Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-11-02
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 02 novembre 1885 02 novembre 1885
Description : 1885/11/02 (A1,N109). 1885/11/02 (A1,N109).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t543244p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
PRÉFECTURE
DEPOT
■ D’AU^H
LEGAL
Première année. — N* 109.
L<« numéro SS oantlmes.
Lump, 2 novembre 1885.
JOURNAL
POLITIQUE QUOTIDIEN
&JLGÉR IB
FHANOK.
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois
4.50 O
6 *2
Un an
18
24
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rne de la Marine, n* 9, ancien hôtel Bazin.
1 a ~ " 1 , , 1 „ ‘'B
Tontes les eommunieations relatives anx annsoaees et réclsn«s iaitmt, as-
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Al#w «
En France, les eommnnications sont reçues savoir :
A Marsfili.x, ehex M. Güstati ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, ehex MM. AUDBOURG et C 1 *, place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DEPECHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
Alger, le 1 er Novembre 1885.
Les 'perturbations atmosphériques et les
fêtes publiques .— Un pleur sur l’obser
vatoire du temps qu’il fera. — L'amé
lioration de la race chevaline. — Ce que
coûte la gloire. —Le vieux neuf. — Les
bottes à pétrole et les fours économi
ques.
Dimanche dernier, jour de la réunion
d’automne, Borée a retenu son souffle et le
réservoir du ciel est resté fermé jusqu’à
cinq heures du soir. Le soleil s'est môme
montré. Il a presque fait beau. Déjà le
temps avait été magnifique pour la fête de
Bouffarick.
Personne ne s’en est plus réjoui qne nous
pour nos sportmans, et nos charmantes
danseuses qui ont pu se livrer une dernière
lois aux plaisirs de la danse champêtre,
sans être obligées d’abriter leurs ébats sous
des parapluies ; n’empêche que c’est un
bouleversement ou plutôt une véritable
révolution dans les choses célestes, elle a
d’autant pins surpris qu’elle n’avait pas été
annoncée.
Il y a seulement un an, deux, tout au
plus, il n’en aurait pas été ainsi. Chacun
aurait été dûment averti de ce qui allait
arriver. Les membres de la Société hippi
que n’auraient pas passé par les angoisses
©t les terreurs qu’ils ont éprouvées le sa
medi, en voyant le ciel ouvrir toutes ses
cataractes et les fillettes auraient eu tous
les loisirs nécessaires pour préparer leurs
fraîches toilettes. Les mères prévoyantes ne
se seraient pas opposées à ce que l’on revê
tît encore les robes blanches ornées de pim
pantes coutures,joie et gaieté des bals cham
pêtres.
*\
A ce moment, l’Observatoire du temps
qu’il fera était encore dans tout son éclat
et, à la veille d’une fête quelconque, ses
communications prévenaient charitablement
tous les intéressés. On était dûment avisé
et c’est à bon escient que l’on prenait l’om
brelle ou le parapluie.
Mais hélas ! trois fois hélas ! cet établis
sement, dont Alger seul avait le privilège
glorieux, a fermé ses portes. L’oracle que
l’on consultait avec tant d’empressement à
la troisième page des journaux, est devenu
aussi muet que celui d’Epidaure. L’ingra
titude des lecteurs lui a fermé la* bouche.
Pour sonder les mystères du ciel, il faut de
nouveau recourir aux almanachs et consul
ter les descendants de Mathieu Laensberg.
Alger n’a pas ressenti comme il l’aurait
dû le coup qui l’a frappé, le jour où son
directeur s’est condamné au silence. Les
feuilles publiques essayent bien de donner
une compensation à leurs lecteurs, en leur
disant le lendemain le temps qu’il a fait la
veille ; mais, comme dit Bulard, ce n’est
pas la même chose et il faut encore, quel
comble! que la fête de Bouffarik et les cour
ses d’automne se passent sans pluie 1 Seule
Blidah est demeurée fidèle à la tradition ;
les amateurs de douches peuvent s’y rendre
avec la certitude de ne pas éprouver de dé
sillusion.
