Titre : Les Droits de l'homme / fondateur Henri Deloncle
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1899-09-08
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32759074m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 08 septembre 1899 08 septembre 1899
Description : 1899/09/08 (A2,N600). 1899/09/08 (A2,N600).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-5700
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 02/05/2016
DEUXIÈME ANNÉE. — 1* 600
VEMDPED! t SEPTEMBRE 1089—ih
S DROITS DE L’HOMME
•as — — — I - ordre et Frogrèa par la Révolution française
MUS : 1 an, 20 fr.; 6 mois, 10 fr.; 3 mois, 5 fr. 80
F RANC E ET ALGÉRIE: 1 an, 24 fr.; 6 mois, 13 fr.; 3 mois, 7 francs
ÉTRANGER 1 an, 35 fr.; 6 mois, 18 fr,; 3 mois, 10 francs
RÉDACTION ET ADMINISTRATION :
* 142 — Rue Montmartre — 142
US ANNONCES son REÇUES fBH H LAGRANGE, ŒU lî Ç®
6, place de la Bourse, 0, et aux Bureaux du Journal
LES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NB SONT PAS RENDUS
TÉLÉPHONE N- 101.81
Fin de l’audition des témoins
Etranglement tics débats
LE REQUISITOIRE DU COMMANDANT CARRIERE
Nous prions instamment nos cor-
respondants et lecteurs de nous
signaler tout retard qu’Ils éprou
veraient dans la réception du
journal, car toutes nos dispositions
sont prises pour qu’Il n’en sur
vienne aucun pouvant nous être
imputé.
La Séance
d'hier
La caractéristique de la séance
d’hier, c’est que la question du « Petit
Bleu » a été définitivement élucidée et
que le colonel Picquart sort vengé des
accusations portées de ce fait contre
lui.
L’authenticité du «Petit Bleu»n’est
pas niable. M.Trarieux l’a prouvée par
un argument topique. Lorsque Pic
quart voulut tendre un piège à Ester
hazy, que lit-il ? Il proposa de lui
adresser une lettre dans laquelle se
raient employés les termes mêmes du
« Petit Bleu », c’est-à-dire qu’il y se
rait question de la maison R. et qu’elle
serait signée C.
Pour agir ainsi, comme l’a fait jus
tement remarquer M. Trarieux, « il
fallait que le lieutenant-colonel Pic
quart eût lui-même la foi la plus abso
lue dans l’authenticité du « Petit
Bleu » ; car, autrement, sa conduite
eût été incompréhensible, la lettre
qu’il eût écrite eut été un logogriphe;
le commandant Esterhazy n’eût pu
rien y comprendre. »
C’est l’évidence même.
Mais les arguments les meilleurs ne
suffisent pas, nous le savons, à con
vaincre les irréductibles. Aussi leur
a-t-on opposé mieux : des faits.
Ces faits sont de deux ordres. Le
premier est la déclaration suivante du
général Zurlinden en réponse à une
question de M c Labori :
Je crois qu'en effet il a été constaté à
l’instruction Tavernier que le grattage a‘a
pas clé fait au moment où le « Petit Bleu •
est arrivé au ministère de la guerre et que,
par conéquent, il ne peut être attri-
Bue au lieutenant- colonel Pic-
quart. (Mouvement).
Le second fait se trouve dans cette
déclaration officielle de M. Paléologue
en réponse à une autre question du
vai 1 ut défenseur :
— Je ne puis que confirmer ce que vient
de ui e M° Labori, c’est-à-dire qu’il existe
une note constatant un entretien du minis-
affaires étrangères, M. Delcassé
avec l’ambassadeur d’Allemagne, dans le
quel entretien l’ambassa leur est venu affir
mer que le celonel de Schwarzkop-
peu reconnaissait avoir adressé au
cemmandant Esterhazy uu certsin
nembre de télégrammes, dits « pe-
tits bleus », qu’en ce qui concernait le
« Petit Bleu » dont il est question, il ne pou
vait affirmer l’avoir écrit lui-même, parce
qu’il ne l'avait pas vu, mais que, toutefois,
il était probable qu’il l’eût écrit. (Mouve
ment prolongé).
La cause est entendue, comme on
dit au Palais. Le «Petit Bleu» est
authentique; il a été adressé par l’at
taché mil.taire allemand à Esterhazy
qui était en relations avec lui.
Pour le rendre suspect, les ennemis
de Picquart, qui se trouvaient aussi
être justement ceux de la vérité, le
grattèrent après le départ du lieu
tenant-colonel du service des rensei
gnements. L’admirable soldat resta
onze mois sous les verrous pour expier
le crime des autres.
Après la démonstration éclatante
faite devant le conseil de guerre,
qu’importe la partialité du colonel
Jouaust dont se trouvent gênés les
gens de l’accusation eux-mêmes! La
vérité est irrésistible; elle balaye
comme des fétus de paille tous les
mauvais vouloirs têtus, toutes les ré
sistances obstinées.
M. Jouaust a reproché à M. Tra-
rieux d’avoir fait une plaidoirie au
lieu d’un témoignage, alors qu’il a
laissé accuser pendant des séances en
tières les généraux-procureurs, de
Mercier à Roget, et jusqu’aux simples
capitaines. Il suffit qu’on se dresse en
accusateur pour avoir le droit de par
ler, d’interrompre, de riposter tout à
son aise. En revanche, les témoins à
décharge se voient imposer silence.
M. de Fonds-Lamothe en sait quelque
chose.
Quant au colonel Picquart, il est
invité à ne faire aucune digression.
C’est un droit qui appartient aux
seuls généraux, paraît-il.
Que dire, d’autre part, du sans-
gêne cosaque avec lequel est traitée la
défense I C’est purement odieux. Me
Labori se voit brutalement fermer la
bouche dès qu’il pose une question
gênante pour les étoilés de l’accusa
tion.
Qu’importe, encore une fois. Plus
difficile à gravir est le calvaire qui
mène à la vérité et à la justice, plus
grande et plus magnifique sera la vic
toire fatale, nécessaire.
Deux mots sur la déposition de du
Paty lue à l’audience d’hier. J’y dé
coupe le passage suivant:
Le lendemain dimanche 7 octobre, je re
mis à M. le général Gonse une note dont les
conclusions étaient les suivantes :
« En résumé, malgré certaines dissei-
blances, il y a entre les deux écritures des
ressemblances suffisantes pour jus ifer
une expertise légale. »
Rien de plus.
Cette note établissait ma bonne foi ; elle
a disparu des archives de la see-
flou de statistique.
Remarquez-vous avec quel art sa
vant on a toujours su faire disparaî
tre les documents défavorables à
l’accusation, alors qu’on n’était pas en
peine, faute de pièces authentiques
contre Dreyfus, d’en fabriquer?
Et ce n’est pas un seul document de
du Paty qui a disparu. Un autre n’a
pas été retrouvé.
Cette mission (celle du 31 décembre 1894
auprès de Dreyfus), dit le témoin, a fait
l’objet d’une lettre au ministre, qui a été
lue devant le conseil par le général Mer
cier, et d’une note qui n’a pas été re
trouvée aux archives et qui constituait
un compte rendu détaillé.
Pourquoi cette note n’a-t-elle pas
été retrouvée? C’est sans doute que
sa production eût gêné les bourreaux
de Dreyfus. Elle eût constitué l’aveu
de quelque faux, de quelque machi
nation encore inédite.
C’est pour le même motif qu’ont
disparu : le commentaire du dossier
secret, le rapport Gonse-Wattine, la
feuille détachée du carnet de Lebrun-
Renault, le rapport de la préfecture
de police favorable à Dreyfus, la cir
culaire du 17 mai 1891, qui n’a été
livrée que tout récemment, etc., etc.
A mesure qu’une pièce authentique
disparaissait, un faux la remplaçait
dans le dossier. Azaïs aurait appelé
cela le système des compensations.
Judet se borne à dire que l’armée à le
droit de se défendre !
L’armée, est-il besoin de le répéter,
n’a rien à voir dans ces abominables
manœuvres; son honneur n’est pas
intéressé à ce qu’un innocent retourne
au bagne. Une cause qui a besoin de
faux et de machinations criminelles
pour triompher n’est pas, ne peut pas
être celle de l’armée française. Ceux
qui le disent sont des menteurs.
L. NARCELLIN.
GÉNÉALOGIE
Il se vante, le Cernuzky
D'être de maison souveraine.
Il descend, la chose est certaine
Mais saura-t-on jamais de qui ?
Lazarovitch, fils de Lazare,
Descend-il, narguant le Gotha,
De ce juif qui ressuscita ?
