Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-08-27
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 27 août 1885 27 août 1885
Description : 1885/08/27 (A1,N42). 1885/08/27 (A1,N42).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t544824z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
PfiF.lTCTlTIE |i' M. i ; ! ; |.
ÜEPOT LEGAL
Première année.— N" 42 .
Le numéro 5 centimes.
JOf
Jeudi, 27 août 1885.
La Dépêche Algérienne
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois Un an
Algérie 4.50 O 18
Frange O 12 24
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux annnoncea et réclames doivent, «»
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, AIg«.
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rne du Baussel, * ;
A Paris, chez MM. AUDBOURG et C‘«, piac8 de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DEPECHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion, des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, le 26 Août 1885.
HOMMES DU JODR
XXli
M. BOUVIER
DÉPUTÉ DE MARSEILLE
M. Rouvier, l’ancien ami de Gambetta,
l’ancien ministre du Commerce, le grand
ministre, comme l’appelaient si ironique
ment, il y a quelques mois à peine, les or
ganes avancés de la presse française est, né
à Aix. le 17 avril 1842.
Avocat à Marseille, il combattit l’Empire
dans les journaux de l'opposition et fut
nommé secrétaire général de la préfecture
des Bouches-du-Rhône, après le 4 septem
bre 1870. Candidat à l’Assemblée nationale,
le 8 février 1871, il obtint sans être élu 44,052
voix, mais passa aux élections complémen
taires du 2 juillet avec 34,156 voix et prit
place à l’extrôme-gaucbe. Il protesta contre
l’exécution,â Marseille, de Gaston Créraieux,
et vit déposer contre lui une demande
d'autorisation de poursuites, pour un article
de la Constitution que la Commission des
grâces jugea outrageant. Cette demande fut
repoussée en mars 1872, sur la proposition
de M. Chhngarnier, par l 'amnistie du dé
dain .
Rapporteur de la commission^ pour la
/èforme judiciaire eu Egypte, M. Rouvier
soutint avec zèle les intérêts français en
Orient et adopta les lois constitutionnelles.
Elu député, le 20 février 1876, dans la
3 e circonscription de Marseille, par 8,508
voix contre 3,501 obtenues par le candidat
monarchiste, il reprit sa place à l’extrême
gauche et fui élu secrétaire de la Chambre.
Au mois de mai suivant, il se vit accuser
d’actes d’immoralité commis au Palais-
Royal et auxquels la presse monarchiste
donna un retentissement scandaleux.
Il demanda lui-même à la Chambre
d’autoriser les poursuites contre lui (13 juin
1876), prit pour défenseur M e Nicollet et fut
acquitté le 13 juillet, par un jugement dont
les dispositifs laissaient planer sur son
innocence une incertitude outrageante.
Trois ans plus tard, la Commission d’en
quête parlementaire, sur les agissements de
la préfecture de police, retrouva l’origine de
cette invention calomnieuse, dont une
feuille plus que légère s’était faite l’écho.
Après le 16 Mai 1877, M. Rouvier fut un
des 363. Il se présenta aux élections du
14 octobre et fut réélu par 8 784 voix contre
2,855 obtenues par le candidat officiel. Il fut
également êiuen 1881, sans concurrent; cette
fois, on s’était lassé de ses victoires Succes
sives.
Dans le caoinet du 14 novembre 1881,
présidé par M. Gambetta, on lui confia le
portefeuille du commerce et des colouies
qu’il garda jusqu’à la chute du grand pa
triote. c’est-à -dire jusqu’au 26 janvier 1882.
Il retourna aux affaires quelques mois
avant la chute du dernier ministère Ferry
et dirigea avec sa grande habileté le même
ministère du commerce, dont il avait été le
chef incontesté sous le grand ministère.
M. Rouvier est un homme d’un mérite et
d’une autorité incontestables. Dans lune
comme dans l’autre Chambre, il a pris une
part importante aux discussions économi
ques, commerciales et financières.
Il a défendu, avec une compétence hors
de pair, les intérêts de la ville de Marseille,
s’est prononcé en faveur de l’impôt sur le
revenu, mais a combattu énergiquement
cette utopie qui a nom l’impôt du capital et
que présentait avec acharnement le fameux
Menier.
