Titre : Les Droits de l'homme / fondateur Henri Deloncle
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1898-09-15
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32759074m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 septembre 1898 15 septembre 1898
Description : 1898/09/15 (A1,N248). 1898/09/15 (A1,N248).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6817432x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-5700
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 02/05/2016
< —29/
“,4.
JEUDI 15 SEPTEMBRE 1898 ‘2.
PREMIÈRE ANNÉE. — T 248
Le Numéro : CINQ centimes
ES DROITS DE L’HOM
Ordre et progrès par la Révolution Française
ABONNEMENTS
PARIS
J an 20 •
6 mois 10 ■
3 mois 5 50
FRANCE ET ALGÉRIE
1 an 24
6 mois 13
3 mois 7
ÉTRANGER et union postale
• 1 an 35 •
» 6 mois..AS •
• 3 mois. 1O »
RÉDACTION ET ADMINISTRATION :
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LES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NE SONT PAS RENDUS
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L'ÉTAPE
Mesurons l’étape parcourue depuis
un an... La vérité a marché, certes!
mais par quels chemins hérissés d'em-
bûches et d’obstacles, et combien fut
pénible son ascension vers la lumière,
vers la conscience des foules !
Le bilan de nos efforts est facile à
recapituler, — on le dressait hier, ici
même. Le commandant Esterhazy, la
Hulan national en qui se personnifie
ce que, durant de si longs mois d’irri
tantes polémiques, l’on dénomma
« l’honneur de l’armée », le traître,
enfin, l’auteur du bordereau de 1894,
est mis en reforme. Le voici disparu
de la scène, a la veille de se suicider
moralement par l’aveu suprême ou par
la fuite, selon qu'à l’instant psycholo-
gique de ses ultimes résistances il sera
plus ou moins protégé encore par
ceux-là qui, d’une abominable et cri
minelle complicité, couvrirent jusqu’à
ce jour ses stupres odieux. Le colonel
Henry, à son tour conscient de son in
famie, abandonné à la fatalité de
ses hontes par les chefs dont il avait
servi l’abjection et souligné par ses
faux les desseins perfides, dans l’hor
reur de sa chute, s’est fait à lui-
même bonne et prompte justice. Ce
héros n’a pas eu le courage d’at
tendre le châtiment de son crime,
il a préféré l’expiation sourde du ra
soir lil orateur. Le colonel du Paty de
Clam, cet autre faussaire, scribe in
fernal biseautant des dépêches, ingé
nieux faiseur de dames voilées, pilier
de vespasiennes et automate grotes-
que du petit doigt sur la couture du
pantalon, est mis en non-activité par
retrait d’emploi, échappant ainsi par
une douce mesure disciplinaire à de
plus sévères, mais plus équitables vin
dictes. M. Godefroy Cavaignac et le
général Le Mouton de Boisdeffre, l’un
ci-devant ministre de la guerre, l’autre
ci-devant chef d’Etat-Major général
de l’armée, ont mis la clef sous la
porte, qu’ils firent claquer en s’en al
lant, — et puis, bonsoir!
Et c’est tout. C’est un succès, sans
doute, un succès appréciable, mais
non point une victoire. Félicitons-
nous du résultat dès à présent acquis
comme du fruit savoureux de cette
propagande énergique et tenace que
nous avons menée sans défaillance et
sans faiblesse contre les crimes de
l’Etat-Major. Mais ne triomphons
point encore! Nous ne sommes pas
au bout de nos efforts, et si l’étape
parcourue nous a approchés du but à
atteindre, il nous reste, hélas! du
chemin à faire, beaucoup de chemin,
avant d’abattre victorieusement toutes
les puissances de réaction coalisées
contre le droit et la justice.
Sommes-nous donc prophètes de
malheur?
Nous souhaiterions que l’heure du
triomphe sonnât plus tôt que nous ne
l’osons espérer; mais à la minute pré
cise où nous sommes, il serait dange
reux de trop s’accoutumer à de falla-
cieuses illusions. A peine avons-nous
l’avantage de quelques escarmouches
ou notre stratégie fut heureuse; nous
n'avons encore, à la vérité, gagné
nulle bataille sérieuse. L’ennemi cou
che sur ses positions, encore qu’il ait
perdu quelques unités de combat dans
les premières bagarres ; il nous faut
le déloger de là, devant que la victoire
vienne enfin récompenser la fortune
de nos armes.
A vrai dire, nous ne désespérons
point d’aboutir. L’opinion naguère
rebelle nous est enfin clémente. La
lumière a lui dans les cerveaux obscurs
ou Es excitations du chauvinisme
‘ troit et des haines farouches avaient
passionnément accumulé d’épaisses
ténèbres. La conscience publique s’est
ressaisie; les esprits républicains, tou
jours épris des généreuses doctrines
de la Révolution et des saines tradi
tions de justice, nous sont revenus,
indignés des mystères de mensonges
et de calomnies qu’ils soupçonnent à
travers les légendes dont on fit peser
sur eux le sombre et tragique cauche-
mar. Grâce à cette admirable et si èlo-
Quente campagne de lumière et de
raison, où s’affirma le talent sincère
e puissant des Zola, des Jaurès, des
. menceau, des Trarieux, des Urbain
johier et de tant d’autres que gui-
•Tem les premières révélations de
ernard Lazare, preturcour des im-
entes réparations, ce paye de
France sait aujourd’hui, à n’en
plus douter, qu’une monstrueuse ini
quité de justice fut commise par le
premier Conseil de Guerre de 1891
contre l’infortuné capitaine Dreyfus.
Ils demeurent bien rares ceux qui
doutent encore de l’innocence du
martyr de file du Diable et des turpi
tudes de la coterie réactionnaire de
l’Etat-Major; — ceux-là, du moins,
qui sont de bonne foi, estiment que la
révision est devenue nécessaire, iné
vitable, fatale !
Mais il reste à vaincre des résistan
ces toujours puissantes, liguées contre
la vérité, embusquées au détour des
pouvoirs publics contre la justice mé
connue et violée. C’est le syndicat des
vrais coupables, le syndicat de trahi
son, celui-là! qui se dresse de toutes
ses forces contre le code de révision,
dont les ministres du cabinet Brisson
essayent timidement d’entr’ouvrir les
feuillets. Le lieutenant-colonel Geor
ges Picquart, cet honnête homme si
clairvoyant, demeure incarcéré, — et
n’est-il point piquant d’observer en
passant (pie jamais, parmi la solitude
d’une détention imméritée, il ne son
gea à se couper la gorge avec un ra
soir, encore que sa carrière soit mo
mentanément brisée et qu’on le dise
si coupable?
C’est le privilège des consciences
droites de ne point faiblir devant les
vicissitudes de la vie. — Emile Zola
continue de vivre cet armistice d’exil
que prochainement il rompra, pour
venir répondre devant la justice de
ses accusations si précises, que vé
rifient les incidents d’hier. D’autres
qui furent frappés de disgrâce pour
leur passion d’humanité, pour leur
idéal de justice, n’ont point bénéficié
de la moindre amnistie administrative,
— lès Grimaux, les Stapfer et autres
protestataires du droit et de la liberté
de conscience.
Enfin, celui que l’injustice des
hommes condamna au martyre le plus
effroyable qui se puisse imaginer, le
malheureux déporté de file du Diable
continue de jeter à travers l’espace,
par delà l’immensité de l’Océan, son
cri de captif innocent, ses poignants
appels à la pitié humaine !
