Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-07-23
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 23 juillet 1852 23 juillet 1852
Description : 1852/07/23 (Numéro 205). 1852/07/23 (Numéro 205).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMERO 205.
BUREAUX. : rue de Valois PalaMeyalj. n i®.
B
1833.-VENDREDI 25 JUILLET.
PRIX SE Ii'AEOHKEEÏEÎST
PARIS..- 18 F. m TBIMESTM-
DÏPÂ.RTEUENS. 1© Fw —
ON NUSIÉaO : 20 CSNTUm.
root les pats ënàngbrs, 48 raporter
au tableau qui sera publié dans le journal,
les 10 et 25 da ohaque moi*.
Les abomemens datent de) 1" et 18
tit chaque voit.- ■
S'adresser , franco, pour la rédaction, à M3 Ctrcim 'jU>CiJtfUGNy, ras
Les articles déposés ne sont pas rendus}
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
.On s t éxme i da*slei département, m* Messagiries et aux Direction* de poste*— A Lonrlrei. thei MM» Cownt tt ïhî J I S'odresier, fraBCOÏpct /r l'admifiittratio», à M. DïNAtN, directemrï ,
— A Strasbourg, ches M. AtSiiNDHE, pour l'Allemagne ^ . [ Les annonces sont resne* au turean d'J jonrtsah et ohe* M. PANIS, régisseur, 10, place de la Bburs
PARIS, 22 JUILLET,
La commission d'enquête sur la, marine
militaire avait à étudier une question fojrt
importante, celle - de savoir quelle part il
faut f truction des b;Uimens de l'Etat. D'utiles in
formations ont été recueillies à ce sujet.
E q principe, l'Etat doit tous les ençoura-
gemens possibles à l'industrie privée ; il est
tenu d'éviter de lui faire çoncurrencc, et il
ne peut légitimement se réserver l'exécution
directe de certains grands travaux que si l'in
térêt public le commande ou si l'industrie
n'a pas les moyens de les accomplir. L'inté
rêt public est clairement engagé dans la
construction.de la flotte. Il s'agit de savoir si
l'industrie particulière est impuissante à, le
satisfaire.
Il faut distinguer les deux espèces de cons
tructions que l'Etat peut demander à l'in
dustrie, car les résultats de l'expérience que
l'administration a déjà faite à cet égard sont
fort différens. Ce sont les coques de bâtiment
en bois ou en fer, et les machines à vapeur.
Nous croyons que les usines françaises sont
actuellement en état de fournir à notre ma
rine top les Içs machines nécessaires. Au con
traire les constructeurs de nos ports sont
évidemment hors d'état de produire des bâ
ti mens tels que les vaisseaux et les grandes
frégates. . ,
.En outre on conteste même à la généra
lité d'entre eux la faculté de construire de
bons navires de flottille. Le fait eit que l'ad
ministration de la marine a. fait des essais
malheureux en ce genre. Un ceriain nom
bre de petits navires, et notamment des
bricks, livrés par l'industrie, ont été l'objet
xlfs plus -vives critiques dans nos ports mili
taires. -Des plaintes sont parvenues aux: mi
nistres placés à la tête de la marine. De
leur côté les constructeurs ont défendu leurs
œuvres avec véhémence ; ils ont mis les
plaigsans au défi de prouver leurs accusa
tions. Cette preuve : eût été, en certains cas,
.si difficile à faire et si dispendieuse,que l'ad
ministration ne pouvait pas être sérieuse
ment tentée de pousser bien loin les choses.
La plupart du temps, quand ces accusaiions
étaicnt.'produites, le prix du navire avait été
compté au constructeur, et la marine n'avait
plus qu'à tirer le meilleur parti possible de
son acquisition. Ce qui a paru le.plus clair
dans tout ceci, c'.est une certaine rivalité
ëntre lês ports militaires et les ports de com
merce. ,
En admettant,au surplus, que les vices si
gnalés dans les constructions faites par l'in
dustrie aient existé rééellement et n'aient
.pas été exagérés, il faudrait'encore se rendre
compte de leurs causes, examiner s'ils n'é
taient pas inévitables et s'il ne serait pas
possible'd'en ; prévenir le renouvellement.
L'Etat procède par voie d'adjudication pu
blique à la concession des bàtimens que l'in
dustrie est chargée de construirè. L'adjudi
cation publique a un principal avantage,
c'est dé plàcer au-dessus du,soupçon la pro
bité de l'administration j mais la. probité
la plus scrupuleuse et la plus austère doit,
'en ^certains cas, savoir laisser le champ li
bre à la calomnie, et la mépriser dans l'in
térêt du pays. Lorsqu'il s'agit de construire
un navire qui doit porteï le pavillon de
la France, sur lequel de braves marins ex
poseront leur vie, et de qui dépendra une
partie de l'honneur militaire et de la fortune
du pays, le gouvernement nous semble avoir
le droit incontestable de choisir librement
ceux à qui il confie cet important travail.