M. Rouvier a donc rendu de réels et
grands services à son département ; les
Marseillais, qui le savent., aiment beaucoup
leur député, et sa réélection ne fait doute
pour personne.
4
Orléansville
Orléansville, 22 août 1885.
Qu’est le Chéliff? Rien.
Que doit-il être ? Tout.
Qu«l triste spectacle, mon cher ami, que
celui que présentait au voyageur d’il y a
vingt ans, cette longue vallée du Chéliff
sans arbres, sans villages, bordée par des
collines dénudées où de rares marabouts
attestaient seuls l'exislence des tribus clair
semées qui l’habitaient.
Aujourd’hui encore le spectacle a peu
changé. Les progrès ont été lents; la colo
nisation moins rapide que sur presque tous
les autres points du pays. Cela s’explique. Eu
Algérie, le peuplement européen a fait la
tache d’huile autour des gros centres ; et
comme nous sommes à égale distance d’Al
ger à Oran, et que cette distance est grande,
il nous faudra encore bien des années pour
que la prospérité de notre région atteigne
celle de la Mitidjs.
Les villages, cependant, commencent à
peupler cette vaste sollituie, mais hélas ! le
plus grand nombre est misérable. L’ad
ministration a tout fait pour les faire vivrs
et le plus grand nombre s’étiolent et se dé
peuplent.
Seul, Orléansville a pris, depuis trois ans,
un aspect de prospérité qui tranche sur la
région qui l’environne. C’est une véritable
oasis. Les vieux arbres rabougris qui mou
raient de soif ont fait place aux jeunes qui
verdoient et ne demandent qu’à vivre. Le
vaste bois de pins que l’on appelle, je ne
sais trop pourquoi, « la Pépinière » a perdu
cette teinte grisâtre de mauvais augure et
a repris sa fraîcheur des premières années.
Tout autour., les orangeries, les luzernières,
les cultures maraîchères de toute nature
occupent une population qui a doublé, et
dont la fortune est assurée.
C’est aux irrigations qu’est due cette
transformation. C’est à elles que notre for
tune est désormais liée, non pas seulement
pour la petite région qui, aujourd’hui, utilise
une faible partie des eaux du Cüéliff, mais
pour toute cette grande plaine, qui peut
jouir des mêmes avantages, et atteindre la
même prospérilé.
Car, il faut qu’on le sache, cette terre mal,
famée, presque sans valeur, où I on fait un 9
récolte, dit-oa tous les cinq ans, où la fa
mine est toujours à craindre, où les Fran
çais se ruinent et où les indigènes vivent
misérables, contient un sol d’une richesse
et d’une fertilité incomparables. Il est peu
d’endroits en Algérie où la terre végétale
soit plus profoude et plus féconde.
Sa stérilité n’a qu’une seule cause : le
manque de pluie, et le manque de pluie n’a
qu’une seule cauëe : le déboisement.
Il faudrait donc reboiser, mais comme les
arbres meurent faute de pluie, pendant les
étés où la chaleur est doublée par la réver
bération du sol dénudé, ou tourne dans un
cercle vicieux qui semble sans issue.
Il en a une cependant.
Ce qui vient d’être fait autour d’Orléans-
ville peut l’être du Djendei à Relizane. Oui,
cela est démontré aujourd’hui, il est possi
ble d’irriguer celte immense plaine Le
Chéliff et ses affluents peuvent remplacer
l’eau du ciel qui ne tombe pas. Avec une
série de barrages bien conçus et bien cons
truits il est possible de faire face à tous les
besoins. Là où il sera impossible d’avoir de
l’eau toute l’année on en jouira tout au
moins jusqu’au mois de mai. Les arrosages
de printemps satureront les terres et for
meront de nouvelles sources en aval.
