Titre : L'Echo de France
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1915-01-09
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32759978g
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 09 janvier 1915 09 janvier 1915
Description : 1915/01/09 (N11104). 1915/01/09 (N11104).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k1034757f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-15395
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/10/2015
£?• ANNEE. — N* 11104.
Six ou Huit Pages
•D.A.ÏTS TOUTE LA FRANCE
5 Centimes
j-
SAMEDI f) JANVIER 101...
HENRY SIMOND
btHECTECn-ÛiDACTFTR ES CHS»
PAUL SIMOND
»IRECTEüK*A01UNIàZâAlSCS
NOUVELLES DU MONDE ENTIER
44fe«ie tîléjjripkique: CûHORiS’PARlS RédaeUon et Administration : 6, PLACE DE L’OPÉRA (9 S ) àjrefiil télégraphiai: EGHORiS*PARlft
TÉLÉPHONE: Rédacteur en chef, 101-52. - Administrateur, 102-45. - Rédaction, 102-79. - Entre minuit et & heures du matin, 101-56
VALENTIN SIMOND
FOND A TFT II
ABONNEMENTS (Téléphone : 102-94)
VN’ MOI3 TEOJSMOM R!X MOI8 OU A*
Pahii» bt Diüfartssknts. 3 fr. u fr. 12fr. 24lr.
UMo.NposrA.tB 4 fr. 10 fr. lé fr. 38 fr.
Le Tonneau
Mon ami qui n’est plus jeune, mais
ïui se bat comme un jeune m’a raconté
oeci :
Vous vous souvenez de la forêt où je
bivouaque depuis tantôt trois mois ; de
ccs terres vallonnées en longueur et am
plement gaufrées, que nous avons par
courues ensemble, naguère, le fusil de
chasse sous le bras, écoutant la voix
rare de mes quatre ardennais qui ne
lâchent jamais leur lièvre. Ce sont les
mêmes futaies de chênes mal nourris,
ébranchés par la neige, mêlés de hêtres
et de bouleaux, et c’est le même sol ar
gileux, où le pied glisse sans qu'on
puisse prévoir dans quel sens, et c’est la
même immensité. Mais tout le reste a
changé : on se bat dans ces bois ; l’écla-
lement des obus y remplace le cri dts
Orfraies et le battement d'ailes des ra
miers de passage ; les feuilles mortes
pourrissent sous dix centimètres de
boue, et ce sont des milliers d'hommes
^t de chevaux qui la piétinent, (Us
roues de voitures et de caissons qui la
malaxent, et les cantonniers charges de
la racler çà et là, le long des lignes fo
restières, font partie des régiments du
génie ou de la vieille infanterie de nos
campagnes, barbons parmi lesquels je
vis et j’aime à vivre. Nous avons bâti
des villages. Le péril du froid et de 'a
pluie, l’instinct de vivre, les notions
d'assemblage que possédaient certains
d'entre nous, le don d’invention, l’ému
lation qui nous portait à dépasser l’œu
vre des autres, tout nous servit, tout
contribue d’abord à créer le logement,
et vite ù le perfectionner, et vite à l’em
bellir. Nous avons déjà deux écoles au
moins d'arti3tes : celle des terrassiers,
qui creusent des abris dans le sous-sol
jaune, y dessinent des bancs, y ména
gent des cheminées, y approfondissent
des alcôves pour l’escouade, artistes vé
ritables, qui ne se contentent point de
la pioche et qui soignent les glacis et
rectifient les angles ; puis l'école des dé
corateurs. Je vous ferai volontiers les
honneurs de la cabane d’un capitaine.
On se courbe pour entrer, mais on se re-
lève aussitôt. Le plancher est de fou
gères. A droite, le lit de l’officier, à gau-
che celui de l'ordonnance : tous deux du
même style, l’éternel, composés d’un
cadre de terre et de deux gerbes de
paille d'avoine. Les murs sont recou
verts en partie d’une loque d'audri,nople
rouge,-on parti© d’un clayonnage do ■ro
seaux et de baguettes de coudrier; et
J en ai honte un peu, car j’ai lu que le
luxe amollit les guerriers. Des rondins
de chêne sont encastrés dans les murs,
et, soutiennent le toit, qu’on a chargé de
beaucoup de terre, à cause des bombes
qm nous chercheat. Vouâ me deman-
r5 z \ 1 rvn ^ #- a Pl uie tombe sur la mai
son . Elle finira pas traverser ? » En
aucune façon : tout est prévu : le toit a
un revetemeîit de lamelles de bois, et,
pour recueillir les eaux, deux territo-
naux, hommes d’invention, ont posé les
gouttières les mieux moulées et cintrées
qu on puisse imaginer : les deux moi
tiés de l’écorce d’un jeune hêtre. En vé
rité, si vous admirez ma maison de
guerre, je pourrais vous en montrer
trois au moins, que se sont bâties les
soldats de ma compagnie, et qui sont
mieux décorées, mieux protégées,
mieux chauffées que celle du capitaine.
Nous n’étions pas établis de la sorte,
le premier soir où nous avons pris pos
session des bois, et nous avons dormi
au pied des arbres. Je rhe rappelle que
c'était le 14 septembre. Belle date ! Je
n’y pense pas sans un soupir de regret.
La poussée de notre victoire de la Marne
allait finir, mais elle n’était pas finie.
L ennemi ne s’était pas encore terré ; il
nous montrait son dos, s’arrêtant quel
quefois, se détournant, et grattant la
terre pour s’abriter de nous. Les régi
ments n’avaient plus de jambes malheu
reusement, et plus de souffle pour con-
imuer la poursuite. Il faisait chaud ; la
foret si mouillée aujourd’hui, sonnait
JÎSf te pied; il tombait des branches
e * rïos cimes d’arbre entières, »ar-
P ? r os °b us » les petits gaulis,
lenn J °K ne x P 0U - < * S £S de hêtre et de bou-
i ^ brisées par les balles, s’inclinaient
hÜmmf 0Up et craquaient en pliant. Des
nommes restaient en arrière, mourants,
blessés, fourbus. D'autres venaient. Je
criais comme un lion : « A moi, les
2 mi -iL nous tes*tenons! » Ils venaient,
-gaulés, courbés sous la rafale, la main
puche portant le fusil au ras de la
terre, et la droite souvent levée, allon
geant la vi9ière du képi, afin dfc mieux
voir les Allemands qui se défilaient, der
rière les buissons et les chênes. Nous
ivions la lumière presque en face un
peu plus sur la joue gauche, une’ lu
mière très ardente quand les feuilles ne
nous protégeaient pas. I* soleil décli
nait. Tout à coup, cette lumière devint
plus abondante, et, en même temps la
fusillade se ralentit. Je criai aux sept
bons coureurs qui étaient devant moi, —
le reste était derrière : — « Halte I cou
chez-vous dans le fossé I »
Nous arrivions à une clairière. De
vant nous, un espace libre s’élargit vers
le couchant, et, au delà, la forêt recom
mence partout égale. Je reconnais l’en
droit. Ces murs, ces toits vers la gauche
ces fumiers, cette porte de grange ou
verte par un obus, c’est la ferme de Mel-
zieourt. Les ennemis ont fait comme
nous, ils se sont jetés dans le fossé, de
l'autre côté de ce terrain vague qui’ est
devant nous, un peu montant, semé de
ronciers crevé d'ornières, sorte de car
refour et de vestibule en avant de la
ferme forestière. Les Allemands sont
Cachés à cent cinquante mètres de nous.
Je regarde : à mi-distance, immobile, la
tête penchée, un vieux cheval blanc est
attelé à une charrette, et, sur la char
rette, il y a un tonneau de vin. Mes sol
dats l’ont bien vu, avant moi. Quelle
aubaine l Trois d'entre aux retrouvent
des jambes el s'élancent, le fusil haut,
pour s’emparer du butin et ramener l’at
telage de notre côté. Deux tombent
morts avant d’avoir fait, vingt pas. Le
troisième revient, et se couche à côté de
moi. Je veux le gronder :
— Regardez encore, mon capitaine !
Ce sont maintenant les Allemands qui
veulent prendre le tonneau. La guerre,
qui se fait pour un si grand objet, sem
ble parfois se rapetisser jusqu'à des
querelles ridicules et bien indignes de la
passion qu’y mettent les hommes. Mais
ce n’est là qu’une apparence: un ton
neau de vin, c’est la preuve de la vic
toire, comme un canon ou une mitrail
leuse qu’on a enlevé à l’ennemi, c’est le
témoin et le gain du combat. Et puis,
les gosiers saignent de soif. Une cen
taine d’Allemands sont sur pied ; ils
chargent en poussant des cris.
— Feu rapide à volonté, à 100 mè
tres, feu !
