Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-08-12
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 12 août 1852 12 août 1852
Description : 1852/08/12 (Numéro 225). 1852/08/12 (Numéro 225).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 225."
P2UX BB t'ABOHHESSEKT
mis....... 18 f. PAU TKIHE8TEIJ
KÉPÀHTEMENS. 1® F. —
BN NUMÉRO : *0 CEHTOUM.'
POUR LES PATS ÉTRANGERS SA ropOrtM
au tableau qui sera publié dons le Journal^
es 10 et 25 de chaque moisi
\Les tiityaummt datent dti i® ti U
dt chaqut moi'i
: iHéjàè W*Um* (SPalala-Moy&l),^,; A®i
C 1S52.-JEUD1 12 AOUT.
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
S'adresser, franco, pour .la rédaction, à M. C ichkvax -C ulhigny, rédacteur in chef.
Les articles déposés ne sont pas rendus.
On $'abi.nne } <&.»; le* dépirtemns^ aux .Messageries et aux Directions de poste.—A Londres, chez MM.' G owie et ïils
. . —A Strasbourg y chez M. A lexandre, pour l'Allemagne. ; ■ '
S'adresser, franco, pour l'administration, à M.jDENAlN, directeur^
l/ss annonces *act segiies au bureau d« jc-Tinaai; « chas M. PAWs, regismstu, 10, place
PARIS, 11 AOUT.
Nous avons annoncé que les conférences
ouvertes entre la France et la Belgique
n'ayant abouti ni à la conclusion d'un traité
définitif, ni à la prolongation de là convention
du 13 décembre 4845, les rapports eommer-
cinus. des deux pays se trouvaient, à partir
du 10 août, replacés sous l'empire du tarif
général. Les négociations poursuivent néan
moins leur cours, et tout porte à croire que,
lorsque le cabinet belge sera reconstitué, on
arrivera facilement à une conclusion.
Il u'est donc pas inutile de remonter à
l'origine de la convention du 13 décembre
1845 ét d'en examiner les résultats. C'est
une étude qui n'a pas seulement une Impor
tance rétrospective. Ne doit-elle pès, en effet,
servir de base à la nouvelle convention qui
pourra intervenir?
Le traité primitif conclu entre la France et
la Belgique, date de 1842. Il fut motivé par la
grande révolution que la décou verte de la fi
lature mécanique du lin occasiona dans l'in
dustrie linière. L'Angleterre, qui deman
dait autrefois des«ftls délia à la,France,nous
"enexpédiait par masses. Dans une telle situa
tion, il fallait nous défendr#, sous peine de
laisser périr cette industrie.Minière.que nous
exercions de temps immémorial. Le droit à
l'entrée fut d'abord porté à 10 0/0. Mais
à peine la loi de 1841 , qui avait sanc
tionné ce tarif, était-elle promulguée, que
l'accroissement continu jîes importations
en faisait ïpconnaltre l'insuffisance. Le droit
fut, en conséquence, élevé à environ 20
0/0 par une ordonnance du 26 juin 1842,
légalisée quelques années après. C'est seu
lement à partir de cette époque. que no
tre industrie, protégée d'une manière con
venable, put prospérer et doter définitive
ment la France de la filature mécanique
du lin. Nouvelle preuve, pour le dire en
passant, de l'efficacité d u système protecteur.
Mais alors intervint la Belgique, qui
nous fournissait des toiles depuis long
temps. Esle objecta que lenouveau tarif était
surtout dirigé contre les produits^anglais, et
elle récLma un droit différentiel. On entra
en pourparlers. La France se'montra dispo
sée à faire des concessions sur le droit des
■ fils et des toiles de lin, à la condition que la
Belgique accorderait en retour un traitement
de faveur à quelques-uns de nos produits.
De là la convention du 16 juillet 1842,.qui a
précédé celle du 13 décembre .1845,.y-'
Voici quelles étaient les bases de Ta con
vention du 16 juillet 1842, cop'clue pour,
quatre années. Nous consentions à laisser
entrer les fils et les toiles btlges sousl'em"-
pire du tarif de 1841; c'ésatf un avantage d&
50 0/0 que nous leur a.'cofdionssur les fils
et les toiles de l'Angleterre ; les produits
belges n'acquittaient qu'un droit de 10 0/0
de la valeur, tandis que les produits auglais
fttairi ni.snmn.i s à imd«wt »4e 20 O/O.-Eu-eOta-
pensation, la Belgique nous concédait uue
diminution de droit sur nos soieries et sur
nos vins, et un déchet plus considérable sur
nos sels. Mais il y avait cette différence, que
nous nous interdisions d'étendre à aucun
autre pays les faveurs que nous accordions
à la Belgique, tandis que la Belgique restait
libre d'étendre à d'autres Etats celles qu'elle
nous accordait.
■ La convention du 16 juillet! 842 rie fut
discutée par uoschambre» législatives qu'eu
184o. Elle tut alors assez vivement aitapiée.
On allégua que nous avions donné à la Bel
gique beaucoup plus qu'elle ne nous avait
rendu. Le droit de faveur 'accordé à ses fils
et à ses toiles, avait été un bienfait pour
elle dans l'état de misère où se trou
vaient les .Flandres. Les .avantages qu'el
le avait faits à nos soieries et à nos vins,
ne nous avaient, au conlraire, que très
p qii'elle s'était empressée u'étendre au Zoll-
verein les dispositions qu'elle nous avait
accordées. Enliu, on fit également entendre
des réclamations contre les augmentations de
droit dont elle venait de frapper nos fils de
laine, nos tissus de laine légers,, nos articles
de mode et nos articles de vêtement.
, Ces attaques, qui avaient été appuyées par
le rapporteur"à la chambre des dénotés, fu
rent assez graves pour amener M. Guizot à
la tribune. M. Guizot reconnut" qu'en effet
nous n'avions pas obtenu autant que nous
avions concède; mais il fit surtout valoir
les raisons politiques qui avaient déterminé
le gouvernement. « Il n'y a personne, dit-
il, qui ne sache de quelle importance a été
pour nous la substitution de l'Etat belge
à l'Etat qui existait sur notre frontière avant.
1830. Il n'y a personne qui ne sache que l'E
tat antérieur avait été ihstitué contre nous ;
et que l'Etat belge a été institué à notre pro
fit; que, par le principe rie neutralité, re-
couuu et appliqué à l'Etat belge, imtre fron
tière a acquis une sécurité qu'elle Savait pas
auparavant. On peut dire que notre frontiè
re a été en quelque sorte moralement recu
lée jusqu'à l'Escaut. » Et, comme on se ré
criait contre celte expression que l'on trouvait
exagérée, M. Guizot ajoutait : « Pensez à l'a
vantage d'avoir de ce côté un gouvernement
qui, non seulement n'a jamais clierchéà nuus
susciter aucun embarras, mais qui, au con
traire, est constamment engagé envers nous
dans des rapports de bienveillance et de bon
ne intelligence politique. » M. Guizot rendait
cet hommage à la sagesse et à l'habileté du
roi Léopold, -qu'il avait compris que son
royaume devait surtout s'adosser à la Fran
ce, et qu'il avait toujours suivi fidèlement
cette politique avantageuse aux deux Etats.
On. conçoit que de semblables considéra
tions étaient de nature à agir sur la chambre.
M. Guizot avait déclaré d'ailleurs que, quand
la convention expirerait, nous aurions le
droit de demander à la Belgique des avan
tages plus étendus que ceux qu'elles nous
avait accordés. Le traitement de faveur con
cédé aux fi's et aux toiles belges fut donc
voté; mais il fut. voté seulement jusqu'au
mois de juillet 1846, c'est-à-dire jusqu'à
l'espiration'du délai assigné à la convention.
Cette discussion eut pour résultat de faire
rouvrir presque immédiatement des négo
ciations entre les deux gouvernemens afin
d'examiner les conditions de renouvellement
du traité qui n'avait plus que moins d'une
année à courir. Le maintien du droit diffé
rentiel accordéaux filsetaux toilesbelges était
de la plus haute importance pour nos voi
sins. La misère avait fait Ifs progrès les plus
déplorabhs dans li s Flandres. La charité
pubûque était à'bout de ressources; la
population ■était déernée , et le nombre
des décès déparait cîlui des naissances.
La Belgique obtint la conservation du
traitement de faveur pour son industrie
linière; toutefois, on créa uuê catégorie
nouvelle pour les fils fins dt plu di tiente-
six mille mètres au kilogtanime : on fixa
un maximum pour les q au lies qui leur
raient être importées aux droits réduits ; on
retira l'engagement qui avait ete pris de ne
pas-toucher au tarif général, ce qui, du"
reste, n'avait d'imponmce q o uns'le
point de vue des principes. La Belgique
obtint, en outre, quelques avantages pour
ses machines et pour ses ardoises. Quelles
concessions nous fit-elle ep retour? Elle
maintint la diminution de* droits sur nos
vins et nûs soieries, diminution dont jouis
saient d'ailleurs les Etats du Zollverein.
Elfe porta de 7 à 12 0/0 le 'déchet accordé
à nos sels. Elle retira les augmentations
ade droits dont elle avait frappé, en 1838, nos
tissus de coton, et, en -1844, nos fils et tissus
de laine, nos articles de mode et nos articles
d'habillement. Le traité fut conclu pouf six
ans.
Recherchons maintenant quelles ont été
les conséquences de cette convention Le trai
té du 15 décembre 1845 n'ayant été, en
grande partie, pour ce qui concerne les pro
duits liniers, que Ja-reproiuclion des avan
tages faits à la, Belgique par le traité de 1842,
c'est à cette dernière époque qu'il con
vient de remonter pour se rendre compte
des résultats de la laveur accordée à nos
voisins. Nous ne recevions, en 1842, que
500,000 kilogr. de fils belges ; cette quantité
s'est successivement accrue au i point d'at
teindre 2,300,000 kilogr. .eu 1815; mais, de<
•puisée moment elle a commencé à décroître,,
et elle est revenue en 1831 à un chiffre qui
différé peu de celui de 1842. L'importation
des toiies, de son côté, a subi une progres
sion régulièrement déci ois>ante, et elle est
arrivée à n'être plus que le tiers de ce qu'elle
était avant 1842. Quant à nos vins, à nos soie
ries, à nos tils et tissus de laine, leur expor
tation en Belgique s'est accrue, mais non
pas cependant dans une proportion qui per
mette de l'attribuer uniquement al influence
du traité.
Il semblerait résulter de la que la Belgi
que n'aurait, pis plus que la France, un
grand intérêt au renouv. llem^nt du ti a» té.
Mais on se tromperait en tirant cette conclu-
siondes chiffres précédons. Les faveurs ac
cordées à l'industrie balge n'ont pas em
pêché, il est vrai, ses importations de toiles
en France; de décroître: mais elle j trouve
euçore un deboucue de plusieurs millions,
et, bien que la situation des Flandres se soit
singulièri ment nue îuree depuis 1843, il
n'est pas douteux que le retrait des avan-
tagesdont 11 s eia ent en possession aurait les
conséquences les plus lâcheuses pour une
contrée qui vient a psine d'échapper â une
crise terrible. En effet, notre industrie, grâ
ce à une législation sagement protectrice, a
marché eh avant,,et si les fdbricans belges
cessaient d'être favorisés par, un tarif excep
tionnel, elle s'emparerait de la place qu'ils
occupent sur noire marché. . Les Flandres
perdraient donc le débouché qu'elles trou
vent encore en France, et seraient exposées
à de nouveaux désastres.
