Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-11-17
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 17 novembre 1852 17 novembre 1852
Description : 1852/11/17 (Numéro 322). 1852/11/17 (Numéro 322).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 522.
BOIEABX : rue de Valois (Palais-Royal), n* ÎO.
B 1852.,-MERCREDI 17 NOVEMBRE.
Prix de l'abonnement.
PARCS ET DEP&RTEBIENS !
8 FA. POUR, TROIS MOIS.
UN NUMÉRO : 15 CËKTIA1ES.
»ocr les pats étrangers , se -reporter au
tableau publié dans le journal» les 10 et
25 de chaque mois.
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JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
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S'adresser, franco ,~pour l'administration,
à m . denai N j directeur.
S'adresser ,'franco, pour la rédaction, à M. C uciieval- C làîugny, rédacteur en chef.
Les articles déposés ne sont pas rendus.
On s'abonne, dans les départements, aux Messageries et aux Directions da riss/t-c,— /I Londres, chez MM. Co "WiE et fils.
— A Strasbourg, chez M. A lexansbe, pour f Allemagne.
Les annoncés sent reçues chez M. PANIS, régisseur, 10, place de la Eovrse;
•K. et au bureau du journal.
PARIS, 16 NOVEMBRE»
L'Amérique^ du Sud semble vouée à une
perpétuelle mobilité : une révolution vient
encore d'avoir lieu à Buenos-Ayres, et me
nace de compliquer de difficultés nouvelles
■, la situation des petites républiques delaPlata.
La çhute de Rosas "avait été accueillie avec
j oie par le parti qu'il opprimait depuislrien de s
années; mais le gros de la population avait
vu une humiliation dans le triomphe d'Ur
quiza. Buenos-Ayres, qui depuis si long--
temps était l'arbitre de la confédération ar
gentine, était atteinte à la fois dans son or
gueil et daus ses intérêts. Âu lieu de régler
despotiquement les rapports, des autres pro
vinces avec l'Europe, elle voyait ce poilvoir
entre les mains d'Urquiza; au lieu d'être
l'entrepôt obligatoire de tout le commerce,
et de bénéficier à la- fois sur les acheteurs
" indigènes et les importateurs étrangers, elle
voyait tous les affluens de la Plata ouverts à
toutes les marines du globe.
La chambre des représentans, composée
en grande majorité de créatures de Rosas,
n'avait pas tardé à se faire l'organe de tous
ces-froissemens de la vanité nationale et de
tous les mécontentemens populaires. Elle
opposa d'abord une résistance passive aux
efforts d'Urquiza, puis elle se mit en op
position directe avec le ministère qu'il avait
composé : et Urquiza fut obligé de la dis
soudre violemment et de prendre une sorte
de dictature.
Cet acte d'Urquiza, en consommant aux
yeux des habitans de Buenos-Ayres là dé
gradation de leur province, fut le point de
départ d'une conspiration qui trouvait des
élémens tout formés dans les troupes de
Rosas qu'Urquiza n'avait point licenciées.
On noua des intelligences parmi les trou
pes d'Urquiza, composées de levées' ou dé
recrues volontaires qui désiraient vivement
regagner leurs foyers, et l'on attendit une
occasion favorable.
Cette occasion se présenta naturellement
lorsque, le 8 septembre, Urquiza quitta
Buenos-Ayres pour se rendre à Santa-Fé, où
il allait installer et présider le congrès géné
ral de la confédération. Il laissait la garde de
Buenos-Ayres au général Galan, avec deux
mille hommes d'Entre-Rios et deux mille
hommes du contingent de Corrientes.; C'est
•aux chefs de ce contingent que les conjurés
s'adressèrent pour leur demander de rester
témoins passifs 4e ce qui allait s'accomplir.
Dans la nuit du 10 au 11.septe mbre, deux ba
taillons du contingent.de Corrientes, sous les
ordres, du général Madariaga, et une batterie
d'artillerie sefformèrenten armes sur la place
de la Victoire. Labrigade decavaleriè dumêine
contingent, s'emparade (ses chefs, les géné
raux Virasoro et Urdinarrain, et vint rejoin
dre l'infanterie. _ Les troupes de Buenos-
Ayres prirent également les armes avant le
point du jour. Le tocsin sonna aussitôt, et la
population se rassembla sur la grande place,
aux cris de Vive la liberté ! vive Buenos-
Ayres!
Le général Galan n'avait, pour faire face à
ce mouvement, que les deux mille hommes
d'Entre-Rios : toute tentative de répression
était donc impossible. Il entra' en négocia
tion, et il fut convenu qu'il,évacuerait la
ville avec toutes ses forces, sans être inquié
té. Il exçédia la nouvelle de ce qui venait de
se passer à Urquiza, qui lui répondit par
l'ordre de continuer sa marche rétrograde,
et de ramener ses troupes dansTEntre-Rios.
Aussitôt après l'évacuation de la ville, les
membres de la chambre dissoute par Ur
quiza se rassemblèrent, se déclarèrent réin-
égrés dans leurs fonctions, et élurent pour
-gouverneur le général Pinto,qui choisit aus
sitôt pour ministre dirigeant M. Alsina. On
vota en même temps une adresse aux gou-
vernemens et aux citoyens des autres Etats
de la confédération. Ce document, d'une im
mense longueur, est écrit avec toute l'em
phase espagnole. Le mouvement du 11 y est
célébré comme une ère nouvelle dans l'his
toire du monde, et Urquiza y est' l'objet
des attaques les plus violentes et les-plus
| ridicules. . •
Les partisans de Rosas et les unitaires pa
raissent avoir agi d'un commun accord pour
renverser.l'autorité d'Urquiza. Il reste à sa
voir si la bonne harmonie durera long-temps
•entre eux et s'ils ne vont pas se disputer de
nouveau le pouvoir. C'est peut-être ce
qu'a pensé Urquiza, qui ne semble pas
avoir pris grande inquiétude de ce qui
venait de se passer à Buenos-Ayres. Il a an
noncé l'intention d'abandonner cette ville à
elle-même, et il a rappelé tputesses troupes
Dans deux proclamations adressées, l'une à
la province d'Entre-Rios et l'autre aux habi
tans de Santa-Fé, il déclare que la confédé
ration peut se suffire sans Buenos-Ayres, et
former encore une riche et puissante nation
Il a fait remettre à tous les représentans
des puissances étrangères une note où il les
avertit de sa résolution d'installer à Santa-
Fé le congrès général, et où il les invite à ne
traiter qu'avec lui pour tout ce qui concerné
les relations extérieures de la confédération.
Le gouvernement provisoire de Buenos-
Ayres semble n'être pas sans appréhension
sur l'attitude ultérieure des autres provin
ces, malgré les assurances données officieu
sement par Urquiza, qu'il ne ferait aucune
tentative contre Buenos-Ayres, et qu'il se bor
nerait à repousser tout empiétement de Bue
nos-Ayres sur-le reste des Etats argentins.
Aussi un des premiers soins de ce gouverne-
mènt a-t-il été de présenter, à la chambre
des représentans, une loi qui confirme le dé
cret d'Urquiza sur la liberté des fleuves. Rue-
, nis-Ayres renoncerait dsne volontairement
au monopole commercial qu'elle croyait
indispensable à sa prospérité, et qui a sou
levé contré elle'tous les Etats argentins/
Peu importe à la France le gouvernement
qui régira telle ou telle partie des rives de
la. Plata. Le point essentiel pour notre
commerce, c'est que les fleuves demeurent
ouverts à notre marine ; et si la nouvelle ré
volution qui vient d'avoirlieu à Buenos-Ayres
a pour effet de rendre définitive etirrévocable
la liberté de la navigation, nous ne pouvons
que nous en féliciter» Mais il est à craindre
que Buenos-Ayres ne fasse quelque tentative
pour ressaisir le monopole dont la crainte
d'Urquiza lui impose l'abandon.
CUCHEVAL CLÀRIGNY.
On assure que les dépêches arrivées au
jourd'hui à Paris annoncent que le général
Urquiza, dont on croyait la cause perdue,
était revenu avec son armée, et qu'il avait
mis le siège devant Buenos-Ayres. On pen
sait-que la villle était disposée à se soumet
tre. - (Patrie.)
Le convoi impérial qui devait, ramener
aujourd'hui de Fontainebleau S. A. I. .le
prince-Président était attendu à la gare du
chemin 'de ter, vers deux heures. La cour
d'arrivée du débarcadère était occupée par
un détachement de dragons devant former
l'escorte. Devant le p'erron du salon d'arrivée
se trouvaient deux calèches découvertes ""atte
lées à quatre chevaux conduits à la Domon,
destinées au prince et à sa' suite. Plus loin
étaient rangées les Voitures des personnes
invitées par S. A. I. aux courses'de Fontaine
bleau, et qui devaient revenir avec elle. Une
foule de curieux stationnait sur la rampe
qui conduit à la cour d'arrivée; les employé?
de l'administration et quelques personnes
. venues là de'bonne heure avaient été admi
ses dans cette cour.
M. le préfet de police et un certain nom
bre de fonctionnaires attendaient dans le
salon d'arrivée, qui avait été décoré de ten
tures et de drapeaux pour cette circons
tance.
A deux heures quarante minutes, le train
spécial a été signalé, et, quelques miaules
après, on a-aperçu la locomotive pavoisée de
drapeaux tricolores.. •
Le wagon-salon était occupé par S. A. I.
le prince-Président et ses invités, parmi les
quels on remarquait le prince Napoléon,-la
princesse Matbilde, M. Fould, minisire d'E
tat, le général Magnan, le général Roguet,
le colohel Fleury, etc., et plusieurs dames.
M. Isaac Pereire, l'un des administrateurs
du chemin de Lyon, a accompagné S. A. I.
jusqu'à sa voiture.
A sa sortie de la .gare, Louis-Napol'éon.a
été. accueilli'par les acclamations multipliées
de Vive VEmpereur ! Plusieurs femmes se
sont élancé^ vers la voiture du chef de l'E
tat et lui ont remis des pétitions qu'il a re
çues avec bienveillance.
