Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1889-09-26
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 26 septembre 1889 26 septembre 1889
Description : 1889/09/26 (Numéro 10369). 1889/09/26 (Numéro 10369).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
un saDonne aux Bureaux du Journal; 5, BOULEVARD DES ITALIENS, A paris, et aans tous les Bureaux ae Fosle
JEUDI 26 SEPTEMBRE
VINGT-NEUVIÈME ANNEE. N° 10309
PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS Trois mois, 14lr,; Sii mois, 28 fr. Un an, 56 fr,1
ïjÉPfefi ALSACE-LORRAINE 17fr.; 34fr.; 68 fr.
0" BHIOS POSTALE. l.Sfr.; 36 fr.; "72ifr.
¡ LES ABONNEMENTS DATENT DES 1« ET 16 DE CHAQUE MOIS
ILJn numéro (départements) 2O centimes^
̃«. ANNONCES MM. Lagrange, Cerf ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
Adresse télégraphique TEMPS PARIS
:l PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS..?̃ Trois mois, 1 4 fr. Six mois, 28 fr, Un an, 56 £,
fk*'i ALSACE-LORRAINE 17fr.; 34 fr.; 68 fr.
CJIOIl POSTALE. lSfr.; 36 fr.; 72 fr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1er ET 16 DE CHAQUE MOIS
JJn numéro (à Paris) 1£> centimes.
.̃' Directeur politique: Adrien Hébrard :}
La rédaction ne répond pas des articles communiqués V
̃BUREAUX 5, b^ulevardlîes Italiens, PARIS
v- Adresse télégraphique TEMPS PARIS
̃J Sur leur demande, les abon.
iiés nouveaux recevront tout
tse> qui a paru du f eiuïHeton en
cours de publication.
j rmsre~a~r~
/̃̃i.. :̃ PARIS, 25 SEPTEMBRE
BULLETIN DU JOUR
La vie politique est à moitié suspendue en
^Angleterre depuis la séparation du Parle-
ment, après une session plus laborieuse
peut-être que féconde. Ministres et hommes
politiques se retrempent dans les saines dis-
f tractions de la vie de campagne. M. Balfour
cherche un repos qu'il a bien gagné en
̃jouant avec passion au jeu national écossais
du golf sur les links ou stades de Felixstowe,
sur la rive de la mer du Nord. M. Gladstone,
de retour à son château de Hawarden, dans
v le Cheshire, de sa rapide excursion à Paris,
remplit ses devoirs de country gentleman en
entretenant ses tenanciers de la confection
des gelées et confitures comme solution de
la crise agricole et en lisant d'une voix en-
core sonore l'épître ou l'évangile dans l'é-
glise dont son fils est le recteur.
Toutefois, ce calme idyllique n'est pas sans
subir de temps à autre quelques atteintes. En
̃friande, la lutte continue sans rémission en-
tre le parti national et les champions de la
suprématie anglo-saxonne. Une délégation
• libérale anglaise, à la tête de laquelle se sont
crânement placés un ancien membre du ca-
-innet Gladstone, M. Stansfeid, et lady Sand-
n u Ir st, la veuve d'un feld-maréchal de l'ar-
• mée britannique et la mère d'un pair d'An-
gleterre, parcourt les campagnes, assiste
aux évictions, ranime l'espoir dans l'âme
dès paysans et s'est vu conférer le droit de
̃'• cité par Dublin, la capitale du royaume.
Pendant ce temps, les députés irlandais
continuent à se succéder avec une régularité
presque mécanique dans les prisons de Sa
i Majesté. M. William O'Brien, pour la se-
conde fois de cette année, expie un délit de
parole dans une' maison de force. D'autres
vont le rejoindre. L'effet moral de ces con-
damnations, qui n'a jamais été fort grand, a
été encore ébranlé dans ces derniers temps
•par la ligne de défense adoptée par les avo-
> cats nationalistes.
Pour avoir des pièces à conviction, le gou-
vernement a imaginé de donner à un certain
nombre de gendarmes (Royal Irish constabu-
'ïary) des notions élémentaires de sténogra-
Ehie et de les faire assister aux réunions pu-
liques. C'est le plus souvent sur le vu du
'rapport soi-disant authentique de ces poli-
aciers que les magistrats, officiellement si-
gnés sous le nom de résidents et populaire-
ment sous celui d'amovibles (rcmovables), pro-
̃<'noncent les durs arrêts contre l'exécution
impitoyable desquels M. Shaw-Lefèvre, l'an-
^cien ministre, vient de s'efforcer de soulever
4i:la conscience publique.
Or, les avocats nationalistes se sontavisés,
dans leurs contre-interrogatoires, pour sou-
mettre à une épreuve pratique la capacité de
ces sténographes improvisés, de leur dicter
.̃ un fragment de discours et de leur faire lire
ensuite leurs notes. Les résultats de cette ex-
rpérience démonstrative ont été pitoyables,
les passages choisis ont été reproduits en
dépit du bon sens par des Paridores ignares:
ce qui n'a pas empêché les tribunaux
'spéciaux de viser comme parole d'Evangile
dans les considérants de leurs jugements les
'̃̃* comptes rendus fantaisistes de ces bons gen-
'larmes.
[:; M. Balfour, à la fin de la dernière session,
avait tenu, sur la question de satisfactions à
donner aux catholiques irlandais dans l'en-
-eignement supérieur, un langage qui avait
été accueilli de certains côtés comme un coup
*de .partie propre sinon à rompre, du moins à
relâcher les liens qui unissent le parti libé-
ral au groupe nationaliste. En effet, il avait,
tournant résolument le dos aux principes et
aux traditions du parti tory, qui est aussi le
,parti ultra-protestant, fait entrevoir la possi-
bilité d'accorder à l'épiscopat irlandais l'Uni-
versité exclusivement catholique que celui-ci
réclame depuis si longtemps et aux lieu et
.place de laquelle il se. refuse énergiquement
à accepter le non-confessionnalisme de l'en-
seignement supérieur. Or, sur ce point, le
'parti libéral est lié par l'article essentiel de
son programme qui vise la laïcité ou, du
•anoins, la neutralité religieuse de l'enseigne-
Xnent à tous ses degrés.
Après avoirenlevéà. Oxford et àCambridge
et au collège de la Trinité, à Dublin, le carac-
tère exclusivement protestant et anglican que
leur donnait l'institution des Tests ou profes-
'sions de foi spéciales, il était impossible au
:parti libéral de concéder aux évêques d'Ir-
îande le caractère exclusivement catholique
de leur Université projetée. M. Gladstone et
ses amis entendent simplement, en accordant
le Home ride à l'Ile-sœur, lui rendre le droit
de régler à son gré c'est-à-dire probable-
ment dans le sens des vœux de l'immense
majorité catholique de telles questions,
FEUILLETON OU <£t\ïipS
DU 26 SEPTEMBRE 1889 [18]
UN MYSTÈRE 1
̃ ̃- '̃ ̃ ̃' xix •
Un été de la Saint-Martin prolongé au delà
de toutes les vraisemblances retint longtemps
loin de Paris ceux que leurs devoirs ou leurs
plaisirs n'y rappelaient pas impérieusement.
Le silence et l'abandon continuaient à ré-
gner à l'hôtel de Beaurand; sauf quelques
humbles amis, de ceux que la nécessité ou la
reconnaissance attachent à la fortune des
grands, Mme Montclar reçut peu de visites, et
Estelle n'en reçut point du tout.
Aussi sa surprise fut-elle grande lorsqu'elle
s'entendit un jour demander par Mme de Pol-
rey. Le froid d'une journée glaciale avait em-
pêché Mme de Montclar de prendre l'air en
voiture vers deux heures, comme elle le fai-
sait souvent, et sa nièce était restée pour lui
tenir compagnie.
Le premier mouvement de la jeune femme
avait été de refuser sa porte; n'y avait-il pas
quelque chose d'outrageant dans cette visite, à
une heure où l'on n'en fait guère, succédant à
'un silence inexcusable?
Cependant, une réflexion rapide changea ses
dispositions il fallait savoir ce que Mme de
Polrey avait à lui dire; ce serait peut-être in-
téressant et certainement instructif; de plus,
si, comme c'était probable, la bonne dame, en
se présentant à l'heure de la promenade d'Es-
telle, avait compté s'en tirer en déposant des
cartes, la satisfaction maligne de la prendre à
son propre piège n'était pas à dédaigner.
.» -«> .g
Reproduction et traduction interdites.
mais ils se refusent à violer leurs principes
en conférant de leurs propres mains au ca-
tholicisme irlandais le privilège qu'ils ont
arraché à l'Eglise établie d'Angleterre.
Jl semblait donc qu'il y eût là le germe
d'un conflit possible entre les deux ailes de
la coalition opposante. La marche des évé-
nements n'a pas justifié ces craintes.
D'une part, M. Balfour avait compté sans
la loyale répugnance du parti nationaliste,
même ultra-catholique, à jouer un tour à
M. Gladstone en acceptant du gouvernement
tory un acompte bien modeste au prix de ce
que leur assurerait la concession du Home
ride. Les évêques n'ont pas fait signe de se
prêter à ce plan. M. Davitt, qui représente
à la fois la nuance la plus colorée du natio-
nalisme et le dévouement le plus absolu à
l'Eglise, a lancé une protestation indignée
contre « le marché déshonorant » qu'un mi-
nistre, ennemi des aspirations les plus pro-
fondes de l'Irlande, osait lui offrir.
D'autre part, M. Balfour n'avait pas cal-
culé exactement la force de la résistance qu'il
rencontrerait dans les rangs de son propre
parti. Les Orangistes irlandais, qui ne sont
rien s'ils ne sont pas des ultra-protestants
encore tout pénétrés des traditions d'une in-
juste suprématie religieuse, se sont cabrés
violemment. Le sentiment qui a si longtemps
trouvé sa formule exacte en Angleterre dans
le cri de guerre tory: Nopopery (A bas le pa-
pisme) s'est ému. Interpellé sévèrement par
un docteur de ce cléricalisme à rebours, M.
Balfour, dans une lettre publiée hier, a con-
sidérablement réduit la portée de son projet
en déclarant qu'il ne s'agissait pas de créer
une Université catholique.
Du coup tombent toutes les spéculations
échafaudé'es sur ce que l'on eût volontiers
traité de chef-d'œuvre de machiavélisme.
Les électeurs de cinq collèges anglais et
écossais vont avoir l'occasion de se pronon-
cer sur la politique du gouvernement. A
Aberdeen, l'élection d'un gladstonien est
sûre, ainsi que dans les comtés unis d'Elgin
et Nairn. A Peterborough, la victoire est dif-
ficile contre l'influence de la grande famille
des Fitzwilliam, mais on compte sur un pro-
grès.
Ce qui est significatif, c'est que dans les
deux circonscriptions rurales Sleaford du
comté de Lincoln et le comté de Buckingham
nord, la lutte est très vive. A Sleaford, M.
Chaplin, le nouveau ministre de l'agricul-
ture, qui est le propriétaire de vastes domai-
nes, l'emportera sans doute grâce à cette
dernière qualité. Dans le Bucks, les libé-
raux ont tout lieu d'espérer que le capitaine
Verney sortira vainqueur.
On voit que le vent continue d'enfler les
voiles de l'opposition, malgré les efforts de
M. Chamberlain pour créer une diversion en
instituant on ne sait quel parti hybride dont
il serait naturellement le chef.
mm&tm r ̃–
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps
Madrid, 25 septembre, 8 h. 20.
Le ministre d'Espagne à Tanger a télégraphié
que le sultan consent à nommer un commissaire
extraordinaire marocain, porteur d'ordres catégo-
riques du sultan pour la mise en liberté des marins
du navire Miguel-Teresa. Le sultan a aussi consenti
à laisser le croiseur espagnol Navarra accompa-
gner le commissaire marocain à Alhucemas.
On dit que par suite du refus du général Cialdini
à accepter le poste d'ambassadeur à Madrid, le gou-
vernement italien a résolu d'envoyer à Madrid le
comté Mafjfei, qui a déjà occupé ce poste.
•><; r Madrid, 25 septembre, 9 h. 30.