Par quel enchaînement bizarre
Se rattache-t-il au passé ?
D'où tombe sur nous ce bohème ?
D’où descend-il ? Obscur problème
Dont le monde est embarrassé —
A l’éclaircir je me hasarde —
Un jour, sans qu’on sache comment,
Pour se marier richement
il descendit... d’une mansarde,
On dit aussi — des malveillants —■
Que plus d’une fins, famélique
Le pauvre prince hypothétique
Descendit aux expédients.
Pour une trop forte incartade
il cessa d'être lieutenant,
Officier jadis, maintenant
il est descendu de son grade.
Enfin vidé, vanné, panne,
N’ayant plus même un nom à vendre
Tout ci l'heure on l’a vu descendre
Du dernier bateau de Quesnay.
GAUST.
LES ETRANGERS
Voici le dernier bulletin de santé de notre
directeur, M. Roger Danglar :
L’état du malade s’est considérablement
aggravé depuis hier et est presque déses
péré.
DE AL.BARRAN,
Dr Constant HILLEMAND,
Dr Levt.
D’un journal militariste cette insinuation
abominable contre un capitaine d’infante
rie de marine qui a eu le tort de contre
dire les affirmations intéressées du général
Mercier :
Est-il vrai que M. Freystatter, qui, à son
retour de Madagascar était ■ à quia », ait loué
un luxueux appartement en vue de donner des
fêtes cet hiver ?
C’est de plus en plus nous qui insultons
l’armée et qui détruisons, par nos attaques,
la confiance que les soldats doivent avoir
en leurs chefs.
La citation envoyée à MM. Schwarzkop-
peu et Panizzardi pour invoquer leurs
témoignages en faveur de la vérité, les
lettres adressées par M® Labori aux sou
verains d’Allemagne et d’Italie pour leur
demander d’aider par tous les moyens en
leur pouvoir la manifestation de cette
vérité, ont eu le talent de mettre en fureur
tous nos excellents nationalistes. Il est
cependant manifeste que c’est par eux, et
non par la défense, qu’a été introduit dans
cette affaire le témoignage de l’étranger que
l’accusation semble redouter si fort. Par un
scrupule que tous les gens délicats avaient
compris et apprécié, ni Dreyfus ni ses avocats
n’avaient fait appel au témoignage, cepen
dant si intéressant, de M. Conybeare et de
M. Cascila, pour ne citer que ceux-là. En
provoquant la déposition d’un ancien offi
cier de l’armée autrichienne, les amis de
M. Quesnay de Beaurepaire ont dissipé les
scrupules des défenseurs de Dreyfus : puis
que l’on admet que des étrangers viennent
plaider le pour, il est rationnel que d’au-
très étrangers soient admis à plaid» r le
contre : tous les distinguo les plus subtils
de M. Maurice Barres ne sauront l’empê
cher. Reste à savoir si les militaires à la
loyauté de qui l’on s’adresse répondront à
cet appel. D'aucuns assurent que non. C’est
possible après o it. Mais cela n’est pas dé
montré; et, pour tout dire, cela ne me pa
raît pas bien naturel. Il me semble en
effet monstreux que des nations mises
en cause ne saisissent point avec empres
sement, par simple raison d’humanité, de
charité chrétienne et aussi d’honnêteté,
toute occasion de dégager leur responsabi
lité. En laissant à nouveau commettre une
erreur judiciaire monstrueuse, elles ac
cepteraient,en effet, une sorte de compli
cité parfaitement définie. Je doute qu’elles
consentent bénévolement à charger leur
conscience d’une pareille responsabilité.
Ce qui me fait émettre une telle opinion,
c’est que ces nations viennent, depuis le
début du procès de Rennes, de faire preuve
à notre égard d’un désintéressement, d’une
magnanimité réellement sans exemple
dans les annales de la diplomatie.
Si l’on veut bien, en effet, réfléchir quel
que peu à ce qui s’est passé à Rennes, on
sera stupéfait de constater que pas un des
pays mis en cause n'ait protesté contre les
allégations dirigées contre lui. Les étran
gers ont compris que l’affaire Dreyfus,
grâce à la tournure qu’ont su lui donner
les politiciens, n’est pas une affaire ordi
naire. Iis laissent donc faire. Mais il est
cependant bien évident qu’il est des règles
internationales diplomatiques qu’on ne de
vrait pas violer impunément.
Les gouvernements allemand et italien,
par exemple, ont, dans des circonstances
solennelles, affirmé officiellement qu’ils
n’avaient jamais eu aucun rapport avec le
capitaine Dreyfus. Dans le procès intenté à
cet officier, dire publiquement qu’il a trahi
sa patrie au profit de l’un de ces deux
pays là, ce serait donc donner officielle
ment un éclatant démenti à leurs souve
rains.
Est il besoin de dire quelles seraient les
effroyables conséquences d’un acte aussi
irréfléchi ?...
Voilà pourquoi, dans les audiences publi
ques, on désigne M. Schwarzkoppen et M.
Panizzardi par des lettres de l’alphabet,
voilà pourquoi on appelle l’Allemagne et
l’Italie « des puissances étrangères ». Ce
sont là conventions qui ne trompent per
sonne, mais qui permettent de ne pas por
ter atteinte à la cordialité de nos relations
i plomatiques, pour mettre en doute leurs
déclarations, pour imposer des démentis à
leurs dires. Et l’étonnant commissaire du
gouvernement qu’est M. Carrière n’a pas
< ru devoir protester! A peine a-t-il fait
entendre une timide réserve quand M. Pi
cot, l’honorable membre de l’Institut, a fait
allusion a la pièce Schneider.
Qui contentera la gravité de pareilles
façons d’agir ? Tout le monde sait en effet
que, d’après la fiction diplomatique, les
ambassadeurs représentent réellementleurs
souverains. Un outrage proféré contre eux
passe onc au-dessus de leurs têtes pour
atteindre directement ces souverains. En
accusant de fausses déclarations et de
mensonges des agents officiellement accré
dités auprès de nous, nos bons champions
de l’Etat-Major ont donc tout simplement
insulté l’empereur d’Allemagne, le roi
d’Italie, l’empereur d’Autriche. Pour que
ces souver ins n’aient pas montré les dents,
exigé des excuses véritable s, demandé une
réparation solennelle, il faut qu’ils fassent
preuve en cette circonstance d’une singu
lière patience. Et rien ne démontre mieux
quel est Tardent désir qu’ont tous ces sou
verains de ne point troubler sous un vain
prétexte la paix européenne.
Mais, toutefois, on ne peut, on ne doit
point se dissimuler que la situation est dif
ficile et qu’il y a une certaine gêne en ce
moment dans nos relations extérieures.
Quelques incidents caractéristiques le dé
montrent. M. le comte de Wolkenstein-
Trotsburg, ambassadeur d’Autriche, prend
cet été, loin de nous, un congé d’une lon
gueur inusitée. La grande revue des troupes
allemandes à Strasbourg va être passée en
présence d’envoyés militaires de tous pays,
parmi lesquels la France seule ne sera pas
représentée. Et M. Delcassé est rentré pré
cipitamment, la semaine passée, de son
département de l’Ariège où il comptait de
meurer quelques jours
Ces difficultés, nous les devons à M. le
général Mercier, lequel nous a, de gaîté de
cœur, acculé à une situation qui n’est heu-
reusement que délicate, mais qu’un rien
pourrait rendre humiliante...
Si encore cela lui avait permis de satis
faire sa haine ou de servir utilement la
cause de l’Etat-Major, on pourrait peut-
être, sinon l’excuser, du moins le com
prendre... On ne saurait décidément jamais
trop dire à quel point cet homme aura été
criminel.
Paul MARION.
nis sur le sieur de Cernuzky. S’agirait-il du
même personnage?
J. 8.
LETTRE DE RENNES
accompagné du capitaine d’Attel, aver
lequel il avait d’excellentes relations. Je
donnerai, s’il y a lieu, d’autres précisions.
Monsieur le général Roget osera-t-il encore
prétendre que le commandant Forzinetti
n'a jamais connu le capitaine d’Attel?
MARIUS ADER.
ues.
Or. depuis un mois, ces relations ont été
dix fois a la veille d’être rompues. Et cela
par la faute de nos antirevisionnistes les
plus farouches. Le général Mercier, le gé
néral Roget, le capitaine Cuignet ne se sont
pas gênés pour prononcer des noms pro-
..près, pour mettre en cause des agents di-
Questions embarrassantes
De la première déposition de l’ex officier
autrichien Cernuzky, il ressort qu’il aurait
entendu nommer par un agent étranger
quatre officiers français, que cet agent dé-
signait comme acquis au service des ren
seignements de son pays.