Il importe, d'ailleurs, de remarquer que
.tous les avantages fûts par la France à la
production belge, ne sont pas inscrits dans
le traité de 1843. Nous accueillons ses fon
tes au droit de 4 fr. le quintal, tandis que
nous demandons 7 fr. aux foutes anglaises.
Nous recevons ses houilles au droit de 15
centimes, tandis que nous faisons payer
50 centimes aux houilles de la Grande-
Bretsgue. Or, il faut savoir que les impor
tations des houilles belges figurent, dans
les états publiés par, l'administration des
douanes, pour près de 50 millions de francs.
On dira sans douta que ces tarifs diffé
rentiels ont été principalement établis en
vue de nos propres intérêts. A la bonne
heure; mais il n'en est pas moins incontes
table que les Belges en profitent de leur côté;
ils uoivent même savoir que le commerce
rouennais se sert surtout de cet argument,
pour réclamer la suppression des zones dans
des méinoiivs que, pour noire part, nous
avons combattus plus d'une fois.
Nous croyons donc notre gouvernement
fondé â dem tnler des coacassions nouvelles
à la Belgique. La chambre de commerce de
Lille, a signalé deux abus dont il con
viendrait de prévenir le retour : d'une
"part, 1 introdUctioB, au droit de l'ecrii, de
toiles, fabriquées avec di s fils qui ont subi
un certain degré de blanchiment, et, d'autre
part, les moyens employés pour fausser les
résultats de l'instrument qui sert à apprécier
le degré d^fuiesse du tissu, et par conséquent
sa valeur. Nous devons également réclamer
des dispositions indispensables pour relever
notre commerce des sels, qui a subi une
décroissance depuis les dernières mesur. s
prises en Belgique'. Enfin, il y a nécessité
de mettre un terme à l'industrie frauduleuse
de la contrefaçon, en accordant à l'importa
tion des livres belges une réduction de droit
compatible avec les intérêts de nos libraires-
éditeurs.
Si nous sommes bien informés, les négo
ciations entamées pour une convention pro- v
visoire auraient échoué, parce que notre
gouvernement voulait que l'abolition de la
contrefaçon y fût posée en principe. lia paru
au cabinet belge que, dans sa position de mi
nistère démissionnai! e, il ne pouvait assu
mer la responsabilité d'un acte aussi im
portant.. S'il en est ainsi, la reconstitution
du cabinet belge sera probab'ement bientôt
suivie de la conclusion d'un traité définitif
j.qui, nouv Tespérons, donnera satisfaction
'VÀ inteicts des deux nations. bi'rat.
v , mi il III mm —
Notre correspondant de Madrid nous écrit
que le. décret du 1 er août, qui ordonne d
transférer aufrésor'pwb'ic les fonds versés à
la banque d i'Saint-Ferdinand par les jeu-
i.-es gens appelé- an sort, etqui se sont exemp
tés du sert ire mitilaire, a été très bien ac
cueilli de toity le monde en Espagne. On dit
que ces foads^'elèvent à lasomme de51 mil-
llms d j réa ux~et on es père q ue d'autres dépôts
d'argent, eparuillés dans diverses^ caisses ou
dt'posés à la même banque, ne tarderont pas
à être tvàus-ferés tiussi au trésor, en recevant
un intérêt de 5 0/0. Cette mesure, qui est
avantageuse pour tout le monde, mettra le
* gouvernement à même de diminuer consi
dérablement sa dette flottante , et fera un
grand bien au crédit de l'Espagne..
Le Dario espagnol, journal de l'opposition
modérée, en parlant de cette mesure, n'ex
prime qu'un seul regret, c'est qu'elle n'ait
p is été prise plus lôt. Il en attend des avan
tages considérables, parce que le crédit du
trésor se trouve aujourd'hui visiblement
amélioré.
Le président du consei], M. Bravo-Muril-
lo, après plu-ieurs jounsdeséjour à Madrid,
est reparti pour la .résidence royale de la
Granja. D'après certains bruits, à ce que
nous assure notre correspondant, M. Bravo-
Mnrillo devait proposer a la reine uue modi-
cationassiz impoitante^daus le miujstqçe.
C-;tle modification prouverait que le,premier
ministre n'a pas été sourd aux conseils qui lui
arrivent de tous les côtés pour le convaincre
delà nécessité de renforcer son ministère en
prenant pour.collègues des hommes aussi
laborieux que lui-même, et qui inspirent au
pays plus de confiance que les médiocrités
cloqt il s'est entouré.
On assurait à Madrid que le marquis de
Miraflores, ministre d'Etat, serait remplacé
par. M. Beltran de Lis, ministre de l'in
térieur,' et que M. Oiivan remplacerait ce
dernier. On annonçait aussi la retraite de
M. Reynoio, ministre des travaux publics,
et du ministre de la,justice; mais on ne dé
signait pas encore leurs succeseurs. Tous ces
cbaiigemens annoncés recevaient le meil
leur accueil de la part du public et étaient
attendus avec impatience, principaiement
la retraite de M. Ileynoso et du marqtns ce
Mirafloràs. L'essai qu'on a fait de M. Reyno-
so, en le chargeant, pour son début, d'un
département aussi important, surtout au
jourd'hui; en Espagne que celui des tra
vaux publics, aétebitin loin de réussir. L'é-
Jan général pour les' chemins de 1er, pour
les canalisations, pour les routes, qui s'est
développé avec tant d'enthousiasme dans la
péninsule, mériterait un meilleur directeur.
Quant à M. de Miraflores, qui n'occupe,
il est vrai, que'ie portefeuitTu des affaires
étranger* Sj, ministère assez lus gnifiant au-
joùm r iiui en Espagne, ou a toujours pen-é
a Madrid que M. Biavo-Murii:o n'avait pas
été heureusement inspire en le choisi.«saut
pour collègue, et que lui-même s'était mé
pu- sur tes vrais intérêts en abandonnant
s s ani'S politique» et la présidence du sénat
pour accepter un poste ministériel.
t. BONIFACB.
du 10, et en attendant le résultat d«s négociations
qiti sa poursuivent à Paris, les droits généraux, du
tmf seront appliqués aux tnarchaudisud comprises
dans cet .acte inUrnatijnal. ».
guis Tindépendance belge ajoute :
« En attendant la signature et la sanction de la
convention aniioncrecnwmelrès prochaine, il n'en
v;i pns moins y sivoie, à partir d'aujourd'hui, une
période de transition pendant liqu<-lie le lygime
antérieur aux t aitrs 'le 18121845 va. rentrer < n
vigueur. Ainsi tes anciens dr. its sur les vin-, les
fils et tissus de lame, le* t 'S appliqués à l'impo'rlati.m de France, et de même
la douane fraiiç.iwe |n reevra pend ..rit qu-l.iui'S ^e
mairies les aiiciens oruits sur les produit- belges
coin pris, dans les conventions de 184i-18t5. »
Le Moniteur publie ce maiin la note sui
vante :
de quinze |oui> en Belgique, a empêché fes plé
nipotentiaires belucs de conclure un ir..ité de com-
nane d( m ud entii- la Fwnce et la Belgique.
» Le ternie de la convention de iSiSvxpira.nt
la 10, le commerce s'est trouvé de'piein droit re
place îous l'empire du droit commua des tarifs des
deux pays. Néanmoins, les négociations conti
nuent, et l'on iieut espérer qu'elles ubautiroht à
un résultat satislaisant. »
' Le numéro de la Nouvelle Goz' tte de Prusse
(Grzette de la Croix), qui a paru hier, con
tient l'avis suivant, qui porte la signature du
rédacteur en chef :
« Le ;ou-fi.'né a reçu hier l'invitation de se
présenter à la préfecture de pr.lipe ; là, le prési
dent, M. de Unikddey, lui â annoncé qu'il était
chargé, par un rescrit ministériel, d'enjoiudre à la
rédaction de la Nouvelle Gazitte de Prusse. de ces
ser ses attaques haineuses et violentes contre les
puissances ttrangères, et particulièrement contre
le Président de la République,' Louis-Napoléun ;
M. de Hiokeldey a ajouté qu'au cas où la rédac
tion ne tiendrait-pas compte de cet avertissement,
on aurait recours à d'autres mesures.» (D'Beutner.)
On lit dans la Gazette de Cologne du 9
août : ; '
« Le 30 avril dernier, le. tribunal supérieur
îtlc Mayence a condamné le rédacteur de la Main-
zcrabmd-Post-Zriiung (journal du soir à Maven-
ce), le peintre Muller, pour avoir publié un article
sur le coup d'Etat du 2 décembre, à quatre semai
nes d'emprisonnement et 25 floiins d'amende. Le
tribunal a vu dans cet article une provocation à
l'assassinat. L'imprimeur du journal a été con
damné à deus mois de prison et à 80 fr. d'amend'e.
Les deux condamnés se sont pourvus en cassation,
mais le pourvoi a été rejeté. »
.Voici maintenant ce qu'insère le Moni
teur belQ'-. dans son numéro d'hier :
« La convention conclue avec la France le 13
décembre 1843, a pris fin le 9 août 1852. A partir
On lit dans la partie officielle du Moniteur
haïtien, en date du 29 mai 1852 :
Le Conslitutiunnel du 3 février contient un avis
extrait des journaux de Berleaux et ainsi conçu :
« Il résulte d'une communication que M. le minis-
» tre des affaires étrangères vient de me transmettre.
» que le gérant du consuht-général de France, au
» t'ort-au'-Prince, a été invité par &1, le ministre des
» relations extérieures d'Haïti, à prévenir les arma-
» teurs et capitaines de navires français que les ci-
» toyens haïtiens, quels q 'ils soient, ne pouiront plus
» rentrer da^es leur patrie qu'en vertu d'une autorisa-
» tion émanant de l'empereur lui-même.
n Je vou-i prie de porter cet avis à la connaissante
» du commerce de vot e arrondissement, afin que
«■les capitaines des bâUmens en îk-stination Puif
» Haïti, puissent, avant de. recevoir à leur bord des
» citoyens haïtiens, s'assut-er que ceux-ci se sont
» munis de l'autorisat on exigée. »
À différentes reprise?, des Haïtiens exilés ont
tenté de rompre leur ban, et'ont pris passage à
bord d; bât.mens étrangers en destination pour
Hiti. ,
Les«diflicuités soulevées à cette occasion, se sont
trop souvent renouvelles"pour qu'il ne fût pas né—
jces-.drc d'y mettre un terme.
L'avis précédent contient dor.c la mesure qu'a
prise, à cet égar 1, le gouvernement de S.M. Use
rait trop rigoureux de l'étendre à tous les Haïtiens
quels qu'ils soient ; elle ne doit concerner q ie ceux
auxquels l'entr.-.e du pn\-; est interdite, et ces der
niers sont tous tous le coup de jugemens portant
condamnation contre eux, ou de l'an été de S. il.
en date_du 27 juin 1818.