Le prince Napoléon, MM. le ministre d'E
tat et le général Roguet étaient dans la voi
ture de S. A. I.
REPRÉSENTATION SOLENNELLE
AU THÉÂTRE DE l 'OPÉII A-COUIQUE.
FEUILLETON OU CONSTITUTIONNEL, 17 NOVEMBRE.
RENÉE DE VARVILLE."
VIII. .
PÈRNAND ET SOPHIE.
Fernand et Sophie furent les plus atten
tifs parmi ceux qui entourèrent le lit du ma
lade. Renée avait obtenu de sa tante, Mme
de Saint-Méry, de laisser sa plus jeune fille
au-château pour l'aider dans ses soins, et
l'accident motivait cette concession.
Cet accident avait été grave; il fallait subir
quarante jours d'une immobilité presque
complète, un régime sévère, et tous lés in-
- convéniens qui suivent d'ordinaire une Irac-
ture de jambe, et qui furent rendus plus
dangereux par le mauvais état de la santé
de Maurice; mais, grâce à tous ces soins, il
ne devait garder aucune trace de cet événe
ment funeste. - ^
•Renée ne quittait pas la chambre du ma
lade; sa cousine Sophie y était souvent avec
elle. • '
Le baron leur donnait une grande part de
. son temps, et Fernand, resté au château,
leur aurait volontiers donné-tout le sien.
.. On devine reflet qu'avait produit cette fin
si triste d'un joui- de mariage ; on n'assigna
pourtant que des causes très simples et très
naturelles à l'accident; des chevaux empor
tés, un mouvement généreux de Maurice,
une secousse violente, ou la force de la roue
qui, en jetant M. de Vanille sur les pierres
de la roule, avaient mis sa vie en danger.
On parla beaucoup, on gémit, on blâma.
Enlin tout ce qu'un pareil événement, un
jour de noce, peut amener d'exclamations et
de récits d'évenemeus analogues, fut multi
plié par le nombre des convives, et répété
successivement à ceux qui arrivaient pour
le dîntr... On dîna pourtant, mais ou ne
dansa, point;... pas d'illuminations, encore
moins de feu d'artifice, le deuil au lieu de la
joie!
: * La rcpioduction est interdite, i
Pourtant les médecins avaient dès le pre
mier moment répondu de la vie de Maurice.
Renée, avec sa bonté naturelle, souffrit des
souffrances qu'elle vitsupportées courageuse
ment par M. de Varville ; elle le soigna avec
cette délicatesse et cette grâce charmante
d'une jeune femmè aulit d'unmalade. Quand
il ressentit — ~~ J ~
n'eut pas
quelques accès de fièvre , elle
l'air d'entendre qu'il répétait
avec trouble uh nom qui n'était pas le sien;
et, s 'il faut dire tout, Renée, en découvrant,
qu'une autre femme occupait celui qui ve
nait de jurer de n'aimer qu'elle, n'éprouva
pas les regrets qui eussent été naturels. Seu
lement elle se disait : Pourquoi ce mariage?
Cependant Renée ne se crut pas autorisée
par-la à rattacher sa pensée à cette appari
tion qui revenait quelquefois passer devant
ses yeux. Non, elle l'écartait avec sein, et les
jours, en s'écoulant, affaiblissaient ce sou
venir. Il devenait confus et allait s'eftaçant.
Ce jeune homme entrevu un seul jour, dont
elle ignorait le nom, dont personne ne lui
parlait, ce n'était plus qu'ynrêve, çt Renée,
né voyant rien, n entendant rien qui rame
nât le rêve qu'elle voulait oublier, doutait
parfois-qu'il eût eu quelque réalité. - .
Mme de Savigny avait prolongé son séjour
autant qu'elle l'avait pu, après le triste acci
dent. Enfin il fallut partir; mais ce ne fut
pas sans avoir cherché, avec toute sa' pers
picacité de femme d'esprit parisienne, à
deviner ' ce qui se passait dans l'ame de Re
née; et sa surprise fut grande en voyant
que la naïve enfant ne laissait échapper au
cune marque de dépit ou de chagrin ; car
elle savait que Renée avait tout vu ; elle
s'attendait à des questions ; elle pensait que
Maurice aurait à supporter des reproches.
Mais non! calme, pensive et réfléchie, la
jeune femme ne témoignait ni humeur
ni curiosité; cependant c'était un cœur can
dide, et ses impressions se peignaient d'or
dinaire sur son-visage. Tout ce qu'il fut pos
sible d'y remarquer de nouveau se borna à
une expression plus sérieuse; il n'y avait
plus ces joies enfantines, ces badinages gra
cieux qu'elle avait vus jadis à Renée... tout
cela avait disparu,
La santé du marquis de Varville expliquait
aux yeux du monde la tristesse de Renée, et
M. Méry a intitulé Fête de l'Avenir la can
tate que l'on a exécutée ce soir à l'Opéra-
Comique. Le directeur du théâtre aurait pu
donner le nom de Fête des Fleurs à cette bel
le soirée. Jamais on n'a vu tant d'arbustes,
tant de fleurs, des plus belles et des plus ra
res. Les Vestibules, les escaliers, les cou- -
Mrs, le foyer en étaient remplis. A l'inté
rieur, des festons de roses artificielles en
touraient la salle d'une quadruple guir
lande. L'or, le velours ruisselaient partout,
et il ne fallait pas moins que toute cette
magnificence, soutenue d'uù resplendissant
éclairage, pour encadrer ces toilettes étince-
lantes, ces frais etgragieux visages qui, par
tout, occupaient les- plus belles places ; les
hommes, dans presque toute la. salle, sauf
dans les loges-officielles, se tenaient au se
cond et même au troisième plan.
Nous ne citerons pas toutes les illustra
tions qu'on remarquait dans la salle; il fau
drait nommer -tous les ministres, tout le
corps diplomatique, tous les généraux ayant
commandement 1 , sans parler des hauts fonc
tionnaires, des sommités des lettres et des
arts. Nous dirons seulement que le prince
Jérôme était à la gauche du Président .
S. A. I. est arrivée à sept heures et demie.
Sur son passage, elle a été saluée de cris
répétés de : Vive l'Empereur l qui ont re
doublé quand elle est descendue de voiture..
Le péristyle, improvisé.rue Marivaux pour la
recevoir, était efune rare-élégance. L'illumi
nation, composée d'aigles et du chiffre de
S, A. I. alternés, jetait des feux éblouissans.
Des cordons lumineux entouraient l'édifice,
dont les alentours étaient sablés. Le direc
teur, M. Perrin, a reçu le prince et l'a con
duit à sa loge. A l'arrivée de S. A. L, toute
a salle s'est levée,, les acclamations et les
applaudissemens ont été unanimes. Les da
mes n'ont pas été les rîioins démonstratives.
Le foyer avait été transformé en un véri
table boudoir. A l'une des extrémités était
le buste de l'Empereur,-à l'autre celui du
prince Louis-Napoléon.
Le spectacle a commencé par le Domino
noir. Couderc et Mme Ugalde n'ont rien né
gligé pour mériter d'augustes suffrages.Tous
deux avaient laissé de grands souvenirs dans
ce chef-d'œuvra de M. Auber; ils se sont ef
forcés de rappeler les jours de leurs triom
phes. - " " ; .
Après le second acte du Domino noir, dans
lequel on avait intercalé un charmant bal-
"et, une marche triomphale a annoncé l'in
termède. Bientôt le rideau s'est levé et a
laissé- voir- un arc de triomphe dans le
style de la Renaissance, devant lequel se
trouvaient groupés ail pied d'une colonne
tronquée servant de piédestal au buste de
Napoléon III couronne, la Sculpture, la Mu
sique, la Poésie. Une lyre d'or était appuyée
il fallut bien quertVîme de Savigny se conten
tât aussi de cette explication.
Elle se, disait en'partant que son neveu,
avait fait un très bon mariage ; que .sa fem
me était charmante et paraissait fort raison
nable; que forcément dans la retraite pen
dant deux mois au moins, seul avec elle, il
s'y attacherait, et qu'en définitive elle avait
agi sagement et en bonne parente.
Tout ce ijui était venu au château pour le
mariage s'était dispersé; il ne restait, après
le départ de Mûie dé Savigny, que Sophie et
Fernand près des mariés; le baron avait dit
en souriant à Fernand :
— Restez ici jusqu'au moment d'aller à
Paris, vous y serez mieux que partout ail
leurs. Puisque vous ne' quitterez la Bourgo
gne que dans un mois, passez-le près de ceux
qui vous aiment.
Il y avait un peu de malice dans l'expres
sion du vieillard en disant cela, et Fernand
en parut troublé ; mais le baron ajouta :
— N'avez-voûs pas donné votre démission
de votre place à Dijon ?
Au moment où ces paroles étaient pro
noncées dans la chambre de Maurice, So
phie,qui cherchait avec la plus grande atten
tion quelque chose autour d'elle pour conti
nuer sa tapisserie, fut obligée, dit-elle, de
retourner à sa chambre pour trouver ce
dont elle avait besoin, et en passant près du
baron,elle ne détourna pas assez bien la tête
pour qu'il ne pût apercevoir une vive rou
geur qui accrut sa disposition malicieuse.
Quand elle fut'sortie, le baron reprit avec
bonté, quoique toujours un peu souriant :
— Oli ! c'est que M.- Fernand était arrivé
bien jeune à la place de professeur de phi
losophie et de Jangue allemande à l'univer
sité de Dijon! 11 .-fallait qu'il eût un bien
grand mérite, ou,de bien hautesprotections,
choses également estimées, car 1 l'avait em
porté sur des compétiteurs plus âgés, ayant
déjà fait leurs preuves, et s'étant munis de
toutes les recommandations d'amis, de pa
rais et de protecteurs do tous genres, que
leur liabilete et leur bonheur avaient pu
leur faire obtenir.