Avec les irrigations,le reboisement se fera
de lui-même, et avec le reboisement les
pluies reviendront. La vie régnera où pla
nait la mort. Le Chéliff lui-même repren
dra le rang de fleuve navigable. La Chica-
nette ne sera plus une fumisterie, et les ré-
dactenrs de l’ Illustration, s’ils viennent
jamais en Algérie après la réalisation de ce
programme, demeureront persuadés que
G. Zukri n’était pas un vulgaire mystifica
teur, mais simplement un illuminé qui as,
pressenti l’avenir.
Quelques chiffres pour finir. Les terres;
irrigables autour d’Orléansville se louent de
59 à 100 fr. par hectare. Us serait bien sur
prenant que ce dernier chiffre ne soit pas.
dépassé quand la prospérité du pays sera
générale. Prenons-Ie toutefois pour base de
calcul.
Du Djendei à Relizane on peut arroser
environ 100,000 hectares ; à raison de 10fi
fr. l’hectare ils produiront un revenu de dix
millions. Aujourd’hui ils produisent à peine
le dixième, c'est donc neuf millions de dif
férence.
Or, l’ensemble des travaux est estimé â
20 millions par les ingénieurs de l’Etat.,
Intérêt et amortissement un million. Béné
fice annuel huit militons. Augmentation
de la fortune nationale cent soixante mil
lions.
Voilà de quoi faire venir l’eau à la bou
che.
Cette démonstration, absolument rigou
reuse, puisse-t-elle la faire venir sur nos
terres.
Informations algériennes
Le Conseil municipal d’Oran a refusé det
voter la somme de 2,069 fr. réprésentant la
part incombant à la commune pour les
années 1884-1885 dans les indemnités det
logement allouées aux pasteurs protestants
du département.
X
Deux espagnols, expulsés du territoires
français, ont été embarqués hier sur l’/saaa
Pereire, à destination de Port-Vendres,,
d’où ils seront conduits à la frontière.
X
Un mouvementde greffiers a été expédié
par le Parquet général à la Chancellerie.
Ce mouvement comporte la permutation:
des greffiers de l’Arba, d’Azeffoun et de*
Tablat.
X
On nous annonce l’apparition prochaine &
Bougie d’uu troisième journal, la Summam^
Feuilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
N° 42.
LA
GRAflBE1ÂRIÎÈ1E
PAR
Georges OHNET
Toute la nuit il s’était promis de partir, et,
en une seconde, il décidait de rester. Il ne vit
là rien que de naturel. L’ineohèrence n’est-
elle pas la règle même de l’amonr ? Il se
composa, pour entrer chez son père, un vi
sage souriant. A sa vue, Fleury, qui parlait
avec animation, s’arrêta court, prit un air
embarrassé et loucha furieusement de ses
yeux troubles.
— Eh bien ! dit avec éclat Carvajan, en
allant à son fils, les voilà dans une belle
passe, ces gens si fiers, qui ne veulent pas
s’exposer à se trouver en face de nous !
— On vient de tout m’apprendre, inter
rompit Pascal.
— Eh bien ! qu’en dis-tu ?
— Qu’eu dit le parquet ? riposta le jeune
homme.
— Le parquet' est extraordinairement
mou ! Il est pris entre la certitude qui ré
sulte des preuves matérielles du crime et le
doute qui est la conséquence d’un passé
honorable... Tous ces magistrats, au fond,
sont des réactionnaires, et ils font des fa
çons pour arrêter le fils d’un marquis, voilà
tout. Ils ont télégraphié à Rouen, au procu
reur général, qui télégraphiera sans doute
à sou tour au garde des sceaux... Et, pen
dant ce temps, ici, la population fermente ;
et sans Fleury qui s’est trouvé là fort à
point, tout à l’heure, le prévenu était échar
pé par les ouvriers... On parle pour de
main d’une manifestation... Moi, je viens
de le dire au commissaire et au capitaine
de gendarmerie : si on n’arrête pas dès ce
soir ce gaillard-là, je ne réponds pas de
l’ordre à La Neuville !...
— Le mieux qu’il y aurait à faire pour M.
Robert, ce serait de partir pendant qu’il est
temps encore, dit doucereusement Fleury...
Une fois à l’abri, tout le monde serait tran
quille... C’est ce que j’ai essayé de faire
comprendre aux dames de Clairefont...