Le, ministre des relations extérieures,
L. VVFUÈSE.
L'avenis-ement suivant a été adressé au
Journal de Bcziet s :
« Nous, préfet de l'Hérault , Cheva.ier de la Lé-
gion-d'Honneur, vu les arlicits i') et 32 du décret
du 17 févr er 1852 sur ta presse ; v-i le nu i éro 32
du Joum :id" téziers, eu dite du 6 août, conte
nant u i. aitick signé E. Millet, et intitulé : Col ti
ge communal ;
» Considérant que, dans cet article et à l'occa
sion d'une délibération prise par le lOHseil mu
nicipal de Bézi nal s'est permis de supposèr que le débat oc
casions par cette délibération , a été em
preint d'irritation et de peu de bonne foi", que,
selm loi, des eombfctiiïaûs savantes, des calculs,
fUiYcs de lont/nes méMtntions, avaient, échoué cen
tre l'altitude ferme et rési lue .de. la majorité ;
qu'enfin il n'a pas craint'de signaler la participa
tion du chffde l'auturiié municipale à la lutte cdn~
tre ce même eolléqe, que le préfet recommandait
naguère si vivement à sa loliicilwle; '
»Con-id rant que le sieur Millet s'est ainsi
rendu l'organe d'iusinuaiions malveillantes contre
une partie du conseil* municipal ' t contre 'e chef
d'administration de- la ville de Béziers ; qu'il s'e.-t
plu a supposer un antagonisme entre ce magis
trat 11 les représentans de l'airo ité supérieure
dans le département ; qu'il a ainsi eveédé les bor
nes de la m«dcr»tioii et e-t d'autant (dus rrf t réhen îble, qu'il lui avait été
communique de la sous-pr. fecture un compta-
rendu officiel de la délibération du conseil muni
cipal, compte-rendu qui a été inséré le mètnejour
dans les autres journaux de Beziers, tandis que le
sieur Millet a«cru devoir l'ajourner a un prochain
numéro;
» .Considérant que déjà le sieur Mil et s'étaitfdt
remarquer par une polémi que ouvertement mal
veillante à i'égard du maire de Beziers, et qu il lui
avait été adressé, en notre nom, un averti-sement
officieux, dont il n'a tenu aucun compta ; arrêtons:
» Art. 1 er . Aux termes de I article 22 du décret
organique sur la presse, un premier avertissement
est donné au Journal de Résjers, en la per-onne
du sieur J2. Millet, propriétaire-gérant dudiljour-
naf. .
» Art. 2. Le présent arrêté sera textuellement
inséré en tète du prochain numéro du Journal' de
Biiziers.
■ » Art. 3. Ampliation en sera adressée à M. l,e
sous-préfet de Béziers, chargé d'en assurer l'exé
cution. ■ "
«Fait et arrêté err-Phô'.el de la préfecture à
Montpellier, le 7 août 1852.
» a. durand saint-amand. »
Nous avons des nouvelles d'Alger du 5
août :
Le3 événemens accomplis;dans la province de
Con* tantiiie, depuis le 20 juill -t, se.b'ornesst à la
continuation des chàtimeris sévères infi gés aux
Beni-Salah par la colonne du colonel de Tourville.
Les troupes sous ses ordres sont rentrées a Bone
le 1 er août. Le Magellan est parti 1« 2 pour com
mencer les transports qui vont rendre successive
ment à leur destination le t" bataillon dt? chas
seurs à pied, le 68" de ligne, le 12° et le 8°-
M. le général de Mac-Mahon s'ei-t dirige, sur
Constantiue, en formant une deuxième colonne
sous lès ordres du général d'Àutema're. adn de
battre p'us de terrain dans son retour. Il était, le
30 juillet, à Tiffech.
Les communes de la banlieue de Paris semblant?
rivaliser de zèle pour la construction de nouveau?'
édifices publics. Ayant-hier encore, la pose de la
prem ère pierre d'une mairie, de deux écoles et de
ailes d'asile réunissait une grande partie de la
population d'Issy. M. le préfet de la Seine, qui
avait été in\ité à présider celte cérémonie, s'y est
fait représenter pai M. Charl s Meiruau, sccrétaire-
geriéral de laprtfeciurc, qu'assistaitM. ie sous-pré
fet de Sceaux, et qu'entouraient des menubresducon-
seil-g né al du département, du conseil d'arrondis-
séme 111, et plutkurs au»rcs foftci ioni latres. Les auto
rités ont été r( çues par le maire et le conseil muni-
cipal, qui compte parmi ses membres M. Foui llé Lé-
[teiletier. député de Paris au Corps Législatif. Ac
compagnées par le cler gé < t escortées par la garde
nationale, tout entière socs les armes, elles se sont
rendues sur le lieu de la cérémonie, où te trouvait
déjà toute la population de la commune. /
M. le curé d'issy a pris le premier la parole, et
dans une allocution simple et touchante, il a fait
ressortir l'influence de'a mairie, deTécole et de .
l'église sur la vie entière de 1 homme, dont elles
renferment e. sauvegardent les intérêts divers.
M. Merruau, secrétaire-général de la préfecture, a
ensuite pris la parole en ces termes :
« Messieurs,
» Des cérémonies semblables à celle -qui nous
réunit en ce moment, se sont depuis quelque temps
multipliées d.ms le département de la Seine. Les
communes qu'il lenfrrmo semblent, à 1 exemple de
Paris, lutter de saciifices et de créations utiles. Par
tout on fjnde on achève, ou répare, ou îni.ugure des
c alices municipaux. Ce travail, dislnbué sur tous
les points de'noire lerr toire, cette activité féconds,
dirigée ver» les intérêts véritables et pacifiques, vous
savez, Messieurs, par votre ç/opre expérience, quel
les en sont les sources en même temps que les avan
tages.
» La force et la stabilité du pouvoir nous donnai t
le goût et le loisir de nous, occuper des affaires qui
FEU.i LtT3N DU CONSTITUTIONNEL, 12 AOUT.
GRIMÛD DE L'A REYMÈRE.
m.
LE VER SOLITAIRE,
!•?■ Les déjeûcers philosophiques de Grimod
de la Reynière avaient lieu deux fois par
semaine, le mercredi et le samedi; pour
peu que l'on connût l'amphitryon, on
avait le droit de s'y présénter, et même,
dès qu'on y avait été admis une fois, ou
pouvait amener un compagnon. A votre
arrivée, un introducteur s'emparait de votre
épée, de votre canne, de votre chapeau, de
votre croix de Saint-Louis ; puis il levait
une énorme barre.de fer qui scellait la porte
de la salle à manger. Cette barre de fer était
ensuite soigneusement remise, ce qui annon
çait qu'on ne serait pas libre de sortir à son
gré. Au milieu de la salle du festin, uue
table d'acajou était entourée -de sièges tous
égaux, sauf un seul plus élevé pour le pré-,
sideut, à la manière des clubs anglais. On
renouvelait ce président à chaque déjeûner.
Du reste, les règlemeus, tracés sur le mur en
lettres d'or, se présenfàient aux yeux des con
vives. qui avaient tout le loisir de s'en pé
nétrer eu attendant l'arrivée du maître.
Grimod de la Reynière ue sortait de son
cabinet qu'à midi un quart, accompagné
d'un petit bonhomme qui lui servait de
jockey et de clerc. Aidé de ce clerc, il ap
portait une pyramide de tartines de beurre,
qu'il posait sur la table. D'autres valets sui
vaient, avec deux brocs, l'un de café, l'autre
de lait. Il fallait boire vingt deux tasses de
café, au maximum, ou dix-huit, au mini
mum. Celui qui le premier avait avalé les
vingt-deuxtass.es, était élu président, et pre
nait place sur le fauteuil élevé. Les deux
brocs taris et les tarlinesépuisées, il arrivait
un aloyau de l'espèce la plus forte, auquel on
faisait faire solennellement trois fois le tour
de la table ; et le repas s'achevait à fond avec
ce mets substantiel, mais unique.
On causait ensuite littérature, on disser
tait sur ies livres nouveaux et l'on ne se sé
parait qu'après avoir épuisé la matière. Gri-
mod ue trouvait point mauvais que l'on cri
tiquât ses propres productions; il recevait
saus humeur les conseils qu'on lui dormait,
mais il ne les suivait pas. Ce fut là toujours
le trait la plus distinctif de son caractère.
Très expansif et très cordial da.is ses rap
ports d'amitié, il avait lafiîtuitede vouloir se
conduire seul, et nulle inflaentv. pas môme
celle des femmes, ne pouvait détuuru dé ses résolutions. Toute sa vie, il n'en fit
qu'à sa tête, pour employer une phrase du lan
gage populaire; comme chez toits les entêtés,
sa volouté ne faisait que s'affermir au choc
des obstacles. Entêté de bonne compagnie
d'ailleurs, officieux, discret, enjoué, ayant
mérité le surnom de l'homme le plus poli du
royaume, nous pouvons dire de lui, en re
tournant une comparaison célèbre, que c'é
tait uue lige de fer peinte en roseau. On voit
que son despotisme éclatait surtout à table;
il fallait manger comme lui, boire commé
lui, et ne s'en aller qu'aux heures où il vou-
lait bien vous laisser partir. La llnpe qui,
d'après ce qu'en raconte Chateaubriand dans'
'ses Mémoires, ne trouvait aucun mets à son
goût, el se faisait faire une omelette dans
les grandes maisons où on le priait iiîw-r,
La Harpe, aurait été mal venu chez Grimod
de la Reynière, pour peu qu'il n'aimât pas
l'aloyau.
Jamais Grimod ne. se départit de cette
rigueur étrange. C'était lui être l'ort agréa-
ble que de lui amener un nouveau convive,
mais dans ce cas il fallait répondre du con
vive que l'on amenait. — P eut-il-boire mi
tant que vous savez? demandait il à l'intro
ducteur; s'il s'arrcte en chemin, vous, mon
ami, vous boirez double ; s'il ne mange pas
comme je l'enti-nds ,'Vous, Monsieur, vous
mangerez pour deux (1).
(1) Parmi ces gourmands impérieux dont 1-s
noms peuvent s'ajouter à ceux de La ll 'r ,)C et de
Grimod de la Reynière, mentionnons le poète co
mique Barthe, l'auteur des Fams'-s. infidélités.
Barihe n'était pas p jur lieo de Marseille. 11 avait
un c » racler e épouvamablement irasciUe, en môme
temps que très ptr.-oiinel ; néanmoins on le re
cherchait pour ses saillies. Son habitude était de
minger de tous les plats d'une table; mais comme
il avait la vue ba^e et qu'il craignait toujours
d'en laisser échapper quelques-uns, il se retour
nait à chique instant vers son domesùq ie cl lui
dbmtndftii avec un çrand sérieux : — Ai-je mangé
de o'ci? ai-je mange de cela?