Non, nous ne triomphons point
encore. La révision nous est promise,
mais du bout des lèvres ministérielles.
Cavaignac démissionnaire, le général
Zurlinden s’est substitué à lui pour
reprendre à son compte personnel sa
revision du dossier, par laquelle il
entend s’opposer à la révision judi
ciaire, la seule qui importe en l’occur
rence. Et Son Excellence Félix Faure,
le président soliveau, chez qui la
crainte de Drumont est le co:mence-
ment de la sagesse, intervient à son
tour et profère ce veto : pas de révi
sion ! Songez donc, il faudrait accor
der à la conscience publique l’exécu
tion des coupables, etZurlinden, après
avoir promis d’agir avec décision,
zèle et loyauté, refuse maintenant de
s’atteler à la dernière charrette, où se
confondraient côte à côte les Lauth
et les Gribelin, les du Paty de Clam,
les Gonse, les Boisdeffre et les Mer
cier. Le prestige de l'Etat-Major, ce
prestige nécessaire au dogme du res
pect de l’armée et de l’infaillibilité des
Conseils de guerre, s’évanouirait, tel
un mauvais rêve, sous le mépris de
l’opinion! Il n’y faut point songer..
Telle est l’étape parcourue. Repre
nons haleine, et en route vers la vraie
bataille. Le but est là. Sus à l’Etat-
Major !
MARCEL HUART.
P- S. — A un correspondant : Merci,
mon Te. C.. F/., pour les renseignements
précieux que vous me communiquez. Je les
utiliserai certainement un jour. Observez
toutefois que je n’ai point témoigné le re
gret que le général Brugère n’eût point été
nommé. J’ai constaté seulement que deux
officiers supérieurs, dont lui, étaient dési
gnés à la succession du général de Boisdef
fre, et que, par surcroît de sûreté, on a fait
choix d'un troisième, le général Renouard,
qui n’était, lui, nullement désigné à recueil
lir cet héritage. Entre cette simple constata
tion et un regret que je n'ai point exprimé,
il y a une nuance que vous méditerez.
M. H.
mux= ==
Les DROITS DE L'HOMME publie-
rout demain l'article de
PIERRE BERTRAND
Le ministre de la guerre a-t-il porté
son attention sur les graves faits que
nous lui signalions il y a quelques jours?
L’incident du faux représentant le co
lonel Picquart en conversation avec le
colonel de Schwartzkoppen, l’a-t-on élu-
cidé au ministère?
Nous attendons des réponses.
P. L.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ
Aujourd'hui,
Mercredi 1% septembre 1898,
M. Félix Faure étant président de la Ré
publique et M. Henri Brisson étant prési
dent du conseil des ministres,
LE LIEUTENANT-COLONEL
Georges PICQUART
accomplit son 64e jour de prison préven
tive pour avoir demandé que justice soit
rendue à un officier français injustement
et illégalement condamné et pour avoir
dénoncé au gouvernement de la Républi
que le faux dont le lieutenant-colonel
Henry, chef du service des renseigne
ments au ministère de la guerre, s’est re
connu coupable.
B I JL IW
Plusieurs de nos confrères ont repro
duit le bilan que nous avons dressé
hier; quelques-uns ont bien voulu le
compléter ; reprenons
1 0 Colonel
2° Commandant Esterhazy .
3° Colonel Henry
4° Général de Boisdeffre.. •
6° Cavaignac.
6° Colonel du Paty de Clam
7° Général Gonse
8° Besson d’Ormescheville .
9° Pauffin de Saint-Morel..
10° Commandant Lauth....
donc :
Mort fou;
Mis en réforme et disparu;
Arrêté et suicidé ;
Démissionnaire ;
Démissionnaire ;
Mis en non-activité;
En disgrâce ;
En disgrâce ;
En disgrâce ;
En disgrâce.
Peut-être en avons-nous encore oublié.
POLITIQUE
Nous attendons depuis dix-huit
mois, nous attendrons bien encore
jusqu’à samedi. C’est samedi que le
ministère Brisson prendra ses résolu
tions définitives. Nous avons la con
fiance qu’elles seront dignes de lui.
Mais il ne s’agit pas de nous : il s’agit
de celui qui attend la justice et la vé
rité dans les tourments et qui fut con
damné sans savoir pourquoi ; il s’agit
de la République et du pays.
Quand on a la certitude d’être dans
l’illégalité et qu’on s’appelle le gou
vernement de la France, a-t-on le
droit d’y rester une heure de plus ?
Nous avons sans doute une bien
faible idée de ce qui s’est passé depuis
quinze jours dans l’opinion du pays,
dans l’âme des foules.
Quand on apprit coup sur coup ces
nouvelles étonnantes : l’arrestation et
le suicide d’Henry, la démission du
général de Boisdeffre, la retraite de
M. Cavaignac, la mise en réforme
d’Esterhazy, la mise en non activité
par retrait d’emploi, du colonel du
Paty de Clam, l’éloignement de plu
sieurs autres, rendus en hâte à leurs
garnisons, toutes ces chutes, tous ces
écroulements, que s’est-il passé chez
ces milliers d’âmes simples et loyales
qu’on avait abusées ?
En elles aussi se lit un écroulement
que nous ne pouvons pas nous figurer.
Au premier moment, ce fut une dou
leur aiguë. Puis, de là, naquit la vo-
lont, la volonté désormais intraitable
de savoir la vérité, toute la vérité.
J’ai rencontré ici un de mes amis de
province qui m’a dépeint en quelques
mots cette crise de son esprit, com
ment pendant plusieurs jours il ne
pût retrouver le sommeil, il sentait
autour de son front un cercle de feu ;
je vous assure que c’était pathétique.
Et il y en a ainsi par toute la France
des milliers et des milliers. Aujour
d’hui tous veulent la vérité, la vérité
au grand jour, la vérité quand même;
nulle puissance au monde ne serait
capable de les empêcher d’avoir la
vérité. Et déjà ils se la créent à eux-
mêmes dans leur conscience, ils
disent : « Oui, maintenant j’en suis
certain, Dreyfus a été injustement
condamné! »
Quelle stupidité sans nom pour les
politiciens, pour des chefs de gouver
nement, d’avoir répété pendant qua
tre années au peuple : « justement et
légalement condamné ! » Alors que les
uns n’avaient absolument aucune
preuve de ce qu’ils avançaient et que
les autres avaient la preuve du con
traire ! Ils se sont cruellement joués de
la France.
Le président de la République est
aujourd’hui en présence de l’armée, il
en est le chef : qu’il sache voir ce
qu’il y a dans ce grand spectacle, au-
delà de l’éclat des armes et des splen
dides apparences! Qu’il songe à l’his-
toire ! Qu’il se rappelle combien mal
reuses sont les armées qui tombent
aux mains des intrigants et des ambi
tieux ! Qu’il nous revienne samedi
pour coopérer loyalement avec ses
ministres, et autant qu’il lui appar
tient, au rétablissement de la vérité et
des lois! Là est le salut.
HECTOR DEPASSE
CHRONIQUE
COUP DE SOLEIL
Par quelle monstrueuse aberration
l’homme qui vient de livrer son nom à la
vindicte universelle en frappant lâchement
une inoffensive princesse, a-t-il cru servir en
rien la cause maudite qu’il avait embrassée ?