Des soldats français rallient au com
mandement. Ils sortent du bois, malgré
les halles, et nous rejoignent dans le
fossé d’où part un feu endiablé. Dix Al
lemands roulent à terre ; les autres con
tinuent de éourir. Iæ crépitement des
fusils s’accélère; presque toute ma com
pagnie est là, défendant le tonneau de
vin de France, qu’elle s’est promis de
débonder. Surtout que les voleurs n’ap
prochent* pas ! Ils ne sont plus qu’à vingt
mètres de la charrette. Mais les balles
fauchent la bande grise. Ils hésitent, ils
se dispersent, les survivants rentrent
dans les fourrés.
^ C’est le deuxième acte. Par de^us nos
têtes, les deux artilleries tirent sans dis
continuer. Au milieu de la clairière, le
cheval blanc baisse la tête un peu plus,
et s’abat. Il est mort lui aussi : mais la
grosse barrique, sur son lit de fougères
vertes, n’a pas même changé de place
etr, seul, l’arrière-train de la voiture
s’est élevé au-dessus du sol.
Mes hommes grognent : « On l’aura !
c’est du vin de chez nous ! A bas les
pattes, les Boches ! » Je leur défends de
s’exposer, de sortir de l'abri, et je m’en
vais rallier les retardataires, qui tirent
de la lisière du bois, par-dessus nous,
et que* je trouve mal placés. A peine me
suis-je éloigné, que trois de mes terri
toriaux, qui étaient couchés près de moi
tout à l’heure, à l’extrémité du fossé
trois amis qui ne cessent de rire de
manger et de prendre des initiatives
imprévues, se lèvent tout debout, sans
armes, les mains en l'air et agitant un
bidon vide. Ils montrent, par leurs ges
tes, qu ils veulent seulement goûter le
vin, en rapporter à leurs camarades, et
que les ennemis sans doute auront en
suite la même permission. C’est do la
folie, d'autant plus que les Allemands
sont arrivés avant nous à la ferme,qu’ils
l’occupent, et qu'ils ne peuvent man
quer d’intervenir dans la bataille. Déjà
j’ai vu s'ouvrir une fenêtre, et des om
bres passer dans la cour. Hélas ! qui
vont-il tuer ? Est-ce Didelot, ou Thié-
nard, ou Parcellier? Je n’ai pas le temps
de les nommer, mes trois braves, et mes
lèvres remuent encore pour prononcer :
c' Thiénard », quand je vois, au pas de
course, les trois capotes ballantes, Thié
nard qui tient la tète, Parcellier qui le
suit, et le bon gros Didelot, qui, même
au galop, n’avance pas. Va-t-on, vrai
ment, leur accorder ce droit de préliba
tion ? Des ententes secrètes traversent la
guerre, vous le savez. En est-ce une ?
Pendant auelques secondes, le passage
est libre. Mes territoriaux s'approchent
du cheval mort. Ils se baissent. Je crois
en vérité, qu’ils ont l'intention de le dé
teler et' de ramener à bras la voiture de
butin. Dix coups de fusil partent de la
fermç. Ils sont le signal d’une reprise
terrible de la fusillade. Thiénard. Par
cellier, Didelot,. pour éviter les balles, se
laissent tomber près du cheval blanc
derrière la roue, jusque sous le tonneau
En même temps, à notre gauche, à la
corne de la forêt, une sonnerie retentit
éclatante, aiguë, dominant tout : « Y l
la goutte à boire là-haut ! Y a la goutte
à boire ! » Des hommes s’élancent de la
futaie, baïonnette au canon, et chargent
sur la ferme. Ce sont les coloniaux qui
viennent à la rescousse. Ils se précipi
tent dans la cour, ils entrent dans Ws
granges, ils poursuivent dans les étables
les Allemands surpris, et j’entends le cri
des hommes qui ne crieront plus jamais.
En moins de dix minutes Melzicourt
est pris et la lisière en face est dégagée.
Les coloniaux en troupe, et levant leur
képi, accourent vers le fossé où nous
étions terrés. Eux aussi, ils avaient vu
l’attelage, et quelques-uns, à demi-morts
de fatigue, mais la figure heureuse, fai
saient, en approchant, le geste de boire
à nos santés. Le soleil, descendait au-
dessous des collines.
Mais l’ennemi avait juré de se venger:
le dernier obus qu’il tira ce soir-là coupa
le tonneau en deux, et ne nous laissa
que le puits de la ferme conquise.
iî est: b a 71 y.
üe l'Académie française.
Le Fils de M.et Mme René Viviani
mort au champ d’honneur
Mme René Viviani et M. René Viviani
viennent de recevoir officiellement là nou
velle de la mort de leur fils cadet, tombé,
le 22 août, sur le champ de bataille de
Cussigny (Meurthe-et-Moselle), à la fron
tière même, à quelques mètres des tran
chées allemandes, que la 4* compagnie du
131" de ligne, dont il faisait partie, avait
reçu l'ordr d’attaquer.
L’aîné si t à l’armée comme sous-offi
cier.
Deux transports turcs coûtés
Malte, 7 janvier.
Le 2 janvier, un grand transport turc a
été coulé par une mine à la sortie du Bos
phore. Le 5, un autro transport, convoyé
par le croiseuV turc Mcdjidié a été coulé
dans la mer Noire entre Sinope et Trébi-
zonde. Le croiseur protégé russe Mer curia
et le destroyer russe Gnievni attaquèrent
le convoi ; le Mediidié, bien qu’atteint par
> d lus leurs projectiles, réussit 4 s'enfuir,
Communiqués officiels
159 e ® jour de la guerre (8 janvier, 15 heures)
L'artillerie ennemie a montré pendant toute la journée du 7 beaucoup d'ac
tivité EN BELGIQUE ET DAX S LA REGION D'ARRAS. L'artillerie française
a répondit vivement el efficacement.
Notre infanterie a réalisé Quelques progrès. PRES DE LOMBAERTZY DE,
nous avons enlevé, à 50 mètres en avant de nos tranchées t un mamelon occupé
par l'ennemi.
A L'EST DE SAINT-GEORGES, 7102/5 avons gagné du terrain et nous avons
sérieusement endommagé les tranchées ennemies voisines de Steenstraatc.
DANS LE SECTEUR D'ARRAS, au bois de Bcrthonval, nous avons, sans être
attaqués, dii évacuer certains éléments de tranchées où les hommes s'étaient en
lisés jusqu'aux épaules.
A gauche de la Boissclle, notre ligne de tranchées a été portée en avant ;
nous occupons les chemins de la Roisselle â Avelov.
DANS LA VALLEE DE L'AISNE, le duel d'artüierie a été assez vif ; notre
artillerie lourde a obtenu de bons résultats.
Près de Blanc-Sablon, les minenwerfer de l'ennemi nous ont infligé des per
tes, mais, dans Vaprès-midi, nous avons arrêté le feu allemand.
DANS LE SECTEUR DE REIMS, à l'ouest du bois des Zouaves, nous avons
fait sauter un blockhaus et occupé une nouvelle tranchée à 200 mètres en
avant de nos lignes.
Le combat d'infanterie ENTRE BETHENY ET PRUNAY a été d'une ex
trême Apreté.
Les Allemands ont laissé de nombreux morts sur le terrain ; nos pertes sont
minimes.
ENTRE JONCHERY-SUR-SUIPPE ET SOU AIN, nous avons, à plusieurs re-
prises, réduit au silence l'artillerie ennemie, bouleversé des tranchées et dé
truit des abatis.
EN ARGONNE, à l'ouest de la Haute-Chevauchée, l'ennemi a fait sauter à la
mine quelques-unes de nos tranchées de première ligne, qui ont été compte- 1
tement bouleversées.
L'attaque violente qu'il a aussitôt prononcée à été repoussée à la baïon
nette.
Nous avons fait des prisonniers et maintenu notre front, sauf sur une éten
due de 80 mètres, où le bouleversement des tranchées nous a obligés à établir
notre ligne à 20 mètres en arrière.
SUR LES HAUTS-DE-MEUSE ET ENTRE MEUSE ET MOSELLE, rien à
signaler.
Le vent a soufflé en tempête toute la journée.
No*re offcnsirtXi continué dans la région de TIIANN ET D'ALTKIRCH et a
obtenu des résultats importants.
Nous avons repris des tranchées sur le flanc est de la cote 425 où l'ennemi
avait réussi à se réinstaller il y a deux jours.
Nous avons ensuite gagné du terrain a lest de ces tranchées.
Plus au sud, NOUS AVONS ENLEVE BU RN IIAU PT-LE-H AU T ; nous avons,
en même temps progressé dans la direction de Pont d'Aspach et du Kalhberg.
L'artillerie ennemie qui avait essayé sans succès d'atteindre nos batteries, a
renoncé à tirer sur elles pour bombarder exclusivement l'hôpital de Thann, qui
a été évacué.
23 heures
An NORD DE SOISSONS, nous avons enlevé une redoute allemande, con
quis deux lignes successives de tranchées et atteint la troisième ligne. Trois re
tours offensifs exécutés par les Allemands ont échoué.
En ARGONNE, une très violente aftaqur allemande à hauteur de la HAUTE-
CHEVAUCHEE nous a d'abord forcés à nous replier sur 1 kilomètre de front.