Le règlement de l'indemnité, la réparation au pa-
villon et les objections du Maroc de ce chef que la
barque Miguel-Teresa faisait la contrebande, seront
discutés à Tanger entre le ministre d'Espagne et
Sidi-Mahommed-Torres. L'affaire de la canonnière
Cocodrilo sera traitée à part, vu que le comman-
dant de la canonnière a agi sans instructions du
gouvernement. On ne connaîtra pas avant ven-
dredi le résultat de la mission auprès des Kabyles
du Riff.
du Riff. -1~ Rome, 25 septembre, 9 h. 20.
Toutes sortes de bruits circulent sur la mort du
cardinal Schiaffino. La vérité est qu'il a succombé
aux suites d'une fièvre pernicieuse, dont il avait
déjà été atteint l'hiver dernier.
Berlin, 25 septembre, 8 h. 20.
C'est le 14 octobre que l'empereur et l'impératrice
d'Allemagne arriveront au château de Monza et se-
ront pendant trois jours les hôtes du roi d'Italie.
Le 15, il y aura déjeuner do gala dans le parc de
Monza le 16, excursion sur le lac Majeur le 17,
départ pour Gènes le 18, embarquement à Gênes
pour Naples, où le couple impérial restera trois ou
quatre jours.
Contrairement aux bruits qui ont couru sur la
santé de M. Bismarck on a même dit qu'il était
mort je puis vous affirmer que le chancelier se
porte aussi bien que possible et se prépare à venir
à Berlin.
.̃̃̃?' Vienne, 25 septembre, 8 h. 30.
« L'Union nationale allemande », le centre de l'a-
gitation teutomane et antisémitique, vient d'être
dissous par un arrêté du lieutenant général de la
Basse-Autriche. Si cette mesure est importante par
elle-même, elle gagne encore en signification par
les considérants qui motivent et précèdent l'ordon-
nance de dissolution. Il est dit d'abord que cette
association, qui existe depuis le mois de mai 1889,
Celle qui, suivant l'expression admise, avait
servi dé mère à Mme de Beaurand fut, en ef-
fet, quelque peu désappointée en se voyant in-
troduire mais on ne peut pas toujours es-
pérer de trouver sortis les gens qu'on va voir
par nécessité D'ailleurs, elle n'était pas fâ-
chée, de son côté, de voir quel visage faisait
une femme accusée d'un si abominable crime.
Escortée de ces deux filles, elle pénétra donc
dans le grand salon où Estelle se trouvait déjà
prête à la recevoir.
Ma chère enfant, dit-elle quand on se fut
assis après les inévitables embrassades, je n'ai
pas voulu perdre un moment pour vous an-
noncer la nouvelle qui remplit notre maison
de joie. Vos deux amies, vos compagnes d'en-
fance, sont fiancées à deux braves gentilshom-
mes de nos amis; l'un est un voisin de campa-
gne l'autre est lieutenant au 10° régiment de
hussards; mes deux filles sont contentes, mes
deux futurs gendres sont ravis, et on célébrera
les deux mariages le même jour.
Je vous fais mes compliments sincères,
chère madame, dit Estelle. Elle regarda ses
compagnes d'enfance, qui semblaient, en effet,
satisfaites de leur sort, et leur adressa quel-
ques bonnes paroles les jeunes filles, après
tout, n'étaient pas responsables de la prudence
excessive de leur mère. Elle fut étonnée de se
voir répondre avec une politesse cérémonieuse,
bien différente de l'ancienne familiarité.
Une nuée de souvenirs assaillit Estelle. C'é-
taient là les amies qu'elle avait quittées six ou
sept mois auparavant, dans sa chambre de jeune
fille, empressées autour d'elle, attachant à sa
personne une fleur, un bijou, amusées de leur
rôle de demoiselles d'honneur, et cachant, l'aî-
née au moins, car la plus jeune lui était sincè-
rement attachée, une jalousie réelle sous les
dehors de la plus tendre amitié? 2
Que tout cela était loin I Un laps de vingt
années, une couronne de cheveux blancs com-
me celle de Mme Montclar, remplaçant les nat-
tes de jais 46 \$ jeune femme, n'eussent pas
a voté des félicitations au député Turk pour son
attitude dans la séance du Reichsrath du 10 avril,
lors de la discussion do la loi militaire. Par contre,
le député Joseph Fiegl, membre de l'association,
était l'objet d'un vote de blâme, parce qu'il avait
désavoué les paroles prononce par M. Turk, et
que tous les partis dans le Parlement ont qualifiées
de trahison envers le pays. M. Turk avait dit que
l'Allemagne serait bien à plaindre si jamais elle en
était réduite à réclamer l'assistance de l'Autriche.
A la suite de ce vote de blâme, M. Fiegl et son
collègue Schnarf, qui avait partagé son attitude à
l'égard de M. Turk, ont été rayés des registres de
l'association. En agissant ainsi, l'association, con-
formément d'ailleurs à ses principes de conduite, a
adopté ouvertement un point de vue hostile à la
monarchie austro-hongroise et par conséquent anti-
patriotique et dangereux pour le bien de l'Etat.
En outre, l'association a favorisé par plusieurs
actes l'expansion de l'antisémitisme, qui est de na-
ture à exciter la population en aggravant et enve-
nimant les conflits de race et de nationalité. Cette
manière d'agir a tendu en dernier lieu à troubler
l'ordre et le repos public.
En dernier lieu, l'arrêté vise une adresse envoyée
au congrès antisémite de Bochum (Wcstphalie).
L'association, en exerçant son action en dehors de
l'Autriche, a contrevenu à ses statuts.
Un délai de deux mois est accordé à l'association
pour en rappeler de la décision du lieutenant géné-
ral auprès du ministère do l'intérieur; mais, dès à
présent, le fonctionnement du comité est suspendu.
Les journaux libéraux font remarquer que c'est
la première fois que l'antisémitisme est stigmatisé
comme une cause do troubles, dans une pièce offi-
cielle et venant du gouvernement.
Budapest, 25 septembre, 8 heures.
Le conseil des ministres de Budapest a commen-
cé l'examen du projet de réforme administrative
élaboré par le ministre Szilagyi. Ce projet est très
vaste et tend à substituer l'autorité du gouverne-
ment central à l'autonomie des comitats partout où
celle-ci est restée déboutai; s'agLLdp. modifications
si importantes, que plusieurs ministres "soiit d'avis"
qu'il faut consulter la nation en faisant de nouvel-
les élections parlementaires. M. Szilagyi avait en-
voyé une copie de son projet à M. Tisza, à Os-
tende, mais le président du conseil a jusqu'à pré-
sent réservé son opinion.
Belgrade, 25 septembre, 9 heures.
La reine Nathalie est toujours au château de
Stenko, près Jassy. Elle y reçoit de nombreuses
visites. On dit qu'elle arrivera dimanche prochain
à Belgrade.
Les radicaux proclament qu'ils sont sûrs d'une
majorité écrasante à la prochaine Skouptchina.
,.ngi.
Le pays a parlé il parlera plus complète-
ment encore le 6 octobre prochain. Ceux des
conservateurs qui déclaraient, il y a quelque
temps, être tout prêts à faire taire leurs pré-
férences particulières et à se ranger à la vo-
lonté nationale clairement exprimée peu-
vent-ils, doivent-ils encore hésiter à la re-
connaître et à s'incliner devant elle? Nous
ne nous adressons point aux hommes qui
restent attachés au droit divin, au droit héré-
ditaire si l'on veut, et opposent ce droit an-
cien au droit nouveau issu du suffrage uni-
versel. A ceux qui ont la doctrine rigide et
l'attitude hiératique que le comte de Cham-
bord a gardées pendant plus de qua-
rante ans nous n'avons rien à dire.
La politique est pour eux une affaire de
foi religieuse, et on ne discute pas avec là
foi. Mais ces légitimistes purs et fidèles sont
bien peu nombreux. Le plus grand nombre
des conservateurs, surtout depuis l'appari-
tion du boulangisme sur la scène politique,
ont professé d'autres principes et pris d'au-
tres engagements. Ils ont dit et répété main-
tes fois que le suffrage universel était leur
maître et, en se ralliant a1 la convocation
d'une Constituante, ils promettaient d'accep-
ter loyalement et de servir sans arrière-pen-
sée le régime quel qu'il fût, empire, royauté
ou république, qui sortirait de cette consul-
tation du pays.
Voilà le nouveau terrain politique sur le-
quel sont descendus les conservateurs; ils
ont fait en principe le sacrifice de leurs doc-
trines privées ils ont dit que leurs préfé-
rences dynastiques ne devaient plus préva-
loir sur l'intérêt général et la volonté bien
clairement affirmée de la nation. Non seule-
ment ils sont descendus théoriquement sur
ce terrain, mais ils y ont opéré toutes leurs
évolutions durant la période électorale. La
grande majorité des candidats élus de la
droite ont déclaré très hautement que la
République n'était pas en cause, qu'ils
n'attaquaient pas la forme même du
gouvernement. Ils semblaient dire et ils
disaient en effet qu'ils acceptaient la Ré-
publique à la seule condition de changer
les hommes qui la gouvernent, ce qui dé-
pend uniquement du vote d'une majorité
parlementaire. Qu'est-ce qui peut donc au-
jourd'hui les empêcher d'être conséquents
avec eux-mêmes et de reconnaître que, la Ré-
publique étant pour la cinquième ou la sixiè-
me fois réclamée par le pays, il ne leur reste
plus qu'à s'y rallier sans arrière-pensée?
Il est vrai qu'il n'y a eu à proprement par-
ler ni constituante ni plébiscite dans les for-
mes que ces mots réveillent. Mais veut-on
être de bonne foi, peut-on sérieusement con-
tester le sens constitutionnel des dernières
élections? Vous vouliez consulter la France;
elle vous a répondu. Prétendez-vous que sa
réponse est douteuse? Vous l'avez interro-
accusé un gouffre plus profond et plus large.
En une seconde, Estelle chassa cette impres-
sion, et la tristesse prête à la saisir disparut,
remplacée par une fierté tant soit peu dédai-
gneuse.
Soyez heureuses, mes chères amies, dit-
elle avec une grande liberté d'esprit; le bon-
heur ne connaît point de conditions absolues;
chacun arrange le sien à sa guise j'espère que
le vôtre sera facile et fidèle.
Sur chacun des petits museaux chiffonnés
parut un sourire de commande, chaque bouche
proféra deux ou trois paroles dénuées de sens
réel, mais pleines d'à-propos, et les deux paires
d'yeux se tournèrent vers leur maman, qui de-
vait avoir encore quelque chose à dire.
Les mariages sont pour le 29, dit Mme
de Polrey avec une légère inquiétude il est
bien fâcheux que votre deuil ne puisse vous
permettre d'y assister; peut-être pourriez-vous
venir à la messe, cependant?
Mon Dieu pensa Estelle, comme elle a
peur de me voir accepter! Elle mériterait un
beau oui, bien formel; mais cela ne vaut même
pas une taquinerie de ma part.
Je ne pourrai pas, dit-elle tout haut,
Mme Montclar est souffrante; le 29, c'est
dans huit jours, je crois? Je ne pense pas
qu'elle puisse supporter la fatigue d'une céré-
monie dans un délai aussi rapproché, et je ne
sors jamais sans elle.
Vous avez tout à fait raison, dit Mme de
Polrey, visiblement soulagée; quelque regret
que nous en ayons, nous ne pouvons que vous
approuver.
Elle se leva pour partir la jeune femme l'ac-
compagna jusqu'au hall. L'aînée des jeunes
filles lui dit tout à coup
Tu viendras voir mon trousseau, n'est-ce
pas, Estelle? Il sera exposé lundi et mardi; il
n'est pas aussi riche que le tien, mais pourtant
il n'est pas mal.
Oui, fit la mère, passablement ennuyée,
vous pourriez venir un matin, ou bien vers
gée sur la revision, elle vous a crié avec une
force irrésistible « Je veux la République et
ne veux aucun autre régime. » En quoi les
formes de la consultation nationale en chan-
geraient-elles le résultat? Quelle réponse plus
claire pourrait faire une assemblée consti-
tuante ? Vous vouliez un plébiscite vous l'avez.
Ergotez tant que vous voudrez sur les distinc-
tions plus ou moins subtiles que vous pouvez
faire ce n'est pas avec des subtilités qu'on
règle une politique. Vous devez bien confes-
ser que le pays veut la République dès lors
il n'y a plus qu'une question à décider, celle
de savoir si vous voulez enfin y prendre vo-
tre place en cessant de la contester et de lui
nuire, ou bien si, comme vous le disait l'au-
tre jour l'un des vôtres, vous voulez conti-
nuer votre rôle ingrat d'émigrés à l'intérieur.