A examiner froidement le fait comme un
théoricien pourrait le tenter, on ne trouve
qu’imbécillité, là où on aurait souhaité ren
contrer quelque héroïque coup de folie. Et
s’il ne répugnait dans une aussi triste occur
rence de se souvenir— malgré le deuil—de
la boutade d’un homme d’esprit on pourrait
appliquer à cet assassinat repoussant le mot
bien connu du prince de Talleyrand : < C’est
plus qu’un crime, c’est une faute.»
Certains publicistes, en effet, avaient
réussi en exploitant un reste de chevalerie à
faire excuser, quelquefois même à glorifier
les attentats stupides des propagandistes par
le fait. Grâce à d'ingénieux sophismes, ces
virtuoses du crime ont entretenu dans le
public un état d’esprit dangereux par son
indifférence même devant ce que plusieurs
considèrent simplement comme des meurtres
politiques. Mais qu’est-ce que la politique
peut avoir de commun avec cette malheu
reuse reine dont le principal souci était de
s’en éloigner. D’un naturel peu fait pour sup
porter les exigences de l’étiquette de cour,
d’une intelligence cultivée et que les petis
côtés de la grandeur effrayaient, elle vécut
en dehors des agitations du pouvoir et loin
de la fréquentation des puissants. Toujours
à la recherche de quelque spectacle nouveau
par lequel la nature devait la distraire des
malheurs qui depuis sa plus tendre enfance
ont fondu sur elle, elle fut sur la fin de sa
vie, amoureuse seulement de l’Art et l’admi
ratrice convaincue de tous ceux qui le ser
vaient.
Peut-être même avec cette ampleur
d’idées, cette absence de préjugés qui la
caractérisaient heureusement, avec ce pen
chant inné à célébrer la Beauté en elle-
même — que ce fut dans l’acte aussi bien
que dans la pensée — se laissa-t-elle aller
à quelque indulgence pour les théories hu
manitaires si dangereuses lorsque des fous
prennent le soin de les appliquer.
Ce crime n’a pas d’excuses, si tant est
qu’un crime en puisse jamais avoir. On avait
pu écrire que pour ces propagandistes illu
minés, frapper haut c’était frapper fort :
mais si aveugle que puisse être le cou
teau pour ceux-là même qui s’appuient sur
de semblables aphorismes, il eût dû respec
ter le sein d’une femme. Les femmes, en
effet, avaient jusqu’alors ce privilège qu’on
les laissât en dehors des luttes sombres et
des rouges représailles. En frappant l'une
d’elles, l’Italien a rompu le pacte, et l’aberra-
tion même à laquelle il faut recourir pour
trouver le mobile de ce forfait si lâche et si
bas, explique mais n’absout pas.
Le misérable s’est ôté tout droit, jusqu’au
droit au pardon, à cette vague pitié que nous
avons à l'heure même de l’expiation pour
ceux qui expient leurs crimes.
H. REYNOLD.
L’INFORMATEUR
DE L' « ÉCLAIR »
L’AVEU DU SILEXCE
Nous avons posé hier cette question :
Nous demandons à M. Sabatier directeur
de l’ « ECLAIR » s’il ne tenait pas le docu
ment : «Ce canaille de D... », ou la certitude
que ce document existait, de M. Paul Belon
rédacteur au « PETIT JOURNAL ».
L'Eclair, ce matin est désespérément
muet.
De son côté, M. Paul Belon garde le
silence.
C’est l’aveu.
_____ P. D.
NÉCESSITÉ D’UNE NOUVELLE INSTRUCTION
Différents journaux reproduisent notre
information d’hier et en commentent la
gravité.
Le Siècle dit :
Dans la soirée, le journal Les Droits de
l'Homme affirme que l’informateur qui a remis
en 1896, à VEclair, le document : • Co canaille
de D.. », document que ce journal reproduisit
en substituant, par un faux abominable , le
nom de Dreyfus, à l’initiale D, n’est autre que
M. Paul Belon, rédacteur au Petit Journal. D’ou
pour le juge devant lequel M. Sabatier, direc
teur de VEclair, avait invoqué le secret pro
fessionnel, l’obligation de rouvrir son instruc
tion et d’entendre, en même temps que le ré
dacteur des Droits de l’Homme, MM. Sabatier et
Paul Belon.
Le Radical et le Rappel sont du même
avis. Ce dernier journal conclut ainsi:
Voilà qui est, en effet, du plus haut intérêt,
— car du moment où l’on connaît l’auteur de
l’article, il n’est pas impossible de réussir à
savoir quif l’a inspiré, et cela, dame, ce serait,
du coup, tout le mystère qui s’éclaircirait.
Pour les changements d’adresses,
prière A nos abonnés de nous en
voyer la dernière bande du journal
accompagnée de O fr. 60 en tima-
bres-poste.
COMPLICES
Les Drumont, les Rochefort et les Des
moulins se sont institués les défenseurs de
Henry et de du Paty de Clam parce qu’ils
ont été moralement les complices de ces
forbans.
Ils ne peuventles abandonner sous peine
de se juger eux-mêmes à l’œuvre de ces
bandits; et c’est ce qui explique qu’ils per
sistent à voir en du Paty de Clam et Henry
des officiers honorables et intelligents.
Et je n'exagère rien. Voici ce que M. Des
moulins, du Gaulois, dit des deux faussai
res de l’Etat-Major.
L’affaire a pris les plus intelligents, les plus
utiles et les a pour longtemps, pour toujours
peut-être, arrachés à la sphère où s’exercaient
leur intelligence et leur activité.
Cela est bien ; ceci est mieux :
Le colonel Henry était un brave soldat, que
tous honoraient; il avait derrière lui un passé
glorieux, devant lui un bel avenir.
Le colonel du Paty de Clam est un brillant
officier qui avait acquis, par son seul mérite,
une situation fort enviée au ministère de la
guerre.
Il faut que M. Desmoulins soit lui-même
un rude gredin pour écrire de pareilles
choses.
UNE BONNE HISTOIRE
Mon ami Durand, très au courant des des
sous de la vie de nos modernes gentlemen,
m'a raconté une bien amusante histoire.
« C’était il y a plusieurs années. Un riche
commerçant arrivé, un ancien tanneur, dit-
on, qui a dans sa chambre à coucher le portrait
en pied de Gyp — appelons-le M. Monocle,
pour ne désigner personne — organisait dans
ses jardins un magnifique garden-party.
Il envoya une invitation à M. Mécanicien,
l’ancien directeur d’un grand quotidien du
matin, remplacé depuis peu dans ses fonc
tions par un de nos plus brillants officiers de
réserve.
Mme Mécanicien n’était pas conviée à la
fête. D’où grande fureur de Mécanicien qui
s’écria : « Pourquoi donc n’a-t-il pas invité ma
femme? Attacherait-il une importance quel
conque aux bruits calomnieux répandus sur
son compte? Il va bien voir la campagne que
je vais inaugurer contre lui : car enfin, si,
moi, je suis marié, lui est un gendre et en
a Un ».
A ces mots, incompréhensibles pour tout
autre qu’un initié, un journaliste présent
s’empressa de sauter dans un fiacre, et de
mettre Monocle au courant de l’incident.