#**
La Société hippique a donc pu dimanche
dernier travailler à sec à l’amélioration de
la race chevaline et un peu aussi à la dété
rioration de la race humaine.Un des jockeys
s’est glorieusement cassé les reins sur le
turf et a passé de vie à trépas. Donc la fête
a été complète. On n’a rien à réclamer aux
organisateurs.
***
Les algériens qui ne savaient pas encore
ce que coûte la gloire, l’ont appris cette
semaine. Le transport la Gironde^ ramenant
un chargement de malades et de blessés du
Cambodge et du Tonkin, s’est chargé de le
leur enseigner.
Quel spectacle que celui* de tous ces pau
vres diables mutilés par le fer ou par le feu
de l’ennemi, ou bien encore délabrés par la
maladie, n’ayant pas môme la force de
débarquer, et transportés sur des matelas
aux wagons qui les ont conduits à leur
corps. Que de souffrances ils ont eu à sup
porter, en dépit des soins dont ils sont l’oc-
jet, depuis le jour où jugés susceptibles
d’être rapatriés, ils sont montés sur le pont
de la Gironde jusqu’à celui où ils retrou
veront la santé; mais que de courage aussi,
que d’abnégation chez tous ces souffrants à
qui la douleur n’arrachait pas un cri, et anx
visages desquels la joie de revoir le sol de
la Patrie attachait Gomme une auréole de
bonheur.
Jamais nous n’aurons assez de compas
sion pour ces victime du devoir. Mais
quelle fierté légitime est la nôtre, en pré
sence de tant de braves enfants donnant
sans marchander leur sang pour l’honneur
du drapeau et du nom français !
***
Une des caractéristiques de ce siècle est
le soin jaloux avec lequel l’industrie tire
parti des déchets et des débris que la civi
lisation jette au coin de la borne.
Comme dans la nature, il n’est pas un
objet qui ne traverse une foule de transfor
mations successives.
Sous ce rapport, comme sous tant d’au
tres, Paris marche en tête du mouvement.
On ne compte plus les ateliers, les usines
même, où le vieux ramassé dans un ruis
seau est métamorphosé en neuf. Les seules
fabriques de ménages d’enfants avec de
vieilles boites à conserves dédaigneusement
repoussées à la rue, occupent des centaines
d’ouvriers et, reconstitué en lingots l’étain
que l’on en retire fait concurrence à celui
sorti directement des mines.
A Alger, on est loin d’être encore aussi
avancé. On néglige môme d’utiliser pour
réchauffer la terre des richesses qui, au lieu
d’être transformées en fécondants engrais,
empoisonnent nos eaux et corrompent l’air.
Aussi, est-ce avec d’autant plus de plaisir
que nous citons l’ingénieuse idée d’un in
dustriel dont nous ignorons le nom et
l’adresse, ceci dit popr que l’Agence Ha
vas ne suppose pas que nous voulions lui
faire une réclame à l’œil.
Déjà on avait utilisé les boîtes à pétrole
en en faisant des bidons, des seaux écono
miques ou des boîtes à ordures. Notre hom
me a fait mieux ; il les transforme en fours
de ménage, oui vous avez bien lu, en véri
tables fours dans lesquels la ménagère peut
indistinctement faire cuire économiquement
sous sa surveillance immédiate, rôtis, gril
lades ou pâtisseries, et cet objet, dont la
place est marquée d’avance dans toutes les
cuisines se vend 2 fr. 50.
Les boîtes à pétrole dont on était naguère
heureux de se débarrasser en les donnant
pour rien, ont désormais acquis une valeur
marchande ; elles vont devenir l’objet d’un
commerce sérieux.
N’est-ce pas là un progrès à signaler,* et
de plus une haute fantaisie que cette der
nière utilisation des boîtes à pétrole ?