Maurice, qui aimait à èntendre ainsi cau
ser autour de lui, bien qu'il prît peu de part
à la conversation, porta ses regards sur Fer»
sur le fût de la colonne. Un Africain se te
nait -auprès des trois déessea.
Le chœur était caché derrière un magni
fique ' rideau de fond-, qui fermait l'arc-de-
triomphe.
L'Africain, c'était Bataille, les trois fem
mes étaient Mmes-Ugalde, Lefebvre et Wer-
theimber ; nous donnons plus loin le texte
de * la cantate qui a été' fort applaudie
et qui le méritait. M. Méry, M. Adam et
leurs interprètes doivent. être heureux de
eur soirée. On a fait répéter le premier hui-
tain, (Chanté par l'Africain;les paroles, la
musique, l'exécution-ont électrisé la salle,
et des cris de Vive l'Empereur l ont éclaté
après chaque reprise de ce passage, em
preint d'une véritable grandeur.
..Dans le genre gracieux, nous aimons à si
gnaler aussi l'art avec lequel M. Adam a su
'ramener l'air : Partant, pour la Syrie, placé
sous le couplet : De ta mère chérie, etc., chan
té d'abord dans le timbre original par Mme
Ugalde et repris ensuite par le quatuor avec
1 des variations d'une grande délicatesse, et
où Mme Ugalde a pu déployer toute là har
diesse de sa vocalisation.
Le tableau final, représentant la vue du
Louvre achevé,, a excité l'enthousiasme gé
néral. Le rideau qui fermait l'arc de triom
phe s'est relevé, soutenu par deux gé
nies, et le Louvre, réuni aux Tuileries, s'est
présenté, pris à vol d'oiseau, à l'œil du spec
tateur; au même moment, on a vu descen
dre deux autres génies portant une couronne
impériale ; en rnerce temps, tous les artistes
du théâtre remplissaient le devant de la scè
ne dans les costumes les plus variés, en agi
tant des palmes vers la loge du prince et en
unissant leurs voix, dans le chœur final.
S. A. J. n'a pas paru moins satisfaite que
le public de ce bel intermède, si habilement
disposé par M. Perrin. Ce serait dommage
que cette charmante composition n'eut
qu'une soirée.
Il était près de onze heures quand l'inter
mède s'est terminé. la foule était encore
considérable aux abords de l'Opéra-Corni-
que, et" elle paraissait décidée a attendre
la sortie- du Président, qui n'aiira eu lieu
que fort tard, si S. A. I. est restée jusqu'à
la fin du spectacle.
Le secrétaire de la rédaction : i. boniface .
Lorsque d'un grand pays les forces sont données
A l'énergiquo main du suprôme pouvoir ! '
I-'our que le bien se liâte, il faut qu'un seul domine :
Le pouvoir divisé n'a qu'un bras impuissant ;
Quand un seul dit : Je veux ! toute œuvre se termine,
Et les plus longs travaux s'achèvent en naissant.
Ainsi notre vieux Louvre, imposante merveille,
Qu'un grand roi commença,que l'Empereur aimait,
.Palmyrg du désert et ruine la Teille,
1 Voit sa dernière pierre à son dernier sommet.
Sous l'œil de son glorieux maître.
Sous'un eiel devenu serein.
Ce Louvre attend ceux qui vont naître : -
Un peuple de marbre et d'airain.
Ce palais aux voûtes nouvelles,
Déjà plein de noms triomphans.
Etend aujourd'hui ses deux ailes
Pour abriter tous ses enfans,
L'AFRICAIN.
Entre les cités la première, I
Paris; aux rayons éelatans, I
Nous venons chercher ta lumière
Eteinte chez nous par le temps.
Sur nos monts, comme l'aigle antique,
Ton aigle trouve un libre accès ; ■
La vapeur, sur la mer d'Afrique
Est un pont sur le lac français.
Le jour où votre, main puissante
De l'Emir ouvrit la prison,
Dans la- tribu reconnaissante
Vous enchaîniez la trahison.
Histoire jamais effacée :
L'Afrique vous doit son réveil,
Le rayon de votre pensée
Illumina notre soleil.
LA POÉSIE.
. Deux grands noms que la gloire inonde
Eblouissent toujours nos yeux ;
De tels noms régnent sur le monde
Quand le monde a foi dans les cieux !
LOUIS!... NAPOLÉON!.-, ô France!
Réjouis-toi quand nous donnons
Le^ceptre d'or et fa puissance
A fui qui p
LA FÊTE DES ARTS ,
CHANTS DE L'AVENIR,
Paroles de M. Méry, musique ile M. Ad."Adam.
PERSONNAGES : .
' LA MUSIQUE,
LA POÉSIE,
I.A SCULPTURE,
VU AFRICAIN,
;Mme Ugalde.
Mlle Lefebvre.
Mlle Wertheimber.
M. Battaille.
LA sculpture ; , '
La France est satisfaite et le monde est tranquille,
Car le monde a.toujourssur nousles yeux ouverts.
Et, quand la fiaix descend sur cette immense ville,
Le calme, de Paris s'étend sur l'univers.
Sire, votre œuvre est faite; oui, deux fois elle s'ouvre
L'ère de Périclès, d'Auguste et de Léon ;
Un aigle plane sur le Louvre,
Une croix sur le Panthéon,
E.t le peuple applaudit le soleil qui découvre
Ce rêve colossal des deux Napoléon.
LA MUSIQUE.
Venez tous, redites encore
Lé môme nom, le même chant;
Venez des hauteurs dé l'aurore,
Venez des plaines du couchant.
Aujourd'hui nous verrons le L'ouvre
Par Napoléon achevé;
Aujourd'hui sa main le découvre
Le monument qu'il a rêvé !
CHŒUR.
Venons tous, redisons encore, etc.
LA MUSIQUE, LA SCULPTURE, LA POÉSIE.
Que disent ces voix lointaines?
Leur chant apporte un grand nom.
Est-ce encore l'hymne v d'Athènes -
Saluant le Partbénon ?
A voir cette foule immense,
. Ces arceaux de fleurs couverts,
On croit que Paris commence
La fête de l'univers !
RÉCITATIF.
Sire,votre œuvre est faite! Oh! combien peu d'années
ll l'aut pour accomplir ce qu'un jour nous fait voir
qui porte ces deux noms !.
,A MUSIQUE. * .
Oui, leiavts fleuriront. Cette illustre journée
Réunit tous les arts en lumineux faisceau.
Hortense, mère auguste, artiste couronnée,
Du prinee impérial a béni le berceau.
De sa mère chérie
Il se souvient toujours.
0 France, ô toi patrie
Des beaux-arts, nos amours !
Mémoire que révère
Son cœur reconnaissant : *
La lyre d'une mère v
' Le berçait en naissant;
. QUATUOR. -
Du palais la porte s'ouvre, -
Et semble nous convier
A peindre aux parois du Louvre
La palme dé l'olivier.
L'aigle qui vient de s'abattre
Sur ce vieux palais des rois
Unit les noms d'Henri quatre . '
Et de Napoléon trois.
(La toile du fond se lève, et laisse voir un décor
représentant le Louvre terminé.)
CHOEUR FINAL.
' Gloire au travail ! l'œuvre est finie,
Louvre des deux Napoléon.
Le Louvre est fait; gloire au génie!
Les beaux-arts ont leur Panthéon !
contient les ré
prince Louis-Na-
La Gazette des Postes
flexions suivantes sur le
poléon 4 '
« Le 2 décembre a été accueilli avec faveur par
les cabinets et par les peuples de l'Europe; la so
ciété avait été .sauvée et la civilisation garantie.
Le plébiscite fut considéré comme l'affermisse
ment de l'autorité, . comme un signe du bon
sens des masses, eti opposé comme châti
ment à ceux qui révoquaient en doute le
droit et la vocation du Napoleonide.
«Les voyages du Président ont dû convaincre les
jeeptiques que sa personne et son principe étaient
l'objet d'un dévoûment réel. Les mesures de son
gouvernement ont réveillé et fortifié la confiance
publique. Une foule de mesures, d'améliorations,
d'entreprises grandioses , calculées pour des an
nées d'ordre et de paix, ont prouvé que le gouver
nement du prince et que la France comptaient sur
la solidité de l'ordre de Choses actuel. Le rétablis
sement de sa dynastie est sur le point de couron
ner l'œuvre. Pourquoi donc la confiance dans la
paix aurait-elle diminué, d'où viendraient donc le
mécontentement, le blâme et l'hostilité? Personne
I n'a pu douter que le but du prince ne fût de re-
■ conquérir la couronne impériale; ceux qui ont
applaudi au 2 décembre, ont dû tenir prêt un bill
d'indemnité pour l'avènement au trône.
» Personne n'a manqué d'esprit au point de ne
pas voir cet enchaînement nécessaire. A ceux qui
nand et l'examina avec plus d'attention. Les
yeux de Renée interrogèrent aussi le jeune
professeur, qui répondit avec uh doux sou
rire :
-•—Voilà déjà cinq ans de cela; j'avais
vingt-sïx ans alors ; mais j'avais l'air d'en
avoir à peine vingt, et ce ne fut pas sans
exciter la surprise et la curiosité que je fus
reçu chez le doyen, homme d'une grande
science, uiais qui l'avait acquise par de si
longues années d'études qu'il s'étonnait
qu'on put avoir la moindre prétention de
savant avant qu'une cinquantaine d'hivers
eussent permis d'amasser à loisir les pro
fonds trésors de la science.
— Le fait est, dit le baron, que je vous vis
alors chez ce doyen, un brave, homme que
je visitais quand j'allais à Dijon; car j'allais
encore à la ville alors de temps en temp re
voir quelques vieux amis, et je vous vis
mince, -pale, sans barbe, avec vos cheveux
blonds tombant sur un col rabattu! Vous aviez
■unair bien enfantin pour venir instruire des
ma chère Renée, que malgré cela ce fut bien
vite le professeur le plus renommé de la ville.
