fait une restriction, formulé une critique,
alors que les applaudissements éclataient de
toutes parts et que la vue du drapeau provo-
quait les plus touchantes manifestations d'un
patriotisme toujours facile à émouvoir?
Ceux qui suivent de loin les manoeuvres
qui ont lieu chaque année aiment à profiter
de cette occasion pour dresser l'état des ré-
formes accomplies, de celles que l'intérêt de
la défense nationale exige et de celles aussi
dont les manœuvres elles-mêmes ont dé-
montré l'urgence. Une armée qui demeure
stationnaire est condamnée d'avance à avoir
le dessous, quelle que soit d'ailleurs le ca-
ractère de la lutte où elle sera engagée.
Nulle part plus que dans le domaine de l'art
militaire l'activité humaine ne s'est donné
libre carrière, multipliant les découvertes
ingénieuses, les transformations inattendues.
Aussi les budgets de la guerre, en tous pays,
vont-ils en croissant chaque jour et doit-on
se demander, non sans une certaine curio-
sité mélangée d'inquiétude, où l'on s'arrê-
tera dans cette voie qui paraît sans issue.
Les manœuvres elles-mêmes coûtent fort
cher, non seulement au budget de l'Etat,
mais à la nation entière; l'appel des réser-
vistes est une très lourde charge pour les po-
pulations, qui sont obligées d'interrompre
certains travaux; l'industrie et l'agriculture
sont également atteintes dans leurs intérêts.
Aussi ne faut-il pas être surpris que des pro-
testations se soient élevées, et que certains
organes de la presse aient réclamé la sup-
pression des convocations annuelles de la ré-
serve et de l'armée territoriale. Nous avons
jugé inutile d'entamer une polémique à ce
sujet; le rappel sous les drapeaux, à des in-
Mon cher tuteur, s'écria-t-elle, je ne veux
pas entendre parler de ce procès, et je donne-
rais de bon cœur une somme plus importante
pour empêcher que le misérable engagement
de cette chère Béatrice lui puisse être jeté au
visage. D'ailleurs, cent mille livres de rente se-
raient pour moi une fortune fabuleuse et, en
tout cas, bien plus considérable qu'il ne faut. Je
ne saurais vraiment pas comment dépenser un
tel revenu! 1
Hum, fit l'avocat, c'est une chose qui s'ap-
prend vile, croyez-moi.
Peu importe, dit Mary en riant. J'ai fait
répondre il y a quelques jours à lord Laking-
ton que j'étais prête à entrer avec lui dans tel
arrangement qui lui paraîtrait convenable. De
grâce, ne le tenez pas davantage en suspens.
Faites préparer sans retard les pièces ou actes
nécessaires, comme il vous plaira de les appe-
ler, et finissons-en. A propos, voyez-vous quel-
quefois M. Ringwood?
Rarement depuis quelque temps. Peut-
être est-il occupé. occupé à préparer pour
vous son mémoire de frais, miss Mary! Je
crains bien que vous n'ayez de terribles comp-
tes à lui rendre 1.
C'est vous, naturellement, monsieur Car-
buckle, qui réglerez cela. Tout ce que je puis
dire, c'est que je vous prie de donner les yeux
fermés ce qu'il demandera.
Bah! je plaisantais, enfant: Ringwood a
certainement travaillé ferme pour vous servir;
mais il serait aussi blessé que moi-même à l'i-
dée d'être payé par. vous
Mais comment, alors, puis-je m'acquitter
envers lui? s'écria Mary.
Ah! je n'en sais rien. Il vous le dira lui-
même C'est un garçon audacieux, et on ne
peut pas savoir jusqu'où iront ses préten-
tions Adieu.
Miss Chichester avait médité plus d'une
fois sur la persistance que Ringwood met-
tait à l'éviter. Fidèle à la résolution qu'il
avait prise, il n'était pas revenu à Victoria
Road depuis l'expédition de Portsmouth. Quel-
que temps auparavant, Mary s'était crue par-
faitement autorisée à le considérer comme un
admirateur capable de devenir un prétendant
sur le plus léger encouragement. Elle eom-
tervalles déterminés, des anciens soldats est
tellement nécessaire au maintien de la cohé-
sion de nos forces militaires que toute dis-
sertation serait en l'espèce bien inopportune,
surtout si l'on ajoute que la loi de 1872 en-
combre l'armée active e^Sà, réserve de
300,000 jeunes gens environ qui n'ont jamais
servi que pendant deux périodes de vingt-
huit jours.