Informations algériennes
Un vœu excellent demandant une loi sur
l'échenillage a été émis au Conseil général
d’Oran, par M. David.
Les chenilles, ,en effat, n’ont jamais été
aussi abondantes que cette année et beau
coup de propriétaires sont découragés et
ont cessé d’écheniiler, parce que le voisin
ne prenant pas la môme mesure, infestait,
par son voisinage, la vigne de celui qui
avait réussi à nettoyer sa propriété.
X
M Jacques, sénateur d Oran, arrivera à
Alger ce soir, dimanche.
X
Aucun des projets fournis par la Compa-
nie de l’Est-Algérien pour la continuation
es travaux de la ligne Bougie-Maasour,
n’est revenu du mioistère des travaux pu
blics.
Ces retards incompréhensibles sont pré
judiciables à tout le rrionde, aussi bien aux
entrepreneurs qu’aux nombreux ouvriers
qui attendent.
X
Hier est arrivé à Bougie, le 4* bataillon
du 3® Zouaves, venant de Sètif, et qui doit
tenir garnison à Bougie.
X
Nous apprenons, par la compagnie tran
satlantique, que les mouvements de troupes
entre l’Algérie et la France auront lien
dorénavant par Marseille.
X
Nous apprenons la mort de M. Roynefr*
propriétaire à Kherrata, ex-conseiller géné-«=
ral du département de Constantine, pour la
circonscription extra muros de Sétif.
, X
Le temps a été préjudiciable aux courses
de dimanche à Tuuis. La veille il avait plu-
ct le jour môme le ciel était assez mena
çant pour détourner bien des amateurs d«
plaisir d’y assister.
Malgré cela, une société assez nombreuse
de sportmens s’était donné rendez-vous à
Thippodrome ds Megrin et la tribune offi
cielle était presque entièrement garnie.
AD CONSEIL GÉNÉRAL
Le Conseil général a clos hier sa session..
On peut dire que, cette fois cette assem
blée a travailfè très vite et très bien.
On sait que les conseillers généraux ont
un mois pour la session. Très souvent on
ne terminait que le dernier jour, à la der
nière heure, souvent même on était obligé
de recourir à une séance de nuit.
Feuilleton de la Dépêche Algérienne
N' 34.
LES
L'HOHR
PAR
A. RAGOT et G. PRADÏL (,)
PREMIÈRE PARTIE
LES DEUX TESTAMENTS
— Tandis que, continua M. de Nantrey
en scadant ses paroles, comme s’il eût voulu
Ses faire entrer une à une dans le tuyau de
l’oreille de Brigot et lui en faire compren
dre toute la portée, tandis que, si le billet
ne venait pas de vous, si vous pouviez dire
à la justice qui vous a remis ce billet, les
Choses changeraient complètement de face
et tourneraient peut-être môme à votre avan
tage.
Le juge d’instruction attendit.
— Il est donc regrettable pour vous, con
tinua-t-il, que vous ne puissiez vous rap
peler qui vous a remis, ou donné, ou échan
gé ca billet, car il est une autre chose que
(1} Reproduction Interdite anx journaux qui n’ont
traité arec ta Société des Gens de Lettres.
je ne doispoit vous cacher.Paris a été inon
dé durant longtemps de billets semblables à
celui-ci On n’a pu parvenir à découvrir le
falsificateur, et il va être bien difficile de ne
pas croire que c’est vous, puisque vous ne
pourrez point prouver que vous tenez ce
billet d’une autre personne. On va vous
conduire au Dépôt, et là vous attendrez
l'instruction régulière de votre affaire.
Puis, s’adressant à Choume, qui n’avait
point dit un mot durant toute cette scène,
mais qui n'avait poit perdu de l’œil son pri
sonnier :
— Emmenez cet homme, dit-il, et donnez
l’ordre qu’on le garde au secret le plus ab
solu.
