Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-12-06
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 06 décembre 1852 06 décembre 1852
Description : 1852/12/06 (Numéro 341). 1852/12/06 (Numéro 341).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 541.
Prix de l'aboiement.
befartfibïeffls :|
. ï® fb. peua trois mois
paris;
13 f». pour trois mois.
un numéro : 20 centimes.
»obb les pats étrangers, se reporter au
tableau publié dans le journal, les tO si
S5.de chaque mois.
fe>JSâ3'
eiIEffîm : rn® de Valois (Palals-Boyal^ ftO.
B 1852.?- LUNDI 6 DÉCEMBRE.
Joute lettre non, affranchie sera rigoureusem-.n' refi
Les articles déposés ne sont pas rendus.
""Oiui//
/S4s3
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
!On s'ahonn", dan? les départemens, aux Messageries et aux Directions de p»sto, — A Londres, ches MM. Cowee et fus.
•*- A Strasbourg, chez M. Axeïamsbe, pru* C Allemagne.
S'adresser, franco ', pour l'admit!
à m. dbnira, directeur^-;-_ -,«-j,
Les annonces sont reçues chez M. PANIS, régisseur, 10, place de la Bourse p -!i
et au bureau du journal.
PARIS, 5 DÉCEMBRE.
* Les partis, qui voient avec regret le nou
veau gouvernement se consolider en Fran
ce, cherchent jeterdes "inquiétudes dans
kp pïiys> en présentant l'immense mouvement
d'affaires dont nous sommes témoins comme
le résultat d'un entraînement irréfléchi,d'une
spéculation effrenee. A les en croire, cette
hausse générale des valeurs est illusoire et
factice. Nous sommes sous l'influence d'un
tairage trompeur, qui peut égarer les es
prits superficiels. mais qui n'abuse pas les
hommes mtelligens et habitués à aller au
fond des choses.
Rien de plus curieux que les raisonnement
auxquels ont recours ces pessimistes intéres
sés. Si vous-leur dites que la rente, en s'éle-
vaat à 85 fr., ne fait que reprendre le niveau
qu'elle avait atteint sous le gouvernement de
Louis-Philippe, ils vous répondent- comme
Banville, dans l'Ecole des Vieillards : Mais
bous , c'est autre chose ! « De notre temps,
disent-ils, la hausse était en harmonie avec
le" développement progressif des affaires,
et pouvait-être considérée comme un in
dice véritable de l'état du crédit. Il n'en
est pas de même aujourd'hui. La haus
se actuelle s'est faite trop subitement
pour qu'elle puisse provenir d'une situation
vraie et régulière; elle est presque entière
ment artificielle, et .doit être attribuée,
sur tout à une déviation des capitaux qui se
portent en masse à la Bourse, et qui débor
dent avec l'impétuosité du torrent. »
La distinction est subtile, il faut en con
venir. De ce que la rente a gagne 30 fr. en
quelques mois, de ce que les actions de che
mins de fer et les actions industrielles ont
presque doublé de valeur dans un espace de
temps aussi court, vous en concluez que
cette hausse rapide est une hausse de mau
vais aloi. Le temps, en pareille chose , ne
fait rien à l'affaire. Et si la hausse a été ra
pide, vous oubliez apparemment qu'à une
certaine époque la baisse l'avait été encore
bien davantage.
Faut-il vous rappeler qu'après la révolur
tion de février, on a vu le 5 0/0 tomber pres
que immédiatement à 50 fr.?Certes, la chute"
fut ^brusque. Direz-vous qu'une baisse aussi
énorme en aussi peu de temps ait été le
résultat d'un mouvement factice ï Vous
savez bien que non. La situation était telle,
que les capitaux ne pouvaient se prêter sans
exiger une prime d'assurance en rapport
avec les risques qu'ils couraient. Qu'est-il
arrivé plus tard, lorsque la tranquillité s'est
raffermie ? Lès" cours de la renie et dé
toutes les valeurs se sont relevés ; ils
n'ont pu cependant atteindre le même taux;
qu'autrefois, parce que, si l'on avait la sécu
rité du présent, on n'avait pas celle de l'ave-"
nir. Mais enfin Louis-Napoléon a pris la réso
lution héroïque de nous arracher à cet état
d'incertitude qui paralysait le crédit public-et
le crédit privé; il a consulté le pays deux fois en
une année, et, d'accord avec la volonté natio
nale, il a fondé un gouvernement stable qui
présente toutes lés garanties d'ordre et de
durée. Pourquoi donc, nous le demandons,
toutes les valeurs ne seraient-elles pas re
montées alors aux mêmes prix que dans les
jours les plus prospères de la précédente
monarchie?
Qu'on veuille bien nous apprendre pour
quelle raison le 3 0/0 ne" vaudrait pas au
jourd'hui 85 fr. comme il y a six ans. Le
gouvernement de Louis-Napoléon serait-il
moins soUde que celui de Louis-Philippe î
On n'oserait le prétendre. Elu trois fois
par le peuple, l'héritier de l'Empereur a
établi son pouvoir sur la base la plus
large et la plus forte- qui ait jamais exis
té. La France serait-elle moins riche ac
tuellement qu'elle n'était avant la révolu
tion de février? L'assertion ne serait pas
plus exacte. Si l'année 18-48 a été dé
sastreuse., on a beaucoup travaille pen
dant les années suivantes, et, précisé
ment parce qu'on craignait de s'engager
dans des affaires de longue haleine, on a pu
amasser des épargnes qui n'attendaient que
le retour de la confiance pour chercher un
placement. Or, n'était-il pas êrôdtfllTqit'âVee
un gouvernement mieux établi, avec une
France plus riche, L crédit publie devait se
relever promptement et de lui-même au
point ou il avait été quelques années aupa
ravant ?
Le crédit des compagnies, de chemins de
fer a suivi tout naturellement celui de l'Etat;
mais il a encore été servi par d'autres cau
ses. Des chemins qui étaient en construction
ont été achevés. Notre réseau s'est agrandi.
L'expérience a révélé ce qu'il y avait d'ave
nir dans ces entreprises dont nous igno
rions tous, les élémens de succès. Le dé
veloppement de la circulation, l'accrois
sement des transports, le progrès con
tinu des recettes ont contribué à faire
rechercher dés placemens qui tendaient
sans cesse à s'améliorer. Que l'on compare
le prix des actions avec le produit des che
mins, et l'on reconnaîtra qu'il n'a rien
d'exagéré.
, Ainsi, la hausse des valeurs, si rapid
qu'elle ait été, n'est due qu'à un mouvement
naturel et régulier. L'attribuer à un engoû-
ment momentané, qui précipite les capitaux
vers la Bourse, c'est yodloir fermer les yeux
à la lumière pour n'écouter que ses rancu
nes et ses passions. Et d'ailleurs, pour que
cette explication eût l'ombre de vraisem
blance, il faudrait que les capitaux eus
sent déserté l'agriculture, le commerce, l'in-
dustrie.Or,jamaisragriculture,lecommerce,
l'industrie n'ont obtenu l'argent à aussi bon
compte. Les propriétés territoriales, invenda
bles il y a peu de temps encore, ont reprisleur
valeur. Partout on construit des usines et l'on
augmente celles qui existaient. A aucune
époque, nos manufactures de coton, de lai
ne, de soie n'ont été- aussi prospères. On
peut en dire autant de nos industries de
luxe. Le mouvement n'est donc pas concentré •
entre les quatre murs de la Bourse; il s'é
tend sur la Franee entière; il embrasse
toutes les branches de l'actiyité publique.
J. Bi:rat.
C'est aujourd'hui que la proclamation de
l'Empire se fait* dans toute la France ; dans
quelques communes éloignées seulement, la
solennité sera renvoyée à dimanche pro
chain. .
Presque partout, les conseils municipaux
des villes ont voulu répondre, selon leurs
moyens, au désir du nouvel Empereur, en
.distribuant des secours aux indigens. Ici,
l'on fera des dons de combustibles, ail
leurs de vêtemeus ; dans plusieurs villes,
à Metz, à Strasbourg, à Arras, à Nancy, à
Reims-, etc., on dégagera du Mont-de-Piété,
les effets engagés pour de faibles sommes,
surtout les couvertures et les vêtemèns d'hi
ver; ailleurs, à Lille , par exemple, on fera
des distributions d'effets de couchage ; ail
leurs encore , dans le Gers , les enfans
les plus méritans des écoles communales
recevront des livrets de caisse d'épargne.
Mais, sans négliger les pauvres, quel
ques villes ont pensé qu'on pouvait don
ner quelqu'éclat à la solennité par des
illuminations, par des spectacles gratis.
Dans les grandes places de guerre, telles
que Lille et Strasbourg, la pompe militaire
que déploie la garnison unie à la garde natio
nale, dispense pour ainsi dire de tout au
tre appareil. Dans des villes de moindre im
portance, il fallait quelque chose de plus.
Ainsi, à Guéret, il y aura une représenta
tion gratuite, pour laquelle on a monté ex
pressément le Fils de l'Homme. A Arras,
le 1" régiment du génie-comptait éclairer
les promenades au moyen de la lumière
électrique et d'artifices de guerre. A Lille,
une cantate en l'honneur dé l'Empereur se
ra chantée au théâtre. ,
Dans beaucoup de villes, les chefs de corps
mettent leur musique militaire à la disposi
tion de l'autorité pour exécuter des mor
ceaux d'harmonie, le soir, sur les estrades du
haut desquelles aura été proclamé l'Empire.
Conformément à la circulaire .de M. de
Pei signy, il ne devait pas y avoir de cérémo
nie religieuse officielle. Cèpendant plusieurs
prélats, notamment l'évèque d'Orléans et
révêque de Verdun, ont fuit savoir qu'ils
chanteraient le Veni Creator et le Te Deum.
Dans un grand nombre de localités, des
banquets ou des b.als~ par. souscription-ont"
Me organisés; presque partout, l'autorité
supérieure locale ouvrira ses salons le soir
de ce grand jour.
