Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-09-12
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 septembre 1885 12 septembre 1885
Description : 1885/09/12 (A1,N58). 1885/09/12 (A1,N58).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5448406
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
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Première année. — N° 58.
Le numéro SS centimes.
PRËFECTtJIŒ
OKI'OT
!2L
D‘ ALGER
LEGAL
Samedi, 12 septembre 1886.
JOURNAL POLITIQUE ÛUOTiDIE
" ■ ~ '
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois Un an
Algérie 4.50 9 18
France.... O
Toutes les communications relatives aux annnonces et réclames doivent, es
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Alt«r
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille chez M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, chez MM. ÀUDBOURG et O, place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
Alger, le 11 Septembre 1885.
LES HOUES DU JOUR
XXXVII
M. LEPÈRE
DÉPUTÉ DE L’YONNE
M. Lepère, député de l’Yonne, est mort
avant-hier à Auxerre.
M. Lepère était né le l eo février 1823.
Avocat distingué au barreau de sa ville
natale, il entra dans les luttes politiques
sous l’empire, auquel il fit une vive oppo
sition. Le 8 février 1871, il fut élu repré
sentant de l’Yonne à l’Assemblée natio
nale; il prit place sur les bancs de l’Union
républicaine et se fit bientôt remarquer par
son talent d’orateur et sa connaissance des
affaires. Il combattit avec énergie les cabi
nets monarchiques qui se succédèrent après
la chute de Thiers et vota constamment avec
la minorité républicaine.
Elu député le 20 février 1876 dans la l re
circonscription d’Auxerre, il fut choisi pour
vice-président de la Chambre. Il fit partie
des 363, et, malgré les efforts de l’adminis
tration pour le faire échouer, il fut réélu
aux élections du 14 octobre.Ileut 1 honneur,
à la réunion de la Chambre, do faire partie
du comité des dix huit chargé de diriger la
résistance de la majorité républicaine aux
entreprises du cabinet de Rocbebouët.
A la formation du ministère Dufaure, le
14 décembre 1877. M. Lepère fut nommé
nous-secrétaire d’Etat à l’intérieur.
Le 4 février 1879, il entra dans le premier
ministère formé par M. Grévy, comme mi
nistre de l'agriculture et du commerce, et
passant, un mois après, le 4 mars, au mi
nistère de l’intérieur et des cultes, il eut,
dans ce poste, à lutter contre l’agitation
soulevée par certains membres du haut
clergé, à propos des nouveaux projets de
loi sur l’enseignement, et dut frapper les
écrits ou les actes de plusieurs prélats d’ap
pels comme d’abus. Il donna sa démission
le 16 mai 1880, à la suite de la discussion
de la loi sur les réunions publiques.
A la dernière Chambre, M. Lepère sié
geait à la gauche radicale. Il devait se re
présenter aux élections du 4 octobre pro
chain.
dans le dépariera nt de Constantine
Le parti radical intransigeant de Cons
tantine a enfin fait choix de ses deux candi
dats à la députation. Ce sont M. le sénateur
Forcioii et le citoyen Fawtier qui ont reçu
du Comité central la mission de faire échec
à MM. Thomson et Treille.
Tout d’abord, on est frappé de l’indigence
du parti intransigeant en hommes suscep
tibles de rallier les suffrages de leurs conci
toyens. Pour avoir sur deux candidats un
nom parfaitement honorable, force a été au
comité de faire appel au dévouement du sé
nateur du département, hasardant cette
grosse partie de voir le suffrage universel
donner tort au suffrage restreint, et l’autorité
morale de son leader singulièrement affai
blie par un échec au-devant duquel il l’au
rait envoyé.
Le nom de M. Forcioii était, du reste, il
faut bien la reconnaître, indispensable pour
couvrir quelque peu celui du citoyen Faw
tier et lui permettre d’affronter le scrutin.