L’un de ces officiers aurait été, selon le
témoin austro-serbe, le capitaine Dreyfus.
C’est très bien; mais n’importerait-il pas de
savoir les noms des trois autres officiers
qui trahissent?
Veut on les laisser opérer à leur aise,
puisqu’on n’a même pas profité de la pré
sence de Cernuzky pour avoir leur
nom ?
Le deuxième bureau, auquel ces noms
pourraient, au premier titre, être utiles est
pourtant amplement représenté à Rennes.
Pourquoi ce silence qui protège trois
traîtres ?
De deux choses l’une, ou les officiers de
l’Etat-Major considèrent la déposition de
leur témoin comme fausse, et n’accordant
aucune importance à ses dires, ils ne veu
lent pas l’embarrasser par une question à
laquelle il faut une réponse précise.
Ou bien, ils connaissent les traîtres et
sont désireux de les protéger de tous désa-
gréments.
H. By.
Lazarovitch ou Cernuzky?
On jugeait avant-hier à la 10e chambre
correctionnelle, un hongrois nommé Backi.
Il avait la connaissance, dans un café
u égayé » par un orchestre de tziganes, de
Mme la comtesse de Raime, née Pauline
Hallegon. Cette dame âgée de cinquante-
cinq ans, fut sensible à la Cour que lui fit
notre beau rasta. Grand seigneur, affligé
momentanément de revers de fortune, il
était sur le point de rentrer en possession
d’un riche héritage. Il mit aux pieds de la
respectable dame cet héritage et lui de
manda sa main.
Il avait eu soin, entre temps, de l’alléger
de quelques billets de mille francs. Puis,
un beau jour, comme la date fixée pour le
mariage approchait, notre homme disparut
11 a été
oubliant de laisser son adresse.
condamné par défaut à trois ans de pri
son.
Or ce Backi avait un complice. Voici ce
que Mme de Raime a déclaré à l’audience :
« En somme, si j’ai remis mon argent à
Backi, c’est par suite des manœuvres qu’il a
employées vis-à-vis de moi, et j’ai été vic
time d’une escroquerie au mariage.
• Un sieur Lazarovitch, ami de Backi, me ser
vait d’interprête et traduisait les lettres de
Backi. Il a filé lui-même en disant qu’il partait
pour Moscou. •
Lazarovitch, hongrois, tzigane ou bo
hème, austro-serbe ou moldovalaque, es
croc... Tout cela semble concorder bien fâ
cheusement avec les renseignements four-
Les témoins de
abois. Ils brûlent
ches. Ce matin, ils
Rennes, 6 septembre.
l’accusation sont aux
leurs dernières cartou
ont fait d nner Z irlin-
LA NOTE SLR MADAGASCAR
den et Billot. Je sais qu’ils gardent Mercier
en réserve pour le coup de la dernière
heure. On raconte à qui veut l’entendre
que Mercier a en poche un papier écra
sant. Les uns disent que c'est un document
original et authentique émanant de je ne
sais plus quel énorme personnage. Les au
tres prétendent que c’est la photographie
— la photographie unique— du bordereau
original, portant en marge des annotations
de l’empereur Guillaume lui-même. En
supposant que cette dernière hypothèse
soit la vraie, la chose ne prouverait pas
que le bordereau n’est pas d’Esterhazy. Je
souhaite, pour ma part, que le redoutable
Mercier laisse tomber sur nos têtes son
épée de Damoclès. Dreyfus étant innocent,
il n’y a pas à chercher, comme on dit, midi
à quatorze heures : le papier que Mercier
a dans sa poche est un nouveau faux, ou
bien, s’il est authentique, il est une nou
velle preuve de la culpabilité d’Esterhazy.
Dans les deux cas, n us ne pouvons, nous,
les auxiliaires de la justice et de la vérité,
que souhaiter et même réclamer à grands
cris la production au grand jour de l’au
dience du papier suprême du général Mer
cier. Nous en attendons l’exhibition avec
confiance et sérénité.
Donc, comme je le disais tout à l’heure,
seuls Zurlinden et Billot ont donné aujour-
d’hui. Giâceà Zurlinden, nous avons eu
l’intervention de M. Paléolog le, et de la
conversation qui s’est engagée entre le co
lonel Jouaust, M. Trarieux, Me Labori, M.
Paléologue et le général Zurlinden, il est
résulté ceci : il est prouvé officiellement
que le « Petit Bleu » — pour lequel Pic
quart a fait dix mois de prison préventive—
est une pièce absolument authentique,
adressée à Esterhazy parM. de Schwarzkop-
peu. Si, après cette constatation, approu-
vée par le général Zurlinden lui-même, les
juges du conseil de guerre de R unes ne
sont pas satisfaits, je me demande ce qu’il
faudra encore leur démontrer par a+5.
Le général Billot, lui, après «voir fui par
une sortie théâtrale quand on lui deman
dait pourquoi il avait laissé M. de Torcy
accepter un reçu d’Esterhazy pour la re
mise du « document libérât ur », a laissé
échapper une accusation qui a permis à
Labori et au capitaine Dreyfus de démas
quer les nouvelles batteries de l’Etat-Major.
Billot, le Billot du «Dreyfus légalement et
justement condamné» a cherché à insinuer
— lâchant Esterhazy dans une certaine me
sure — que Dreyfus et Esterhazy pouvaient
bien être complices. Cette nouvelle infamie
du misérable politicien Billot a fait bondir
l’accusé et ses défenseurs. Et, chose incon
cevable, le colonel Jouaust a refusé catégo
riquement à Labori de poser à ce sujet des
questions au général Billot. Il s’en est suivi
un violent incident, duquel il ne restera,
d’ailleurs, comme conséquences, que ceci :
l’accusation purement gratuite de Billot, la
protestation indignée de Labori et du capi
taine Dreyfus et l’incompréhensible partia
lité du colonel Jouaust. Les membres du
conseil de guerre jugeront.
Ils jugeront, aussi, de la goujaterie du
nommé Lauth, qui s’est conduit ce matin
comme un drôle et un misérable en appor
tant à la barre, grâce à la complaisance du
président — qui, je m’empresse de le dire,
a renvoyé Lauth à sa place dès qu’il a vu,
un peu trop tard, de quoi il s’agissait —
des insinuations infâmes sur le compte du
colonel Picquart en se mêlant aux affaires
de sa vie la plus intime. Le goujat Lauth,
qui est encore, et on a le droit de s’en
étonner, officier français et chevalier de la
Légion d’honneur, me fait l’effet d’avoir
des idées toutes spéciales sur ce que
M. Guilloutet appelait « le mur de la vie
rivée » et — à défaut d'autre chose — sur
es notions les plus élémentaires de la ga
lanterie française que nos officiers se pi
quent pourtant d’observer avec un scru
pule jaloux. Le public qui assistait à l’au
dience a, d’ailleurs, couvert de huées le
sieur Lauth.
Puisque j’en suis là, je m’en voudrais de
ne pas faire la lumière sur le cas d’un
autre des témoins de l'accusation. Il s’agit
— par hasard 1 du général Roget, qui, après
la déposition de l’honorable commandant
Forzinetti, avait prétendu établir que le
commandant Forzinetti ne connaissait pas
le capitaine d'Attel. Roget avait même dit
qu’étant à Alger, le capitaine d’Attel n’avait
aucune relation avec le commandant For-
zinetti. Il y a eu sur ce point, vous le sa
vez, la protestation énergique de Forzinetti,
et je n’y —— ' T ~ : ~ i nin ---
chose. J’i
nergique de Forzinetti,
reviens pas. Mais je sais autre
‘ai vu hier mon confrère Seyman,
avec qui j’ai eu à ce sujet une fort' inté-
ressante conversation. Il en résulte ceci :
au temps où le général Roget était à Alger,
le capitaine d’Attel y était aussi, attaché à
l’Etat-Major du général Delebecque, et le
commandant Forzinetti était directeur du
pénitencier militaire, à la même époque.
Seyman, qui était alors secrétaire de la
rédaction de VAkbar, a reçu souvent la
visite de son ami le commandant Forzi
netti, et celui-ci était Dresque toujours
Le colonel Audry a démontré hier par
A+B que la note sur Madagascar ne peut
être que la note établie par les délégués du
ministère de la guerre, de la marine, des
affaires étrangères et des colo des au com
mencement d’août 1891. Cette rote existant
en divers ministères, il serait facile de se
rendre compte de son importance au point
de vue materiel; nous savons que ce docu
ment forme un volume in-quarto de quel
ques centaines de pages. Il eût fallu plu
sieurs jours pour le copier.