Vite, un exprès fut dépêché, avec une carte
spéciale pour Mme Mécanicien.
Morale : le journaliste fut décoré à la pro
motion suivante, et le journal de Mécanicien
n’entama aucune campagne contre M. Mo
nocle.
Et c’est ainsi, me dit en terminant Durand,
que cet ancien tanneur reçut pour la pre
mière fois une peau-de requin ».
JACK.
ECHOS
DEUX ABONNÉS
Le journal les Droits de l'Homme a reçu la
lettre suivante :
• Citoyen,
« Mon frère et moi, nous sommes les fils
aînés de huit enfants. Notre père est lorrain
et notre mère alsacienne.
» Nous sommes tous les deux en 5* classi
que dans un grand lycée de Paris. Notre père
est employé dans une maison de fruits des
Halles centrales ; c’est vous dire que nous
sommes sans aucune fortune.
» Voulant absolument nous instruire, il
nous serait très agréable de pouvoir profiter
de tous les enseignements que l’on peut ac
quérir en lisant le journal les Droits de
c Homme.
» Ne voudriez-vous pas,en notre qualité de
fils d’annexés et d’étudiants pauvres nous
faire gratuitement le service du journal.
» Nous vous remercions de tout cœur et
nous vous assurons de notre plus entier dé
vouement.
» ANDRÉ S. (13 ans), ALEXANDRE S. (12 ans). •
(Adresse).
C’est entendu !... Les Alsaciens-Lorrains et
les étudiants pauvres ont toujours droit à
notre amitié.
Nos correspondants recevront leur journal,
et puisse cette lecture les amener à aimer la
République, la Justice et la Vérité.
* *
LES PERLES.
Quel est le quotidien d’hier soir qui a laiss
passer cette monstrueuse coquille
• M. Brisson s’est pendu cet après-midi au
ministère de la justice... »
Pendu pour rendu est charmant... C’est
d’actualité à une époque où les rasoirs vien
nent comme par hasard dans la main des
lieutenants-colonels.
— Le Figaro de ce matin nous en apprend
une bonne.
Ecoutez :
• Vers le Nord-Est, cependant, le canon
tonne à une grande distance, mais ni feu ni
fumée ne permettent de reconnaître le théâtre
de l’engagement. Il s’agit sans doute d’une
rencontre ENTRE LES CAVALERIES.
Evidemment ! c’est une rencontre entre
hussards et tringlots. C’est pour cela qu’on
entend le canon !
LE ROMAN D’UN RÉCIDIVISTE
Le jeune Caze de Berzieux, que la Cour
d’assises de la Seine condamnait récemment
à quinze ans de travaux forcés, est très satis
fait de son sort. Il s’attendait à vingt ans au
moins de la même peine, et tous les jours il
remercie son avocat, Me Jacques Cohen, qui
l’assista, du talent qu’il déploya avec occès,
d’ailleurs.
Ce qu’il y a d’intéressant dans le cas de
Berzieux, c est qu’il a mis à profit les loisirs
de la cellule pour écrire un roman de quatre
cents pages intitulé le Roman d'un récidiviste.
Ce livre est, paraît-il, fort bien écrit, et son
auteur affirme qu’il a une portée sociale.
Bien plus, ce livre est à clefs, et nous croyons
ne pas exagérer en affirmant qu’il est même
à fausses clefs.
LES ARMÉES DU GLOBE
La Revue des revues publie une série de
détails bien curieux à propos des armées du
globe :
Sur tout le globe, il se trouve 5,250,000
soldats permanents et il y aurait dans le cas
d’un conflit universel, 44,250,000 hommes
sous les armes.
Et si ces hommes armés recevaient l’ordre
d’exterminer le reste de la population terres
tre, chacun d’eux ne devrait massacrer que
3a personnes.
Ils pourraient ensuite, en s’entretuant, arri
ver à ta destruction complète de la race hu
maine.
Placés en file, les soldats du globe feraient
un cordon serré autour de l’équateur, chaque
homme appuyant son fusil sur l’epaule de
celui placé devant lui.
Une seule décharge de chacun de ces fusils,
tous partant à la fois, coûterait plus de 2 mil
lions et demi de francs.
On pourrait continuer indéfiniment ces
intéressants calculs.,.
GIL.
La Dreyfusarde
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Votre- insulte est pour nous un titre,
Et nous arborons vos brocards.
Oui, nous sommes les Dreyfusards!
Ennemis jurés des césars,
Du goupillon et de la mitre.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Que d’autres que nous s’aplatissent
Et rampent comme des froussards !
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Amis des lettres et des arts
Par qui les peuples se grandissent.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Il faudra qu’on nous assassine
Pour faire baisser nos regards !
Oui, nous sommes les Dreyfusards 1
Et sous la botte des soudards,
Nous ne courbons pas notre échine.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
L’Etat-Major qui se délabre
A beau nous traiter de pendards.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Français, mais non patriotards.
Soldats, mais non valets du Sabre !
Oui, nous sommes les Dreyfusards!
Et nous haïssons l’artifice,
L’éteignoir, le voile et les fards.
Oui, nous sommes les Dreyfusards!
Nous gravons sur nos étendards :
« Vérité, Liberté, Justice! »
Michel COP,
Il nous parait intéressant de faire dès
aujourd’hui la classification des jour
naux parisiens à propos de l’affaire
Dreyfus :
Pour la Révision ;
L'Aurore, V Autorité, la Cloche, le
Courrier du Soir, les Droits de VHomme,
LEcho de Paris, V Estafette, la France,
militaire, la Fronde, le Figaro, la Ga
zette du Village, le Journal des Débats,
la Lanterne, la Liberté, le Matin, la
Paix, la Petite République, le Petit Pa
risien, le Paris, le Petit Rieu, le Rappel,
le Radical, le Signal, le Siècle, le Sifflet,
le Soleil, le Temps, etc..., etc...
CONTRE la Révision :
La Croix de Paris, l’ Eclair, VEvéne
ment, le Gaulois, la Gazette de France,
le Gil Blas, V Intransigeant, le Journal,
le Jour, la Libre Parole, le Moniteur uni
versel, la Patrie, le Petit Caporal, le
Petit Journal, le Petit Moniteur, le Peu
ple Français, la Presse, le Pstt, la Répu
blique française, le Soir, V Univers, la
Vérité, etc., etc.
C’est un tableau que nous tiendrons à
jour.
AVANT H REVISION
CONFÉRENCES MINISTÉRIELLES
L’agence Havas communiquait hier aux
journaux la note suivante :
« M. Henri Brisson, président du con
seil, s’est rendu ce matin, à dix heures,
au ministère de la justice, où il a longue
ment conféré avec M. Sarrien, garde des
sceaux. »
Ajoutons qu’une autre conférence aurait
eu lieu entre le général Zuriinden et le
garde «les sceaux.
" On n’en dit point davantage.
L’ • ÉCLAIR • POURSUIVI
Me Labori s’est rendu hier après-midi
au parquet pour déposer, de la part du co
lonel Picquart, une plainte contre le jour
nal VEclair, qui a raconté, hier, à sa ma
nière, l’historique de l’intervention du co
lonel Picquart dans l’affaire Dreyfus-Ester-
hazy.
D’après VEclair, le colonel Picquart au
rait accepté d'être le complaisant des amis
de la famille Dreyfus : il n’aurait eu qu'ur
“,4.