Il ne se mêlait pas au monde; sa *we studieu
se se passait a préparer et à faire ses cours,
puis a un travail assidu dans sa demeure.
La seule maison qu'il fréquentât était celle
de ce doyen, homme éclairé sur toute chose,
mais vivant retiré, et dont la femme et la
fille faisaient toute lajoie.... Ah ! dit le baron,
j'oubliais de vousane que ce doyen avait
eleve jadis notre paient, M. de Saint-Méry,
qui hn gard'ut une grande reconnaissance et
conduisait quelquefois sei. filles près de la
sienne.
— Ah ! dit ^laurice !
Renée sourit aussi; Fernand fut embar
rassé et rougit.
— Voilà, dit le baron, ce que jë sais de
M. Fernand, qui ne veut jamais parler de
lui. Pourtant, je vois sur le visage de ma
petite' Renée, qu'elle ne serait pas fâchée
d'en savoir davantage, et M. de Varville, à
quinous faisons deslectures pour le distraire,
aimerait mieux un roman raconté par le hé
ros lui-même. ,
— Certes, dit Maurice !...
Mais Fernand s'écria :
— Un roman ! moi un héros de roman !
Et il rit de bon cœur. * ■ v
—Eh bien! reprit Maurice, les romans sont
l'histoire du cœur humain, de ses passions,
de ses combats, de ses faiblesses et . de ses
regrets. Qui n'a pas eu à trente ans son ro
man, c'esl -àrdire ses troubles intérieurs?
Heureux ceux qui ont été vainqueurs dans
ces luttes, ou qui du moins n'ont pas été trop
blessés,dans le combat!
Il y avait une grande mélancolie et pres
que une confidence de Maurice dans ces pa
roles ; elles inspirèrent de l'intérêt à Renée
et de la confiance à Fernand.
— Si vous pouviez désirer réellement de
savoir ce qui me regarde, par intérêt pour
moi?...
— Oui, oui, oui ! dirent presque en même
temps le baron, Maurice et Renée
— Alors je vais vous raconter ma vie. ,Ce
sera court et simple : nul événement remar
quable ne viendra vous frapper;mais ce se
ra vrai, et vous verrez que je" n'ai que des
grâces à rendre au ciel pour m'avoir fait des
jours si calmes.
Je-suis né dans un village d'Alsace, près
des bords du Rhin. Mon père était cultivateur
aisé, et même riche pour le 'canton. 11 avait
à ferme une grande terre des plus considéra
bles et possédait lui-même plusieurs arpens
de bois. Il vivait dans l'aisance, et sa nom
breuse famille ne lui inspirait - aucune in
quiétude. J'étais le second de onze enfans, et
je venais d'atteindre ma dixième année,
lorsque j'entendis par hasard une conversa
tion a mon sujet entre mon père, ma mère
et le curé.
— C'est dommage, disait mon père, que
vous ne puissiez pas vous charger de Fer
nand! Ce serait là son affaire; il est doux et
intelligent; mais ni ses forces ni son goût
ne le portent au travail des champs : il n'y
fera pas grand'chose et il n'y sera pas heu
reux.-
— Le serait-il davantage, répondit le pas
teur, dans un état qu'il aurait embrassé
sans en connaître les devoirs, et où il re
gretterait peut-être un jour de se trouver
engagé?
— Ah ! je sais bien, dit ma mère, ce qu'il i
■ ne voudraient pas se contenter des assurances de
paix si souvent données,- ou auxquels elles inspire
raient de la défiance, nous demandons quelles ga
ranties autres ou plus, grandes le prince eût pu
donner que des paroles de paix? Demander un
désarmement serait vraiment exiger trop dans un
moment où l'Europe estlà armée jusqu'aux dents;
où la. révolution en France tend à une forme que
l'étranger a deux fois renversée violemment pour
rétablir l'ancien droit, lorsque ces paroles, qui
ont retenti dés camps de Varsovie jusqu'au Rhin,
ne sont pas encore oubliées : « Qu'il fallait écra
ser la France pour extirper la révolution. » Un
peuple qui a de pareils souvenirs et une noble
fierté ne se livre pas pieds.et poings liés.»
Un arrêté du préfet de la Seine, affiché
aujourd'hui, fait connaître aux électeurs que
le scrutin sur le plébiscite sera ouvert, le di
manche et le lundi 21 et 22 décembre à
huit heures du matin, et fermé à six heures
du soir.
Conformément aux ordres du ministre de
la marine, les officiers des différens corps de
l'armée navale, appelés à voter à Paris, de
vront préalablement se munir d'une pièce
constatant leur position.
A défaut, ils "devront réclamer de la di
rection du personnel un certificat attestant
leur identité.
Le scrutin sera, ouvert dimanche 21 no
vembre, au ministère de la marine, à onze'
heures du matin, et le lundi 22, à la même
heure. ,
Nous avons cité hier quelques passages
d'une lettre pastorale^ de l'évêque de Gap,
sur le vote des 21 et 22 décembre. M. l'évê
que de Rennes n'est pas moins explicite :
«Ne sachant jamais décliner une responsabilité
quelconque quand nous croyons qu'elle incombe
à notre charge pastorale, nous vous dirons en
toute simplicité de cœur et tout haut : «Votez et
faites voter par ceux de vos paroissiens dont vous
possédez la corifîanee en faveur du sénatus-con-
sulte qui va être soumis à la ratification de la
France ; que tous mettent oui dans l'urne électo
rale. . -
» Vous connaissez trop, Messieurs et chers coo-
pérateurs, l'indépendance de notre caractère et le
désintéressement de nos intentions personnelles,
pour attribuer cet avis, que nous vous donnons
avec tant de franchise, à tout autre motif qu'à ce
lui des intérêts sacrés de la religion, dé la société
et de la famille, aujourd'hui tout aussi menacés
et peut-être plusencoré qu'en 1848 et 1849.
» Que chacun donc, comme à ces deux époques
de si glorieuse mémoire pour le diocèse de Ren- .
nés, sache mettre de côte ses idées ou ses affec
tions privées pour ne songer qu'à notre chère et
malheureuse patrie, qué Louis-Napoléon seul peut
sauver d'un cataclysme universel. -
» Pour vous, chers coopérateurs, comme il y a
quatre années, soyez les conseillers de vos obéis-
sans troupeaux; comme alors, stimulez leur in
différence naturelle, guidez leur inexpérience et
dirigez leurs votes. Ne craignez rien; s'il le faut,
invoquez notre autorité pour vous mettre à cou
vert, et rejetez sur votre évêque toute la respon
sabilité d'une mesure"que sa conscience accepte
sans peur et sans reproche, car il la croit ferme
ment l'accomplissement d'un devoir.»
Nous trouvons dans un journal italien, la
Voce délia Libertà, deux des pièces révolu
tionnaires que le Moniteur a publiées hier.
Le journal italien donne au' manifeste de la
société de la Révolution, le titre de Bulletin
n° 6, ce qui trahit l'existence d'une série de
publications du même genre. Quant au ma
nifeste daté de Jersey, il le fait précéder de
l'introduction suivante :
« Nous recevons de Jersey la réponse que
Victor Hugo a adressée aux républicains de
France au nom du comité français. Nous
le publions, en regrettant de détruire par
une traduction une grande partie du mérite v
de l'original. »
r Les regrets du journal démagogique étaient
superflus. Le gouvernement français, en li
vrant à la publicité ces pièces plus ridi
cules encore qu'odieuses, n'a privé personne
de ces beautés auxquellés la Voce délia Li
bertà est si sensible. '
Le secrétaire ds la rédaction, L. boniface .
Quelques faits qui nous sont simultané
ment'signalés par la presse départementale
de ces derniers jours ^ montrent quelles
faudrait à mon petit Fernand. Ce serait
de pouvoir étudier et devenir savant. C'est
là sa vocation ! Dès qu'il peut se procu
rer un livre, il reste des heures entières
les yeux dessus, sans bouger, et parfois,
quand il n'en a pas, je le surprends assis,
les yeux levés au ciel, murmurant des pa
roles qui sont belles comme des prières;
mais nous avons tout juste ce qu'il faut pour
élever ici notre famille, et il serait impossible
d'en distraire la somme nécessaire pour en
voyer Fernand étudier à la ville. N'y pen
sons pas, et cherchons dans les travaux de
la ferme ceux qui seront les moins fatigans
pour lui.
• Ces paroles si simples éveillèrent en moi
une foule d'idées" nouvelle s : car jusque-là
je ne m'étais pas rendu compte de mes goûts
«t de mes penebans. Le bruit me fatiguait;
je ne pouvais supporter de rudes travaux;
les jeux des autres enfans me déplaisaient,
et mon seul plaisir était la solitude. Je de-
..1—1—i- • -
. waacuvav;, OC UC"
mandais à garder les chevaux qu'on laissait
'.ans les bois, et je me souviens enco-
errer dans , .. • J- kjvuliUUO CIIUU—
re de ces nuits mystérieuses, où la lune, en,
se joueÉt au îhilieu des grands arbres de la
forêt, pretàit mille formes fantastiques à
leurs contours variés, et jetait ma pensée
/liane Aac .v&vrac nlflinf -
vv Tiotuua îtîtJJ'l"
ques. Cependant ces instincts de moname
vers un monde idéal et poétique ne .m 'a-
yaient jamais fait comprendre ou désirer
une autre vie que celle de notre village ; je
ne savais pas avoir un souhait hors de ce sol
natal, ou y.vivre autrement que les autres;,
mais à partir de ce jour et de cette eonver-'
sation entendue, je vis, je sentis, je comparai,
et dès-lors je formai des projets pour l'ave
nir, sans me rendre compte des moyens de
les exécuter. Décidé à quitter le pays, je ces
sai de m'y plaire, et tout me sembla fatigue-
et ennui. Je voulais toucher à l'arbre cle
science, et mon esprit n'habitait plus avec
moi noire village. ,
Soit que les circonstances favorisent une
volonté puissante, soit que la puissance de
cette volonté force les circonstances à lui être
favorables pour arriver à son but, il se pré
senta bientôt une occasion qui me permit de
marcher vers le mien
BOIEABX : rue de Valois (Palais-Royal), n* ÎO.