Le colonel Aubry affirme, comme s’il le
savait, que c’est cette note qui a été livrée
par l’auteur du bordereau. Dans ce cas, le
traître aurait écrit, pour faire mousser sa
marchandise aux yeux de son correspon-
dant : « Note officielle établie par les délé-
gués des ministres en vue de l’expédition
de Madagascar. »
A lieu de cela, il a écrit simplement:
« Note sur Madagascar », sans plus.
Rappelons que personne ne connaît la
teneur des notes énumérées au bordereau.
Mieux: que personne ne peut dire si elles
ont été livrées.
Si elles ont été envoyées, elles sont pro
bablement sans valeur aucune. La seule
chose que l’on sache d’une façon positive,
c’est que le bordereau est de l’écriture
d’Esterhazy.
C’est vraiment insuffisant pour motiverla
condamnation de Dreyfus.
J.V.
LE PROCÈS
de Rennes
27% JOURNÉE
AVANT L'AUDIENCE
Rennes, 7 septembre.
Très peu de curieux ce matin auxabordt
du lycée.
L’audience était publique dès le début,
les témoins ne s'attardent pas et pénètrent
de suite dans le lycée.
Les généraux Mercier, de Boisdeffre,
Gonse, Roget arrivent successivement, ils
sont tous en uniforme.
Le commandant Lauth et le colonel Pic
quart pénétrèrent l’un derrière l’autre dans
le lycée.
A six heures trente tout le monde est d
peu près rentré et le vide se fait avenue d®
la Gare.
Max Régis A Rennes
Max Régis, l’ex-maire d'Alger, et Lionne,
conseiller municipal d’Alger, sont arrives
ce matin à qu tre heures à Rennes, M*
compagnés de deux de leurs amis.
L'AUDIENCE
La séance du conseil de guerre est ou*
verte à 6 heures AO, devant une salle archi"
comble.
Dès l’arrivée à sa place du capitaine
Dreyfus, le comm ssairc du gouvernemen
demande la parole.
L’austro-serbe malade
Le commandant Carrière annonce qu’la
reçu de M. Cernuzky une lettre lui annon"
çantque ce témoin, malade, est dans Iim
possibilité de se rendre devant le conse
de guerre, mais qu’il se tiendra à son 10"
à la disposition du conseil-
Incident Savignaud
Le greffier Coupois donne lecture d’une
requête du témoin Savignaud, qui prie
conseil de lui donner acte de ce que, *
cours de sa déposition, M. Trarieux I»
qualifie d’imposteur et do faux témoin
M. Trarieux. — Je demande la paroe.
Le commissaire du GOUVERNEMENT: 4
conseil n'a pas autre chose à faire que.
donner acte. Le conseil n’a pas à inter,,
nir dans ce débat, il n’a qu'à faire 1a C00
tatations des faits. s
M. Trarieux. — Je maintiens ce que.
dit : il existe entre M. Scheurer-Kestnen,
colonel Picquart, M. Roque et le tem?,
une contradiction qui implique uecessarn
ment que des faux témcins existent
côté ou de l’autre. " .
Le faux-témoin n’est pas M. Sche 4,
Kestner, ce n’est pas M. Roque, ce nestai
le colonel Picquart. Ce que j’ai dit, J®
dit en mon âme et couscience. Si “I 60
des lois qui me soient applicables,
existe aussi contre les faux témoins. _
. Le président. — Le conseil donne ason
témoin Savignaud que dans sa depoy
• otester d’abord
tiens à,RFe ane parole d
âme a n’a pas craint de s
moins 1 “as craint de dire
moin.. bour la r vision,
marchai ie avait foi dans
quicong marchait contre 1
PT è “atteste, il ne mec
trie, s as Labori; ni Me L
connais Pi, si ces paroles
moi vous 10 dire, !
ment.
. où, au choc des pas
Le jour i’ai vu se déchaîne
en fu re de f die qui souff
ce ' a 'ai connu à un mon
quand lrsn, tout ce que des
mis enFNorer, à aimer, nn
appris d D?? Ehbien ! oui!
als de sOuArances. (Mouveme
tes les. 2. j'avais toujours le
comme. «“blable, ia ou étai
vers’" dans le fond de me
celui que,v?, eh bien! oui,
étreu, ma[Justice divine n
mandéSustice humaine. Et ;
P ^^? j’ai écouté la voix de
ressaisar dit de marcher droi
elle."Messieurs, partager ni h
Sansars sans souci non plus
furem ' ‘ai fait mon dev
desofet et ce devoir veut qu
le O de iu-tice. (Mouvemen
reuyer als aie dire au debu
.gage entre M. le commissa
nement et moi
La situation juri
m* Demange, poursuivant
wciser la situation de 1 arc
P Lorsque le procès en rey
cacé Dreyfus était un condi
des 'présomptions graves
pour que la Cour de cassi
Aujourd’hui, devant voa
que la Cour de cassation You
c’est au ministère public a p
j pabilité. Qu’on ne nous repi
de n’avoir pas fait la preuve
de notre client : cette tache r
bait pas. C’est au commissail
nement à établir qu’il est
crime odieux qu’on lin impu
Me Demange proteste cor
rôle avancée qu'on voudra
Esterhazy par le conseil.
Non ! dit-il, les juges n’ont
entre Dreyfus et Esterhazy.
c’est que linnocei.ee de 1
raisse, éclatante, entière, e
proclamiez.
Ab l ilsétaient loyaux, les j
vous ne Têtes pas moins, et s
tion était faite, lorsqu’ils To
elle ne pouvait l'être que sur
et si à ce moment-là, ces jug
l’écriture d’Esterhazy sous les
raient jugé autrement qu’i
{Mouvements.)
Les protestations de 1
La situation juridique de
établie. M® Demange déclare■
céder maintenant comme il al
le faire toujours en matière ce
parlant tout de suite des ici
fournis sur l’accusé en 1894, l’I
cat dit que les seuls véritabl
qui soient absolument exacts,
que nous trouvons dans lâme avant même sa condaii.il
été son premier cri, en effet ?!
ne me tue pas, parce que 1
cent ! ■ I
Et, au Cherche-Midi, devant
dant Forzinetti, n'a-t-il pas t
teste de son innocence? I
Puis, après avoir donné ian
tlire de certains passages des ■
vantes adressées par le con
famille, M® Demange, dans ul
veinent oratoire. s’ecrie : Voi
cent de son âme! Seul dans se
il parle à lui-même. Il aval!
voir reconnaître son innocence
M® Demange rappelle le •
damne dans sa cellule, à las
Santé : « Dans trois ans, on!
mon innocence! » Et il explic
dans ses encouragements, dan
lations peut-être un peu trop M
de justice, que Dreyfus avait •
poir de justice pour l avenir, et
quoi, ému par les poignantes
capitaine Dreyfus, dont toute •
brisée, il n’avait pas pu ne pas
consolations. H
Lettres de Dreyful
Me Demange donne alors il
lettre dans laquelle le capitail
au milieu d’affirmations de so|
Duel Pressensé-B
Nous apprenons à la dernière
la rencontre entre MM. Barri"'
sensé aura lieu cette après-m
de Saint-Ouen, a trois heures. 1
L’arme choisie serait, affirme-
tolet de tir rayé; les conditie
balles échangées à vingt-cinq p:
mandement.
Rappelons que les témoins
M. Francis de Pressensé : M
Perrin et Ernest Vaughau ; po
rice Barrés : MM. Jean Syveton
teil. |
Léminent praticien, le Dr La|
Gîtera M. Francis de Pressensé.
DÉMENTI |
Plusieurs journaux ont annon
ait être pourvu au remplaceme’
ambassadeur à Vienne, M. le 1
keverseaux. I
Cette nouvelle est absolun
trouvée.
tu PROCES DE RE
I VINGT-HUITIEME AUDIENCE
I (De nos envoyés spéciau.