C'est d'une fête de ce genre qu'on peut'
dire d'avance, avec assurance, que la joie a
été universelle. Quand huit millions d'hom
mes ont su se réunir pour élever un trône, ;
on peut être sur qu'ils sauront bien s'enten- 1
dre pour célébrer l'accomplissement de leurs
vœux. - l. boniface.
L'armée-de mer et la population côtière
auront aussi.leur part dans les grâces accor
dées par Napoléon III, à l'occasion de son
avènement a l'Empire. S. M. I. a signé hier,
les deux décrets-suivans : ' / "I
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté
nationale, Empereur des Français,
A tous présens et à venir, salut :
Voulant signaler par des actes de clémence no
tre avènement au trône, où le vœu de la natiori
nous a appelé, - r ,
Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'E
tat au département de la marine et des colonies,
Avons décrété et décrétons ce qui suit :
Art. l ct . Amnistie est accordée aux officiers^
mariniers et matelots, ainsi qu'aux sous-officiers,
brigadiers, caporaux et soldats des troupes de là
marine en état de désertion, et aux insoumis qui,
à la date du présent décret, n'ont pas été jugés
et condamnés définitivement.
Art. 2. L'amnistie est entière, absolue et sans
condition de service pour les déserteurs et insou
mis qui se trouvant-dans l'un des cas suivaus :
1° Pour les insoumis qui appartiennent à l'une
des classes jus'ques et y compris celle de 1840, ou
qui se sont engagés volontairement antérieure
ment au 3J décembre 1840;
2° Pour les déserteurs qui ont été admis sous
les drapeaux, à quelque titre que ce soit, anté
rieurexent au 31 décembre 1841
3° Pour les déserteurs, et insoumis actuellement
mariés ou veufs ayant un ou plusieurs enfans, ou
âgés, à là date du présent décret, de plus de
trente-six ans;
4° Pour les déserteurs et insoumis qui se trou
veraient, à la date du présent décret, dans l'un des
cas d'exemption prévus par l'art. 13 de la loi du
21 mars-1832 (1);
5° Pour les déserteurs auxquels il ne reste pas,
à la même date, plus d'une année de service à
faire pour atteindre le temps de leur libération.
Art. 3. Les déserteurs ou insoumis qui ne rem
plissent pas l'une des conditions' du précédent
article seront tenus d'entrer dans l'armée de terre
ou de mer, pour y accomplir le temps de service
auquel ils sont astreints par la loi du 21 mars.
1832, temps dans lequel celui de leur absence ne
sera pas compté.
Art. 4. L'application de l'amnistie sera laite par
les autorités auxquelles le ministre de la marine
adressera des instructions à cet effet. Les déser
teurs et insoumis devront se présenter devant
l'une d'elles pour formuler leur déclaration de re
pentir avant l'expiration des délais ci-après, qui
compteront à partir de la date du présent décret ;
Savoir :. '
Deux mois pour ceux qui sont dans l'intérieur
-de la -France;
Trois mois pour ceux qui sont en Corse;.
Six mois pour ceux qui sont hors du territoire
français, mais en Europe ou en Algérie;
Un an pour ceux qui sont hors d'Europe, et dix-
huit mois pour ceux qui sont au-delà du cap de'
Bonne-Espérance ou du cap Horn.
Art. 5. A l'expiration de ces délais, le ministre
de la marine donnera des ordres à l'effet de pour-:
suivre de nouveau fes déserteurs et insoumis qui
ne se seront pas présentés pour réclamer le bénér
fice de la présente amnistie.
Ceux des déserteurs et insoumis qui ne sont pas
dégagés de l'obligation de servir, et qui, après
avoir reçu l'application de l'amnistie et avoir pris
une feuille de route pour rejoindre un corps, ne
se rendraient pas à leur destination dans lès dé
tais fixés par les règlemens, resteront sous le poids
de la législation relative à la désertion et à l'in
soumission, et-seront considérés comme -déser
teurs ou insoumis par récidive.
(I) Seront exemptés... les jeunes gens... qui se
trouveront dans un des ças suivans : '
1° Ceux qui n'auront pas la tailla de 1 îiètre 56
centimètres;
2° Ceux que leurs infirmités rendront impropres au
service ; .
3° L'ainé d'orphelins de père et de mère ; .
4° Le fils unique ou l'ainé des fils, ou, à défaut de
fils ou de gendre, le petit-fils unique ou l'ainé des
pstits-fils d une femme actuellement veuve, ou d'un
père aveugle ou entré dans sa soixante et dixième
année. -. " ' ■
S 0 Le plus âgé des deux frères appelés à faire par
tie du même tirage et désignés tous deux par le sort,
si Je plus jeune est reconnu propre au service ; '
6° Celui dont ui) frère sera sous les drapeaux à
tout autre titre que. par remplacement; ,
7° Celui dont un frère sera mort en activité de ser
vice, ou aura été réformé ou admis à la retraite pour
blessures reçues dans un service commandé, ou in
firmités contractées dans les armées de terre ou de
mer., . ;
FEUILLETON DU CQHCT1TUTI8NNEL, 6 MCEMBBE-
THÉÂTRES.
v A ldevii.lb : Les Paniers de la Marquise, vaudeville
en un acte, de Léon Gozlan. — Le Clu!ne et le Ro-
■' seau, comédie-vaudeville en un acte, de M. Galoppe
d'Onqûaire. — variétés : Ce que vivent les roses,
„ vaudeville en un acte, de MM. Monnier etMartin.—
Les Deux inséparables, vaudeville en un acte, de M.
H. de Fouiquemont.— pàlais-boyal: La Femme aux
Œufs d'or, un acte, de MM. Dumanoir et Clairville.
- — Le Parapluie de Damoclès, un acte, de MM.
Yarin, 'Harmau et Léman. — Stella, de M. Francis
Wey. _
Voici Ja grêle de petites pièces que nous
avions en réserve; rentrezvite chez vous, car
ça va tomber dru; nous serons bienheureux
si nous nous en tirons avec quelques vitres
cassées; d'au tant que, pendant l'averse, un
certain vent soufflait qu'on nomme le Léon
Gozlan, qui, d'ordinaire, vous fouette au vi
sage des plaisanteries aiguës et soulève les
bons mois en tourbillons.
Ensuite, pour prendre mes comparaisons
dans un autre ordre d'idées, et pour pas
ser de l'eau au feu, ce qui est toujours si
facile, même dans un feuilleton, pour peu
qu'on y metle de bonne volonté, je dirai
que ce puits d'esprit, cet ouragan du vau
deville, que notre Léon Gozlan est un vol
can, ou bien un feu d'artifice, si mieux
vous l'aimez, et qu'il n'ignore aucun des
secrets de la pyrotechnie. Ses pièces sont
pleines de fusées volantes et de serpenteaux.
/'Dans le courant de l'ouvrage, on voit tour
noyer des soleils ; il se dégage du dialogue
.des bombes lumineuses comme celles des
chandelles romaines,, et ledénoûment éclate
toujours en maniéré de bouquets Je suis
seulement étonné qu'il ne mette pas le feu aux
frises. Le public-est tenté dé s'écrier : Bravo,
Ruggieri ! Après quoi l'on sort ébloui et en
chanté, sans avoir songé, pendant tout le
temps qu'on a tiré la pièce, à autre chose
qu'aux fusées, et à cet embrasement géné
ral du théâtre. Aussi le feuilleton est-il ex
trêmement surpris, le lendemain matin, en
trouvant la carcasse noircie de l'ouvrage nou
veau. Qui est-eequi songeait laveille à la car
casse? Nous autres, nous avons le spectacle
des poutres nues, de l'échafaudage grêle et
de la scène jonchée de baguettes; ramassez
doncles fusées vides dont les bons mots sont
partis; rattrapez les pétarades; remettes tout
ce carton en place ! on vous donne le signai;
tirez, si vous le pouvez, un feu d'artifice qui
offre quelque idee de l'autre. Nous voici tous
là mèche a la main, et fort penauds ; et je
crois que c'est tout au plus si nous réussi
rons à mettre le feu à un bout de cigare,
car nous n'allumerons même pas le feuil
leton. •
Je renonce donc à la pyrotechnie; faites-
vous raconter les gerbes, les soleils et les
bombai par quelque homme de l'art ; je me
sens tout à fait impuissant à ranimer en
paroles un feu d'artifice éteint, à égaler la
brillante réalité par des descriptions ternes,
-et je vais simplement vous parler de Mlle Dé-
jazet et du costume dans lequel elle a con
senti à paraître.
Jamais, nous le savons, Mlle Déjazet ne se
montrera tout-à-fait une femme; elle fait le
petit garçon depuis si long-temps au théâtre,
qu'elle a dû devenir homme, et que ce serait
mentir au sexe qu'elle s'est donné , que de
se conformer- exactement à, celui qu'elle te
nait autrefois de la nature. Cependant on
suppliait si vivement" Déjazet de se déguiser
une fois, de mettre une robe et de jouer un
rôle de femme, qu'elle a fini par céder aux
sollicitations.
— Vous l'exigez, a-t-elle dit, j'y consens
pour ne vous pas déplaire, mais je serai ex
cessivement ridicule. Je n'ai plus l'habitudé
de cette espèce de vêtement. Comment vou
lez-vous que je me coiffe? Il faudra que
j'emprunte des nattes , que je m'agrandisse
les yeux, à la manière des actrices, avec
du noir de fumée; ensuite les femmes se
mettent, je croi-s, sur la poitrine d'es choses
qui me gêneront beaucoup; le pantalon est
si commode, l'habit si facile à porter ; je ne
pourrai jamais marcher avec des jupes. Il
faut que je -me sente mon épée dans les jam
bes pour être à l'aise: les falbalas me feront
tomber/je m'y prendrai les pieds.