B 1852.,-MERCREDI 17 NOVEMBRE.
Prix de l'abonnement.
PARCS ET DEP&RTEBIENS !
8 FA. POUR, TROIS MOIS.
UN NUMÉRO : 15 CËKTIA1ES.
»ocr les pats étrangers , se -reporter au
tableau publié dans le journal» les 10 et
25 de chaque mois.
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JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
9
S'adresser, franco ,~pour l'administration,
à m . denai N j directeur.
S'adresser ,'franco, pour la rédaction, à M. C uciieval- C làîugny, rédacteur en chef.
Les articles déposés ne sont pas rendus.
On s'abonne, dans les départements, aux Messageries et aux Directions da riss/t-c,— /I Londres, chez MM. Co "WiE et fils.
— A Strasbourg, chez M. A lexansbe, pour f Allemagne.
Les annoncés sent reçues chez M. PANIS, régisseur, 10, place de la Eovrse;
•K. et au bureau du journal.
PARIS, 16 NOVEMBRE»
L'Amérique^ du Sud semble vouée à une
perpétuelle mobilité : une révolution vient
encore d'avoir lieu à Buenos-Ayres, et me
nace de compliquer de difficultés nouvelles
■, la situation des petites républiques delaPlata.
La çhute de Rosas "avait été accueillie avec
j oie par le parti qu'il opprimait depuislrien de s
années; mais le gros de la population avait
vu une humiliation dans le triomphe d'Ur
quiza. Buenos-Ayres, qui depuis si long--
temps était l'arbitre de la confédération ar
gentine, était atteinte à la fois dans son or
gueil et daus ses intérêts. Âu lieu de régler
despotiquement les rapports, des autres pro
vinces avec l'Europe, elle voyait ce poilvoir
entre les mains d'Urquiza; au lieu d'être
l'entrepôt obligatoire de tout le commerce,
et de bénéficier à la- fois sur les acheteurs
" indigènes et les importateurs étrangers, elle
voyait tous les affluens de la Plata ouverts à
toutes les marines du globe.
La chambre des représentans, composée
en grande majorité de créatures de Rosas,
n'avait pas tardé à se faire l'organe de tous
ces-froissemens de la vanité nationale et de
tous les mécontentemens populaires. Elle
opposa d'abord une résistance passive aux
efforts d'Urquiza, puis elle se mit en op
position directe avec le ministère qu'il avait
composé : et Urquiza fut obligé de la dis
soudre violemment et de prendre une sorte
de dictature.
Cet acte d'Urquiza, en consommant aux
yeux des habitans de Buenos-Ayres là dé
gradation de leur province, fut le point de
départ d'une conspiration qui trouvait des
élémens tout formés dans les troupes de
Rosas qu'Urquiza n'avait point licenciées.
On noua des intelligences parmi les trou
pes d'Urquiza, composées de levées' ou dé
recrues volontaires qui désiraient vivement
regagner leurs foyers, et l'on attendit une
occasion favorable.
Cette occasion se présenta naturellement
lorsque, le 8 septembre, Urquiza quitta
Buenos-Ayres pour se rendre à Santa-Fé, où
il allait installer et présider le congrès géné
ral de la confédération. Il laissait la garde de
Buenos-Ayres au général Galan, avec deux
mille hommes d'Entre-Rios et deux mille
hommes du contingent de Corrientes.; C'est
•aux chefs de ce contingent que les conjurés
s'adressèrent pour leur demander de rester
témoins passifs 4e ce qui allait s'accomplir.
Dans la nuit du 10 au 11.septe mbre, deux ba
taillons du contingent.de Corrientes, sous les
ordres, du général Madariaga, et une batterie
d'artillerie sefformèrenten armes sur la place
de la Victoire. Labrigade decavaleriè dumêine
contingent, s'emparade (ses chefs, les géné
raux Virasoro et Urdinarrain, et vint rejoin
dre l'infanterie. _ Les troupes de Buenos-
Ayres prirent également les armes avant le
point du jour. Le tocsin sonna aussitôt, et la
population se rassembla sur la grande place,
aux cris de Vive la liberté ! vive Buenos-
Ayres!
Le général Galan n'avait, pour faire face à
ce mouvement, que les deux mille hommes
d'Entre-Rios : toute tentative de répression
était donc impossible. Il entra' en négocia
tion, et il fut convenu qu'il,évacuerait la
ville avec toutes ses forces, sans être inquié
té. Il exçédia la nouvelle de ce qui venait de
se passer à Urquiza, qui lui répondit par
l'ordre de continuer sa marche rétrograde,
et de ramener ses troupes dansTEntre-Rios.
Aussitôt après l'évacuation de la ville, les
membres de la chambre dissoute par Ur
quiza se rassemblèrent, se déclarèrent réin-
égrés dans leurs fonctions, et élurent pour
-gouverneur le général Pinto,qui choisit aus
sitôt pour ministre dirigeant M. Alsina. On
vota en même temps une adresse aux gou-
vernemens et aux citoyens des autres Etats
de la confédération. Ce document, d'une im
mense longueur, est écrit avec toute l'em
phase espagnole. Le mouvement du 11 y est
célébré comme une ère nouvelle dans l'his
toire du monde, et Urquiza y est' l'objet
des attaques les plus violentes et les-plus
| ridicules. . •
Les partisans de Rosas et les unitaires pa
raissent avoir agi d'un commun accord pour
renverser.l'autorité d'Urquiza. Il reste à sa
voir si la bonne harmonie durera long-temps
•entre eux et s'ils ne vont pas se disputer de
nouveau le pouvoir. C'est peut-être ce
qu'a pensé Urquiza, qui ne semble pas
avoir pris grande inquiétude de ce qui
venait de se passer à Buenos-Ayres. Il a an
noncé l'intention d'abandonner cette ville à
elle-même, et il a rappelé tputesses troupes
Dans deux proclamations adressées, l'une à
la province d'Entre-Rios et l'autre aux habi
tans de Santa-Fé, il déclare que la confédé
ration peut se suffire sans Buenos-Ayres, et
former encore une riche et puissante nation
Il a fait remettre à tous les représentans
des puissances étrangères une note où il les
avertit de sa résolution d'installer à Santa-
Fé le congrès général, et où il les invite à ne
traiter qu'avec lui pour tout ce qui concerné
les relations extérieures de la confédération.
Le gouvernement provisoire de Buenos-
Ayres semble n'être pas sans appréhension
sur l'attitude ultérieure des autres provin
ces, malgré les assurances données officieu
sement par Urquiza, qu'il ne ferait aucune
tentative contre Buenos-Ayres, et qu'il se bor
nerait à repousser tout empiétement de Bue
nos-Ayres sur-le reste des Etats argentins.
Aussi un des premiers soins de ce gouverne-
mènt a-t-il été de présenter, à la chambre
des représentans, une loi qui confirme le dé
cret d'Urquiza sur la liberté des fleuves. Rue-
, nis-Ayres renoncerait dsne volontairement
au monopole commercial qu'elle croyait
indispensable à sa prospérité, et qui a sou
levé contré elle'tous les Etats argentins/
Peu importe à la France le gouvernement
qui régira telle ou telle partie des rives de
la. Plata. Le point essentiel pour notre
commerce, c'est que les fleuves demeurent
ouverts à notre marine ; et si la nouvelle ré
volution qui vient d'avoirlieu à Buenos-Ayres
a pour effet de rendre définitive etirrévocable
la liberté de la navigation, nous ne pouvons
que nous en féliciter» Mais il est à craindre
que Buenos-Ayres ne fasse quelque tentative
pour ressaisir le monopole dont la crainte
d'Urquiza lui impose l'abandon.
CUCHEVAL CLÀRIGNY.
On assure que les dépêches arrivées au
jourd'hui à Paris annoncent que le général
Urquiza, dont on croyait la cause perdue,
était revenu avec son armée, et qu'il avait
mis le siège devant Buenos-Ayres. On pen
sait-que la villle était disposée à se soumet
tre. - (Patrie.)
Le convoi impérial qui devait, ramener
aujourd'hui de Fontainebleau S. A. I. .le
prince-Président était attendu à la gare du
chemin 'de ter, vers deux heures. La cour
d'arrivée du débarcadère était occupée par
un détachement de dragons devant former
l'escorte. Devant le p'erron du salon d'arrivée
se trouvaient deux calèches découvertes ""atte
lées à quatre chevaux conduits à la Domon,
destinées au prince et à sa' suite. Plus loin
étaient rangées les Voitures des personnes
invitées par S. A. I. aux courses'de Fontaine
bleau, et qui devaient revenir avec elle. Une
foule de curieux stationnait sur la rampe
qui conduit à la cour d'arrivée; les employé?
de l'administration et quelques personnes
. venues là de'bonne heure avaient été admi
ses dans cette cour.
M. le préfet de police et un certain nom
bre de fonctionnaires attendaient dans le
salon d'arrivée, qui avait été décoré de ten
tures et de drapeaux pour cette circons
tance.
A deux heures quarante minutes, le train
spécial a été signalé, et, quelques miaules
après, on a-aperçu la locomotive pavoisée de
drapeaux tricolores.. •
Le wagon-salon était occupé par S. A. I.
le prince-Président et ses invités, parmi les
quels on remarquait le prince Napoléon,-la
princesse Matbilde, M. Fould, minisire d'E
tat, le général Magnan, le général Roguet,
le colohel Fleury, etc., et plusieurs dames.
M. Isaac Pereire, l'un des administrateurs
du chemin de Lyon, a accompagné S. A. I.
jusqu'à sa voiture.
A sa sortie de la .gare, Louis-Napol'éon.a
été. accueilli'par les acclamations multipliées
de Vive VEmpereur ! Plusieurs femmes se
sont élancé^ vers la voiture du chef de l'E
tat et lui ont remis des pétitions qu'il a re
çues avec bienveillance.
