Titre : Excelsior : journal illustré quotidien : informations, littérature, sciences, arts, sports, théâtre, élégances
Éditeur : [s. n.] (Paris)
Date d'édition : 1925-04-22
Contributeur : Lafitte, Pierre (1872-1938). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32771891w
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 avril 1925 22 avril 1925
Description : 1925/04/22 (A16,N5245). 1925/04/22 (A16,N5245).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4603988m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-228
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/07/2016
EXCELSIOR
La tolérance mutuelle est l'unique
remède aux erreurs qui pervertissent
Vesprit/des hommes d'un bout de
l'univers à l'autre.
VOLTAIRE.
Igme Année. ■— N- 5,245. ■— Pierre làtte, fondateur.
2 0 c. o et Seine-et-Marne. PARIS, 20, RUE D'ENGHIEN (Xme) -1 -1 -- 1 et Colonies 25"
.......... VOIR MERCREDI
EN PAGE 6 22
NOS AVRIL 1925
ILLUSTRATIONS ~ Reine
Adr. télégr. : Excel.-Paris.— TéL : Gut. 02-73, 02-75, 15-00.
LE CABINET PAINLEVÉ S'EST PRESENTÉ HIER DEVANT LE PARLEMENT
PAR 304 VOIX CONTRE 218 LA CHAMBRE LUI A VOTÉ LA CONFIANCE
Le débat fut très mouvementé au Palais-Bourbon et le retour
de M. J. Caillaux au pouvoir provoqua de vives polémiques.
La déclaration ministérielle parle de deux problèmes
essentiels : Préserver pour l'avenir la sécurité de la France;
sauvegarder son équilibre financier.
Au sujet des relations avec le Saint-Siège, elle annonce le
maintien auprès du Vatican d'un représentant hautement
qualifié. Sur la question d'Alsace et de Lorraine, elle
déclare que les malentendus s'àpaiseront.
Le robinet Painlevé s'est présenté
hier devant les Chambres et, sui-
vant l'usage, un débat politique 'l
suivi, au Palais-Bourbon, la lecture
de lri déclaration ministérielle.
On le verra plus loin, la séance
qui n'a pris fin qu'à une heure avan-
cée de la nuit il été très animée et
par moments tumultueuse.
Après diverses interventions, dont
celles de M. Painlevé. qui a briève-
ment r(¡pomw o'M.r intrrpellateurs de
M. Cailloux, qui (l donné quelques
explications sur ses projets finan-
ciers. et de M. Aristide Briand, qui.
répondant à M. Jean *F(ibr?l sur la
question de la sécurité: a affirmé que
le lWllVClIU gouvernement continue-
rait à l'extérieur la politique du rnï-
nistère Herriot. la bataille s'est eiiga-
gée sur la priorité demandée pour
l'ordre du jour de confiance déposé
(Ill nom des groupes du cartel des
OfJucJ¡rs. ordre du jour accepté par
M. Painlevé.
Le gouvernement l'a emporté par
304 voix contre 218, c'est-à-dire à la
majorité que nous avions prévue.
L'ordre dit. jour a été ensuite
adopté au fond.
LA SÉANCE
'Une ovation du cartet salue l'en;
trée de M., Herriot qui va Rasseoir à
nX.-J.nfnteut' de là •jta'tfelHV-au. unHeu
r:td ic ¡('a nx stffri'âiistirs";• vy,
Queuille et Bovier-Lapierre sont ses
voisins immédiats.
Mais une .clameur s'élève. Ce sont
les nouveaux ministres qui arrivent
par le couloir de gauche. En tête,
M. Painlevé qui tient à la main les
feuillets de la déclaration. Puis
M. Briand, M. Pierre Laval, M. Cail-
laux en jaquette, monocle à i'œil
droit, M. Schrameck, M. Antériou et
plusieurs sous-secrétaires d'Etat..
MM. Caillaux et Aristide Briand
prennent place aux côtés de M. Pain-
levé, au premier rang des bancs des
ministres. *
A droite, quelques cris hostiles ac-
cueillent l'entrée de M. Caillaux.
Nous demandons l'amnistie pour
Lenoir et Bolo! crie M. Bouteille.
Cette manifestation est de courte-
durée. D'un vigoureux coup de son-
neUe,-M. Fernand Bouisson, qui pré-
side, rétablit le, silence. Puis il
donne lecture d'une lettre par la-
quelle .\1. Painlevé, nommé président
du Conseil, déclare donner sa démis-
sion de président de la Chambre des
dénutés.
La lecture de la déclaration
M. Painlevé monte alors à la tribune
et lit la déclaration que nous pu-
blions d'autre part.. Des mouvements
divers ponctuent cette lecture.
Tout d'abord, quand le président du
Conseil rappelle les douloureux sa-
cri lices consentis par le pays pendant
la guerre, des cris éclatent, à droite :
— CaillauxI Caillaux!
Le nom du ministre des Finances
revient, d'ailleurs, fréquemment dans
les interruptions. M. Caillaux ne pa-
raît guère s'en soucier. On le voit
tapoter de la main son pupitre, tout
comme le fait souvent M. Aristide
Briand.
De vives protestations éclatent en-
core sur les bancs de la droite quand
M. Painlevé fait allusion au vœu des
associations d'anciens combattants.
M. Barillet, M. Michel Missoffe et
d'autres montrent alors M. Caillaux
au banc du gouvernement. On cons-
tate, d'autre part, une certaine ré-
serve sur les bancs radicaux et socia-
listes aux passages concernant la
représentation de la France auprès
du Vatican, l'application des lois
la'iqtiEs avec « autant de mesure que
de fermeté :Mais
la m eu or i té uu cai'tâî^së retrou vc-ïrour~
applaudir la fin de' la déclaration.
M. Fernand Bouisson donne lecture
des cinq demandes d'interpellation
déposées par MM. Cac.hin, Charles
Bertrand', Jean Goy et Taittinger.
Les interpellations
EL c'est la discussion immédiate.
M. Cachin déclare que ses amis et
lui- n'attendent absolument rien du
cabinet actuel.
,— Ni ce gouvernement, ni ses ■succes-
seurs ne réaliseront leur programme —
ils Je. savent. Ce que les communistes
veulent, c'est préparer un gouvernement
d'ouvriers et de paysans.
Plus loin, M. Cachin rappelle que
INI. Caillaux a connu, dans ces derniè-
res a'nnées, de prodigieux revers de
fortune et qu'il fut un temps où,
couvert d'outrages, il ne trouvait des
défenseurs que sur les hauteurs de
l'extrême gauche et parmi les prolé-
taires..