Mais nous avons contre-attaqué et réoccupé nos positions.
üe Billet
de Junius
L'alloratioîi militaire, qui est vite dette
sacrée de l'Etat, se trouve dans un qrand
nombre de communes exploitée au profit
des passions politiques, qui constituent en
l’espèce de véritables crimes contre la pa
trie. L’Echo de Paris publiait, il y a quel
ques jours, la lettre d'un parlementaire ra
dical qui sc donnait les gants d'une réus
site auprès de ta commission d'appel. Cette
commission avait annulé le refus de l'al
location opposé par une municipalité sec
taire à la femme d'un mobilisé, et ce par
lementaire exploitait ù son profit cet acte
de justice.
Ce scandale s'est produit dans la Haute-
Garonne. Mais ce serait une erreur de
croire que le cas est unique. Ce qui est un
scandale courant, au contraire, c'est le
refus de l'allocation systématique ment op
posé par certains maires aux familles dont
les opinions politiques ou religieuses leur
déplaisent. Leur arbitraire cynique ne
frappe que des familles pauvres, femmes
et enfants sans ressources, puisque le père
et mari est ù la bataille. Qu'il y ait des
gens capables d'une pareille, lâcheté, cela
fait honte à l'humanité. Mais il y en a,
et. même il y en a trop. Comment défendre
les familles de nos soldais contre de telles
pratiques ? Nos ministres ont certainement
écrit des circulaires pour recommander à
tous la justice et l'impartialité. Mais on
sait ce que valent ces instructions banales.
Autant en emporte le vent. Il y aurait un
moyen efficace et sûr que je me permets
de recommander à nos gouvernants. Ce se
rait de faire adresser par leur préfet un
nouvel avis à tous les maires de France
avec cette clause finale : tout maire qui,
par méchanceté et sans raison avouable,
aura privé la femme et les enfants d'un
soldat mobilisé de l'allocaliçn qui leur
est due, sera pécuniairement responsable
du tort qu’il leur aura causé.
Avec cela, on pourra être sûr qu'aucun
maire ne voudra courir le pis que d'un pa-
reü cl,dûment. JDMÜS
SUR LE FRONT RUSSE
Communiqué du grand état-major
Pétrograd, 7 janvier.
Sur la rive gauche de la Vistule, ’c G jan
vier, l’accalmie a été presque générale,
sauf sur le front Soukha-BolimofT, où une
action de détail a eu lieu.
Les Allemands, pour approcher de nos
positions, cherchent à appliquer les procé
dés de la guerre de siège, en avançant,
dans certains endroits, au moyen de la
sape, et en utilisant, pour se mettre à
couvert, des boucliers d’acier.
Dans la. région du village do Soukho, Iss
Allemands qui s'étaient emparés, dans la
nuit du G, d’une partie de nos tranchées,
en ont été délogés le matin à la baïonnette.
Dans un combat, nous avons pris cinq mi
trailleuses et nous avons fait un certain
nombre de prisonniers.
En Galicie, on ne signale aucune modifi
cation importante.
En Bukovine, notre offensive continue.
LE 10* CORPS TURC COUPÉ
Londres, 8 janvier.
Le correspondant de la Gazette de la
Bourse, à Tiflis, télégraphie à son journal
que la retraite du 10 e corps d'armée turc
est coupée. Des régiments entiers se ren
demi
Les Autrichiens avouent que
des considérations de sécurité
ont rendu leur retraite nécessaire
Communiqué autrichien du 7 janvier
Amsterdam, 8 janvier.
Calme sur le front de la Hongrie et
de la Galicie.
Geléç et neige dans les hautes régions.
Sur la Doiinaietz et en Pologne russe,
duels d’artillerie intermittents.
Dans la région des forêts et des Car-
pathes et sur nos positions avancées
plus au sud, des considérations de sé
curité pour nos troupes qui se trouvaient
en présence de forces ennemies supé
rieures ont rendu leur retraite nécessaire
vers les passes principales.
Les rois do Roumanie et de Bulgarie
auront une entrevue
On signale d Amsterdam au Times, un
télégramme de Bucaiest à lu Gazette de
Voss confirmant le bruit d’uno prochaine
rencontre du roi de Roumanie et du roi Je
Bulgarie qui aurait lieu en territo’re rou
main.
Les deux monarques seraient accompa
gnés de leurs ministres des affaires étrau-
RtfeS.
De Plein Droit...
Il y a des choses que, d’abord, jo n'au
rais jamais eu l’idée de demander, tel
lement elles me paraissaient naturelles
et simples, tellement elles relèvent du
bon sen.s le plus élémentaire et de la
plus stricte, de la plu3 évidente équité...
Et puis un beau jour, un incident, un
document, la plainte ou la protestation
de quelque malheureux cruellement
éprouvé et lésé, viennent nous révéler
tout à coup, non pas que la justice n'est,
pas de ce monde, mais que trop souvent
le « monde » ne se préoccupe pas assez
d’être juste...
On n’y songe pas, voilà tout : cest no
tre tâche, du moins est-ce ainsi que je la
comprends, de faire que Ton y songe...
J’avoue, par exemple, qu’il a*fallu que
l'Echo de Paris publiât avant-hier la let
tre do cette femme de lieutenant, qui
s’inquiète du-prix de la pension de ses
deux fils au lycée, et craint de no plus
pouvoir l’acquitter, — il a fallu cette
lettre pour me révéler qu’elle pût être
obligée à payer, en effet, la pension de
ses fils...
Oui, je sais, et on l'a fort bien indi
qué en même temps ici même : il est peu
vraisemblable que si elle écrit au provi
seur l’impossibilité où elle se trouve, il
est peu vraisemblable que l’on en pro
fite aussitôt pour mettre ses deux fils à
la porte du lycée.
Mais c’est Toujours à cela que j’en re
viens et sur quoi j'insiste : le souci de
semblables démarches, toujours délica
tes, difficiles, pénibles, devrait être évité
à des femmes que la guerre a isolées,
désemparées, et qui ont bien d’autres et
d’assez nombreux soucis...
Gomment n'existe-t-il pas, pour les
frais d'études, comme pour les loyers,
un moratorium catégorique et. formel au
profit des enfants des mobilisés ?
Le décret complémentaire sur Le mo
ratorium des loyers, qui vient de nous
accorder la double satisfaction que nous
avions demandée, en ce qui concerne le
paiement et le congé des femmes des
militaires morts sous 1rs drapeaux, pré
cise que les avantages stipulés leur se
ront acquis « de plein droit ».
De plein droit, et sans qu’il soit
besoin de fournir les moindres pièces
justificatives, ni de réclamer quoi que
ce soit, - de plein droit, les économes
des lycées ne devraient même pas préson
ter, en ce moment, aux femmes des mo
bilisés, les notes de la pension de leurs
enfants... ~ ,
Et de plein droit également, j'estime
que le* enfants de tous ceux qui seront
morts au champ d'honneur devront,
sans aucune formalité d’aucune sorte,
être pourvus dune bourse dans les éta
blissements de l'Etat.
C’est pour la France que ces pères
sont morts, que ces enfants sont orphe
lins ; la France tout entière contracte à
leur endroit une dette sacrée, une res
ponsabilité, une charge.
L’Etat doit être tenu de se substituer
aux pères qui ne sont plus, il doit être
tenu pour responsable ue l'instruction et
de l’éducation de leurs enfants : et la
charge nous incombe à tous de mettre
ces enfants à même d'êtres dignes de
leurs pères, et semblables à eux.
VN FRANÇAIS.
Grecs étaient exposés à ces violences en
core plus que les autres chrétiens, car
toute J !a première partie de la proclama
tion qui annonce la guerre sainte est
pleine d’allusions aux « voisins, encou
ragés et protégés par la Triple-Entente,
qui ont provoqué le conflit balka
nique ». Ne nous étonnons donc pas si
les relations diplomatiques entre Athè
nes et Constantinople deviennent de
plus en plus difficiles.
Questions lointaines, dira-l-on. —
Lointaines par leurs noms, peut-être,
mais bien proches par leurs répercus
sions. Le principal avantage que l’Alle
magne s’est assuré en mettant la main
sur le gouvernement turc, ce n’est pas
la possibilité d’uno invasion au Cau
case, ce désastre, et ce n’est pas non
plus la perspective d’une invasion en
Egypte, ce mirage. Non, le véritable
avantage de nos ennemis, c’est qu’on
prenant Constantinople, ils ont fermé
Jes Détroits, arrêté le commerce mari
time de 'la Russie, obligé la Roumanie
à choisir entre une exportation facile en
Autriche et une exportation difficile
par Salonique. Tout ce qui contribuera
à rouvrir la mer Noire sera un inappré
ciable profit pour nos alliés et pour
ceux qui peuvent devenir nos alliés.
;. n.
Des renforts allemands en Bosnie?
