Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-09-27
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 27 septembre 1885 27 septembre 1885
Description : 1885/09/27 (A1,N73). 1885/09/27 (A1,N73).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5448557
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
PREFECTURE
D'ALGER
A L0-ÉRTTÎ
ABONNEMENTS :
Trois mots Six mois
4.50 9
Un an
48
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux aimnoncea et réclames doivmt, «R,
Algérie, être adressées à I'AGENCE HAVAS, boulevard de la République, A1®KF
En France, les communications sont reçue» savoir :
A Marebiuæ, ehex M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, chex MM. AÛDBOÜRG et C‘«, place de la Bourse, 10,
P* À TVCITI
... 6 42
24
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertioa des annonces légales judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
Di-; roi
Première année. — N° 73.
Le numéro centimes.
jif
legal
Dimanche, 27 septembre 188S.
Motifs et dispositif d’un arrêt
contradictoirement rendu par
la Chambre des appels cor
rectionnels de la Cour d'Alger
le vingt-six juillet 1879, en
registré dans la cause d’entre
Monsieur Charles Bourlier,
propriétaire, demeurant à
M’Zérah, commune de la Ré-
ghaïa, agissant tant en son
nom personnel que comme
président du Comité d’immi
gration et de patronage établi
à Alger, et M. M. Charles-
François Marchai, rédacteur
en chef du journal le PETIT
COLON, Pierre Bienvenu, ad-
minist rateu r-gérapt du dit
journal, tous deux demeurant
à. Alger, et le ministère pu
blic.
Attendu que les appelants sont recevables
en la forme,
Au fond.
Attendu que Bienvenu, administrateur-
gérant du journal le Petit Coton, a publié
dans le numéro de ce- journal du seize fé
vrier 1879 un article commençant par ces
mots : « Nous ne sommes pas très curieux »
et finissant par ceux-ci : » Département
# d’Alger », et dans ce numéro du dit jour
nal du vingt-deux février 1879, sous le ti
tre : « Une enquête, la colonisation et le
» préfet Brunei », un article commençant
par ces mots : « Il y a quelques jours » et,
finissant par ceux-ci : Le désordre et la
» ruine. *
Attendu que, pour l’appréciation de la
poursuite eu diffamation dirigée par M.
Bourlier contre Bienvenu et Marchai, à l’oc
casion de cette publication, il est impossi
ble de séparer les deux articles incriminés ;
le premier conçu sous la forme d’une simple
question à laquelle le prévenu savait bien
qu’on ne répondrait pas, n’étant que le pre
mier acte devant servir de point de départ
ou de prétexte plausible aux yeux du lec
teur pour l'œuvre diffamatoire qui allait être
entreprise, qu’il y avait donc lieu de retenir
cet article contrairement à ce qu’ont fait les
premiers juges;
Attendu qu’il est allégué par le Petit Co
lon que Bourlier a hypothéqué les terres
que l’Etat lui avait remises en dépôt pour
les rétrocéder aux colons ;
Que ce fait, s’il était vrai, ne constituerait
pas sans doute le délit d’abus de confiance
tel qu’il est défini par la loi pénale ; mais
qu’il renferme une imputation que réprouve
la morale et qui, par suite, porte atteinte à
l’honneur et à la considération de Bourlier ;
Attendu qu’il est encore allégué que Bour
lier a perçu la part de l’octroi de mer affé
rente à l’Arbatacb ; qu’il a reçu le prix de
location des teires ; qu’enfin, bien qu’ayant
touché une somme de cent soixante-huit
mille francs, il n’a payé ni l’architecte, ni
les entrepreneurs, ni les maçons chargés de
la construction du village ;
Attendu que la situation de Atte entre
prise est, en outre, caractérisée d’une ma
nière générale, par ces mots ; « C’est un
» village qui vient de naître et il est déjà
» frappé de mort, aucune commune ne vou-
» drait s’adjoindre une annexe qui n’appor-
» terait dans ses affaires que le désordre,
» le gâchis et le déficit ;
Attendu que ces faits sont de nature à
compromettre la réputation de Bourlier, soit
au point de vue de sa probité, de sa déli
catesse, soit au point de vue de son apti
tude, puisqu’ils le désignent à toute une
population comme coupable d’infidélité et
désordre dans l’accomplissement d’un man
dat qu’il n’avait recherché que comme in
dustriel et d’avoir ainsi causé la ruine d’une
œuvre d’intérêt public ;
Attendu que, sans doute, la presse doit
avoir toute liberté de discussion et de cri
tique, mais que ce privilège inhérent à sa
mission, s’il lui crée un droit, a pour co
rollaire nécessaire le devoir de ne jamais
diffamer, encore moins de calomnier ;
Attendu que si M. Bourlier peut, à juste
titre, se plaindre des diffamations dont le
Petit Colon l’a rendu victime, il est non
moins fondé à prétendre que ces diffama
tions sont calomnieuses ; que leur fausseté
résulte de tous les documents versés au
débat,.