I Reprise de l’audienct
I Laudience est reprise à dix he|
• Demange reprend sa pla
' tare des preuves morales, en rod
ordre d’idées au jour même I
Wion de Dreyfus. |
a.examine, d’abord ce que fut
• dictée, imaginée par du Pat
Le rôle de du Paty I
. Demange retrace admirab
qu/? et le role joué par du Pa
rewaa culpabilité de Dreyfus lui
prsee par la trop grande puis
’ U sur lui-meme. 1
r dessus c'est la découvert de
k sanaille de D... » écrit par 1
reaneme a qui avait été adresse I
inseetc‘est, aussitôt, l’applicatio
Eale D... A Dreyfus. „ 1
plus Tors Du Paty a examiné Dre
prec.mme un prévenu, mais al
qu’il avait un coupabll
VEMDPED! t SEPTEMBRE 1089—ih
S DROITS DE L’HOMME
•as — — — I - ordre et Frogrèa par la Révolution française
MUS : 1 an, 20 fr.; 6 mois, 10 fr.; 3 mois, 5 fr. 80
F RANC E ET ALGÉRIE: 1 an, 24 fr.; 6 mois, 13 fr.; 3 mois, 7 francs
ÉTRANGER 1 an, 35 fr.; 6 mois, 18 fr,; 3 mois, 10 francs
RÉDACTION ET ADMINISTRATION :
* 142 — Rue Montmartre — 142
US ANNONCES son REÇUES fBH H LAGRANGE, ŒU lî Ç®
6, place de la Bourse, 0, et aux Bureaux du Journal
LES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NB SONT PAS RENDUS
TÉLÉPHONE N- 101.81
Fin de l’audition des témoins
Etranglement tics débats
LE REQUISITOIRE DU COMMANDANT CARRIERE
Nous prions instamment nos cor-
respondants et lecteurs de nous
signaler tout retard qu’Ils éprou
veraient dans la réception du
journal, car toutes nos dispositions
sont prises pour qu’Il n’en sur
vienne aucun pouvant nous être
imputé.
La Séance
d'hier
La caractéristique de la séance
d’hier, c’est que la question du « Petit
Bleu » a été définitivement élucidée et
que le colonel Picquart sort vengé des
accusations portées de ce fait contre
lui.
L’authenticité du «Petit Bleu»n’est
pas niable. M.Trarieux l’a prouvée par
un argument topique. Lorsque Pic
quart voulut tendre un piège à Ester
hazy, que lit-il ? Il proposa de lui
adresser une lettre dans laquelle se
raient employés les termes mêmes du
« Petit Bleu », c’est-à-dire qu’il y se
rait question de la maison R. et qu’elle
serait signée C.
Pour agir ainsi, comme l’a fait jus
tement remarquer M. Trarieux, « il
fallait que le lieutenant-colonel Pic
quart eût lui-même la foi la plus abso
lue dans l’authenticité du « Petit
Bleu » ; car, autrement, sa conduite
eût été incompréhensible, la lettre
qu’il eût écrite eut été un logogriphe;
le commandant Esterhazy n’eût pu
rien y comprendre. »
C’est l’évidence même.
Mais les arguments les meilleurs ne
suffisent pas, nous le savons, à con
vaincre les irréductibles. Aussi leur
a-t-on opposé mieux : des faits.
Ces faits sont de deux ordres. Le
premier est la déclaration suivante du
général Zurlinden en réponse à une
question de M c Labori :
Je crois qu'en effet il a été constaté à
l’instruction Tavernier que le grattage a‘a
pas clé fait au moment où le « Petit Bleu •
est arrivé au ministère de la guerre et que,
par conéquent, il ne peut être attri-
Bue au lieutenant- colonel Pic-
quart. (Mouvement).
Le second fait se trouve dans cette
déclaration officielle de M. Paléologue
en réponse à une autre question du
vai 1 ut défenseur :
— Je ne puis que confirmer ce que vient
de ui e M° Labori, c’est-à-dire qu’il existe
une note constatant un entretien du minis-
affaires étrangères, M. Delcassé
avec l’ambassadeur d’Allemagne, dans le
quel entretien l’ambassa leur est venu affir
mer que le celonel de Schwarzkop-
peu reconnaissait avoir adressé au
cemmandant Esterhazy uu certsin
nembre de télégrammes, dits « pe-
tits bleus », qu’en ce qui concernait le
« Petit Bleu » dont il est question, il ne pou
vait affirmer l’avoir écrit lui-même, parce
qu’il ne l'avait pas vu, mais que, toutefois,
il était probable qu’il l’eût écrit. (Mouve
ment prolongé).
La cause est entendue, comme on
dit au Palais. Le «Petit Bleu» est
authentique; il a été adressé par l’at
taché mil.taire allemand à Esterhazy
qui était en relations avec lui.
Pour le rendre suspect, les ennemis
de Picquart, qui se trouvaient aussi
être justement ceux de la vérité, le
grattèrent après le départ du lieu
tenant-colonel du service des rensei
gnements. L’admirable soldat resta
onze mois sous les verrous pour expier
le crime des autres.
Après la démonstration éclatante
faite devant le conseil de guerre,
qu’importe la partialité du colonel
Jouaust dont se trouvent gênés les
gens de l’accusation eux-mêmes! La
vérité est irrésistible; elle balaye
comme des fétus de paille tous les
mauvais vouloirs têtus, toutes les ré
sistances obstinées.
M. Jouaust a reproché à M. Tra-
rieux d’avoir fait une plaidoirie au
lieu d’un témoignage, alors qu’il a
laissé accuser pendant des séances en
tières les généraux-procureurs, de
Mercier à Roget, et jusqu’aux simples
capitaines. Il suffit qu’on se dresse en
accusateur pour avoir le droit de par
ler, d’interrompre, de riposter tout à
son aise. En revanche, les témoins à
décharge se voient imposer silence.
M. de Fonds-Lamothe en sait quelque
chose.
Quant au colonel Picquart, il est
invité à ne faire aucune digression.
C’est un droit qui appartient aux
seuls généraux, paraît-il.
Que dire, d’autre part, du sans-
gêne cosaque avec lequel est traitée la
défense I C’est purement odieux. Me
Labori se voit brutalement fermer la
bouche dès qu’il pose une question
gênante pour les étoilés de l’accusa
tion.
Qu’importe, encore une fois. Plus
difficile à gravir est le calvaire qui
mène à la vérité et à la justice, plus
grande et plus magnifique sera la vic
toire fatale, nécessaire.
Deux mots sur la déposition de du
Paty lue à l’audience d’hier. J’y dé
coupe le passage suivant:
Le lendemain dimanche 7 octobre, je re
mis à M. le général Gonse une note dont les
conclusions étaient les suivantes :
« En résumé, malgré certaines dissei-
blances, il y a entre les deux écritures des
ressemblances suffisantes pour jus ifer
une expertise légale. »
Rien de plus.
Cette note établissait ma bonne foi ; elle
a disparu des archives de la see-
flou de statistique.
Remarquez-vous avec quel art sa
vant on a toujours su faire disparaî
tre les documents défavorables à
l’accusation, alors qu’on n’était pas en
peine, faute de pièces authentiques
contre Dreyfus, d’en fabriquer?
Et ce n’est pas un seul document de
du Paty qui a disparu. Un autre n’a
pas été retrouvé.
Cette mission (celle du 31 décembre 1894
auprès de Dreyfus), dit le témoin, a fait
l’objet d’une lettre au ministre, qui a été
lue devant le conseil par le général Mer
cier, et d’une note qui n’a pas été re
trouvée aux archives et qui constituait
un compte rendu détaillé.
Pourquoi cette note n’a-t-elle pas
été retrouvée? C’est sans doute que
sa production eût gêné les bourreaux
de Dreyfus. Elle eût constitué l’aveu
de quelque faux, de quelque machi
nation encore inédite.
C’est pour le même motif qu’ont
disparu : le commentaire du dossier
secret, le rapport Gonse-Wattine, la
feuille détachée du carnet de Lebrun-
Renault, le rapport de la préfecture
de police favorable à Dreyfus, la cir
culaire du 17 mai 1891, qui n’a été
livrée que tout récemment, etc., etc.
A mesure qu’une pièce authentique
disparaissait, un faux la remplaçait
dans le dossier. Azaïs aurait appelé
cela le système des compensations.
Judet se borne à dire que l’armée à le
droit de se défendre !
L’armée, est-il besoin de le répéter,
n’a rien à voir dans ces abominables
manœuvres; son honneur n’est pas
intéressé à ce qu’un innocent retourne
au bagne. Une cause qui a besoin de
faux et de machinations criminelles
pour triompher n’est pas, ne peut pas
être celle de l’armée française. Ceux
qui le disent sont des menteurs.
L. NARCELLIN.
GÉNÉALOGIE
Il se vante, le Cernuzky
D'être de maison souveraine.
Il descend, la chose est certaine
Mais saura-t-on jamais de qui ?
Lazarovitch, fils de Lazare,
Descend-il, narguant le Gotha,
De ce juif qui ressuscita ?
Par quel enchaînement bizarre
Se rattache-t-il au passé ?
D'où tombe sur nous ce bohème ?