On a, insisté, et, de guerre lasse, Déjazet
a accep té un rôle de comtesse dans une pièce
de Léon Gozlan,- mais à la condition de lé
jouer en poudre et en robe à paniers, c'est-
à-dire dans un attirail qui, s'il-ne ressemble
pas au costume des-hommes, n'a du moins
rien de commun avec celuique portent main
tenant les femmes. On peut considérer les
paniers comme un compromis entre les deux
sexes. Déjazet espérait bign, à l'aide des pa
niers, dissimuler la moitié de* l'embarras
qu'on éprouve toujours, si hardi qu'on
soit, dans un travesti.—Effectivement, les
paniers ont tout sauvé; quand Dejazet est
entrée, personne n'aurait pu dire que c'é
tait un garçon; à la vérité on n'aurait pas
osé non plus affirmer que c'était une femme.
Mais enfin, comme comtesse enrobe à pa
niers, elle offrait toute la vraisemblance dé
sirable.
Peut-être la mode des paniers ne vous
Elaît-efle pas, et n'en devinez-vous point le
ut ét la grâce. Les paniçrsbnt fait fureur,
cependant. Léon Gozlan nous explique pour
quoi. Selon l'auteur, les paniers étaient con
sidérés comme un rempart plutôt encore
que comme une toilette d'apparat. Il paraît
qu'on doit l'invention des paniers à Vauban,
Art. 6. Notre ministre de la marine et des colo
nies est chargé de l'exécution du présent décret.
Fait au palais des Tuileries, le 4 décembre iS'Si.
napoléon.
Par l'Empereur :
/Lot ministre secrétaire d'Etat
cfo l 'ia"mariRe"etdes ooloaies, •- • » - ~-
' théodore ducos.
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté
nationale, Empereur des Français,"
A tous présens et à venir, salut :
Sur le rapport de notre'ministre secrétaire d'E
tat au département de la marine et des colonies,
Avons décrété' et décrétons ce qui suit :
Art. i et . Remise est faite de toutes peines pro
noncées jusqu'à ce jour pour délits et contraven
tions aux décrets des 9 janvier 18S2, sur la pêche
maritime côtière ; 19 mars 1832, sur le rôle d'é
quipage et les indications des navires du com
merce; 20 mars 1852, sur la navigation au bor
nage; 24 mars 1852, sur la discipline dans la ma
rine marchande; et 28 mars 18oJ, sur la pêche
du hareng.
Art. 2.11 "ne sera exercé aucune poursuite à
raison des contraventions et délits commis anté
rieurement à ce jour et punis par lesdits décrets.
Art. 3. Notre ministre secrétaire d'Etat au dé
partement de la marine et des colonies, notre
garde-des-sceaux, ministre secrétaire d'Etat au
département de la justice", notre ministre secré
taire d'Etat au département dé l'intérieur, de l'a
griculture et du commerce, et notre miuistre se
crétaire d'Etat au département dès finances, sont
chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exé
cution du présent décret, qui sera inséré au Bul
letin des lois et au Bulletin officiel de la marine.
Fait au palais des Tuileries, le 4 décembre 1852.
napoléon.
Par l'Empereur ;
Le .ministre secrétaire d'Etat - -
de la marine et des colonies,
xhé0dobe bocos.
Le décret suivant est publié aujourd'hui
par le journal officiel :
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté
nationale, Empereur des Français ;
Considérant que le comte de Morny a rendu au
pays des services éclatans en décembre 1851;
Qu'il est juste de lui donner un témoignage
exceptionnel de notre reconnaissance;
Décrétons :
Art- 1 er . M. le comte de Morny, député au-
Corps-Législatif, ancien ministre de l'intérieur,
est nommé grand-croix dans notre ordre de fa
Légion -d'Honneur.
- Fait au palais dcs.Tuilcries. le 2 déceml*et852.
NAPOLÉON.
Par l'Empereur :
Le ministre d'Et t achille fould.
I
L& Sénat se réunna landi, G décembre, à
une heure.
Le Moniteur de ce matin contient un dé
cret dont la lecture produira une vive satis
faction en France : nous voulons parler du
décret qui nomme M. le comte de Morny
grand'eroix dans l'ordre de la Légion-d'Hon-
nejir .L&dévoûmen t atec lequel M. le comte de
Morny s'est associé à l'oeuvre réparatrice du
2 décembre,les éclatantes preuves de capacité
u'il a données comme homme d'Etat pen-
ant son court passage âu ministère de l'in
térieur, les qualités de cœur et d'esprit qu'il
a déployées dans les momens difficiles que
nous avons traversés, constituent, en effet,
des services dignes d'un témoignage excep
tionnel de reconnaissance, selon les expressions
du décret.
La France applaudira à cette haute distinc
tion accordée aM, le comte de Morny. S. M.I.
la considère comme un acte de justice et de re
connaissance de sapait. La France s'associera
à,ces expressions. S. M. estseule apte àjuger
de ce qui est juste, dans des circonstances^
de cette nature ; mais le sentiment de grati
tude appartient au pays tout entier, et il se
•manifestera spontanément envers l'homme
d'Etat si digne de cette distinction excep
tionnelle. (Patrie.)
Le gouvernement a reçu aujourd'hui, par
le télégraphe, des nouvelles de la proclama
tion du rétablissement de l'Empire dans les
départemens, et notamment dans les villes
de Lyon, Rouen, Orléans, Nantes, Tours,
Toulouse, Bar-le-Duc, Valence, Saint-Etien
ne, Strasbourg, Nancy, Lille, Valenciennes.
v Cette proclamation s'est faite en présence
des autorités civiles et militaires, au milieu
du plus grand enthousiasme de la popula
tion et aux cris de : Vive Napoléon III! Le
clergé a spontanément offert son concours
à l'autorité civile en faisant chanter des Te
■Deum, en témoignage de la part que la reli
gion prend à ce grand événement national.
(Patrie.)
Dès le matin, des salves d'artillerie tirées
des forts qui-gïrtgg|$ilt Paris ont ■MinttBtW'ht'
proclamatioiîdè l'Empire, qui devait se faire
dans toutes les communes de la banlieue. A
Sceaux, à*Saint-Denis, à Montmartre, à Cha-
renton, à Vincennes, à La Villette, à Belle-
ville, etc., on a donné une grande solennité
à cette proclamation, qui a été suivie de ré
jouissances et de banquets dans un grand
nombre de localités.
Le budget présenté par M.. d'Israeli a été
pour toute la chambre des communes une
véritable surprise. Tous les partis s'étaient
évertués à deviner les- projets du chance
lier de l'échiquier, tous lui avaient prê
té un budget de leur façon et avaient
fait leur pian de campagne en consé
quence.-: Rien de ce qui avait été annonr
cé ne s'est vérifié. M. d'Israeli a parlé
cinq heures passées, avec une clarté, une
netteté, une justesse qui ont tenu toute
la, chambre attentive. Il a présenté tout
un ensemble de mesures, tout un systè
me bien coordonné, il a enlevé à lotis les
ergoteurs- du parlement leurs chicanes fa
milières et leurs petites améliorations de
détail, il a dépassé par la hardiesse de ses
propositions toutes les réformes "'dent on
espérait se faire un drapeau contre le minis
tère, et il a laissé tous ses adversaires à court
d'argumens, d'objections et de motions. Les
journaux de tous les partis sont obligés de
rendre justice aux connaissances profondes
dont a fait preuve le nouveau ministre, à
l'étendue de ses vues et à. l'importance
de ses plans. Le Times reconnaît que
le budget de M. d'Israeli est le plas remar
quable qu'on ait présenté au parlement de
puis le dernier budget de sir Robert Peel. On
croyait, dit-il, qu'il n'y avait plus qu'à con
tinuer dans la voie ou l'on était entré, et
qu'à réaliser des réformes de détail. M. d'Is
raeli vient d'ouvrir devant le parlement et.
devant le pays un horizon tout nouveau.
, L'es propositions de M. d'Israeli peuvent
se résumer ainsi : Faire disparaître 100
millions des taxes actuellement perçues,
et retrouver ces 100 millions par la'plus;
value des taxes conservées, mais mieux as
sises et plus équitablement réparties. Ce
chiffre de 100 millions donne une idée de l'é
chelle sur laquelle M. d'Israeli se. propose
d'opérer.
- On avait prêté à M. d'Israeli l'intention de.
venir én aide à l'agriculture, en mettant
à la charge du trésor public une partie des
taxes locales, et de subvenir à cet accroisse
ment de dépenses soit par l'économie que
produirait une conversion nouvelle de la ren
te, soit par un impôt additionnel sur
les détenteurs de fonds publics. Le chan
celier de l'échiquier a trouvé le moyen d'as
surer aux classes agricoles une compensation
desper tes qu'on leur a imposées, mais c'est en
sommant les disciples de Robert Peel de se
montrer conséquens avec eux-mêmes, c'est
en leur proposant de nouvelles réductions
d'impôts. Les hommes qui ont demandé
l'abolition des lois sur les céréales en se
fondant sur ce qu'elles augmentaient le prix
du pain, ne peuvent refuser aux agricul-
teursune diminution de moitiédansles droits
dus sur la drêche et le houblon, droits qui
accroissent le prix de la bière, c'est-à-dire de
la boisson nationale et populaire. Or, cette
diminution de moitié représente une perte
de soixante millions pour le trésor.