Qu’il est, en effet, établi que jamais Bour
lier n’a hypothéqué les terres concédées ;
que jamais non plus ii n’a perçu et ne pou
vait percevoir une part quelconque de l’oc
troi de mer; qu’il a régulièrement payé
tous les ouvriers ou entrepreneurs qui ont
construit le village de l’Arbatach ; que
ceux-là seuls qui ne sont pas complètement
désintéressés ne doivent s’en prendre qu’aux
saisies-arrêts pratiquées à leur encontre et
que la somme destinée à effectuer cette li
bération a ôté versée à la Caisse des dépôts
et consignations ;
Attendu que la mauvaise foi de Bienvenu
ressort de la fausseté des fspts imputés, de
la certitude qu’il avait de cette fausseté, cir
constance qui explique pourquoi il n’a pas
cherché à vérifier leur sincérité, alors que
cela lui eût été si facile ;
Attendu que la publicité est établie par
la publication des articles incriminés dans
le journal le Petit Colon ;
Attendu en ce. qui touche Marchai, que ce
prévenu est rédacteur en chef du Petit Co
lon ; qu’en cette qualité il a reçu la lettre
du dix-huit février 1879, que la date de cette
lettre postérieure de deux jours au premier
article inséré dans le numéro du seize
février, semble indiquer qu’elle n’a été
écrite et adressée qu’à la suite d’un accord
provoqué et intervenu; qu’en tous cas,Mar
chai l’a remise au journal, et qu’ainsi il s’est
rendu complice du délit de diffamation ;
Attendu que de, tout ce qui précède, il ré
sulte, à la charge de Bienvenu comme au
teur et Marchai comme complice, la preuve
du délit qui leur est reproché ;
Attendu, quant aux réparations civiles,
qu’un préjudice certain a été causé à Bour
lier ; qu’il y a lieu cependant de considérer
que par suite de sa grande honorabilité, ce
ne sera pas une somme de dommages inté
rêts plus ou moins élevée qui augmentera
ou diminuera l’estime qu’on ne saurait lui
refuser, alors surtout qu’il s’agit, comme
dans l’espèce, quel qu’en soit d’ailleurs le
mobile, d’une œuvre féconde entre toutes
pour l’avenir de la colonie, qu’il suffira dose
d’accorder à Bourlier, à titre de supplément
de dommages-intérêts, tous les dépens
d’appel ;
Attendu que la partie qui succomba doit
les dépens,
Par ces motifs :
La Cour, recevant en la forme les appels
interjetés, et statuant au fond.
Dit qu’il a été bien jugé, mal appelé, con
firme le jugement déféré ;
Dit toutefois qu’à titre de supplément de
réparation civile, Bienvenu et Marchai sont
condamnés aux dépens de l'appel à Bour
lier.
D t encore, modifiant sur ce point les dis
positions du jugement, que le présent arrêt
sera inséré daus ses motifs et dans son dis
positif, en tête et à la première page du
numéro du Petit Colon qui paraîtra immé
diatement après la réquisition qui lui sera
faite, la dite insertion imprimée avec des
caractères identiques à ceux qui ont servi à
la publication des articles diffamatoires ;
Ordonne en outre la même insertion, sui
vant les mêmes conditions, dans six jour
naux de la France et de l’Algérie, au choix
de Bourlier, le tout aux frais de Bienvenu
et de Marchai ;
Condamne ces derniers en tous les dé
pens, Bourlier demeurant responsable vis-
à-vis du Trésor, sauf son recours.
Fixe enfin au maximum la durée de la
contrainte par corps pour l’exècutioa des
condamnations prononcées.
Alger, le 26 Septembre 1885.
Comité Central Républicain
Élections législatives du 4 octobre 1885 .