D’où descend-il ? Obscur problème
Dont le monde est embarrassé —
A l’éclaircir je me hasarde —
Un jour, sans qu’on sache comment,
Pour se marier richement
il descendit... d’une mansarde,
On dit aussi — des malveillants —■
Que plus d’une fins, famélique
Le pauvre prince hypothétique
Descendit aux expédients.
Pour une trop forte incartade
il cessa d'être lieutenant,
Officier jadis, maintenant
il est descendu de son grade.
Enfin vidé, vanné, panne,
N’ayant plus même un nom à vendre
Tout ci l'heure on l’a vu descendre
Du dernier bateau de Quesnay.
GAUST.
LES ETRANGERS
Voici le dernier bulletin de santé de notre
directeur, M. Roger Danglar :
L’état du malade s’est considérablement
aggravé depuis hier et est presque déses
péré.
DE AL.BARRAN,
Dr Constant HILLEMAND,
Dr Levt.
D’un journal militariste cette insinuation
abominable contre un capitaine d’infante
rie de marine qui a eu le tort de contre
dire les affirmations intéressées du général
Mercier :
Est-il vrai que M. Freystatter, qui, à son
retour de Madagascar était ■ à quia », ait loué
un luxueux appartement en vue de donner des
fêtes cet hiver ?
C’est de plus en plus nous qui insultons
l’armée et qui détruisons, par nos attaques,
la confiance que les soldats doivent avoir
en leurs chefs.
La citation envoyée à MM. Schwarzkop-
peu et Panizzardi pour invoquer leurs
témoignages en faveur de la vérité, les
lettres adressées par M® Labori aux sou
verains d’Allemagne et d’Italie pour leur
demander d’aider par tous les moyens en
leur pouvoir la manifestation de cette
vérité, ont eu le talent de mettre en fureur
tous nos excellents nationalistes. Il est
cependant manifeste que c’est par eux, et
non par la défense, qu’a été introduit dans
cette affaire le témoignage de l’étranger que
l’accusation semble redouter si fort. Par un
scrupule que tous les gens délicats avaient
compris et apprécié, ni Dreyfus ni ses avocats
n’avaient fait appel au témoignage, cepen
dant si intéressant, de M. Conybeare et de
M. Cascila, pour ne citer que ceux-là. En
provoquant la déposition d’un ancien offi
cier de l’armée autrichienne, les amis de
M. Quesnay de Beaurepaire ont dissipé les
scrupules des défenseurs de Dreyfus : puis
que l’on admet que des étrangers viennent
plaider le pour, il est rationnel que d’au-
très étrangers soient admis à plaid» r le
contre : tous les distinguo les plus subtils
de M. Maurice Barres ne sauront l’empê
cher. Reste à savoir si les militaires à la
loyauté de qui l’on s’adresse répondront à
cet appel. D'aucuns assurent que non. C’est
possible après o it. Mais cela n’est pas dé
montré; et, pour tout dire, cela ne me pa
raît pas bien naturel. Il me semble en
effet monstreux que des nations mises
en cause ne saisissent point avec empres
sement, par simple raison d’humanité, de
charité chrétienne et aussi d’honnêteté,
toute occasion de dégager leur responsabi
lité. En laissant à nouveau commettre une
erreur judiciaire monstrueuse, elles ac
cepteraient,en effet, une sorte de compli
cité parfaitement définie. Je doute qu’elles
consentent bénévolement à charger leur
conscience d’une pareille responsabilité.
Ce qui me fait émettre une telle opinion,
c’est que ces nations viennent, depuis le
début du procès de Rennes, de faire preuve
à notre égard d’un désintéressement, d’une
magnanimité réellement sans exemple
dans les annales de la diplomatie.
Si l’on veut bien, en effet, réfléchir quel
que peu à ce qui s’est passé à Rennes, on
sera stupéfait de constater que pas un des
pays mis en cause n'ait protesté contre les
allégations dirigées contre lui. Les étran
gers ont compris que l’affaire Dreyfus,
grâce à la tournure qu’ont su lui donner
les politiciens, n’est pas une affaire ordi
naire. Iis laissent donc faire. Mais il est
cependant bien évident qu’il est des règles
internationales diplomatiques qu’on ne de
vrait pas violer impunément.
Les gouvernements allemand et italien,
par exemple, ont, dans des circonstances
solennelles, affirmé officiellement qu’ils
n’avaient jamais eu aucun rapport avec le
capitaine Dreyfus. Dans le procès intenté à
cet officier, dire publiquement qu’il a trahi
sa patrie au profit de l’un de ces deux
pays là, ce serait donc donner officielle
ment un éclatant démenti à leurs souve
rains.
Est il besoin de dire quelles seraient les
effroyables conséquences d’un acte aussi
irréfléchi ?...
Voilà pourquoi, dans les audiences publi
ques, on désigne M. Schwarzkoppen et M.
Panizzardi par des lettres de l’alphabet,
voilà pourquoi on appelle l’Allemagne et
l’Italie « des puissances étrangères ». Ce
sont là conventions qui ne trompent per
sonne, mais qui permettent de ne pas por
ter atteinte à la cordialité de nos relations
i plomatiques, pour mettre en doute leurs
déclarations, pour imposer des démentis à
leurs dires. Et l’étonnant commissaire du
gouvernement qu’est M. Carrière n’a pas
< ru devoir protester! A peine a-t-il fait
entendre une timide réserve quand M. Pi
cot, l’honorable membre de l’Institut, a fait
allusion a la pièce Schneider.
Qui contentera la gravité de pareilles
façons d’agir ? Tout le monde sait en effet
que, d’après la fiction diplomatique, les
ambassadeurs représentent réellementleurs
souverains. Un outrage proféré contre eux
passe onc au-dessus de leurs têtes pour
atteindre directement ces souverains. En
accusant de fausses déclarations et de
mensonges des agents officiellement accré
dités auprès de nous, nos bons champions
de l’Etat-Major ont donc tout simplement
insulté l’empereur d’Allemagne, le roi
d’Italie, l’empereur d’Autriche. Pour que
ces souver ins n’aient pas montré les dents,
exigé des excuses véritable s, demandé une
réparation solennelle, il faut qu’ils fassent
preuve en cette circonstance d’une singu
lière patience. Et rien ne démontre mieux
quel est Tardent désir qu’ont tous ces sou
verains de ne point troubler sous un vain
prétexte la paix européenne.
Mais, toutefois, on ne peut, on ne doit
point se dissimuler que la situation est dif
ficile et qu’il y a une certaine gêne en ce
moment dans nos relations extérieures.
Quelques incidents caractéristiques le dé
montrent. M. le comte de Wolkenstein-
Trotsburg, ambassadeur d’Autriche, prend
cet été, loin de nous, un congé d’une lon
gueur inusitée. La grande revue des troupes
allemandes à Strasbourg va être passée en
présence d’envoyés militaires de tous pays,
parmi lesquels la France seule ne sera pas
représentée. Et M. Delcassé est rentré pré
cipitamment, la semaine passée, de son
département de l’Ariège où il comptait de
meurer quelques jours
Ces difficultés, nous les devons à M. le
général Mercier, lequel nous a, de gaîté de
cœur, acculé à une situation qui n’est heu-
reusement que délicate, mais qu’un rien
pourrait rendre humiliante...
Si encore cela lui avait permis de satis
faire sa haine ou de servir utilement la
cause de l’Etat-Major, on pourrait peut-
être, sinon l’excuser, du moins le com
prendre... On ne saurait décidément jamais
trop dire à quel point cet homme aura été
criminel.
Paul MARION.
nis sur le sieur de Cernuzky. S’agirait-il du
même personnage?
J. 8.
LETTRE DE RENNES
accompagné du capitaine d’Attel, aver
lequel il avait d’excellentes relations. Je
donnerai, s’il y a lieu, d’autres précisions.
Monsieur le général Roget osera-t-il encore
prétendre que le commandant Forzinetti
n'a jamais connu le capitaine d’Attel?
MARIUS ADER.
ues.
Or. depuis un mois, ces relations ont été
dix fois a la veille d’être rompues. Et cela
par la faute de nos antirevisionnistes les
plus farouches. Le général Mercier, le gé
néral Roget, le capitaine Cuignet ne se sont
pas gênés pour prononcer des noms pro-
..près, pour mettre en cause des agents di-
Questions embarrassantes
De la première déposition de l’ex officier
autrichien Cernuzky, il ressort qu’il aurait
entendu nommer par un agent étranger
quatre officiers français, que cet agent dé-
signait comme acquis au service des ren
seignements de son pays.