M. d'Israeli a trouvé, dans l'application
d'une autre théorie des réformistes, un se-
eond «îoyen de venir en aide aux classes
agricoles, sans que les hommes de Manches
ter aient le moindre mot à dire. L'école de
Manchester, par hostilité contre les proprié
taires fonciers, s'est mise à préconiser l'im
pôt direct, et spécialement la taxe sur le re
venu; mais elle soutient en même temps qu'il
est injuste de taxer uniformément le revenu
fixe et assuré qui provient d'une propriété,
et le revenu toujours précaire que l'hom
me laborieux tire de son travail, de son
industrie et de son savoir; c'est-à-dire
que les représentans des villes industriel
les trouvent très bon que les revenus des
propriétaires fonciers soient soumis à la
taxe et voudraient en affranchir les reve
nus des manufacturiers-Le ministre a pris
ces réformateurs au mot : il propose de
conserver la taxe sur lerevenu,maisil divise
les contribuables en deux grandes classes
payant une quotité inégale : dans la premiè
re, il place les revenus fixes - gu capitalisés j
comme ceux qui proviennent de la propriété
-foncière ou des fonds publics; dan'sîaseconde,'
il place les revenus éventuels, varfebîes er'
précaires, comme les profits de l'industriel, 1
au marchand et du fermier % En vertu (le
"fSïïe 'cTassificatîontïe'sTermTêfs et tenanciers,
quifiguraient autrefois dans la catégorie la
plus imposée, obtiennent un dégrèvement de
vingt-cinq pour cent. Les avocats des classes
industrielles, qui ont fait valoir si souvent eri
faveur'des manufacturiers les alternatives
de baisse et de hausse dans les matières pre
mières, les chômages, etc., ne peuvent faire
d'objection à ce qu'on mette dans la même
classe les produits de .la terre, soumîsëàtoitf
tes les variations des saisons. '
La dernière réforme importante du bud
get de M. d'Israeli est la réduction du-droit
sur lé thé, qui, de deux shillings, et demi;
sera abaisse à un shilling par livre sur les
thés de toute qualité. Le ministre est
donc allé du premier coup au-delà de ce
que comptaient -demander les. agitateurs
qui voulaient former une ligue pour l'a*
baissement des droits sur le the.- Le. li
bre-échangiste Mac-Grégor, qui comptait
se mettre à la tête de cette, ligue, et s'en!
faire un piédestal politique, se voit donc du
premier coup obligé de chercher un autre
instrument cle popularité. •
Les sommes que ces diverses réductions
de droit coûteront au trésor, seront retrou
vées par. une extension delà taxe du reve
nu. Les revenus au-dessous de 3,750 francs
étaient exempts de l'income-tax ; on n'exemp
tera plus désormais que les revenus au-
dessous de 2,500 fr. On coupera court-
ainsi à quantité,de fraudes qui avaient lieU;
et comme la quotité de la taxe est sensi
blement abaissée, on n'imposera point une
charge sérieuse aux nouveaux contribu
ables. Cependant ces petites cotes, par
leur nombre considérable, représenteront
pour le trésor une somme fort importante^
La taxe sur les maisons, qui a remplacé
l'an dernier l'impôt des portes, et. fenêtres,
ne s'appliquait pas aux maisons dont le
loyer ne dépassait pas 230 francs : co
qui équivalait à un exemption de presque
ioutes les maisons situées en dehors des vil
les. La taxe sera étendue à toutes les mai
sons dont la valeur locative excédera vingt-
cinq francs), c'est-à-dire qu'on n'exemp
tera plus que l'habitation du pauvre.
Cette répartition nouvelle de la taxe sur le
revenu ét de la taxe mobilière, garantit au
trésor un revenu au moins équivalent à ce-[
lui qu'il perd par les réductions proposée^, et
elle ne lese pourtant aucun intérêt légitime.
- Ce sont' la les grands traits du budget de
M. d'Israeli, que nousnous proposons d'étu
dier plus tard dans ses détails. ; "
cuciieval-cr.arigny.
On écrit de Bruxelles, le 3 décembre :
Nous apprenons que M. le duc de Bas
sani) a, dès hier, notifié officiellement au
gouvernement belge l'avénement de Loujs-
Napoléon ni à l'Empire. »,
On nous écrit de Stockholm, 27 novem
bre : - ,
« Les bulletins du château sont plus sa-
tisftusans. — Une amélioration s'est mani
festée durant ces trois derniers jours, très-
lente, il est vrai, mais progressive ; et les
médecins sont unanimes pour espérer unë
prochaine entrée en convalescence. »
IX DE ANGLAISE.
Nous avons déjà annoncé, d'après la dé
pêche télégraphique de Trieste, la prise de
la ville de Prome par l'expédition anglaise
dirigée contre l'empire des Birmans. Les
journaux de l'Inde qui nous sont parvenus
contiennent sur cet événement de nombreux
détails, extraits des rapports officiels adres
sés au gouverneur-général de l'Inde parie
major-général Godwin et par le commodore
Lambert, ainsi que des correspondances par-»
ticulières.
Les troupes anglaises, au nombre de 2,300
hommes, quittèrent Rangoun le 18 septem
bre et s'embarquèrent sur les bateaux à va
peur de l'escadre pour remonter le fleuve
Irawaddy. Le 9 octobre, elles arrivèrent eni
vue de Prome, sans avoir rencontré aucune
résistance. L'ennemi n'avait fortifié que les
approches de la ville ; les canons des stea
mers répondirent au premier feu des Bir
mans , et en deux heures, les batteries établies
surlerivagefurentcomplètementdémOntées.
Vers cinq heures, un détachement du 80*
et que les maris du siècle dernier les mirent
en usage, pour couvrir leui côté faible, c'est-
à-dire leurs femmes, contre les surprises de
l'ennemi.
Tentez donc quelque entreprise galante
vis-à-vis d'une comtesse revêtue de ses pa
niers. La comtesse aurait la plus tendre dis
position à se laisser entraîner, que les pa
niers deviendraient un obstacle naturel et
insurmontable qu'aucun amant;—et je parle
des invincibles,—ne pourraitfranchir. Voyez
"d'ici le cher amant dire à sa comtesse :
Idole de mon ame, réponds à ma flamme !
— La comtesse, à demi défaillante, se
défend à peine, et se laisse aller... Elle est
soutenue par ses paniers, et ne tombe ja
mais. L'amant veut-il presser sur son cœur
l'idole de son ame; autant essayer d'enser
rer le dôme des Invalides; les bras leg
plus longs n'arrivent seulement pas à la
taille de la bien-aimée. ;— Alors, il faut
supplier la comtesse d'abandonner un,appa
reil si- peu favorable au sentiment. — Chère
comtesse, s'écrie le marquis, au paroxisme
de l'amour, quittez vos paniers ! — Le mot
tombe déjà comme une douche surle tête-'
à-tète. Quoi de plus prosaïque, dans un mo
ment de grand lyrisme, que ce: Quittez vos
paniers! — Mais je supposé que la comtesse
ait pris une résolution héroïque ; elle sait le
marquis capable de se percer le cœur sous
ses yeux si elle lui résiste davantage : — Tu
le veux, cruel" marquis, dit-elle d'une voix
mourante, eh bien! je vais défaire mes pa
niers ! "
Sûr quoi la comtesse sort, fait des ré
flexions sages dans son cabinet de toilette,
et ne revient pas. Le marquis se ealme; en
nuyé d'attendre, il prend le parti de s'en
aller : l'honneur du comte est sauf !
. Voilà à quoi servaient les paniers. Nous
n'avons plus de paniers aujourd'hui; mais
la vertu de nts dames les remplace avanta
geusement, et les maris le savent bien.
SoUs Louis XV, les mœurs étaient fort re
lâchées; les paniers eux-mêmes ne met
taient pas toujours un honnête gentilhomme
à l'abri; car enfin, si précautionnée qu'on
soit, on ne dort pas avec ses paniers", et l'on
sait combien de pauvres comtesses furent
surprises hors de leur osier.
Le comte, fort jaloux de sa nature,—
quelle bizarrerie étonnante pour l'époque !
—le comte avait donc défendu à la comtesse
de jamais sortir de ses paniers. — Comtesse,
je pars pour la Bretagne, où le roi m'envoie;
faites-moi l'amitié, pour me tranquilliser, de
vous faire confectionner des paniers de nuit
dans lesquels vous rêverez ae moi tout à
votre aise, et le plus innocemmentdumonde.
C'est-à-dire que le comte entendait laisser
sa tourterelle en ca^e.
— Cher comte, repondit la comtesse, vi
vez en paix, mes paniers et votre souvenir
ne me quitteront pas.
Mais à peine le comte avait-il tourné les
talons, que le petit de Giac vint rendre visite
à sa cousine."
— Ahi cousine ! fit le cousin bien tendre
ment".
— Ah ! cousin !... fit la cousine en soupi
rant. (Comme de juste, on avai§ dû les ma
rier autrefois.) :
< .—Chère cousine, continua le petit de Giac
pour dire quelque chose,—car l'on ne sait ja
mais trop que dire en pareille circonstance
quand on est très jeune et vivement épris
(ô timidité inséparable des premiers dé
buts !) — cousine, vous avez de fort beaux
paniers.
Cousin, c'est mon mari qui me les a
donnés.
— Ne me parlez jamais de votre mari !
«'écria le petit de Giac d'un ton tragique.
— S'il vous trouvait ici, il nous tuerait,
répondit la comtesse. ,
Au même instant on entendit des pas dans
l'escalier; c'était le comte .qui revenait sur
ses pas, voir une dernière fois les paniers de
la comtesse :
— Où me. cacher? demanda le petit de
Giac.
— Mon Dieu ! répondit la comtesse, il n'y
a pas de Cabinets dans ce vaudeville, M.
le comte les a tous condamnés, comme at
tentatoires à son honneur, et les fenêtres
sont murées.
—r Je ne suis pourtant pas bien gros, fit
le pauvre petit Giac , on me mettrait dans
une armoire.
— Toutes les armoires, répondit la com
tesse, ont également été exclues de la pièce,
je ne vois qu'un endroit où pouvoir vous
cacher,, c'est mon panier gauche. Entrez-y,
car la situation vous y force, et elle a été
évidemment préparée fort habilement pour
ne vous point laisser d'autre asile.
jt,e petit Giac se mit donc sous le panier
gauche, et il ne s'y trouvait pas fort à plain
dre, puisque ça le rapprochait d'autant du
cœur de sa charmante cousine, quand M. le
comte entra chez la comtesse.
— Chère amie, s'écria notre jaloux, vous
voyez en moi un mari bienheureux de re
trouver sa femme telle qu'il l'a laissée, avec
des paniers, symbole de la pudeur.
— Comte, je m'habitue parfaitement à
une mode qui vous plaît, et je commence
même à trouver mes paniers très commo-.
des, en ce sens qu'on y peut mettre bien des
choses. '
— Naïve enfant! fit le comte au comble
de l'ivresse; puis il ajouta galamment : Si
vos paniers ne mettaient pas une barrière
entre vous et moi... Mais qu'entends-je?... ^
En effet, les trompes sonnaient dans l'a»
venue du château : Mironton, ton, ton, mi-
ronton, mirontaine.