Mais, aux premiers mots, Mlle Antoinette
s’est dressée toute pâle, et, avec des regards
meurtriers comme des coups de pistolet,
elle a crié : Jamais ! Partir, ce serait avouer
qu’il est coupable... Nous savons d’où part
cette calomnie... Nous la réduirons à néant!
Elle désignait clairement M. le Maire, et
peut-être aussi un peu moi-même... Mais
je ne me suis pas laissé démonter. J’ai in
sisté, j’ai donné à entendre que les mauvais
gars de La Neuville, très surexcités, pour
raient se porter sur Clairefont... Alors la
vieille Saint-Maurice a bondi, et, rouge
comme une braise, en jurant comme un
troupier : Qu’ils y viennent ! Il ne manqua
pas de fusils an râtelier... Us verront que
les femmes de la maison valent des hom
mes... U y a là-haut, dans les greniers,
le pierrier qui servait autrefois pour les
feux d’artifice... Je le descendrai dans le
vestibule, et si on touche seulement à la
serrure de notre porte... je mitraille toute
cette canaille ! Et elle sacrait, la vieille, que
c’en était fabuleux ! Allez donc faire enten
dre raison à des esprits détraqués ! Quant
au marquis, il était enfermé dans sa tour,
comme un hibou, à tourner les pages de
quelque grimoire, ou à empester l’air de la
contrée avec des drogues chimiques...
Impossible de le voir... Celui-là, tout hé
bété qu’il est, aurait mieux compris la si
tuation que celte vieille échappée de la
chouannerie.
— Mais elle paraît la comprendre parfai
tement, dit Pascal avec tranquillité, et elle
soutient envers et contre tous l’innocence de
son neveu... Comme l’a fort bien dit Mlle
de Clairefont, fuir, c’est avouer, et le comte
Robert est sans doute décidé à se défendre...
II a peut-être des preuves à fournir... Un
bon alibi serait décisif... Qui sait s’il ne le
produira pas ?
— Je l’en défie ! cria Carvajan, à qui
l’opposition de son fils fit perdre tout son
calme.
-- Mon père, vous n’en savez rien....
— Yas-tu le défendre ?
— Et vous, allez-vous l’accuser ?
Us se trouvaient face à face, parlant aussi
ferme l’un que l’autre : Pascal, absolument
maître de lui, et voulant savoir exactement
qu elle était la part de son père dans le tra
vail d’investissement qui s’étendait autour
de Robert ; CarvajaD, le cerveau enflammé
par une colère subite, et prêt à étaler sa
haine au grand jour.
— Non ! certes ! intervint Fleury d’ua
ton conciliant, votre père n’accuse pas.
D’ailleurs, à quoi bon ? M. le maire, com
me toujours, n’a souci que de la chose pu
blique... Devant vous, nous parlons ea
toute liberté, pesant le pour et le contre
Croyez que si M Carvajan pouvait étouffer
cette affaire-là, il le ferait et promptement...
U est l’ennemi de M. de Clairefont... Il 1©
combat sur le terrain politique et finan
cier. .. Mais profiter d’un malheur pareil T
Devrais-je avoir besoin de vous dire quTI
n’y a même pas pensé ?... Et pourtant. De
serait-ce pas légitime ? Ses adversaires ont-
ils jamais reculé devant les pires manœu
vres ? Vous en avez eu la preuve hier soir...
Si nous pouvions établir ^l'innocence de ce
malheureux jeune homme, nous le ferions...
Mais, malheureusement, il n’y a pas de
doute à conserver... C’est la dernière étape,,
voyez-vous, de cette famille qui depuis
trente ans va sans cesse < eu descendant
Quand j’ai eu l’honneur de vous rencontrer
ici, pour la première fois, vous veniez d’être
témoin, justement, d’un des actes de vio
lence habituels à ce malheureux... Je vous:
ai dit alors, ne croyant pas être si bon pro
phète, que vous arriviez pour assister aux
suprêmes phases de la lutte engagée entres
M. de Clairefont et votre père... Eh bien î: '
la lutte est finie... Elle se termine dans lac
boue et dans le sang.