Mais, aujourd'hui, ce n'est pas l'institu-
tion des vingt-huit et des treize jours que
l'on vise; c'est aux grandes manœuvres que
l'on s'en prend c'est leur utilité que l'on
conteste. A qui profitent-elles, dit-on, ces
manœuvres où chacun marche vers un but
parfaitement déterminé, suivant des chemins
dont il connalt les moindres détours, où le
combat n'est qu'un vain simulacre, où les
arbitres ont fort à faire pour désigner le
vainqueur et le vaincu? En un mot, on pré-
tend que l'imprévu ne joue aucun rôle aux
manœuvres d'automne, alors qu'il est réel-
ment tout à la guerre.
Ces objections avaient une certaine valeur,
quand on réglait jusque dans les détails les
plus insignifiants l'action des régiments,
que l'on indiquait même l'heure de la ren-
contre et celle de la cessation du feu, on in-
terdisait du même coup toute initiative aux
généraux. Les manœuvres n'étaient plus
alors que des exercices de garnison; elles
n'étaient plus l'image, même affaiblie, de la
guerre, l'école où se forment les chefs d'ar-
mée, où les officiers subalternes complètent
leur instruction.
Aussi le ministre de la guerre avait-il
prescrit que, cette année, les généraux fus-
sent laissés tout à fait libres de leurs mou-
vements on leur ordonnait simplement de
s'emparer d'une ville, d'une région ou d'ar-
rêter les progrès d'une armée d'invasion. Le
programme était élémentaire; quant à son
exécution, toujours très compliquée, il ap-
partenait aux seuls généraux de l'assurer à
leur gré et sous leur responsabilité person-
nelle.
Cette modification radicale n'a pas désar-
mé les détracteurs des manœuvres d'au-
tomne ils ont prétendu que le spectacle des
fautes commises par des généraux était nui-
sible au respect de la discipline. Voilà, en
vérité, une étrange façon. de raisonner. Tan-
tôt, dit-on, les généraux sont soumis à une
sujétion intolérable et se meuvent dans un
cadre trop étroit; tantôt, au contraire, ils
jouissent d'une indépendance dangereuse. Et
sur quelle autorité s'appuie-t-on pour étayer
cette thèse risquée? Sur l'autorité des écri-
vains militaires de l'Allemagne, sur celle de
Frédéric II, le souverain qui créa les manœu-
vres et qui, de 1745 à 1756, entraîna ses trou-
pes en leur faisant exécuter sans relâche les
opérations les plus compliquées de la guerre.
Il est parfaitement exact qu'après la mort
de Frédéric II les manœuvres de l'armée
prussienne dégénérèrent peu à peu en repré-
sentations militaires auxquelles étaient con-
viés les généraux des nations étrangères.
Aussi le général Bronsart de Schellendorf
s'exprime-t-il en ces termes « On sacrifia
» tout au coup d'œil, et c'est ainsi que furent
» préparés les désastres de 1806. » Et il
ajoute Le résultat des manœuvres de 1745
». est bien connu elles eurent pour consé-
» quence l'issue des batailles de la guerre de
» Sept Ans, qui, livrées presque toutes con-
» tre un ennemi supérieur en nombre, se ter-
» minèrent presque toutes à l'avantage des
» armes prussiennes. »
Quant aux revues qui ont clos les manœu-
vres, non seulement à Bordeaux et'à Limo-
ges, mais dans tous nos corps d'armée, elles
nous semblent presque aussi indispensables
que les manœuvres elles-mêmes. Les réser-
vistes et les soldats ont gaiement supporté
des fatigues parfois excessives; ils ont ap-
pris à marcher sans se plaindre; ils ont aussi
fraternisé, ils se sont retrouvés, anciens et
jeunes soldats, et c'est cette union intime de
l'armée et de sa réserve qu'il faut favoriser
à tout prix. Eh bien, le réserviste est fier
d'avoir été passé en revue; que le soleil soit
brûlant ou que la pluie tombe, il tient à défi-
ler devant son général. N'est-ce donc rien
que l'esprit militaire?
iM«grn.–
M. le docteur Chautemps, conseiller muni-
cipal, adresse à la Justice une lettre pour dé-
fendre l'attitude de la commission de contrôle
du Laboratoire, dont il est le président, dans
la question des bières salicylées. Contre quels
adversaires la commission a-t-elle donc à se
défendre? Contre certains organes de la presse
radicale la plus avancée. Voilà qui est presque
incroyable, mais qui n'est, hélas! quetrop vrai.