Si l’on ne peut, en effet, contester à ce
dernier des qualités de polémiste et d’ora
teur, ainsi qu’une certaine compétence en
matière algérienne, il faut bien, d’un autre
côté, à tort ou à raison, avouer que la no
toriété dont jouit ce personnage est une de
celles qui ferment l’accès des fonctions pu
bliques à ceux qui en sont affligés. Le ci
toyen Fawtier, envoyé à la Chambre comme
député, serait un comble. La considération
de l’Algérie en serait certainement atteinte,
et on ne tarderait pas â assister à quelques-
uns de ces scandales que ne peuvent éviter
les besogneux, quand ils ont des passions
ardentes et de grands besoins d’argent.
L’épithète de carottier serait certaine
ment la plus douce de celles que ses collè
gues ne tarderaient pas à lui appliquer.
Mais si, comme nous le disions, le citoyen
Fawtier est appelé à bénéficier de la par
faite honorabilité de M. Forcioii, ce dernier
pourrait bien voir déteindre un peu sur lui
la méchante réputation de son copain.
Nous estimons que M. Forcioii a fait vis-
à-vis de son parti acte d’une condescendance
rare, en consentant à prendre part person
nellement à la lutta dans les conditions ac
tuelles.
MM. Thomson et Treille se présentent, en
effet, devant leurs électeurs avec un bagage
parlementaire dont il est difficile, à moins
d’être plus que prévenu contre eux, de ne
pas leur tenir compte. Us ont, dans toutes
les occasions, vaillamment défendu les in
térêts de leur département qui leur doit, en
majeure partie, l’état d’avancement de son
réseau de voies ferrées.
Dans ces conditions, la possession d’état
devient une forteresse dont il est bien diffi
cile de déloger ceux qui l’occupent ; et cela
d’autant plus, que ce n’est pas un siège
mais deux que les intransigeants sont tenus
de décrocher.
L’une ou l’autre des listes doit passer tout
entière. On ne comprendrait pas plus à
Constantine, une députation composée du
premier nom porté en tête de chaque liste,
Forcioii et Thomson par exemple, que l’on
ne comprendrait à Alger le nom de M. Le-
tellier acculé à celui de M. Marchai ou de
M Samary.
Les électeurs du département de Constan
tine sont, du reste, trop intelligents pour
ne pas comprendre cette situation, et trop
pratiques aussi pour ne pas peser mûre
ment les avantages qu’ils doivent aux dé
putés sortants et les sacrifier à des promes
ses.
En ce qui touche M. Forcioii, ils se diront
qu’étant sénateur, il n’a nul besoin d'être
député pour être utile à son pays.
Quant à M. Fawtier, ils estimeront cer
tainement que la place d’un homme qui
s’est créé un aussi grand nombre d’obliga
tions n’est pas à la Chambre. Un homme
politique ne saurait traîner, sans danger,
â sa suite une queue de créanciers de tout
genre, comme celle dont ii a plu au citoyen
Fawtier de s’affubler.
~T0UCHàl1TJCCQRD
Le feu est ouvert sur toute la ligne.
Nous entrons, en effet, en pleine période
électorale, aussi Petit Colon et Radical al
gérien se démènent-il à qui mieux mieux,
pour dire son fait à I’uû de nos candidats.
M. Bourlier est qualifié d’opportuniste par
M. Marchai, et de réactionnaire par le ci
toyen Basset.
Nous verrons par la suite comment M.
Marchai s’y prendra pour opposer à M. Bour
lier son opportunisme,lui qui a été, pendant
si longtemps, ainsi qu’on le prouvera en cas
de besoin, l’opportuniste le plus convaincu,
le plus ardent qui se soit jamais rencontré
sous la calotte des cieux.
Nous verrons également comment le révo
lutionnaire Basset s’y prendra pour faire un
crime à M. Bourlier d’être réactionnaire,
alors que la plupart des sympathies et des
affections du pur d’entre les purs sont pour
les réactionnaires,ainsi qu'on le démontrera
le cas échéant.
Avant de répondre à ces attaques, nous
attendrons qu’elles soient motivées.
Pendant ce temps-là, examinons un peu
les visées de ces Messieurs.