_«a*»_
Le scrutin de ballottage, auquel candidats et
électeurs se préparent dès maintenant, se pré-
sente jusqu'ici dans des conditions favorables,
comme on a déjà pu le voir par la série de
désistements que nous avons annoncés et qui
vont se poursuivre dans toute la France. Pour
que le triomphe soit complet et éclatant, il faut
que les candidats se rendent bien compte de
l'état d'esprit des électeurs les candidats ra-
dicaux, par exemple, n'ignorent pas que bon
nombre d'électeurs modérés redoutent par-des-
sus tout l'avènement d'une majorité revision-
niste ne serait-il pas habile de leur part, si-
non de renoncer à cette partie de leur pro-
gramme, ce que personne ne songe à leur de-
mander, tout au moins de déclarer bien haut
qu'ils ne veulent qu'une revision républicaine?
Pourquoi chacun d'eux ne dirait-il pas dansses
affiches ou dans ses déclarations verbales
« Oui, j'ai été et je reste partisan de la revi-
sion, voire de la revision par une Constituante,
Biais je suis avant tout républicain et je n'en-
tends pas que jamais la revision puisse profi-
ter aux ennemis que nous allons combattre
cette fois tous ensemble. Je m'engage donc for-
mellement à ne voter la revision qu'avec des
républicains. »
Est-ce qu'un tel langage ne serait pas parfai-
tement honorable, est-ce qu'il impliquerait la
moindre dérogation aux principes, la plus pe-
tite capitulation de conscience? Mais il aurait
l'immense avantage de rendre impossible toute
hésitation chez les plus modérés. Ces derniers
se font, en effet, cette réflexion En quoi un
candidat qui met la revision par une Consti-
tuante au-dessus de tout, au-dessus même du
salut de la République, prêt à la voter avec les
monarchistes et les boulangistes se distin-
gue-t-ils de ces derniers? Il est aussi dange-
reux, plus dangereux peut-être, car il per-
mettrait à nos adversaires communs de por-
ter à la République un coup d'autant plus
terrible que les républicains en prendraient
la responsabilité. La répugnance de beau-
coup d'électeurs est donc aisée à compren-
dre. Bon nombre de radicaux s'en sont rendu
compte M. Floquet, entre autres, dont nul ne
conteste apparemment l'autorité, parmi les ré-
publicains avancés, a fait, sur ce point, les dé-
clarations les plus catégoriques. Quel motif
pourraient invoquer ses coreligionnaires pour
ne pas imiter son exemple?
̃ :o.' i
M. Saint-Genest publie ce matin, dans le Figaro,
un article dont nous donnons quelques extraits
parçe qu'il nous paraît de nature à éclairer les con-
servateurs sincères et patriotes à la veille du scru-
tin de ballottage. Voici comment il s'adresse aux
monarchistes: ̃ ,r; t ̃ ~1.' J"
Mme de Créqui, apprenant que son neveu'épou-
sait une roturière vieille et laide, lui dit un beau
soir
Eh bien! voyons, qu'est-ce qu'elle t'apporte, la
coquine ?
Cent mille livres, ma tante
Ah mon ami, pour l'ouvrage, ce n'est pas payé.
Eh bien, je dirai de même aux royalistes pour
l'ouvrage, ce n'est pas payé. Quand on se rappelle les
avanies qu'ils ont subies, les affronts qu'ils ont dévo-
rés, quand on pense que des grands seigneurs, com-
me le duc de la Rochefoucauld, ont dû se mésallier
avec la Boulange afin de gagner une vingtaine de
voix. en vérité, pour l'ouvrage, ce n'est pas payé.
Quand on songe qu'un ami personnel de M. le comte
de Paris, tel que M. Lambert de Sainte- Croix, et qu'un
gentilhomme de lettres, tel que M. Hervé, ont dû s'y
résigner également, pour arriver à n'être pas élu du
tout. c'est encore moins payé.
Et dire qu'à l'heure qu'il est, ces hommes remercient
peut-être le ciel de n'avoir pas réussi, car si le peuple
avait donné la majorité à ceux qui veulent tout dé-
truire, ç'aurait été si effroyable que jamais le pays
no leur aurait pardonné.
Qu'est-ce que les radicaux reprochent à la Constitu-
tion ? C'est d'avoir un Sénat qui les empêche d'anéan-
tir l'Eglise, de désorganiser complètement la magis-
trature et l'armée.
Qu'est-ce que les boulangistes reprochent à cette
même Constitution ? C'est d'avoir un président et une
Chambre haute qui les empêchent de donner la dicta-
ture à leur général.
Et vous alliez vous entendre avec ces radicaux et
ces boulangistes pour renverser un Sénat qui vous
protège et un président qui fait respecter votre pays
Comment! c'est le Sénat qui, depuis dix ans, lutte
tant bien que mal pour sauver ce qui reste des clas-
ses dirigeantes, c'est même pour cela que les démo-
crates le détestent tant, et ce que vous imaginez de
mieux, c'est de détruire ce Sénat, pour faire triom-
pher la Chambre basse, qui veut votre mort.
J'aurais plutôt compris le contraire, à la rigueur.
Ç'aurait été original comme politique, mais ç'aurait
été logique, tandis que votre raisonnement était in-
sensé aussi insensé que votre guerre contre le par-
lementarisme.'
Car, en dehors du parlementarisme, il n'y a que la
dictature la dictature d'un César ou la dictature
d'une Convention. Est-ce donc là ce que vous vouliez,
vous monarchistes ?
Aujourd'hui, il n'est pas d'illusion possible, n'est-ce
pas ? Vous savez que tout ce que les coalisés racon-
tent dans leurs journaux ne sont que des phrases pour
marquer leur défaite vous connaissez les dépêches
une heure et demie à cette heure-là vous nous
trouveriez seules, sûrement.
Mme de Beaurand sourit: cette petite inso-
lence, innocente, pour ainsi dire, qui l'eût pro-
fondément blessée deux mois plus tôt, lui
semblait maintenant irrésistiblement comique
dans son inconscience.
Soyez tranquilles, répondit-elle, j'irai à
l'heure où je serai sûre de ne rencontrer per-
sonne il n'y a pas si longtemps que j'ai quitté
votre maison, j'en connais encore les habi-
tudes.
C'est à cause de ton deuil, tu comprends?
fit la plus jeune, qui avait rougi de honte en
entendant parler sa mère.
C'était une bonne petite fille, encore assez
peu habituée au monde pour ne pas songer
uniquement à elle-même.
J'ai compris, ma chère enfant, répondit
Mme de Beaurand en lui mettant affectueuse-
ment sa main sur l'épaule, et je te remercie. Je
vous remercie aussi de votre visite, chère ma-
dame veuillez me rappeler au souvenir de M.
de Polrey.
Quand les trois femmes furent dans leur
voiture, la maman gronda son écervelée de fille
qui avait failli commettre une si grande bévue.
Peux-tu t'imaginer l'effet qu'elle aurait
produit en arrivant vers cinq heures, au milieu
de tout ce monde? dit-elle en terminant son
homélie.
Il faut pourtant bien qu'elle voie ce qu'on
nous donne! fit la jeune fille d'un air boudeur.
Après tout, son trousseau n'était pas beaucoup,
beaucoup plus beau que les nôtres, toute riche
qu'elle est.
Elle a très bien répondu, interrompit vi-
vement Odette, et elle a montré beaucoup de
tact. Quand je serai mariée, moi, je la verrai l
Tu ne feras pas cela gronda la sœur
aînée.
A moins que mon mari ne me le défende,
tu verras si je ne la vois pas répliqua la pe-
tite rebelle. %i s'il était assez lâche pour me le 1
que les correspondants étrangers envoient aux gou-
vernements d'Europe, avec ces simples mots Vic-
toire de la République.
Souvenez-vous du proverbe: « Quand on ne peut
pas mordre, il ne faut pas aboyer. »
Faites comme en Angleterre, où du jour au lende-
main les hommes emportés dans une lutte furieuse
s'arrêtent brusquement et changent leur fusil d'é-
paule.
C'est dur, mais, que voulez-vous, le peuple tient à
la République, il faut en prendre notre parti; moi je ne
l'aime pas, je la déteste même. Je suis non seulement
le plus monarchiste, mais le plus réactionnaire des
hommes. Mais la vie se passe à supporter ce qu'on
n'aime point.
Voyez donc la situation en face, et sans avouer que
vous vous êtes trompés, ce qui est 'impossible à un
Français, choisissez donc pour ce ballottage des hom-
mes raisonnables qui, sans rêver des bouleverse-
ments et des restaurations impossibles, cherchent
simplement à faire vivre notre pauvre pays et à le
protéger contre les menaces du dehors.
Par-dessus tout, si vous m'en croyez (et c'est en
mon nom seul que le parle), votez pour n'importe
quel modéré de droite ou de gauche, plutôt que de
voter pour un boulangiste.
A noter aussi un article de M. Ernest Daudet dans
le Moniteur, l'un des organes du parti qui s'intitule
conservateur, bien qu'il ait paru s'attacher jusqu'ici
à être tout le contraire
Une France devenue républicaine en dépit des aven-
tures, des épreuves et des mécomptes; une France
convaincue qu'il n'est pas impossible de constituer
sous cette forme un gouvernement conservateur, telle
est donc la situation devant laquelle nous nous trou-
vons et qu'il faut avoir le courage d'envisager avec
sang-froid.
Cette situation n'est pas nouvelle.
On peut même se demander si ce n'est pas pour l'a-
voir trop longtemps méconnue que le parti conserva-
teur s'est affaibli.
En tout cas, il n'est plus permis de la méconnaître.
Fermer les yeux à l'évidence ne constitue pas une
politique.
La sagesse ordonne au contraire de tenir compte
des circonstances,, des temps, des tendances des gé-
nérations nouvelles, des changements survenus dans
le tempérament du pays et d'y conformer sa conduite.
'C'est dire que d'impérieux devoirs s'imposent aux
conservateurs.
Ils auront à décider s'ils vont continuer à s'affaiblir
dans une opposition impuissante, s'ils vont laisser se
former sans eux, en dehors d'eux, peut-être même
contre eux un parti conservateur dans la République,
ou si, au contraire, par une adhésion qui n'exigerait
à cette heure le sacrifice d'aucune espérance immé-
diatement réalisable, ils se mettront en état d'exercer
sur la direction des affaires publiques l'influence qui
leur appartient légitimement.
«Se»
LES ÉLECTIONS ET LA PRESSE ÉTRANGÈRE
Les journaux étrangers continuent à faire con-
naître leurs impressions sur les élections de di-
manche. Celle de la Gazette de V Allemagne du Nord,
organe officieux de M. de Bismarck, n'est pas sans
intérêt
Le résultat dés élections en France, dit-elle, montre
que la rentrée en scène du groupe républicain conser-
vateur, dont M. Léon Say peut être considéré comme le
représentant le plus éminent, va avoir une importance
considérable dans la politique française de demain.
Il est vrai que la feuille berlinoise paraît se con-
tredire en ajoutant
Une faudrait pas conclure de ce qu'à côté de M.
Léon Say d'autres chefs du centre gauche ont été
élus, que cette fraction, qui représente la tradition de
M. Thiers, soit propre à former le noyau d'une majo-
rité compacte et sûre et à donner au pays un gouver-
nement stable, considéré et certain de l'avenir.
L'explication de cette contradiction est dans les
lignes suivantes
Si on ne triomphe pas des divisions parlementaires
actuelles, les quelques sièges perdus par l'oppcsition
n'auront aucune importance. Il suit de là que l'on ne
connaîtra la ̃fraie signification des élections qu'au
moment où la majorité de la Chambre sera à l'oeu-
vr e. •
Pour la Mforma, journal de M. Crispi
Le résultat des élections prouve que la majorité
des Français veut la République, mais une Républi-
que qui n'est,pas complètement celle des gouvernants
d'hier ni celle des gouvernants d'aujourd'hui, ni celle
des gouvernants probables de demain. Il faut se féli-
citer d'ailleurs avec la France du bon sens dont elle
fait preuve. •»
Toute l'Europe a assisté aux élections avec une
parfaite neutralité, et sans aucun désir de les voir
mal tourner, ce qui doit convaincre la France com-
bien étaient .calomnieuses les accusations formulées
contre d'autres gouvernements de vouloir sa perte.