—Ces fanfares, s'écria le comte; m'annon-
Prix de l'aboiement.
befartfibïeffls :|
. ï® fb. peua trois mois
paris;
13 f». pour trois mois.
un numéro : 20 centimes.
»obb les pats étrangers, se reporter au
tableau publié dans le journal, les tO si
S5.de chaque mois.
fe>JSâ3'
eiIEffîm : rn® de Valois (Palals-Boyal^ ftO.
B 1852.?- LUNDI 6 DÉCEMBRE.
Joute lettre non, affranchie sera rigoureusem-.n' refi
Les articles déposés ne sont pas rendus.
""Oiui//
/S4s3
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
!On s'ahonn", dan? les départemens, aux Messageries et aux Directions de p»sto, — A Londres, ches MM. Cowee et fus.
•*- A Strasbourg, chez M. Axeïamsbe, pru* C Allemagne.
S'adresser, franco ', pour l'admit!
à m. dbnira, directeur^-;-_ -,«-j,
Les annonces sont reçues chez M. PANIS, régisseur, 10, place de la Bourse p -!i
et au bureau du journal.
PARIS, 5 DÉCEMBRE.
* Les partis, qui voient avec regret le nou
veau gouvernement se consolider en Fran
ce, cherchent jeterdes "inquiétudes dans
kp pïiys> en présentant l'immense mouvement
d'affaires dont nous sommes témoins comme
le résultat d'un entraînement irréfléchi,d'une
spéculation effrenee. A les en croire, cette
hausse générale des valeurs est illusoire et
factice. Nous sommes sous l'influence d'un
tairage trompeur, qui peut égarer les es
prits superficiels. mais qui n'abuse pas les
hommes mtelligens et habitués à aller au
fond des choses.
Rien de plus curieux que les raisonnement
auxquels ont recours ces pessimistes intéres
sés. Si vous-leur dites que la rente, en s'éle-
vaat à 85 fr., ne fait que reprendre le niveau
qu'elle avait atteint sous le gouvernement de
Louis-Philippe, ils vous répondent- comme
Banville, dans l'Ecole des Vieillards : Mais
bous , c'est autre chose ! « De notre temps,
disent-ils, la hausse était en harmonie avec
le" développement progressif des affaires,
et pouvait-être considérée comme un in
dice véritable de l'état du crédit. Il n'en
est pas de même aujourd'hui. La haus
se actuelle s'est faite trop subitement
pour qu'elle puisse provenir d'une situation
vraie et régulière; elle est presque entière
ment artificielle, et .doit être attribuée,
sur tout à une déviation des capitaux qui se
portent en masse à la Bourse, et qui débor
dent avec l'impétuosité du torrent. »
La distinction est subtile, il faut en con
venir. De ce que la rente a gagne 30 fr. en
quelques mois, de ce que les actions de che
mins de fer et les actions industrielles ont
presque doublé de valeur dans un espace de
temps aussi court, vous en concluez que
cette hausse rapide est une hausse de mau
vais aloi. Le temps, en pareille chose , ne
fait rien à l'affaire. Et si la hausse a été ra
pide, vous oubliez apparemment qu'à une
certaine époque la baisse l'avait été encore
bien davantage.
Faut-il vous rappeler qu'après la révolur
tion de février, on a vu le 5 0/0 tomber pres
que immédiatement à 50 fr.?Certes, la chute"
fut ^brusque. Direz-vous qu'une baisse aussi
énorme en aussi peu de temps ait été le
résultat d'un mouvement factice ï Vous
savez bien que non. La situation était telle,
que les capitaux ne pouvaient se prêter sans
exiger une prime d'assurance en rapport
avec les risques qu'ils couraient. Qu'est-il
arrivé plus tard, lorsque la tranquillité s'est
raffermie ? Lès" cours de la renie et dé
toutes les valeurs se sont relevés ; ils
n'ont pu cependant atteindre le même taux;
qu'autrefois, parce que, si l'on avait la sécu
rité du présent, on n'avait pas celle de l'ave-"
nir. Mais enfin Louis-Napoléon a pris la réso
lution héroïque de nous arracher à cet état
d'incertitude qui paralysait le crédit public-et
le crédit privé; il a consulté le pays deux fois en
une année, et, d'accord avec la volonté natio
nale, il a fondé un gouvernement stable qui
présente toutes lés garanties d'ordre et de
durée. Pourquoi donc, nous le demandons,
toutes les valeurs ne seraient-elles pas re
montées alors aux mêmes prix que dans les
jours les plus prospères de la précédente
monarchie?
Qu'on veuille bien nous apprendre pour
quelle raison le 3 0/0 ne" vaudrait pas au
jourd'hui 85 fr. comme il y a six ans. Le
gouvernement de Louis-Napoléon serait-il
moins soUde que celui de Louis-Philippe î
On n'oserait le prétendre. Elu trois fois
par le peuple, l'héritier de l'Empereur a
établi son pouvoir sur la base la plus
large et la plus forte- qui ait jamais exis
té. La France serait-elle moins riche ac
tuellement qu'elle n'était avant la révolu
tion de février? L'assertion ne serait pas
plus exacte. Si l'année 18-48 a été dé
sastreuse., on a beaucoup travaille pen
dant les années suivantes, et, précisé
ment parce qu'on craignait de s'engager
dans des affaires de longue haleine, on a pu
amasser des épargnes qui n'attendaient que
le retour de la confiance pour chercher un
placement. Or, n'était-il pas êrôdtfllTqit'âVee
un gouvernement mieux établi, avec une
France plus riche, L crédit publie devait se
relever promptement et de lui-même au
point ou il avait été quelques années aupa
ravant ?
Le crédit des compagnies, de chemins de
fer a suivi tout naturellement celui de l'Etat;
mais il a encore été servi par d'autres cau
ses. Des chemins qui étaient en construction
ont été achevés. Notre réseau s'est agrandi.
L'expérience a révélé ce qu'il y avait d'ave
nir dans ces entreprises dont nous igno
rions tous, les élémens de succès. Le dé
veloppement de la circulation, l'accrois
sement des transports, le progrès con
tinu des recettes ont contribué à faire
rechercher dés placemens qui tendaient
sans cesse à s'améliorer. Que l'on compare
le prix des actions avec le produit des che
mins, et l'on reconnaîtra qu'il n'a rien
d'exagéré.
, Ainsi, la hausse des valeurs, si rapid
qu'elle ait été, n'est due qu'à un mouvement
naturel et régulier. L'attribuer à un engoû-
ment momentané, qui précipite les capitaux
vers la Bourse, c'est yodloir fermer les yeux
à la lumière pour n'écouter que ses rancu
nes et ses passions. Et d'ailleurs, pour que
cette explication eût l'ombre de vraisem
blance, il faudrait que les capitaux eus
sent déserté l'agriculture, le commerce, l'in-
dustrie.Or,jamaisragriculture,lecommerce,
l'industrie n'ont obtenu l'argent à aussi bon
compte. Les propriétés territoriales, invenda
bles il y a peu de temps encore, ont reprisleur
valeur. Partout on construit des usines et l'on
augmente celles qui existaient. A aucune
époque, nos manufactures de coton, de lai
ne, de soie n'ont été- aussi prospères. On
peut en dire autant de nos industries de
luxe. Le mouvement n'est donc pas concentré •
entre les quatre murs de la Bourse; il s'é
tend sur la Franee entière; il embrasse
toutes les branches de l'actiyité publique.
J. Bi:rat.
C'est aujourd'hui que la proclamation de
l'Empire se fait* dans toute la France ; dans
quelques communes éloignées seulement, la
solennité sera renvoyée à dimanche pro
chain. .
Presque partout, les conseils municipaux
des villes ont voulu répondre, selon leurs
moyens, au désir du nouvel Empereur, en
.distribuant des secours aux indigens. Ici,
l'on fera des dons de combustibles, ail
leurs de vêtemeus ; dans plusieurs villes,
à Metz, à Strasbourg, à Arras, à Nancy, à
Reims-, etc., on dégagera du Mont-de-Piété,
les effets engagés pour de faibles sommes,
surtout les couvertures et les vêtemèns d'hi
ver; ailleurs, à Lille , par exemple, on fera
des distributions d'effets de couchage ; ail
leurs encore , dans le Gers , les enfans
les plus méritans des écoles communales
recevront des livrets de caisse d'épargne.
Mais, sans négliger les pauvres, quel
ques villes ont pensé qu'on pouvait don
ner quelqu'éclat à la solennité par des
illuminations, par des spectacles gratis.
Dans les grandes places de guerre, telles
que Lille et Strasbourg, la pompe militaire
que déploie la garnison unie à la garde natio
nale, dispense pour ainsi dire de tout au
tre appareil. Dans des villes de moindre im
portance, il fallait quelque chose de plus.
Ainsi, à Guéret, il y aura une représenta
tion gratuite, pour laquelle on a monté ex
pressément le Fils de l'Homme. A Arras,
le 1" régiment du génie-comptait éclairer
les promenades au moyen de la lumière
électrique et d'artifices de guerre. A Lille,
une cantate en l'honneur dé l'Empereur se
ra chantée au théâtre. ,
Dans beaucoup de villes, les chefs de corps
mettent leur musique militaire à la disposi
tion de l'autorité pour exécuter des mor
ceaux d'harmonie, le soir, sur les estrades du
haut desquelles aura été proclamé l'Empire.
Conformément à la circulaire .de M. de
Pei signy, il ne devait pas y avoir de cérémo
nie religieuse officielle. Cèpendant plusieurs
prélats, notamment l'évèque d'Orléans et
révêque de Verdun, ont fuit savoir qu'ils
chanteraient le Veni Creator et le Te Deum.
Dans un grand nombre de localités, des
banquets ou des b.als~ par. souscription-ont"
Me organisés; presque partout, l'autorité
supérieure locale ouvrira ses salons le soir
de ce grand jour.
C'est d'une fête de ce genre qu'on peut'
dire d'avance, avec assurance, que la joie a
été universelle. Quand huit millions d'hom
mes ont su se réunir pour élever un trône, ;
on peut être sur qu'ils sauront bien s'enten- 1
dre pour célébrer l'accomplissement de leurs
vœux. - l. boniface.