M. Marchai accepte le programme de
Médéa, et au besoin la candidature ; il est
prêt à faire ce sacrifice dans l’intérêt de
l’Algérie et même de la France
Le citoyen Basset, qui ne peut hélas 5
accepter de candidature, adopte également
le programme ; pas celui des opportunistes
de Médéa cependant, mais celui du comité
central révolutionnaire de Paris.
On le voit, il y a déjà désaccord entre les
deux honorables qui veulent présider à nos
destinées ; mais, où le désaccord s’accentue»
c’est lorsqu’il s’agit du choix des candidats.
Marchai tieuteà son programme et môme
à sa candidature.
Basset tient à son programme et à... sou
candidat : le vénéré Lelièvre. Selon Basset,
il est des candidatures qui se posent (attrape
Samary) ; d’autres qu'on pose (voilà pour
toi, Marchal(, et enfin il en est qui s'impo
sent
« La candidature Lelièvre est de celles-
ci, » ajoute le Radical.
IL est vrai que quelques lignes plus haut
notre confrère critique les choix faits avant
l’adoption d’un programme ; c’était une aL-
lusion à la candidature Marchai, acceptée
par des groupements ou des comités plu s*
ou moins auto isês Mais, ëès quil s’agit
de la candidature d’un ami de la maison,
on n’éprouve pas de ces scrupules et on n’a
pas besoin d’attendre l’élaboration sur place
d’un programme. On prend celui de Paris
et on propose le candidat bou â tout faire...
ce que M. Basset, lui prescrira.
Nous saurons bientôt lequel des deux —
du Petit Colon ou du Radical — décro
chera la timbale.
Informations algériennes
Le Républicain annonce que M. Rostan,
administrateur de la commune-mixte de
Jemmapes vient d’êtie frappé d’un arrêté de
suspension de six mois.
X
Hier, a eu lieu à Sétif le second tour de
scrutin pour l’élection d'un conseiller muui-
cipal restant à élire.
M Kraft, frère du conseiller général de
Sétif, a été élu à une forte majorilé.
X
On lit dans le Courrier d'Oran :
« Nous sommes autorisés à dire que,
contrairement à ce qu’affirme l 'Evénement,
M. Etienne n’a pas reçu la lettre attribuée à
M. le général de Négrier et publiée dans
l 'Avenir de la Haute-Saône.
Fenilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
N° 58.
LA
GRANDE MARHIÊRE
PAR
Georges OHNET
Le silence s’étendit sur le château, et tout
parut dormir. Dans la nuit, une hulotte se
plaignait, mélancolique, et son chant de
mauvais augure ne troublait pas la jeune
fille. Elle y trouvait comme un écho de sa
tristesse. N’était-ce pas le seul oiseau qui
pût tourner autour de cette maison vouée
au malheur ? Eile resta allongée dans un
fauteuil, les yeux fixés sur une facette de la
cheminée que la lumière faisait briller, sui
vant son imagination qui l'emportait bien
loin.
Peu à peu elle éprouva une sensation d’al
lègement, comme si son être eût flotté dans
l’espace, balancé par des souffles légers ;
elle ne sentait plus sa fatigue, elle était dé
gagée de sa douleur, elle voguait dans un
bleu charmant et infini. Sa bouche exhala
un souffle plus régulier : elle s’était endor
mie. Ce sommeil dura une grande heure,
•puis, du fond de son repos, il lui sembla
qu’une voix l’appelait. Elle se dressa ef
frayée et courut au lit du malade. A demi
soulevé sur son coude, il ouvrait des yeux
troubles et vagues. Elle lui parla douce
ment ; il prit sa main, la serra, comme pour
lui indiquer qu’il l’a reconnaissait, puis, ar
ticulant ses mots avec peine :
— Il faudra voir ce jeune homme, ma
fille... Il est honnête... C’est lui qui sau
vera ton frère...
Elle crut a une hallucination causée par
la fiév e, à une conception délirante ; elle
embrassa le vieillard pour le calmer, et, en
trant dans son idée, comme on fait avec un
enfant :
— Oui, mon père, oui, reposez-vous...
tout ira bien...