Grimod de la tteynière, chfz qui il allait quel
quefois nous a cons r.vé queUfùes-uir .'s de ses
hjûPa'tlBS. Eu plus extraordinaire est san£ contredit
Hors de table, il était tout au service et à
la discrétion des gens ; il mettait à obliger
ses amis cette verve dont l'héritage s'est dis
persé avec les hommes du JtVlll 8 siècle.
Venait-on lui demander son intervention
d.ms quelque affaire délicate : — Ah I mon
cher, que je vous sais gré de vous adresser
à moi ! Vite, ma canne, nron chapeau! ne,
remettons rien au lendemain, et dit "S -moi
où il faut que nous nous,rendions présente
ment. — Peu s'en fallait qu'il ne plaçât la
reconnaissance de son côté, tant était prodi
gieux le mouvement qu'il se donnait-Il em
ploya de la sorte sa médiation et son crédita
'faire rouvrir la porte du Théâtre-Français à
Collin d'Harleville qui se l'était fermée par
un excès de suscept bilité, et ce fut à lui que
l'Inconstant dut sa représentation et son
succès. Mais après fout, puisque cette anec
dote rst amusante et qu'elle ajoute un trait
de plus aux mœurs d'un temps dont nous
avons désiré écrire un coin de l'histoire lit
téraire, nous n'avons aucun motif pour ne
point la raconter; elfe set vira peut-êtred'en-
scigrçemerit à quelijuc.s jetan s auteurs eif
leur apprenant par quelles épreuves ont pas
sé 1rs plus distingués d'inlre eux.
D.ms un de s:s accès d'humeur, Collin
d'Harleville avait retiré sa pièce de l'Incons-
celle que nous allons rac>r.l«r.
Barthe était alors au régime, ce qui ne l'empê
chait pas de dîner ci vil! •. Invité '1a-s une gran
de maison, il y arrive nif les tro ; s heures ; mais,
av^nt de monter au s don, i'. entre dan^ la cui.-i-.ie,
et, s'adres>ant au chef : — Jîon-ieur, Lu-dit-il,
«comme je suis an régime, je vous prie rie ni | o nt
saler la soupe. L-' cuisinier se i\tourne, r- g irde
avec beaucoup d etonnciiien: l'hoiMin qui lui fait
une pareille demande, et n'y répond que par une
indiiiaison assiz embrrai^ee, que Barlh-: prend
pour une adhésion. Cependant un se met à iiide,
on sert à notre poète du potnge. De-, la première
cuillerée, il s'aperçoit que, l in d'avoir fuit droit à
sa requête, le cuisinier y a prodigue les as atson-
nnn ns. Putieux, il se lève, prend son chapeau et
sort ; il entre "dans la cuisine, s'approche du chef
es, sans lui dire un seul mot, lui applique la plut
vigoureuse paire de fouftîets q-.ii jamais ait nicn-
ti ; puis, il sort tranquillement de la mai-o.i pour
aller chercher ailleurs un dîner lirons éoice.
« Sun intérieur était teinble, dit Grimod de la
Reyrôère, «t nous n'avons jamais,connu d'homme
qui méritât mieux que lui le nom de tyran dorn>s-
litjW,; sa veuve et ses valets fuurfliraient là-i'cs-
sus de très bons mémoires. 11 a lini par mourir,
en 1786, des suires d'un accès de cofore enté sur
une indigestion}» ^
tant, jouée seulement à la cour, et s'était
brouillé avec presque tous les acteurs de la
Comédie-Française. Dégoûté de ses premiers
déLoiivs, il avait résolu de renoncer à la
carrière draouilique, et, depuis deux aus, il
vivait relire à lu campagne. Ce fut là que
Grimod de la Reynière allalevoiret parvint,
non sans peine, â ébranler sa>résolution ; il
obtint de lui que sa pièce, corrigée et revue
avec soin, serait lu-i a Molé, et qu'à la suite
de cette démarche un rapprochement avec
le théâtre serait, tenté par le célèbre co
médien. Rendez-vous fut pris chez ce
lui-ci , qui indiqua lui-même le jour, el
l'heure. Grimod de la Reynière et Collin
d'Harleville furent on ne peut plus exacts ;
mais il n'en, fut pas ainsi de Molé qui, de
puis long-temps, ayant mis dans sa vie pri
vée l impcrtuieuce de ses rôles, n'arriva qu'à
l'heure du dîner, et ne s'excusa qu'à demi.
— B ih ! dit-il/notrelehturésera pour une
autre lois ; en attendant allons manger des
huîtres, cela vaui)a bi/ft, la pièce du poète
Col-in.
Nous aimons à supposer que ce mot, assez
h.'i^ôr ié, fat prononce par ï'iuiaiit ib'e petit-
nKitire sur re tem de légèreté et de baduiage
qui éxcitSB'loul. Néanmoins Collin d'Harle
ville devint violet de colère, et Grimod fut
obligé de lui comprimer fortement le aras
pour l'empêeh(;r d'éclater. On se mit à ta
ble, et l'on pense que le poêle Collin ne fut
pas celui qui nian^ a avec le pins d appétit.
Unj&coud rendez voli S fut cupeud.i -i co;i-
V 'ù'f p.;.ur la semaine suivaille.; comme la
première fow, il fut fixé à une heure, et,
comme la première l'ois, Molé n'arriva qu'à
trois heures. Vilihrs, qui a iapp<.rté l'aven
ture dan-: tes Souceni> s, ajoute que l'acteur
csp.'ija de tiouvenu de pcsifiler le pocte tn
passant dins la sfil e à ni mg. r; mais alors,
Colin d'iltrlêville, profondément blessé,
voulut quitter la p trtie. Grimod de la R:y-
niere vint encore au secours de son amour'
propre : il prit en particulier Molé, lui fil
sentir l'iie o-ivenanee de son procédé, fit lui
demanda un dernier re;;dez-\ous sur lequel
oti pût eotnider.
— Que voulez-vous? s'écria le comédien à
pirouettes ; je vous-en donner,us dix à la.
mSuio heure que j'y serais aussi peu fiiàle.
— Explique z-voils»
— Vous connaissez Yobjet divin qui m'oc-
cupé, vous savez combien j'en suis épris;
jugez s'il est une pièce qui vaille deux heu
res passées à la toilette de Mademoiselle "* !
Si vous ne me prenez pas aii saut du lit, ja
mais je n'entendrai l'Inconstant.
— Qu'à cela ne tienne! répliqua Grimod
de la Reynière.
Effèi ticernent, il revint deux jours après
au lever de Molé, qui écouta la pièce pen
dant qu'on lui me tt'ait des papillotes ; mais
cette fuis les choses sè passèrent différem
ment, et Molè se montra tellement enchante
de 'l'Inconstant, qu'il répara tousses torls en
mettant autant de chaleur à le faire recevoir
qu'il avait mis d'indifférence à l'entendre.
C'était par de pareils offices que Grimod
de la Reynière se rapprochait les cœurs que
ses bizarreries auraient pu lui éloigner; il
avait ainsi deuxcaractères et par conséquent
deux réputations.
Sa mauvaise étoile, dont on ne peut nier
l'influence en matière de galanterie, le porta
sur ces entrefaites à afficher un attachement
scandaleux, qui irrita de nouveau sa famille
contre lui. Il faut déplorer ces aberrations
dans un homme de si bonne compagnie, et
regretter que le ciel lui eût donné un cœur
si étourdiment sensible. C'est une chose,
dont nous n'avons jamais bien pu nous ren
dre compte : tant u'appèiit et tant d'amôui l
Faire un dieu de son ventre et se soum-Ure
en esclave aux genoux d'une lemrre? D'or
dinaire, l'une de ces facultés exclut entiè
rement l'autre ou finit par l'absorber; mais,
chez Grimod de la Reynière, elles ne cessè
rent jamais d'avoir ensemble leur coors ré-
gu'ier, et, comme deux lignes pamilè'es,
elks se continuèrent ju-qu'à la fin de s>s
jours, sans s'être rencontrées uu seul ins
tant.
Û ie irnlheureuse aventure, dont les dé
tails se trouvent consignés dan- le tome II de
la Chronique ScamdaLvse, vint ajouter encore,
mais d'une façon rrgrettal.de, à sa ivno-omée.
Uu soir qu'il se trouvait au parterre de l'Opé
ra, à 1 une des représentations d'Armide, il
se sentit extièmement pressé par la fouie.
— Qui est-ce donc qui pousse de cette ma
nière? s'écria-t : il; c'est tans doute quelque
garçon perruquier.
— C'est moi qui pousse, lui répondit aussi
tôt un militaire; dis-uni ton adressa, j'irai
demam te donner un coup de peigne. Ce mi
litaire était lui même le iîlsd'uit fermier-
général, M. de C?ize.
■l.o lendemain, les deux adversaires se
joignirent, et, s'étaat rendus aux Champs-
Elysées, ils se battirent au pistolet, : en plein
jour, devant trois mille personnes. Cet acte
incroyable d'originalités d'audace, un des
plus extraordinaires-du cette extraordinaire
époque, eût un triste résultat. Le pistolet de
Grimod creva 1 œil et laboura la tète de l'in
fortuné militaire, qui expira quelques heu 8 »
res après.
Ou aura remirq lé la singfllmté d'un duel
au pistolet au XVtll e siéile. Il est vrai que
MM. de Gaze et de la Reynière étaient les re
jetons de deux financiers. C dte affaire fit un
bruit énorme, et acheva de répandre le no ai
du jeune avocat. L'été suivant, il fut chau-
sonné, en compagnie de Mesmer, d-; Fran
klin etde Delille,'dan3 quelques couplets qui
coururent les rues :
. Diogène moderne,
• Un Km q:>e chacun berne
Croit tenir la lanterne
Et tranche du Caton ;
Contre la raillerie . , .•••> "
Si cervelle aguerrie . ' j
Al'lichc la folie,- j
lit p'è dic la raison.
Charig. z-nioi cette têta,
Cette grirnau le tèt-%
.Chinirez-moi cette xète.-
Téte de h aisson.
Ce dernier vers faisait allusion à la c6iffiî
re élevée qu'nlfectionaait particulièrement
Grimod de la Reynière.
Malgré Thotqkur que -voulaient bien lui
f tii-e h s ehan-onriiers, son bagage littéraire
était i n''o-edi-.> plus modestes, car,en dehors
de ses arti:!es de journaux, il n'avait publié
qu'un mui 'e 'Vidiuiie 'ay tut pour titre : Ré
flexions ph'loun célibataire , en ressouvenir de si s mal
heurs d'amour. 11 est vrai que cet ouvrage
avait obtenu quelque vogue, grâce au
bruit nue l'auteur faisait d ms le moule,
que troi> éditions in avof iit élé imprimées
en di\ moi- ; que les g ;Z'dt-s en avaient par
lé, ete. ; il n'eu fallait pas davantage pour
bu dernier ra"g m l'amasse, à lui surtout,
homme de i icliesse et dj noblesse. Les fie-
p xio'is sur le plaisir , que cous avons tâ
che de relire, ont pii èire très goûté,s
à leur date; la mode était alors à ces es
pèces de dissertations morales; mais quoi-
qu'ui faismt Ha part à d'ingénieux para
doxes, à des printures plus vraies qu'amu
santes, à uu style de bonne société et aussi
couinât que peuvent-le désirer les lecteurs
P2UX BB t'ABOHHESSEKT
mis....... 18 f. PAU TKIHE8TEIJ
KÉPÀHTEMENS. 1® F. —
BN NUMÉRO : *0 CEHTOUM.'