L’un de ces officiers aurait été, selon le
témoin austro-serbe, le capitaine Dreyfus.
C’est très bien; mais n’importerait-il pas de
savoir les noms des trois autres officiers
qui trahissent?
Veut on les laisser opérer à leur aise,
puisqu’on n’a même pas profité de la pré
sence de Cernuzky pour avoir leur
nom ?
Le deuxième bureau, auquel ces noms
pourraient, au premier titre, être utiles est
pourtant amplement représenté à Rennes.
Pourquoi ce silence qui protège trois
traîtres ?
De deux choses l’une, ou les officiers de
l’Etat-Major considèrent la déposition de
leur témoin comme fausse, et n’accordant
aucune importance à ses dires, ils ne veu
lent pas l’embarrasser par une question à
laquelle il faut une réponse précise.
Ou bien, ils connaissent les traîtres et
sont désireux de les protéger de tous désa-
gréments.
H. By.
Lazarovitch ou Cernuzky?
On jugeait avant-hier à la 10e chambre
correctionnelle, un hongrois nommé Backi.
Il avait la connaissance, dans un café
u égayé » par un orchestre de tziganes, de
Mme la comtesse de Raime, née Pauline
Hallegon. Cette dame âgée de cinquante-
cinq ans, fut sensible à la Cour que lui fit
notre beau rasta. Grand seigneur, affligé
momentanément de revers de fortune, il
était sur le point de rentrer en possession
d’un riche héritage. Il mit aux pieds de la
respectable dame cet héritage et lui de
manda sa main.
Il avait eu soin, entre temps, de l’alléger
de quelques billets de mille francs. Puis,
un beau jour, comme la date fixée pour le
mariage approchait, notre homme disparut
11 a été
oubliant de laisser son adresse.
condamné par défaut à trois ans de pri
son.
Or ce Backi avait un complice. Voici ce
que Mme de Raime a déclaré à l’audience :
« En somme, si j’ai remis mon argent à
Backi, c’est par suite des manœuvres qu’il a
employées vis-à-vis de moi, et j’ai été vic
time d’une escroquerie au mariage.
• Un sieur Lazarovitch, ami de Backi, me ser
vait d’interprête et traduisait les lettres de
Backi. Il a filé lui-même en disant qu’il partait
pour Moscou. •
Lazarovitch, hongrois, tzigane ou bo
hème, austro-serbe ou moldovalaque, es
croc... Tout cela semble concorder bien fâ
cheusement avec les renseignements four-
Les témoins de
abois. Ils brûlent
ches. Ce matin, ils
Rennes, 6 septembre.
l’accusation sont aux
leurs dernières cartou
ont fait d nner Z irlin-
LA NOTE SLR MADAGASCAR
den et Billot. Je sais qu’ils gardent Mercier
en réserve pour le coup de la dernière
heure. On raconte à qui veut l’entendre
que Mercier a en poche un papier écra
sant. Les uns disent que c'est un document
original et authentique émanant de je ne
sais plus quel énorme personnage. Les au
tres prétendent que c’est la photographie
— la photographie unique— du bordereau
original, portant en marge des annotations
de l’empereur Guillaume lui-même. En
supposant que cette dernière hypothèse
soit la vraie, la chose ne prouverait pas
que le bordereau n’est pas d’Esterhazy. Je
souhaite, pour ma part, que le redoutable
Mercier laisse tomber sur nos têtes son
épée de Damoclès. Dreyfus étant innocent,
il n’y a pas à chercher, comme on dit, midi
à quatorze heures : le papier que Mercier
a dans sa poche est un nouveau faux, ou
bien, s’il est authentique, il est une nou
velle preuve de la culpabilité d’Esterhazy.
Dans les deux cas, n us ne pouvons, nous,
les auxiliaires de la justice et de la vérité,
que souhaiter et même réclamer à grands
cris la production au grand jour de l’au
dience du papier suprême du général Mer
cier. Nous en attendons l’exhibition avec
confiance et sérénité.
Donc, comme je le disais tout à l’heure,
seuls Zurlinden et Billot ont donné aujour-
d’hui. Giâceà Zurlinden, nous avons eu
l’intervention de M. Paléolog le, et de la
conversation qui s’est engagée entre le co
lonel Jouaust, M. Trarieux, Me Labori, M.
Paléologue et le général Zurlinden, il est
résulté ceci : il est prouvé officiellement
que le « Petit Bleu » — pour lequel Pic
quart a fait dix mois de prison préventive—
est une pièce absolument authentique,
adressée à Esterhazy parM. de Schwarzkop-
peu. Si, après cette constatation, approu-
vée par le général Zurlinden lui-même, les
juges du conseil de guerre de R unes ne
sont pas satisfaits, je me demande ce qu’il
faudra encore leur démontrer par a+5.
Le général Billot, lui, après «voir fui par
une sortie théâtrale quand on lui deman
dait pourquoi il avait laissé M. de Torcy
accepter un reçu d’Esterhazy pour la re
mise du « document libérât ur », a laissé
échapper une accusation qui a permis à
Labori et au capitaine Dreyfus de démas
quer les nouvelles batteries de l’Etat-Major.
Billot, le Billot du «Dreyfus légalement et
justement condamné» a cherché à insinuer
— lâchant Esterhazy dans une certaine me
sure — que Dreyfus et Esterhazy pouvaient
bien être complices. Cette nouvelle infamie
du misérable politicien Billot a fait bondir
l’accusé et ses défenseurs. Et, chose incon
cevable, le colonel Jouaust a refusé catégo
riquement à Labori de poser à ce sujet des
questions au général Billot. Il s’en est suivi
un violent incident, duquel il ne restera,
d’ailleurs, comme conséquences, que ceci :
l’accusation purement gratuite de Billot, la
protestation indignée de Labori et du capi
taine Dreyfus et l’incompréhensible partia
lité du colonel Jouaust. Les membres du
conseil de guerre jugeront.
Ils jugeront, aussi, de la goujaterie du
nommé Lauth, qui s’est conduit ce matin
comme un drôle et un misérable en appor
tant à la barre, grâce à la complaisance du
président — qui, je m’empresse de le dire,
a renvoyé Lauth à sa place dès qu’il a vu,
un peu trop tard, de quoi il s’agissait —
des insinuations infâmes sur le compte du
colonel Picquart en se mêlant aux affaires
de sa vie la plus intime. Le goujat Lauth,
qui est encore, et on a le droit de s’en
étonner, officier français et chevalier de la
Légion d’honneur, me fait l’effet d’avoir
des idées toutes spéciales sur ce que
M. Guilloutet appelait « le mur de la vie
rivée » et — à défaut d'autre chose — sur
es notions les plus élémentaires de la ga
lanterie française que nos officiers se pi
quent pourtant d’observer avec un scru
pule jaloux. Le public qui assistait à l’au
dience a, d’ailleurs, couvert de huées le
sieur Lauth.
Puisque j’en suis là, je m’en voudrais de
ne pas faire la lumière sur le cas d’un
autre des témoins de l'accusation. Il s’agit
— par hasard 1 du général Roget, qui, après
la déposition de l’honorable commandant
Forzinetti, avait prétendu établir que le
commandant Forzinetti ne connaissait pas
le capitaine d'Attel. Roget avait même dit
qu’étant à Alger, le capitaine d’Attel n’avait
aucune relation avec le commandant For-
zinetti. Il y a eu sur ce point, vous le sa
vez, la protestation énergique de Forzinetti,
et je n’y —— ' T ~ : ~ i nin ---
chose. J’i
nergique de Forzinetti,
reviens pas. Mais je sais autre
‘ai vu hier mon confrère Seyman,
avec qui j’ai eu à ce sujet une fort' inté-
ressante conversation. Il en résulte ceci :
au temps où le général Roget était à Alger,
le capitaine d’Attel y était aussi, attaché à
l’Etat-Major du général Delebecque, et le
commandant Forzinetti était directeur du
pénitencier militaire, à la même époque.
Seyman, qui était alors secrétaire de la
rédaction de VAkbar, a reçu souvent la
visite de son ami le commandant Forzi
netti, et celui-ci était Dresque toujours
Le colonel Audry a démontré hier par
A+B que la note sur Madagascar ne peut
être que la note établie par les délégués du
ministère de la guerre, de la marine, des
affaires étrangères et des colo des au com
mencement d’août 1891. Cette rote existant
en divers ministères, il serait facile de se
rendre compte de son importance au point
de vue materiel; nous savons que ce docu
ment forme un volume in-quarto de quel
ques centaines de pages. Il eût fallu plu
sieurs jours pour le copier.