Il agita sa tête blanche, leva ses yeux
dans lesquels, en cet instant, vivait la pen
sée, et, avec un accent qui parut prophéti
que à Antoinette, il répéta :
— C’est ce jeune homme qui nous sauve
ra... Il est honnête... Il faut le voir, ma
fille...
II essaya de diriger ses regards sur elle,
mais les muscles de son cou le faisaient
souffrir, car sa figure se contracta. Une om
bre de démence passa de nouveau sur son
visage
— IL était là tout à l’heure, murmura-t-
il, et c’était lui qui te suppliait Je l’ai
bien reconnu... là près des rideaux...
— C’était M. de Croix-Mesnil, mon pè
re. ..
— Non, fit le malade avec une agitation
croissante. Je sais ce que je dis... J’ai ma
raison... C’était Pascal Carvajan .. C’est
lui seul qui peut sauver ton frère... Pro
mets-moi que tu le verras ! Je n’aurai
pas de tranquillité avant que tu me l’aies
promis...
— Reposez-done, mon père, je vous le
promets !
Les traits du marquis se détendirent. Il
se laissa aller en arrière avec béatitude, et
murmura des paroles que la jeune fille ne
comprit pas. Quelques instants après il
dormait paisiblement.
Mlle de Clairefont demeura songeuse. Le
souvenir de Pascal, brusquement évoqué,
lui était revenu tout entier. Son visage
énergique et fier était là, devant elle, et ses
lèvres s’ouvraient pour parler : Elle ne vou
lait pas l’écouter, elle savait d’avarice ce
qu’il allait dire. Et, murmure confus et car-
ressant, ses paroles montaient autour d’elle
ainsi qu’une prière. Comment eût-elle pu
douter qu’il l’aimât ? Tout le lui prouvait,
sa muette admiration, sou craintif respect,
son délicat effacement. Il tremblait en l’a
percevant, il pâlissait quand elle s’éloignait,
il eût voulu se mettre à genoux sur son
passage, et il avait provoqué Croix-Mesnil
parce qu’il le croyait aimé Oui, il lui ap
partenait. Il devait haïr tout ce qui n’était
pas d’elle et ne serait pas pour elle ; il
avait horreur des intrigues qu’ourdissait
son père, il eût donné son sang pour ne
pas exciter l’horreur, et n r a r ait jamais es
péré qu’il pût obtenir l’amitié. Oui, il serait
un serviteur zélé, un défenseur loyal- Et
tout ce qu’elle ava’t entendu raconter sur
Pascal, et qu’elle avait dédaigné, se repré
sentait à son esprit : son habileté comme
homme d affaires, son talent comme avocat,
ses luttes contre le despotisme paternel. Et
les paroles du marquis résonnaient encore
à ses oreilles : C’est lui qui sauvera ton
frère !
Par quelle mystérieuse intuition le vieil-^
lard avait-il été conduit à désigner Pascal
comme le sauveur possible de Robert ? Une
puissance surnaturelle lui avait-elle montré
le jeune homme dans le vague de son rêve?
Il prétendait le reconnaître, et il ne l’avait
jamais vu. Quelle voix céleste lui avait
soufflé son nom à l’oreille ?
Comment, à l’heure décisive, avec une au
torité irrésistible, se soulevait-il de sou lieu
de souffrance pour donner ce hardi con
seil ? N’était-il pas du devoir d’Antoinette
de le suivre ? Elle l’avait promis, et au fond
d’elle-même, une secrète espérance naissait
déjà.. Le salut viendrait de là peut-être. Par
le fils on obtiendrait, beaucoup du père. Si
la haine de Carvajan, adoucie par cette ca
pitulation de ses ennemis, allait se calmer ?
S’il consentait seulement à rester neutre, à
ne plus déchaîner contre eux toutes les
mauvaises passions de ses partisans. Corn-
me 1 horizon pourrait promptement s’éclair
cir ! Robert, lavé de tout soupçon et rendu
à.la liberté, viendrait près du malade dont
il hâterait la guérison.