Le prince Napoléon, MM. le ministre d'E
tat et le général Roguet étaient dans la voi
ture de S. A. I.
REPRÉSENTATION SOLENNELLE
AU THÉÂTRE DE l 'OPÉII A-COUIQUE.
FEUILLETON OU CONSTITUTIONNEL, 17 NOVEMBRE.
RENÉE DE VARVILLE."
VIII. .
PÈRNAND ET SOPHIE.
Fernand et Sophie furent les plus atten
tifs parmi ceux qui entourèrent le lit du ma
lade. Renée avait obtenu de sa tante, Mme
de Saint-Méry, de laisser sa plus jeune fille
au-château pour l'aider dans ses soins, et
l'accident motivait cette concession.
Cet accident avait été grave; il fallait subir
quarante jours d'une immobilité presque
complète, un régime sévère, et tous lés in-
- convéniens qui suivent d'ordinaire une Irac-
ture de jambe, et qui furent rendus plus
dangereux par le mauvais état de la santé
de Maurice; mais, grâce à tous ces soins, il
ne devait garder aucune trace de cet événe
ment funeste. - ^
•Renée ne quittait pas la chambre du ma
lade; sa cousine Sophie y était souvent avec
elle. • '
Le baron leur donnait une grande part de
. son temps, et Fernand, resté au château,
leur aurait volontiers donné-tout le sien.
.. On devine reflet qu'avait produit cette fin
si triste d'un joui- de mariage ; on n'assigna
pourtant que des causes très simples et très
naturelles à l'accident; des chevaux empor
tés, un mouvement généreux de Maurice,
une secousse violente, ou la force de la roue
qui, en jetant M. de Vanille sur les pierres
de la roule, avaient mis sa vie en danger.
On parla beaucoup, on gémit, on blâma.
Enlin tout ce qu'un pareil événement, un
jour de noce, peut amener d'exclamations et
de récits d'évenemeus analogues, fut multi
plié par le nombre des convives, et répété
successivement à ceux qui arrivaient pour
le dîntr... On dîna pourtant, mais ou ne
dansa, point;... pas d'illuminations, encore
moins de feu d'artifice, le deuil au lieu de la
joie!
: * La rcpioduction est interdite, i
Pourtant les médecins avaient dès le pre
mier moment répondu de la vie de Maurice.
Renée, avec sa bonté naturelle, souffrit des
souffrances qu'elle vitsupportées courageuse
ment par M. de Varville ; elle le soigna avec
cette délicatesse et cette grâce charmante
d'une jeune femmè aulit d'unmalade. Quand
il ressentit — ~~ J ~
n'eut pas
quelques accès de fièvre , elle
l'air d'entendre qu'il répétait
avec trouble uh nom qui n'était pas le sien;
et, s 'il faut dire tout, Renée, en découvrant,
qu'une autre femme occupait celui qui ve
nait de jurer de n'aimer qu'elle, n'éprouva
pas les regrets qui eussent été naturels. Seu
lement elle se disait : Pourquoi ce mariage?
Cependant Renée ne se crut pas autorisée
par-la à rattacher sa pensée à cette appari
tion qui revenait quelquefois passer devant
ses yeux. Non, elle l'écartait avec sein, et les
jours, en s'écoulant, affaiblissaient ce sou
venir. Il devenait confus et allait s'eftaçant.
Ce jeune homme entrevu un seul jour, dont
elle ignorait le nom, dont personne ne lui
parlait, ce n'était plus qu'ynrêve, çt Renée,
né voyant rien, n entendant rien qui rame
nât le rêve qu'elle voulait oublier, doutait
parfois-qu'il eût eu quelque réalité. - .
Mme de Savigny avait prolongé son séjour
autant qu'elle l'avait pu, après le triste acci
dent. Enfin il fallut partir; mais ce ne fut
pas sans avoir cherché, avec toute sa' pers
picacité de femme d'esprit parisienne, à
deviner ' ce qui se passait dans l'ame de Re
née; et sa surprise fut grande en voyant
que la naïve enfant ne laissait échapper au
cune marque de dépit ou de chagrin ; car
elle savait que Renée avait tout vu ; elle
s'attendait à des questions ; elle pensait que
Maurice aurait à supporter des reproches.
Mais non! calme, pensive et réfléchie, la
jeune femme ne témoignait ni humeur
ni curiosité; cependant c'était un cœur can
dide, et ses impressions se peignaient d'or
dinaire sur son-visage. Tout ce qu'il fut pos
sible d'y remarquer de nouveau se borna à
une expression plus sérieuse; il n'y avait
plus ces joies enfantines, ces badinages gra
cieux qu'elle avait vus jadis à Renée... tout
cela avait disparu,
La santé du marquis de Varville expliquait
aux yeux du monde la tristesse de Renée, et
M. Méry a intitulé Fête de l'Avenir la can
tate que l'on a exécutée ce soir à l'Opéra-
Comique. Le directeur du théâtre aurait pu
donner le nom de Fête des Fleurs à cette bel
le soirée. Jamais on n'a vu tant d'arbustes,
tant de fleurs, des plus belles et des plus ra
res. Les Vestibules, les escaliers, les cou- -
Mrs, le foyer en étaient remplis. A l'inté
rieur, des festons de roses artificielles en
touraient la salle d'une quadruple guir
lande. L'or, le velours ruisselaient partout,
et il ne fallait pas moins que toute cette
magnificence, soutenue d'uù resplendissant
éclairage, pour encadrer ces toilettes étince-
lantes, ces frais etgragieux visages qui, par
tout, occupaient les- plus belles places ; les
hommes, dans presque toute la. salle, sauf
dans les loges-officielles, se tenaient au se
cond et même au troisième plan.
Nous ne citerons pas toutes les illustra
tions qu'on remarquait dans la salle; il fau
drait nommer -tous les ministres, tout le
corps diplomatique, tous les généraux ayant
commandement 1 , sans parler des hauts fonc
tionnaires, des sommités des lettres et des
arts. Nous dirons seulement que le prince
Jérôme était à la gauche du Président .
S. A. I. est arrivée à sept heures et demie.
Sur son passage, elle a été saluée de cris
répétés de : Vive l'Empereur l qui ont re
doublé quand elle est descendue de voiture..
Le péristyle, improvisé.rue Marivaux pour la
recevoir, était efune rare-élégance. L'illumi
nation, composée d'aigles et du chiffre de
S, A. I. alternés, jetait des feux éblouissans.
Des cordons lumineux entouraient l'édifice,
dont les alentours étaient sablés. Le direc
teur, M. Perrin, a reçu le prince et l'a con
duit à sa loge. A l'arrivée de S. A. L, toute
a salle s'est levée,, les acclamations et les
applaudissemens ont été unanimes. Les da
mes n'ont pas été les rîioins démonstratives.
Le foyer avait été transformé en un véri
table boudoir. A l'une des extrémités était
le buste de l'Empereur,-à l'autre celui du
prince Louis-Napoléon.
Le spectacle a commencé par le Domino
noir. Couderc et Mme Ugalde n'ont rien né
gligé pour mériter d'augustes suffrages.Tous
deux avaient laissé de grands souvenirs dans
ce chef-d'œuvra de M. Auber; ils se sont ef
forcés de rappeler les jours de leurs triom
phes. - " " ; .
Après le second acte du Domino noir, dans
lequel on avait intercalé un charmant bal-
"et, une marche triomphale a annoncé l'in
termède. Bientôt le rideau s'est levé et a
laissé- voir- un arc de triomphe dans le
style de la Renaissance, devant lequel se
trouvaient groupés ail pied d'une colonne
tronquée servant de piédestal au buste de
Napoléon III couronne, la Sculpture, la Mu
sique, la Poésie. Une lyre d'or était appuyée
il fallut bien quertVîme de Savigny se conten
tât aussi de cette explication.
Elle se, disait en'partant que son neveu,
avait fait un très bon mariage ; que .sa fem
me était charmante et paraissait fort raison
nable; que forcément dans la retraite pen
dant deux mois au moins, seul avec elle, il
s'y attacherait, et qu'en définitive elle avait
agi sagement et en bonne parente.
Tout ce ijui était venu au château pour le
mariage s'était dispersé; il ne restait, après
le départ de Mûie dé Savigny, que Sophie et
Fernand près des mariés; le baron avait dit
en souriant à Fernand :
— Restez ici jusqu'au moment d'aller à
Paris, vous y serez mieux que partout ail
leurs. Puisque vous ne' quitterez la Bourgo
gne que dans un mois, passez-le près de ceux
qui vous aiment.
Il y avait un peu de malice dans l'expres
sion du vieillard en disant cela, et Fernand
en parut troublé ; mais le baron ajouta :
— N'avez-voûs pas donné votre démission
de votre place à Dijon ?
Au moment où ces paroles étaient pro
noncées dans la chambre de Maurice, So
phie,qui cherchait avec la plus grande atten
tion quelque chose autour d'elle pour conti
nuer sa tapisserie, fut obligée, dit-elle, de
retourner à sa chambre pour trouver ce
dont elle avait besoin, et en passant près du
baron,elle ne détourna pas assez bien la tête
pour qu'il ne pût apercevoir une vive rou
geur qui accrut sa disposition malicieuse.
Quand elle fut'sortie, le baron reprit avec
bonté, quoique toujours un peu souriant :
— Oli ! c'est que M.- Fernand était arrivé
bien jeune à la place de professeur de phi
losophie et de Jangue allemande à l'univer
sité de Dijon! 11 .-fallait qu'il eût un bien
grand mérite, ou,de bien hautesprotections,
choses également estimées, car 1 l'avait em
porté sur des compétiteurs plus âgés, ayant
déjà fait leurs preuves, et s'étant munis de
toutes les recommandations d'amis, de pa
rais et de protecteurs do tous genres, que
leur liabilete et leur bonheur avaient pu
leur faire obtenir.