(Suite lre colonne page 3)
UN COIN DE LA SCENE DE L'ALHAMBRA APRES LE SINISTRE
Un incendie s'est déclaré, hier matin, à 3 heures, dans le théâtre de l'Alham-
bra, rue de Malte. La scène et les accessoires sont complètement détruits par
le feu, qui brûla pendant plus de deux heures. Le rideau de fer protégea heu-
reusement la salle : seuls, l'orchestre et les premiers rangs de fauteuils furent
endommagés. Les dégâts sont évalués à plusieurs centaines de mille francs,
et le théâtre restera fermé pendante plusieurs - semaines, pour les réparations.
M. PAINLEVE LISANT LA DECLARATION MINISTERIELLE A LA TRIBUNE DE LA CHAMBRE
M. STEEG A LA TRIBUNE DU SENAT
Sur cette photo de la séance que présidait M. Bouisson, on reconnaît : M. Briand (1), M. Caillaux (2), M. Pierre
Laval (3), M. Herriot (4), M. Malvy (5) et M. J.-L. Dumesnil (6). — Sur laphotographie de gauche, M. Steeg, vice-
président du Conseil, ministre de la Justice, lisant la déclaration à la tribune du Sénat.
LA DÉCLARATION MINISTÉRIELLE
Voici le texte de la déclaration mi-
nistérielle qui a été lue hier après-
,midi à la Chambre par M; Paul Pain-
,levé, -président 4lu -Gonseil,. ,et-, a'u
Sénat par M. Th. Steeg, garde des
sceaux :
Messieurs,
Le gouvernement qui se présente de-
vant vous se trouve, comme le gouver-
nement précédent, en face de deux
devoirs grandioses, pressants et lourds de
responsabilités ;
Préserver pour l'avenir la sécurité de
la France ;
Sauvegarder son équilibre financier.
En ce moment, devant ces deux pro-
blèmes, tous les autres, si importants
qu'ils soient, s'effacent.
Que sept ans après une guerre vicio-
rieuse, où il a consenti de si lourds, de si
héroïques,t de si douloureux sacrifices,
notre pays connaisse'les inquiétudes dont
il souffre actuellement, c'est pour lui une
amère désillusion, mais il veut regarder
la vérité en face.
Quelque sévères que soient les devoirs
qîl 'il titi faille assumer, il n'y sera point
inégal et saura déployer pour les rem-
plir la même énergie que sur les champs
de bataille.
L'espoir obstiné d'obtenir les répara-
tions que la justice exigeait, que l'opinion
réclamait après tant de ruines et de souf-
frances, mais que refusait la réalité, nous
a fait à plusieurs reprises rejeter le pos-
sible, que chaque relard diminuait en-
colle.
Mais, las des espérances illusoires, le
suffrage universel a fait connaUre sa
volonté qui, est souveraine : paix dans la
sécurité, dans le respect et le maintien
des traités ; stabilité économique dans un
régime de justice fiscale, voilà les deux
grandes aspirations qui se dégagent de la
dernière consultation du pays. Ce sont
elles qui ont orienté l'activité du dernier
gouvernement, ce sont elles qui doivent
orienter le notre.
A la double et lourde tâche qui s'im-
pose ainsi à nous, nous convions à colla-
borer tous les citoyens de France chez qui
le sentiment national parle plus haut que
les passions de partis ou les intérêts par-
ticuliers.
Politique extérieure
Dans les prochaines négociations inter-
nationales, le gouvernement poursuivra
le développement de l'exécution du plan
Dawes, en même temps que le règlement
lies dettes interalliées, qui pèsent si lour-
dement et sur Mo tre crédit. Mais, parv.tessus tout, il s'ef-
forcera de multifibkèf les. garanties de
paix et de sécurité entre- les peuples qui,
hier, se sont durement et courageusement
heurtés sur la ligne de feu.
Etroitement fidèle à tous ses alliés,
juste et pacifique envers toutes les naT.
lions, la France a le désir profond de
contribuer à donner au monde le repos
et la stabilité dont il a tant besoin. Mais
la première condition d'une paix stable,
c'est que la France soit elle-même en
sûreté.
Sécurité, arbitrage, désarmement, voilà
les trois conditions solidaires sur lesquel-
les repose le protocole de Genève, pre-
mière ébauche d'u?t grand pacte interna-
tional de paix.
Notre organisation militaire
L'heureuse solution de ces problèmes
extérieurs influerait largement sur l'allè-
gement et la rénovation de notre organi-
sation militaire, que le pays a énergique-
ment réclamés et que nous poursuivrons
et réaliserons de toute notre activité.
Politique financière
Un grand progrès a été réalisé le jour
où. le gouvernement qui nous a précédés
a courayeusement affirmé sa volonté de
revenir à la règle tutélaire de l'unité bud-
gétaire.
Le gouvernement qui est devant vous
lient pour le premier et le plus essentiel
de ses devoirs d'assurer le maintien inté-
gral de celle règle. En plein accord avec
le Parlement, il fera effort pour que ces
vues prévalent dans le budget de l'exer-
cice en cours. Il s'engage formellement à
ne présenter pour l'année 1926 qu'un
projet de budget où. toutes les dépenses
définitives de l'Etat, comprimées aussi
rigoureusement qu'il sera possible, seront
couvertes par l'impôt, aucune d'entre
elles ne devant plus désormais çtre im-
putée au Trésor.
Le fait qu'on a abusé du Trésor public
de tordes façons et sous mille formes, le
fait qu'on l'a alimenté par (les émissions
sans frein de valeurs à court et à très
court terme sont, les deux causes princi-
pales des, embarras actuels de l'Etat. "
Nous sommes persuadés que, soutenus
par les représentants du pays, prenant
appui sûr l'opinion publique, nous sur-
monterons les difficultés immédiates,
dont, nous tenons à le répéter, il ne faut
pas exagérer le péril.
Quand nous y serons parvenus, quand
nul ne pourra plus contester que nous
touchons au plein et définitif équilibre
budgétaire, nous nous appliquerons à (lé-
gager l'Etat des fonctions de banquier
qu'on lui a fait trop largement assumer
et il diminuer un passif insupportable
pour un grand pays qui veut, qui doit
avoir des finances libres et fortes.
Il nous faudra demander de larges sa-
crt/'!ces à la nation; nous en appellerons
au patriotisme de tous les citoyens. Sous
avons la conviction que, soucieux d'assu-
rer le cours des hautes destinées de la
France, et de servir l'intérêt général con-
fondu ici avec les intérêts, particuliers, ils
ne nous ménageront pas leur bonne vo-
lonté.