JEUDI 15 SEPTEMBRE 1898 ‘2.
PREMIÈRE ANNÉE. — T 248
Le Numéro : CINQ centimes
ES DROITS DE L’HOM
Ordre et progrès par la Révolution Française
ABONNEMENTS
PARIS
J an 20 •
6 mois 10 ■
3 mois 5 50
FRANCE ET ALGÉRIE
1 an 24
6 mois 13
3 mois 7
ÉTRANGER et union postale
• 1 an 35 •
» 6 mois..AS •
• 3 mois. 1O »
RÉDACTION ET ADMINISTRATION :
142 — Rue Montmartre — 142
Les annonces sont reçues chez MM. Lagrange, Cerf et Cio
6. Place de la Bourse, 6. et au* Bureau* du Journal
LES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NE SONT PAS RENDUS
TÉLÉPHONE N* 101.87
L'ÉTAPE
Mesurons l’étape parcourue depuis
un an... La vérité a marché, certes!
mais par quels chemins hérissés d'em-
bûches et d’obstacles, et combien fut
pénible son ascension vers la lumière,
vers la conscience des foules !
Le bilan de nos efforts est facile à
recapituler, — on le dressait hier, ici
même. Le commandant Esterhazy, la
Hulan national en qui se personnifie
ce que, durant de si longs mois d’irri
tantes polémiques, l’on dénomma
« l’honneur de l’armée », le traître,
enfin, l’auteur du bordereau de 1894,
est mis en reforme. Le voici disparu
de la scène, a la veille de se suicider
moralement par l’aveu suprême ou par
la fuite, selon qu'à l’instant psycholo-
gique de ses ultimes résistances il sera
plus ou moins protégé encore par
ceux-là qui, d’une abominable et cri
minelle complicité, couvrirent jusqu’à
ce jour ses stupres odieux. Le colonel
Henry, à son tour conscient de son in
famie, abandonné à la fatalité de
ses hontes par les chefs dont il avait
servi l’abjection et souligné par ses
faux les desseins perfides, dans l’hor
reur de sa chute, s’est fait à lui-
même bonne et prompte justice. Ce
héros n’a pas eu le courage d’at
tendre le châtiment de son crime,
il a préféré l’expiation sourde du ra
soir lil orateur. Le colonel du Paty de
Clam, cet autre faussaire, scribe in
fernal biseautant des dépêches, ingé
nieux faiseur de dames voilées, pilier
de vespasiennes et automate grotes-
que du petit doigt sur la couture du
pantalon, est mis en non-activité par
retrait d’emploi, échappant ainsi par
une douce mesure disciplinaire à de
plus sévères, mais plus équitables vin
dictes. M. Godefroy Cavaignac et le
général Le Mouton de Boisdeffre, l’un
ci-devant ministre de la guerre, l’autre
ci-devant chef d’Etat-Major général
de l’armée, ont mis la clef sous la
porte, qu’ils firent claquer en s’en al
lant, — et puis, bonsoir!
Et c’est tout. C’est un succès, sans
doute, un succès appréciable, mais
non point une victoire. Félicitons-
nous du résultat dès à présent acquis
comme du fruit savoureux de cette
propagande énergique et tenace que
nous avons menée sans défaillance et
sans faiblesse contre les crimes de
l’Etat-Major. Mais ne triomphons
point encore! Nous ne sommes pas
au bout de nos efforts, et si l’étape
parcourue nous a approchés du but à
atteindre, il nous reste, hélas! du
chemin à faire, beaucoup de chemin,
avant d’abattre victorieusement toutes
les puissances de réaction coalisées
contre le droit et la justice.
Sommes-nous donc prophètes de
malheur?
Nous souhaiterions que l’heure du
triomphe sonnât plus tôt que nous ne
l’osons espérer; mais à la minute pré
cise où nous sommes, il serait dange
reux de trop s’accoutumer à de falla-
cieuses illusions. A peine avons-nous
l’avantage de quelques escarmouches
ou notre stratégie fut heureuse; nous
n'avons encore, à la vérité, gagné
nulle bataille sérieuse. L’ennemi cou
che sur ses positions, encore qu’il ait
perdu quelques unités de combat dans
les premières bagarres ; il nous faut
le déloger de là, devant que la victoire
vienne enfin récompenser la fortune
de nos armes.
A vrai dire, nous ne désespérons
point d’aboutir. L’opinion naguère
rebelle nous est enfin clémente. La
lumière a lui dans les cerveaux obscurs
ou Es excitations du chauvinisme
‘ troit et des haines farouches avaient
passionnément accumulé d’épaisses
ténèbres. La conscience publique s’est
ressaisie; les esprits républicains, tou
jours épris des généreuses doctrines
de la Révolution et des saines tradi
tions de justice, nous sont revenus,
indignés des mystères de mensonges
et de calomnies qu’ils soupçonnent à
travers les légendes dont on fit peser
sur eux le sombre et tragique cauche-
mar. Grâce à cette admirable et si èlo-
Quente campagne de lumière et de
raison, où s’affirma le talent sincère
e puissant des Zola, des Jaurès, des
. menceau, des Trarieux, des Urbain
johier et de tant d’autres que gui-
•Tem les premières révélations de
ernard Lazare, preturcour des im-
entes réparations, ce paye de
France sait aujourd’hui, à n’en
plus douter, qu’une monstrueuse ini
quité de justice fut commise par le
premier Conseil de Guerre de 1891
contre l’infortuné capitaine Dreyfus.
Ils demeurent bien rares ceux qui
doutent encore de l’innocence du
martyr de file du Diable et des turpi
tudes de la coterie réactionnaire de
l’Etat-Major; — ceux-là, du moins,
qui sont de bonne foi, estiment que la
révision est devenue nécessaire, iné
vitable, fatale !
Mais il reste à vaincre des résistan
ces toujours puissantes, liguées contre
la vérité, embusquées au détour des
pouvoirs publics contre la justice mé
connue et violée. C’est le syndicat des
vrais coupables, le syndicat de trahi
son, celui-là! qui se dresse de toutes
ses forces contre le code de révision,
dont les ministres du cabinet Brisson
essayent timidement d’entr’ouvrir les
feuillets. Le lieutenant-colonel Geor
ges Picquart, cet honnête homme si
clairvoyant, demeure incarcéré, — et
n’est-il point piquant d’observer en
passant (pie jamais, parmi la solitude
d’une détention imméritée, il ne son
gea à se couper la gorge avec un ra
soir, encore que sa carrière soit mo
mentanément brisée et qu’on le dise
si coupable?
C’est le privilège des consciences
droites de ne point faiblir devant les
vicissitudes de la vie. — Emile Zola
continue de vivre cet armistice d’exil
que prochainement il rompra, pour
venir répondre devant la justice de
ses accusations si précises, que vé
rifient les incidents d’hier. D’autres
qui furent frappés de disgrâce pour
leur passion d’humanité, pour leur
idéal de justice, n’ont point bénéficié
de la moindre amnistie administrative,
— lès Grimaux, les Stapfer et autres
protestataires du droit et de la liberté
de conscience.
Enfin, celui que l’injustice des
hommes condamna au martyre le plus
effroyable qui se puisse imaginer, le
malheureux déporté de file du Diable
continue de jeter à travers l’espace,
par delà l’immensité de l’Océan, son
cri de captif innocent, ses poignants
appels à la pitié humaine !