Parmi les constructeurs, il y eu a qui met-,
tent'lcur gloire à bien faire, quiontàsoute-
nir une renommée bien acquise, Qui se distin
guant par une capacité éprouvée, qui offrent
enfin des garanties exceptionnelles. Ceux-
ci sont le plus souvent écartés par le hasard
de l'adjudication publique. C'est quelque
chose d'aveuglé et de sourd que l'adjudica
tion. Un rabais de quelques centimes la fait
échoir au moios capable et quelquefois au
moins honnête. Un çposlructeur conscien-
cieux-aiaaera toujours,mieux renonca'Àune
entreprise que de la soumissionner, à un
iprix. insuffisant. Au contraire, un concur-
; rent moins scrupuleux • se chargera à tout
prix d'une fourniture, en se réservant de
frauder l'Etat et de né lui livrer que des
produits de qualité inférieure. - *
Il n'y a donc pasà hésiter; il faut renoncer
à concéder par voie d'adjudication publique
les constructions confiées à l'industrie. En
Angleterre, l'amirautén'v a jamaiseurecours.
Elle interroge les principaux constructeurs;
elle reçoit leurs offres, et elle désigne en
suite librement celui qu'elle croit le plus
capable d'exécuter ses plans. Pourquoi ne
ferions-nous pas de même en France? Il
faut enfin répudier cette politique qui con
sistait avoir le gouvernement en continuelle
suspicion et à le tenir en échec. Perpétuelle
ment occupé à se défendre, et gêné, dans
tous ses mouvemens, par la prévision des
attaques que chacun de ses actes suscitait, il
ne pouvait jamais prendre une allure déci
dée^ une vigoureuse initiative. Ce syslèmede
défiance a fait son temps. Laissons à l'admi
nistration u-a'e libre carrière, sauf à punir
d'une manière exemplaire les agens qui se
raient prévaricateurs.
L'adjudication, d'ailleurs, n'a, en pareille
matière, qu'un prétexte sérieux, c'est l'éco
nomie. Or on a établi, lors de la dernière
enquête faite en Angleterre sur l'état de la
marine Toyale britannique, que les frais
d'entretien et de réparation des navires - dé
fectueux, construits à bon marché, les ren
daient bientôt plus dispendieux qu'un bon
bâtiment payé cher.
Il ne suffît pas d'ailleurs que le gouverne-,
ment ait la liberté de choisir les construc
teurs, il faut, en outre, qu'il organise dans
leurs chantiers, une surveillance Effective.
Aujourd'hui; quand l'administration confie
à l'industrie l'exécution d'un bàiiment, elle
commet à la surveillance des travaux un
ingénieur et deux contre-maîtres. Si l'in
génieur; pouvait êire toujours présent
dans le chantier, de construction, les fraudes
seraient difficiles. Mais cet offniec est elicrgé
d'autres travaux, et, souvent, sa résidence
est. éloignée de la demeure du constructeur;
sa surveillance se réduit donc à une inspec
tion passagère, dont il est aisé d'éluder l'ef
fet.Quantaux contre-maîtres, ils n'ont ni l'au
torité, ni les connaissances nécessaires pour
exercer un contrôle sérieux sur les travaux
de chaque jour. Aussi certains TcmsïrubtëiûS'
peuvent-ils impunément employer des bois
refusés dans les arsenaux. Une surveillance
bien organisée empêcherait de tels abus ; elle
corrigerait, en outre, jour par jour, les er
reurs nombreuses que commet naturelle
ment l'industrie dans la construction d'une
machine de guerre, qui diffère, sous bien
des rapports, des bàtimens destinés au com
merce.
..... Enfin il y aurait à réformer les, usages
consacrés en ce qui concerne les avances à
faire aux constructeurs. En l'état du com-
merce.et de l'industrie française,il estimpos-
sible d'imposer aux constructeurs l'obliga
tion de terminer leurs travaux avant d'en
recevoir le prix. Précédemment, l'Etat leur
a accordé un quart du prix pendant la cons
truction, la moitié lors de la mise à l'eau, et
le dernier quart après l'achèvement com
plet des travaux.
Celte distribution a l'inconvénient d'enga
ger l'Etat envers le constructeur, de telle
sorte que le bâtiment, étant presque entiè
rement payé d'avance, l'administration n'est
plus libre de le refuser, malgré les vices
qu'elle peut reconnaître dans sa construc
tion. Les constructeurs, d'un autre côté, se
plaignent des lenteurs que l'administration
apporte dans le règlement desescomptes;
il en est qui ont attendu, disent-ils, ce rè
glement pendant quatorze, mois. Ce retard,,
causé par des formalités trop multipliées,
leur aurait fait perdre avec les intérêts de
leur capital tout le bénéfice de l'entreprise.