L'armée-de mer et la population côtière
auront aussi.leur part dans les grâces accor
dées par Napoléon III, à l'occasion de son
avènement a l'Empire. S. M. I. a signé hier,
les deux décrets-suivans : ' / "I
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté
nationale, Empereur des Français,
A tous présens et à venir, salut :
Voulant signaler par des actes de clémence no
tre avènement au trône, où le vœu de la natiori
nous a appelé, - r ,
Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'E
tat au département de la marine et des colonies,
Avons décrété et décrétons ce qui suit :
Art. l ct . Amnistie est accordée aux officiers^
mariniers et matelots, ainsi qu'aux sous-officiers,
brigadiers, caporaux et soldats des troupes de là
marine en état de désertion, et aux insoumis qui,
à la date du présent décret, n'ont pas été jugés
et condamnés définitivement.
Art. 2. L'amnistie est entière, absolue et sans
condition de service pour les déserteurs et insou
mis qui se trouvant-dans l'un des cas suivaus :
1° Pour les insoumis qui appartiennent à l'une
des classes jus'ques et y compris celle de 1840, ou
qui se sont engagés volontairement antérieure
ment au 3J décembre 1840;
2° Pour les déserteurs qui ont été admis sous
les drapeaux, à quelque titre que ce soit, anté
rieurexent au 31 décembre 1841
3° Pour les déserteurs, et insoumis actuellement
mariés ou veufs ayant un ou plusieurs enfans, ou
âgés, à là date du présent décret, de plus de
trente-six ans;
4° Pour les déserteurs et insoumis qui se trou
veraient, à la date du présent décret, dans l'un des
cas d'exemption prévus par l'art. 13 de la loi du
21 mars-1832 (1);
5° Pour les déserteurs auxquels il ne reste pas,
à la même date, plus d'une année de service à
faire pour atteindre le temps de leur libération.
Art. 3. Les déserteurs ou insoumis qui ne rem
plissent pas l'une des conditions' du précédent
article seront tenus d'entrer dans l'armée de terre
ou de mer, pour y accomplir le temps de service
auquel ils sont astreints par la loi du 21 mars.
1832, temps dans lequel celui de leur absence ne
sera pas compté.
Art. 4. L'application de l'amnistie sera laite par
les autorités auxquelles le ministre de la marine
adressera des instructions à cet effet. Les déser
teurs et insoumis devront se présenter devant
l'une d'elles pour formuler leur déclaration de re
pentir avant l'expiration des délais ci-après, qui
compteront à partir de la date du présent décret ;
Savoir :. '
Deux mois pour ceux qui sont dans l'intérieur
-de la -France;
Trois mois pour ceux qui sont en Corse;.
Six mois pour ceux qui sont hors du territoire
français, mais en Europe ou en Algérie;
Un an pour ceux qui sont hors d'Europe, et dix-
huit mois pour ceux qui sont au-delà du cap de'
Bonne-Espérance ou du cap Horn.
Art. 5. A l'expiration de ces délais, le ministre
de la marine donnera des ordres à l'effet de pour-:
suivre de nouveau fes déserteurs et insoumis qui
ne se seront pas présentés pour réclamer le bénér
fice de la présente amnistie.
Ceux des déserteurs et insoumis qui ne sont pas
dégagés de l'obligation de servir, et qui, après
avoir reçu l'application de l'amnistie et avoir pris
une feuille de route pour rejoindre un corps, ne
se rendraient pas à leur destination dans lès dé
tais fixés par les règlemens, resteront sous le poids
de la législation relative à la désertion et à l'in
soumission, et-seront considérés comme -déser
teurs ou insoumis par récidive.
(I) Seront exemptés... les jeunes gens... qui se
trouveront dans un des ças suivans : '
1° Ceux qui n'auront pas la tailla de 1 îiètre 56
centimètres;
2° Ceux que leurs infirmités rendront impropres au
service ; .
3° L'ainé d'orphelins de père et de mère ; .
4° Le fils unique ou l'ainé des fils, ou, à défaut de
fils ou de gendre, le petit-fils unique ou l'ainé des
pstits-fils d une femme actuellement veuve, ou d'un
père aveugle ou entré dans sa soixante et dixième
année. -. " ' ■
S 0 Le plus âgé des deux frères appelés à faire par
tie du même tirage et désignés tous deux par le sort,
si Je plus jeune est reconnu propre au service ; '
6° Celui dont ui) frère sera sous les drapeaux à
tout autre titre que. par remplacement; ,
7° Celui dont un frère sera mort en activité de ser
vice, ou aura été réformé ou admis à la retraite pour
blessures reçues dans un service commandé, ou in
firmités contractées dans les armées de terre ou de
mer., . ;
FEUILLETON DU CQHCT1TUTI8NNEL, 6 MCEMBBE-
THÉÂTRES.
v A ldevii.lb : Les Paniers de la Marquise, vaudeville
en un acte, de Léon Gozlan. — Le Clu!ne et le Ro-
■' seau, comédie-vaudeville en un acte, de M. Galoppe
d'Onqûaire. — variétés : Ce que vivent les roses,
„ vaudeville en un acte, de MM. Monnier etMartin.—
Les Deux inséparables, vaudeville en un acte, de M.
H. de Fouiquemont.— pàlais-boyal: La Femme aux
Œufs d'or, un acte, de MM. Dumanoir et Clairville.
- — Le Parapluie de Damoclès, un acte, de MM.
Yarin, 'Harmau et Léman. — Stella, de M. Francis
Wey. _
Voici Ja grêle de petites pièces que nous
avions en réserve; rentrezvite chez vous, car
ça va tomber dru; nous serons bienheureux
si nous nous en tirons avec quelques vitres
cassées; d'au tant que, pendant l'averse, un
certain vent soufflait qu'on nomme le Léon
Gozlan, qui, d'ordinaire, vous fouette au vi
sage des plaisanteries aiguës et soulève les
bons mois en tourbillons.
Ensuite, pour prendre mes comparaisons
dans un autre ordre d'idées, et pour pas
ser de l'eau au feu, ce qui est toujours si
facile, même dans un feuilleton, pour peu
qu'on y metle de bonne volonté, je dirai
que ce puits d'esprit, cet ouragan du vau
deville, que notre Léon Gozlan est un vol
can, ou bien un feu d'artifice, si mieux
vous l'aimez, et qu'il n'ignore aucun des
secrets de la pyrotechnie. Ses pièces sont
pleines de fusées volantes et de serpenteaux.
/'Dans le courant de l'ouvrage, on voit tour
noyer des soleils ; il se dégage du dialogue
.des bombes lumineuses comme celles des
chandelles romaines,, et ledénoûment éclate
toujours en maniéré de bouquets Je suis
seulement étonné qu'il ne mette pas le feu aux
frises. Le public-est tenté dé s'écrier : Bravo,
Ruggieri ! Après quoi l'on sort ébloui et en
chanté, sans avoir songé, pendant tout le
temps qu'on a tiré la pièce, à autre chose
qu'aux fusées, et à cet embrasement géné
ral du théâtre. Aussi le feuilleton est-il ex
trêmement surpris, le lendemain matin, en
trouvant la carcasse noircie de l'ouvrage nou
veau. Qui est-eequi songeait laveille à la car
casse? Nous autres, nous avons le spectacle
des poutres nues, de l'échafaudage grêle et
de la scène jonchée de baguettes; ramassez
doncles fusées vides dont les bons mots sont
partis; rattrapez les pétarades; remettes tout
ce carton en place ! on vous donne le signai;
tirez, si vous le pouvez, un feu d'artifice qui
offre quelque idee de l'autre. Nous voici tous
là mèche a la main, et fort penauds ; et je
crois que c'est tout au plus si nous réussi
rons à mettre le feu à un bout de cigare,
car nous n'allumerons même pas le feuil
leton. •
Je renonce donc à la pyrotechnie; faites-
vous raconter les gerbes, les soleils et les
bombai par quelque homme de l'art ; je me
sens tout à fait impuissant à ranimer en
paroles un feu d'artifice éteint, à égaler la
brillante réalité par des descriptions ternes,
-et je vais simplement vous parler de Mlle Dé-
jazet et du costume dans lequel elle a con
senti à paraître.
Jamais, nous le savons, Mlle Déjazet ne se
montrera tout-à-fait une femme; elle fait le
petit garçon depuis si long-temps au théâtre,
qu'elle a dû devenir homme, et que ce serait
mentir au sexe qu'elle s'est donné , que de
se conformer- exactement à, celui qu'elle te
nait autrefois de la nature. Cependant on
suppliait si vivement" Déjazet de se déguiser
une fois, de mettre une robe et de jouer un
rôle de femme, qu'elle a fini par céder aux
sollicitations.
— Vous l'exigez, a-t-elle dit, j'y consens
pour ne vous pas déplaire, mais je serai ex
cessivement ridicule. Je n'ai plus l'habitudé
de cette espèce de vêtement. Comment vou
lez-vous que je me coiffe? Il faudra que
j'emprunte des nattes , que je m'agrandisse
les yeux, à la manière des actrices, avec
du noir de fumée; ensuite les femmes se
mettent, je croi-s, sur la poitrine d'es choses
qui me gêneront beaucoup; le pantalon est
si commode, l'habit si facile à porter ; je ne
pourrai jamais marcher avec des jupes. Il
faut que je -me sente mon épée dans les jam
bes pour être à l'aise: les falbalas me feront
tomber/je m'y prendrai les pieds.
On a, insisté, et, de guerre lasse, Déjazet
a accep té un rôle de comtesse dans une pièce
de Léon Gozlan,- mais à la condition de lé
jouer en poudre et en robe à paniers, c'est-
à-dire dans un attirail qui, s'il-ne ressemble
pas au costume des-hommes, n'a du moins
rien de commun avec celuique portent main
tenant les femmes. On peut considérer les
paniers comme un compromis entre les deux
sexes. Déjazet espérait bign, à l'aide des pa
niers, dissimuler la moitié de* l'embarras
qu'on éprouve toujours, si hardi qu'on
soit, dans un travesti.—Effectivement, les
paniers ont tout sauvé; quand Dejazet est
entrée, personne n'aurait pu dire que c'é
tait un garçon; à la vérité on n'aurait pas
osé non plus affirmer que c'était une femme.