— Et nous n’en sommes pas cause I re~
ÜEPOT LEGAL
Première année.— N" 42 .
Le numéro 5 centimes.
JOf
Jeudi, 27 août 1885.
La Dépêche Algérienne
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois Un an
Algérie 4.50 O 18
Frange O 12 24
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux annnoncea et réclames doivent, «»
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, AIg«.
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rne du Baussel, * ;
A Paris, chez MM. AUDBOURG et C‘«, piac8 de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DEPECHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion, des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, le 26 Août 1885.
HOMMES DU JODR
XXli
M. BOUVIER
DÉPUTÉ DE MARSEILLE
M. Rouvier, l’ancien ami de Gambetta,
l’ancien ministre du Commerce, le grand
ministre, comme l’appelaient si ironique
ment, il y a quelques mois à peine, les or
ganes avancés de la presse française est, né
à Aix. le 17 avril 1842.
Avocat à Marseille, il combattit l’Empire
dans les journaux de l'opposition et fut
nommé secrétaire général de la préfecture
des Bouches-du-Rhône, après le 4 septem
bre 1870. Candidat à l’Assemblée nationale,
le 8 février 1871, il obtint sans être élu 44,052
voix, mais passa aux élections complémen
taires du 2 juillet avec 34,156 voix et prit
place à l’extrôme-gaucbe. Il protesta contre
l’exécution,â Marseille, de Gaston Créraieux,
et vit déposer contre lui une demande
d'autorisation de poursuites, pour un article
de la Constitution que la Commission des
grâces jugea outrageant. Cette demande fut
repoussée en mars 1872, sur la proposition
de M. Chhngarnier, par l 'amnistie du dé
dain .
Rapporteur de la commission^ pour la
/èforme judiciaire eu Egypte, M. Rouvier
soutint avec zèle les intérêts français en
Orient et adopta les lois constitutionnelles.
Elu député, le 20 février 1876, dans la
3 e circonscription de Marseille, par 8,508
voix contre 3,501 obtenues par le candidat
monarchiste, il reprit sa place à l’extrême
gauche et fui élu secrétaire de la Chambre.
Au mois de mai suivant, il se vit accuser
d’actes d’immoralité commis au Palais-
Royal et auxquels la presse monarchiste
donna un retentissement scandaleux.
Il demanda lui-même à la Chambre
d’autoriser les poursuites contre lui (13 juin
1876), prit pour défenseur M e Nicollet et fut
acquitté le 13 juillet, par un jugement dont
les dispositifs laissaient planer sur son
innocence une incertitude outrageante.
Trois ans plus tard, la Commission d’en
quête parlementaire, sur les agissements de
la préfecture de police, retrouva l’origine de
cette invention calomnieuse, dont une
feuille plus que légère s’était faite l’écho.
Après le 16 Mai 1877, M. Rouvier fut un
des 363. Il se présenta aux élections du
14 octobre et fut réélu par 8 784 voix contre
2,855 obtenues par le candidat officiel. Il fut
également êiuen 1881, sans concurrent; cette
fois, on s’était lassé de ses victoires Succes
sives.
Dans le caoinet du 14 novembre 1881,
présidé par M. Gambetta, on lui confia le
portefeuille du commerce et des colouies
qu’il garda jusqu’à la chute du grand pa
triote. c’est-à -dire jusqu’au 26 janvier 1882.
Il retourna aux affaires quelques mois
avant la chute du dernier ministère Ferry
et dirigea avec sa grande habileté le même
ministère du commerce, dont il avait été le
chef incontesté sous le grand ministère.
M. Rouvier est un homme d’un mérite et
d’une autorité incontestables. Dans lune
comme dans l’autre Chambre, il a pris une
part importante aux discussions économi
ques, commerciales et financières.
Il a défendu, avec une compétence hors
de pair, les intérêts de la ville de Marseille,
s’est prononcé en faveur de l’impôt sur le
revenu, mais a combattu énergiquement
cette utopie qui a nom l’impôt du capital et
que présentait avec acharnement le fameux
Menier.