LETELLIER
DÉPUTÉ SORTANT
BOURLIER
CONSEILLER GÉNÉRAL
Candidats Républicains
Une réunion électorale aura lieu
au Théâtre National, samedi, 26 sep
tembre, à 8 heures du soir.
Ordre du jour :
1® Compte rendu du mandat de M.*
Letellier, député sortant ;
2 0 Audition des candidats.
Le Président du Comité central
républicain,
Aumerat.
Feuilleton de la Dépêche Algérienne
N° 2.
PAR
A. KACOT et G. PRADEL «>
PROLOGUE
— Oui, rèpliqua-t-il simplement, et j’ai
failli mourir. J’ai failli me noyer... C’est
Ce qui m’a retardé.
— Ah ! fit-elle. Et elle continua d’un ton
embarrassé : Je vous demande pardon pour
an reproche injuste.
Il eut un geste d’indifférence indiquant
que sans doute cet accueil le touchait peu,
car il continua sans répondre, ni s’arrêter à
l’excuse de la jeune femme.
— Il a même fallu me sauver deux fois.
La barque a sombré d’abord ; je suis venu
ensuite me heurter contre la petite porte de
la terrasse qui était fermée.
— Elle était fermée ? répliqua-t-elle len
tement en scandant les mots. Vous en ôtes
atr, bien sûr ?
Parfaitement, il m’a même fallu l'en
foncer.
(t) Eepreénetie» interdite ami joarsamx qui a’ent
|ij|traité arec la Société des Gens de Lettres.
— Ah ! s’écria-t-elle encore, et ses sour
cils se contractèrent comme si un soupçon
terrible traversait soudain son esprit.
Mais son interlocuteur ne lui laissa pas le
temps de poursuivre les idées qui venaient
de l’assaillir.
—■ Enfin ! dit-il, et sa voix prit une in
flexion profonde et grave. Je viens de Saint-
Florent. Vous m’aviez dit d’attendre là, j’ai
attendu. Ah ! que les heures ont été len
tes !... que les angoisses ont été lourdes!
Vous deviez m’envoyer l’enfant; une nour
rice, dont j’ignore le nom, devait me l’ap
porter. Hier, une lettre de vous m’est par
venue, et l’inconnu déplia un billet qu’il
relut : — « Venez à onze heures du soir au
château. — Aline. » Eh bien, me voilà,
qu’y a-t-il? Que me voulez-vous? qu’allez-
vous m’apprendre ? Mais répondez ! répon
dez donc.
Et sa voix devint furieuse.
— Vous voyez bien que vous me faites
mourir.
Elle leva sur lui des yeux froids et calmes
et répondit avec une tranquillité parfaite :
— D’abord, je vous préviens que si vous
me parlez sur ce ton-là, vous ne saurez ab
solument rien.
— Aline, répliqua-t-il en faisant un vio
lent effort sur lui-même, Aline, je vous de
mande pardon. Je vous implore. J’ai tort,
je le reconnais ; mais aussi, c’est qu’avec
votre sang-froid, lorsqu’il s’agit d’un intérêt
aussi sacré, votre calme me fait bondir.
Oui, j’ai compris, je comprends que cet en
fant, vous ne pouviez le garder ici. Une in
discrétion de domestique, une perfidie de
valet pouvaient instruire votre mari à Pé-
tersbourg et vous perdre. J’ai compris tout
cela, je vous le répète, et j’ai attendu, con
fiant dans votre parole. A cette heure, vous
m’avez dit de venir. J’ai tout laissé: me
voilà ! Où est notre enfant?
— Il est mort, dit-elle en caissant la tête.
— Mort ! répèta-til sourdement Mort ! Et
comment ? et pourquoi ? quel est le malheur
qui a ravi ce petit être à ma tendresse?
Vous m’aviez promis, vous m’aviez juré,
Aline, que cet enfant, dont vous ne pouviez
vous charger, je l’aurais à moi, à moi seul.
Ah ! je devais l’élever et ne jamais lui refu
ser les caresses ; avant d’être à moi, n’est-il
pas à vous? Vous deviez l’envoyer à Saint-
Florent. Pourquoi ne l’avez vous pas fait ?
—- Je l’ai fait, répliqua-t-elie ; mais une
fatalité que je ne pouvais prévoir est venue
s’abattre sur nous. Il y a deux jours, vers le
milieu de la nuit, j’ai fait partir la nourrice,
elle devait descendre la rive de la Loire,
prendre le pont au-dessus d’Ancenis et re
monter jusqu’à Saint-Florent.