Il semblerait que les feuilles radicales dussent
prendre en main plus que les autres les inté-
rêts des petites gens, qui n'ont pas les moyens
de se mettre à l'abri de la falsification des ali-
ments et des boissons en payant très cher des
produits authentiques. Les gens riches ou
seulement aisés pourraient, à la rigueur, se
passer des services du Laboratoire municipal,
et même des sévérités de la loi contre les diver-
ses formes de la fraude alimentaire. Mais si le
mençait à penser qu'elle s'était trompée et
que ce qu'elle avait pris pour un sentiment sé-
rieux n'était que la fantaisie d'un instant. Cette
réflexion lui était pénible. Sans qu'elle eût
donné son cœur avant qu'il lui fût demandé,
elle avait certainement beaucoup pensé à Ronald
Ringwood, et elle se sentait fort indignée qu'il
eût cessé si aisément de s'occuper d'elle..
Je voudrais le revoir, pensait-elle avec im-
patience. Quand ce ne serait que pour bien me
convaincre combien j'ai été folle de penser qu'il
s'occupait de moi 1
Miss Chichester ne devait pas tarder long-
temps à voir ce souhait satisfait. Un matin,
Ronald Ringwood fit irruption chez M. Car-
buckle, l'air agité, un papier rose à la main.
C'est trop de mauvaise chance s'écria-t-il.
Voici un télégramme de l'asile de Portsmouth
qui m'annonce la mort de Térence Finnigan!
Voyez « Mort à huit heures et demie ce ma-
tin détails par lettre. »
Et cette convention entre lord Lakington et
miss Chichester qui n'est pas encore signée! l
Penser qu'elle perd cent mille livres de rente
pour un simple relard!
C'esttrès fâcheux, dit Carbuckle. Mais Mary
est la personne du monde qui prendra le moins
à cœur une affaire de ce genre. Quel coup de
filet pour le noble vicomte! Le voilà en pos-
session du capital entier de la tontine! Je
sais bien une chose, par exemple, c'est que je
n'abandonne pas ces trente mille francs à Pe-
gram C'était bon quand Mary était une héritière;
mais j'aurai à lui faire entendre cette fois que
les gens pauvres ne peuvent pas et ne doivent
pas se laisser voler ainsi. Il faudra même que
j'aille la voir à cet effet. Et, le diable, c'est que
j'ai des affaires jusqu'au cou et que je ne sais
où prendre le temps. Il est inutile de vous prier
d'y aller à ma place, j'imagine?.
J'irai si cela peut vous faire plaisir, répli-
qua tranquillement Ronald.
M. Carbuckle ouvrit de grands yeux.
Fort bien! dit-il, allez porter ces nouvelles
à miss Chichosler. Si vous ne la trouvez pas
« belle joueuse », j'en serai très surpris.
Quel que puisse être parfois l'aveuglement
du sexe fort, sur l'état des affections des jeunes
personnes qui les louchent de près, la partie
féminine de la famille est plus perspicace. Mary
Laboratoire est utile à quelqu'un, s'il y a une
catégorie d'individus au profit desquels la loi
fait bien de sévir, c'est évidemment la masse
des ouvriers pauvres, clientèle politique ordi-
naire de la presse ultrajradicale. Pourtant, dès
qu'une question comme celle du mouillage ou
celle. de la bière salicylée vient à se poser, on
peut être sûr de trouver nombre d'organes de
cette presse du côté des empoisonneurs publics.
Il y a, malheureusement pour ces journaux,
une trop bonne raison de leur étrange langage.
Cette raison, il faut bien la dire c'est la
crainte de s'aliéner un personnage qui joue
dans les élections un rôle décisif le marchand
de vin, le cabaretier. Evidemment, on se dit
qu'à approuver. les enquêtes préservatrices du
Laboratoire ou à admettre la législation actuelle
du mouillage on risque de perdre la bienveil
lance du marchand de vin, qui se vengera à la
prochaine élection municipale ou législative.
Oui, tel est le calcul inavouable, mais facile à
saisir, des gens qui se font chaque jour les
complices des pires attentats à la santé publi-
que. Entre leur influence dans certains milieux
et la vie de leurs concitoyens ils n'hésitent
pas. Le cabaretier versera à ses clients du vin
qui n'aura de vin que le nom et de la bière sa-
licylée les clieni s en pâtiront, qu'importe, si
c'est là le prix dont il faut payer le succès d'une
liste électorale dans les arrondissements les
plus populeux? Vive le salicylate 1 car, le sali-
cylate permis, c'est le cabaretier conquis, et le
cabaretier, c'est l'électeur 1
Il y a quelque chose de plus scandaleux enco-
re que l'attitude des personnes auxquelles nous
faisons allusion c'est la sottise du public, la
sottise de l'électeur, qui se livre ainsi corps et
âme, qui boit allègrement du salicylate, qui
donne son vote en échange et qui se fâche
quand on fait mine de le défendre. On a écrit
souvent que le peuple de Paris était le plus
spirituel du monde. Il y parait bien, en vérité 1
Mais, après tout, tous les goûts sont, comme
on dit, dans la nature. La femme de Sganarelle
aimait à être battue si les ouvriers de Paris
aiment à être empoisonnés, cela les regarde.