Maurice, qui aimait à èntendre ainsi cau
ser autour de lui, bien qu'il prît peu de part
à la conversation, porta ses regards sur Fer»
sur le fût de la colonne. Un Africain se te
nait -auprès des trois déessea.
Le chœur était caché derrière un magni
fique ' rideau de fond-, qui fermait l'arc-de-
triomphe.
L'Africain, c'était Bataille, les trois fem
mes étaient Mmes-Ugalde, Lefebvre et Wer-
theimber ; nous donnons plus loin le texte
de * la cantate qui a été' fort applaudie
et qui le méritait. M. Méry, M. Adam et
leurs interprètes doivent. être heureux de
eur soirée. On a fait répéter le premier hui-
tain, (Chanté par l'Africain;les paroles, la
musique, l'exécution-ont électrisé la salle,
et des cris de Vive l'Empereur l ont éclaté
après chaque reprise de ce passage, em
preint d'une véritable grandeur.
..Dans le genre gracieux, nous aimons à si
gnaler aussi l'art avec lequel M. Adam a su
'ramener l'air : Partant, pour la Syrie, placé
sous le couplet : De ta mère chérie, etc., chan
té d'abord dans le timbre original par Mme
Ugalde et repris ensuite par le quatuor avec
1 des variations d'une grande délicatesse, et
où Mme Ugalde a pu déployer toute là har
diesse de sa vocalisation.
Le tableau final, représentant la vue du
Louvre achevé,, a excité l'enthousiasme gé
néral. Le rideau qui fermait l'arc de triom
phe s'est relevé, soutenu par deux gé
nies, et le Louvre, réuni aux Tuileries, s'est
présenté, pris à vol d'oiseau, à l'œil du spec
tateur; au même moment, on a vu descen
dre deux autres génies portant une couronne
impériale ; en rnerce temps, tous les artistes
du théâtre remplissaient le devant de la scè
ne dans les costumes les plus variés, en agi
tant des palmes vers la loge du prince et en
unissant leurs voix, dans le chœur final.
S. A. J. n'a pas paru moins satisfaite que
le public de ce bel intermède, si habilement
disposé par M. Perrin. Ce serait dommage
que cette charmante composition n'eut
qu'une soirée.
Il était près de onze heures quand l'inter
mède s'est terminé. la foule était encore
considérable aux abords de l'Opéra-Corni-
que, et" elle paraissait décidée a attendre
la sortie- du Président, qui n'aiira eu lieu
que fort tard, si S. A. I. est restée jusqu'à
la fin du spectacle.
Le secrétaire de la rédaction : i. boniface .
Lorsque d'un grand pays les forces sont données
A l'énergiquo main du suprôme pouvoir ! '
I-'our que le bien se liâte, il faut qu'un seul domine :
Le pouvoir divisé n'a qu'un bras impuissant ;
Quand un seul dit : Je veux ! toute œuvre se termine,
Et les plus longs travaux s'achèvent en naissant.
Ainsi notre vieux Louvre, imposante merveille,
Qu'un grand roi commença,que l'Empereur aimait,
.Palmyrg du désert et ruine la Teille,
1 Voit sa dernière pierre à son dernier sommet.
Sous l'œil de son glorieux maître.
Sous'un eiel devenu serein.
Ce Louvre attend ceux qui vont naître : -
Un peuple de marbre et d'airain.
Ce palais aux voûtes nouvelles,
Déjà plein de noms triomphans.
Etend aujourd'hui ses deux ailes
Pour abriter tous ses enfans,
L'AFRICAIN.
Entre les cités la première, I
Paris; aux rayons éelatans, I
Nous venons chercher ta lumière
Eteinte chez nous par le temps.
Sur nos monts, comme l'aigle antique,
Ton aigle trouve un libre accès ; ■
La vapeur, sur la mer d'Afrique
Est un pont sur le lac français.
Le jour où votre, main puissante
De l'Emir ouvrit la prison,
Dans la- tribu reconnaissante
Vous enchaîniez la trahison.
Histoire jamais effacée :
L'Afrique vous doit son réveil,
Le rayon de votre pensée
Illumina notre soleil.
LA POÉSIE.
. Deux grands noms que la gloire inonde
Eblouissent toujours nos yeux ;
De tels noms régnent sur le monde
Quand le monde a foi dans les cieux !
LOUIS!... NAPOLÉON!.-, ô France!
Réjouis-toi quand nous donnons
Le^ceptre d'or et fa puissance
A fui qui p
LA FÊTE DES ARTS ,
CHANTS DE L'AVENIR,
Paroles de M. Méry, musique ile M. Ad."Adam.
PERSONNAGES : .
' LA MUSIQUE,
LA POÉSIE,
I.A SCULPTURE,
VU AFRICAIN,
;Mme Ugalde.
Mlle Lefebvre.
Mlle Wertheimber.
M. Battaille.
LA sculpture ; , '
La France est satisfaite et le monde est tranquille,
Car le monde a.toujourssur nousles yeux ouverts.
Et, quand la fiaix descend sur cette immense ville,
Le calme, de Paris s'étend sur l'univers.
Sire, votre œuvre est faite; oui, deux fois elle s'ouvre
L'ère de Périclès, d'Auguste et de Léon ;
Un aigle plane sur le Louvre,
Une croix sur le Panthéon,
E.t le peuple applaudit le soleil qui découvre
Ce rêve colossal des deux Napoléon.
LA MUSIQUE.
Venez tous, redites encore
Lé môme nom, le même chant;
Venez des hauteurs dé l'aurore,
Venez des plaines du couchant.
Aujourd'hui nous verrons le L'ouvre
Par Napoléon achevé;
Aujourd'hui sa main le découvre
Le monument qu'il a rêvé !
CHŒUR.
Venons tous, redisons encore, etc.
LA MUSIQUE, LA SCULPTURE, LA POÉSIE.
Que disent ces voix lointaines?
Leur chant apporte un grand nom.
Est-ce encore l'hymne v d'Athènes -
Saluant le Partbénon ?
A voir cette foule immense,
. Ces arceaux de fleurs couverts,
On croit que Paris commence
La fête de l'univers !
RÉCITATIF.
Sire,votre œuvre est faite! Oh! combien peu d'années
ll l'aut pour accomplir ce qu'un jour nous fait voir
qui porte ces deux noms !.
,A MUSIQUE. * .
Oui, leiavts fleuriront. Cette illustre journée
Réunit tous les arts en lumineux faisceau.
Hortense, mère auguste, artiste couronnée,
Du prinee impérial a béni le berceau.
De sa mère chérie
Il se souvient toujours.
0 France, ô toi patrie
Des beaux-arts, nos amours !
Mémoire que révère
Son cœur reconnaissant : *
La lyre d'une mère v
' Le berçait en naissant;
. QUATUOR. -
Du palais la porte s'ouvre, -
Et semble nous convier
A peindre aux parois du Louvre
La palme dé l'olivier.
L'aigle qui vient de s'abattre
Sur ce vieux palais des rois
Unit les noms d'Henri quatre . '
Et de Napoléon trois.
(La toile du fond se lève, et laisse voir un décor
représentant le Louvre terminé.)
CHOEUR FINAL.
' Gloire au travail ! l'œuvre est finie,
Louvre des deux Napoléon.
Le Louvre est fait; gloire au génie!
Les beaux-arts ont leur Panthéon !
contient les ré
prince Louis-Na-
La Gazette des Postes
flexions suivantes sur le
poléon 4 '
« Le 2 décembre a été accueilli avec faveur par
les cabinets et par les peuples de l'Europe; la so
ciété avait été .sauvée et la civilisation garantie.
Le plébiscite fut considéré comme l'affermisse
ment de l'autorité, . comme un signe du bon
sens des masses, eti opposé comme châti
ment à ceux qui révoquaient en doute le
droit et la vocation du Napoleonide.
«Les voyages du Président ont dû convaincre les
jeeptiques que sa personne et son principe étaient
l'objet d'un dévoûment réel. Les mesures de son
gouvernement ont réveillé et fortifié la confiance
publique. Une foule de mesures, d'améliorations,
d'entreprises grandioses , calculées pour des an
nées d'ordre et de paix, ont prouvé que le gouver
nement du prince et que la France comptaient sur
la solidité de l'ordre de Choses actuel. Le rétablis
sement de sa dynastie est sur le point de couron
ner l'œuvre. Pourquoi donc la confiance dans la
paix aurait-elle diminué, d'où viendraient donc le
mécontentement, le blâme et l'hostilité? Personne
I n'a pu douter que le but du prince ne fût de re-
■ conquérir la couronne impériale; ceux qui ont
applaudi au 2 décembre, ont dû tenir prêt un bill
d'indemnité pour l'avènement au trône.
» Personne n'a manqué d'esprit au point de ne
pas voir cet enchaînement nécessaire. A ceux qui
nand et l'examina avec plus d'attention. Les
yeux de Renée interrogèrent aussi le jeune
professeur, qui répondit avec uh doux sou
rire :
-•—Voilà déjà cinq ans de cela; j'avais
vingt-sïx ans alors ; mais j'avais l'air d'en
avoir à peine vingt, et ce ne fut pas sans
exciter la surprise et la curiosité que je fus
reçu chez le doyen, homme d'une grande
science, uiais qui l'avait acquise par de si
longues années d'études qu'il s'étonnait
qu'on put avoir la moindre prétention de
savant avant qu'une cinquantaine d'hivers
eussent permis d'amasser à loisir les pro
fonds trésors de la science.
— Le fait est, dit le baron, que je vous vis
alors chez ce doyen, un brave, homme que
je visitais quand j'allais à Dijon; car j'allais
encore à la ville alors de temps en temp re
voir quelques vieux amis, et je vous vis
mince, -pale, sans barbe, avec vos cheveux
blonds tombant sur un col rabattu! Vous aviez
■unair bien enfantin pour venir instruire des
ma chère Renée, que malgré cela ce fut bien
vite le professeur le plus renommé de la ville.
Il ne se mêlait pas au monde; sa *we studieu
se se passait a préparer et à faire ses cours,
puis a un travail assidu dans sa demeure.