La politique avec le Vatican
Le maintien de l'équilibre financier,
sans lequel la ruine menacerait tous les
foyers, est à nos yeux essentiel ; il ré-
clame toute notre vigilance et nous im-
pose le devoir d'écarter tout débat qui
risquerait de, susciter des malentendus
irritants que des polémiques passionnées
pourraient chercher Ù. rendre irrépara-
bles.
C'est en ce sens qu'au sortir des dis-
cussions parlementaires sur Id relations
entre la République française et le Va-
tican, il est apparu qu'il convenait de
faire état à la fois des exigences de la
concorde nationale et des conditions dé-
licates de la politique mondiale pour
maintenir auprès du ralican un repré-
sentant hautement qualifié. Tous les
membres du gouvernement, quelles que
soient leurs convictions doctrinales, ont
été d'accord pour vous demander au
nom de l'intérêt général de ne pas rou-
vrir une controverse inopportune et dom-
mageable au crédit public.
Mais, si nous sommes respectueux (je
tontes les croyances et bien décidés à
éviter tout cc qui pourrait troubler les
consciences, n01lS restons indéfectible -
ment attachés à la législation laïque de
la République que, nous saurons faire
respecter en l'appliquant avec autant de
mCiwre. que cie fermeté.
L'Alsace et la Lorraine
Quant il l'Alsace et à la T,orraine re-
couvrées, elles sont trop chères à notre
cœur, le jour d'indicible joie où elles
ont été rendues à leur vraie patrie est
trop vivant dans notre souvenir pour que
(les malentendus, passionnés peut-être,
mais destinés- à s'apaiser, entraînent une
mésintelligence réelle entre elles et le
gouvernement. L'assimilation législative
ne salirait être poursuivie (que leurs re-
présentants en soient assurés!) qu'en-
tourée de tous les conseils qualifiés, dans
le respect des droits acquis, dans un
souci d'entente générale et d'unité natio-
nale.
Aucun Français n'ignore le pur et in-
vincible patriotisme des fils dll' Haut-
lUtin, du Bas-Rhin, de la Moselle et leurs
nobles traditions séculaires de liberté et
rie démocratie républicaines. N/nis som-
mes sûrs qu'ils entendront notre appel
fraternel, quand nous leur demanderons
(l'effacer ensemble et d'un commun ac-
corel, avec le concours cfu temps, les
traces d'un demi-siècle de douloureuse
sél)aratio?i. '.
Programme social
Si les soucis financiers que nous tra-
versons retardent pour un temps la réa-
lisation de réformes sociales trop coû-
teuses, ils ne sauraient faire obstacle aux
mesures démocratiques qui peuvent êlre
adoptées dès maintenant, sans grever le
budget. Ces mesures sont même indis-
pensables à cette atmosphère de' con-
corde dont nous parlions plus haut et à
laquelle ne sauraient participer les mas-
ses laborieuses, si elles se sentaient
comme oubliées par les pouvoirs pu-
blics, alors que la vie leur est si difficile.
Nous: hâterons devant le Sénat le vote
du projet de' loi des assurances sociales.
Nous assurerons la protection du droit
syndicat. Nous poursuivrons la réinté-
gration des cheminots, l'application
loyale de la loi (le huit heures, indis-
pensable garantie' du progrès (les classes
ouvrières ; la ratification des conven-
tions internationales ((Il travail de Wa-
shington et de Genève, ratification qui
donnera à la France une autorité morale
accrue dans le conseil des peuples. Nous
ne négligerons aucun de nos devoirs,
nous maintiendrons intacts les droits des
créanciers privilégiés de la nation, qui
ont payé sa victoire de leur chair et de
leur nll/(J. FI si le qouvernement :i rutlll-
ché au ministère des Finances les servi-
ces des régions libérées, c'est pour affir-
mer sa volonté de comprimer ail strict
minimum les dépenses administratives
et de consacrer à ceux qui attendent en-
core le règlement de leurs dommages,
petits sinistrés pour le plus grand nom-
bre, les ressources rendues disponibles
par une finance sévèrement contrôlée.
Pas d'atermoiements
Messieurs, les difficultés présentes,
quelque anxiété qu'elles nous causent, ne
doivent point nous faire oublier les iné-
puisai/les ressources de notre pays, ni
nous, rendre inquiets de son avenir. La
France a pour elle son sol, son climat, les
bras et le cerveau de ses enfants, son
équilibre, sa probité impeccable qu'au-
cune épreuve n'a jamais entamée, qu'au-
C1ln effort n'a jamais rebutée. Elle a pour
elle les France d'outre-mer, chaque jour
productrices plus abondantes et plus va-
riées de matières premières. Elle a pour
elle le prestige de son héroïsme et le
rayonnement de son génie, et cette admi-
rable unité nationale enfin reconstituée
dans son intégrité. Elle est comme un
navire magnifique et chargé de trésors,
mais dont la route pour un temps serait
semée d'écueils. Si vous nous croyez ca-
pables de tenir ferme la barre, faites-
nous crédit ; laissez-nous le temps d'agir ;
jugez-nous sur nos actes et sur leurs
résultats. Si. ati contraire, nous n'avons
pas voire confiance, remettez immédiate-
ment en d'autres mains le destin du pays,
car l'heure est de celles qui ne compor-
tent ni atermoiements ni délais. 1
M. BERTHÉLEMY RÉINTÉGRÉ
DANS SES FONCTIONS DE DOYEN
M. BERTHÉLEMY SORTANT DU MINIS-
TÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
En attendant sa réintégration dans
.ses fonctions de doyen, M. Berthé-
len/Y devait, hier matin, faire son
cours aux étudiants de deuxième
année. Une formidable ovation sa-
lua son arrivée à la Faculté. La ma-
nifestation se prolongea plus d'un
quart d'heure. Quand il eut ter-
miné son cours le doyen se rendit
au ministère de l'Instruction pu-
blique. Le nouveau ministre, M. de
Monzie, eut avec son ancien maître
une entrevue de vingt ?II in'll/es. au
cours de laquelle il lui promit de
le réintégrer oujfJurd' hui même
dans ses fonctions de doyen.
ON ARRÊTE L'AUTEUR DES DEUX CRIMES
COMMIS DANS LA FORÊT DE RAMBOUILLET
LES DEUX HOMMES TROUVES ASSASSINÉS EN MAI
ET NOVEMBRE DERNIER SONT IDENTIFIÉS
L'assassin, anarchiste condamné pour émission de
faux billets et insoumis, fait des aveux complets.