M. Rouvier a donc rendu de réels et
grands services à son département ; les
Marseillais, qui le savent., aiment beaucoup
leur député, et sa réélection ne fait doute
pour personne.
4
Orléansville
Orléansville, 22 août 1885.
Qu’est le Chéliff? Rien.
Que doit-il être ? Tout.
Qu«l triste spectacle, mon cher ami, que
celui que présentait au voyageur d’il y a
vingt ans, cette longue vallée du Chéliff
sans arbres, sans villages, bordée par des
collines dénudées où de rares marabouts
attestaient seuls l'exislence des tribus clair
semées qui l’habitaient.
Aujourd’hui encore le spectacle a peu
changé. Les progrès ont été lents; la colo
nisation moins rapide que sur presque tous
les autres points du pays. Cela s’explique. Eu
Algérie, le peuplement européen a fait la
tache d’huile autour des gros centres ; et
comme nous sommes à égale distance d’Al
ger à Oran, et que cette distance est grande,
il nous faudra encore bien des années pour
que la prospérité de notre région atteigne
celle de la Mitidjs.
Les villages, cependant, commencent à
peupler cette vaste sollituie, mais hélas ! le
plus grand nombre est misérable. L’ad
ministration a tout fait pour les faire vivrs
et le plus grand nombre s’étiolent et se dé
peuplent.
Seul, Orléansville a pris, depuis trois ans,
un aspect de prospérité qui tranche sur la
région qui l’environne. C’est une véritable
oasis. Les vieux arbres rabougris qui mou
raient de soif ont fait place aux jeunes qui
verdoient et ne demandent qu’à vivre. Le
vaste bois de pins que l’on appelle, je ne
sais trop pourquoi, « la Pépinière » a perdu
cette teinte grisâtre de mauvais augure et
a repris sa fraîcheur des premières années.
Tout autour., les orangeries, les luzernières,
les cultures maraîchères de toute nature
occupent une population qui a doublé, et
dont la fortune est assurée.
C’est aux irrigations qu’est due cette
transformation. C’est à elles que notre for
tune est désormais liée, non pas seulement
pour la petite région qui, aujourd’hui, utilise
une faible partie des eaux du Cüéliff, mais
pour toute cette grande plaine, qui peut
jouir des mêmes avantages, et atteindre la
même prospérilé.
Car, il faut qu’on le sache, cette terre mal,
famée, presque sans valeur, où I on fait un 9
récolte, dit-oa tous les cinq ans, où la fa
mine est toujours à craindre, où les Fran
çais se ruinent et où les indigènes vivent
misérables, contient un sol d’une richesse
et d’une fertilité incomparables. Il est peu
d’endroits en Algérie où la terre végétale
soit plus profoude et plus féconde.
Sa stérilité n’a qu’une seule cause : le
manque de pluie, et le manque de pluie n’a
qu’une seule cauëe : le déboisement.
Il faudrait donc reboiser, mais comme les
arbres meurent faute de pluie, pendant les
étés où la chaleur est doublée par la réver
bération du sol dénudé, ou tourne dans un
cercle vicieux qui semble sans issue.
Il en a une cependant.
Ce qui vient d’être fait autour d’Orléans-
ville peut l’être du Djendei à Relizane. Oui,
cela est démontré aujourd’hui, il est possi
ble d’irriguer celte immense plaine Le
Chéliff et ses affluents peuvent remplacer
l’eau du ciel qui ne tombe pas. Avec une
série de barrages bien conçus et bien cons
truits il est possible de faire face à tous les
besoins. Là où il sera impossible d’avoir de
l’eau toute l’année on en jouira tout au
moins jusqu’au mois de mai. Les arrosages
de printemps satureront les terres et for
meront de nouvelles sources en aval.
Avec les irrigations,le reboisement se fera
de lui-même, et avec le reboisement les
pluies reviendront. La vie régnera où pla
nait la mort. Le Chéliff lui-même repren
dra le rang de fleuve navigable. La Chica-
nette ne sera plus une fumisterie, et les ré-
dactenrs de l’ Illustration, s’ils viennent
jamais en Algérie après la réalisation de ce
programme, demeureront persuadés que
G. Zukri n’était pas un vulgaire mystifica
teur, mais simplement un illuminé qui as,
pressenti l’avenir.