L'INSURRECTION MILITAIRE A MADRID
(Dépêches de notre correspondant particulier)
• Madrid, 22 septembre, 8 h. 30.
La reine est rentrée hier à Madrid. La foule, sur
son passage dans les rues, lui a fait un accueil
bienveillant. A la gare, le monde officiel a éLéplus
enthousiaste. Elle doit assister aujourd'hui au con-
seil des ministres et retourner demain à la Granja,
où sont restés, avec l'infante Isabelle, le jeune roi
et les princesses. La reine n'a reçu personne, quoi-
que le maréchal Martinez Campos et plusieurs au-
tres généraux fussent au palais.
M. Sagasta a réuni les ministres dès son arrivée
à Madrid. Il a été décidé qu'on continuerait la po-
litique libérale, mais qu'on agirait avec une ri-
gueur inflexible contre les chefs du mouvement
révolutionnaire.
Madrid, 22 septembre, 9 heures.
La poursuite des insurgés continue activement.
Les prisonniers déclarent qu'ils ont tué plusieurs
sergents qui les avaient entraînés à la révolte. Ils
disent aussi que le général-brigadier Villacanipa
est blessé et qu'avec deux autres officiers il s'est
réfugié dans les carrières de Colmenar. Les trou-
pes surveillent cette localité.
Jusqu'à présent on a arrêté 30 civils, 3 officiers,
7 sergents, 140 fantassins et 106 cavaliers. Tous ont
été écroués dans les prisons militaires, où fonc-
tionnent les conseils de guerre dont les arrêts ne
seront. connus qu'après le départ de la reine pour
la Granja.
Madrid, 22 septembre, 9 h. 10.
D'après les dépêches officielles, les insurgés ont
opposé une certaine résistance aux troupes en-
voyées à leur poursuite.
Plusieurs engagements ont eu lieu et près
d'Aranjuez trois officiers auraient été tués.
A Madrid, on a arrêté cinquante-sept civils et
plusieurs officiers en retraite. Il parait que l'in-
struction a établi que les militaires furent les
les principaux agents du mouvement, mais qu'ils
avaient été trompés par des civils, qui leur ont
fait croire que le soulèvement serait général.
De nombreuses arrestations, parmi les républi-
cains avancés, ont eu lieu à Saragosse, Valladolid,
Léon, Valence et Barcelone.
La cérémonie des obsèques du général Velarde
et du colonel Mirasol a été imposante. La reine a
envoyé deux couronnes. Les ministres, les princi-
pales autorités, les notabilités de tous les par-
tis et une foule immense ont assisté à l'enterre-
ment.
On dit que la reine a exprimé aux généraux Pa-
via et Jovellar le désir de visiter avec eux les ca-
sernes.
Madrid, 22 septembre, 9 heures 30.
Il paraît certain maintenant que le chef du mou
vement a été le brigadier Villacampa, qui avait
déjà pris part à une conspiration et qui avait été
admis à l'amnistie accordée récemment par la
reine régente. Il avait été réintégré dans son
grade.
La majorité de la presse conseille au gouverne-
ment la clémence pour les simples soldats, victi-
mes des conseils de leurs chefs.
Hier, dans la nuit, quinze nouvelles arrestations
de républicains avancés ont eu lieu à Madrid.
Les ministres ont conseillé à la reine de rester
dans la capitale, mais de renoncer à la visite des
casernes.
L'instruction a établi que le mouvement ne de-
vait éclater que le 22 septembre, mais que, par la
faute du régiment de Garellano, il fut avancé de
quelques jours.
Chichester était une nature énergique et con-
centrée. Elle ne se répandait pas en confiden-
ces, et jamais, croyait-elle, elle n'avait donné
le moindre signe de l'intérêt particulier qu'elle
portait à Ronald Ringwood. Malgré tout cela,
Béatrice avait pénétré le secret de son amie, et
sa conviction bien assise était que si le jeune
avocat se mettait jamais aux pieds de Mary, il
ne solliciterait pas en vain.
Aussi ne put-elle réprimer un mouvement de
curiosité quand elle entendit annoncer M. Ring-
wood. La première fois qu'elle l'avait vu, Mary
n'était pas encor pour elle l'intime amie qu'elle
était devenue depuis elle se dit avec satisfac-
tion qu'elle allait pouvoir juger avec certitude
de la justesse de ses conjectures. Mary, de son
côté, eut une vague intuition que cette entre-
vue ne serait pas sans influence sur son sort.