On se souvient de la découverte
qui fut faite dans la nuit du 10 au
11 mai dernier, dans la forêt de Ram-
bouillet, du cadavre nu d'un inconnu
tué à coups de revolver. Au mois de
novembre suivant, le cadavre d'un
autre inconnu, tué dans les mêmes
conditions, fut découvert dans la
même forêt, au lieudit « les Buttes-
Noires ». Toutes les recherches effec-
tuées jusqu'ici par les magistrats et
qui établissaient une corrélation en-
tre les deux assassinats, n'avaient
donné jusqu'ici aucun -résultat. - Et-
l'on pouvait penser que les deux af-
faires devaient être classées, quand,
samedi dernier, une personne attirait
l'attention de M. Barthélémy, com-
missaire aux délégations judiciaires,
sur les faits et gestes, d'un individu
déclarant se nommer Berthier et qui
occupait, 152, route de Malakofï, à
Montrouge, un pavillon occupé anté-
rieusement par un nommé M. Passet,
disparu en mai 192-4, et par un de
ses amis, également disparu en no-
vembre suivant. La coïncidence de
ces dates avec celles des macabres
découvertes faites à Rambouillet re-
tint l'attention de M. Barthélémy, qui
décida de procéder à une enquête. *
Le brigadier chef Ohollet, les ins-
pecteurs Holier, Burr et Gaucher
établirent une étroite surveillance
autour de l'individu signalé cf s'ef-
forcèrent de recueillir des renseigne-
ments précis sur lui dans le voisi-
nage de son domicile. /'
. C'est ainsi qu'ils apprirent que
c'est en 1917 que le pavillon du 152
de la route de Malakoff avait été
loué par un ébéniste d'art, disant se
nommer Passet, et qu'un de ses
amis, le locataire actuel, venait sou-
vent .voir. EiV 1Q24, Tébéniste
Ülsp.aru t'l brusquement; et ''s
ion demeura inoccupé. Peu après,
l'am i du disparu vint trouver J:.q:u'Q,.,
priétaire, Mme Lafl'ont, et lui dé-
clara •:
— Je suis M. Berthier que vous
avez certainement vu chez votre lo-
cataire, M. Passet. Celui-ci est parti
à la campagne. Il va prochainement
être opéré d'un cancer à l'estomac.
Le calme le plus absolu lui est né-
cessaire. C'est pourquoi il ne vous a
pas laissé son adressé. Ayez l'obli-
geance de me remettre sa correspon-
dance et je la lui ferai parvenir. »
Quelques semaines plus tard, le
prétendu « Berthier » vint s'instal-
ler dans le pavillon dont il régla
désormais régulièrement le loyer. Au
mois de septembre 1924, il confia a
la propriétaire que « son ami Pas-
set » lui avait cédé le bail. Il de-
manda de- renouveler ce bail à son
nom. Mais la propriétaire, peu con-
fiante, demanda un délai.
En octobre, il installa dans la mai-
son un ménage ami et se réserva, au
premier étage, une chambre qu'il
n occupait que de temps à autre.
Il exploitait le magasin que
M. Passet occupait auparavant, 3, rue
cF ¡\ rge'n eu il.
Au cours de l'enquête, les policiers
identifièrent ce prétendu Berthier.
Ils;.acquirent, en effet, la Certitude
qu'il n'était autre que Lucien-Henri
Rebuffé ou Rebuffet, âgé de vingt-.
neuf ans. anarchiste. militant assez
connu dans les milieux libertaires.
Il avait été arrêté en 1918 par l'ins-
pecte vtr principal Béthuel pour émis-
sion de fausses coupures de 5 fra'ncs.
Après sa peine de réclusion, Rebuffé,
appelé au service militaire, demeura
insoumis.
Les inspecteurs découvrirent en-
core que l'anarchiste avait longtemps
habité Rambouillet oÙ il avait été
élevé au lieudit « Le Pâtis », dans le
foyer anarchiste la Ruche, fondé par
Sébastien Faure. Enfin, au monie.it
de son arrestation, en 1918. il viVait
avec une jeune femme, Germaine R...
qui devint l'amie d'un autre anar-
chiste, Cou loii, -eniployé dans le ma-
gasin d'ébénisterie d'art du prétendu
Passet, 3. rue d'Argenteuil. Les po-
liciers apprirent il cette adresse que
Couton avait disparu quelques mois
après son patron.
L'arrestation
Dès lors, l'arrestation de l'insou-
mis fut, décidée. Dans la matinée de
lundi, un policier se rendit ri LI ma-
gasin de la rue d'Argenteuil. Et, sous
prétexte de marchander un meuble
à l'étatagp, il fit sortir de son ma-
gasin Rebuffé. Trois autres policiers
se jetèrent alors sur celui-ci et II)
maîtrisèrent, non sans difficulté. Il
fut arhené, à.'la poUce judiciaire. Son
ancienne amie, entendue par M. Bar-
lltél.emy, ; s'affirma très étonnée de
'n'àvoir jamais reçu de nouvelles de
Coulon, dont Ta disparition lui avait
toujours, paru suspecte, ainsi que
celle rde « Passet ».
Interrogé alors, Rebuffé expliqua
que son ami « Passct» était, lui
aussi, un anarchiste dont le vrai nOIl1
était Emile Moreau. Celui-ci était
un artisan habile et un Iidmme cul-
tivé. Obligé d'abandonner son maga-
sin, ce Moreau aurait. consenti à le
céder a Rebuffé, moyennant 7,000 fr.
Q'ùant à Coulon, Rebuffé expliquait
son silence par la jalousie que le
nouvel ami de Germaine R. mani-
festait à l'égard de son prédécesseur.
Ces explications parurent insuffi-
santes aux policiers. Lundi après-
midi, une perquisition fut décidée.
Dans la boutique de la rue d'Argen-
teuil, les inspecteurs découvrirent
deux journaux, l'un du 17 mai, l'autre
du 14 novembre, relatant la décou-
verte des deux cadavres dans la forêt,
LA RECONSTITUTION EN FORET DE RAMBOUILLET, HIER
En haut, Rebuffé (x) discutant avec les magistrats. En bas, l'assassin devant
l'étang dans lequel il prétend avoir jeté des vêtements d'une de ses victimes,
Moreau, et qui va être exploré aujourd'hui ; l'assassin y aurait aussi jeté le
revolver dont il s'était servi. Ses allégations paraissent d'ailleurs exactes, car
Rebuffé ne paraît pas avoir l'intention de discuter aucun des détails des crimes
qui lui sont reprochés. Dans le médaillon, Lucien-Henri Rebuffé.