— Eh bien !
— Eh bien ! que voulez-vous que je vous
dise l La malheureuse femme a été prise par
la pluie, elle s’est égarée, perdue ; le flot
montant de la première crue l’a gaguée :
elle et l’enfant ont disparu.
Ces paroles étaient prononcées d’un ton
de froideur et de fausseté qui n’échappa
point à l’inconnu.
— Vous mentez î s’ècria-t-ii.
— Monsieur, dit-elle en devenant livide,
vous oubliez que e’est à moi que vous par
lez ! que c’est à une mère dont le cœur est
déchiré que s’adresse cette insulte.
— Non, insista-t-il, non, c’est impossible,
vous n’avez pas livré cet enfant, la nuit, à.
l’aventure, seul avec une femme !.. Il n’est
pas mort, cela ne peut être. Et d’abord, si
cet enfant avait péri, vous ne seriez pas là,
calme, froide, insensible...
— Je vous jure que cet enfant a péri.
— Alors, c’est que vous l’avez tué. Oh 1
Aline, pas d'indignation, pas de grandes
phrases, pas de grandes scènes. Vous savez
si je vous ai aimée, Aline, vous savez si
pendant de longs mois votre fatale beauté
m’a rendu fou. Je vous ai aimée, je vous ai
adorée ; mais ma passion ne m’a pas aveu
glé à ce point qu’elle m’ait empêché de vous
connaître. Je ne vous aime plus, Aline, vous,-
le savez, je n’ai pas besoin de vous l’ap
prendre.
, — Je le sais, dit-elle d’une voix sifflante*
I puisque vous m’insultez.
— Vous insulter ! Ah ! je n’y songe point*
et, je vous en supplie, excusez ma violence.
M iis que voulez-vous que je pense? Que
voulez-vous que je croie ? Je vous vois là,
calme, froide, impassible, m’annonçant la
mort de notre enfant, de mon fils. Pas une
larme, rien ! et vous voulez que je vous
croie ? Mais si je vous croyais malheureuse !
c’est que c’est par vous que l'enfant aurait
péri. C’est que vous l’auriez fait disparaî
tre, paree qu’il vous gênait, parce que rien
n’existe daos votre cœur, Aline ; rien, pas
même l’amour maternel, parce que vous*
D'ALGER
A L0-ÉRTTÎ
ABONNEMENTS :
Trois mots Six mois
4.50 9
Un an
48
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux aimnoncea et réclames doivmt, «R,
Algérie, être adressées à I'AGENCE HAVAS, boulevard de la République, A1®KF
En France, les communications sont reçue» savoir :
A Marebiuæ, ehex M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, chex MM. AÛDBOÜRG et C‘«, place de la Bourse, 10,
P* À TVCITI
... 6 42
24
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertioa des annonces légales judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
Di-; roi
Première année. — N° 73.
Le numéro centimes.
jif
legal
Dimanche, 27 septembre 188S.
Motifs et dispositif d’un arrêt
contradictoirement rendu par
la Chambre des appels cor
rectionnels de la Cour d'Alger
le vingt-six juillet 1879, en
registré dans la cause d’entre
Monsieur Charles Bourlier,
propriétaire, demeurant à
M’Zérah, commune de la Ré-
ghaïa, agissant tant en son
nom personnel que comme
président du Comité d’immi
gration et de patronage établi
à Alger, et M. M. Charles-
François Marchai, rédacteur
en chef du journal le PETIT
COLON, Pierre Bienvenu, ad-
minist rateu r-gérapt du dit
journal, tous deux demeurant
à. Alger, et le ministère pu
blic.
Attendu que les appelants sont recevables
en la forme,
Au fond.
Attendu que Bienvenu, administrateur-
gérant du journal le Petit Coton, a publié
dans le numéro de ce- journal du seize fé
vrier 1879 un article commençant par ces
mots : « Nous ne sommes pas très curieux »
et finissant par ceux-ci : » Département
# d’Alger », et dans ce numéro du dit jour
nal du vingt-deux février 1879, sous le ti
tre : « Une enquête, la colonisation et le
» préfet Brunei », un article commençant
par ces mots : « Il y a quelques jours » et,
finissant par ceux-ci : Le désordre et la
» ruine. *
Attendu que, pour l’appréciation de la
poursuite eu diffamation dirigée par M.