(De notre correspondant particulier)
t- .. Rome, 8 i&nviôr
Lne dépêche adressée à la Tribuna an
nonco quo 6£(XlO Allemands auraient été
enviés en Bannie pour marcher contre la
Si la nouvelle est exacte, elle prouve que
1 Autriche est à bout de ressources nuis
déCto dans ‘‘‘“Possibilité de se
atrenclne par ses propres forces. C.
L’arrestation du Cardinal Mercier
(Da notre correspondant particulier)
» . Rome, 8 janvier
La nouvelle dp l'arrestation du cardinal
i°' St r. au Ji >Uri ? * mi Pteinament con-
tirmée. Le cardinal est aux arrêts dans
son palais épiscopal, avec défense d'ên
soi tir, ce qui équivaut à une véritable
captivité.
On m’assure que Benoit XV, conversant
avec differents personnages, en a exprimé
sa profonde douleur et, très probable
ment, il protestera énergiquement contre
1 acte de violence commis par les autori
tés allemandes.
On ignore encore la forme que pourra,
revêtir cette protestation.
L’attitude si courageuse el si digne de
l’archevêque de Malines provo^de ici l’ad
miration générale. Les affirmations con
tenues dans la lettre pastorale qui a si
vivement irrité les Allemands, sont d’ail
leurs pleinement conformes au droit pu
blic européen. — C.
Une Mission japonaise au Vatican
(De notre correspondant particulier)
Rome, 8 janvier.
D'après les informations parvenues ici
de Tokio, le gouvernement japonais en
verra au Vatican une mission extraordi
naire chargée de présenter les félicitations
du mikado à Benoit XV à l’occasion de
son avènement à la papauté.
On sait que Pie X, il y a une dizaine
d’années, avait envoyé une mission offi
cielle au père du mikado actuel, mission
qui fut reçue ù Tokio avec les plus grands
honneurs et qui était présidée par Mgr
O’Connel, évêque de Boston, élevé depuis
au cardinalat.
Comme on le voit, la papauté est en ce
moment l’objet d’attentions etla «art de toutes les puissances. » C.
Le Râle de la Grèce
La propagande que l'Allemagne a or
ganisée dans tous les pays neutres vient
d'éprouver en Grèce un échec qui mé
rite d’être signalé. Ce n’est pas pour
nous une simple satisfaction d'amour-
propre. La politique qui se fait dans le
Sud-Est de l'Europe influe directement
sur la durée de la guerre.
A l’occasion du budget qu’on a discuté
à Athènes jusqu'à lundi dernier, quel-,
ques parlementaires et quelques jour
naux de l’opposition ont critiqué les ac
tes du cabinet que préside, évidemment
avec la pleine confiance du roi, M. Ve-
nizelos. L'un de ces parlementaires —
ne le nommons pas pour ne pas qu’il
soit trop embarrassé quand il reviendra
dire à Paris combien il aime la France
— est allé par exemple jusqu’à soute
nir que la Grèce avait violé sa neutra
lité en se faisant verser par des banques
françaises le produit partiel d'un em
prunt précédemment conclu. Des jour
naux, d'autre part, ont entrepris de dé
montrer que l'occupation de Valona par
les Italiens créait un grave danger pour
la Grèce, et que celle-ci aurait tort de
n'y pas répondre par une expansion plus
active en Albanie. Le Parlement lui-mê
me a fait justice de'ces critiques en vo
tant le budget. Mais, si les critiques dis
paraissent, il faut retenir la réplique
que l'officieuse Patris a donnée aux
partisans d’une politique d'aventures en
Albanie, dans un artiçle quê notre re
vue de la presse étrangère résume au
jourd’hui.
La Patris rappelle deux vérités fonda
mentales : la première, c’est que l’occu
pation de Valona par les Italiens pose
un problème entre l’Italie et rAutriche,
problème grave en face duquel la Grèce
n'a aucun motif de prendre le parti de
l'Autriche ; la seconde, c’est que l’avenir
de l’hellénisme n’est lias dans l'Adriati
que, mais dans la mer Egée.
Sur les rivages de cette mer, de3 po
pulations grecques maltraitées par les
Turcs ne cessent d'appeler à l’aide.
Quand l’Allemagne a fait proclamer la
« guerre sainte » par le sultan de Cons
tantinople, elle n’a occasionné à la Rus
sie — .on vient de s’on apercevoir — que
des inconvénients singulièrement passa
gers.' Mais elle a attiré sur les malheu
reux chrétiens qui habitent dans l’Em
pire ottoman toutes les violences que
peuvent faire commettre à la fois le fa
natisme, le goût du pillage et l’idée
qu’on cille des gens désarmés. Les
UN DÉMENTI
Un radio-télégramme do presse alle
mand prétend que nous avons perdu la
cote 425 dominant Steinbach et que nous
n’avons pas pénétré dans Burnhaupt-le-
Haut.
Cesjdeux allégations sont fausses.
LA VIE MILITAIRE
contée par les soldats
Comment les officiers font part de la mort
de leurs «uitiats
A Monsieur le maire de C... — Monsieur,
en attendant que lu nouvelle vous soit ofll-
cicllement confirmée pour en faire part
u la famille, jo viens, en ma qualité Uo
lieutenant du ...* d'infanterie, vous don
ner quelques détails sur la mort du soldat
Léon Blin, de votre commune, tué le l ,r
novembre, vers sept heures du matin, au
moment où lu compagnie procédait à ‘a
relève d’une ligne d’avant-postes.
Le pauvre enfant est tombé mortelle-
rnfiut. frappé d’une balle en plein front,
alpr-4 qu'allant quitter la tranchée il plai
santait avec sus camarades.
Intelligent, dévoué, d'une tenue irrépro
chable, toujours gai, Blin n’avait, en cam
pagne, ersipé d'ètre le modèle des soldats.
Je ressentais une grande affection pour
lui, d’autant que j’avais eu à l'ixistruire,
lors do l’incorporation des soldats de la
classe 1913.
Son corps repose actuellement, dans le
ravin, entre le bois de Iianzières et le bois
Bouchot ; sa tombe porte une croix, sur
laquelle j’ai gravé les inscriptions sui
vantes :
« Ici repose le soldat Léon Blin, de la
... p compagnie, du ...* d'infanterie, né le
Kl août 1893, tué le l w novembre 1914. »
Dans le cas où la famille désirerait lo
retrouver, je vous adresse un petit croquis
du terrain, afin de faciliter les recherches.
Veuillez présenter à la famille B... l’ex
pression de nos condoléances les plus
émues. — S ou s-lieu tenant D...
U
A Monsieur et Madame B...-G..., de San-
mur. — Monsieur, il y a un mois, je vous
appris la conduite héroïque de votre fils,
et c'eut avec grande joie que je lus la.
lettre où vous m’exprimiez votre bonheur.
Malheurement, ce bon moment a été do
courte durée. La mission qui m’incombe
aujourd’hui est toute douloureuse. Votre
fils, qui avait cent lois affronté les gros
obus et les balle-s allemandes, fut très
grièvement blessé, lo 13 de ce mois, ù la
tête et au bras. Transporté à l'ambulance
de Courmelois, U y est mort dans la ma
tinée du 14. Son corps repose daas le ci
metière de cette commune, près do l'église.
J’éprouve, monsieur, un regret cruel a
vous annoncer une aussi terrible nouvelle.
L'héroïsme de cette fin du brigadier B...-
G..., cité à l’ordre et proposé pour la mé
daille militaire, rejaillira sur sa famille
et adoucira, si possible, la douleur do tous
les siens. — Capitaine M... de
*
_ _
« Le commandant B... s’associe pleine
ment à la douleur des pauvres parents de
notre regretté brigadier. Ignorant la peur,
il était brave entre tous les braves. Il a su
le montrer dès le commencement de la
campagne 1 11 est mort glorieusement, en
touré de l’estime et do l’affection généra
les.
» Jamais la médaille militaire n'eût été
mieux placée que sur su poitrine, iléias I
la mort inexorable est venue lui eiflever
cette suprême récompense.
» Le Dieu des années qui, là-haut, juge
les actes et les hommes, aura reconnu dans
votre fils l’une de ses âmes régénérées pur
le baptême du sang. Soyez sûr que, du
ciel qu’il a vaillamment conquis, votre
héros vous soitrit et vous dit : « Courage,
» mes pauvres parents, courage ! » — Com
mandant B... »
#
* *
« Madame, des personnes plus qualifiées
que moi vous ont appris le malheur qui
vous frappe. Je no veux pourtant pas res
ter muet devant votre douleur. La sym
pathie que je ressentais autrefois pour vo
tre fils s'était affirmée depuis la guerre.
C’est un compagnon d’armes, un ami que
je perds. Si v u sang tumultueux, son ardeur
extrême, mal à l’aise dans les règles ron-
ventionncllos des temps de paix, s’étaient
donnés libre cours dans cette période tra
gique. Et son caractère exceptionnel, sa
magnifique énergie avaient enfin pu se dé
velopper. De telles figures grandissent
dans les heures de tourmente.