Ces mots produisirent un stupéfiant effet
sur le M* Gambille. Il sentit que c’en était
fait, que sa liberté était perdue ; il jeta un
regard désespéré autour de lui, cherchant
un soutien, un appui, et il ne trouva que
l’implacable regard de M. de Nantey et le
non moins impassible Choume, qui, du
geste, l’invitait à sortir.
La tête lui tourna, ses jambes flageolè
rent et il se raccrocha à un meuble pour ne
pas tomber.
Le juge et l’agent se rendirent parfai
tement compte que le filou était sur ses fins
et que la perspective du secret allait lui dé
lier la langue.
— Voyons, dit M. de Nantrey, voulez-
vous parler? si vous savez quelque chose,
il en est temps encore. Dites-vous bien qne
la justice ne manquera pas d’avoir pour
vous une certaine commisération, si vous
l’aidez à mettre la main sur le véritable cou
pable.
— En tout cas, fit GambiF' ça n’est pas
moi, et il tortilla sa casquette d un air em
barrassé et honteux.
Le juge répliqua :
— Nous pensons bien qee ce n’est pas
vous qui êtes le principal coupable, mais
nous avons toutes raisons da croire que vous
le connaissez,que vous savez où il se cache,
et voilà ee que la justice a intérêt à con
naître. Il ne suffit pas que vous ne soyez
point le chef de la bande, vous êtes tout au
moins recéleur, et nous pensons que la
prison, le secret, les interrogatoires suivis
et surtout la perspective d'aller au bagne,
si vous ne consentez pas à dénoncer vos ou
votre complice, vous forceront à dire la
vérité.
— Mon doux juge, je ne sais rien.
— Alors qu'on l’emmène au dépôt.
Brigot dit Gambille n’y tint plus ; c’était
sa dernière parade. II s’élança aux genoux
du juge d'instruction en lui disant :
— Monsieur le juge, je vous dirai tout,
tout, tout ; mais promettez-moi que vous ne
m’enverrez pas au secret.
— Pariez, alors...
— Je ne suis pas, je vous l’ai dit, com
mença Brigot, Fauteur des billets... Ça,
c’est la pure vérité ; que je meure à l’instant
si je mens.
— Bien, c’est acquis aux débats. Passez.
Connaissez voas l’auteur des billets?
Brigot se tut. Il essayait de chercher un
biais, un faux-fuyant; ou sentait qu’il fai
sait tous ses efforts pour éviter une réponse
catégorique. Il finit par se décider cepen
dant.
— Oui, fit-il en baissant la. tôle, je le
connais ; c’est une fière canaille, allez ! if
m’a mis dedans numéro 1. Oui, je le con
nais, je le connais bien même et je puis vous
dire que c’est un malin. Figurez-vous, mon
doux juge, que c’est sa faute si je suis pincé.
C’est lui qui a les planches, c’est lui qui
fabrique les billets, et moi je faisais partie
de la bande des écouleurs. Lui, le malin, if
ne paraissait jamais ; c’est moi qui ai servi
d’intermédiaire, qui en remettais tant à ce
lui-ci, tant à celui- là, tant à cet autre ; puis
c’est moi qui touchais l’argent et, leur part
faite, le rapportais au susdit. Ça allait bien
pendant un temps, pais la police a com
mencé à ouvrir l’œil. Alors v’ià qu’un beau
jour il me dit ccrnme ça: « Gambille, faut
tenter un grand coup. » Il me prend tout
mon argent, que je iui donne. Puis il est
parti sans crier gare, m° laissant entre îes
mains une dizaine rij fij.fi.fis pas sérieux dut
tout, que j ai écoulés avec peine. Bref, il ne
me restait que celui-là. Ah! si le commerce
avait donné, je n’aurais pas essayé de le
filer; mais le commerce n’allait pas, j’ai
voulu en faire de l’or, et j’ai été pris; voilà!
— Et où est-il cet homme-là?
— Ça, mon doux juge, je n’en sais rien*
Et si je le savais je lui flanquerais une fa
meuse danse, pour m’avoir pris mon magot
et pour m’avoir fait poser
— Il n’est pas à Paris ?