Bourlier contre Bienvenu et Marchai, à l’oc
casion de cette publication, il est impossi
ble de séparer les deux articles incriminés ;
le premier conçu sous la forme d’une simple
question à laquelle le prévenu savait bien
qu’on ne répondrait pas, n’étant que le pre
mier acte devant servir de point de départ
ou de prétexte plausible aux yeux du lec
teur pour l'œuvre diffamatoire qui allait être
entreprise, qu’il y avait donc lieu de retenir
cet article contrairement à ce qu’ont fait les
premiers juges;
Attendu qu’il est allégué par le Petit Co
lon que Bourlier a hypothéqué les terres
que l’Etat lui avait remises en dépôt pour
les rétrocéder aux colons ;
Que ce fait, s’il était vrai, ne constituerait
pas sans doute le délit d’abus de confiance
tel qu’il est défini par la loi pénale ; mais
qu’il renferme une imputation que réprouve
la morale et qui, par suite, porte atteinte à
l’honneur et à la considération de Bourlier ;
Attendu qu’il est encore allégué que Bour
lier a perçu la part de l’octroi de mer affé
rente à l’Arbatacb ; qu’il a reçu le prix de
location des teires ; qu’enfin, bien qu’ayant
touché une somme de cent soixante-huit
mille francs, il n’a payé ni l’architecte, ni
les entrepreneurs, ni les maçons chargés de
la construction du village ;
Attendu que la situation de Atte entre
prise est, en outre, caractérisée d’une ma
nière générale, par ces mots ; « C’est un
» village qui vient de naître et il est déjà
» frappé de mort, aucune commune ne vou-
» drait s’adjoindre une annexe qui n’appor-
» terait dans ses affaires que le désordre,
» le gâchis et le déficit ;
Attendu que ces faits sont de nature à
compromettre la réputation de Bourlier, soit
au point de vue de sa probité, de sa déli
catesse, soit au point de vue de son apti
tude, puisqu’ils le désignent à toute une
population comme coupable d’infidélité et
désordre dans l’accomplissement d’un man
dat qu’il n’avait recherché que comme in
dustriel et d’avoir ainsi causé la ruine d’une
œuvre d’intérêt public ;
Attendu que, sans doute, la presse doit
avoir toute liberté de discussion et de cri
tique, mais que ce privilège inhérent à sa
mission, s’il lui crée un droit, a pour co
rollaire nécessaire le devoir de ne jamais
diffamer, encore moins de calomnier ;
Attendu que si M. Bourlier peut, à juste
titre, se plaindre des diffamations dont le
Petit Colon l’a rendu victime, il est non
moins fondé à prétendre que ces diffama
tions sont calomnieuses ; que leur fausseté
résulte de tous les documents versés au
débat,.
Qu’il est, en effet, établi que jamais Bour
lier n’a hypothéqué les terres concédées ;
que jamais non plus ii n’a perçu et ne pou
vait percevoir une part quelconque de l’oc
troi de mer; qu’il a régulièrement payé
tous les ouvriers ou entrepreneurs qui ont
construit le village de l’Arbatach ; que
ceux-là seuls qui ne sont pas complètement
désintéressés ne doivent s’en prendre qu’aux
saisies-arrêts pratiquées à leur encontre et
que la somme destinée à effectuer cette li
bération a ôté versée à la Caisse des dépôts
et consignations ;
Attendu que la mauvaise foi de Bienvenu
ressort de la fausseté des fspts imputés, de
la certitude qu’il avait de cette fausseté, cir
constance qui explique pourquoi il n’a pas
cherché à vérifier leur sincérité, alors que
cela lui eût été si facile ;
Attendu que la publicité est établie par
la publication des articles incriminés dans
le journal le Petit Colon ;
Attendu en ce. qui touche Marchai, que ce
prévenu est rédacteur en chef du Petit Co
lon ; qu’en cette qualité il a reçu la lettre
du dix-huit février 1879, que la date de cette
lettre postérieure de deux jours au premier
article inséré dans le numéro du seize
février, semble indiquer qu’elle n’a été
écrite et adressée qu’à la suite d’un accord
provoqué et intervenu; qu’en tous cas,Mar
chai l’a remise au journal, et qu’ainsi il s’est
rendu complice du délit de diffamation ;
Attendu que de, tout ce qui précède, il ré
sulte, à la charge de Bienvenu comme au
teur et Marchai comme complice, la preuve
du délit qui leur est reproché ;
Attendu, quant aux réparations civiles,
qu’un préjudice certain a été causé à Bour
lier ; qu’il y a lieu cependant de considérer
que par suite de sa grande honorabilité, ce
ne sera pas une somme de dommages inté
rêts plus ou moins élevée qui augmentera
ou diminuera l’estime qu’on ne saurait lui
refuser, alors surtout qu’il s’agit, comme
dans l’espèce, quel qu’en soit d’ailleurs le
mobile, d’une œuvre féconde entre toutes
pour l’avenir de la colonie, qu’il suffira dose
d’accorder à Bourlier, à titre de supplément
de dommages-intérêts, tous les dépens
d’appel ;
Attendu que la partie qui succomba doit
les dépens,
Par ces motifs :
La Cour, recevant en la forme les appels
interjetés, et statuant au fond.