(A suivre).
—-
Première année. — N° 58.
Le numéro SS centimes.
PRËFECTtJIŒ
OKI'OT
!2L
D‘ ALGER
LEGAL
Samedi, 12 septembre 1886.
JOURNAL POLITIQUE ÛUOTiDIE
" ■ ~ '
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois Un an
Algérie 4.50 9 18
France.... O
Toutes les communications relatives aux annnonces et réclames doivent, es
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Alt«r
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille chez M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, chez MM. ÀUDBOURG et O, place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
Alger, le 11 Septembre 1885.
LES HOUES DU JOUR
XXXVII
M. LEPÈRE
DÉPUTÉ DE L’YONNE
M. Lepère, député de l’Yonne, est mort
avant-hier à Auxerre.
M. Lepère était né le l eo février 1823.
Avocat distingué au barreau de sa ville
natale, il entra dans les luttes politiques
sous l’empire, auquel il fit une vive oppo
sition. Le 8 février 1871, il fut élu repré
sentant de l’Yonne à l’Assemblée natio
nale; il prit place sur les bancs de l’Union
républicaine et se fit bientôt remarquer par
son talent d’orateur et sa connaissance des
affaires. Il combattit avec énergie les cabi
nets monarchiques qui se succédèrent après
la chute de Thiers et vota constamment avec
la minorité républicaine.
Elu député le 20 février 1876 dans la l re
circonscription d’Auxerre, il fut choisi pour
vice-président de la Chambre. Il fit partie
des 363, et, malgré les efforts de l’adminis
tration pour le faire échouer, il fut réélu
aux élections du 14 octobre.Ileut 1 honneur,
à la réunion de la Chambre, do faire partie
du comité des dix huit chargé de diriger la
résistance de la majorité républicaine aux
entreprises du cabinet de Rocbebouët.
A la formation du ministère Dufaure, le
14 décembre 1877. M. Lepère fut nommé
nous-secrétaire d’Etat à l’intérieur.
Le 4 février 1879, il entra dans le premier
ministère formé par M. Grévy, comme mi
nistre de l'agriculture et du commerce, et
passant, un mois après, le 4 mars, au mi
nistère de l’intérieur et des cultes, il eut,
dans ce poste, à lutter contre l’agitation
soulevée par certains membres du haut
clergé, à propos des nouveaux projets de
loi sur l’enseignement, et dut frapper les
écrits ou les actes de plusieurs prélats d’ap
pels comme d’abus. Il donna sa démission
le 16 mai 1880, à la suite de la discussion
de la loi sur les réunions publiques.
A la dernière Chambre, M. Lepère sié
geait à la gauche radicale. Il devait se re
présenter aux élections du 4 octobre pro
chain.
dans le dépariera nt de Constantine
Le parti radical intransigeant de Cons
tantine a enfin fait choix de ses deux candi
dats à la députation. Ce sont M. le sénateur
Forcioii et le citoyen Fawtier qui ont reçu
du Comité central la mission de faire échec
à MM. Thomson et Treille.
Tout d’abord, on est frappé de l’indigence
du parti intransigeant en hommes suscep
tibles de rallier les suffrages de leurs conci
toyens. Pour avoir sur deux candidats un
nom parfaitement honorable, force a été au
comité de faire appel au dévouement du sé
nateur du département, hasardant cette
grosse partie de voir le suffrage universel
donner tort au suffrage restreint, et l’autorité
morale de son leader singulièrement affai
blie par un échec au-devant duquel il l’au
rait envoyé.
Le nom de M. Forcioii était, du reste, il
faut bien la reconnaître, indispensable pour
couvrir quelque peu celui du citoyen Faw
tier et lui permettre d’affronter le scrutin.