Mais ce fut au tour de mistress Lyme Wre-
gis elle-même d'éprouver quelque curiosité
lorsque, après avoir échangé avec elle quelques
phrases de bienvenue, M. Ringwood s'adressa
a miss Chichester
J'ai le regret, dit-il, de vous apprendre
que je vous apporte une fâcheuse nouvelle. Si
mistress Lyme Wregis veut bien le permettre,
c'est à vous seule que je voudrais la communi-
quer d'abord.
Certainement, certainement, dit la vieille
dame. Mary, ma chère, conduisez M. Ring-
wood dans le petit salon, et. attendez un peu,
ma petite vous savez que Béatrice et moi som-
mes prêtes à sympathiser avec vous, n'est-ce
pas ?.
Mary se contenta de remercier sa vieille amie
par un regard éloquent.
Rien de fâcheux n'est arrivé à M. Car-
buckle ? s'écria-t-elle aussitôt qu'elle se trouva
seule avec Ronald.
Non, Dieu merci, ma mauvaise nouvelle a
rapport à la grande tontine, miss Chichester.
J'ai reçu par le télégraphe la nouvelle de la
mort de Finnigan.
Pauvre Térence 1 dit la jeune fille. Il avait
toujours été fidèle à mon père et à nous!
Sa fin a été très douce, poursuivit Ro-
nald, et vu l'état où il était on ne peut regret-
ter pour lui qu'il ait cessé d'exister. Mais vous
paraissez oublier qu'à sa vie étaient attachés
vos droits à la tontine. Les négociations pour
(Service Havas)
Madrid, 21 septembre.
La Correspondencia, journal ministériel, publie une dé-
pêche du commandant militaire d'Aranjuez annonçant
qu'il est informé par le commandant de gendarmerie
de Chinchon de la présence à Colmenar de Oreja de
200 insurgés commandés par un général de brigade.
Le commandant de gendarmerie de Morata télégra-
phie de son côté que les insurgés ont été dispersés et
ont laissé 38 prisonniers, dont 36 soldats d'infanterie
et deux de cavalerie; les autres ont fui vers Villarejo,
Suivant l'Imparcial, journal ministériel, le nombre
des so'dats de cavalerie insurgés à Colmenar serait de
85 et non de 200.
Dix insurgés se sont rendus aux autorités du village
de Villaverde, près Madrid.
Madrid, 21 septembre.
Une dépêche officielle confirme que les insurgés ont
été battus à Morata 38 d'entre eux ont été faits pri-
sonniers.
Le Correo, journal ministériel, dit qu'il ne reste plus
que 10 cavaliers insurgés, qui se sont réfugiés dans les
bois de Tolède.
Madrid, 21 septembre.
Un étudiant en médecine, accusé d'avoir tiré un coup
de revolver sur le général Velarde, a été arrêté.
LES ÉVÉNEMENTS EN BULGARIE
[Dépêches de nos correspondants particuliers)
Sofia, 21 septembre, 4 h. 30 soir.
L'ukase convoquant la grande Assemblée natio-
nale sera publié samedi. Le gouvernement compte
que 500 députés sur 600 soutiendront sa politique.
Sofia, 21 septembre, 7 h. 10 soir.
Le consul russe a refusé d'accepter la réponse
que le gouvernement de la régence a faite à la
note russe, bien qu'on y promette que le procès
des conjurés sera retardé jusqu'à l'arrivée du gé-
néral Kaulbars. MM. Karavelof et Radoslavof se
sont rendus au consulat pour obtenir que l'on re-
vienne sur ce refus. Leur démarche ne peut avoir
de succès, car il est certain que le représentant de
la Russie a des instructions précises et qu'il cher-
chera à établir que la Bulgarie est sous la dépen-
dance complète de la Russie.
Le gouvernement russe dei*ande aussi que la
convocation de la grande Assemblée nalionale soit
différée. ̃•
(Service Havas)
Sofia, 21 septembre.
Il y a eu dans la journée un nouvel entretien des mi-
nistres avec le consul de Russie au sujet de la nouvelle
rédaction de la note. Le gouvernement bulgare n'a pas
encore fait savoir s'il acceptait les termes de cette mo-
dification.
On ne pense pas que cette affaire puisse amener une
crise aiguë immédiatement, mais elle aggrave encore
la tension des rapports.
La Russie croit toujours constater dans les faits et
gestes du gouvernement bulgare un mauvais vouloir à
son égard.