Mais enfin, comme comtesse enrobe à pa
niers, elle offrait toute la vraisemblance dé
sirable.
Peut-être la mode des paniers ne vous
Elaît-efle pas, et n'en devinez-vous point le
ut ét la grâce. Les paniçrsbnt fait fureur,
cependant. Léon Gozlan nous explique pour
quoi. Selon l'auteur, les paniers étaient con
sidérés comme un rempart plutôt encore
que comme une toilette d'apparat. Il paraît
qu'on doit l'invention des paniers à Vauban,
Art. 6. Notre ministre de la marine et des colo
nies est chargé de l'exécution du présent décret.
Fait au palais des Tuileries, le 4 décembre iS'Si.
napoléon.
Par l'Empereur :
/Lot ministre secrétaire d'Etat
cfo l 'ia"mariRe"etdes ooloaies, •- • » - ~-
' théodore ducos.
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté
nationale, Empereur des Français,"
A tous présens et à venir, salut :
Sur le rapport de notre'ministre secrétaire d'E
tat au département de la marine et des colonies,
Avons décrété' et décrétons ce qui suit :
Art. i et . Remise est faite de toutes peines pro
noncées jusqu'à ce jour pour délits et contraven
tions aux décrets des 9 janvier 18S2, sur la pêche
maritime côtière ; 19 mars 1832, sur le rôle d'é
quipage et les indications des navires du com
merce; 20 mars 1852, sur la navigation au bor
nage; 24 mars 1852, sur la discipline dans la ma
rine marchande; et 28 mars 18oJ, sur la pêche
du hareng.
Art. 2.11 "ne sera exercé aucune poursuite à
raison des contraventions et délits commis anté
rieurement à ce jour et punis par lesdits décrets.
Art. 3. Notre ministre secrétaire d'Etat au dé
partement de la marine et des colonies, notre
garde-des-sceaux, ministre secrétaire d'Etat au
département de la justice", notre ministre secré
taire d'Etat au département dé l'intérieur, de l'a
griculture et du commerce, et notre miuistre se
crétaire d'Etat au département dès finances, sont
chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exé
cution du présent décret, qui sera inséré au Bul
letin des lois et au Bulletin officiel de la marine.
Fait au palais des Tuileries, le 4 décembre 1852.
napoléon.
Par l'Empereur ;
Le .ministre secrétaire d'Etat - -
de la marine et des colonies,
xhé0dobe bocos.
Le décret suivant est publié aujourd'hui
par le journal officiel :
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté
nationale, Empereur des Français ;
Considérant que le comte de Morny a rendu au
pays des services éclatans en décembre 1851;
Qu'il est juste de lui donner un témoignage
exceptionnel de notre reconnaissance;
Décrétons :
Art- 1 er . M. le comte de Morny, député au-
Corps-Législatif, ancien ministre de l'intérieur,
est nommé grand-croix dans notre ordre de fa
Légion -d'Honneur.
- Fait au palais dcs.Tuilcries. le 2 déceml*et852.
NAPOLÉON.
Par l'Empereur :
Le ministre d'Et t achille fould.
I
L& Sénat se réunna landi, G décembre, à
une heure.
Le Moniteur de ce matin contient un dé
cret dont la lecture produira une vive satis
faction en France : nous voulons parler du
décret qui nomme M. le comte de Morny
grand'eroix dans l'ordre de la Légion-d'Hon-
nejir .L&dévoûmen t atec lequel M. le comte de
Morny s'est associé à l'oeuvre réparatrice du
2 décembre,les éclatantes preuves de capacité
u'il a données comme homme d'Etat pen-
ant son court passage âu ministère de l'in
térieur, les qualités de cœur et d'esprit qu'il
a déployées dans les momens difficiles que
nous avons traversés, constituent, en effet,
des services dignes d'un témoignage excep
tionnel de reconnaissance, selon les expressions
du décret.
La France applaudira à cette haute distinc
tion accordée aM, le comte de Morny. S. M.I.
la considère comme un acte de justice et de re
connaissance de sapait. La France s'associera
à,ces expressions. S. M. estseule apte àjuger
de ce qui est juste, dans des circonstances^
de cette nature ; mais le sentiment de grati
tude appartient au pays tout entier, et il se
•manifestera spontanément envers l'homme
d'Etat si digne de cette distinction excep
tionnelle. (Patrie.)
Le gouvernement a reçu aujourd'hui, par
le télégraphe, des nouvelles de la proclama
tion du rétablissement de l'Empire dans les
départemens, et notamment dans les villes
de Lyon, Rouen, Orléans, Nantes, Tours,
Toulouse, Bar-le-Duc, Valence, Saint-Etien
ne, Strasbourg, Nancy, Lille, Valenciennes.
v Cette proclamation s'est faite en présence
des autorités civiles et militaires, au milieu
du plus grand enthousiasme de la popula
tion et aux cris de : Vive Napoléon III! Le
clergé a spontanément offert son concours
à l'autorité civile en faisant chanter des Te
■Deum, en témoignage de la part que la reli
gion prend à ce grand événement national.
(Patrie.)
Dès le matin, des salves d'artillerie tirées
des forts qui-gïrtgg|$ilt Paris ont ■MinttBtW'ht'
proclamatioiîdè l'Empire, qui devait se faire
dans toutes les communes de la banlieue. A
Sceaux, à*Saint-Denis, à Montmartre, à Cha-
renton, à Vincennes, à La Villette, à Belle-
ville, etc., on a donné une grande solennité
à cette proclamation, qui a été suivie de ré
jouissances et de banquets dans un grand
nombre de localités.
Le budget présenté par M.. d'Israeli a été
pour toute la chambre des communes une
véritable surprise. Tous les partis s'étaient
évertués à deviner les- projets du chance
lier de l'échiquier, tous lui avaient prê
té un budget de leur façon et avaient
fait leur pian de campagne en consé
quence.-: Rien de ce qui avait été annonr
cé ne s'est vérifié. M. d'Israeli a parlé
cinq heures passées, avec une clarté, une
netteté, une justesse qui ont tenu toute
la, chambre attentive. Il a présenté tout
un ensemble de mesures, tout un systè
me bien coordonné, il a enlevé à lotis les
ergoteurs- du parlement leurs chicanes fa
milières et leurs petites améliorations de
détail, il a dépassé par la hardiesse de ses
propositions toutes les réformes "'dent on
espérait se faire un drapeau contre le minis
tère, et il a laissé tous ses adversaires à court
d'argumens, d'objections et de motions. Les
journaux de tous les partis sont obligés de
rendre justice aux connaissances profondes
dont a fait preuve le nouveau ministre, à
l'étendue de ses vues et à. l'importance
de ses plans. Le Times reconnaît que
le budget de M. d'Israeli est le plas remar
quable qu'on ait présenté au parlement de
puis le dernier budget de sir Robert Peel. On
croyait, dit-il, qu'il n'y avait plus qu'à con
tinuer dans la voie ou l'on était entré, et
qu'à réaliser des réformes de détail. M. d'Is
raeli vient d'ouvrir devant le parlement et.
devant le pays un horizon tout nouveau.
, L'es propositions de M. d'Israeli peuvent
se résumer ainsi : Faire disparaître 100
millions des taxes actuellement perçues,
et retrouver ces 100 millions par la'plus;
value des taxes conservées, mais mieux as
sises et plus équitablement réparties. Ce
chiffre de 100 millions donne une idée de l'é
chelle sur laquelle M. d'Israeli se. propose
d'opérer.
- On avait prêté à M. d'Israeli l'intention de.
venir én aide à l'agriculture, en mettant
à la charge du trésor public une partie des
taxes locales, et de subvenir à cet accroisse
ment de dépenses soit par l'économie que
produirait une conversion nouvelle de la ren
te, soit par un impôt additionnel sur
les détenteurs de fonds publics. Le chan
celier de l'échiquier a trouvé le moyen d'as
surer aux classes agricoles une compensation
desper tes qu'on leur a imposées, mais c'est en
sommant les disciples de Robert Peel de se
montrer conséquens avec eux-mêmes, c'est
en leur proposant de nouvelles réductions
d'impôts. Les hommes qui ont demandé
l'abolition des lois sur les céréales en se
fondant sur ce qu'elles augmentaient le prix
du pain, ne peuvent refuser aux agricul-
teursune diminution de moitiédansles droits
dus sur la drêche et le houblon, droits qui
accroissent le prix de la bière, c'est-à-dire de
la boisson nationale et populaire. Or, cette
diminution de moitié représente une perte
de soixante millions pour le trésor.