Si l’on ne peut, en effet, contester à ce
dernier des qualités de polémiste et d’ora
teur, ainsi qu’une certaine compétence en
matière algérienne, il faut bien, d’un autre
côté, à tort ou à raison, avouer que la no
toriété dont jouit ce personnage est une de
celles qui ferment l’accès des fonctions pu
bliques à ceux qui en sont affligés. Le ci
toyen Fawtier, envoyé à la Chambre comme
député, serait un comble. La considération
de l’Algérie en serait certainement atteinte,
et on ne tarderait pas â assister à quelques-
uns de ces scandales que ne peuvent éviter
les besogneux, quand ils ont des passions
ardentes et de grands besoins d’argent.
L’épithète de carottier serait certaine
ment la plus douce de celles que ses collè
gues ne tarderaient pas à lui appliquer.
Mais si, comme nous le disions, le citoyen
Fawtier est appelé à bénéficier de la par
faite honorabilité de M. Forcioii, ce dernier
pourrait bien voir déteindre un peu sur lui
la méchante réputation de son copain.
Nous estimons que M. Forcioii a fait vis-
à-vis de son parti acte d’une condescendance
rare, en consentant à prendre part person
nellement à la lutta dans les conditions ac
tuelles.
MM. Thomson et Treille se présentent, en
effet, devant leurs électeurs avec un bagage
parlementaire dont il est difficile, à moins
d’être plus que prévenu contre eux, de ne
pas leur tenir compte. Us ont, dans toutes
les occasions, vaillamment défendu les in
térêts de leur département qui leur doit, en
majeure partie, l’état d’avancement de son
réseau de voies ferrées.
Dans ces conditions, la possession d’état
devient une forteresse dont il est bien diffi
cile de déloger ceux qui l’occupent ; et cela
d’autant plus, que ce n’est pas un siège
mais deux que les intransigeants sont tenus
de décrocher.
L’une ou l’autre des listes doit passer tout
entière. On ne comprendrait pas plus à
Constantine, une députation composée du
premier nom porté en tête de chaque liste,
Forcioii et Thomson par exemple, que l’on
ne comprendrait à Alger le nom de M. Le-
tellier acculé à celui de M. Marchai ou de
M Samary.
Les électeurs du département de Constan
tine sont, du reste, trop intelligents pour
ne pas comprendre cette situation, et trop
pratiques aussi pour ne pas peser mûre
ment les avantages qu’ils doivent aux dé
putés sortants et les sacrifier à des promes
ses.
En ce qui touche M. Forcioii, ils se diront
qu’étant sénateur, il n’a nul besoin d'être
député pour être utile à son pays.
Quant à M. Fawtier, ils estimeront cer
tainement que la place d’un homme qui
s’est créé un aussi grand nombre d’obliga
tions n’est pas à la Chambre. Un homme
politique ne saurait traîner, sans danger,
â sa suite une queue de créanciers de tout
genre, comme celle dont ii a plu au citoyen
Fawtier de s’affubler.
~T0UCHàl1TJCCQRD
Le feu est ouvert sur toute la ligne.
Nous entrons, en effet, en pleine période
électorale, aussi Petit Colon et Radical al
gérien se démènent-il à qui mieux mieux,
pour dire son fait à I’uû de nos candidats.
M. Bourlier est qualifié d’opportuniste par
M. Marchai, et de réactionnaire par le ci
toyen Basset.
Nous verrons par la suite comment M.
Marchai s’y prendra pour opposer à M. Bour
lier son opportunisme,lui qui a été, pendant
si longtemps, ainsi qu’on le prouvera en cas
de besoin, l’opportuniste le plus convaincu,
le plus ardent qui se soit jamais rencontré
sous la calotte des cieux.
Nous verrons également comment le révo
lutionnaire Basset s’y prendra pour faire un
crime à M. Bourlier d’être réactionnaire,
alors que la plupart des sympathies et des
affections du pur d’entre les purs sont pour
les réactionnaires,ainsi qu'on le démontrera
le cas échéant.
Avant de répondre à ces attaques, nous
attendrons qu’elles soient motivées.
Pendant ce temps-là, examinons un peu
les visées de ces Messieurs.