La tolérance mutuelle est l'unique
remède aux erreurs qui pervertissent
Vesprit/des hommes d'un bout de
l'univers à l'autre.
VOLTAIRE.
Igme Année. ■— N- 5,245. ■— Pierre làtte, fondateur.
2 0 c. o et Seine-et-Marne. PARIS, 20, RUE D'ENGHIEN (Xme) -1 -1 -- 1 et Colonies 25"
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EN PAGE 6 22
NOS AVRIL 1925
ILLUSTRATIONS ~ Reine
Adr. télégr. : Excel.-Paris.— TéL : Gut. 02-73, 02-75, 15-00.
LE CABINET PAINLEVÉ S'EST PRESENTÉ HIER DEVANT LE PARLEMENT
PAR 304 VOIX CONTRE 218 LA CHAMBRE LUI A VOTÉ LA CONFIANCE
Le débat fut très mouvementé au Palais-Bourbon et le retour
de M. J. Caillaux au pouvoir provoqua de vives polémiques.
La déclaration ministérielle parle de deux problèmes
essentiels : Préserver pour l'avenir la sécurité de la France;
sauvegarder son équilibre financier.
Au sujet des relations avec le Saint-Siège, elle annonce le
maintien auprès du Vatican d'un représentant hautement
qualifié. Sur la question d'Alsace et de Lorraine, elle
déclare que les malentendus s'àpaiseront.
Le robinet Painlevé s'est présenté
hier devant les Chambres et, sui-
vant l'usage, un débat politique 'l
suivi, au Palais-Bourbon, la lecture
de lri déclaration ministérielle.
On le verra plus loin, la séance
qui n'a pris fin qu'à une heure avan-
cée de la nuit il été très animée et
par moments tumultueuse.
Après diverses interventions, dont
celles de M. Painlevé. qui a briève-
ment r(¡pomw o'M.r intrrpellateurs de
M. Cailloux, qui (l donné quelques
explications sur ses projets finan-
ciers. et de M. Aristide Briand, qui.
répondant à M. Jean *F(ibr?l sur la
question de la sécurité: a affirmé que
le lWllVClIU gouvernement continue-
rait à l'extérieur la politique du rnï-
nistère Herriot. la bataille s'est eiiga-
gée sur la priorité demandée pour
l'ordre du jour de confiance déposé
(Ill nom des groupes du cartel des
OfJucJ¡rs. ordre du jour accepté par
M. Painlevé.
Le gouvernement l'a emporté par
304 voix contre 218, c'est-à-dire à la
majorité que nous avions prévue.
L'ordre dit. jour a été ensuite
adopté au fond.
LA SÉANCE
'Une ovation du cartet salue l'en;
trée de M., Herriot qui va Rasseoir à
nX.-J.nfnteut' de là •jta'tfelHV-au. unHeu
r:td ic ¡('a nx stffri'âiistirs";• vy,
Queuille et Bovier-Lapierre sont ses
voisins immédiats.
Mais une .clameur s'élève. Ce sont
les nouveaux ministres qui arrivent
par le couloir de gauche. En tête,
M. Painlevé qui tient à la main les
feuillets de la déclaration. Puis
M. Briand, M. Pierre Laval, M. Cail-
laux en jaquette, monocle à i'œil
droit, M. Schrameck, M. Antériou et
plusieurs sous-secrétaires d'Etat..
MM. Caillaux et Aristide Briand
prennent place aux côtés de M. Pain-
levé, au premier rang des bancs des
ministres. *
A droite, quelques cris hostiles ac-
cueillent l'entrée de M. Caillaux.
Nous demandons l'amnistie pour
Lenoir et Bolo! crie M. Bouteille.
Cette manifestation est de courte-
durée. D'un vigoureux coup de son-
neUe,-M. Fernand Bouisson, qui pré-
side, rétablit le, silence. Puis il
donne lecture d'une lettre par la-
quelle .\1. Painlevé, nommé président
du Conseil, déclare donner sa démis-
sion de président de la Chambre des
dénutés.
La lecture de la déclaration
M. Painlevé monte alors à la tribune
et lit la déclaration que nous pu-
blions d'autre part.. Des mouvements
divers ponctuent cette lecture.
Tout d'abord, quand le président du
Conseil rappelle les douloureux sa-
cri lices consentis par le pays pendant
la guerre, des cris éclatent, à droite :
— CaillauxI Caillaux!
Le nom du ministre des Finances
revient, d'ailleurs, fréquemment dans
les interruptions. M. Caillaux ne pa-
raît guère s'en soucier. On le voit
tapoter de la main son pupitre, tout
comme le fait souvent M. Aristide
Briand.
De vives protestations éclatent en-
core sur les bancs de la droite quand
M. Painlevé fait allusion au vœu des
associations d'anciens combattants.
M. Barillet, M. Michel Missoffe et
d'autres montrent alors M. Caillaux
au banc du gouvernement. On cons-
tate, d'autre part, une certaine ré-
serve sur les bancs radicaux et socia-
listes aux passages concernant la
représentation de la France auprès
du Vatican, l'application des lois
la'iqtiEs avec « autant de mesure que
de fermeté :Mais
la m eu or i té uu cai'tâî^së retrou vc-ïrour~
applaudir la fin de' la déclaration.
M. Fernand Bouisson donne lecture
des cinq demandes d'interpellation
déposées par MM. Cac.hin, Charles
Bertrand', Jean Goy et Taittinger.
Les interpellations
EL c'est la discussion immédiate.
M. Cachin déclare que ses amis et
lui- n'attendent absolument rien du
cabinet actuel.
,— Ni ce gouvernement, ni ses ■succes-
seurs ne réaliseront leur programme —
ils Je. savent. Ce que les communistes
veulent, c'est préparer un gouvernement
d'ouvriers et de paysans.
Plus loin, M. Cachin rappelle que
INI. Caillaux a connu, dans ces derniè-
res a'nnées, de prodigieux revers de
fortune et qu'il fut un temps où,
couvert d'outrages, il ne trouvait des
défenseurs que sur les hauteurs de
l'extrême gauche et parmi les prolé-
taires..