Dit qu’il a été bien jugé, mal appelé, con
firme le jugement déféré ;
Dit toutefois qu’à titre de supplément de
réparation civile, Bienvenu et Marchai sont
condamnés aux dépens de l'appel à Bour
lier.
D t encore, modifiant sur ce point les dis
positions du jugement, que le présent arrêt
sera inséré daus ses motifs et dans son dis
positif, en tête et à la première page du
numéro du Petit Colon qui paraîtra immé
diatement après la réquisition qui lui sera
faite, la dite insertion imprimée avec des
caractères identiques à ceux qui ont servi à
la publication des articles diffamatoires ;
Ordonne en outre la même insertion, sui
vant les mêmes conditions, dans six jour
naux de la France et de l’Algérie, au choix
de Bourlier, le tout aux frais de Bienvenu
et de Marchai ;
Condamne ces derniers en tous les dé
pens, Bourlier demeurant responsable vis-
à-vis du Trésor, sauf son recours.
Fixe enfin au maximum la durée de la
contrainte par corps pour l’exècutioa des
condamnations prononcées.
Alger, le 26 Septembre 1885.
Comité Central Républicain
Élections législatives du 4 octobre 1885 .
LETELLIER
DÉPUTÉ SORTANT
BOURLIER
CONSEILLER GÉNÉRAL
Candidats Républicains
Une réunion électorale aura lieu
au Théâtre National, samedi, 26 sep
tembre, à 8 heures du soir.
Ordre du jour :
1® Compte rendu du mandat de M.*
Letellier, député sortant ;
2 0 Audition des candidats.
Le Président du Comité central
républicain,
Aumerat.
Feuilleton de la Dépêche Algérienne
N° 2.
PAR
A. KACOT et G. PRADEL «>
PROLOGUE
— Oui, rèpliqua-t-il simplement, et j’ai
failli mourir. J’ai failli me noyer... C’est
Ce qui m’a retardé.
— Ah ! fit-elle. Et elle continua d’un ton
embarrassé : Je vous demande pardon pour
an reproche injuste.
Il eut un geste d’indifférence indiquant
que sans doute cet accueil le touchait peu,
car il continua sans répondre, ni s’arrêter à
l’excuse de la jeune femme.
— Il a même fallu me sauver deux fois.
La barque a sombré d’abord ; je suis venu
ensuite me heurter contre la petite porte de
la terrasse qui était fermée.
— Elle était fermée ? répliqua-t-elle len
tement en scandant les mots. Vous en ôtes
atr, bien sûr ?
Parfaitement, il m’a même fallu l'en
foncer.
(t) Eepreénetie» interdite ami joarsamx qui a’ent
|ij|traité arec la Société des Gens de Lettres.
— Ah ! s’écria-t-elle encore, et ses sour
cils se contractèrent comme si un soupçon
terrible traversait soudain son esprit.
Mais son interlocuteur ne lui laissa pas le
temps de poursuivre les idées qui venaient
de l’assaillir.
—■ Enfin ! dit-il, et sa voix prit une in
flexion profonde et grave. Je viens de Saint-
Florent. Vous m’aviez dit d’attendre là, j’ai
attendu. Ah ! que les heures ont été len
tes !... que les angoisses ont été lourdes!
Vous deviez m’envoyer l’enfant; une nour
rice, dont j’ignore le nom, devait me l’ap
porter. Hier, une lettre de vous m’est par
venue, et l’inconnu déplia un billet qu’il
relut : — « Venez à onze heures du soir au
château. — Aline. » Eh bien, me voilà,
qu’y a-t-il? Que me voulez-vous? qu’allez-
vous m’apprendre ? Mais répondez ! répon
dez donc.