Non, nous ne triomphons point
encore. La révision nous est promise,
mais du bout des lèvres ministérielles.
Cavaignac démissionnaire, le général
Zurlinden s’est substitué à lui pour
reprendre à son compte personnel sa
revision du dossier, par laquelle il
entend s’opposer à la révision judi
ciaire, la seule qui importe en l’occur
rence. Et Son Excellence Félix Faure,
le président soliveau, chez qui la
crainte de Drumont est le co:mence-
ment de la sagesse, intervient à son
tour et profère ce veto : pas de révi
sion ! Songez donc, il faudrait accor
der à la conscience publique l’exécu
tion des coupables, etZurlinden, après
avoir promis d’agir avec décision,
zèle et loyauté, refuse maintenant de
s’atteler à la dernière charrette, où se
confondraient côte à côte les Lauth
et les Gribelin, les du Paty de Clam,
les Gonse, les Boisdeffre et les Mer
cier. Le prestige de l'Etat-Major, ce
prestige nécessaire au dogme du res
pect de l’armée et de l’infaillibilité des
Conseils de guerre, s’évanouirait, tel
un mauvais rêve, sous le mépris de
l’opinion! Il n’y faut point songer..
Telle est l’étape parcourue. Repre
nons haleine, et en route vers la vraie
bataille. Le but est là. Sus à l’Etat-
Major !
MARCEL HUART.
P- S. — A un correspondant : Merci,
mon Te. C.. F/., pour les renseignements
précieux que vous me communiquez. Je les
utiliserai certainement un jour. Observez
toutefois que je n’ai point témoigné le re
gret que le général Brugère n’eût point été
nommé. J’ai constaté seulement que deux
officiers supérieurs, dont lui, étaient dési
gnés à la succession du général de Boisdef
fre, et que, par surcroît de sûreté, on a fait
choix d'un troisième, le général Renouard,
qui n’était, lui, nullement désigné à recueil
lir cet héritage. Entre cette simple constata
tion et un regret que je n'ai point exprimé,
il y a une nuance que vous méditerez.
M. H.
mux= ==
Les DROITS DE L'HOMME publie-
rout demain l'article de
PIERRE BERTRAND
Le ministre de la guerre a-t-il porté
son attention sur les graves faits que
nous lui signalions il y a quelques jours?
L’incident du faux représentant le co
lonel Picquart en conversation avec le
colonel de Schwartzkoppen, l’a-t-on élu-
cidé au ministère?
Nous attendons des réponses.
P. L.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ
Aujourd'hui,
Mercredi 1% septembre 1898,
M. Félix Faure étant président de la Ré
publique et M. Henri Brisson étant prési
dent du conseil des ministres,
LE LIEUTENANT-COLONEL
Georges PICQUART
accomplit son 64e jour de prison préven
tive pour avoir demandé que justice soit
rendue à un officier français injustement
et illégalement condamné et pour avoir
dénoncé au gouvernement de la Républi
que le faux dont le lieutenant-colonel
Henry, chef du service des renseigne
ments au ministère de la guerre, s’est re
connu coupable.
B I JL IW
Plusieurs de nos confrères ont repro
duit le bilan que nous avons dressé
hier; quelques-uns ont bien voulu le
compléter ; reprenons
1 0 Colonel
2° Commandant Esterhazy .
3° Colonel Henry
4° Général de Boisdeffre.. •
6° Cavaignac.
6° Colonel du Paty de Clam
7° Général Gonse
8° Besson d’Ormescheville .
9° Pauffin de Saint-Morel..
10° Commandant Lauth....
donc :
Mort fou;
Mis en réforme et disparu;
Arrêté et suicidé ;
Démissionnaire ;
Démissionnaire ;
Mis en non-activité;
En disgrâce ;
En disgrâce ;
En disgrâce ;
En disgrâce.
Peut-être en avons-nous encore oublié.
POLITIQUE
Nous attendons depuis dix-huit
mois, nous attendrons bien encore
jusqu’à samedi. C’est samedi que le
ministère Brisson prendra ses résolu
tions définitives. Nous avons la con
fiance qu’elles seront dignes de lui.
Mais il ne s’agit pas de nous : il s’agit
de celui qui attend la justice et la vé
rité dans les tourments et qui fut con
damné sans savoir pourquoi ; il s’agit
de la République et du pays.
Quand on a la certitude d’être dans
l’illégalité et qu’on s’appelle le gou
vernement de la France, a-t-on le
droit d’y rester une heure de plus ?
Nous avons sans doute une bien
faible idée de ce qui s’est passé depuis
quinze jours dans l’opinion du pays,
dans l’âme des foules.
Quand on apprit coup sur coup ces
nouvelles étonnantes : l’arrestation et
le suicide d’Henry, la démission du
général de Boisdeffre, la retraite de
M. Cavaignac, la mise en réforme
d’Esterhazy, la mise en non activité
par retrait d’emploi, du colonel du
Paty de Clam, l’éloignement de plu
sieurs autres, rendus en hâte à leurs
garnisons, toutes ces chutes, tous ces
écroulements, que s’est-il passé chez
ces milliers d’âmes simples et loyales
qu’on avait abusées ?
En elles aussi se lit un écroulement
que nous ne pouvons pas nous figurer.
Au premier moment, ce fut une dou
leur aiguë. Puis, de là, naquit la vo-
lont, la volonté désormais intraitable
de savoir la vérité, toute la vérité.
J’ai rencontré ici un de mes amis de
province qui m’a dépeint en quelques
mots cette crise de son esprit, com
ment pendant plusieurs jours il ne
pût retrouver le sommeil, il sentait
autour de son front un cercle de feu ;
je vous assure que c’était pathétique.
Et il y en a ainsi par toute la France
des milliers et des milliers. Aujour
d’hui tous veulent la vérité, la vérité
au grand jour, la vérité quand même;
nulle puissance au monde ne serait
capable de les empêcher d’avoir la
vérité. Et déjà ils se la créent à eux-
mêmes dans leur conscience, ils
disent : « Oui, maintenant j’en suis
certain, Dreyfus a été injustement
condamné! »
Quelle stupidité sans nom pour les
politiciens, pour des chefs de gouver
nement, d’avoir répété pendant qua
tre années au peuple : « justement et
légalement condamné ! » Alors que les
uns n’avaient absolument aucune
preuve de ce qu’ils avançaient et que
les autres avaient la preuve du con
traire ! Ils se sont cruellement joués de
la France.
Le président de la République est
aujourd’hui en présence de l’armée, il
en est le chef : qu’il sache voir ce
qu’il y a dans ce grand spectacle, au-
delà de l’éclat des armes et des splen
dides apparences! Qu’il songe à l’his-
toire ! Qu’il se rappelle combien mal
reuses sont les armées qui tombent
aux mains des intrigants et des ambi
tieux ! Qu’il nous revienne samedi
pour coopérer loyalement avec ses
ministres, et autant qu’il lui appar
tient, au rétablissement de la vérité et
des lois! Là est le salut.
HECTOR DEPASSE
CHRONIQUE
COUP DE SOLEIL
Par quelle monstrueuse aberration
l’homme qui vient de livrer son nom à la
vindicte universelle en frappant lâchement
une inoffensive princesse, a-t-il cru servir en
rien la cause maudite qu’il avait embrassée ?