M. Marchai accepte le programme de
Médéa, et au besoin la candidature ; il est
prêt à faire ce sacrifice dans l’intérêt de
l’Algérie et même de la France
Le citoyen Basset, qui ne peut hélas 5
accepter de candidature, adopte également
le programme ; pas celui des opportunistes
de Médéa cependant, mais celui du comité
central révolutionnaire de Paris.
On le voit, il y a déjà désaccord entre les
deux honorables qui veulent présider à nos
destinées ; mais, où le désaccord s’accentue»
c’est lorsqu’il s’agit du choix des candidats.
Marchai tieuteà son programme et môme
à sa candidature.
Basset tient à son programme et à... sou
candidat : le vénéré Lelièvre. Selon Basset,
il est des candidatures qui se posent (attrape
Samary) ; d’autres qu'on pose (voilà pour
toi, Marchal(, et enfin il en est qui s'impo
sent
« La candidature Lelièvre est de celles-
ci, » ajoute le Radical.
IL est vrai que quelques lignes plus haut
notre confrère critique les choix faits avant
l’adoption d’un programme ; c’était une aL-
lusion à la candidature Marchai, acceptée
par des groupements ou des comités plu s*
ou moins auto isês Mais, ëès quil s’agit
de la candidature d’un ami de la maison,
on n’éprouve pas de ces scrupules et on n’a
pas besoin d’attendre l’élaboration sur place
d’un programme. On prend celui de Paris
et on propose le candidat bou â tout faire...
ce que M. Basset, lui prescrira.
Nous saurons bientôt lequel des deux —
du Petit Colon ou du Radical — décro
chera la timbale.
Informations algériennes
Le Républicain annonce que M. Rostan,
administrateur de la commune-mixte de
Jemmapes vient d’êtie frappé d’un arrêté de
suspension de six mois.
X
Hier, a eu lieu à Sétif le second tour de
scrutin pour l’élection d'un conseiller muui-
cipal restant à élire.
M Kraft, frère du conseiller général de
Sétif, a été élu à une forte majorilé.
X
On lit dans le Courrier d'Oran :
« Nous sommes autorisés à dire que,
contrairement à ce qu’affirme l 'Evénement,
M. Etienne n’a pas reçu la lettre attribuée à
M. le général de Négrier et publiée dans
l 'Avenir de la Haute-Saône.
Fenilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
N° 58.
LA
GRANDE MARHIÊRE
PAR
Georges OHNET
Le silence s’étendit sur le château, et tout
parut dormir. Dans la nuit, une hulotte se
plaignait, mélancolique, et son chant de
mauvais augure ne troublait pas la jeune
fille. Elle y trouvait comme un écho de sa
tristesse. N’était-ce pas le seul oiseau qui
pût tourner autour de cette maison vouée
au malheur ? Eile resta allongée dans un
fauteuil, les yeux fixés sur une facette de la
cheminée que la lumière faisait briller, sui
vant son imagination qui l'emportait bien
loin.
Peu à peu elle éprouva une sensation d’al
lègement, comme si son être eût flotté dans
l’espace, balancé par des souffles légers ;
elle ne sentait plus sa fatigue, elle était dé
gagée de sa douleur, elle voguait dans un
bleu charmant et infini. Sa bouche exhala
un souffle plus régulier : elle s’était endor
mie. Ce sommeil dura une grande heure,
•puis, du fond de son repos, il lui sembla
qu’une voix l’appelait. Elle se dressa ef
frayée et courut au lit du malade. A demi
soulevé sur son coude, il ouvrait des yeux
troubles et vagues. Elle lui parla douce
ment ; il prit sa main, la serra, comme pour
lui indiquer qu’il l’a reconnaissait, puis, ar
ticulant ses mots avec peine :
— Il faudra voir ce jeune homme, ma
fille... Il est honnête... C’est lui qui sau
vera ton frère...
Elle crut a une hallucination causée par
la fiév e, à une conception délirante ; elle
embrassa le vieillard pour le calmer, et, en
trant dans son idée, comme on fait avec un
enfant :
— Oui, mon père, oui, reposez-vous...
tout ira bien...