Le Secolo, journal républicain de Milan, se réjouit
vivement de la défaite "du boulangisme. Il estime
que la France a fait adhésion à la politique de M.
Carnot, qui signifie paix, travail.
Le Nouveau Temps, feuille libérale russe, résume
son sentiment en ce sens
Les résultats des élections doivent inspirer aux
gouvernants français une conduite prudente, qui leur
fasse aborder exclusivement des réformes répondant
au commun désir de voir la France dirigée par un
gouvernement fort, qui lui permette d'affronter vail-
lamment les dangers extérieurs et d'occuper une place
digne d'elle parmi les puissances européennes.
Les Novosti trouvent les résultats satisfaisants
pour le parti républicain, mais ils ajoutent que le
nombre des ballottages doit montrer aux républi-
cains la nécessité de suivre à l'avenir une plus sage
conduite.
La Pall Mail Gazette, radicale, s'exprime ainsi
Une fois de plus, le paysanfrançais a sauvé sa patrie,
et une fois de plus il a été démontré que Paris n'est pas
la France. Paris qui, aujourd'hui comme toujours, est
dans l'opposition, a été empoigné par l'idée boulan-
giste. Par contre, toutes les bévues des républicains
ne sauraient aliéner à la République la grande masse
des électeurs français. Les Français fermes, raison-
nables et sérieux qui, à toutes les élections générales,
accordent sans'bruit à la République les quatre mil-
lions de voix qui forment la solide base de son pou-
voir, n'ont pas pu être détournés de leur fidélité.
Tous les rêves relatifs à une majorité révisionniste,
si petite fut-elle, se sont complètement évanouis. La
campagne boulangiste a fait four. Le général Boulan-
ger et ses amis ont fait de leur mieux. Ils ont tra-
vaillé avec énergie et enthousiasme et, comme résul-
tat, le nombre des révisionnistes ne dépasse pas ce-
lui des réactionnaires.
défendre, je ne l'aimerais plus du tout Elle a
été très bonne avec moi, Estelle, pendant que
nous étions au couvent, et je l'aime beaucoup.
Et je ne croirai jamais qu'elle suit capable de
rien faire de mal, mais rien pas quoi que ce
soit!
En voilà assez, dit placidement Mme de
Polrey. Ne vous mettez pas en colère, mes en-
fants, car cela vous échaufferait le teint et
nous avons encore dix ou onze visites à faire
avant le dîner.
Après avoir agité avec Mme Monclar la ques-
tion de savoir s'il convenait ou non d'accepter
l'invitation forcée de Mme de Polrey, Estelle
se décida pour l'affirmative. En conséquence,
le mardi suivant, vers onze heures, elle fran-
chit, pour la première fois depuis le jour de
son mariage, le seuil de la maison qui avait
été ou qui avait semblé être la sienne pen-
dant une dizaine d'années.
Son émotion fut grande en revoyant ce logis
orné pour la circonstance, de même qu'il l'a-
vait été pour elle; c'était elle qui, si peu de
mois auparavant, courait d'une table à l'au-
tre, soulevant délicatement du bout des doigts
les dentelles et les étoffes soyeuses, comme
le faisaient aujourd'hui ses anciennes amies
avec quelle joie enfantine n'avait-elle pas
frôlé les plis de sa robe nuptiale, ravie
de la voir si belle!. Elle se souvenait comment
le dernier soir, seule dans la chambre où elle
ne devait plus rentrer, elle avait essayé sur
ses épaules nues, devant la glace, les bijoux
qui lui venaient de sa mère; comme les pierres
brillaient sur le satin mat de sa jeune poitrine,
et comme les étoiles de diamant scintillaient
dans ses cheveux noirs 1 La vision radieuse de
ce moment, le dernier de sa liberté de jeune
fille, lui fit monter des larmes dans les yeux,
pendant qu'elle effleurait d'une main discrète
les rubans légers qui nouaient le trousseau.
Estelle, dit tout à coup à son oreille une
voix presque enfantine, quand je serai mariée.
j'irai te voir, tu veux bien, dis?
Les deux cents collets-montés qui, en 1885, suk
vaient le drapeau de l'opposition comme conserva-
teurs, suivent maintenant le même drapeau comme
révisionnistes. Voilà tout. A-t-on jamais fait tant de
bruit pour rien?
La défaite du boulangisme et la renaissance de la
République, résultant -des élections, sont satisfaisan-
tes à plus d'un point de vue. L'Europe en sera rassu-
rée et la redoutable éventualité d'une prochaine
guerre retardée. En même temps, la cause du gou-
vernement populaire y sera raffermie dans le monda
entier. '̃
Le Standard, journal conservateur, ne tient pas
un autre langage, bien qu'il se place à un point de
vue différent
La conclusion à laquelle nous sommes amenés es(
que l'instinct général qui a poussé tous les hommes
d'Etat de l'Europe à saluer la victoire de la Républi-
que comme un succès en faveur de la paix, est un
instinct parfaitement juste.
Le fait que l'ordre de choses qui règne actuellement
en France se trouve fortifié augmente les chances du
maintien de la tranquillité européenne. En un mot, la
gouvernement de M. Carnot constitue, pour le mo-
ment, la meilleure forme de gouvernement possible
chez nos voisins.
La République peut avoir commis bien des fautes
et des folies en tout cas, elle n'en est pas à gagner
ses éperons et peut, à juste titre, faire valoir qu'elle
a déjà fait quelque chose pour la France.
Celle-ci ne possède-t-elle pas une armée puissante
et bien organisée ? Le peuple français est d'avis que
cette armée existe. Qui l'a créée ? La République.
La France a-t-elle une marine de premier ordre,
pourvue de bons équipages ? Si la réponse est encore
affirmative, nous demanderons de nouveau à qui
doit-on cette marine ? A la clairvoyance, à l'énergie,
au patriotisme de la République.
La France occupe-t-elle parmi les nations une place
haute et respectée ? Seuls, les pires factieux de l'inté-
rieur et les critiques les plus prévenus à l'étranger
pourraient songer à le nier.
Qui a conçu et réalisé avec le succès que l'on sait
le projet de l'Exposition? Ce n'est ni le comte de Pa-
ris, ni le prince Napoléon, ni assurément le général
Boulanger.
Avec de tels droits à la confiance du peuple, de tels
titres à son respect, le gouvernement de la Républi»
que n'a pas à s'occuper de donner satisfaction au dé-
sir de gloire militaire qui peut se trouver à l'état la-
tent dans les cœurs français.
L'Europe a donc de bonnes raisons pour se réjouir
de ce qui doit encore fortifier la position de la Répu-
blique.
AFFAIRES COLONIALES
̃ • ̃ • *:̃̃• > -.̃̃' :̃̃ ̃̃.>̃ ̃ :ic
Actes officiels
Sont nommés dans la magistrature coloniale
Juge suppléant au tribunal de première instance
de Saigon, M. Fays, substitut du procureur do la
République près le tribunal de première instance
de Pondichéry..
Substitut du procureur de la République près le
tribunal de première instance de Pondichéry, M.
Vennemani, juge suppléant au'tribunal de pre-
mière instance de Saïgon. ·
Nouvelles coloniales et maritim93
Le port de Rochefort procédera, le 20 octobre
prochain, à la mise à l'eau du croiseur de 1re classe
le Jean-Bart. Ce bâtiment déplacera 4,162 tonneaux
et filera 19 nœuds. Il sera armé de quatre canons
de 16 centimètres, six de 14 centimètres, de canons-
à tir rapide, de canons-revolvers et de quatre tubes
lance-torpilles.
La première pièce de quille de ce bâtiment a éte
mise en place en septembre 1887, et à la fin de l'an-
née présente le Jean-Bart sera construit aux 70 cen-
tièmes. Les 30 centièmes restants seront exécutés
en 1890, de telle sorte qu'il pourra être livré à la
flotte à la fin de l'année prochaine.
Les plans du Jean-Bart sont de M. l'ingénjeur
Thibaudier.
«. • ̃_
LETTRES DE TURQUIE
;[ ·. ,i
(De notre correspondant particulier)
Constantinople, 20 septembre.
Une circulaire, qui vient d'être distribuée à Con-
stantinople, annonce la création et le fonctionne-
ment, à partir du 1er octobre prochain, d'uno
agence télégraphique, l' « Agence de Constantino-
ple qui se substituerait aux agences existantes
et concentrerait tout le service des informations do
Turquie à publier en Europe et des nouvelles d'Eu-
rope à publier en Turquie.
Il existait ici deux agences, l'agence Reuter et
l'agence Havas. Depuis longtemps, l'agence Reu-
ter avait renoncé à publier ici des nouvelles d'Eu-
rope et son agent se contentait d'expédier en Eu-
rope les nouvelles de Turquie. L'agence Havas,
qui continuait seule ce double service, a, depuis un
an environ, diminué progressivement le nombre
des télégrammes d'Europe distribués sur place, et
elle est venue à ce point de n'en publier qu'un ou
deux de loin en loin, tous les trois ou quatre jours.
Il devenait manifeste qu'elle ne tarderait pas à
cesser ce service, et cela pour deux causes princi-
pales l'appauvrissement de plus en plus accusé de
Constantinople, où il n'y a pas d'industrie, où le
grand commerce n'existe plus et où la Bourse n'a
plus son importance d'autrefois; 2° les difficultés
provenant du gouvernement, qui arrête à chaque
instant, soit à l'arrivée, soit au départ, les dépêches
les plus inoffensives, et rend ainsi matériellement
impossible le fonctionnement d'une agence. Le
nombre des abonnés a considérablement diminué,
et aujourd'hui le chiffre de ces abonnés est déri-
soire.
La nouvelle agence ne sera pas plus heureuse si
elle doit fonctionner uniquement avec ses capitaux.
Mais vous remarquerez que, par ses relations mê-
mes, cette agence peut être considérée comme un
instrument de la triple alliance. Son directeur, le
docteur Grosser, est correspondant de la Gazelle de
Cologne et peut-être l'agence aura-t-elle des sub-
ventions qui lui permettront de se passer des abon-
nés dont, en tout cas, le nombre sera modeste.
Il est probable, sinon certain, que cette agence
s'attachera à donner le moins possible de nouvel-
les de France et à présenter sous le jour le plus
Mme de Beaurand se retourna brusquement
et vit levés vers elle, pleins d'une flamme gé-
néreuse, les yeux d'Odette, dont, au couvent,
elle avait été si longtemps la « petite mère ».
Toi? dit-elle, saisie de tendresse et de
joie. Tu m'aimes donc toujours?
Oh 1 oui. Tu verras mon fiancé. il est
très gentil Je l'aime bien. il est très bon;
tu l'aimeras aussi. Tu viendras déjeuner chez
nous, n'est-ce pas? Tiens, je mettrai pour toi
ce service-là! fit-elle en indiquant une petite
table couverte d'argenterie et de linge da-
massé. C'est mon plus joli!
Estelle jeta un regard autour d'elle; à l'autre
extrémité du salon, Mme de Polrey et sa fille
a!née tenaient un grand conseil avec la coutu-
rière. Elle saisit dans ses bras la jeune fille en-
core toute fluette, et haisa passionnément la
petit museau chiffonné, en ce moment beau
d'une beauté tout idéale.
Tu es une chère mignonne, lui dit-elle à
voix basse, et je t'aimerai toujours pour co
que tu viens de me dire. Que Dieu te bénisse,
ma petite fille, pour ta charité et te la rende au
centuple en son paradis! Tu as vraiment, au-
jourd'hui, donné un verre d'eau a une pauvre.
-Alors, tu viendras? répondit l'enfant qui
ne comprenait qu'à demi.
Nous nous verrons, oui, plus tard, quand
tu voudras. Pas maintenant.
Elle mit entre Odetle et elle l'intervalle d'un
pas ou deux, puis se retourna vers Mme de
Polrey, qui revenait vers elle. Des paroles et
encore des paroles, des politesses menteuses,
et Mme de Beaurand quitta la maison do
son enfance. Seule, en voiture, elle se sentit si
touchée qu'elle fondit en larmes pendant
qu'elle les essuyait, délicieusement émue, au*
près de l'image de sa « petite fille » vint se pla«-
cer celle de Théodore Benoist.