A examiner froidement le fait comme un
théoricien pourrait le tenter, on ne trouve
qu’imbécillité, là où on aurait souhaité ren
contrer quelque héroïque coup de folie. Et
s’il ne répugnait dans une aussi triste occur
rence de se souvenir— malgré le deuil—de
la boutade d’un homme d’esprit on pourrait
appliquer à cet assassinat repoussant le mot
bien connu du prince de Talleyrand : < C’est
plus qu’un crime, c’est une faute.»
Certains publicistes, en effet, avaient
réussi en exploitant un reste de chevalerie à
faire excuser, quelquefois même à glorifier
les attentats stupides des propagandistes par
le fait. Grâce à d'ingénieux sophismes, ces
virtuoses du crime ont entretenu dans le
public un état d’esprit dangereux par son
indifférence même devant ce que plusieurs
considèrent simplement comme des meurtres
politiques. Mais qu’est-ce que la politique
peut avoir de commun avec cette malheu
reuse reine dont le principal souci était de
s’en éloigner. D’un naturel peu fait pour sup
porter les exigences de l’étiquette de cour,
d’une intelligence cultivée et que les petis
côtés de la grandeur effrayaient, elle vécut
en dehors des agitations du pouvoir et loin
de la fréquentation des puissants. Toujours
à la recherche de quelque spectacle nouveau
par lequel la nature devait la distraire des
malheurs qui depuis sa plus tendre enfance
ont fondu sur elle, elle fut sur la fin de sa
vie, amoureuse seulement de l’Art et l’admi
ratrice convaincue de tous ceux qui le ser
vaient.
Peut-être même avec cette ampleur
d’idées, cette absence de préjugés qui la
caractérisaient heureusement, avec ce pen
chant inné à célébrer la Beauté en elle-
même — que ce fut dans l’acte aussi bien
que dans la pensée — se laissa-t-elle aller
à quelque indulgence pour les théories hu
manitaires si dangereuses lorsque des fous
prennent le soin de les appliquer.
Ce crime n’a pas d’excuses, si tant est
qu’un crime en puisse jamais avoir. On avait
pu écrire que pour ces propagandistes illu
minés, frapper haut c’était frapper fort :
mais si aveugle que puisse être le cou
teau pour ceux-là même qui s’appuient sur
de semblables aphorismes, il eût dû respec
ter le sein d’une femme. Les femmes, en
effet, avaient jusqu’alors ce privilège qu’on
les laissât en dehors des luttes sombres et
des rouges représailles. En frappant l'une
d’elles, l’Italien a rompu le pacte, et l’aberra-
tion même à laquelle il faut recourir pour
trouver le mobile de ce forfait si lâche et si
bas, explique mais n’absout pas.
Le misérable s’est ôté tout droit, jusqu’au
droit au pardon, à cette vague pitié que nous
avons à l'heure même de l’expiation pour
ceux qui expient leurs crimes.
H. REYNOLD.
L’INFORMATEUR
DE L' « ÉCLAIR »
L’AVEU DU SILEXCE
Nous avons posé hier cette question :
Nous demandons à M. Sabatier directeur
de l’ « ECLAIR » s’il ne tenait pas le docu
ment : «Ce canaille de D... », ou la certitude
que ce document existait, de M. Paul Belon
rédacteur au « PETIT JOURNAL ».
L'Eclair, ce matin est désespérément
muet.
De son côté, M. Paul Belon garde le
silence.
C’est l’aveu.
_____ P. D.
NÉCESSITÉ D’UNE NOUVELLE INSTRUCTION
Différents journaux reproduisent notre
information d’hier et en commentent la
gravité.
Le Siècle dit :
Dans la soirée, le journal Les Droits de
l'Homme affirme que l’informateur qui a remis
en 1896, à VEclair, le document : • Co canaille
de D.. », document que ce journal reproduisit
en substituant, par un faux abominable , le
nom de Dreyfus, à l’initiale D, n’est autre que
M. Paul Belon, rédacteur au Petit Journal. D’ou
pour le juge devant lequel M. Sabatier, direc
teur de VEclair, avait invoqué le secret pro
fessionnel, l’obligation de rouvrir son instruc
tion et d’entendre, en même temps que le ré
dacteur des Droits de l’Homme, MM. Sabatier et
Paul Belon.
Le Radical et le Rappel sont du même
avis. Ce dernier journal conclut ainsi:
Voilà qui est, en effet, du plus haut intérêt,
— car du moment où l’on connaît l’auteur de
l’article, il n’est pas impossible de réussir à
savoir quif l’a inspiré, et cela, dame, ce serait,
du coup, tout le mystère qui s’éclaircirait.
Pour les changements d’adresses,
prière A nos abonnés de nous en
voyer la dernière bande du journal
accompagnée de O fr. 60 en tima-
bres-poste.
COMPLICES
Les Drumont, les Rochefort et les Des
moulins se sont institués les défenseurs de
Henry et de du Paty de Clam parce qu’ils
ont été moralement les complices de ces
forbans.
Ils ne peuventles abandonner sous peine
de se juger eux-mêmes à l’œuvre de ces
bandits; et c’est ce qui explique qu’ils per
sistent à voir en du Paty de Clam et Henry
des officiers honorables et intelligents.
Et je n'exagère rien. Voici ce que M. Des
moulins, du Gaulois, dit des deux faussai
res de l’Etat-Major.
L’affaire a pris les plus intelligents, les plus
utiles et les a pour longtemps, pour toujours
peut-être, arrachés à la sphère où s’exercaient
leur intelligence et leur activité.
Cela est bien ; ceci est mieux :
Le colonel Henry était un brave soldat, que
tous honoraient; il avait derrière lui un passé
glorieux, devant lui un bel avenir.
Le colonel du Paty de Clam est un brillant
officier qui avait acquis, par son seul mérite,
une situation fort enviée au ministère de la
guerre.
Il faut que M. Desmoulins soit lui-même
un rude gredin pour écrire de pareilles
choses.
UNE BONNE HISTOIRE
Mon ami Durand, très au courant des des
sous de la vie de nos modernes gentlemen,
m'a raconté une bien amusante histoire.
« C’était il y a plusieurs années. Un riche
commerçant arrivé, un ancien tanneur, dit-
on, qui a dans sa chambre à coucher le portrait
en pied de Gyp — appelons-le M. Monocle,
pour ne désigner personne — organisait dans
ses jardins un magnifique garden-party.
Il envoya une invitation à M. Mécanicien,
l’ancien directeur d’un grand quotidien du
matin, remplacé depuis peu dans ses fonc
tions par un de nos plus brillants officiers de
réserve.
Mme Mécanicien n’était pas conviée à la
fête. D’où grande fureur de Mécanicien qui
s’écria : « Pourquoi donc n’a-t-il pas invité ma
femme? Attacherait-il une importance quel
conque aux bruits calomnieux répandus sur
son compte? Il va bien voir la campagne que
je vais inaugurer contre lui : car enfin, si,
moi, je suis marié, lui est un gendre et en
a Un ».
A ces mots, incompréhensibles pour tout
autre qu’un initié, un journaliste présent
s’empressa de sauter dans un fiacre, et de
mettre Monocle au courant de l’incident.
Vite, un exprès fut dépêché, avec une carte
spéciale pour Mme Mécanicien.