Ce qui est vrai, c'est qu'une opinion assez répandue
soutient que le gouvernement ne doit pas manifester
d'animosité contre la Russie, mais conserver dans ses
actes la plus grande indépendance possible. D'après
cette opinion, il ne faudrait donc pas montrer trop de
condescendance envers la Russie.
L'opinion contraire, qui n'a pas encore prévalu, sou-
tient que l'on devrait faire les premiers. pas dans la
voie d'un accord avec la Russie.
Ce qui accroit le désaccord, c'est qu'à tort ou à raison
la Russie prétend que le gouvernement actuel s'inspire
toujours des conseils de l'Angleterre, qui sont naturel-
lement contraires aux vues de la Russie. Mais on croit
plutôt que l'Angleterre ne jouit plus d'un grand crédit
et, dans certains milieux bulgares on se montre même
sceptique à l'égard de l'appui de l'Angleterre, dont l'effi-
cacité, d'après eux, ne vaut pas les dangers que pour-
rait courir l'avenir du pays si l'on prêtait l'oreille à ses
conseils.
On suit ici attentivement la politique de l'Autriche,
qui semble très hésitante. On remarque que dans l'af-
faire de la note dont il est question plus haut elle ne
s'est pas jointe à l'Allemagne et à la Russie.
L'impression qui domine dans les cercles diplomati-
ques est que cette série d'incidents peut aboutir à de
graves complications.
AFFAIRES COLONIALES
Tonkin
Nous recevons du cabinet de M. le résident gé-
néral en Annam et au Tonkin communication de
la note suivante
Hanoï, 12 août 1886.
Le journal le Temps a publié, à la date du 25 juin, re-
lativement à une adjudication pour un service de cor-
respondances fluviales qui devait avoir lieu le 20 juil-
let dernier, une note blâmant le choix de cette date
comme prématurée, puisqu'elle empêchait les indus-
tries françaises de prendre part à l'adjudication, et ac-
cusant l'administration ou de routine ou d'insouciance
coupable à l'égard des intérêts français.
L'administration du protectorat ne peut accepter en
cette circonstance ni l'un ni l'autre reproche, pour les
raisons suivantes
Les intérêts français sont représentés au Tonkin par
des maisons considérables, à même de satisfaire, sur
tous les points, au programme tracé par le cahier des
charges de l'adjudication. Ces maisons sont notamment
les suivantes Roques, Ulysse- Pila, Claparède, De-
nis frères deBordeaux, les Messageries maritimes, les
Chantiers de la Loire, la Banque maritime, la Banque
de l'Indo-Chine.
Les intérêts du protectorat exigeaient que cette ad-
judication eût lieu à très courte échéance. C'est, en ef-
fet, l'administration qui fait encore actuellement, à ses
frais, le service de la poste, du transport des voyageurs,
des troupes, du matériel, etc. Le tarif et la subvention
payés à l'industrie privée pour faire le même ser-
vice devaient amener une grosse réduction sur les dé-
penses.
Enfin, il avait paru équitable, au moins pour cette
première adjudication, d'offrir des avantages aux mai-
sons françaises qui avaient eu confiance dès le premier
jour dans le Tonkin et y avaient fondé de grands éta-
le. partage que nous avions entamées avec lord
Lakington n'étaient malheureusement pas ter-
minées. L'acte n'est pas signé. Il est par consé-
quent sans valeur.
Je vois, dit Mary avec calme. Lord La-
kington a droit à la totalité de la somme, et ma
fortune s'en va en fumée.
C'est comme vous le dites, et je ne saurais
vous exprimer le regret que j'en ai.
Merci. Je ne dirai pas que je suis insensi-
ble à la perte de cent mille francs de rente; i
mais rappelez-vous que je ne les ai jamais eus,
et qu'il y a un mois à peine je n'avais jamais
pensé à la possibilité de les avoir. Il n'y a donc
rien de véritablement changé dans ma posi-
tion. Mais je ne pourrai jamais assez vous re-
mercier de toute la peine que vous vous êtes
donnée pour ma tante d'abord, pour moi en-
suite, ni assez m'excuser de vous avoir fait
perdre tant de temps.
Ce temps ne sera pas tout à fait perdu,
j'espère, dit Ringwood. Ainsi que M. Carbue-
kle me l'a déclaré -en apprenant la nouvelle,
maintenant que vous avez perdu une fortune
vous ne pouvez guère abandonner votre créan-
ce, et nous recouvrerons pour vous ce que M.
Pegram vous a frauduleusement soustrait.