» Le brigudier B... G... est mort en plein
épanouissement jie tout son être.
» Votre fils n'est pas entièrement dis
paru, madame, son dme est immortelle,
parce qu’elle est le souffle de Dieu et parce
qu'elle se confond avec l'âme de ta
France. Il restera en glorieux exemple.
Son souvenir est impérissable ; il conti
nuera de vivre tant que vivront ceux qui
povirront raconter son histoire. 11 lut pour
nous le boute-entraim et le semeur de vail
lance, plein d’initiative, insouciant et goL
Six ou Huit Pages
•D.A.ÏTS TOUTE LA FRANCE
5 Centimes
j-
SAMEDI f) JANVIER 101...
HENRY SIMOND
btHECTECn-ÛiDACTFTR ES CHS»
PAUL SIMOND
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NOUVELLES DU MONDE ENTIER
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VALENTIN SIMOND
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Le Tonneau
Mon ami qui n’est plus jeune, mais
ïui se bat comme un jeune m’a raconté
oeci :
Vous vous souvenez de la forêt où je
bivouaque depuis tantôt trois mois ; de
ccs terres vallonnées en longueur et am
plement gaufrées, que nous avons par
courues ensemble, naguère, le fusil de
chasse sous le bras, écoutant la voix
rare de mes quatre ardennais qui ne
lâchent jamais leur lièvre. Ce sont les
mêmes futaies de chênes mal nourris,
ébranchés par la neige, mêlés de hêtres
et de bouleaux, et c’est le même sol ar
gileux, où le pied glisse sans qu'on
puisse prévoir dans quel sens, et c’est la
même immensité. Mais tout le reste a
changé : on se bat dans ces bois ; l’écla-
lement des obus y remplace le cri dts
Orfraies et le battement d'ailes des ra
miers de passage ; les feuilles mortes
pourrissent sous dix centimètres de
boue, et ce sont des milliers d'hommes
^t de chevaux qui la piétinent, (Us
roues de voitures et de caissons qui la
malaxent, et les cantonniers charges de
la racler çà et là, le long des lignes fo
restières, font partie des régiments du
génie ou de la vieille infanterie de nos
campagnes, barbons parmi lesquels je
vis et j’aime à vivre. Nous avons bâti
des villages. Le péril du froid et de 'a
pluie, l’instinct de vivre, les notions
d'assemblage que possédaient certains
d'entre nous, le don d’invention, l’ému
lation qui nous portait à dépasser l’œu
vre des autres, tout nous servit, tout
contribue d’abord à créer le logement,
et vite ù le perfectionner, et vite à l’em
bellir. Nous avons déjà deux écoles au
moins d'arti3tes : celle des terrassiers,
qui creusent des abris dans le sous-sol
jaune, y dessinent des bancs, y ména
gent des cheminées, y approfondissent
des alcôves pour l’escouade, artistes vé
ritables, qui ne se contentent point de
la pioche et qui soignent les glacis et
rectifient les angles ; puis l'école des dé
corateurs. Je vous ferai volontiers les
honneurs de la cabane d’un capitaine.
On se courbe pour entrer, mais on se re-
lève aussitôt. Le plancher est de fou
gères. A droite, le lit de l’officier, à gau-
che celui de l'ordonnance : tous deux du
même style, l’éternel, composés d’un
cadre de terre et de deux gerbes de
paille d'avoine. Les murs sont recou
verts en partie d’une loque d'audri,nople
rouge,-on parti© d’un clayonnage do ■ro
seaux et de baguettes de coudrier; et
J en ai honte un peu, car j’ai lu que le
luxe amollit les guerriers. Des rondins
de chêne sont encastrés dans les murs,
et, soutiennent le toit, qu’on a chargé de
beaucoup de terre, à cause des bombes
qm nous chercheat. Vouâ me deman-
r5 z \ 1 rvn ^ #- a Pl uie tombe sur la mai
son . Elle finira pas traverser ? » En
aucune façon : tout est prévu : le toit a
un revetemeîit de lamelles de bois, et,
pour recueillir les eaux, deux territo-
naux, hommes d’invention, ont posé les
gouttières les mieux moulées et cintrées
qu on puisse imaginer : les deux moi
tiés de l’écorce d’un jeune hêtre. En vé
rité, si vous admirez ma maison de
guerre, je pourrais vous en montrer
trois au moins, que se sont bâties les
soldats de ma compagnie, et qui sont
mieux décorées, mieux protégées,
mieux chauffées que celle du capitaine.
Nous n’étions pas établis de la sorte,
le premier soir où nous avons pris pos
session des bois, et nous avons dormi
au pied des arbres. Je rhe rappelle que
c'était le 14 septembre. Belle date ! Je
n’y pense pas sans un soupir de regret.
La poussée de notre victoire de la Marne
allait finir, mais elle n’était pas finie.
L ennemi ne s’était pas encore terré ; il
nous montrait son dos, s’arrêtant quel
quefois, se détournant, et grattant la
terre pour s’abriter de nous. Les régi
ments n’avaient plus de jambes malheu
reusement, et plus de souffle pour con-
imuer la poursuite. Il faisait chaud ; la
foret si mouillée aujourd’hui, sonnait
JÎSf te pied; il tombait des branches
e * rïos cimes d’arbre entières, »ar-
P ? r os °b us » les petits gaulis,
lenn J °K ne x P 0U - < * S £S de hêtre et de bou-
i ^ brisées par les balles, s’inclinaient
hÜmmf 0Up et craquaient en pliant. Des
nommes restaient en arrière, mourants,
blessés, fourbus. D'autres venaient. Je
criais comme un lion : « A moi, les
2 mi -iL nous tes*tenons! » Ils venaient,
-gaulés, courbés sous la rafale, la main
puche portant le fusil au ras de la
terre, et la droite souvent levée, allon
geant la vi9ière du képi, afin dfc mieux
voir les Allemands qui se défilaient, der
rière les buissons et les chênes. Nous
ivions la lumière presque en face un
peu plus sur la joue gauche, une’ lu
mière très ardente quand les feuilles ne
nous protégeaient pas. I* soleil décli
nait. Tout à coup, cette lumière devint
plus abondante, et, en même temps la
fusillade se ralentit. Je criai aux sept
bons coureurs qui étaient devant moi, —
le reste était derrière : — « Halte I cou
chez-vous dans le fossé I »
Nous arrivions à une clairière. De
vant nous, un espace libre s’élargit vers
le couchant, et, au delà, la forêt recom
mence partout égale. Je reconnais l’en
droit. Ces murs, ces toits vers la gauche
ces fumiers, cette porte de grange ou
verte par un obus, c’est la ferme de Mel-
zieourt. Les ennemis ont fait comme
nous, ils se sont jetés dans le fossé, de
l'autre côté de ce terrain vague qui’ est
devant nous, un peu montant, semé de
ronciers crevé d'ornières, sorte de car
refour et de vestibule en avant de la
ferme forestière. Les Allemands sont
Cachés à cent cinquante mètres de nous.
Je regarde : à mi-distance, immobile, la
tête penchée, un vieux cheval blanc est
attelé à une charrette, et, sur la char
rette, il y a un tonneau de vin. Mes sol
dats l’ont bien vu, avant moi. Quelle
aubaine l Trois d'entre aux retrouvent
des jambes el s'élancent, le fusil haut,
pour s’emparer du butin et ramener l’at
telage de notre côté. Deux tombent
morts avant d’avoir fait, vingt pas. Le
troisième revient, et se couche à côté de
moi. Je veux le gronder :
— Regardez encore, mon capitaine !
Ce sont maintenant les Allemands qui
veulent prendre le tonneau. La guerre,
qui se fait pour un si grand objet, sem
ble parfois se rapetisser jusqu'à des
querelles ridicules et bien indignes de la
passion qu’y mettent les hommes. Mais
ce n’est là qu’une apparence: un ton
neau de vin, c’est la preuve de la vic
toire, comme un canon ou une mitrail
leuse qu’on a enlevé à l’ennemi, c’est le
témoin et le gain du combat. Et puis,
les gosiers saignent de soif. Une cen
taine d’Allemands sont sur pied ; ils
chargent en poussant des cris.
— Feu rapide à volonté, à 100 mè
tres, feu !
Des soldats français rallient au com
mandement. Ils sortent du bois, malgré
les halles, et nous rejoignent dans le
fossé d’où part un feu endiablé. Dix Al
lemands roulent à terre ; les autres con
tinuent de éourir. Iæ crépitement des
fusils s’accélère; presque toute ma com
pagnie est là, défendant le tonneau de
vin de France, qu’elle s’est promis de
débonder. Surtout que les voleurs n’ap
prochent* pas ! Ils ne sont plus qu’à vingt
mètres de la charrette. Mais les balles
fauchent la bande grise. Ils hésitent, ils
se dispersent, les survivants rentrent
dans les fourrés.