HENRY GUÉVII.LE.I
(A suivre. )
JEUDI 26 SEPTEMBRE
VINGT-NEUVIÈME ANNEE. N° 10309
PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS Trois mois, 14lr,; Sii mois, 28 fr. Un an, 56 fr,1
ïjÉPfefi ALSACE-LORRAINE 17fr.; 34fr.; 68 fr.
0" BHIOS POSTALE. l.Sfr.; 36 fr.; "72ifr.
¡ LES ABONNEMENTS DATENT DES 1« ET 16 DE CHAQUE MOIS
ILJn numéro (départements) 2O centimes^
̃«. ANNONCES MM. Lagrange, Cerf ET Ce, 8, place de la Bourse
(Droit d'insertion réservé à la rédaction.)
BUREAUX 5, boulevard des Italiens, PARIS
Adresse télégraphique TEMPS PARIS
:l PRIX DE L'ABONNEMENT
PARIS..?̃ Trois mois, 1 4 fr. Six mois, 28 fr, Un an, 56 £,
fk*'i ALSACE-LORRAINE 17fr.; 34 fr.; 68 fr.
CJIOIl POSTALE. lSfr.; 36 fr.; 72 fr.
LES ABONNEMENTS DATENT DES 1er ET 16 DE CHAQUE MOIS
JJn numéro (à Paris) 1£> centimes.
.̃' Directeur politique: Adrien Hébrard :}
La rédaction ne répond pas des articles communiqués V
̃BUREAUX 5, b^ulevardlîes Italiens, PARIS
v- Adresse télégraphique TEMPS PARIS
̃J Sur leur demande, les abon.
iiés nouveaux recevront tout
tse> qui a paru du f eiuïHeton en
cours de publication.
j rmsre~a~r~
/̃̃i.. :̃ PARIS, 25 SEPTEMBRE
BULLETIN DU JOUR
La vie politique est à moitié suspendue en
^Angleterre depuis la séparation du Parle-
ment, après une session plus laborieuse
peut-être que féconde. Ministres et hommes
politiques se retrempent dans les saines dis-
f tractions de la vie de campagne. M. Balfour
cherche un repos qu'il a bien gagné en
̃jouant avec passion au jeu national écossais
du golf sur les links ou stades de Felixstowe,
sur la rive de la mer du Nord. M. Gladstone,
de retour à son château de Hawarden, dans
v le Cheshire, de sa rapide excursion à Paris,
remplit ses devoirs de country gentleman en
entretenant ses tenanciers de la confection
des gelées et confitures comme solution de
la crise agricole et en lisant d'une voix en-
core sonore l'épître ou l'évangile dans l'é-
glise dont son fils est le recteur.
Toutefois, ce calme idyllique n'est pas sans
subir de temps à autre quelques atteintes. En
̃friande, la lutte continue sans rémission en-
tre le parti national et les champions de la
suprématie anglo-saxonne. Une délégation
• libérale anglaise, à la tête de laquelle se sont
crânement placés un ancien membre du ca-
-innet Gladstone, M. Stansfeid, et lady Sand-
n u Ir st, la veuve d'un feld-maréchal de l'ar-
• mée britannique et la mère d'un pair d'An-
gleterre, parcourt les campagnes, assiste
aux évictions, ranime l'espoir dans l'âme
dès paysans et s'est vu conférer le droit de
̃'• cité par Dublin, la capitale du royaume.
Pendant ce temps, les députés irlandais
continuent à se succéder avec une régularité
presque mécanique dans les prisons de Sa
i Majesté. M. William O'Brien, pour la se-
conde fois de cette année, expie un délit de
parole dans une' maison de force. D'autres
vont le rejoindre. L'effet moral de ces con-
damnations, qui n'a jamais été fort grand, a
été encore ébranlé dans ces derniers temps
•par la ligne de défense adoptée par les avo-
> cats nationalistes.
Pour avoir des pièces à conviction, le gou-
vernement a imaginé de donner à un certain
nombre de gendarmes (Royal Irish constabu-
'ïary) des notions élémentaires de sténogra-
Ehie et de les faire assister aux réunions pu-
liques. C'est le plus souvent sur le vu du
'rapport soi-disant authentique de ces poli-
aciers que les magistrats, officiellement si-
gnés sous le nom de résidents et populaire-
ment sous celui d'amovibles (rcmovables), pro-
̃<'noncent les durs arrêts contre l'exécution
impitoyable desquels M. Shaw-Lefèvre, l'an-
^cien ministre, vient de s'efforcer de soulever
4i:la conscience publique.
Or, les avocats nationalistes se sontavisés,
dans leurs contre-interrogatoires, pour sou-
mettre à une épreuve pratique la capacité de
ces sténographes improvisés, de leur dicter
.̃ un fragment de discours et de leur faire lire
ensuite leurs notes. Les résultats de cette ex-
rpérience démonstrative ont été pitoyables,
les passages choisis ont été reproduits en
dépit du bon sens par des Paridores ignares:
ce qui n'a pas empêché les tribunaux
'spéciaux de viser comme parole d'Evangile
dans les considérants de leurs jugements les
'̃̃* comptes rendus fantaisistes de ces bons gen-
'larmes.
[:; M. Balfour, à la fin de la dernière session,
avait tenu, sur la question de satisfactions à
donner aux catholiques irlandais dans l'en-
-eignement supérieur, un langage qui avait
été accueilli de certains côtés comme un coup
*de .partie propre sinon à rompre, du moins à
relâcher les liens qui unissent le parti libé-
ral au groupe nationaliste. En effet, il avait,
tournant résolument le dos aux principes et
aux traditions du parti tory, qui est aussi le
,parti ultra-protestant, fait entrevoir la possi-
bilité d'accorder à l'épiscopat irlandais l'Uni-
versité exclusivement catholique que celui-ci
réclame depuis si longtemps et aux lieu et
.place de laquelle il se. refuse énergiquement
à accepter le non-confessionnalisme de l'en-
seignement supérieur. Or, sur ce point, le
'parti libéral est lié par l'article essentiel de
son programme qui vise la laïcité ou, du
•anoins, la neutralité religieuse de l'enseigne-
Xnent à tous ses degrés.
Après avoirenlevéà. Oxford et àCambridge
et au collège de la Trinité, à Dublin, le carac-
tère exclusivement protestant et anglican que
leur donnait l'institution des Tests ou profes-
'sions de foi spéciales, il était impossible au
:parti libéral de concéder aux évêques d'Ir-
îande le caractère exclusivement catholique
de leur Université projetée. M. Gladstone et
ses amis entendent simplement, en accordant
le Home ride à l'Ile-sœur, lui rendre le droit
de régler à son gré c'est-à-dire probable-
ment dans le sens des vœux de l'immense
majorité catholique de telles questions,
FEUILLETON OU <£t\ïipS
DU 26 SEPTEMBRE 1889 [18]
UN MYSTÈRE 1
̃ ̃- '̃ ̃ ̃' xix •
Un été de la Saint-Martin prolongé au delà
de toutes les vraisemblances retint longtemps
loin de Paris ceux que leurs devoirs ou leurs
plaisirs n'y rappelaient pas impérieusement.
Le silence et l'abandon continuaient à ré-
gner à l'hôtel de Beaurand; sauf quelques
humbles amis, de ceux que la nécessité ou la
reconnaissance attachent à la fortune des
grands, Mme Montclar reçut peu de visites, et
Estelle n'en reçut point du tout.
Aussi sa surprise fut-elle grande lorsqu'elle
s'entendit un jour demander par Mme de Pol-
rey. Le froid d'une journée glaciale avait em-
pêché Mme de Montclar de prendre l'air en
voiture vers deux heures, comme elle le fai-
sait souvent, et sa nièce était restée pour lui
tenir compagnie.
Le premier mouvement de la jeune femme
avait été de refuser sa porte; n'y avait-il pas
quelque chose d'outrageant dans cette visite, à
une heure où l'on n'en fait guère, succédant à
'un silence inexcusable?
Cependant, une réflexion rapide changea ses
dispositions il fallait savoir ce que Mme de
Polrey avait à lui dire; ce serait peut-être in-
téressant et certainement instructif; de plus,
si, comme c'était probable, la bonne dame, en
se présentant à l'heure de la promenade d'Es-
telle, avait compté s'en tirer en déposant des
cartes, la satisfaction maligne de la prendre à
son propre piège n'était pas à dédaigner.
.» -«> .g
Reproduction et traduction interdites.
mais ils se refusent à violer leurs principes
en conférant de leurs propres mains au ca-
tholicisme irlandais le privilège qu'ils ont
arraché à l'Eglise établie d'Angleterre.
Jl semblait donc qu'il y eût là le germe
d'un conflit possible entre les deux ailes de
la coalition opposante. La marche des évé-
nements n'a pas justifié ces craintes.
D'une part, M. Balfour avait compté sans
la loyale répugnance du parti nationaliste,
même ultra-catholique, à jouer un tour à
M. Gladstone en acceptant du gouvernement
tory un acompte bien modeste au prix de ce
que leur assurerait la concession du Home
ride. Les évêques n'ont pas fait signe de se
prêter à ce plan. M. Davitt, qui représente
à la fois la nuance la plus colorée du natio-
nalisme et le dévouement le plus absolu à
l'Eglise, a lancé une protestation indignée
contre « le marché déshonorant » qu'un mi-
nistre, ennemi des aspirations les plus pro-
fondes de l'Irlande, osait lui offrir.
D'autre part, M. Balfour n'avait pas cal-
culé exactement la force de la résistance qu'il
rencontrerait dans les rangs de son propre
parti. Les Orangistes irlandais, qui ne sont
rien s'ils ne sont pas des ultra-protestants
encore tout pénétrés des traditions d'une in-
juste suprématie religieuse, se sont cabrés
violemment. Le sentiment qui a si longtemps
trouvé sa formule exacte en Angleterre dans
le cri de guerre tory: Nopopery (A bas le pa-
pisme) s'est ému. Interpellé sévèrement par
un docteur de ce cléricalisme à rebours, M.
Balfour, dans une lettre publiée hier, a con-
sidérablement réduit la portée de son projet
en déclarant qu'il ne s'agissait pas de créer
une Université catholique.
Du coup tombent toutes les spéculations
échafaudé'es sur ce que l'on eût volontiers
traité de chef-d'œuvre de machiavélisme.
Les électeurs de cinq collèges anglais et
écossais vont avoir l'occasion de se pronon-
cer sur la politique du gouvernement. A
Aberdeen, l'élection d'un gladstonien est
sûre, ainsi que dans les comtés unis d'Elgin
et Nairn. A Peterborough, la victoire est dif-
ficile contre l'influence de la grande famille
des Fitzwilliam, mais on compte sur un pro-
grès.
Ce qui est significatif, c'est que dans les
deux circonscriptions rurales Sleaford du
comté de Lincoln et le comté de Buckingham
nord, la lutte est très vive. A Sleaford, M.
Chaplin, le nouveau ministre de l'agricul-
ture, qui est le propriétaire de vastes domai-
nes, l'emportera sans doute grâce à cette
dernière qualité. Dans le Bucks, les libé-
raux ont tout lieu d'espérer que le capitaine
Verney sortira vainqueur.
On voit que le vent continue d'enfler les
voiles de l'opposition, malgré les efforts de
M. Chamberlain pour créer une diversion en
instituant on ne sait quel parti hybride dont
il serait naturellement le chef.
mm&tm r ̃–
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps
Madrid, 25 septembre, 8 h. 20.
Le ministre d'Espagne à Tanger a télégraphié
que le sultan consent à nommer un commissaire
extraordinaire marocain, porteur d'ordres catégo-
riques du sultan pour la mise en liberté des marins
du navire Miguel-Teresa. Le sultan a aussi consenti
à laisser le croiseur espagnol Navarra accompa-
gner le commissaire marocain à Alhucemas.
On dit que par suite du refus du général Cialdini
à accepter le poste d'ambassadeur à Madrid, le gou-
vernement italien a résolu d'envoyer à Madrid le
comté Mafjfei, qui a déjà occupé ce poste.
•><; r Madrid, 25 septembre, 9 h. 30.