DEPOT
■ D’AU^H
LEGAL
Première année. — N* 109.
L<« numéro SS oantlmes.
Lump, 2 novembre 1885.
JOURNAL
POLITIQUE QUOTIDIEN
&JLGÉR IB
FHANOK.
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois
4.50 O
6 *2
Un an
18
24
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rne de la Marine, n* 9, ancien hôtel Bazin.
1 a ~ " 1 , , 1 „ ‘'B
Tontes les eommunieations relatives anx annsoaees et réclsn«s iaitmt, as-
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Al#w «
En France, les eommnnications sont reçues savoir :
A Marsfili.x, ehex M. Güstati ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, ehex MM. AUDBOURG et C 1 *, place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DEPECHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
Alger, le 1 er Novembre 1885.
Les 'perturbations atmosphériques et les
fêtes publiques .— Un pleur sur l’obser
vatoire du temps qu’il fera. — L'amé
lioration de la race chevaline. — Ce que
coûte la gloire. —Le vieux neuf. — Les
bottes à pétrole et les fours économi
ques.
Dimanche dernier, jour de la réunion
d’automne, Borée a retenu son souffle et le
réservoir du ciel est resté fermé jusqu’à
cinq heures du soir. Le soleil s'est môme
montré. Il a presque fait beau. Déjà le
temps avait été magnifique pour la fête de
Bouffarick.
Personne ne s’en est plus réjoui qne nous
pour nos sportmans, et nos charmantes
danseuses qui ont pu se livrer une dernière
lois aux plaisirs de la danse champêtre,
sans être obligées d’abriter leurs ébats sous
des parapluies ; n’empêche que c’est un
bouleversement ou plutôt une véritable
révolution dans les choses célestes, elle a
d’autant pins surpris qu’elle n’avait pas été
annoncée.
Il y a seulement un an, deux, tout au
plus, il n’en aurait pas été ainsi. Chacun
aurait été dûment averti de ce qui allait
arriver. Les membres de la Société hippi
que n’auraient pas passé par les angoisses
©t les terreurs qu’ils ont éprouvées le sa
medi, en voyant le ciel ouvrir toutes ses
cataractes et les fillettes auraient eu tous
les loisirs nécessaires pour préparer leurs
fraîches toilettes. Les mères prévoyantes ne
se seraient pas opposées à ce que l’on revê
tît encore les robes blanches ornées de pim
pantes coutures,joie et gaieté des bals cham
pêtres.
*\
A ce moment, l’Observatoire du temps
qu’il fera était encore dans tout son éclat
et, à la veille d’une fête quelconque, ses
communications prévenaient charitablement
tous les intéressés. On était dûment avisé
et c’est à bon escient que l’on prenait l’om
brelle ou le parapluie.
Mais hélas ! trois fois hélas ! cet établis
sement, dont Alger seul avait le privilège
glorieux, a fermé ses portes. L’oracle que
l’on consultait avec tant d’empressement à
la troisième page des journaux, est devenu
aussi muet que celui d’Epidaure. L’ingra
titude des lecteurs lui a fermé la* bouche.
Pour sonder les mystères du ciel, il faut de
nouveau recourir aux almanachs et consul
ter les descendants de Mathieu Laensberg.
Alger n’a pas ressenti comme il l’aurait
dû le coup qui l’a frappé, le jour où son
directeur s’est condamné au silence. Les
feuilles publiques essayent bien de donner
une compensation à leurs lecteurs, en leur
disant le lendemain le temps qu’il a fait la
veille ; mais, comme dit Bulard, ce n’est
pas la même chose et il faut encore, quel
comble! que la fête de Bouffarik et les cour
ses d’automne se passent sans pluie 1 Seule
Blidah est demeurée fidèle à la tradition ;
les amateurs de douches peuvent s’y rendre
avec la certitude de ne pas éprouver de dé
sillusion.