Quelques chiffres pour finir. Les terres;
irrigables autour d’Orléansville se louent de
59 à 100 fr. par hectare. Us serait bien sur
prenant que ce dernier chiffre ne soit pas.
dépassé quand la prospérité du pays sera
générale. Prenons-Ie toutefois pour base de
calcul.
Du Djendei à Relizane on peut arroser
environ 100,000 hectares ; à raison de 10fi
fr. l’hectare ils produiront un revenu de dix
millions. Aujourd’hui ils produisent à peine
le dixième, c'est donc neuf millions de dif
férence.
Or, l’ensemble des travaux est estimé â
20 millions par les ingénieurs de l’Etat.,
Intérêt et amortissement un million. Béné
fice annuel huit militons. Augmentation
de la fortune nationale cent soixante mil
lions.
Voilà de quoi faire venir l’eau à la bou
che.
Cette démonstration, absolument rigou
reuse, puisse-t-elle la faire venir sur nos
terres.
Informations algériennes
Le Conseil municipal d’Oran a refusé det
voter la somme de 2,069 fr. réprésentant la
part incombant à la commune pour les
années 1884-1885 dans les indemnités det
logement allouées aux pasteurs protestants
du département.
X
Deux espagnols, expulsés du territoires
français, ont été embarqués hier sur l’/saaa
Pereire, à destination de Port-Vendres,,
d’où ils seront conduits à la frontière.
X
Un mouvementde greffiers a été expédié
par le Parquet général à la Chancellerie.
Ce mouvement comporte la permutation:
des greffiers de l’Arba, d’Azeffoun et de*
Tablat.
X
On nous annonce l’apparition prochaine &
Bougie d’uu troisième journal, la Summam^
Feuilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
N° 42.
LA
GRAflBE1ÂRIÎÈ1E
PAR
Georges OHNET
Toute la nuit il s’était promis de partir, et,
en une seconde, il décidait de rester. Il ne vit
là rien que de naturel. L’ineohèrence n’est-
elle pas la règle même de l’amonr ? Il se
composa, pour entrer chez son père, un vi
sage souriant. A sa vue, Fleury, qui parlait
avec animation, s’arrêta court, prit un air
embarrassé et loucha furieusement de ses
yeux troubles.
— Eh bien ! dit avec éclat Carvajan, en
allant à son fils, les voilà dans une belle
passe, ces gens si fiers, qui ne veulent pas
s’exposer à se trouver en face de nous !
— On vient de tout m’apprendre, inter
rompit Pascal.
— Eh bien ! qu’en dis-tu ?
— Qu’eu dit le parquet ? riposta le jeune
homme.
— Le parquet' est extraordinairement
mou ! Il est pris entre la certitude qui ré
sulte des preuves matérielles du crime et le
doute qui est la conséquence d’un passé
honorable... Tous ces magistrats, au fond,
sont des réactionnaires, et ils font des fa
çons pour arrêter le fils d’un marquis, voilà
tout. Ils ont télégraphié à Rouen, au procu
reur général, qui télégraphiera sans doute
à sou tour au garde des sceaux... Et, pen
dant ce temps, ici, la population fermente ;
et sans Fleury qui s’est trouvé là fort à
point, tout à l’heure, le prévenu était échar
pé par les ouvriers... On parle pour de
main d’une manifestation... Moi, je viens
de le dire au commissaire et au capitaine
de gendarmerie : si on n’arrête pas dès ce
soir ce gaillard-là, je ne réponds pas de
l’ordre à La Neuville !...
— Le mieux qu’il y aurait à faire pour M.
Robert, ce serait de partir pendant qu’il est
temps encore, dit doucereusement Fleury...
Une fois à l’abri, tout le monde serait tran
quille... C’est ce que j’ai essayé de faire
comprendre aux dames de Clairefont...