Le règlement de l'indemnité, la réparation au pa-
villon et les objections du Maroc de ce chef que la
barque Miguel-Teresa faisait la contrebande, seront
discutés à Tanger entre le ministre d'Espagne et
Sidi-Mahommed-Torres. L'affaire de la canonnière
Cocodrilo sera traitée à part, vu que le comman-
dant de la canonnière a agi sans instructions du
gouvernement. On ne connaîtra pas avant ven-
dredi le résultat de la mission auprès des Kabyles
du Riff.
du Riff. -1~ Rome, 25 septembre, 9 h. 20.
Toutes sortes de bruits circulent sur la mort du
cardinal Schiaffino. La vérité est qu'il a succombé
aux suites d'une fièvre pernicieuse, dont il avait
déjà été atteint l'hiver dernier.
Berlin, 25 septembre, 8 h. 20.
C'est le 14 octobre que l'empereur et l'impératrice
d'Allemagne arriveront au château de Monza et se-
ront pendant trois jours les hôtes du roi d'Italie.
Le 15, il y aura déjeuner do gala dans le parc de
Monza le 16, excursion sur le lac Majeur le 17,
départ pour Gènes le 18, embarquement à Gênes
pour Naples, où le couple impérial restera trois ou
quatre jours.
Contrairement aux bruits qui ont couru sur la
santé de M. Bismarck on a même dit qu'il était
mort je puis vous affirmer que le chancelier se
porte aussi bien que possible et se prépare à venir
à Berlin.
.̃̃̃?' Vienne, 25 septembre, 8 h. 30.
« L'Union nationale allemande », le centre de l'a-
gitation teutomane et antisémitique, vient d'être
dissous par un arrêté du lieutenant général de la
Basse-Autriche. Si cette mesure est importante par
elle-même, elle gagne encore en signification par
les considérants qui motivent et précèdent l'ordon-
nance de dissolution. Il est dit d'abord que cette
association, qui existe depuis le mois de mai 1889,
Celle qui, suivant l'expression admise, avait
servi dé mère à Mme de Beaurand fut, en ef-
fet, quelque peu désappointée en se voyant in-
troduire mais on ne peut pas toujours es-
pérer de trouver sortis les gens qu'on va voir
par nécessité D'ailleurs, elle n'était pas fâ-
chée, de son côté, de voir quel visage faisait
une femme accusée d'un si abominable crime.
Escortée de ces deux filles, elle pénétra donc
dans le grand salon où Estelle se trouvait déjà
prête à la recevoir.
Ma chère enfant, dit-elle quand on se fut
assis après les inévitables embrassades, je n'ai
pas voulu perdre un moment pour vous an-
noncer la nouvelle qui remplit notre maison
de joie. Vos deux amies, vos compagnes d'en-
fance, sont fiancées à deux braves gentilshom-
mes de nos amis; l'un est un voisin de campa-
gne l'autre est lieutenant au 10° régiment de
hussards; mes deux filles sont contentes, mes
deux futurs gendres sont ravis, et on célébrera
les deux mariages le même jour.
Je vous fais mes compliments sincères,
chère madame, dit Estelle. Elle regarda ses
compagnes d'enfance, qui semblaient, en effet,
satisfaites de leur sort, et leur adressa quel-
ques bonnes paroles les jeunes filles, après
tout, n'étaient pas responsables de la prudence
excessive de leur mère. Elle fut étonnée de se
voir répondre avec une politesse cérémonieuse,
bien différente de l'ancienne familiarité.
Une nuée de souvenirs assaillit Estelle. C'é-
taient là les amies qu'elle avait quittées six ou
sept mois auparavant, dans sa chambre de jeune
fille, empressées autour d'elle, attachant à sa
personne une fleur, un bijou, amusées de leur
rôle de demoiselles d'honneur, et cachant, l'aî-
née au moins, car la plus jeune lui était sincè-
rement attachée, une jalousie réelle sous les
dehors de la plus tendre amitié? 2
Que tout cela était loin I Un laps de vingt
années, une couronne de cheveux blancs com-
me celle de Mme Montclar, remplaçant les nat-
tes de jais 46 \$ jeune femme, n'eussent pas
a voté des félicitations au député Turk pour son
attitude dans la séance du Reichsrath du 10 avril,
lors de la discussion do la loi militaire. Par contre,
le député Joseph Fiegl, membre de l'association,
était l'objet d'un vote de blâme, parce qu'il avait
désavoué les paroles prononce par M. Turk, et
que tous les partis dans le Parlement ont qualifiées
de trahison envers le pays. M. Turk avait dit que
l'Allemagne serait bien à plaindre si jamais elle en
était réduite à réclamer l'assistance de l'Autriche.
A la suite de ce vote de blâme, M. Fiegl et son
collègue Schnarf, qui avait partagé son attitude à
l'égard de M. Turk, ont été rayés des registres de
l'association. En agissant ainsi, l'association, con-
formément d'ailleurs à ses principes de conduite, a
adopté ouvertement un point de vue hostile à la
monarchie austro-hongroise et par conséquent anti-
patriotique et dangereux pour le bien de l'Etat.
En outre, l'association a favorisé par plusieurs
actes l'expansion de l'antisémitisme, qui est de na-
ture à exciter la population en aggravant et enve-
nimant les conflits de race et de nationalité. Cette
manière d'agir a tendu en dernier lieu à troubler
l'ordre et le repos public.
En dernier lieu, l'arrêté vise une adresse envoyée
au congrès antisémite de Bochum (Wcstphalie).
L'association, en exerçant son action en dehors de
l'Autriche, a contrevenu à ses statuts.
Un délai de deux mois est accordé à l'association
pour en rappeler de la décision du lieutenant géné-
ral auprès du ministère do l'intérieur; mais, dès à
présent, le fonctionnement du comité est suspendu.
Les journaux libéraux font remarquer que c'est
la première fois que l'antisémitisme est stigmatisé
comme une cause do troubles, dans une pièce offi-
cielle et venant du gouvernement.
Budapest, 25 septembre, 8 heures.
Le conseil des ministres de Budapest a commen-
cé l'examen du projet de réforme administrative
élaboré par le ministre Szilagyi. Ce projet est très
vaste et tend à substituer l'autorité du gouverne-
ment central à l'autonomie des comitats partout où
celle-ci est restée déboutai; s'agLLdp. modifications
si importantes, que plusieurs ministres "soiit d'avis"
qu'il faut consulter la nation en faisant de nouvel-
les élections parlementaires. M. Szilagyi avait en-
voyé une copie de son projet à M. Tisza, à Os-
tende, mais le président du conseil a jusqu'à pré-
sent réservé son opinion.
Belgrade, 25 septembre, 9 heures.
La reine Nathalie est toujours au château de
Stenko, près Jassy. Elle y reçoit de nombreuses
visites. On dit qu'elle arrivera dimanche prochain
à Belgrade.
Les radicaux proclament qu'ils sont sûrs d'une
majorité écrasante à la prochaine Skouptchina.
,.ngi.
Le pays a parlé il parlera plus complète-
ment encore le 6 octobre prochain. Ceux des
conservateurs qui déclaraient, il y a quelque
temps, être tout prêts à faire taire leurs pré-
férences particulières et à se ranger à la vo-
lonté nationale clairement exprimée peu-
vent-ils, doivent-ils encore hésiter à la re-
connaître et à s'incliner devant elle? Nous
ne nous adressons point aux hommes qui
restent attachés au droit divin, au droit héré-
ditaire si l'on veut, et opposent ce droit an-
cien au droit nouveau issu du suffrage uni-
versel. A ceux qui ont la doctrine rigide et
l'attitude hiératique que le comte de Cham-
bord a gardées pendant plus de qua-
rante ans nous n'avons rien à dire.
La politique est pour eux une affaire de
foi religieuse, et on ne discute pas avec là
foi. Mais ces légitimistes purs et fidèles sont
bien peu nombreux. Le plus grand nombre
des conservateurs, surtout depuis l'appari-
tion du boulangisme sur la scène politique,
ont professé d'autres principes et pris d'au-
tres engagements. Ils ont dit et répété main-
tes fois que le suffrage universel était leur
maître et, en se ralliant a1 la convocation
d'une Constituante, ils promettaient d'accep-
ter loyalement et de servir sans arrière-pen-
sée le régime quel qu'il fût, empire, royauté
ou république, qui sortirait de cette consul-
tation du pays.
Voilà le nouveau terrain politique sur le-
quel sont descendus les conservateurs; ils
ont fait en principe le sacrifice de leurs doc-
trines privées ils ont dit que leurs préfé-
rences dynastiques ne devaient plus préva-
loir sur l'intérêt général et la volonté bien
clairement affirmée de la nation. Non seule-
ment ils sont descendus théoriquement sur
ce terrain, mais ils y ont opéré toutes leurs
évolutions durant la période électorale. La
grande majorité des candidats élus de la
droite ont déclaré très hautement que la
République n'était pas en cause, qu'ils
n'attaquaient pas la forme même du
gouvernement. Ils semblaient dire et ils
disaient en effet qu'ils acceptaient la Ré-
publique à la seule condition de changer
les hommes qui la gouvernent, ce qui dé-
pend uniquement du vote d'une majorité
parlementaire. Qu'est-ce qui peut donc au-
jourd'hui les empêcher d'être conséquents
avec eux-mêmes et de reconnaître que, la Ré-
publique étant pour la cinquième ou la sixiè-
me fois réclamée par le pays, il ne leur reste
plus qu'à s'y rallier sans arrière-pensée?
Il est vrai qu'il n'y a eu à proprement par-
ler ni constituante ni plébiscite dans les for-
mes que ces mots réveillent. Mais veut-on
être de bonne foi, peut-on sérieusement con-
tester le sens constitutionnel des dernières
élections? Vous vouliez consulter la France;
elle vous a répondu. Prétendez-vous que sa
réponse est douteuse? Vous l'avez interro-
accusé un gouffre plus profond et plus large.
En une seconde, Estelle chassa cette impres-
sion, et la tristesse prête à la saisir disparut,
remplacée par une fierté tant soit peu dédai-
gneuse.
Soyez heureuses, mes chères amies, dit-
elle avec une grande liberté d'esprit; le bon-
heur ne connaît point de conditions absolues;
chacun arrange le sien à sa guise j'espère que
le vôtre sera facile et fidèle.
Sur chacun des petits museaux chiffonnés
parut un sourire de commande, chaque bouche
proféra deux ou trois paroles dénuées de sens
réel, mais pleines d'à-propos, et les deux paires
d'yeux se tournèrent vers leur maman, qui de-
vait avoir encore quelque chose à dire.
Les mariages sont pour le 29, dit Mme
de Polrey avec une légère inquiétude il est
bien fâcheux que votre deuil ne puisse vous
permettre d'y assister; peut-être pourriez-vous
venir à la messe, cependant?
Mon Dieu pensa Estelle, comme elle a
peur de me voir accepter! Elle mériterait un
beau oui, bien formel; mais cela ne vaut même
pas une taquinerie de ma part.
Je ne pourrai pas, dit-elle tout haut,
Mme Montclar est souffrante; le 29, c'est
dans huit jours, je crois? Je ne pense pas
qu'elle puisse supporter la fatigue d'une céré-
monie dans un délai aussi rapproché, et je ne
sors jamais sans elle.
Vous avez tout à fait raison, dit Mme de
Polrey, visiblement soulagée; quelque regret
que nous en ayons, nous ne pouvons que vous
approuver.
Elle se leva pour partir la jeune femme l'ac-
compagna jusqu'au hall. L'aînée des jeunes
filles lui dit tout à coup
Tu viendras voir mon trousseau, n'est-ce
pas, Estelle? Il sera exposé lundi et mardi; il
n'est pas aussi riche que le tien, mais pourtant
il n'est pas mal.
Oui, fit la mère, passablement ennuyée,
vous pourriez venir un matin, ou bien vers
gée sur la revision, elle vous a crié avec une
force irrésistible « Je veux la République et
ne veux aucun autre régime. » En quoi les
formes de la consultation nationale en chan-
geraient-elles le résultat? Quelle réponse plus
claire pourrait faire une assemblée consti-
tuante ? Vous vouliez un plébiscite vous l'avez.
Ergotez tant que vous voudrez sur les distinc-
tions plus ou moins subtiles que vous pouvez
faire ce n'est pas avec des subtilités qu'on
règle une politique. Vous devez bien confes-
ser que le pays veut la République dès lors
il n'y a plus qu'une question à décider, celle
de savoir si vous voulez enfin y prendre vo-
tre place en cessant de la contester et de lui
nuire, ou bien si, comme vous le disait l'au-
tre jour l'un des vôtres, vous voulez conti-
nuer votre rôle ingrat d'émigrés à l'intérieur.