^ C’est le deuxième acte. Par de^us nos
têtes, les deux artilleries tirent sans dis
continuer. Au milieu de la clairière, le
cheval blanc baisse la tête un peu plus,
et s’abat. Il est mort lui aussi : mais la
grosse barrique, sur son lit de fougères
vertes, n’a pas même changé de place
etr, seul, l’arrière-train de la voiture
s’est élevé au-dessus du sol.
Mes hommes grognent : « On l’aura !
c’est du vin de chez nous ! A bas les
pattes, les Boches ! » Je leur défends de
s’exposer, de sortir de l'abri, et je m’en
vais rallier les retardataires, qui tirent
de la lisière du bois, par-dessus nous,
et que* je trouve mal placés. A peine me
suis-je éloigné, que trois de mes terri
toriaux, qui étaient couchés près de moi
tout à l’heure, à l’extrémité du fossé
trois amis qui ne cessent de rire de
manger et de prendre des initiatives
imprévues, se lèvent tout debout, sans
armes, les mains en l'air et agitant un
bidon vide. Ils montrent, par leurs ges
tes, qu ils veulent seulement goûter le
vin, en rapporter à leurs camarades, et
que les ennemis sans doute auront en
suite la même permission. C’est do la
folie, d'autant plus que les Allemands
sont arrivés avant nous à la ferme,qu’ils
l’occupent, et qu'ils ne peuvent man
quer d’intervenir dans la bataille. Déjà
j’ai vu s'ouvrir une fenêtre, et des om
bres passer dans la cour. Hélas ! qui
vont-il tuer ? Est-ce Didelot, ou Thié-
nard, ou Parcellier? Je n’ai pas le temps
de les nommer, mes trois braves, et mes
lèvres remuent encore pour prononcer :
c' Thiénard », quand je vois, au pas de
course, les trois capotes ballantes, Thié
nard qui tient la tète, Parcellier qui le
suit, et le bon gros Didelot, qui, même
au galop, n’avance pas. Va-t-on, vrai
ment, leur accorder ce droit de préliba
tion ? Des ententes secrètes traversent la
guerre, vous le savez. En est-ce une ?
Pendant auelques secondes, le passage
est libre. Mes territoriaux s'approchent
du cheval mort. Ils se baissent. Je crois
en vérité, qu’ils ont l'intention de le dé
teler et' de ramener à bras la voiture de
butin. Dix coups de fusil partent de la
fermç. Ils sont le signal d’une reprise
terrible de la fusillade. Thiénard. Par
cellier, Didelot,. pour éviter les balles, se
laissent tomber près du cheval blanc
derrière la roue, jusque sous le tonneau
En même temps, à notre gauche, à la
corne de la forêt, une sonnerie retentit
éclatante, aiguë, dominant tout : « Y l
la goutte à boire là-haut ! Y a la goutte
à boire ! » Des hommes s’élancent de la
futaie, baïonnette au canon, et chargent
sur la ferme. Ce sont les coloniaux qui
viennent à la rescousse. Ils se précipi
tent dans la cour, ils entrent dans Ws
granges, ils poursuivent dans les étables
les Allemands surpris, et j’entends le cri
des hommes qui ne crieront plus jamais.
En moins de dix minutes Melzicourt
est pris et la lisière en face est dégagée.
Les coloniaux en troupe, et levant leur
képi, accourent vers le fossé où nous
étions terrés. Eux aussi, ils avaient vu
l’attelage, et quelques-uns, à demi-morts
de fatigue, mais la figure heureuse, fai
saient, en approchant, le geste de boire
à nos santés. Le soleil, descendait au-
dessous des collines.
Mais l’ennemi avait juré de se venger:
le dernier obus qu’il tira ce soir-là coupa
le tonneau en deux, et ne nous laissa
que le puits de la ferme conquise.
iî est: b a 71 y.
üe l'Académie française.
Le Fils de M.et Mme René Viviani
mort au champ d’honneur
Mme René Viviani et M. René Viviani
viennent de recevoir officiellement là nou
velle de la mort de leur fils cadet, tombé,
le 22 août, sur le champ de bataille de
Cussigny (Meurthe-et-Moselle), à la fron
tière même, à quelques mètres des tran
chées allemandes, que la 4* compagnie du
131" de ligne, dont il faisait partie, avait
reçu l'ordr d’attaquer.
L’aîné si t à l’armée comme sous-offi
cier.
Deux transports turcs coûtés
Malte, 7 janvier.
Le 2 janvier, un grand transport turc a
été coulé par une mine à la sortie du Bos
phore. Le 5, un autro transport, convoyé
par le croiseuV turc Mcdjidié a été coulé
dans la mer Noire entre Sinope et Trébi-
zonde. Le croiseur protégé russe Mer curia
et le destroyer russe Gnievni attaquèrent
le convoi ; le Mediidié, bien qu’atteint par
> d lus leurs projectiles, réussit 4 s'enfuir,
Communiqués officiels
159 e ® jour de la guerre (8 janvier, 15 heures)
L'artillerie ennemie a montré pendant toute la journée du 7 beaucoup d'ac
tivité EN BELGIQUE ET DAX S LA REGION D'ARRAS. L'artillerie française
a répondit vivement el efficacement.
Notre infanterie a réalisé Quelques progrès. PRES DE LOMBAERTZY DE,
nous avons enlevé, à 50 mètres en avant de nos tranchées t un mamelon occupé
par l'ennemi.
A L'EST DE SAINT-GEORGES, 7102/5 avons gagné du terrain et nous avons
sérieusement endommagé les tranchées ennemies voisines de Steenstraatc.
DANS LE SECTEUR D'ARRAS, au bois de Bcrthonval, nous avons, sans être
attaqués, dii évacuer certains éléments de tranchées où les hommes s'étaient en
lisés jusqu'aux épaules.
A gauche de la Boissclle, notre ligne de tranchées a été portée en avant ;
nous occupons les chemins de la Roisselle â Avelov.
DANS LA VALLEE DE L'AISNE, le duel d'artüierie a été assez vif ; notre
artillerie lourde a obtenu de bons résultats.
Près de Blanc-Sablon, les minenwerfer de l'ennemi nous ont infligé des per
tes, mais, dans Vaprès-midi, nous avons arrêté le feu allemand.
DANS LE SECTEUR DE REIMS, à l'ouest du bois des Zouaves, nous avons
fait sauter un blockhaus et occupé une nouvelle tranchée à 200 mètres en
avant de nos lignes.
Le combat d'infanterie ENTRE BETHENY ET PRUNAY a été d'une ex
trême Apreté.
Les Allemands ont laissé de nombreux morts sur le terrain ; nos pertes sont
minimes.
ENTRE JONCHERY-SUR-SUIPPE ET SOU AIN, nous avons, à plusieurs re-
prises, réduit au silence l'artillerie ennemie, bouleversé des tranchées et dé
truit des abatis.
EN ARGONNE, à l'ouest de la Haute-Chevauchée, l'ennemi a fait sauter à la
mine quelques-unes de nos tranchées de première ligne, qui ont été compte- 1
tement bouleversées.
L'attaque violente qu'il a aussitôt prononcée à été repoussée à la baïon
nette.
Nous avons fait des prisonniers et maintenu notre front, sauf sur une éten
due de 80 mètres, où le bouleversement des tranchées nous a obligés à établir
notre ligne à 20 mètres en arrière.
SUR LES HAUTS-DE-MEUSE ET ENTRE MEUSE ET MOSELLE, rien à
signaler.
Le vent a soufflé en tempête toute la journée.
No*re offcnsirtXi continué dans la région de TIIANN ET D'ALTKIRCH et a
obtenu des résultats importants.
Nous avons repris des tranchées sur le flanc est de la cote 425 où l'ennemi
avait réussi à se réinstaller il y a deux jours.
Nous avons ensuite gagné du terrain a lest de ces tranchées.
Plus au sud, NOUS AVONS ENLEVE BU RN IIAU PT-LE-H AU T ; nous avons,
en même temps progressé dans la direction de Pont d'Aspach et du Kalhberg.
L'artillerie ennemie qui avait essayé sans succès d'atteindre nos batteries, a
renoncé à tirer sur elles pour bombarder exclusivement l'hôpital de Thann, qui
a été évacué.
23 heures
An NORD DE SOISSONS, nous avons enlevé une redoute allemande, con
quis deux lignes successives de tranchées et atteint la troisième ligne. Trois re
tours offensifs exécutés par les Allemands ont échoué.
En ARGONNE, une très violente aftaqur allemande à hauteur de la HAUTE-
CHEVAUCHEE nous a d'abord forcés à nous replier sur 1 kilomètre de front.
Mais nous avons contre-attaqué et réoccupé nos positions.
üe Billet
de Junius
L'alloratioîi militaire, qui est vite dette
sacrée de l'Etat, se trouve dans un qrand
nombre de communes exploitée au profit
des passions politiques, qui constituent en
l’espèce de véritables crimes contre la pa
trie. L’Echo de Paris publiait, il y a quel
ques jours, la lettre d'un parlementaire ra
dical qui sc donnait les gants d'une réus
site auprès de ta commission d'appel. Cette
commission avait annulé le refus de l'al
location opposé par une municipalité sec
taire à la femme d'un mobilisé, et ce par
lementaire exploitait ù son profit cet acte
de justice.