(Suite lre colonne page 3)
UN COIN DE LA SCENE DE L'ALHAMBRA APRES LE SINISTRE
Un incendie s'est déclaré, hier matin, à 3 heures, dans le théâtre de l'Alham-
bra, rue de Malte. La scène et les accessoires sont complètement détruits par
le feu, qui brûla pendant plus de deux heures. Le rideau de fer protégea heu-
reusement la salle : seuls, l'orchestre et les premiers rangs de fauteuils furent
endommagés. Les dégâts sont évalués à plusieurs centaines de mille francs,
et le théâtre restera fermé pendante plusieurs - semaines, pour les réparations.
M. PAINLEVE LISANT LA DECLARATION MINISTERIELLE A LA TRIBUNE DE LA CHAMBRE
M. STEEG A LA TRIBUNE DU SENAT
Sur cette photo de la séance que présidait M. Bouisson, on reconnaît : M. Briand (1), M. Caillaux (2), M. Pierre
Laval (3), M. Herriot (4), M. Malvy (5) et M. J.-L. Dumesnil (6). — Sur laphotographie de gauche, M. Steeg, vice-
président du Conseil, ministre de la Justice, lisant la déclaration à la tribune du Sénat.
LA DÉCLARATION MINISTÉRIELLE
Voici le texte de la déclaration mi-
nistérielle qui a été lue hier après-
,midi à la Chambre par M; Paul Pain-
,levé, -président 4lu -Gonseil,. ,et-, a'u
Sénat par M. Th. Steeg, garde des
sceaux :
Messieurs,
Le gouvernement qui se présente de-
vant vous se trouve, comme le gouver-
nement précédent, en face de deux
devoirs grandioses, pressants et lourds de
responsabilités ;
Préserver pour l'avenir la sécurité de
la France ;
Sauvegarder son équilibre financier.
En ce moment, devant ces deux pro-
blèmes, tous les autres, si importants
qu'ils soient, s'effacent.
Que sept ans après une guerre vicio-
rieuse, où il a consenti de si lourds, de si
héroïques,t de si douloureux sacrifices,
notre pays connaisse'les inquiétudes dont
il souffre actuellement, c'est pour lui une
amère désillusion, mais il veut regarder
la vérité en face.
Quelque sévères que soient les devoirs
qîl 'il titi faille assumer, il n'y sera point
inégal et saura déployer pour les rem-
plir la même énergie que sur les champs
de bataille.
L'espoir obstiné d'obtenir les répara-
tions que la justice exigeait, que l'opinion
réclamait après tant de ruines et de souf-
frances, mais que refusait la réalité, nous
a fait à plusieurs reprises rejeter le pos-
sible, que chaque relard diminuait en-
colle.
Mais, las des espérances illusoires, le
suffrage universel a fait connaUre sa
volonté qui, est souveraine : paix dans la
sécurité, dans le respect et le maintien
des traités ; stabilité économique dans un
régime de justice fiscale, voilà les deux
grandes aspirations qui se dégagent de la
dernière consultation du pays. Ce sont
elles qui ont orienté l'activité du dernier
gouvernement, ce sont elles qui doivent
orienter le notre.
A la double et lourde tâche qui s'im-
pose ainsi à nous, nous convions à colla-
borer tous les citoyens de France chez qui
le sentiment national parle plus haut que
les passions de partis ou les intérêts par-
ticuliers.
Politique extérieure
Dans les prochaines négociations inter-
nationales, le gouvernement poursuivra
le développement de l'exécution du plan
Dawes, en même temps que le règlement
lies dettes interalliées, qui pèsent si lour-
dement et sur Mo
forcera de multifibkèf les. garanties de
paix et de sécurité entre- les peuples qui,
hier, se sont durement et courageusement
heurtés sur la ligne de feu.
Etroitement fidèle à tous ses alliés,
juste et pacifique envers toutes les naT.
lions, la France a le désir profond de
contribuer à donner au monde le repos
et la stabilité dont il a tant besoin. Mais
la première condition d'une paix stable,
c'est que la France soit elle-même en
sûreté.
Sécurité, arbitrage, désarmement, voilà
les trois conditions solidaires sur lesquel-
les repose le protocole de Genève, pre-
mière ébauche d'u?t grand pacte interna-
tional de paix.
Notre organisation militaire
L'heureuse solution de ces problèmes
extérieurs influerait largement sur l'allè-
gement et la rénovation de notre organi-
sation militaire, que le pays a énergique-
ment réclamés et que nous poursuivrons
et réaliserons de toute notre activité.
Politique financière
Un grand progrès a été réalisé le jour
où. le gouvernement qui nous a précédés
a courayeusement affirmé sa volonté de
revenir à la règle tutélaire de l'unité bud-
gétaire.
Le gouvernement qui est devant vous
lient pour le premier et le plus essentiel
de ses devoirs d'assurer le maintien inté-
gral de celle règle. En plein accord avec
le Parlement, il fera effort pour que ces
vues prévalent dans le budget de l'exer-
cice en cours. Il s'engage formellement à
ne présenter pour l'année 1926 qu'un
projet de budget où. toutes les dépenses
définitives de l'Etat, comprimées aussi
rigoureusement qu'il sera possible, seront
couvertes par l'impôt, aucune d'entre
elles ne devant plus désormais çtre im-
putée au Trésor.
Le fait qu'on a abusé du Trésor public
de tordes façons et sous mille formes, le
fait qu'on l'a alimenté par (les émissions
sans frein de valeurs à court et à très
court terme sont, les deux causes princi-
pales des, embarras actuels de l'Etat. "
Nous sommes persuadés que, soutenus
par les représentants du pays, prenant
appui sûr l'opinion publique, nous sur-
monterons les difficultés immédiates,
dont, nous tenons à le répéter, il ne faut
pas exagérer le péril.
Quand nous y serons parvenus, quand
nul ne pourra plus contester que nous
touchons au plein et définitif équilibre
budgétaire, nous nous appliquerons à (lé-
gager l'Etat des fonctions de banquier
qu'on lui a fait trop largement assumer
et il diminuer un passif insupportable
pour un grand pays qui veut, qui doit
avoir des finances libres et fortes.
Il nous faudra demander de larges sa-
crt/'!ces à la nation; nous en appellerons
au patriotisme de tous les citoyens. Sous
avons la conviction que, soucieux d'assu-
rer le cours des hautes destinées de la
France, et de servir l'intérêt général con-
fondu ici avec les intérêts, particuliers, ils
ne nous ménageront pas leur bonne vo-
lonté.