Le colonel Aubry affirme, comme s’il le
savait, que c’est cette note qui a été livrée
par l’auteur du bordereau. Dans ce cas, le
traître aurait écrit, pour faire mousser sa
marchandise aux yeux de son correspon-
dant : « Note officielle établie par les délé-
gués des ministres en vue de l’expédition
de Madagascar. »
A lieu de cela, il a écrit simplement:
« Note sur Madagascar », sans plus.
Rappelons que personne ne connaît la
teneur des notes énumérées au bordereau.
Mieux: que personne ne peut dire si elles
ont été livrées.
Si elles ont été envoyées, elles sont pro
bablement sans valeur aucune. La seule
chose que l’on sache d’une façon positive,
c’est que le bordereau est de l’écriture
d’Esterhazy.
C’est vraiment insuffisant pour motiverla
condamnation de Dreyfus.
J.V.
LE PROCÈS
de Rennes
27% JOURNÉE
AVANT L'AUDIENCE
Rennes, 7 septembre.
Très peu de curieux ce matin auxabordt
du lycée.
L’audience était publique dès le début,
les témoins ne s'attardent pas et pénètrent
de suite dans le lycée.
Les généraux Mercier, de Boisdeffre,
Gonse, Roget arrivent successivement, ils
sont tous en uniforme.
Le commandant Lauth et le colonel Pic
quart pénétrèrent l’un derrière l’autre dans
le lycée.
A six heures trente tout le monde est d
peu près rentré et le vide se fait avenue d®
la Gare.
Max Régis A Rennes
Max Régis, l’ex-maire d'Alger, et Lionne,
conseiller municipal d’Alger, sont arrives
ce matin à qu tre heures à Rennes, M*
compagnés de deux de leurs amis.
L'AUDIENCE
La séance du conseil de guerre est ou*
verte à 6 heures AO, devant une salle archi"
comble.
Dès l’arrivée à sa place du capitaine
Dreyfus, le comm ssairc du gouvernemen
demande la parole.
L’austro-serbe malade
Le commandant Carrière annonce qu’la
reçu de M. Cernuzky une lettre lui annon"
çantque ce témoin, malade, est dans Iim
possibilité de se rendre devant le conse
de guerre, mais qu’il se tiendra à son 10"
à la disposition du conseil-
Incident Savignaud
Le greffier Coupois donne lecture d’une
requête du témoin Savignaud, qui prie
conseil de lui donner acte de ce que, *
cours de sa déposition, M. Trarieux I»
qualifie d’imposteur et do faux témoin
M. Trarieux. — Je demande la paroe.
Le commissaire du GOUVERNEMENT: 4
conseil n'a pas autre chose à faire que.
donner acte. Le conseil n’a pas à inter,,
nir dans ce débat, il n’a qu'à faire 1a C00
tatations des faits. s
M. Trarieux. — Je maintiens ce que.
dit : il existe entre M. Scheurer-Kestnen,
colonel Picquart, M. Roque et le tem?,
une contradiction qui implique uecessarn
ment que des faux témcins existent
côté ou de l’autre. " .
Le faux-témoin n’est pas M. Sche 4,
Kestner, ce n’est pas M. Roque, ce nestai
le colonel Picquart. Ce que j’ai dit, J®
dit en mon âme et couscience. Si “I 60
des lois qui me soient applicables,
existe aussi contre les faux témoins. _
. Le président. — Le conseil donne ason
témoin Savignaud que dans sa depoy
• otester d’abord
tiens à,RFe ane parole d
âme a n’a pas craint de s
moins 1 “as craint de dire
moin.. bour la r vision,
marchai ie avait foi dans
quicong marchait contre 1
PT è “atteste, il ne mec
trie, s as Labori; ni Me L
connais Pi, si ces paroles
moi vous 10 dire, !
ment.
. où, au choc des pas
Le jour i’ai vu se déchaîne
en fu re de f die qui souff
ce ' a 'ai connu à un mon
quand lrsn, tout ce que des
mis enFNorer, à aimer, nn
appris d D?? Ehbien ! oui!
als de sOuArances. (Mouveme
tes les. 2. j'avais toujours le
comme. «“blable, ia ou étai
vers’" dans le fond de me
celui que,v?, eh bien! oui,
étreu, ma[Justice divine n
mandéSustice humaine. Et ;
P ^^? j’ai écouté la voix de
ressaisar dit de marcher droi
elle."Messieurs, partager ni h
Sansars sans souci non plus
furem ' ‘ai fait mon dev
desofet et ce devoir veut qu
le O de iu-tice. (Mouvemen
reuyer als aie dire au debu
.gage entre M. le commissa
nement et moi
La situation juri
m* Demange, poursuivant
wciser la situation de 1 arc
P Lorsque le procès en rey
cacé Dreyfus était un condi
des 'présomptions graves
pour que la Cour de cassi
Aujourd’hui, devant voa
que la Cour de cassation You
c’est au ministère public a p
j pabilité. Qu’on ne nous repi
de n’avoir pas fait la preuve
de notre client : cette tache r
bait pas. C’est au commissail
nement à établir qu’il est
crime odieux qu’on lin impu
Me Demange proteste cor
rôle avancée qu'on voudra
Esterhazy par le conseil.
Non ! dit-il, les juges n’ont
entre Dreyfus et Esterhazy.
c’est que linnocei.ee de 1
raisse, éclatante, entière, e
proclamiez.
Ab l ilsétaient loyaux, les j
vous ne Têtes pas moins, et s
tion était faite, lorsqu’ils To
elle ne pouvait l'être que sur
et si à ce moment-là, ces jug
l’écriture d’Esterhazy sous les
raient jugé autrement qu’i
{Mouvements.)
Les protestations de 1
La situation juridique de
établie. M® Demange déclare■
céder maintenant comme il al
le faire toujours en matière ce
parlant tout de suite des ici
fournis sur l’accusé en 1894, l’I
cat dit que les seuls véritabl
qui soient absolument exacts,
que nous trouvons dans lâme avant même sa condaii.il
été son premier cri, en effet ?!
ne me tue pas, parce que 1
cent ! ■ I
Et, au Cherche-Midi, devant
dant Forzinetti, n'a-t-il pas t
teste de son innocence? I
Puis, après avoir donné ian
tlire de certains passages des ■
vantes adressées par le con
famille, M® Demange, dans ul
veinent oratoire. s’ecrie : Voi
cent de son âme! Seul dans se
il parle à lui-même. Il aval!
voir reconnaître son innocence
M® Demange rappelle le •
damne dans sa cellule, à las
Santé : « Dans trois ans, on!
mon innocence! » Et il explic
dans ses encouragements, dan
lations peut-être un peu trop M
de justice, que Dreyfus avait •
poir de justice pour l avenir, et
quoi, ému par les poignantes
capitaine Dreyfus, dont toute •
brisée, il n’avait pas pu ne pas
consolations. H
Lettres de Dreyful
Me Demange donne alors il
lettre dans laquelle le capitail
au milieu d’affirmations de so|
Duel Pressensé-B
Nous apprenons à la dernière
la rencontre entre MM. Barri"'
sensé aura lieu cette après-m
de Saint-Ouen, a trois heures. 1
L’arme choisie serait, affirme-
tolet de tir rayé; les conditie
balles échangées à vingt-cinq p:
mandement.
Rappelons que les témoins
M. Francis de Pressensé : M
Perrin et Ernest Vaughau ; po
rice Barrés : MM. Jean Syveton
teil. |
Léminent praticien, le Dr La|
Gîtera M. Francis de Pressensé.
DÉMENTI |
Plusieurs journaux ont annon
ait être pourvu au remplaceme’
ambassadeur à Vienne, M. le 1
keverseaux. I
Cette nouvelle est absolun
trouvée.
tu PROCES DE RE
I VINGT-HUITIEME AUDIENCE
I (De nos envoyés spéciau.
I Reprise de l’audienct
I Laudience est reprise à dix he|
• Demange reprend sa pla
' tare des preuves morales, en rod
ordre d’idées au jour même I
Wion de Dreyfus. |
a.examine, d’abord ce que fut
• dictée, imaginée par du Pat
Le rôle de du Paty I
. Demange retrace admirab
qu/? et le role joué par du Pa
rewaa culpabilité de Dreyfus lui
prsee par la trop grande puis
’ U sur lui-meme. 1
r dessus c'est la découvert de
k sanaille de D... » écrit par 1
reaneme a qui avait été adresse I
inseetc‘est, aussitôt, l’applicatio
Eale D... A Dreyfus. „ 1
plus Tors Du Paty a examiné Dre
prec.mme un prévenu, mais al
qu’il avait un coupabll
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