#**
La Société hippique a donc pu dimanche
dernier travailler à sec à l’amélioration de
la race chevaline et un peu aussi à la dété
rioration de la race humaine.Un des jockeys
s’est glorieusement cassé les reins sur le
turf et a passé de vie à trépas. Donc la fête
a été complète. On n’a rien à réclamer aux
organisateurs.
***
Les algériens qui ne savaient pas encore
ce que coûte la gloire, l’ont appris cette
semaine. Le transport la Gironde^ ramenant
un chargement de malades et de blessés du
Cambodge et du Tonkin, s’est chargé de le
leur enseigner.
Quel spectacle que celui* de tous ces pau
vres diables mutilés par le fer ou par le feu
de l’ennemi, ou bien encore délabrés par la
maladie, n’ayant pas môme la force de
débarquer, et transportés sur des matelas
aux wagons qui les ont conduits à leur
corps. Que de souffrances ils ont eu à sup
porter, en dépit des soins dont ils sont l’oc-
jet, depuis le jour où jugés susceptibles
d’être rapatriés, ils sont montés sur le pont
de la Gironde jusqu’à celui où ils retrou
veront la santé; mais que de courage aussi,
que d’abnégation chez tous ces souffrants à
qui la douleur n’arrachait pas un cri, et anx
visages desquels la joie de revoir le sol de
la Patrie attachait Gomme une auréole de
bonheur.
Jamais nous n’aurons assez de compas
sion pour ces victime du devoir. Mais
quelle fierté légitime est la nôtre, en pré
sence de tant de braves enfants donnant
sans marchander leur sang pour l’honneur
du drapeau et du nom français !
***
Une des caractéristiques de ce siècle est
le soin jaloux avec lequel l’industrie tire
parti des déchets et des débris que la civi
lisation jette au coin de la borne.
Comme dans la nature, il n’est pas un
objet qui ne traverse une foule de transfor
mations successives.
Sous ce rapport, comme sous tant d’au
tres, Paris marche en tête du mouvement.
On ne compte plus les ateliers, les usines
même, où le vieux ramassé dans un ruis
seau est métamorphosé en neuf. Les seules
fabriques de ménages d’enfants avec de
vieilles boites à conserves dédaigneusement
repoussées à la rue, occupent des centaines
d’ouvriers et, reconstitué en lingots l’étain
que l’on en retire fait concurrence à celui
sorti directement des mines.
A Alger, on est loin d’être encore aussi
avancé. On néglige môme d’utiliser pour
réchauffer la terre des richesses qui, au lieu
d’être transformées en fécondants engrais,
empoisonnent nos eaux et corrompent l’air.
Aussi, est-ce avec d’autant plus de plaisir
que nous citons l’ingénieuse idée d’un in
dustriel dont nous ignorons le nom et
l’adresse, ceci dit popr que l’Agence Ha
vas ne suppose pas que nous voulions lui
faire une réclame à l’œil.
Déjà on avait utilisé les boîtes à pétrole
en en faisant des bidons, des seaux écono
miques ou des boîtes à ordures. Notre hom
me a fait mieux ; il les transforme en fours
de ménage, oui vous avez bien lu, en véri
tables fours dans lesquels la ménagère peut
indistinctement faire cuire économiquement
sous sa surveillance immédiate, rôtis, gril
lades ou pâtisseries, et cet objet, dont la
place est marquée d’avance dans toutes les
cuisines se vend 2 fr. 50.
Les boîtes à pétrole dont on était naguère
heureux de se débarrasser en les donnant
pour rien, ont désormais acquis une valeur
marchande ; elles vont devenir l’objet d’un
commerce sérieux.
N’est-ce pas là un progrès à signaler,* et
de plus une haute fantaisie que cette der
nière utilisation des boîtes à pétrole ?
Informations algériennes
Un vœu excellent demandant une loi sur
l'échenillage a été émis au Conseil général
d’Oran, par M. David.