La politique avec le Vatican
Le maintien de l'équilibre financier,
sans lequel la ruine menacerait tous les
foyers, est à nos yeux essentiel ; il ré-
clame toute notre vigilance et nous im-
pose le devoir d'écarter tout débat qui
risquerait de, susciter des malentendus
irritants que des polémiques passionnées
pourraient chercher Ù. rendre irrépara-
bles.
C'est en ce sens qu'au sortir des dis-
cussions parlementaires sur Id relations
entre la République française et le Va-
tican, il est apparu qu'il convenait de
faire état à la fois des exigences de la
concorde nationale et des conditions dé-
licates de la politique mondiale pour
maintenir auprès du ralican un repré-
sentant hautement qualifié. Tous les
membres du gouvernement, quelles que
soient leurs convictions doctrinales, ont
été d'accord pour vous demander au
nom de l'intérêt général de ne pas rou-
vrir une controverse inopportune et dom-
mageable au crédit public.
Mais, si nous sommes respectueux (je
tontes les croyances et bien décidés à
éviter tout cc qui pourrait troubler les
consciences, n01lS restons indéfectible -
ment attachés à la législation laïque de
la République que, nous saurons faire
respecter en l'appliquant avec autant de
mCiwre. que cie fermeté.
L'Alsace et la Lorraine
Quant il l'Alsace et à la T,orraine re-
couvrées, elles sont trop chères à notre
cœur, le jour d'indicible joie où elles
ont été rendues à leur vraie patrie est
trop vivant dans notre souvenir pour que
(les malentendus, passionnés peut-être,
mais destinés- à s'apaiser, entraînent une
mésintelligence réelle entre elles et le
gouvernement. L'assimilation législative
ne salirait être poursuivie (que leurs re-
présentants en soient assurés!) qu'en-
tourée de tous les conseils qualifiés, dans
le respect des droits acquis, dans un
souci d'entente générale et d'unité natio-
nale.
Aucun Français n'ignore le pur et in-
vincible patriotisme des fils dll' Haut-
lUtin, du Bas-Rhin, de la Moselle et leurs
nobles traditions séculaires de liberté et
rie démocratie républicaines. N/nis som-
mes sûrs qu'ils entendront notre appel
fraternel, quand nous leur demanderons
(l'effacer ensemble et d'un commun ac-
corel, avec le concours cfu temps, les
traces d'un demi-siècle de douloureuse
sél)aratio?i. '.
Programme social
Si les soucis financiers que nous tra-
versons retardent pour un temps la réa-
lisation de réformes sociales trop coû-
teuses, ils ne sauraient faire obstacle aux
mesures démocratiques qui peuvent êlre
adoptées dès maintenant, sans grever le
budget. Ces mesures sont même indis-
pensables à cette atmosphère de' con-
corde dont nous parlions plus haut et à
laquelle ne sauraient participer les mas-
ses laborieuses, si elles se sentaient
comme oubliées par les pouvoirs pu-
blics, alors que la vie leur est si difficile.
Nous: hâterons devant le Sénat le vote
du projet de' loi des assurances sociales.
Nous assurerons la protection du droit
syndicat. Nous poursuivrons la réinté-
gration des cheminots, l'application
loyale de la loi (le huit heures, indis-
pensable garantie' du progrès (les classes
ouvrières ; la ratification des conven-
tions internationales ((Il travail de Wa-
shington et de Genève, ratification qui
donnera à la France une autorité morale
accrue dans le conseil des peuples. Nous
ne négligerons aucun de nos devoirs,
nous maintiendrons intacts les droits des
créanciers privilégiés de la nation, qui
ont payé sa victoire de leur chair et de
leur nll/(J. FI si le qouvernement :i rutlll-
ché au ministère des Finances les servi-
ces des régions libérées, c'est pour affir-
mer sa volonté de comprimer ail strict
minimum les dépenses administratives
et de consacrer à ceux qui attendent en-
core le règlement de leurs dommages,
petits sinistrés pour le plus grand nom-
bre, les ressources rendues disponibles
par une finance sévèrement contrôlée.
Pas d'atermoiements
Messieurs, les difficultés présentes,
quelque anxiété qu'elles nous causent, ne
doivent point nous faire oublier les iné-
puisai/les ressources de notre pays, ni
nous, rendre inquiets de son avenir. La
France a pour elle son sol, son climat, les
bras et le cerveau de ses enfants, son
équilibre, sa probité impeccable qu'au-
cune épreuve n'a jamais entamée, qu'au-
C1ln effort n'a jamais rebutée. Elle a pour
elle les France d'outre-mer, chaque jour
productrices plus abondantes et plus va-
riées de matières premières. Elle a pour
elle le prestige de son héroïsme et le
rayonnement de son génie, et cette admi-
rable unité nationale enfin reconstituée
dans son intégrité. Elle est comme un
navire magnifique et chargé de trésors,
mais dont la route pour un temps serait
semée d'écueils. Si vous nous croyez ca-
pables de tenir ferme la barre, faites-
nous crédit ; laissez-nous le temps d'agir ;
jugez-nous sur nos actes et sur leurs
résultats. Si. ati contraire, nous n'avons
pas voire confiance, remettez immédiate-
ment en d'autres mains le destin du pays,
car l'heure est de celles qui ne compor-
tent ni atermoiements ni délais. 1
M. BERTHÉLEMY RÉINTÉGRÉ
DANS SES FONCTIONS DE DOYEN
M. BERTHÉLEMY SORTANT DU MINIS-
TÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
En attendant sa réintégration dans
.ses fonctions de doyen, M. Berthé-
len/Y devait, hier matin, faire son
cours aux étudiants de deuxième
année. Une formidable ovation sa-
lua son arrivée à la Faculté. La ma-
nifestation se prolongea plus d'un
quart d'heure. Quand il eut ter-
miné son cours le doyen se rendit
au ministère de l'Instruction pu-
blique. Le nouveau ministre, M. de
Monzie, eut avec son ancien maître
une entrevue de vingt ?II in'll/es. au
cours de laquelle il lui promit de
le réintégrer oujfJurd' hui même
dans ses fonctions de doyen.
ON ARRÊTE L'AUTEUR DES DEUX CRIMES
COMMIS DANS LA FORÊT DE RAMBOUILLET
LES DEUX HOMMES TROUVES ASSASSINÉS EN MAI
ET NOVEMBRE DERNIER SONT IDENTIFIÉS
L'assassin, anarchiste condamné pour émission de
faux billets et insoumis, fait des aveux complets.