Je vous prie sérieusement de dire à mon
tuteur que je ne consentirai jamais à ce qu'on
fasse des poursuites, dit Mary. U serait impos-
sible d'éviter de traîner devant le public les
noms de lord Lakington et de sa fille, et, sa-
chant combien Béatrice craint un pareil éclat,
je ne le voudrais pas pour tout l'or du monde.
J'avais espéré m'entendre avec M. Carbuckle,
ajouta Mary en souriant, pour voir s'il y aurait
un dédommagement possible de toutes les pei-
nes et de tout le temps que vous nous avez
consacré. Mais maintenant que me voilà rede-
venue pauvre, je n'ai plus à vous offrir que
mes remerciements sincères.
Elle se dirigeait vers la porte.
Un instant, s'il vous plait, miss Chiches-
ter. s'écria Ronald. J'ai encore autre chose à
vous dire. Depuis que je vous connais, je vous
aime. Ma plus haute ambition serait de vous
nommer ma femme. J'ai attendu pour vous
le dire que vous fussiez en possession des faits
que vous ignoriez et que la question de votre
fortune fût résolue. "Faut-il vous l'avouer?.
blissements. Il convient d'ajouter que pouvaient seule»
ment intervenir sérieusement dans cette adjudication
des maisons ayant déjà au Tonkin des intérêts et un
établissement car l'adjudicataire est chargé de faire
face immédiatement à un service provisoire. Il aurait
été à craindre, en attendant trop longtemps, que des
spéculateurs sans consistance l'emportassent à l'adju-
dication, au grand détriment du protectorat, qui, dix
mois après, n'aurait pas eu son service prêt, on des ac-
tionnaires, dont la déconvenue aurait singulièrement
nui à la réputation du Tonkin, réputation qu'il faut mé-
nager ou, pour mieux dire, refaire.
Nous comprenons parfaitement les raisons qu'a-
vait et qu'a encore le protectorat il organiser la
service des transports dans le plus bref délai; et si
nous avons émis quelques critiques, c'est parce
que nous savions que plusieurs maisons françai.
ses établies au Tonkin ne pouvaient prendre part
à l'adjudication, dont elles étaient avisées télégra
phiquement par leurs agents à Hanoï et à Haï-
phong. On ne nous démentira pas quand nous di-
rons qu'il était impossible à Paris d'avoir le cahiei
des charges à temps pour faire les études et sou-
missionner d'une façon sérieuse.
L'importance des services concédés était ï,6ïfa
qu'il nous semblait bon, dans l'intérêt du Trésor,
de ne pas traiter cette affaire avec précipitation,
et un ou deux mois de délai n'eussent pas été d6
trop pour permettre d'étudier à fond les condi-
tions du service.
Et nous avions raison de regretter la décision
prise, car les personnes qui ont soumissionné ayant
eu de grandes exigences, supérieures aux prévi-
sions de l'administration du protectorat, au der-
nier courrier les services n'étaient pas encore con-
cédés. Il est possible que si d'autres concurrents
il y en avait de très sérieux avaient eu le temps
de faire leurs études et leurs propositions, le pro-
tectorat aurait réglé cette question importante,
qui reste toujours à l'état de projet.
L'agence Havas nous communique la dépêche
suivante
Marseille, 21 septembre.
On assure que depuis que le marquis Tseng a remit
ses pouvoirs d'ambassadeur de Chine à Londres à son
successeur, ni lui ni son entourage n'ont discuté avec
personne les affaires d'Annam ou du Cambodge.
Le marquis Tseng vit à Marseille dans une retraite
absolue. Il est retenu ici par une grave maladie de sok
jeune fils, dont il ne quitte pas le chevet, et est lui-
même indisposé.
Actes officiels
M. le commissaire général de la marine Laurenl
est admis à faire valoir ses droits à la retraite.
Sont nommés aux commandements suivants
Du vaisseau à voiles le Fontenoy, le capitaine de
vaisseau Conneau;
De la frégate l'Alceste, le capitaine de frégate
Gourgas;
Du transport l'Isère, le lieutenant de vaisseau
Goez.
Les lieutenants de vaisseau de Gantès et Baehme
sont nommés à des commandements de torpil-
leurs.
Le ministre de la marine prepare un projet "de
loi qui abrogera le décret d'après lequel les ma-
rins du commerce sont embarqués sur des navires
de l'Etat à titre de mesure disciplinaire.
L'amiral Aube pense avec raison, et nous parta-
geons en cela sa façon de voir, que le service à
bord des bâtiments de l'Etat doit être considért
comme un honneur et non comme une peine.
LETTRES DE MADAGASCAR
(De noire correspondant particulier)
Tananarive, 12 août.