POUR LES PATS ÉTRANGERS SA ropOrtM
au tableau qui sera publié dons le Journal^
es 10 et 25 de chaque moisi
\Les tiityaummt datent dti i® ti U
dt chaqut moi'i
: iHéjàè W*Um* (SPalala-Moy&l),^,; A®i
C 1S52.-JEUD1 12 AOUT.
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
S'adresser, franco, pour .la rédaction, à M. C ichkvax -C ulhigny, rédacteur in chef.
Les articles déposés ne sont pas rendus.
On $'abi.nne } <&.»; le* dépirtemns^ aux .Messageries et aux Directions de poste.—A Londres, chez MM.' G owie et ïils
. . —A Strasbourg y chez M. A lexandre, pour l'Allemagne. ; ■ '
S'adresser, franco, pour l'administration, à M.jDENAlN, directeur^
l/ss annonces *act segiies au bureau d« jc-Tinaai; « chas M. PAWs, regismstu, 10, place
PARIS, 11 AOUT.
Nous avons annoncé que les conférences
ouvertes entre la France et la Belgique
n'ayant abouti ni à la conclusion d'un traité
définitif, ni à la prolongation de là convention
du 13 décembre 4845, les rapports eommer-
cinus. des deux pays se trouvaient, à partir
du 10 août, replacés sous l'empire du tarif
général. Les négociations poursuivent néan
moins leur cours, et tout porte à croire que,
lorsque le cabinet belge sera reconstitué, on
arrivera facilement à une conclusion.
Il u'est donc pas inutile de remonter à
l'origine de la convention du 13 décembre
1845 ét d'en examiner les résultats. C'est
une étude qui n'a pas seulement une Impor
tance rétrospective. Ne doit-elle pès, en effet,
servir de base à la nouvelle convention qui
pourra intervenir?
Le traité primitif conclu entre la France et
la Belgique, date de 1842. Il fut motivé par la
grande révolution que la décou verte de la fi
lature mécanique du lin occasiona dans l'in
dustrie linière. L'Angleterre, qui deman
dait autrefois des«ftls délia à la,France,nous
"enexpédiait par masses. Dans une telle situa
tion, il fallait nous défendr#, sous peine de
laisser périr cette industrie.Minière.que nous
exercions de temps immémorial. Le droit à
l'entrée fut d'abord porté à 10 0/0. Mais
à peine la loi de 1841 , qui avait sanc
tionné ce tarif, était-elle promulguée, que
l'accroissement continu jîes importations
en faisait ïpconnaltre l'insuffisance. Le droit
fut, en conséquence, élevé à environ 20
0/0 par une ordonnance du 26 juin 1842,
légalisée quelques années après. C'est seu
lement à partir de cette époque. que no
tre industrie, protégée d'une manière con
venable, put prospérer et doter définitive
ment la France de la filature mécanique
du lin. Nouvelle preuve, pour le dire en
passant, de l'efficacité d u système protecteur.
Mais alors intervint la Belgique, qui
nous fournissait des toiles depuis long
temps. Esle objecta que lenouveau tarif était
surtout dirigé contre les produits^anglais, et
elle récLma un droit différentiel. On entra
en pourparlers. La France se'montra dispo
sée à faire des concessions sur le droit des
■ fils et des toiles de lin, à la condition que la
Belgique accorderait en retour un traitement
de faveur à quelques-uns de nos produits.
De là la convention du 16 juillet 1842,.qui a
précédé celle du 13 décembre .1845,.y-'
Voici quelles étaient les bases de Ta con
vention du 16 juillet 1842, cop'clue pour,
quatre années. Nous consentions à laisser
entrer les fils et les toiles btlges sousl'em"-
pire du tarif de 1841; c'ésatf un avantage d&
50 0/0 que nous leur a.'cofdionssur les fils
et les toiles de l'Angleterre ; les produits
belges n'acquittaient qu'un droit de 10 0/0
de la valeur, tandis que les produits auglais
fttairi ni.snmn.i s à imd«wt »4e 20 O/O.-Eu-eOta-
pensation, la Belgique nous concédait uue
diminution de droit sur nos soieries et sur
nos vins, et un déchet plus considérable sur
nos sels. Mais il y avait cette différence, que
nous nous interdisions d'étendre à aucun
autre pays les faveurs que nous accordions
à la Belgique, tandis que la Belgique restait
libre d'étendre à d'autres Etats celles qu'elle
nous accordait.
■ La convention du 16 juillet! 842 rie fut
discutée par uoschambre» législatives qu'eu
184o. Elle tut alors assez vivement aitapiée.
On allégua que nous avions donné à la Bel
gique beaucoup plus qu'elle ne nous avait
rendu. Le droit de faveur 'accordé à ses fils
et à ses toiles, avait été un bienfait pour
elle dans l'état de misère où se trou
vaient les .Flandres. Les .avantages qu'el
le avait faits à nos soieries et à nos vins,
ne nous avaient, au conlraire, que très
p
verein les dispositions qu'elle nous avait
accordées. Enliu, on fit également entendre
des réclamations contre les augmentations de
droit dont elle venait de frapper nos fils de
laine, nos tissus de laine légers,, nos articles
de mode et nos articles de vêtement.
, Ces attaques, qui avaient été appuyées par
le rapporteur"à la chambre des dénotés, fu
rent assez graves pour amener M. Guizot à
la tribune. M. Guizot reconnut" qu'en effet
nous n'avions pas obtenu autant que nous
avions concède; mais il fit surtout valoir
les raisons politiques qui avaient déterminé
le gouvernement. « Il n'y a personne, dit-
il, qui ne sache de quelle importance a été
pour nous la substitution de l'Etat belge
à l'Etat qui existait sur notre frontière avant.
1830. Il n'y a personne qui ne sache que l'E
tat antérieur avait été ihstitué contre nous ;
et que l'Etat belge a été institué à notre pro
fit; que, par le principe rie neutralité, re-
couuu et appliqué à l'Etat belge, imtre fron
tière a acquis une sécurité qu'elle Savait pas
auparavant. On peut dire que notre frontiè
re a été en quelque sorte moralement recu
lée jusqu'à l'Escaut. » Et, comme on se ré
criait contre celte expression que l'on trouvait
exagérée, M. Guizot ajoutait : « Pensez à l'a
vantage d'avoir de ce côté un gouvernement
qui, non seulement n'a jamais clierchéà nuus
susciter aucun embarras, mais qui, au con
traire, est constamment engagé envers nous
dans des rapports de bienveillance et de bon
ne intelligence politique. » M. Guizot rendait
cet hommage à la sagesse et à l'habileté du
roi Léopold, -qu'il avait compris que son
royaume devait surtout s'adosser à la Fran
ce, et qu'il avait toujours suivi fidèlement
cette politique avantageuse aux deux Etats.
On. conçoit que de semblables considéra
tions étaient de nature à agir sur la chambre.
M. Guizot avait déclaré d'ailleurs que, quand
la convention expirerait, nous aurions le
droit de demander à la Belgique des avan
tages plus étendus que ceux qu'elles nous
avait accordés. Le traitement de faveur con
cédé aux fi's et aux toiles belges fut donc
voté; mais il fut. voté seulement jusqu'au
mois de juillet 1846, c'est-à-dire jusqu'à
l'espiration'du délai assigné à la convention.
Cette discussion eut pour résultat de faire
rouvrir presque immédiatement des négo
ciations entre les deux gouvernemens afin
d'examiner les conditions de renouvellement
du traité qui n'avait plus que moins d'une
année à courir. Le maintien du droit diffé
rentiel accordéaux filsetaux toilesbelges était
de la plus haute importance pour nos voi
sins. La misère avait fait Ifs progrès les plus
déplorabhs dans li s Flandres. La charité
pubûque était à'bout de ressources; la
population ■était déernée , et le nombre
des décès déparait cîlui des naissances.
La Belgique obtint la conservation du
traitement de faveur pour son industrie
linière; toutefois, on créa uuê catégorie
nouvelle pour les fils fins dt plu di tiente-
six mille mètres au kilogtanime : on fixa
un maximum pour les q au lies qui leur
raient être importées aux droits réduits ; on
retira l'engagement qui avait ete pris de ne
pas-toucher au tarif général, ce qui, du"
reste, n'avait d'imponmce q o uns'le
point de vue des principes. La Belgique
obtint, en outre, quelques avantages pour
ses machines et pour ses ardoises. Quelles
concessions nous fit-elle ep retour? Elle
maintint la diminution de* droits sur nos
vins et nûs soieries, diminution dont jouis
saient d'ailleurs les Etats du Zollverein.
Elfe porta de 7 à 12 0/0 le 'déchet accordé
à nos sels. Elle retira les augmentations
ade droits dont elle avait frappé, en 1838, nos
tissus de coton, et, en -1844, nos fils et tissus
de laine, nos articles de mode et nos articles
d'habillement. Le traité fut conclu pouf six
ans.
Recherchons maintenant quelles ont été
les conséquences de cette convention Le trai
té du 15 décembre 1845 n'ayant été, en
grande partie, pour ce qui concerne les pro
duits liniers, que Ja-reproiuclion des avan
tages faits à la, Belgique par le traité de 1842,
c'est à cette dernière époque qu'il con
vient de remonter pour se rendre compte
des résultats de la laveur accordée à nos
voisins. Nous ne recevions, en 1842, que
500,000 kilogr. de fils belges ; cette quantité
s'est successivement accrue au i point d'at
teindre 2,300,000 kilogr. .eu 1815; mais, de<
•puisée moment elle a commencé à décroître,,
et elle est revenue en 1831 à un chiffre qui
différé peu de celui de 1842. L'importation
des toiies, de son côté, a subi une progres
sion régulièrement déci ois>ante, et elle est
arrivée à n'être plus que le tiers de ce qu'elle
était avant 1842. Quant à nos vins, à nos soie
ries, à nos tils et tissus de laine, leur expor
tation en Belgique s'est accrue, mais non
pas cependant dans une proportion qui per
mette de l'attribuer uniquement al influence
du traité.
Il semblerait résulter de la que la Belgi
que n'aurait, pis plus que la France, un
grand intérêt au renouv. llem^nt du ti a» té.
Mais on se tromperait en tirant cette conclu-
siondes chiffres précédons. Les faveurs ac
cordées à l'industrie balge n'ont pas em
pêché, il est vrai, ses importations de toiles
en France; de décroître: mais elle j trouve
euçore un deboucue de plusieurs millions,
et, bien que la situation des Flandres se soit
singulièri ment nue îuree depuis 1843, il
n'est pas douteux que le retrait des avan-
tagesdont 11 s eia ent en possession aurait les
conséquences les plus lâcheuses pour une
contrée qui vient a psine d'échapper â une
crise terrible. En effet, notre industrie, grâ
ce à une législation sagement protectrice, a
marché eh avant,,et si les fdbricans belges
cessaient d'être favorisés par, un tarif excep
tionnel, elle s'emparerait de la place qu'ils
occupent sur noire marché. . Les Flandres
perdraient donc le débouché qu'elles trou
vent encore en France, et seraient exposées
à de nouveaux désastres.