Ce scandale s'est produit dans la Haute-
Garonne. Mais ce serait une erreur de
croire que le cas est unique. Ce qui est un
scandale courant, au contraire, c'est le
refus de l'allocation systématique ment op
posé par certains maires aux familles dont
les opinions politiques ou religieuses leur
déplaisent. Leur arbitraire cynique ne
frappe que des familles pauvres, femmes
et enfants sans ressources, puisque le père
et mari est ù la bataille. Qu'il y ait des
gens capables d'une pareille, lâcheté, cela
fait honte à l'humanité. Mais il y en a,
et. même il y en a trop. Comment défendre
les familles de nos soldais contre de telles
pratiques ? Nos ministres ont certainement
écrit des circulaires pour recommander à
tous la justice et l'impartialité. Mais on
sait ce que valent ces instructions banales.
Autant en emporte le vent. Il y aurait un
moyen efficace et sûr que je me permets
de recommander à nos gouvernants. Ce se
rait de faire adresser par leur préfet un
nouvel avis à tous les maires de France
avec cette clause finale : tout maire qui,
par méchanceté et sans raison avouable,
aura privé la femme et les enfants d'un
soldat mobilisé de l'allocaliçn qui leur
est due, sera pécuniairement responsable
du tort qu’il leur aura causé.
Avec cela, on pourra être sûr qu'aucun
maire ne voudra courir le pis que d'un pa-
reü cl,dûment. JDMÜS
SUR LE FRONT RUSSE
Communiqué du grand état-major
Pétrograd, 7 janvier.
Sur la rive gauche de la Vistule, ’c G jan
vier, l’accalmie a été presque générale,
sauf sur le front Soukha-BolimofT, où une
action de détail a eu lieu.
Les Allemands, pour approcher de nos
positions, cherchent à appliquer les procé
dés de la guerre de siège, en avançant,
dans certains endroits, au moyen de la
sape, et en utilisant, pour se mettre à
couvert, des boucliers d’acier.
Dans la. région du village do Soukho, Iss
Allemands qui s'étaient emparés, dans la
nuit du G, d’une partie de nos tranchées,
en ont été délogés le matin à la baïonnette.
Dans un combat, nous avons pris cinq mi
trailleuses et nous avons fait un certain
nombre de prisonniers.
En Galicie, on ne signale aucune modifi
cation importante.
En Bukovine, notre offensive continue.
LE 10* CORPS TURC COUPÉ
Londres, 8 janvier.
Le correspondant de la Gazette de la
Bourse, à Tiflis, télégraphie à son journal
que la retraite du 10 e corps d'armée turc
est coupée. Des régiments entiers se ren
demi
Les Autrichiens avouent que
des considérations de sécurité
ont rendu leur retraite nécessaire
Communiqué autrichien du 7 janvier
Amsterdam, 8 janvier.
Calme sur le front de la Hongrie et
de la Galicie.
Geléç et neige dans les hautes régions.
Sur la Doiinaietz et en Pologne russe,
duels d’artillerie intermittents.
Dans la région des forêts et des Car-
pathes et sur nos positions avancées
plus au sud, des considérations de sé
curité pour nos troupes qui se trouvaient
en présence de forces ennemies supé
rieures ont rendu leur retraite nécessaire
vers les passes principales.
Les rois do Roumanie et de Bulgarie
auront une entrevue
On signale d Amsterdam au Times, un
télégramme de Bucaiest à lu Gazette de
Voss confirmant le bruit d’uno prochaine
rencontre du roi de Roumanie et du roi Je
Bulgarie qui aurait lieu en territo’re rou
main.
Les deux monarques seraient accompa
gnés de leurs ministres des affaires étrau-
RtfeS.
De Plein Droit...
Il y a des choses que, d’abord, jo n'au
rais jamais eu l’idée de demander, tel
lement elles me paraissaient naturelles
et simples, tellement elles relèvent du
bon sen.s le plus élémentaire et de la
plus stricte, de la plu3 évidente équité...
Et puis un beau jour, un incident, un
document, la plainte ou la protestation
de quelque malheureux cruellement
éprouvé et lésé, viennent nous révéler
tout à coup, non pas que la justice n'est,
pas de ce monde, mais que trop souvent
le « monde » ne se préoccupe pas assez
d’être juste...
On n’y songe pas, voilà tout : cest no
tre tâche, du moins est-ce ainsi que je la
comprends, de faire que Ton y songe...
J’avoue, par exemple, qu’il a*fallu que
l'Echo de Paris publiât avant-hier la let
tre do cette femme de lieutenant, qui
s’inquiète du-prix de la pension de ses
deux fils au lycée, et craint de no plus
pouvoir l’acquitter, — il a fallu cette
lettre pour me révéler qu’elle pût être
obligée à payer, en effet, la pension de
ses fils...
Oui, je sais, et on l'a fort bien indi
qué en même temps ici même : il est peu
vraisemblable que si elle écrit au provi
seur l’impossibilité où elle se trouve, il
est peu vraisemblable que l’on en pro
fite aussitôt pour mettre ses deux fils à
la porte du lycée.
Mais c’est Toujours à cela que j’en re
viens et sur quoi j'insiste : le souci de
semblables démarches, toujours délica
tes, difficiles, pénibles, devrait être évité
à des femmes que la guerre a isolées,
désemparées, et qui ont bien d’autres et
d’assez nombreux soucis...
Gomment n'existe-t-il pas, pour les
frais d'études, comme pour les loyers,
un moratorium catégorique et. formel au
profit des enfants des mobilisés ?
Le décret complémentaire sur Le mo
ratorium des loyers, qui vient de nous
accorder la double satisfaction que nous
avions demandée, en ce qui concerne le
paiement et le congé des femmes des
militaires morts sous 1rs drapeaux, pré
cise que les avantages stipulés leur se
ront acquis « de plein droit ».
De plein droit, et sans qu’il soit
besoin de fournir les moindres pièces
justificatives, ni de réclamer quoi que
ce soit, - de plein droit, les économes
des lycées ne devraient même pas préson
ter, en ce moment, aux femmes des mo
bilisés, les notes de la pension de leurs
enfants... ~ ,
Et de plein droit également, j'estime
que le* enfants de tous ceux qui seront
morts au champ d'honneur devront,
sans aucune formalité d’aucune sorte,
être pourvus dune bourse dans les éta
blissements de l'Etat.
C’est pour la France que ces pères
sont morts, que ces enfants sont orphe
lins ; la France tout entière contracte à
leur endroit une dette sacrée, une res
ponsabilité, une charge.
L’Etat doit être tenu de se substituer
aux pères qui ne sont plus, il doit être
tenu pour responsable ue l'instruction et
de l’éducation de leurs enfants : et la
charge nous incombe à tous de mettre
ces enfants à même d'êtres dignes de
leurs pères, et semblables à eux.
VN FRANÇAIS.
Grecs étaient exposés à ces violences en
core plus que les autres chrétiens, car
toute J !a première partie de la proclama
tion qui annonce la guerre sainte est
pleine d’allusions aux « voisins, encou
ragés et protégés par la Triple-Entente,
qui ont provoqué le conflit balka
nique ». Ne nous étonnons donc pas si
les relations diplomatiques entre Athè
nes et Constantinople deviennent de
plus en plus difficiles.
Questions lointaines, dira-l-on. —
Lointaines par leurs noms, peut-être,
mais bien proches par leurs répercus
sions. Le principal avantage que l’Alle
magne s’est assuré en mettant la main
sur le gouvernement turc, ce n’est pas
la possibilité d’uno invasion au Cau
case, ce désastre, et ce n’est pas non
plus la perspective d’une invasion en
Egypte, ce mirage. Non, le véritable
avantage de nos ennemis, c’est qu’on
prenant Constantinople, ils ont fermé
Jes Détroits, arrêté le commerce mari
time de 'la Russie, obligé la Roumanie
à choisir entre une exportation facile en
Autriche et une exportation difficile
par Salonique. Tout ce qui contribuera
à rouvrir la mer Noire sera un inappré
ciable profit pour nos alliés et pour
ceux qui peuvent devenir nos alliés.
;. n.
Des renforts allemands en Bosnie?
(De notre correspondant particulier)
t- .. Rome, 8 i&nviôr
Lne dépêche adressée à la Tribuna an
nonco quo 6£(XlO Allemands auraient été
enviés en Bannie pour marcher contre la
Si la nouvelle est exacte, elle prouve que
1 Autriche est à bout de ressources nuis
déCto dans ‘‘‘“Possibilité de se
atrenclne par ses propres forces. C.