Les chenilles, ,en effat, n’ont jamais été
aussi abondantes que cette année et beau
coup de propriétaires sont découragés et
ont cessé d’écheniiler, parce que le voisin
ne prenant pas la môme mesure, infestait,
par son voisinage, la vigne de celui qui
avait réussi à nettoyer sa propriété.
X
M Jacques, sénateur d Oran, arrivera à
Alger ce soir, dimanche.
X
Aucun des projets fournis par la Compa-
nie de l’Est-Algérien pour la continuation
es travaux de la ligne Bougie-Maasour,
n’est revenu du mioistère des travaux pu
blics.
Ces retards incompréhensibles sont pré
judiciables à tout le rrionde, aussi bien aux
entrepreneurs qu’aux nombreux ouvriers
qui attendent.
X
Hier est arrivé à Bougie, le 4* bataillon
du 3® Zouaves, venant de Sètif, et qui doit
tenir garnison à Bougie.
X
Nous apprenons, par la compagnie tran
satlantique, que les mouvements de troupes
entre l’Algérie et la France auront lien
dorénavant par Marseille.
X
Nous apprenons la mort de M. Roynefr*
propriétaire à Kherrata, ex-conseiller géné-«=
ral du département de Constantine, pour la
circonscription extra muros de Sétif.
, X
Le temps a été préjudiciable aux courses
de dimanche à Tuuis. La veille il avait plu-
ct le jour môme le ciel était assez mena
çant pour détourner bien des amateurs d«
plaisir d’y assister.
Malgré cela, une société assez nombreuse
de sportmens s’était donné rendez-vous à
Thippodrome ds Megrin et la tribune offi
cielle était presque entièrement garnie.
AD CONSEIL GÉNÉRAL
Le Conseil général a clos hier sa session..
On peut dire que, cette fois cette assem
blée a travailfè très vite et très bien.
On sait que les conseillers généraux ont
un mois pour la session. Très souvent on
ne terminait que le dernier jour, à la der
nière heure, souvent même on était obligé
de recourir à une séance de nuit.
Feuilleton de la Dépêche Algérienne
N' 34.
LES
L'HOHR
PAR
A. RAGOT et G. PRADÏL (,)
PREMIÈRE PARTIE
LES DEUX TESTAMENTS
— Tandis que, continua M. de Nantrey
en scadant ses paroles, comme s’il eût voulu
Ses faire entrer une à une dans le tuyau de
l’oreille de Brigot et lui en faire compren
dre toute la portée, tandis que, si le billet
ne venait pas de vous, si vous pouviez dire
à la justice qui vous a remis ce billet, les
Choses changeraient complètement de face
et tourneraient peut-être môme à votre avan
tage.
Le juge d’instruction attendit.
— Il est donc regrettable pour vous, con
tinua-t-il, que vous ne puissiez vous rap
peler qui vous a remis, ou donné, ou échan
gé ca billet, car il est une autre chose que
(1} Reproduction Interdite anx journaux qui n’ont
traité arec ta Société des Gens de Lettres.
je ne doispoit vous cacher.Paris a été inon
dé durant longtemps de billets semblables à
celui-ci On n’a pu parvenir à découvrir le
falsificateur, et il va être bien difficile de ne
pas croire que c’est vous, puisque vous ne
pourrez point prouver que vous tenez ce
billet d’une autre personne. On va vous
conduire au Dépôt, et là vous attendrez
l'instruction régulière de votre affaire.
Puis, s’adressant à Choume, qui n’avait
point dit un mot durant toute cette scène,
mais qui n'avait poit perdu de l’œil son pri
sonnier :
— Emmenez cet homme, dit-il, et donnez
l’ordre qu’on le garde au secret le plus ab
solu.
Ces mots produisirent un stupéfiant effet
sur le M* Gambille. Il sentit que c’en était
fait, que sa liberté était perdue ; il jeta un
regard désespéré autour de lui, cherchant
un soutien, un appui, et il ne trouva que
l’implacable regard de M. de Nantey et le
non moins impassible Choume, qui, du
geste, l’invitait à sortir.