Il agita sa tête blanche, leva ses yeux
dans lesquels, en cet instant, vivait la pen
sée, et, avec un accent qui parut prophéti
que à Antoinette, il répéta :
— C’est ce jeune homme qui nous sauve
ra... Il est honnête... Il faut le voir, ma
fille...
II essaya de diriger ses regards sur elle,
mais les muscles de son cou le faisaient
souffrir, car sa figure se contracta. Une om
bre de démence passa de nouveau sur son
visage
— IL était là tout à l’heure, murmura-t-
il, et c’était lui qui te suppliait Je l’ai
bien reconnu... là près des rideaux...
— C’était M. de Croix-Mesnil, mon pè
re. ..
— Non, fit le malade avec une agitation
croissante. Je sais ce que je dis... J’ai ma
raison... C’était Pascal Carvajan .. C’est
lui seul qui peut sauver ton frère... Pro
mets-moi que tu le verras ! Je n’aurai
pas de tranquillité avant que tu me l’aies
promis...
— Reposez-done, mon père, je vous le
promets !
Les traits du marquis se détendirent. Il
se laissa aller en arrière avec béatitude, et
murmura des paroles que la jeune fille ne
comprit pas. Quelques instants après il
dormait paisiblement.
Mlle de Clairefont demeura songeuse. Le
souvenir de Pascal, brusquement évoqué,
lui était revenu tout entier. Son visage
énergique et fier était là, devant elle, et ses
lèvres s’ouvraient pour parler : Elle ne vou
lait pas l’écouter, elle savait d’avarice ce
qu’il allait dire. Et, murmure confus et car-
ressant, ses paroles montaient autour d’elle
ainsi qu’une prière. Comment eût-elle pu
douter qu’il l’aimât ? Tout le lui prouvait,
sa muette admiration, sou craintif respect,
son délicat effacement. Il tremblait en l’a
percevant, il pâlissait quand elle s’éloignait,
il eût voulu se mettre à genoux sur son
passage, et il avait provoqué Croix-Mesnil
parce qu’il le croyait aimé Oui, il lui ap
partenait. Il devait haïr tout ce qui n’était
pas d’elle et ne serait pas pour elle ; il
avait horreur des intrigues qu’ourdissait
son père, il eût donné son sang pour ne
pas exciter l’horreur, et n r a r ait jamais es
péré qu’il pût obtenir l’amitié. Oui, il serait
un serviteur zélé, un défenseur loyal- Et
tout ce qu’elle ava’t entendu raconter sur
Pascal, et qu’elle avait dédaigné, se repré
sentait à son esprit : son habileté comme
homme d affaires, son talent comme avocat,
ses luttes contre le despotisme paternel. Et
les paroles du marquis résonnaient encore
à ses oreilles : C’est lui qui sauvera ton
frère !
Par quelle mystérieuse intuition le vieil-^
lard avait-il été conduit à désigner Pascal
comme le sauveur possible de Robert ? Une
puissance surnaturelle lui avait-elle montré
le jeune homme dans le vague de son rêve?
Il prétendait le reconnaître, et il ne l’avait
jamais vu. Quelle voix céleste lui avait
soufflé son nom à l’oreille ?
Comment, à l’heure décisive, avec une au
torité irrésistible, se soulevait-il de sou lieu
de souffrance pour donner ce hardi con
seil ? N’était-il pas du devoir d’Antoinette
de le suivre ? Elle l’avait promis, et au fond
d’elle-même, une secrète espérance naissait
déjà.. Le salut viendrait de là peut-être. Par
le fils on obtiendrait, beaucoup du père. Si
la haine de Carvajan, adoucie par cette ca
pitulation de ses ennemis, allait se calmer ?
S’il consentait seulement à rester neutre, à
ne plus déchaîner contre eux toutes les
mauvaises passions de ses partisans. Corn-
me 1 horizon pourrait promptement s’éclair
cir ! Robert, lavé de tout soupçon et rendu
à.la liberté, viendrait près du malade dont
il hâterait la guérison.
(A suivre).
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