Il importe, d'ailleurs, de remarquer que
.tous les avantages fûts par la France à la
production belge, ne sont pas inscrits dans
le traité de 1843. Nous accueillons ses fon
tes au droit de 4 fr. le quintal, tandis que
nous demandons 7 fr. aux foutes anglaises.
Nous recevons ses houilles au droit de 15
centimes, tandis que nous faisons payer
50 centimes aux houilles de la Grande-
Bretsgue. Or, il faut savoir que les impor
tations des houilles belges figurent, dans
les états publiés par, l'administration des
douanes, pour près de 50 millions de francs.
On dira sans douta que ces tarifs diffé
rentiels ont été principalement établis en
vue de nos propres intérêts. A la bonne
heure; mais il n'en est pas moins incontes
table que les Belges en profitent de leur côté;
ils uoivent même savoir que le commerce
rouennais se sert surtout de cet argument,
pour réclamer la suppression des zones dans
des méinoiivs que, pour noire part, nous
avons combattus plus d'une fois.
Nous croyons donc notre gouvernement
fondé â dem tnler des coacassions nouvelles
à la Belgique. La chambre de commerce de
Lille, a signalé deux abus dont il con
viendrait de prévenir le retour : d'une
"part, 1 introdUctioB, au droit de l'ecrii, de
toiles, fabriquées avec di s fils qui ont subi
un certain degré de blanchiment, et, d'autre
part, les moyens employés pour fausser les
résultats de l'instrument qui sert à apprécier
le degré d^fuiesse du tissu, et par conséquent
sa valeur. Nous devons également réclamer
des dispositions indispensables pour relever
notre commerce des sels, qui a subi une
décroissance depuis les dernières mesur. s
prises en Belgique'. Enfin, il y a nécessité
de mettre un terme à l'industrie frauduleuse
de la contrefaçon, en accordant à l'importa
tion des livres belges une réduction de droit
compatible avec les intérêts de nos libraires-
éditeurs.
Si nous sommes bien informés, les négo
ciations entamées pour une convention pro- v
visoire auraient échoué, parce que notre
gouvernement voulait que l'abolition de la
contrefaçon y fût posée en principe. lia paru
au cabinet belge que, dans sa position de mi
nistère démissionnai! e, il ne pouvait assu
mer la responsabilité d'un acte aussi im
portant.. S'il en est ainsi, la reconstitution
du cabinet belge sera probab'ement bientôt
suivie de la conclusion d'un traité définitif
j.qui, nouv Tespérons, donnera satisfaction
'VÀ inteicts des deux nations. bi'rat.
v , mi il III mm —
Notre correspondant de Madrid nous écrit
que le. décret du 1 er août, qui ordonne d
transférer aufrésor'pwb'ic les fonds versés à
la banque d i'Saint-Ferdinand par les jeu-
i.-es gens appelé- an sort, etqui se sont exemp
tés du sert ire mitilaire, a été très bien ac
cueilli de toity le monde en Espagne. On dit
que ces foads^'elèvent à lasomme de51 mil-
llms d j réa ux~et on es père q ue d'autres dépôts
d'argent, eparuillés dans diverses^ caisses ou
dt'posés à la même banque, ne tarderont pas
à être tvàus-ferés tiussi au trésor, en recevant
un intérêt de 5 0/0. Cette mesure, qui est
avantageuse pour tout le monde, mettra le
* gouvernement à même de diminuer consi
dérablement sa dette flottante , et fera un
grand bien au crédit de l'Espagne..
Le Dario espagnol, journal de l'opposition
modérée, en parlant de cette mesure, n'ex
prime qu'un seul regret, c'est qu'elle n'ait
p is été prise plus lôt. Il en attend des avan
tages considérables, parce que le crédit du
trésor se trouve aujourd'hui visiblement
amélioré.
Le président du consei], M. Bravo-Muril-
lo, après plu-ieurs jounsdeséjour à Madrid,
est reparti pour la .résidence royale de la
Granja. D'après certains bruits, à ce que
nous assure notre correspondant, M. Bravo-
Mnrillo devait proposer a la reine uue modi-
cationassiz impoitante^daus le miujstqçe.
C-;tle modification prouverait que le,premier
ministre n'a pas été sourd aux conseils qui lui
arrivent de tous les côtés pour le convaincre
delà nécessité de renforcer son ministère en
prenant pour.collègues des hommes aussi
laborieux que lui-même, et qui inspirent au
pays plus de confiance que les médiocrités
cloqt il s'est entouré.
On assurait à Madrid que le marquis de
Miraflores, ministre d'Etat, serait remplacé
par. M. Beltran de Lis, ministre de l'in
térieur,' et que M. Oiivan remplacerait ce
dernier. On annonçait aussi la retraite de
M. Reynoio, ministre des travaux publics,
et du ministre de la,justice; mais on ne dé
signait pas encore leurs succeseurs. Tous ces
cbaiigemens annoncés recevaient le meil
leur accueil de la part du public et étaient
attendus avec impatience, principaiement
la retraite de M. Ileynoso et du marqtns ce
Mirafloràs. L'essai qu'on a fait de M. Reyno-
so, en le chargeant, pour son début, d'un
département aussi important, surtout au
jourd'hui; en Espagne que celui des tra
vaux publics, aétebitin loin de réussir. L'é-
Jan général pour les' chemins de 1er, pour
les canalisations, pour les routes, qui s'est
développé avec tant d'enthousiasme dans la
péninsule, mériterait un meilleur directeur.
Quant à M. de Miraflores, qui n'occupe,
il est vrai, que'ie portefeuitTu des affaires
étranger* Sj, ministère assez lus gnifiant au-
joùm r iiui en Espagne, ou a toujours pen-é
a Madrid que M. Biavo-Murii:o n'avait pas
été heureusement inspire en le choisi.«saut
pour collègue, et que lui-même s'était mé
pu- sur tes vrais intérêts en abandonnant
s s ani'S politique» et la présidence du sénat
pour accepter un poste ministériel.
t. BONIFACB.
du 10, et en attendant le résultat d«s négociations
qiti sa poursuivent à Paris, les droits généraux, du
tmf seront appliqués aux tnarchaudisud comprises
dans cet .acte inUrnatijnal. ».
guis Tindépendance belge ajoute :
« En attendant la signature et la sanction de la
convention aniioncrecnwmelrès prochaine, il n'en
v;i pns moins y sivoie, à partir d'aujourd'hui, une
période de transition pendant liqu<-lie le lygime
antérieur aux t aitrs 'le 18121845 va. rentrer < n
vigueur. Ainsi tes anciens dr. its sur les vin-, les
fils et tissus de lame, le* t 'S appliqués à l'impo'rlati.m de France, et de même
la douane fraiiç.iwe |n reevra pend ..rit qu-l.iui'S ^e
mairies les aiiciens oruits sur les produit- belges
coin pris, dans les conventions de 184i-18t5. »
Le Moniteur publie ce maiin la note sui
vante :
nipotentiaires belucs de conclure un ir..ité de com-
nane d( m ud entii- la Fwnce et la Belgique.
» Le ternie de la convention de iSiSvxpira.nt
la 10, le commerce s'est trouvé de'piein droit re
place îous l'empire du droit commua des tarifs des
deux pays. Néanmoins, les négociations conti
nuent, et l'on iieut espérer qu'elles ubautiroht à
un résultat satislaisant. »
' Le numéro de la Nouvelle Goz' tte de Prusse
(Grzette de la Croix), qui a paru hier, con
tient l'avis suivant, qui porte la signature du
rédacteur en chef :
« Le ;ou-fi.'né a reçu hier l'invitation de se
présenter à la préfecture de pr.lipe ; là, le prési
dent, M. de Unikddey, lui â annoncé qu'il était
chargé, par un rescrit ministériel, d'enjoiudre à la
rédaction de la Nouvelle Gazitte de Prusse. de ces
ser ses attaques haineuses et violentes contre les
puissances ttrangères, et particulièrement contre
le Président de la République,' Louis-Napoléun ;
M. de Hiokeldey a ajouté qu'au cas où la rédac
tion ne tiendrait-pas compte de cet avertissement,
on aurait recours à d'autres mesures.» (D'Beutner.)
On lit dans la Gazette de Cologne du 9
août : ; '
« Le 30 avril dernier, le. tribunal supérieur
îtlc Mayence a condamné le rédacteur de la Main-
zcrabmd-Post-Zriiung (journal du soir à Maven-
ce), le peintre Muller, pour avoir publié un article
sur le coup d'Etat du 2 décembre, à quatre semai
nes d'emprisonnement et 25 floiins d'amende. Le
tribunal a vu dans cet article une provocation à
l'assassinat. L'imprimeur du journal a été con
damné à deus mois de prison et à 80 fr. d'amend'e.
Les deux condamnés se sont pourvus en cassation,
mais le pourvoi a été rejeté. »
.Voici maintenant ce qu'insère le Moni
teur belQ'-. dans son numéro d'hier :
« La convention conclue avec la France le 13
décembre 1843, a pris fin le 9 août 1852. A partir
On lit dans la partie officielle du Moniteur
haïtien, en date du 29 mai 1852 :
Le Conslitutiunnel du 3 février contient un avis
extrait des journaux de Berleaux et ainsi conçu :
« Il résulte d'une communication que M. le minis-
» tre des affaires étrangères vient de me transmettre.
» que le gérant du consuht-général de France, au
» t'ort-au'-Prince, a été invité par &1, le ministre des
» relations extérieures d'Haïti, à prévenir les arma-
» teurs et capitaines de navires français que les ci-
» toyens haïtiens, quels q 'ils soient, ne pouiront plus
» rentrer da^es leur patrie qu'en vertu d'une autorisa-
» tion émanant de l'empereur lui-même.
n Je vou-i prie de porter cet avis à la connaissante
» du commerce de vot e arrondissement, afin que
«■les capitaines des bâUmens en îk-stination Puif
» Haïti, puissent, avant de. recevoir à leur bord des
» citoyens haïtiens, s'assut-er que ceux-ci se sont
» munis de l'autorisat on exigée. »
À différentes reprise?, des Haïtiens exilés ont
tenté de rompre leur ban, et'ont pris passage à
bord d; bât.mens étrangers en destination pour
Hiti. ,
Les«diflicuités soulevées à cette occasion, se sont
trop souvent renouvelles"pour qu'il ne fût pas né—
jces-.drc d'y mettre un terme.
L'avis précédent contient dor.c la mesure qu'a
prise, à cet égar 1, le gouvernement de S.M. Use
rait trop rigoureux de l'étendre à tous les Haïtiens
quels qu'ils soient ; elle ne doit concerner q ie ceux
auxquels l'entr.-.e du pn\-; est interdite, et ces der
niers sont tous tous le coup de jugemens portant
condamnation contre eux, ou de l'an été de S. il.
en date_du 27 juin 1818.