L’arrestation du Cardinal Mercier
(Da notre correspondant particulier)
» . Rome, 8 janvier
La nouvelle dp l'arrestation du cardinal
i°' St r. au Ji >Uri ? * mi Pteinament con-
tirmée. Le cardinal est aux arrêts dans
son palais épiscopal, avec défense d'ên
soi tir, ce qui équivaut à une véritable
captivité.
On m’assure que Benoit XV, conversant
avec differents personnages, en a exprimé
sa profonde douleur et, très probable
ment, il protestera énergiquement contre
1 acte de violence commis par les autori
tés allemandes.
On ignore encore la forme que pourra,
revêtir cette protestation.
L’attitude si courageuse el si digne de
l’archevêque de Malines provo^de ici l’ad
miration générale. Les affirmations con
tenues dans la lettre pastorale qui a si
vivement irrité les Allemands, sont d’ail
leurs pleinement conformes au droit pu
blic européen. — C.
Une Mission japonaise au Vatican
(De notre correspondant particulier)
Rome, 8 janvier.
D'après les informations parvenues ici
de Tokio, le gouvernement japonais en
verra au Vatican une mission extraordi
naire chargée de présenter les félicitations
du mikado à Benoit XV à l’occasion de
son avènement à la papauté.
On sait que Pie X, il y a une dizaine
d’années, avait envoyé une mission offi
cielle au père du mikado actuel, mission
qui fut reçue ù Tokio avec les plus grands
honneurs et qui était présidée par Mgr
O’Connel, évêque de Boston, élevé depuis
au cardinalat.
Comme on le voit, la papauté est en ce
moment l’objet d’attentions et
Le Râle de la Grèce
La propagande que l'Allemagne a or
ganisée dans tous les pays neutres vient
d'éprouver en Grèce un échec qui mé
rite d’être signalé. Ce n’est pas pour
nous une simple satisfaction d'amour-
propre. La politique qui se fait dans le
Sud-Est de l'Europe influe directement
sur la durée de la guerre.
A l’occasion du budget qu’on a discuté
à Athènes jusqu'à lundi dernier, quel-,
ques parlementaires et quelques jour
naux de l’opposition ont critiqué les ac
tes du cabinet que préside, évidemment
avec la pleine confiance du roi, M. Ve-
nizelos. L'un de ces parlementaires —
ne le nommons pas pour ne pas qu’il
soit trop embarrassé quand il reviendra
dire à Paris combien il aime la France
— est allé par exemple jusqu’à soute
nir que la Grèce avait violé sa neutra
lité en se faisant verser par des banques
françaises le produit partiel d'un em
prunt précédemment conclu. Des jour
naux, d'autre part, ont entrepris de dé
montrer que l'occupation de Valona par
les Italiens créait un grave danger pour
la Grèce, et que celle-ci aurait tort de
n'y pas répondre par une expansion plus
active en Albanie. Le Parlement lui-mê
me a fait justice de'ces critiques en vo
tant le budget. Mais, si les critiques dis
paraissent, il faut retenir la réplique
que l'officieuse Patris a donnée aux
partisans d’une politique d'aventures en
Albanie, dans un artiçle quê notre re
vue de la presse étrangère résume au
jourd’hui.
La Patris rappelle deux vérités fonda
mentales : la première, c’est que l’occu
pation de Valona par les Italiens pose
un problème entre l’Italie et rAutriche,
problème grave en face duquel la Grèce
n'a aucun motif de prendre le parti de
l'Autriche ; la seconde, c’est que l’avenir
de l’hellénisme n’est lias dans l'Adriati
que, mais dans la mer Egée.
Sur les rivages de cette mer, de3 po
pulations grecques maltraitées par les
Turcs ne cessent d'appeler à l’aide.
Quand l’Allemagne a fait proclamer la
« guerre sainte » par le sultan de Cons
tantinople, elle n’a occasionné à la Rus
sie — .on vient de s’on apercevoir — que
des inconvénients singulièrement passa
gers.' Mais elle a attiré sur les malheu
reux chrétiens qui habitent dans l’Em
pire ottoman toutes les violences que
peuvent faire commettre à la fois le fa
natisme, le goût du pillage et l’idée
qu’on cille des gens désarmés. Les
UN DÉMENTI
Un radio-télégramme do presse alle
mand prétend que nous avons perdu la
cote 425 dominant Steinbach et que nous
n’avons pas pénétré dans Burnhaupt-le-
Haut.
Cesjdeux allégations sont fausses.
LA VIE MILITAIRE
contée par les soldats
Comment les officiers font part de la mort
de leurs «uitiats
A Monsieur le maire de C... — Monsieur,
en attendant que lu nouvelle vous soit ofll-
cicllement confirmée pour en faire part
u la famille, jo viens, en ma qualité Uo
lieutenant du ...* d'infanterie, vous don
ner quelques détails sur la mort du soldat
Léon Blin, de votre commune, tué le l ,r
novembre, vers sept heures du matin, au
moment où lu compagnie procédait à ‘a
relève d’une ligne d’avant-postes.
Le pauvre enfant est tombé mortelle-
rnfiut. frappé d’une balle en plein front,
alpr-4 qu'allant quitter la tranchée il plai
santait avec sus camarades.
Intelligent, dévoué, d'une tenue irrépro
chable, toujours gai, Blin n’avait, en cam
pagne, ersipé d'ètre le modèle des soldats.
Je ressentais une grande affection pour
lui, d’autant que j’avais eu à l'ixistruire,
lors do l’incorporation des soldats de la
classe 1913.
Son corps repose actuellement, dans le
ravin, entre le bois de Iianzières et le bois
Bouchot ; sa tombe porte une croix, sur
laquelle j’ai gravé les inscriptions sui
vantes :
« Ici repose le soldat Léon Blin, de la
... p compagnie, du ...* d'infanterie, né le
Kl août 1893, tué le l w novembre 1914. »
Dans le cas où la famille désirerait lo
retrouver, je vous adresse un petit croquis
du terrain, afin de faciliter les recherches.
Veuillez présenter à la famille B... l’ex
pression de nos condoléances les plus
émues. — S ou s-lieu tenant D...
U
A Monsieur et Madame B...-G..., de San-
mur. — Monsieur, il y a un mois, je vous
appris la conduite héroïque de votre fils,
et c'eut avec grande joie que je lus la.
lettre où vous m’exprimiez votre bonheur.
Malheurement, ce bon moment a été do
courte durée. La mission qui m’incombe
aujourd’hui est toute douloureuse. Votre
fils, qui avait cent lois affronté les gros
obus et les balle-s allemandes, fut très
grièvement blessé, lo 13 de ce mois, ù la
tête et au bras. Transporté à l'ambulance
de Courmelois, U y est mort dans la ma
tinée du 14. Son corps repose daas le ci
metière de cette commune, près do l'église.
J’éprouve, monsieur, un regret cruel a
vous annoncer une aussi terrible nouvelle.
L'héroïsme de cette fin du brigadier B...-
G..., cité à l’ordre et proposé pour la mé
daille militaire, rejaillira sur sa famille
et adoucira, si possible, la douleur do tous
les siens. — Capitaine M... de
*
_ _
« Le commandant B... s’associe pleine
ment à la douleur des pauvres parents de
notre regretté brigadier. Ignorant la peur,
il était brave entre tous les braves. Il a su
le montrer dès le commencement de la
campagne 1 11 est mort glorieusement, en
touré de l’estime et do l’affection généra
les.
» Jamais la médaille militaire n'eût été
mieux placée que sur su poitrine, iléias I
la mort inexorable est venue lui eiflever
cette suprême récompense.
» Le Dieu des années qui, là-haut, juge
les actes et les hommes, aura reconnu dans
votre fils l’une de ses âmes régénérées pur
le baptême du sang. Soyez sûr que, du
ciel qu’il a vaillamment conquis, votre
héros vous soitrit et vous dit : « Courage,
» mes pauvres parents, courage ! » — Com
mandant B... »
#
* *
« Madame, des personnes plus qualifiées
que moi vous ont appris le malheur qui
vous frappe. Je no veux pourtant pas res
ter muet devant votre douleur. La sym
pathie que je ressentais autrefois pour vo
tre fils s'était affirmée depuis la guerre.
C’est un compagnon d’armes, un ami que
je perds. Si v u sang tumultueux, son ardeur
extrême, mal à l’aise dans les règles ron-
ventionncllos des temps de paix, s’étaient
donnés libre cours dans cette période tra
gique. Et son caractère exceptionnel, sa
magnifique énergie avaient enfin pu se dé
velopper. De telles figures grandissent
dans les heures de tourmente.
» Le brigudier B... G... est mort en plein
épanouissement jie tout son être.
» Votre fils n'est pas entièrement dis
paru, madame, son dme est immortelle,
parce qu’elle est le souffle de Dieu et parce
qu'elle se confond avec l'âme de ta
France. Il restera en glorieux exemple.
Son souvenir est impérissable ; il conti
nuera de vivre tant que vivront ceux qui
povirront raconter son histoire. 11 lut pour
nous le boute-entraim et le semeur de vail
lance, plein d’initiative, insouciant et goL
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