_«a*»_
Le scrutin de ballottage, auquel candidats et
électeurs se préparent dès maintenant, se pré-
sente jusqu'ici dans des conditions favorables,
comme on a déjà pu le voir par la série de
désistements que nous avons annoncés et qui
vont se poursuivre dans toute la France. Pour
que le triomphe soit complet et éclatant, il faut
que les candidats se rendent bien compte de
l'état d'esprit des électeurs les candidats ra-
dicaux, par exemple, n'ignorent pas que bon
nombre d'électeurs modérés redoutent par-des-
sus tout l'avènement d'une majorité revision-
niste ne serait-il pas habile de leur part, si-
non de renoncer à cette partie de leur pro-
gramme, ce que personne ne songe à leur de-
mander, tout au moins de déclarer bien haut
qu'ils ne veulent qu'une revision républicaine?
Pourquoi chacun d'eux ne dirait-il pas dansses
affiches ou dans ses déclarations verbales
« Oui, j'ai été et je reste partisan de la revi-
sion, voire de la revision par une Constituante,
Biais je suis avant tout républicain et je n'en-
tends pas que jamais la revision puisse profi-
ter aux ennemis que nous allons combattre
cette fois tous ensemble. Je m'engage donc for-
mellement à ne voter la revision qu'avec des
républicains. »
Est-ce qu'un tel langage ne serait pas parfai-
tement honorable, est-ce qu'il impliquerait la
moindre dérogation aux principes, la plus pe-
tite capitulation de conscience? Mais il aurait
l'immense avantage de rendre impossible toute
hésitation chez les plus modérés. Ces derniers
se font, en effet, cette réflexion En quoi un
candidat qui met la revision par une Consti-
tuante au-dessus de tout, au-dessus même du
salut de la République, prêt à la voter avec les
monarchistes et les boulangistes se distin-
gue-t-ils de ces derniers? Il est aussi dange-
reux, plus dangereux peut-être, car il per-
mettrait à nos adversaires communs de por-
ter à la République un coup d'autant plus
terrible que les républicains en prendraient
la responsabilité. La répugnance de beau-
coup d'électeurs est donc aisée à compren-
dre. Bon nombre de radicaux s'en sont rendu
compte M. Floquet, entre autres, dont nul ne
conteste apparemment l'autorité, parmi les ré-
publicains avancés, a fait, sur ce point, les dé-
clarations les plus catégoriques. Quel motif
pourraient invoquer ses coreligionnaires pour
ne pas imiter son exemple?
̃ :o.' i
M. Saint-Genest publie ce matin, dans le Figaro,
un article dont nous donnons quelques extraits
parçe qu'il nous paraît de nature à éclairer les con-
servateurs sincères et patriotes à la veille du scru-
tin de ballottage. Voici comment il s'adresse aux
monarchistes: ̃ ,r; t ̃ ~1.' J"
Mme de Créqui, apprenant que son neveu'épou-
sait une roturière vieille et laide, lui dit un beau
soir
Eh bien! voyons, qu'est-ce qu'elle t'apporte, la
coquine ?
Cent mille livres, ma tante
Ah mon ami, pour l'ouvrage, ce n'est pas payé.
Eh bien, je dirai de même aux royalistes pour
l'ouvrage, ce n'est pas payé. Quand on se rappelle les
avanies qu'ils ont subies, les affronts qu'ils ont dévo-
rés, quand on pense que des grands seigneurs, com-
me le duc de la Rochefoucauld, ont dû se mésallier
avec la Boulange afin de gagner une vingtaine de
voix. en vérité, pour l'ouvrage, ce n'est pas payé.
Quand on songe qu'un ami personnel de M. le comte
de Paris, tel que M. Lambert de Sainte- Croix, et qu'un
gentilhomme de lettres, tel que M. Hervé, ont dû s'y
résigner également, pour arriver à n'être pas élu du
tout. c'est encore moins payé.
Et dire qu'à l'heure qu'il est, ces hommes remercient
peut-être le ciel de n'avoir pas réussi, car si le peuple
avait donné la majorité à ceux qui veulent tout dé-
truire, ç'aurait été si effroyable que jamais le pays
no leur aurait pardonné.
Qu'est-ce que les radicaux reprochent à la Constitu-
tion ? C'est d'avoir un Sénat qui les empêche d'anéan-
tir l'Eglise, de désorganiser complètement la magis-
trature et l'armée.
Qu'est-ce que les boulangistes reprochent à cette
même Constitution ? C'est d'avoir un président et une
Chambre haute qui les empêchent de donner la dicta-
ture à leur général.
Et vous alliez vous entendre avec ces radicaux et
ces boulangistes pour renverser un Sénat qui vous
protège et un président qui fait respecter votre pays
Comment! c'est le Sénat qui, depuis dix ans, lutte
tant bien que mal pour sauver ce qui reste des clas-
ses dirigeantes, c'est même pour cela que les démo-
crates le détestent tant, et ce que vous imaginez de
mieux, c'est de détruire ce Sénat, pour faire triom-
pher la Chambre basse, qui veut votre mort.
J'aurais plutôt compris le contraire, à la rigueur.
Ç'aurait été original comme politique, mais ç'aurait
été logique, tandis que votre raisonnement était in-
sensé aussi insensé que votre guerre contre le par-
lementarisme.'
Car, en dehors du parlementarisme, il n'y a que la
dictature la dictature d'un César ou la dictature
d'une Convention. Est-ce donc là ce que vous vouliez,
vous monarchistes ?
Aujourd'hui, il n'est pas d'illusion possible, n'est-ce
pas ? Vous savez que tout ce que les coalisés racon-
tent dans leurs journaux ne sont que des phrases pour
marquer leur défaite vous connaissez les dépêches
une heure et demie à cette heure-là vous nous
trouveriez seules, sûrement.
Mme de Beaurand sourit: cette petite inso-
lence, innocente, pour ainsi dire, qui l'eût pro-
fondément blessée deux mois plus tôt, lui
semblait maintenant irrésistiblement comique
dans son inconscience.
Soyez tranquilles, répondit-elle, j'irai à
l'heure où je serai sûre de ne rencontrer per-
sonne il n'y a pas si longtemps que j'ai quitté
votre maison, j'en connais encore les habi-
tudes.
C'est à cause de ton deuil, tu comprends?
fit la plus jeune, qui avait rougi de honte en
entendant parler sa mère.
C'était une bonne petite fille, encore assez
peu habituée au monde pour ne pas songer
uniquement à elle-même.
J'ai compris, ma chère enfant, répondit
Mme de Beaurand en lui mettant affectueuse-
ment sa main sur l'épaule, et je te remercie. Je
vous remercie aussi de votre visite, chère ma-
dame veuillez me rappeler au souvenir de M.
de Polrey.
Quand les trois femmes furent dans leur
voiture, la maman gronda son écervelée de fille
qui avait failli commettre une si grande bévue.
Peux-tu t'imaginer l'effet qu'elle aurait
produit en arrivant vers cinq heures, au milieu
de tout ce monde? dit-elle en terminant son
homélie.
Il faut pourtant bien qu'elle voie ce qu'on
nous donne! fit la jeune fille d'un air boudeur.
Après tout, son trousseau n'était pas beaucoup,
beaucoup plus beau que les nôtres, toute riche
qu'elle est.
Elle a très bien répondu, interrompit vi-
vement Odette, et elle a montré beaucoup de
tact. Quand je serai mariée, moi, je la verrai l
Tu ne feras pas cela gronda la sœur
aînée.
A moins que mon mari ne me le défende,
tu verras si je ne la vois pas répliqua la pe-
tite rebelle. %i s'il était assez lâche pour me le 1
que les correspondants étrangers envoient aux gou-
vernements d'Europe, avec ces simples mots Vic-
toire de la République.
Souvenez-vous du proverbe: « Quand on ne peut
pas mordre, il ne faut pas aboyer. »
Faites comme en Angleterre, où du jour au lende-
main les hommes emportés dans une lutte furieuse
s'arrêtent brusquement et changent leur fusil d'é-
paule.
C'est dur, mais, que voulez-vous, le peuple tient à
la République, il faut en prendre notre parti; moi je ne
l'aime pas, je la déteste même. Je suis non seulement
le plus monarchiste, mais le plus réactionnaire des
hommes. Mais la vie se passe à supporter ce qu'on
n'aime point.
Voyez donc la situation en face, et sans avouer que
vous vous êtes trompés, ce qui est 'impossible à un
Français, choisissez donc pour ce ballottage des hom-
mes raisonnables qui, sans rêver des bouleverse-
ments et des restaurations impossibles, cherchent
simplement à faire vivre notre pauvre pays et à le
protéger contre les menaces du dehors.
Par-dessus tout, si vous m'en croyez (et c'est en
mon nom seul que le parle), votez pour n'importe
quel modéré de droite ou de gauche, plutôt que de
voter pour un boulangiste.
A noter aussi un article de M. Ernest Daudet dans
le Moniteur, l'un des organes du parti qui s'intitule
conservateur, bien qu'il ait paru s'attacher jusqu'ici
à être tout le contraire
Une France devenue républicaine en dépit des aven-
tures, des épreuves et des mécomptes; une France
convaincue qu'il n'est pas impossible de constituer
sous cette forme un gouvernement conservateur, telle
est donc la situation devant laquelle nous nous trou-
vons et qu'il faut avoir le courage d'envisager avec
sang-froid.
Cette situation n'est pas nouvelle.
On peut même se demander si ce n'est pas pour l'a-
voir trop longtemps méconnue que le parti conserva-
teur s'est affaibli.
En tout cas, il n'est plus permis de la méconnaître.
Fermer les yeux à l'évidence ne constitue pas une
politique.
La sagesse ordonne au contraire de tenir compte
des circonstances,, des temps, des tendances des gé-
nérations nouvelles, des changements survenus dans
le tempérament du pays et d'y conformer sa conduite.
'C'est dire que d'impérieux devoirs s'imposent aux
conservateurs.
Ils auront à décider s'ils vont continuer à s'affaiblir
dans une opposition impuissante, s'ils vont laisser se
former sans eux, en dehors d'eux, peut-être même
contre eux un parti conservateur dans la République,
ou si, au contraire, par une adhésion qui n'exigerait
à cette heure le sacrifice d'aucune espérance immé-
diatement réalisable, ils se mettront en état d'exercer
sur la direction des affaires publiques l'influence qui
leur appartient légitimement.
«Se»
LES ÉLECTIONS ET LA PRESSE ÉTRANGÈRE
Les journaux étrangers continuent à faire con-
naître leurs impressions sur les élections de di-
manche. Celle de la Gazette de V Allemagne du Nord,
organe officieux de M. de Bismarck, n'est pas sans
intérêt
Le résultat dés élections en France, dit-elle, montre
que la rentrée en scène du groupe républicain conser-
vateur, dont M. Léon Say peut être considéré comme le
représentant le plus éminent, va avoir une importance
considérable dans la politique française de demain.
Il est vrai que la feuille berlinoise paraît se con-
tredire en ajoutant
Une faudrait pas conclure de ce qu'à côté de M.
Léon Say d'autres chefs du centre gauche ont été
élus, que cette fraction, qui représente la tradition de
M. Thiers, soit propre à former le noyau d'une majo-
rité compacte et sûre et à donner au pays un gouver-
nement stable, considéré et certain de l'avenir.
L'explication de cette contradiction est dans les
lignes suivantes
Si on ne triomphe pas des divisions parlementaires
actuelles, les quelques sièges perdus par l'oppcsition
n'auront aucune importance. Il suit de là que l'on ne
connaîtra la ̃fraie signification des élections qu'au
moment où la majorité de la Chambre sera à l'oeu-
vr e. •
Pour la Mforma, journal de M. Crispi
Le résultat des élections prouve que la majorité
des Français veut la République, mais une Républi-
que qui n'est,pas complètement celle des gouvernants
d'hier ni celle des gouvernants d'aujourd'hui, ni celle
des gouvernants probables de demain. Il faut se féli-
citer d'ailleurs avec la France du bon sens dont elle
fait preuve. •»
Toute l'Europe a assisté aux élections avec une
parfaite neutralité, et sans aucun désir de les voir
mal tourner, ce qui doit convaincre la France com-
bien étaient .calomnieuses les accusations formulées
contre d'autres gouvernements de vouloir sa perte.