Morale : le journaliste fut décoré à la pro
motion suivante, et le journal de Mécanicien
n’entama aucune campagne contre M. Mo
nocle.
Et c’est ainsi, me dit en terminant Durand,
que cet ancien tanneur reçut pour la pre
mière fois une peau-de requin ».
JACK.
ECHOS
DEUX ABONNÉS
Le journal les Droits de l'Homme a reçu la
lettre suivante :
• Citoyen,
« Mon frère et moi, nous sommes les fils
aînés de huit enfants. Notre père est lorrain
et notre mère alsacienne.
» Nous sommes tous les deux en 5* classi
que dans un grand lycée de Paris. Notre père
est employé dans une maison de fruits des
Halles centrales ; c’est vous dire que nous
sommes sans aucune fortune.
» Voulant absolument nous instruire, il
nous serait très agréable de pouvoir profiter
de tous les enseignements que l’on peut ac
quérir en lisant le journal les Droits de
c Homme.
» Ne voudriez-vous pas,en notre qualité de
fils d’annexés et d’étudiants pauvres nous
faire gratuitement le service du journal.
» Nous vous remercions de tout cœur et
nous vous assurons de notre plus entier dé
vouement.
» ANDRÉ S. (13 ans), ALEXANDRE S. (12 ans). •
(Adresse).
C’est entendu !... Les Alsaciens-Lorrains et
les étudiants pauvres ont toujours droit à
notre amitié.
Nos correspondants recevront leur journal,
et puisse cette lecture les amener à aimer la
République, la Justice et la Vérité.
* *
LES PERLES.
Quel est le quotidien d’hier soir qui a laiss
passer cette monstrueuse coquille
• M. Brisson s’est pendu cet après-midi au
ministère de la justice... »
Pendu pour rendu est charmant... C’est
d’actualité à une époque où les rasoirs vien
nent comme par hasard dans la main des
lieutenants-colonels.
— Le Figaro de ce matin nous en apprend
une bonne.
Ecoutez :
• Vers le Nord-Est, cependant, le canon
tonne à une grande distance, mais ni feu ni
fumée ne permettent de reconnaître le théâtre
de l’engagement. Il s’agit sans doute d’une
rencontre ENTRE LES CAVALERIES.
Evidemment ! c’est une rencontre entre
hussards et tringlots. C’est pour cela qu’on
entend le canon !
LE ROMAN D’UN RÉCIDIVISTE
Le jeune Caze de Berzieux, que la Cour
d’assises de la Seine condamnait récemment
à quinze ans de travaux forcés, est très satis
fait de son sort. Il s’attendait à vingt ans au
moins de la même peine, et tous les jours il
remercie son avocat, Me Jacques Cohen, qui
l’assista, du talent qu’il déploya avec occès,
d’ailleurs.
Ce qu’il y a d’intéressant dans le cas de
Berzieux, c est qu’il a mis à profit les loisirs
de la cellule pour écrire un roman de quatre
cents pages intitulé le Roman d'un récidiviste.
Ce livre est, paraît-il, fort bien écrit, et son
auteur affirme qu’il a une portée sociale.
Bien plus, ce livre est à clefs, et nous croyons
ne pas exagérer en affirmant qu’il est même
à fausses clefs.
LES ARMÉES DU GLOBE
La Revue des revues publie une série de
détails bien curieux à propos des armées du
globe :
Sur tout le globe, il se trouve 5,250,000
soldats permanents et il y aurait dans le cas
d’un conflit universel, 44,250,000 hommes
sous les armes.
Et si ces hommes armés recevaient l’ordre
d’exterminer le reste de la population terres
tre, chacun d’eux ne devrait massacrer que
3a personnes.
Ils pourraient ensuite, en s’entretuant, arri
ver à ta destruction complète de la race hu
maine.
Placés en file, les soldats du globe feraient
un cordon serré autour de l’équateur, chaque
homme appuyant son fusil sur l’epaule de
celui placé devant lui.
Une seule décharge de chacun de ces fusils,
tous partant à la fois, coûterait plus de 2 mil
lions et demi de francs.
On pourrait continuer indéfiniment ces
intéressants calculs.,.
GIL.
La Dreyfusarde
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Votre- insulte est pour nous un titre,
Et nous arborons vos brocards.
Oui, nous sommes les Dreyfusards!
Ennemis jurés des césars,
Du goupillon et de la mitre.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Que d’autres que nous s’aplatissent
Et rampent comme des froussards !
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Amis des lettres et des arts
Par qui les peuples se grandissent.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Il faudra qu’on nous assassine
Pour faire baisser nos regards !
Oui, nous sommes les Dreyfusards 1
Et sous la botte des soudards,
Nous ne courbons pas notre échine.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
L’Etat-Major qui se délabre
A beau nous traiter de pendards.
Oui, nous sommes les Dreyfusards !
Français, mais non patriotards.
Soldats, mais non valets du Sabre !
Oui, nous sommes les Dreyfusards!
Et nous haïssons l’artifice,
L’éteignoir, le voile et les fards.
Oui, nous sommes les Dreyfusards!
Nous gravons sur nos étendards :
« Vérité, Liberté, Justice! »
Michel COP,
Il nous parait intéressant de faire dès
aujourd’hui la classification des jour
naux parisiens à propos de l’affaire
Dreyfus :
Pour la Révision ;
L'Aurore, V Autorité, la Cloche, le
Courrier du Soir, les Droits de VHomme,
LEcho de Paris, V Estafette, la France,
militaire, la Fronde, le Figaro, la Ga
zette du Village, le Journal des Débats,
la Lanterne, la Liberté, le Matin, la
Paix, la Petite République, le Petit Pa
risien, le Paris, le Petit Rieu, le Rappel,
le Radical, le Signal, le Siècle, le Sifflet,
le Soleil, le Temps, etc..., etc...
CONTRE la Révision :
La Croix de Paris, l’ Eclair, VEvéne
ment, le Gaulois, la Gazette de France,
le Gil Blas, V Intransigeant, le Journal,
le Jour, la Libre Parole, le Moniteur uni
versel, la Patrie, le Petit Caporal, le
Petit Journal, le Petit Moniteur, le Peu
ple Français, la Presse, le Pstt, la Répu
blique française, le Soir, V Univers, la
Vérité, etc., etc.
C’est un tableau que nous tiendrons à
jour.
AVANT H REVISION
CONFÉRENCES MINISTÉRIELLES
L’agence Havas communiquait hier aux
journaux la note suivante :
« M. Henri Brisson, président du con
seil, s’est rendu ce matin, à dix heures,
au ministère de la justice, où il a longue
ment conféré avec M. Sarrien, garde des
sceaux. »
Ajoutons qu’une autre conférence aurait
eu lieu entre le général Zuriinden et le
garde «les sceaux.
" On n’en dit point davantage.
L’ • ÉCLAIR • POURSUIVI
Me Labori s’est rendu hier après-midi
au parquet pour déposer, de la part du co
lonel Picquart, une plainte contre le jour
nal VEclair, qui a raconté, hier, à sa ma
nière, l’historique de l’intervention du co
lonel Picquart dans l’affaire Dreyfus-Ester-
hazy.
D’après VEclair, le colonel Picquart au
rait accepté d'être le complaisant des amis
de la famille Dreyfus : il n’aurait eu qu'ur
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