Le, ministre des relations extérieures,
L. VVFUÈSE.
L'avenis-ement suivant a été adressé au
Journal de Bcziet s :
« Nous, préfet de l'Hérault , Cheva.ier de la Lé-
gion-d'Honneur, vu les arlicits i') et 32 du décret
du 17 févr er 1852 sur ta presse ; v-i le nu i éro 32
du Joum :id" téziers, eu dite du 6 août, conte
nant u i. aitick signé E. Millet, et intitulé : Col ti
ge communal ;
» Considérant que, dans cet article et à l'occa
sion d'une délibération prise par le lOHseil mu
nicipal de Bézi
casions par cette délibération , a été em
preint d'irritation et de peu de bonne foi", que,
selm loi, des eombfctiiïaûs savantes, des calculs,
fUiYcs de lont/nes méMtntions, avaient, échoué cen
tre l'altitude ferme et rési lue .de. la majorité ;
qu'enfin il n'a pas craint'de signaler la participa
tion du chffde l'auturiié municipale à la lutte cdn~
tre ce même eolléqe, que le préfet recommandait
naguère si vivement à sa loliicilwle; '
»Con-id rant que le sieur Millet s'est ainsi
rendu l'organe d'iusinuaiions malveillantes contre
une partie du conseil* municipal ' t contre 'e chef
d'administration de- la ville de Béziers ; qu'il s'e.-t
plu a supposer un antagonisme entre ce magis
trat 11 les représentans de l'airo ité supérieure
dans le département ; qu'il a ainsi eveédé les bor
nes de la m«dcr»tioii et e-t d'autant (dus rrf t réhen îble, qu'il lui avait été
communique de la sous-pr. fecture un compta-
rendu officiel de la délibération du conseil muni
cipal, compte-rendu qui a été inséré le mètnejour
dans les autres journaux de Beziers, tandis que le
sieur Millet a«cru devoir l'ajourner a un prochain
numéro;
» .Considérant que déjà le sieur Mil et s'étaitfdt
remarquer par une polémi que ouvertement mal
veillante à i'égard du maire de Beziers, et qu il lui
avait été adressé, en notre nom, un averti-sement
officieux, dont il n'a tenu aucun compta ; arrêtons:
» Art. 1 er . Aux termes de I article 22 du décret
organique sur la presse, un premier avertissement
est donné au Journal de Résjers, en la per-onne
du sieur J2. Millet, propriétaire-gérant dudiljour-
naf. .
» Art. 2. Le présent arrêté sera textuellement
inséré en tète du prochain numéro du Journal' de
Biiziers.
■ » Art. 3. Ampliation en sera adressée à M. l,e
sous-préfet de Béziers, chargé d'en assurer l'exé
cution. ■ "
«Fait et arrêté err-Phô'.el de la préfecture à
Montpellier, le 7 août 1852.
» a. durand saint-amand. »
Nous avons des nouvelles d'Alger du 5
août :
Le3 événemens accomplis;dans la province de
Con* tantiiie, depuis le 20 juill -t, se.b'ornesst à la
continuation des chàtimeris sévères infi gés aux
Beni-Salah par la colonne du colonel de Tourville.
Les troupes sous ses ordres sont rentrées a Bone
le 1 er août. Le Magellan est parti 1« 2 pour com
mencer les transports qui vont rendre successive
ment à leur destination le t" bataillon dt? chas
seurs à pied, le 68" de ligne, le 12° et le 8°-
M. le général de Mac-Mahon s'ei-t dirige, sur
Constantiue, en formant une deuxième colonne
sous lès ordres du général d'Àutema're. adn de
battre p'us de terrain dans son retour. Il était, le
30 juillet, à Tiffech.
Les communes de la banlieue de Paris semblant?
rivaliser de zèle pour la construction de nouveau?'
édifices publics. Ayant-hier encore, la pose de la
prem ère pierre d'une mairie, de deux écoles et de
ailes d'asile réunissait une grande partie de la
population d'Issy. M. le préfet de la Seine, qui
avait été in\ité à présider celte cérémonie, s'y est
fait représenter pai M. Charl s Meiruau, sccrétaire-
geriéral de laprtfeciurc, qu'assistaitM. ie sous-pré
fet de Sceaux, et qu'entouraient des menubresducon-
seil-g né al du département, du conseil d'arrondis-
séme 111, et plutkurs au»rcs foftci ioni latres. Les auto
rités ont été r( çues par le maire et le conseil muni-
cipal, qui compte parmi ses membres M. Foui llé Lé-
[teiletier. député de Paris au Corps Législatif. Ac
compagnées par le cler gé < t escortées par la garde
nationale, tout entière socs les armes, elles se sont
rendues sur le lieu de la cérémonie, où te trouvait
déjà toute la population de la commune. /
M. le curé d'issy a pris le premier la parole, et
dans une allocution simple et touchante, il a fait
ressortir l'influence de'a mairie, deTécole et de .
l'église sur la vie entière de 1 homme, dont elles
renferment e. sauvegardent les intérêts divers.
M. Merruau, secrétaire-général de la préfecture, a
ensuite pris la parole en ces termes :
« Messieurs,
» Des cérémonies semblables à celle -qui nous
réunit en ce moment, se sont depuis quelque temps
multipliées d.ms le département de la Seine. Les
communes qu'il lenfrrmo semblent, à 1 exemple de
Paris, lutter de saciifices et de créations utiles. Par
tout on fjnde on achève, ou répare, ou îni.ugure des
c alices municipaux. Ce travail, dislnbué sur tous
les points de'noire lerr toire, cette activité féconds,
dirigée ver» les intérêts véritables et pacifiques, vous
savez, Messieurs, par votre ç/opre expérience, quel
les en sont les sources en même temps que les avan
tages.
» La force et la stabilité du pouvoir nous donnai t
le goût et le loisir de nous, occuper des affaires qui
FEU.i LtT3N DU CONSTITUTIONNEL, 12 AOUT.
GRIMÛD DE L'A REYMÈRE.
m.
LE VER SOLITAIRE,
!•?■ Les déjeûcers philosophiques de Grimod
de la Reynière avaient lieu deux fois par
semaine, le mercredi et le samedi; pour
peu que l'on connût l'amphitryon, on
avait le droit de s'y présénter, et même,
dès qu'on y avait été admis une fois, ou
pouvait amener un compagnon. A votre
arrivée, un introducteur s'emparait de votre
épée, de votre canne, de votre chapeau, de
votre croix de Saint-Louis ; puis il levait
une énorme barre.de fer qui scellait la porte
de la salle à manger. Cette barre de fer était
ensuite soigneusement remise, ce qui annon
çait qu'on ne serait pas libre de sortir à son
gré. Au milieu de la salle du festin, uue
table d'acajou était entourée -de sièges tous
égaux, sauf un seul plus élevé pour le pré-,
sideut, à la manière des clubs anglais. On
renouvelait ce président à chaque déjeûner.
Du reste, les règlemeus, tracés sur le mur en
lettres d'or, se présenfàient aux yeux des con
vives. qui avaient tout le loisir de s'en pé
nétrer eu attendant l'arrivée du maître.
Grimod de la Reynière ue sortait de son
cabinet qu'à midi un quart, accompagné
d'un petit bonhomme qui lui servait de
jockey et de clerc. Aidé de ce clerc, il ap
portait une pyramide de tartines de beurre,
qu'il posait sur la table. D'autres valets sui
vaient, avec deux brocs, l'un de café, l'autre
de lait. Il fallait boire vingt deux tasses de
café, au maximum, ou dix-huit, au mini
mum. Celui qui le premier avait avalé les
vingt-deuxtass.es, était élu président, et pre
nait place sur le fauteuil élevé. Les deux
brocs taris et les tarlinesépuisées, il arrivait
un aloyau de l'espèce la plus forte, auquel on
faisait faire solennellement trois fois le tour
de la table ; et le repas s'achevait à fond avec
ce mets substantiel, mais unique.
On causait ensuite littérature, on disser
tait sur ies livres nouveaux et l'on ne se sé
parait qu'après avoir épuisé la matière. Gri-
mod ue trouvait point mauvais que l'on cri
tiquât ses propres productions; il recevait
saus humeur les conseils qu'on lui dormait,
mais il ne les suivait pas. Ce fut là toujours
le trait la plus distinctif de son caractère.
Très expansif et très cordial da.is ses rap
ports d'amitié, il avait lafiîtuitede vouloir se
conduire seul, et nulle inflaentv. pas môme
celle des femmes, ne pouvait détuuru
qu'à sa tête, pour employer une phrase du lan
gage populaire; comme chez toits les entêtés,
sa volouté ne faisait que s'affermir au choc
des obstacles. Entêté de bonne compagnie
d'ailleurs, officieux, discret, enjoué, ayant
mérité le surnom de l'homme le plus poli du
royaume, nous pouvons dire de lui, en re
tournant une comparaison célèbre, que c'é
tait uue lige de fer peinte en roseau. On voit
que son despotisme éclatait surtout à table;
il fallait manger comme lui, boire commé
lui, et ne s'en aller qu'aux heures où il vou-
lait bien vous laisser partir. La llnpe qui,
d'après ce qu'en raconte Chateaubriand dans'
'ses Mémoires, ne trouvait aucun mets à son
goût, el se faisait faire une omelette dans
les grandes maisons où on le priait iiîw-r,
La Harpe, aurait été mal venu chez Grimod
de la Reynière, pour peu qu'il n'aimât pas
l'aloyau.
Jamais Grimod ne. se départit de cette
rigueur étrange. C'était lui être l'ort agréa-
ble que de lui amener un nouveau convive,
mais dans ce cas il fallait répondre du con
vive que l'on amenait. — P eut-il-boire mi
tant que vous savez? demandait il à l'intro
ducteur; s'il s'arrcte en chemin, vous, mon
ami, vous boirez double ; s'il ne mange pas
comme je l'enti-nds ,'Vous, Monsieur, vous
mangerez pour deux (1).
(1) Parmi ces gourmands impérieux dont 1-s
noms peuvent s'ajouter à ceux de La ll 'r ,)C et de
Grimod de la Reynière, mentionnons le poète co
mique Barthe, l'auteur des Fams'-s. infidélités.
Barihe n'était pas p jur lieo de Marseille. 11 avait
un c » racler e épouvamablement irasciUe, en môme
temps que très ptr.-oiinel ; néanmoins on le re
cherchait pour ses saillies. Son habitude était de
minger de tous les plats d'une table; mais comme
il avait la vue ba^e et qu'il craignait toujours
d'en laisser échapper quelques-uns, il se retour
nait à chique instant vers son domesùq ie cl lui
dbmtndftii avec un çrand sérieux : — Ai-je mangé
de o'ci? ai-je mange de cela?
Grimod de la tteynière, chfz qui il allait quel
quefois nous a cons r.vé queUfùes-uir .'s de ses
hjûPa'tlBS. Eu plus extraordinaire est san£ contredit
Hors de table, il était tout au service et à
la discrétion des gens ; il mettait à obliger
ses amis cette verve dont l'héritage s'est dis
persé avec les hommes du JtVlll 8 siècle.