M. d'Israeli a trouvé, dans l'application
d'une autre théorie des réformistes, un se-
eond «îoyen de venir en aide aux classes
agricoles, sans que les hommes de Manches
ter aient le moindre mot à dire. L'école de
Manchester, par hostilité contre les proprié
taires fonciers, s'est mise à préconiser l'im
pôt direct, et spécialement la taxe sur le re
venu; mais elle soutient en même temps qu'il
est injuste de taxer uniformément le revenu
fixe et assuré qui provient d'une propriété,
et le revenu toujours précaire que l'hom
me laborieux tire de son travail, de son
industrie et de son savoir; c'est-à-dire
que les représentans des villes industriel
les trouvent très bon que les revenus des
propriétaires fonciers soient soumis à la
taxe et voudraient en affranchir les reve
nus des manufacturiers-Le ministre a pris
ces réformateurs au mot : il propose de
conserver la taxe sur lerevenu,maisil divise
les contribuables en deux grandes classes
payant une quotité inégale : dans la premiè
re, il place les revenus fixes - gu capitalisés j
comme ceux qui proviennent de la propriété
-foncière ou des fonds publics; dan'sîaseconde,'
il place les revenus éventuels, varfebîes er'
précaires, comme les profits de l'industriel, 1
au marchand et du fermier % En vertu (le
"fSïïe 'cTassificatîontïe'sTermTêfs et tenanciers,
quifiguraient autrefois dans la catégorie la
plus imposée, obtiennent un dégrèvement de
vingt-cinq pour cent. Les avocats des classes
industrielles, qui ont fait valoir si souvent eri
faveur'des manufacturiers les alternatives
de baisse et de hausse dans les matières pre
mières, les chômages, etc., ne peuvent faire
d'objection à ce qu'on mette dans la même
classe les produits de .la terre, soumîsëàtoitf
tes les variations des saisons. '
La dernière réforme importante du bud
get de M. d'Israeli est la réduction du-droit
sur lé thé, qui, de deux shillings, et demi;
sera abaisse à un shilling par livre sur les
thés de toute qualité. Le ministre est
donc allé du premier coup au-delà de ce
que comptaient -demander les. agitateurs
qui voulaient former une ligue pour l'a*
baissement des droits sur le the.- Le. li
bre-échangiste Mac-Grégor, qui comptait
se mettre à la tête de cette, ligue, et s'en!
faire un piédestal politique, se voit donc du
premier coup obligé de chercher un autre
instrument cle popularité. •
Les sommes que ces diverses réductions
de droit coûteront au trésor, seront retrou
vées par. une extension delà taxe du reve
nu. Les revenus au-dessous de 3,750 francs
étaient exempts de l'income-tax ; on n'exemp
tera plus désormais que les revenus au-
dessous de 2,500 fr. On coupera court-
ainsi à quantité,de fraudes qui avaient lieU;
et comme la quotité de la taxe est sensi
blement abaissée, on n'imposera point une
charge sérieuse aux nouveaux contribu
ables. Cependant ces petites cotes, par
leur nombre considérable, représenteront
pour le trésor une somme fort importante^
La taxe sur les maisons, qui a remplacé
l'an dernier l'impôt des portes, et. fenêtres,
ne s'appliquait pas aux maisons dont le
loyer ne dépassait pas 230 francs : co
qui équivalait à un exemption de presque
ioutes les maisons situées en dehors des vil
les. La taxe sera étendue à toutes les mai
sons dont la valeur locative excédera vingt-
cinq francs), c'est-à-dire qu'on n'exemp
tera plus que l'habitation du pauvre.
Cette répartition nouvelle de la taxe sur le
revenu ét de la taxe mobilière, garantit au
trésor un revenu au moins équivalent à ce-[
lui qu'il perd par les réductions proposée^, et
elle ne lese pourtant aucun intérêt légitime.
- Ce sont' la les grands traits du budget de
M. d'Israeli, que nousnous proposons d'étu
dier plus tard dans ses détails. ; "
cuciieval-cr.arigny.
On écrit de Bruxelles, le 3 décembre :
Nous apprenons que M. le duc de Bas
sani) a, dès hier, notifié officiellement au
gouvernement belge l'avénement de Loujs-
Napoléon ni à l'Empire. »,
On nous écrit de Stockholm, 27 novem
bre : - ,
« Les bulletins du château sont plus sa-
tisftusans. — Une amélioration s'est mani
festée durant ces trois derniers jours, très-
lente, il est vrai, mais progressive ; et les
médecins sont unanimes pour espérer unë
prochaine entrée en convalescence. »
IX DE ANGLAISE.
Nous avons déjà annoncé, d'après la dé
pêche télégraphique de Trieste, la prise de
la ville de Prome par l'expédition anglaise
dirigée contre l'empire des Birmans. Les
journaux de l'Inde qui nous sont parvenus
contiennent sur cet événement de nombreux
détails, extraits des rapports officiels adres
sés au gouverneur-général de l'Inde parie
major-général Godwin et par le commodore
Lambert, ainsi que des correspondances par-»
ticulières.
Les troupes anglaises, au nombre de 2,300
hommes, quittèrent Rangoun le 18 septem
bre et s'embarquèrent sur les bateaux à va
peur de l'escadre pour remonter le fleuve
Irawaddy. Le 9 octobre, elles arrivèrent eni
vue de Prome, sans avoir rencontré aucune
résistance. L'ennemi n'avait fortifié que les
approches de la ville ; les canons des stea
mers répondirent au premier feu des Bir
mans , et en deux heures, les batteries établies
surlerivagefurentcomplètementdémOntées.
Vers cinq heures, un détachement du 80*
et que les maris du siècle dernier les mirent
en usage, pour couvrir leui côté faible, c'est-
à-dire leurs femmes, contre les surprises de
l'ennemi.
Tentez donc quelque entreprise galante
vis-à-vis d'une comtesse revêtue de ses pa
niers. La comtesse aurait la plus tendre dis
position à se laisser entraîner, que les pa
niers deviendraient un obstacle naturel et
insurmontable qu'aucun amant;—et je parle
des invincibles,—ne pourraitfranchir. Voyez
"d'ici le cher amant dire à sa comtesse :
Idole de mon ame, réponds à ma flamme !
— La comtesse, à demi défaillante, se
défend à peine, et se laisse aller... Elle est
soutenue par ses paniers, et ne tombe ja
mais. L'amant veut-il presser sur son cœur
l'idole de son ame; autant essayer d'enser
rer le dôme des Invalides; les bras leg
plus longs n'arrivent seulement pas à la
taille de la bien-aimée. ;— Alors, il faut
supplier la comtesse d'abandonner un,appa
reil si- peu favorable au sentiment. — Chère
comtesse, s'écrie le marquis, au paroxisme
de l'amour, quittez vos paniers ! — Le mot
tombe déjà comme une douche surle tête-'
à-tète. Quoi de plus prosaïque, dans un mo
ment de grand lyrisme, que ce: Quittez vos
paniers! — Mais je supposé que la comtesse
ait pris une résolution héroïque ; elle sait le
marquis capable de se percer le cœur sous
ses yeux si elle lui résiste davantage : — Tu
le veux, cruel" marquis, dit-elle d'une voix
mourante, eh bien! je vais défaire mes pa
niers ! "
Sûr quoi la comtesse sort, fait des ré
flexions sages dans son cabinet de toilette,
et ne revient pas. Le marquis se ealme; en
nuyé d'attendre, il prend le parti de s'en
aller : l'honneur du comte est sauf !
. Voilà à quoi servaient les paniers. Nous
n'avons plus de paniers aujourd'hui; mais
la vertu de nts dames les remplace avanta
geusement, et les maris le savent bien.
SoUs Louis XV, les mœurs étaient fort re
lâchées; les paniers eux-mêmes ne met
taient pas toujours un honnête gentilhomme
à l'abri; car enfin, si précautionnée qu'on
soit, on ne dort pas avec ses paniers", et l'on
sait combien de pauvres comtesses furent
surprises hors de leur osier.
Le comte, fort jaloux de sa nature,—
quelle bizarrerie étonnante pour l'époque !
—le comte avait donc défendu à la comtesse
de jamais sortir de ses paniers. — Comtesse,
je pars pour la Bretagne, où le roi m'envoie;
faites-moi l'amitié, pour me tranquilliser, de
vous faire confectionner des paniers de nuit
dans lesquels vous rêverez ae moi tout à
votre aise, et le plus innocemmentdumonde.
C'est-à-dire que le comte entendait laisser
sa tourterelle en ca^e.
— Cher comte, repondit la comtesse, vi
vez en paix, mes paniers et votre souvenir
ne me quitteront pas.
Mais à peine le comte avait-il tourné les
talons, que le petit de Giac vint rendre visite
à sa cousine."
— Ahi cousine ! fit le cousin bien tendre
ment".
— Ah ! cousin !... fit la cousine en soupi
rant. (Comme de juste, on avai§ dû les ma
rier autrefois.) :
< .—Chère cousine, continua le petit de Giac
pour dire quelque chose,—car l'on ne sait ja
mais trop que dire en pareille circonstance
quand on est très jeune et vivement épris
(ô timidité inséparable des premiers dé
buts !) — cousine, vous avez de fort beaux
paniers.
Cousin, c'est mon mari qui me les a
donnés.
— Ne me parlez jamais de votre mari !
«'écria le petit de Giac d'un ton tragique.
— S'il vous trouvait ici, il nous tuerait,
répondit la comtesse. ,
Au même instant on entendit des pas dans
l'escalier; c'était le comte .qui revenait sur
ses pas, voir une dernière fois les paniers de
la comtesse :
— Où me. cacher? demanda le petit de
Giac.
— Mon Dieu ! répondit la comtesse, il n'y
a pas de Cabinets dans ce vaudeville, M.
le comte les a tous condamnés, comme at
tentatoires à son honneur, et les fenêtres
sont murées.
—r Je ne suis pourtant pas bien gros, fit
le pauvre petit Giac , on me mettrait dans
une armoire.
— Toutes les armoires, répondit la com
tesse, ont également été exclues de la pièce,
je ne vois qu'un endroit où pouvoir vous
cacher,, c'est mon panier gauche. Entrez-y,
car la situation vous y force, et elle a été
évidemment préparée fort habilement pour
ne vous point laisser d'autre asile.
jt,e petit Giac se mit donc sous le panier
gauche, et il ne s'y trouvait pas fort à plain
dre, puisque ça le rapprochait d'autant du
cœur de sa charmante cousine, quand M. le
comte entra chez la comtesse.
— Chère amie, s'écria notre jaloux, vous
voyez en moi un mari bienheureux de re
trouver sa femme telle qu'il l'a laissée, avec
des paniers, symbole de la pudeur.
— Comte, je m'habitue parfaitement à
une mode qui vous plaît, et je commence
même à trouver mes paniers très commo-.
des, en ce sens qu'on y peut mettre bien des
choses. '
— Naïve enfant! fit le comte au comble
de l'ivresse; puis il ajouta galamment : Si
vos paniers ne mettaient pas une barrière
entre vous et moi... Mais qu'entends-je?... ^
En effet, les trompes sonnaient dans l'a»
venue du château : Mironton, ton, ton, mi-
ronton, mirontaine.
—Ces fanfares, s'écria le comte; m'annon-
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