Le Secolo, journal républicain de Milan, se réjouit
vivement de la défaite "du boulangisme. Il estime
que la France a fait adhésion à la politique de M.
Carnot, qui signifie paix, travail.
Le Nouveau Temps, feuille libérale russe, résume
son sentiment en ce sens
Les résultats des élections doivent inspirer aux
gouvernants français une conduite prudente, qui leur
fasse aborder exclusivement des réformes répondant
au commun désir de voir la France dirigée par un
gouvernement fort, qui lui permette d'affronter vail-
lamment les dangers extérieurs et d'occuper une place
digne d'elle parmi les puissances européennes.
Les Novosti trouvent les résultats satisfaisants
pour le parti républicain, mais ils ajoutent que le
nombre des ballottages doit montrer aux républi-
cains la nécessité de suivre à l'avenir une plus sage
conduite.
La Pall Mail Gazette, radicale, s'exprime ainsi
Une fois de plus, le paysanfrançais a sauvé sa patrie,
et une fois de plus il a été démontré que Paris n'est pas
la France. Paris qui, aujourd'hui comme toujours, est
dans l'opposition, a été empoigné par l'idée boulan-
giste. Par contre, toutes les bévues des républicains
ne sauraient aliéner à la République la grande masse
des électeurs français. Les Français fermes, raison-
nables et sérieux qui, à toutes les élections générales,
accordent sans'bruit à la République les quatre mil-
lions de voix qui forment la solide base de son pou-
voir, n'ont pas pu être détournés de leur fidélité.
Tous les rêves relatifs à une majorité révisionniste,
si petite fut-elle, se sont complètement évanouis. La
campagne boulangiste a fait four. Le général Boulan-
ger et ses amis ont fait de leur mieux. Ils ont tra-
vaillé avec énergie et enthousiasme et, comme résul-
tat, le nombre des révisionnistes ne dépasse pas ce-
lui des réactionnaires.
défendre, je ne l'aimerais plus du tout Elle a
été très bonne avec moi, Estelle, pendant que
nous étions au couvent, et je l'aime beaucoup.
Et je ne croirai jamais qu'elle suit capable de
rien faire de mal, mais rien pas quoi que ce
soit!
En voilà assez, dit placidement Mme de
Polrey. Ne vous mettez pas en colère, mes en-
fants, car cela vous échaufferait le teint et
nous avons encore dix ou onze visites à faire
avant le dîner.
Après avoir agité avec Mme Monclar la ques-
tion de savoir s'il convenait ou non d'accepter
l'invitation forcée de Mme de Polrey, Estelle
se décida pour l'affirmative. En conséquence,
le mardi suivant, vers onze heures, elle fran-
chit, pour la première fois depuis le jour de
son mariage, le seuil de la maison qui avait
été ou qui avait semblé être la sienne pen-
dant une dizaine d'années.
Son émotion fut grande en revoyant ce logis
orné pour la circonstance, de même qu'il l'a-
vait été pour elle; c'était elle qui, si peu de
mois auparavant, courait d'une table à l'au-
tre, soulevant délicatement du bout des doigts
les dentelles et les étoffes soyeuses, comme
le faisaient aujourd'hui ses anciennes amies
avec quelle joie enfantine n'avait-elle pas
frôlé les plis de sa robe nuptiale, ravie
de la voir si belle!. Elle se souvenait comment
le dernier soir, seule dans la chambre où elle
ne devait plus rentrer, elle avait essayé sur
ses épaules nues, devant la glace, les bijoux
qui lui venaient de sa mère; comme les pierres
brillaient sur le satin mat de sa jeune poitrine,
et comme les étoiles de diamant scintillaient
dans ses cheveux noirs 1 La vision radieuse de
ce moment, le dernier de sa liberté de jeune
fille, lui fit monter des larmes dans les yeux,
pendant qu'elle effleurait d'une main discrète
les rubans légers qui nouaient le trousseau.
Estelle, dit tout à coup à son oreille une
voix presque enfantine, quand je serai mariée.
j'irai te voir, tu veux bien, dis?
Les deux cents collets-montés qui, en 1885, suk
vaient le drapeau de l'opposition comme conserva-
teurs, suivent maintenant le même drapeau comme
révisionnistes. Voilà tout. A-t-on jamais fait tant de
bruit pour rien?
La défaite du boulangisme et la renaissance de la
République, résultant -des élections, sont satisfaisan-
tes à plus d'un point de vue. L'Europe en sera rassu-
rée et la redoutable éventualité d'une prochaine
guerre retardée. En même temps, la cause du gou-
vernement populaire y sera raffermie dans le monda
entier. '̃
Le Standard, journal conservateur, ne tient pas
un autre langage, bien qu'il se place à un point de
vue différent
La conclusion à laquelle nous sommes amenés es(
que l'instinct général qui a poussé tous les hommes
d'Etat de l'Europe à saluer la victoire de la Républi-
que comme un succès en faveur de la paix, est un
instinct parfaitement juste.
Le fait que l'ordre de choses qui règne actuellement
en France se trouve fortifié augmente les chances du
maintien de la tranquillité européenne. En un mot, la
gouvernement de M. Carnot constitue, pour le mo-
ment, la meilleure forme de gouvernement possible
chez nos voisins.
La République peut avoir commis bien des fautes
et des folies en tout cas, elle n'en est pas à gagner
ses éperons et peut, à juste titre, faire valoir qu'elle
a déjà fait quelque chose pour la France.
Celle-ci ne possède-t-elle pas une armée puissante
et bien organisée ? Le peuple français est d'avis que
cette armée existe. Qui l'a créée ? La République.
La France a-t-elle une marine de premier ordre,
pourvue de bons équipages ? Si la réponse est encore
affirmative, nous demanderons de nouveau à qui
doit-on cette marine ? A la clairvoyance, à l'énergie,
au patriotisme de la République.
La France occupe-t-elle parmi les nations une place
haute et respectée ? Seuls, les pires factieux de l'inté-
rieur et les critiques les plus prévenus à l'étranger
pourraient songer à le nier.
Qui a conçu et réalisé avec le succès que l'on sait
le projet de l'Exposition? Ce n'est ni le comte de Pa-
ris, ni le prince Napoléon, ni assurément le général
Boulanger.
Avec de tels droits à la confiance du peuple, de tels
titres à son respect, le gouvernement de la Républi»
que n'a pas à s'occuper de donner satisfaction au dé-
sir de gloire militaire qui peut se trouver à l'état la-
tent dans les cœurs français.
L'Europe a donc de bonnes raisons pour se réjouir
de ce qui doit encore fortifier la position de la Répu-
blique.
AFFAIRES COLONIALES
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Actes officiels
Sont nommés dans la magistrature coloniale
Juge suppléant au tribunal de première instance
de Saigon, M. Fays, substitut du procureur do la
République près le tribunal de première instance
de Pondichéry..
Substitut du procureur de la République près le
tribunal de première instance de Pondichéry, M.
Vennemani, juge suppléant au'tribunal de pre-
mière instance de Saïgon. ·
Nouvelles coloniales et maritim93
Le port de Rochefort procédera, le 20 octobre
prochain, à la mise à l'eau du croiseur de 1re classe
le Jean-Bart. Ce bâtiment déplacera 4,162 tonneaux
et filera 19 nœuds. Il sera armé de quatre canons
de 16 centimètres, six de 14 centimètres, de canons-
à tir rapide, de canons-revolvers et de quatre tubes
lance-torpilles.
La première pièce de quille de ce bâtiment a éte
mise en place en septembre 1887, et à la fin de l'an-
née présente le Jean-Bart sera construit aux 70 cen-
tièmes. Les 30 centièmes restants seront exécutés
en 1890, de telle sorte qu'il pourra être livré à la
flotte à la fin de l'année prochaine.
Les plans du Jean-Bart sont de M. l'ingénjeur
Thibaudier.
«. • ̃_
LETTRES DE TURQUIE
;[ ·. ,i
(De notre correspondant particulier)
Constantinople, 20 septembre.
Une circulaire, qui vient d'être distribuée à Con-
stantinople, annonce la création et le fonctionne-
ment, à partir du 1er octobre prochain, d'uno
agence télégraphique, l' « Agence de Constantino-
ple qui se substituerait aux agences existantes
et concentrerait tout le service des informations do
Turquie à publier en Europe et des nouvelles d'Eu-
rope à publier en Turquie.
Il existait ici deux agences, l'agence Reuter et
l'agence Havas. Depuis longtemps, l'agence Reu-
ter avait renoncé à publier ici des nouvelles d'Eu-
rope et son agent se contentait d'expédier en Eu-
rope les nouvelles de Turquie. L'agence Havas,
qui continuait seule ce double service, a, depuis un
an environ, diminué progressivement le nombre
des télégrammes d'Europe distribués sur place, et
elle est venue à ce point de n'en publier qu'un ou
deux de loin en loin, tous les trois ou quatre jours.
Il devenait manifeste qu'elle ne tarderait pas à
cesser ce service, et cela pour deux causes princi-
pales l'appauvrissement de plus en plus accusé de
Constantinople, où il n'y a pas d'industrie, où le
grand commerce n'existe plus et où la Bourse n'a
plus son importance d'autrefois; 2° les difficultés
provenant du gouvernement, qui arrête à chaque
instant, soit à l'arrivée, soit au départ, les dépêches
les plus inoffensives, et rend ainsi matériellement
impossible le fonctionnement d'une agence. Le
nombre des abonnés a considérablement diminué,
et aujourd'hui le chiffre de ces abonnés est déri-
soire.
La nouvelle agence ne sera pas plus heureuse si
elle doit fonctionner uniquement avec ses capitaux.
Mais vous remarquerez que, par ses relations mê-
mes, cette agence peut être considérée comme un
instrument de la triple alliance. Son directeur, le
docteur Grosser, est correspondant de la Gazelle de
Cologne et peut-être l'agence aura-t-elle des sub-
ventions qui lui permettront de se passer des abon-
nés dont, en tout cas, le nombre sera modeste.
Il est probable, sinon certain, que cette agence
s'attachera à donner le moins possible de nouvel-
les de France et à présenter sous le jour le plus
Mme de Beaurand se retourna brusquement
et vit levés vers elle, pleins d'une flamme gé-
néreuse, les yeux d'Odette, dont, au couvent,
elle avait été si longtemps la « petite mère ».
Toi? dit-elle, saisie de tendresse et de
joie. Tu m'aimes donc toujours?
Oh 1 oui. Tu verras mon fiancé. il est
très gentil Je l'aime bien. il est très bon;
tu l'aimeras aussi. Tu viendras déjeuner chez
nous, n'est-ce pas? Tiens, je mettrai pour toi
ce service-là! fit-elle en indiquant une petite
table couverte d'argenterie et de linge da-
massé. C'est mon plus joli!
Estelle jeta un regard autour d'elle; à l'autre
extrémité du salon, Mme de Polrey et sa fille
a!née tenaient un grand conseil avec la coutu-
rière. Elle saisit dans ses bras la jeune fille en-
core toute fluette, et haisa passionnément la
petit museau chiffonné, en ce moment beau
d'une beauté tout idéale.
Tu es une chère mignonne, lui dit-elle à
voix basse, et je t'aimerai toujours pour co
que tu viens de me dire. Que Dieu te bénisse,
ma petite fille, pour ta charité et te la rende au
centuple en son paradis! Tu as vraiment, au-
jourd'hui, donné un verre d'eau a une pauvre.
-Alors, tu viendras? répondit l'enfant qui
ne comprenait qu'à demi.
Nous nous verrons, oui, plus tard, quand
tu voudras. Pas maintenant.
Elle mit entre Odetle et elle l'intervalle d'un
pas ou deux, puis se retourna vers Mme de
Polrey, qui revenait vers elle. Des paroles et
encore des paroles, des politesses menteuses,
et Mme de Beaurand quitta la maison do
son enfance. Seule, en voiture, elle se sentit si
touchée qu'elle fondit en larmes pendant
qu'elle les essuyait, délicieusement émue, au*
près de l'image de sa « petite fille » vint se pla«-
cer celle de Théodore Benoist.
HENRY GUÉVII.LE.I
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