Venait-on lui demander son intervention
d.ms quelque affaire délicate : — Ah I mon
cher, que je vous sais gré de vous adresser
à moi ! Vite, ma canne, nron chapeau! ne,
remettons rien au lendemain, et dit "S -moi
où il faut que nous nous,rendions présente
ment. — Peu s'en fallait qu'il ne plaçât la
reconnaissance de son côté, tant était prodi
gieux le mouvement qu'il se donnait-Il em
ploya de la sorte sa médiation et son crédita
'faire rouvrir la porte du Théâtre-Français à
Collin d'Harleville qui se l'était fermée par
un excès de suscept bilité, et ce fut à lui que
l'Inconstant dut sa représentation et son
succès. Mais après fout, puisque cette anec
dote rst amusante et qu'elle ajoute un trait
de plus aux mœurs d'un temps dont nous
avons désiré écrire un coin de l'histoire lit
téraire, nous n'avons aucun motif pour ne
point la raconter; elfe set vira peut-êtred'en-
scigrçemerit à quelijuc.s jetan s auteurs eif
leur apprenant par quelles épreuves ont pas
sé 1rs plus distingués d'inlre eux.
D.ms un de s:s accès d'humeur, Collin
d'Harleville avait retiré sa pièce de l'Incons-
celle que nous allons rac>r.l«r.
Barthe était alors au régime, ce qui ne l'empê
chait pas de dîner ci vil! •. Invité '1a-s une gran
de maison, il y arrive nif les tro ; s heures ; mais,
av^nt de monter au s don, i'. entre dan^ la cui.-i-.ie,
et, s'adres>ant au chef : — Jîon-ieur, Lu-dit-il,
«comme je suis an régime, je vous prie rie ni | o nt
saler la soupe. L-' cuisinier se i\tourne, r- g irde
avec beaucoup d etonnciiien: l'hoiMin qui lui fait
une pareille demande, et n'y répond que par une
indiiiaison assiz embrrai^ee, que Barlh-: prend
pour une adhésion. Cependant un se met à iiide,
on sert à notre poète du potnge. De-, la première
cuillerée, il s'aperçoit que, l in d'avoir fuit droit à
sa requête, le cuisinier y a prodigue les as atson-
nnn ns. Putieux, il se lève, prend son chapeau et
sort ; il entre "dans la cuisine, s'approche du chef
es, sans lui dire un seul mot, lui applique la plut
vigoureuse paire de fouftîets q-.ii jamais ait nicn-
ti ; puis, il sort tranquillement de la mai-o.i pour
aller chercher ailleurs un dîner lirons éoice.
« Sun intérieur était teinble, dit Grimod de la
Reyrôère, «t nous n'avons jamais,connu d'homme
qui méritât mieux que lui le nom de tyran dorn>s-
litjW,; sa veuve et ses valets fuurfliraient là-i'cs-
sus de très bons mémoires. 11 a lini par mourir,
en 1786, des suires d'un accès de cofore enté sur
une indigestion}» ^
tant, jouée seulement à la cour, et s'était
brouillé avec presque tous les acteurs de la
Comédie-Française. Dégoûté de ses premiers
déLoiivs, il avait résolu de renoncer à la
carrière draouilique, et, depuis deux aus, il
vivait relire à lu campagne. Ce fut là que
Grimod de la Reynière allalevoiret parvint,
non sans peine, â ébranler sa>résolution ; il
obtint de lui que sa pièce, corrigée et revue
avec soin, serait lu-i a Molé, et qu'à la suite
de cette démarche un rapprochement avec
le théâtre serait, tenté par le célèbre co
médien. Rendez-vous fut pris chez ce
lui-ci , qui indiqua lui-même le jour, el
l'heure. Grimod de la Reynière et Collin
d'Harleville furent on ne peut plus exacts ;
mais il n'en, fut pas ainsi de Molé qui, de
puis long-temps, ayant mis dans sa vie pri
vée l impcrtuieuce de ses rôles, n'arriva qu'à
l'heure du dîner, et ne s'excusa qu'à demi.
— B ih ! dit-il/notrelehturésera pour une
autre lois ; en attendant allons manger des
huîtres, cela vaui)a bi/ft, la pièce du poète
Col-in.
Nous aimons à supposer que ce mot, assez
h.'i^ôr ié, fat prononce par ï'iuiaiit ib'e petit-
nKitire sur re tem de légèreté et de baduiage
qui éxcitSB'loul. Néanmoins Collin d'Harle
ville devint violet de colère, et Grimod fut
obligé de lui comprimer fortement le aras
pour l'empêeh(;r d'éclater. On se mit à ta
ble, et l'on pense que le poêle Collin ne fut
pas celui qui nian^ a avec le pins d appétit.
Unj&coud rendez voli S fut cupeud.i -i co;i-
V 'ù'f p.;.ur la semaine suivaille.; comme la
première fow, il fut fixé à une heure, et,
comme la première l'ois, Molé n'arriva qu'à
trois heures. Vilihrs, qui a iapp<.rté l'aven
ture dan-: tes Souceni> s, ajoute que l'acteur
csp.'ija de tiouvenu de pcsifiler le pocte tn
passant dins la sfil e à ni mg. r; mais alors,
Colin d'iltrlêville, profondément blessé,
voulut quitter la p trtie. Grimod de la R:y-
niere vint encore au secours de son amour'
propre : il prit en particulier Molé, lui fil
sentir l'iie o-ivenanee de son procédé, fit lui
demanda un dernier re;;dez-\ous sur lequel
oti pût eotnider.
— Que voulez-vous? s'écria le comédien à
pirouettes ; je vous-en donner,us dix à la.
mSuio heure que j'y serais aussi peu fiiàle.
— Explique z-voils»
— Vous connaissez Yobjet divin qui m'oc-
cupé, vous savez combien j'en suis épris;
jugez s'il est une pièce qui vaille deux heu
res passées à la toilette de Mademoiselle "* !
Si vous ne me prenez pas aii saut du lit, ja
mais je n'entendrai l'Inconstant.
— Qu'à cela ne tienne! répliqua Grimod
de la Reynière.
Effèi ticernent, il revint deux jours après
au lever de Molé, qui écouta la pièce pen
dant qu'on lui me tt'ait des papillotes ; mais
cette fuis les choses sè passèrent différem
ment, et Molè se montra tellement enchante
de 'l'Inconstant, qu'il répara tousses torls en
mettant autant de chaleur à le faire recevoir
qu'il avait mis d'indifférence à l'entendre.
C'était par de pareils offices que Grimod
de la Reynière se rapprochait les cœurs que
ses bizarreries auraient pu lui éloigner; il
avait ainsi deuxcaractères et par conséquent
deux réputations.
Sa mauvaise étoile, dont on ne peut nier
l'influence en matière de galanterie, le porta
sur ces entrefaites à afficher un attachement
scandaleux, qui irrita de nouveau sa famille
contre lui. Il faut déplorer ces aberrations
dans un homme de si bonne compagnie, et
regretter que le ciel lui eût donné un cœur
si étourdiment sensible. C'est une chose,
dont nous n'avons jamais bien pu nous ren
dre compte : tant u'appèiit et tant d'amôui l
Faire un dieu de son ventre et se soum-Ure
en esclave aux genoux d'une lemrre? D'or
dinaire, l'une de ces facultés exclut entiè
rement l'autre ou finit par l'absorber; mais,
chez Grimod de la Reynière, elles ne cessè
rent jamais d'avoir ensemble leur coors ré-
gu'ier, et, comme deux lignes pamilè'es,
elks se continuèrent ju-qu'à la fin de s>s
jours, sans s'être rencontrées uu seul ins
tant.
Û ie irnlheureuse aventure, dont les dé
tails se trouvent consignés dan- le tome II de
la Chronique ScamdaLvse, vint ajouter encore,
mais d'une façon rrgrettal.de, à sa ivno-omée.
Uu soir qu'il se trouvait au parterre de l'Opé
ra, à 1 une des représentations d'Armide, il
se sentit extièmement pressé par la fouie.
— Qui est-ce donc qui pousse de cette ma
nière? s'écria-t : il; c'est tans doute quelque
garçon perruquier.
— C'est moi qui pousse, lui répondit aussi
tôt un militaire; dis-uni ton adressa, j'irai
demam te donner un coup de peigne. Ce mi
litaire était lui même le iîlsd'uit fermier-
général, M. de C?ize.
■l.o lendemain, les deux adversaires se
joignirent, et, s'étaat rendus aux Champs-
Elysées, ils se battirent au pistolet, : en plein
jour, devant trois mille personnes. Cet acte
incroyable d'originalités d'audace, un des
plus extraordinaires-du cette extraordinaire
époque, eût un triste résultat. Le pistolet de
Grimod creva 1 œil et laboura la tète de l'in
fortuné militaire, qui expira quelques heu 8 »
res après.
Ou aura remirq lé la singfllmté d'un duel
au pistolet au XVtll e siéile. Il est vrai que
MM. de Gaze et de la Reynière étaient les re
jetons de deux financiers. C dte affaire fit un
bruit énorme, et acheva de répandre le no ai
du jeune avocat. L'été suivant, il fut chau-
sonné, en compagnie de Mesmer, d-; Fran
klin etde Delille,'dan3 quelques couplets qui
coururent les rues :
. Diogène moderne,
• Un Km q:>e chacun berne
Croit tenir la lanterne
Et tranche du Caton ;
Contre la raillerie . , .•••> "
Si cervelle aguerrie . ' j
Al'lichc la folie,- j
lit p'è dic la raison.
Charig. z-nioi cette têta,
Cette grirnau le tèt-%
.Chinirez-moi cette xète.-
Téte de h aisson.
Ce dernier vers faisait allusion à la c6iffiî
re élevée qu'nlfectionaait particulièrement
Grimod de la Reynière.
Malgré Thotqkur que -voulaient bien lui
f tii-e h s ehan-onriiers, son bagage littéraire
était i n''o-edi-.> plus modestes, car,en dehors
de ses arti:!es de journaux, il n'avait publié
qu'un mui 'e 'Vidiuiie 'ay tut pour titre : Ré
flexions ph'lo
heurs d'amour. 11 est vrai que cet ouvrage
avait obtenu quelque vogue, grâce au
bruit nue l'auteur faisait d ms le moule,
que troi> éditions in avof iit élé imprimées
en di\ moi- ; que les g ;Z'dt-s en avaient par
lé, ete. ; il n'eu fallait pas davantage pour
bu dernier ra"g m l'amasse, à lui surtout,
homme de i icliesse et dj noblesse. Les fie-
p xio'is sur le plaisir , que cous avons tâ
che de relire, ont pii èire très goûté,s
à leur date; la mode était alors à ces es
pèces de dissertations morales; mais quoi-
qu'ui faismt Ha part à d'ingénieux para
doxes, à des printures plus vraies qu'amu
santes, à uu style de bonne société et aussi
couinât que peuvent-le désirer les lecteurs
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