La seule maison qu'il fréquentât était celle
de ce doyen, homme éclairé sur toute chose,
mais vivant retiré, et dont la femme et la
fille faisaient toute lajoie.... Ah ! dit le baron,
j'oubliais de vousane que ce doyen avait
eleve jadis notre paient, M. de Saint-Méry,
qui hn gard'ut une grande reconnaissance et
conduisait quelquefois sei. filles près de la
sienne.
— Ah ! dit ^laurice !
Renée sourit aussi; Fernand fut embar
rassé et rougit.
— Voilà, dit le baron, ce que jë sais de
M. Fernand, qui ne veut jamais parler de
lui. Pourtant, je vois sur le visage de ma
petite' Renée, qu'elle ne serait pas fâchée
d'en savoir davantage, et M. de Varville, à
quinous faisons deslectures pour le distraire,
aimerait mieux un roman raconté par le hé
ros lui-même. ,
— Certes, dit Maurice !...
Mais Fernand s'écria :
— Un roman ! moi un héros de roman !
Et il rit de bon cœur. * ■ v
—Eh bien! reprit Maurice, les romans sont
l'histoire du cœur humain, de ses passions,
de ses combats, de ses faiblesses et . de ses
regrets. Qui n'a pas eu à trente ans son ro
man, c'esl -àrdire ses troubles intérieurs?
Heureux ceux qui ont été vainqueurs dans
ces luttes, ou qui du moins n'ont pas été trop
blessés,dans le combat!
Il y avait une grande mélancolie et pres
que une confidence de Maurice dans ces pa
roles ; elles inspirèrent de l'intérêt à Renée
et de la confiance à Fernand.
— Si vous pouviez désirer réellement de
savoir ce qui me regarde, par intérêt pour
moi?...
— Oui, oui, oui ! dirent presque en même
temps le baron, Maurice et Renée
— Alors je vais vous raconter ma vie. ,Ce
sera court et simple : nul événement remar
quable ne viendra vous frapper;mais ce se
ra vrai, et vous verrez que je" n'ai que des
grâces à rendre au ciel pour m'avoir fait des
jours si calmes.
Je-suis né dans un village d'Alsace, près
des bords du Rhin. Mon père était cultivateur
aisé, et même riche pour le 'canton. 11 avait
à ferme une grande terre des plus considéra
bles et possédait lui-même plusieurs arpens
de bois. Il vivait dans l'aisance, et sa nom
breuse famille ne lui inspirait - aucune in
quiétude. J'étais le second de onze enfans, et
je venais d'atteindre ma dixième année,
lorsque j'entendis par hasard une conversa
tion a mon sujet entre mon père, ma mère
et le curé.
— C'est dommage, disait mon père, que
vous ne puissiez pas vous charger de Fer
nand! Ce serait là son affaire; il est doux et
intelligent; mais ni ses forces ni son goût
ne le portent au travail des champs : il n'y
fera pas grand'chose et il n'y sera pas heu
reux.-
— Le serait-il davantage, répondit le pas
teur, dans un état qu'il aurait embrassé
sans en connaître les devoirs, et où il re
gretterait peut-être un jour de se trouver
engagé?
— Ah ! je sais bien, dit ma mère, ce qu'il i
■ ne voudraient pas se contenter des assurances de
paix si souvent données,- ou auxquels elles inspire
raient de la défiance, nous demandons quelles ga
ranties autres ou plus, grandes le prince eût pu
donner que des paroles de paix? Demander un
désarmement serait vraiment exiger trop dans un
moment où l'Europe estlà armée jusqu'aux dents;
où la. révolution en France tend à une forme que
l'étranger a deux fois renversée violemment pour
rétablir l'ancien droit, lorsque ces paroles, qui
ont retenti dés camps de Varsovie jusqu'au Rhin,
ne sont pas encore oubliées : « Qu'il fallait écra
ser la France pour extirper la révolution. » Un
peuple qui a de pareils souvenirs et une noble
fierté ne se livre pas pieds.et poings liés.»
Un arrêté du préfet de la Seine, affiché
aujourd'hui, fait connaître aux électeurs que
le scrutin sur le plébiscite sera ouvert, le di
manche et le lundi 21 et 22 décembre à
huit heures du matin, et fermé à six heures
du soir.
Conformément aux ordres du ministre de
la marine, les officiers des différens corps de
l'armée navale, appelés à voter à Paris, de
vront préalablement se munir d'une pièce
constatant leur position.
A défaut, ils "devront réclamer de la di
rection du personnel un certificat attestant
leur identité.
Le scrutin sera, ouvert dimanche 21 no
vembre, au ministère de la marine, à onze'
heures du matin, et le lundi 22, à la même
heure. ,
Nous avons cité hier quelques passages
d'une lettre pastorale^ de l'évêque de Gap,
sur le vote des 21 et 22 décembre. M. l'évê
que de Rennes n'est pas moins explicite :
«Ne sachant jamais décliner une responsabilité
quelconque quand nous croyons qu'elle incombe
à notre charge pastorale, nous vous dirons en
toute simplicité de cœur et tout haut : «Votez et
faites voter par ceux de vos paroissiens dont vous
possédez la corifîanee en faveur du sénatus-con-
sulte qui va être soumis à la ratification de la
France ; que tous mettent oui dans l'urne électo
rale. . -
» Vous connaissez trop, Messieurs et chers coo-
pérateurs, l'indépendance de notre caractère et le
désintéressement de nos intentions personnelles,
pour attribuer cet avis, que nous vous donnons
avec tant de franchise, à tout autre motif qu'à ce
lui des intérêts sacrés de la religion, dé la société
et de la famille, aujourd'hui tout aussi menacés
et peut-être plusencoré qu'en 1848 et 1849.
» Que chacun donc, comme à ces deux époques
de si glorieuse mémoire pour le diocèse de Ren- .
nés, sache mettre de côte ses idées ou ses affec
tions privées pour ne songer qu'à notre chère et
malheureuse patrie, qué Louis-Napoléon seul peut
sauver d'un cataclysme universel. -
» Pour vous, chers coopérateurs, comme il y a
quatre années, soyez les conseillers de vos obéis-
sans troupeaux; comme alors, stimulez leur in
différence naturelle, guidez leur inexpérience et
dirigez leurs votes. Ne craignez rien; s'il le faut,
invoquez notre autorité pour vous mettre à cou
vert, et rejetez sur votre évêque toute la respon
sabilité d'une mesure"que sa conscience accepte
sans peur et sans reproche, car il la croit ferme
ment l'accomplissement d'un devoir.»
Nous trouvons dans un journal italien, la
Voce délia Libertà, deux des pièces révolu
tionnaires que le Moniteur a publiées hier.
Le journal italien donne au' manifeste de la
société de la Révolution, le titre de Bulletin
n° 6, ce qui trahit l'existence d'une série de
publications du même genre. Quant au ma
nifeste daté de Jersey, il le fait précéder de
l'introduction suivante :
« Nous recevons de Jersey la réponse que
Victor Hugo a adressée aux républicains de
France au nom du comité français. Nous
le publions, en regrettant de détruire par
une traduction une grande partie du mérite v
de l'original. »
r Les regrets du journal démagogique étaient
superflus. Le gouvernement français, en li
vrant à la publicité ces pièces plus ridi
cules encore qu'odieuses, n'a privé personne
de ces beautés auxquellés la Voce délia Li
bertà est si sensible. '
Le secrétaire ds la rédaction, L. boniface .
Quelques faits qui nous sont simultané
ment'signalés par la presse départementale
de ces derniers jours ^ montrent quelles
faudrait à mon petit Fernand. Ce serait
de pouvoir étudier et devenir savant. C'est
là sa vocation ! Dès qu'il peut se procu
rer un livre, il reste des heures entières
les yeux dessus, sans bouger, et parfois,
quand il n'en a pas, je le surprends assis,
les yeux levés au ciel, murmurant des pa
roles qui sont belles comme des prières;
mais nous avons tout juste ce qu'il faut pour
élever ici notre famille, et il serait impossible
d'en distraire la somme nécessaire pour en
voyer Fernand étudier à la ville. N'y pen
sons pas, et cherchons dans les travaux de
la ferme ceux qui seront les moins fatigans
pour lui.
• Ces paroles si simples éveillèrent en moi
une foule d'idées" nouvelle s : car jusque-là
je ne m'étais pas rendu compte de mes goûts
«t de mes penebans. Le bruit me fatiguait;
je ne pouvais supporter de rudes travaux;
les jeux des autres enfans me déplaisaient,
et mon seul plaisir était la solitude. Je de-
..1—1—i- • -
. waacuvav;, OC UC"
mandais à garder les chevaux qu'on laissait
'.ans les bois, et je me souviens enco-
errer dans , .. • J- kjvuliUUO CIIUU—
re de ces nuits mystérieuses, où la lune, en,
se joueÉt au îhilieu des grands arbres de la
forêt, pretàit mille formes fantastiques à
leurs contours variés, et jetait ma pensée
/liane Aac .v&vrac nlflinf -
vv Tiotuua îtîtJJ'l"
ques. Cependant ces instincts de moname
vers un monde idéal et poétique ne .m 'a-
yaient jamais fait comprendre ou désirer
une autre vie que celle de notre village ; je
ne savais pas avoir un souhait hors de ce sol
natal, ou y.vivre autrement que les autres;,
mais à partir de ce jour et de cette eonver-'
sation entendue, je vis, je sentis, je comparai,
et dès-lors je formai des projets pour l'ave
nir, sans me rendre compte des moyens de
les exécuter. Décidé à quitter le pays, je ces
sai de m'y plaire, et tout me sembla fatigue-
et ennui. Je voulais toucher à l'arbre cle
science, et mon esprit n'habitait plus avec
moi noire village. ,
Soit que les circonstances favorisent une
volonté puissante, soit que la puissance de
cette volonté force les circonstances à lui être
favorables pour arriver à son but, il se pré
senta bientôt une occasion qui me permit de
marcher vers le mien
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