Mais, aux premiers mots, Mlle Antoinette
s’est dressée toute pâle, et, avec des regards
meurtriers comme des coups de pistolet,
elle a crié : Jamais ! Partir, ce serait avouer
qu’il est coupable... Nous savons d’où part
cette calomnie... Nous la réduirons à néant!
Elle désignait clairement M. le Maire, et
peut-être aussi un peu moi-même... Mais
je ne me suis pas laissé démonter. J’ai in
sisté, j’ai donné à entendre que les mauvais
gars de La Neuville, très surexcités, pour
raient se porter sur Clairefont... Alors la
vieille Saint-Maurice a bondi, et, rouge
comme une braise, en jurant comme un
troupier : Qu’ils y viennent ! Il ne manqua
pas de fusils an râtelier... Us verront que
les femmes de la maison valent des hom
mes... U y a là-haut, dans les greniers,
le pierrier qui servait autrefois pour les
feux d’artifice... Je le descendrai dans le
vestibule, et si on touche seulement à la
serrure de notre porte... je mitraille toute
cette canaille ! Et elle sacrait, la vieille, que
c’en était fabuleux ! Allez donc faire enten
dre raison à des esprits détraqués ! Quant
au marquis, il était enfermé dans sa tour,
comme un hibou, à tourner les pages de
quelque grimoire, ou à empester l’air de la
contrée avec des drogues chimiques...
Impossible de le voir... Celui-là, tout hé
bété qu’il est, aurait mieux compris la si
tuation que celte vieille échappée de la
chouannerie.
— Mais elle paraît la comprendre parfai
tement, dit Pascal avec tranquillité, et elle
soutient envers et contre tous l’innocence de
son neveu... Comme l’a fort bien dit Mlle
de Clairefont, fuir, c’est avouer, et le comte
Robert est sans doute décidé à se défendre...
II a peut-être des preuves à fournir... Un
bon alibi serait décisif... Qui sait s’il ne le
produira pas ?
— Je l’en défie ! cria Carvajan, à qui
l’opposition de son fils fit perdre tout son
calme.
-- Mon père, vous n’en savez rien....
— Yas-tu le défendre ?
— Et vous, allez-vous l’accuser ?
Us se trouvaient face à face, parlant aussi
ferme l’un que l’autre : Pascal, absolument
maître de lui, et voulant savoir exactement
qu elle était la part de son père dans le tra
vail d’investissement qui s’étendait autour
de Robert ; CarvajaD, le cerveau enflammé
par une colère subite, et prêt à étaler sa
haine au grand jour.
— Non ! certes ! intervint Fleury d’ua
ton conciliant, votre père n’accuse pas.
D’ailleurs, à quoi bon ? M. le maire, com
me toujours, n’a souci que de la chose pu
blique... Devant vous, nous parlons ea
toute liberté, pesant le pour et le contre
Croyez que si M Carvajan pouvait étouffer
cette affaire-là, il le ferait et promptement...
U est l’ennemi de M. de Clairefont... Il 1©
combat sur le terrain politique et finan
cier. .. Mais profiter d’un malheur pareil T
Devrais-je avoir besoin de vous dire quTI
n’y a même pas pensé ?... Et pourtant. De
serait-ce pas légitime ? Ses adversaires ont-
ils jamais reculé devant les pires manœu
vres ? Vous en avez eu la preuve hier soir...
Si nous pouvions établir ^l'innocence de ce
malheureux jeune homme, nous le ferions...
Mais, malheureusement, il n’y a pas de
doute à conserver... C’est la dernière étape,,
voyez-vous, de cette famille qui depuis
trente ans va sans cesse < eu descendant
Quand j’ai eu l’honneur de vous rencontrer
ici, pour la première fois, vous veniez d’être
témoin, justement, d’un des actes de vio
lence habituels à ce malheureux... Je vous:
ai dit alors, ne croyant pas être si bon pro
phète, que vous arriviez pour assister aux
suprêmes phases de la lutte engagée entres
M. de Clairefont et votre père... Eh bien î: '
la lutte est finie... Elle se termine dans lac
boue et dans le sang.
— Et nous n’en sommes pas cause I re~
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