On se souvient de la découverte
qui fut faite dans la nuit du 10 au
11 mai dernier, dans la forêt de Ram-
bouillet, du cadavre nu d'un inconnu
tué à coups de revolver. Au mois de
novembre suivant, le cadavre d'un
autre inconnu, tué dans les mêmes
conditions, fut découvert dans la
même forêt, au lieudit « les Buttes-
Noires ». Toutes les recherches effec-
tuées jusqu'ici par les magistrats et
qui établissaient une corrélation en-
tre les deux assassinats, n'avaient
donné jusqu'ici aucun -résultat. - Et-
l'on pouvait penser que les deux af-
faires devaient être classées, quand,
samedi dernier, une personne attirait
l'attention de M. Barthélémy, com-
missaire aux délégations judiciaires,
sur les faits et gestes, d'un individu
déclarant se nommer Berthier et qui
occupait, 152, route de Malakofï, à
Montrouge, un pavillon occupé anté-
rieusement par un nommé M. Passet,
disparu en mai 192-4, et par un de
ses amis, également disparu en no-
vembre suivant. La coïncidence de
ces dates avec celles des macabres
découvertes faites à Rambouillet re-
tint l'attention de M. Barthélémy, qui
décida de procéder à une enquête. *
Le brigadier chef Ohollet, les ins-
pecteurs Holier, Burr et Gaucher
établirent une étroite surveillance
autour de l'individu signalé cf s'ef-
forcèrent de recueillir des renseigne-
ments précis sur lui dans le voisi-
nage de son domicile. /'
. C'est ainsi qu'ils apprirent que
c'est en 1917 que le pavillon du 152
de la route de Malakoff avait été
loué par un ébéniste d'art, disant se
nommer Passet, et qu'un de ses
amis, le locataire actuel, venait sou-
vent .voir. EiV 1Q24, Tébéniste
Ülsp.aru t'l brusquement; et ''s
ion demeura inoccupé. Peu après,
l'am i du disparu vint trouver J:.q:u'Q,.,
priétaire, Mme Lafl'ont, et lui dé-
clara •:
— Je suis M. Berthier que vous
avez certainement vu chez votre lo-
cataire, M. Passet. Celui-ci est parti
à la campagne. Il va prochainement
être opéré d'un cancer à l'estomac.
Le calme le plus absolu lui est né-
cessaire. C'est pourquoi il ne vous a
pas laissé son adressé. Ayez l'obli-
geance de me remettre sa correspon-
dance et je la lui ferai parvenir. »
Quelques semaines plus tard, le
prétendu « Berthier » vint s'instal-
ler dans le pavillon dont il régla
désormais régulièrement le loyer. Au
mois de septembre 1924, il confia a
la propriétaire que « son ami Pas-
set » lui avait cédé le bail. Il de-
manda de- renouveler ce bail à son
nom. Mais la propriétaire, peu con-
fiante, demanda un délai.
En octobre, il installa dans la mai-
son un ménage ami et se réserva, au
premier étage, une chambre qu'il
n occupait que de temps à autre.
Il exploitait le magasin que
M. Passet occupait auparavant, 3, rue
cF ¡\ rge'n eu il.
Au cours de l'enquête, les policiers
identifièrent ce prétendu Berthier.
Ils;.acquirent, en effet, la Certitude
qu'il n'était autre que Lucien-Henri
Rebuffé ou Rebuffet, âgé de vingt-.
neuf ans. anarchiste. militant assez
connu dans les milieux libertaires.
Il avait été arrêté en 1918 par l'ins-
pecte vtr principal Béthuel pour émis-
sion de fausses coupures de 5 fra'ncs.
Après sa peine de réclusion, Rebuffé,
appelé au service militaire, demeura
insoumis.
Les inspecteurs découvrirent en-
core que l'anarchiste avait longtemps
habité Rambouillet oÙ il avait été
élevé au lieudit « Le Pâtis », dans le
foyer anarchiste la Ruche, fondé par
Sébastien Faure. Enfin, au monie.it
de son arrestation, en 1918. il viVait
avec une jeune femme, Germaine R...
qui devint l'amie d'un autre anar-
chiste, Cou loii, -eniployé dans le ma-
gasin d'ébénisterie d'art du prétendu
Passet, 3. rue d'Argenteuil. Les po-
liciers apprirent il cette adresse que
Couton avait disparu quelques mois
après son patron.
L'arrestation
Dès lors, l'arrestation de l'insou-
mis fut, décidée. Dans la matinée de
lundi, un policier se rendit ri LI ma-
gasin de la rue d'Argenteuil. Et, sous
prétexte de marchander un meuble
à l'étatagp, il fit sortir de son ma-
gasin Rebuffé. Trois autres policiers
se jetèrent alors sur celui-ci et II)
maîtrisèrent, non sans difficulté. Il
fut arhené, à.'la poUce judiciaire. Son
ancienne amie, entendue par M. Bar-
lltél.emy, ; s'affirma très étonnée de
'n'àvoir jamais reçu de nouvelles de
Coulon, dont Ta disparition lui avait
toujours, paru suspecte, ainsi que
celle rde « Passet ».
Interrogé alors, Rebuffé expliqua
que son ami « Passct» était, lui
aussi, un anarchiste dont le vrai nOIl1
était Emile Moreau. Celui-ci était
un artisan habile et un Iidmme cul-
tivé. Obligé d'abandonner son maga-
sin, ce Moreau aurait. consenti à le
céder a Rebuffé, moyennant 7,000 fr.
Q'ùant à Coulon, Rebuffé expliquait
son silence par la jalousie que le
nouvel ami de Germaine R. mani-
festait à l'égard de son prédécesseur.
Ces explications parurent insuffi-
santes aux policiers. Lundi après-
midi, une perquisition fut décidée.
Dans la boutique de la rue d'Argen-
teuil, les inspecteurs découvrirent
deux journaux, l'un du 17 mai, l'autre
du 14 novembre, relatant la décou-
verte des deux cadavres dans la forêt,
LA RECONSTITUTION EN FORET DE RAMBOUILLET, HIER
En haut, Rebuffé (x) discutant avec les magistrats. En bas, l'assassin devant
l'étang dans lequel il prétend avoir jeté des vêtements d'une de ses victimes,
Moreau, et qui va être exploré aujourd'hui ; l'assassin y aurait aussi jeté le
revolver dont il s'était servi. Ses allégations paraissent d'ailleurs exactes, car
Rebuffé ne paraît pas avoir l'intention de discuter aucun des détails des crimes
qui lui sont reprochés. Dans le médaillon, Lucien-Henri Rebuffé.
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