Ce Mariavel (1) est un type curieux. On affirme
que, pendant la guerre, il était chef d'une bande de
voleurs dont la spécialité était de piller les maisons
de ses compatriotes qui étaient à l'armée. Il est la
terreur de Tananarive; continuellement ivre, il
parcourt les rues de la capitale accompagné d'une
bande d'esclaves, bousculant et frappant les pas-
sants, sans distinction d'âge et de sexe. Dès qu'on
l'aperçoit, on fuit comme devant un chien en-.
ragé.
Lundi dernier, son premier aide de camp, un
13° honneur, ayant voulu le faire rentrer chez lui,
a été rossé d'importance en pleine rue par ce fou
furieux, qui a complété ses hauts faits en renver*
sant la lampe du docteur de la légation, qu'un do-
meslique allait faire remplir.
Mais cette fois mal lui en,prit; titubant sur ses
jambes, il a perdu l'équilibre et a été mordre ls
poussière.
Malheur aux femmes qui plaisent à ce forcené.
Celles qui attirent ses regards sont forcées d'ac-
cepter ses faveurs, sinon il les fait battre par ses
esclaves. Et c'est l" moindre des châtiments; par-
fois il leur fait couper les oreilles, parfois aussi i!
lance sur elles. ses chiens et ses offiuiers sur ls
place d'Andahalo.
Tel est l'homme auquel les missionnaires indé-
pendants sont parvenus, dans l'intérêt de leur in-
fluence, à faire accorder la survivance de la charge
de premier ministre. Cela promet pour l'avenir.
Quand de pareils désordres peuvent se produire
impunément dans une ville de quatre-vingt millf
âmes, ne doit-on pas convenir que la sécuriU
n'existe ni pour les indigènes, ni même pour les
Européens ? Le sort de chacun dépend des caprices
du dictateur ou de ses séides.
On se trompe él rangement en s'imaginant que
les Malgaches possèdent un commencement de ci-
vilisation et que le christianisme a corrigé leurs
mœurs. Si les exécutions sommaires sont suppri-
mées, elles sont remplacées par l'empoisonnement
et l'assassinat. La débauche la plus hideuse s'a-
brite derrière les pratiques étroites d'une religior.
formaliste et intolérante, mais elle n'a pas dimi-
(1) Nous rappelons que nous avons détaché hier dt
cette lettre le récit de l'incident soulevé par ce Ma>
riavel, le fils du premier ministre, et pour lequel tout.
satisfaction a été donnée à M. Le Myre de Vilers.
Même si j'avais eu l'honneur d'être agréé, l'ap.
préhension de ce que vous auriez pu penser en
découvrant que j'avais toujours connu l'avenir
brillant qui vous était peut-être ouvert aurait
empoisonné ma joie! Et pour n'avoir pas la
faiblesse de succomber, je me jurai de rester
éloigné de vous tant que l'issue de la loterie
resterait douteuse. J'aurais osé vous demander
votre main, même si vous aviez été une riche
héritière; au moins n'y. aurait-il eu rien de
louche là-dedans. Mais, quel que soit votre
arrêt, vous serez sûre au moins que mes mo-
tifs ne sont point mercenaires. Mary, voulez-
vous m'aimer?. dites-le moi; voulez-vous de-
venir ma femme?
Je sais à peine ce que je veux 1 répondit la
jeune fille d'une voix mal assurée. Vous me
prenez tout à fait par surprise. Mais croyez que
personne ne pourrait admirer plus que moi la
délicatesse de votre conduite. Et c'est bien ce
qui me fait hésiter. Car ce n'est pas assez que
votre femme vous aime, monsieur Ringwood, Il
fautqu'elle ne se sente pas trop indigne de par-
tager votre vie et de marcher côte à côte avec
vous dans la carrière qui vous est sûrement ré-
servée. Vous me laisserez quelques heures de
réflexion, n'est-ce pas?. Demain, je vous ré-
pondrai.
C'est plus que je n'avais osé estpérer, dit
Ronald en portant la main de Mary à ses lè-
vres.
Il est à peine nécessaire de dire qu'un double
mariage vint bientôt servir de conclusion à
l'histoire de la grande tontine. Mais ce qui mé-
rite d'être noté, c'est que lord Lakington, sur
les instances pressantes de son neveu et de sa
fille, assura cent mille francs à miss Chiches-
ter comme présent de noces et à titre de corn.
pensation pour la créance qu'elle abandonnait
si généreusement aux Pegram. Le vicomte mon-
trant dans son âge mûr une tendance mar-
quée à l'économie des biens de ce monde, se.
lon l'habitude des prodigues réformés, unQ
telle générosité devenait de sa part tout à fa'i
exemplaire: il n'est que juste de lui en laisser
l'honneur.
FIN
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