Et sa voix devint furieuse.
— Vous voyez bien que vous me faites
mourir.
Elle leva sur lui des yeux froids et calmes
et répondit avec une tranquillité parfaite :
— D’abord, je vous préviens que si vous
me parlez sur ce ton-là, vous ne saurez ab
solument rien.
— Aline, répliqua-t-il en faisant un vio
lent effort sur lui-même, Aline, je vous de
mande pardon. Je vous implore. J’ai tort,
je le reconnais ; mais aussi, c’est qu’avec
votre sang-froid, lorsqu’il s’agit d’un intérêt
aussi sacré, votre calme me fait bondir.
Oui, j’ai compris, je comprends que cet en
fant, vous ne pouviez le garder ici. Une in
discrétion de domestique, une perfidie de
valet pouvaient instruire votre mari à Pé-
tersbourg et vous perdre. J’ai compris tout
cela, je vous le répète, et j’ai attendu, con
fiant dans votre parole. A cette heure, vous
m’avez dit de venir. J’ai tout laissé: me
voilà ! Où est notre enfant?
— Il est mort, dit-elle en caissant la tête.
— Mort ! répèta-til sourdement Mort ! Et
comment ? et pourquoi ? quel est le malheur
qui a ravi ce petit être à ma tendresse?
Vous m’aviez promis, vous m’aviez juré,
Aline, que cet enfant, dont vous ne pouviez
vous charger, je l’aurais à moi, à moi seul.
Ah ! je devais l’élever et ne jamais lui refu
ser les caresses ; avant d’être à moi, n’est-il
pas à vous? Vous deviez l’envoyer à Saint-
Florent. Pourquoi ne l’avez vous pas fait ?
—- Je l’ai fait, répliqua-t-elie ; mais une
fatalité que je ne pouvais prévoir est venue
s’abattre sur nous. Il y a deux jours, vers le
milieu de la nuit, j’ai fait partir la nourrice,
elle devait descendre la rive de la Loire,
prendre le pont au-dessus d’Ancenis et re
monter jusqu’à Saint-Florent.
— Eh bien !
— Eh bien ! que voulez-vous que je vous
dise l La malheureuse femme a été prise par
la pluie, elle s’est égarée, perdue ; le flot
montant de la première crue l’a gaguée :
elle et l’enfant ont disparu.
Ces paroles étaient prononcées d’un ton
de froideur et de fausseté qui n’échappa
point à l’inconnu.
— Vous mentez î s’ècria-t-ii.
— Monsieur, dit-elle en devenant livide,
vous oubliez que e’est à moi que vous par
lez ! que c’est à une mère dont le cœur est
déchiré que s’adresse cette insulte.
— Non, insista-t-il, non, c’est impossible,
vous n’avez pas livré cet enfant, la nuit, à.
l’aventure, seul avec une femme !.. Il n’est
pas mort, cela ne peut être. Et d’abord, si
cet enfant avait péri, vous ne seriez pas là,
calme, froide, insensible...
— Je vous jure que cet enfant a péri.
— Alors, c’est que vous l’avez tué. Oh 1
Aline, pas d'indignation, pas de grandes
phrases, pas de grandes scènes. Vous savez
si je vous ai aimée, Aline, vous savez si
pendant de longs mois votre fatale beauté
m’a rendu fou. Je vous ai aimée, je vous ai
adorée ; mais ma passion ne m’a pas aveu
glé à ce point qu’elle m’ait empêché de vous
connaître. Je ne vous aime plus, Aline, vous,-
le savez, je n’ai pas besoin de vous l’ap
prendre.
, — Je le sais, dit-elle d’une voix sifflante*
I puisque vous m’insultez.
— Vous insulter ! Ah ! je n’y songe point*
et, je vous en supplie, excusez ma violence.
M iis que voulez-vous que je pense? Que
voulez-vous que je croie ? Je vous vois là,
calme, froide, impassible, m’annonçant la
mort de notre enfant, de mon fils. Pas une
larme, rien ! et vous voulez que je vous
croie ? Mais si je vous croyais malheureuse !
c’est que c’est par vous que l'enfant aurait
péri. C’est que vous l’auriez fait disparaî
tre, paree qu’il vous gênait, parce que rien
n’existe daos votre cœur, Aline ; rien, pas
même l’amour maternel, parce que vous*
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