L’intendance du jardin royal des plantes

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12 novembre 2019

Le colloque « Droit(s) et jardins » qui se tient le 15 novembre à la BNF est l’occasion de revenir sur la fondation et l’évolution structurelle et organisationnelle d’un des plus célèbres « jardins » du monde : le jardin des plantes.

Jardin du Roy pour la culture des plantes médécinales, à Paris, dessin de Federic Scalberge, 1636.

 

C’est en 1626 que Guy de la Brosse, médecin du roi Louis XIII, décide de fonder le « Jardin Royal des plantes médicinales dans un but de rayonnement culturel mais aussi de transmission pédagogique (« pour y faire démonstration aux escholiers et autres personnes intéressées... »). Le projet est entériné par un édit royal de 1635. Ouvert au public en 1640, il propose alors à la curiosité des visiteurs plus de 2300 plantes différentes.

Malgré la forte opposition de la Faculté de médecine, inquiète de l’arrivée d’un possible « rival », le jardin devient également un lieu d’enseignement même si la Sorbonne conserve l’exclusivité de l’octroi des diplômes. C’est le roi lui-même qui nomme les professeurs officiant au Jardin.

Guy de la Brosse ne pourra malheureusement guère observer l’évolution de son projet puisqu’il meurt à peine un an après son ouverture au public. C’est alors son neveu, Guy Crescent Fagon, qui se voit confier la charge de développer le Jardin des plantes. Les intendants se reposaient sur des médecins et apothicaires, qui dispensaient, en qualités de « démonstrateurs » ou « sous-démonstrateurs », des cours de botanique, de chimie et d’anatomie humaine. Parmi ces savants, « officiers du jardin du roi », on trouve notamment Christophe Glaser, Antoine-Laurent de Jussieu et Joseph Pitton de Tournefort. Les intendants s’appuyaient également sur les jardiniers en chef, au nombre desquels Jean-André Thouin, dont les fils, André et Gabriel, marqueront l’histoire de l’horticulture. Le jardin est alors réaménagé et la « butte Coypeau » (ou « Butte des Copeaux) devient un labyrinthe végétal. Est également installée la première serre chauffée, innovation majeure qui permet de cultiver des plantes exotiques.

Le poste de « concierge et directeur de la culture des plantes du Jardin royal » est créé le 9 novembre 1674 par Colbert pour Nicolas Marchant, qui l'occupe jusqu'à sa mort en 1678. Jean Marchant, son fils, lui succède alors de 1678 à 1694, date à laquelle la charge est supprimée.

 

Le "règne" du comte Buffon

En 1718, le Jardin royal des plantes médicinales devient le Jardin royal des plantes. Buffon est nommé intendant du Jardin en 1739. Il est l’intendant qui marquera le plus profondément le Jardin sur lequel il va régner sans partage pendant presque un demi-siècle.

 

Disctinction des charges de surintendance du Jardin royal et de premier médecin, 1718

 

Brillant et ambitieux gestionnaire, juriste de formation, Buffon va considérablement agrandir et « moderniser » le Jardin qui devient une institution majeure. Il déborde d’idées et souhaite que « son » Jardin permette rien moins que de « tracer le tableau de la nature entière ». Esprit curieux et amateur d’innovation et d’expérimentation, il fait construire l'un des premiers édifices métalliques au monde, la « gloriette du Labyrinthe » ou « gloriette de Buffon », située au sommet du grand labyrinthe. Parallèlement à ses activités de gestion du site, il rédige une colossale Histoire naturelle en 36 volumes, publiée de 1749 à 1804. Audacieusement, il y définit ce qu’est « l’esprit scientifique » et prône une science expérimentale contre toutes les idées préconçues et figées. Il meurt un an avec le déclenchement de la Révolution Française qui va profondément bouleverser l’organisation du Jardin.
 
  
Portrait de Buffon, 1777 et, Le Buffon choisi de B. Rabier, 1924
 
Le dernier intendant, Bernardin de Saint-Pierre, écrivain, ingénieur et botaniste, nommé  en 1792, ne fera qu’un bref passage à la tête de l’institution. On retiendra toutefois de lui qu’il fût l‘initiateur de l’installation d’une ménagerie au sein du site. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre alors, le « Jardin du Roi » devenant « Museum national d’histoire naturelle », par décret de la Convention nationale du 10 juin 1793… Évolution dans laquelle ont joué un rôle actif les « officiers du jardin des plantes ». La Révolution, loin de mettre à bas l’établissement, le développe, ce qui n’est pas du goût des riverains confrontés à des expropriations
 
  
Voyage au jardin des Plantes, par L. F. Jauffret, 1797 et Le Jardin des Plantes, 1865

Pour aller plus loin

- Toujours dans le cadre du colloque « Droit (s) et jardin », le blog Gallica a également mis à l’honneur l’abbé Lemire et la création des jardins ouvriers, la communauté des maîtres jardiniers de Paris, Jean de La Quintinie, créateur du Potager du roi et Adolphe Alphand et les parcs et jardins de Paris.
- Poursuivez encore votre exploration du thème « Droit(s) et jardin », en consultant la bibliographie sélective qui lui a été consacrée.