La tête lui tourna, ses jambes flageolè
rent et il se raccrocha à un meuble pour ne
pas tomber.
Le juge et l’agent se rendirent parfai
tement compte que le filou était sur ses fins
et que la perspective du secret allait lui dé
lier la langue.
— Voyons, dit M. de Nantrey, voulez-
vous parler? si vous savez quelque chose,
il en est temps encore. Dites-vous bien qne
la justice ne manquera pas d’avoir pour
vous une certaine commisération, si vous
l’aidez à mettre la main sur le véritable cou
pable.
— En tout cas, fit GambiF' ça n’est pas
moi, et il tortilla sa casquette d un air em
barrassé et honteux.
Le juge répliqua :
— Nous pensons bien qee ce n’est pas
vous qui êtes le principal coupable, mais
nous avons toutes raisons da croire que vous
le connaissez,que vous savez où il se cache,
et voilà ee que la justice a intérêt à con
naître. Il ne suffit pas que vous ne soyez
point le chef de la bande, vous êtes tout au
moins recéleur, et nous pensons que la
prison, le secret, les interrogatoires suivis
et surtout la perspective d'aller au bagne,
si vous ne consentez pas à dénoncer vos ou
votre complice, vous forceront à dire la
vérité.
— Mon doux juge, je ne sais rien.
— Alors qu'on l’emmène au dépôt.
Brigot dit Gambille n’y tint plus ; c’était
sa dernière parade. II s’élança aux genoux
du juge d'instruction en lui disant :
— Monsieur le juge, je vous dirai tout,
tout, tout ; mais promettez-moi que vous ne
m’enverrez pas au secret.
— Pariez, alors...
— Je ne suis pas, je vous l’ai dit, com
mença Brigot, Fauteur des billets... Ça,
c’est la pure vérité ; que je meure à l’instant
si je mens.
— Bien, c’est acquis aux débats. Passez.
Connaissez voas l’auteur des billets?
Brigot se tut. Il essayait de chercher un
biais, un faux-fuyant; ou sentait qu’il fai
sait tous ses efforts pour éviter une réponse
catégorique. Il finit par se décider cepen
dant.
— Oui, fit-il en baissant la. tôle, je le
connais ; c’est une fière canaille, allez ! if
m’a mis dedans numéro 1. Oui, je le con
nais, je le connais bien même et je puis vous
dire que c’est un malin. Figurez-vous, mon
doux juge, que c’est sa faute si je suis pincé.
C’est lui qui a les planches, c’est lui qui
fabrique les billets, et moi je faisais partie
de la bande des écouleurs. Lui, le malin, if
ne paraissait jamais ; c’est moi qui ai servi
d’intermédiaire, qui en remettais tant à ce
lui-ci, tant à celui- là, tant à cet autre ; puis
c’est moi qui touchais l’argent et, leur part
faite, le rapportais au susdit. Ça allait bien
pendant un temps, pais la police a com
mencé à ouvrir l’œil. Alors v’ià qu’un beau
jour il me dit ccrnme ça: « Gambille, faut
tenter un grand coup. » Il me prend tout
mon argent, que je iui donne. Puis il est
parti sans crier gare, m° laissant entre îes
mains une dizaine rij fij.fi.fis pas sérieux dut
tout, que j ai écoulés avec peine. Bref, il ne
me restait que celui-là. Ah! si le commerce
avait donné, je n’aurais pas essayé de le
filer; mais le commerce n’allait pas, j’ai
voulu en faire de l’or, et j’ai été pris; voilà!
— Et où est-il cet homme-là?
— Ça, mon doux juge, je n’en sais rien*
Et si je le savais je lui flanquerais une fa
meuse danse, pour m’avoir pris mon magot
et pour m’avoir fait poser
— Il n’est pas à Paris ?
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