En Angleterre les fournisseurs, sur la pré
sentation des pièces requises, reçoivent- un
..bon sur la banque d'Angleterre et sont payés
à rinsïà'nt même • ce bon s'obtieri! dans les 1
bureaux en vingt-quatre heures, après jus
tification des circonstances prévues dans le
marché passé avec l'administration. Nos for
mes de comptabilité sont moins vives. Mais,
sang exiger un règlement-dè compte en vingt-
quatre heures,les constructeurs peuvent rai
sonnablement demander qu'on' ne le leur
fasse pas attendre pendant qualprze mois.
Nous venons de dire à quelles-conditions
l'industrie privée peut construire de bons
navires de flottille. Il nous reste à exprimer
un avis sur la fournituredes machines à va
peur destinées à la flotte. dena.ijy. ■
En têtedeson numéro du20 juillet* l'Union
irctorae.publie un premier avertissement, ;
qu'elle'vient de recevoir : - i
a Le préfet delà Loire-Inférieure,
» Vu l'article 32 du.décret du 17 février 1852 :
sur la presse ; . t
> » Vu l'article.du journal l'Union bretonne (nu- !
méro du 17 juillet), signé Ernest Merson, eom- \
mençant par ces inots : , !
« Noire querelle avec i'Espévaiice du Peuple,- etc.,
etc. » et se terminant par ceux-i i : « Nous avons ,
tout préparés des argumens et des pièces qui de-r
vront du moins la rendre décisive. »
» Considérant que cet article contient à l'égard
du rédacteur d'une feuille publique d'amers sar
casmes qui-dépassent lés'fcornes dans lestpielles la -<
polémique doit se renfermer, et qu'il est du de
voir de l'autorité d'atteindre' de Son blâme un tel
langage »
» Arrête": • _ 6
» Art. 1 er . Un premier avertissement est donné
au journal l'Union bretonne, dans la personne de
son rédacteur en chef et gérant, M. Ernest Merson;
» Art. 2. Le présent arrêté sera, aux termes
de l'article 19 du décret précité,'inséré en tête du
plus prochain numéro du journal l'Union bretonne.
m Art. 3. M. le commissaire central de police
de Nantes est chargé de l'exécution de cet arrêté.
» Nantes, le 19 juillet 1832.
» Le préfet, e. de mentque. »
L'Espérance a reçu de soir côté l'avertisse
ment suivant :
préfecture de la loire-inférieure.
Cabinet du préfet.
Le préfet de la Loire-Inférieure,
Vu l'art; 32 du décret du 17 février 18b2 sur la
presse;
Vu l'article du journal- l'Espérance du peuple
(numéro du 19 juillet), signé Emerand de la Uo-
cliette, commençant par ces rapts : >'
« Nou3 ne crofons pas que jam'ais homme ait
poussé plus loin le grotesque et le ridicule, etc ; »
et se terminant par ceux-ci : « Il y a des insectes
qu'on ne peut écraser, parce qu'ils s'aplatissent
sous le piei ; » ;
Considérant q'ué cet article contient à l'égard du
rédacteur d'ulie feuille publique des injures et des
'vïSIcfltés "dë- îangBtgë-Vjuines do la polémique permise, et qu'il est . du de
voir de l'autorité de frapper de son blâme un-tel
langage,
■ Arrête.
Art. 1 er . Un deuxième avertissement est donné
au journal l'Espérance dit Peuple, dans la person
ne, des sieurs Emerand de la lV>chclte> l'un de ses
rédacteurs, et Brodu, son gérant. '
Art; 2: Le présent arrête serai, aux termes de
l'art.. 19 du décret précité, .inséré tn lète du plus
prochain numéro du journal F Espérance.
Art. 3. M. le commissaire central de police de
Nantes est chargé de Pexéciition du présent arrêté.
Nantes, le 20 juillet 1852.
Le préfet, e. de mentque. ,
Le même préfet de la Loire-Inférieure
vient d'adresser la lettre suivante à MM* les
sous-préfets et maires du département-:
« Nantes, le 19 juillet 1852»-
» Messieurs,
» Il est arrivé à ma connaissance que, dans un
assez grand, nombre de communes, .des cabaretiers,
sans dou e pour attirer les consommateurs^ atta
chaient à une corde un poulet ou des' volatiles
quelconques, qu'on les suspendait à un arbre, que.
des pierres leur étaient lancées d une distance con
venue, et que celui qui avait , porté le coup de
mort était le vainqueur. „■ •«
» Souvent l'agonie des pauvres volatiles est-
Jongue et truelle. S'
. » C't st là, Messieurs, un jeu qui ne «attrait être
toléré. Il accoutume les hommes, les femmes, les
enfans même à la vue du sang. Les siîplfrances
provoquent le rire, et il en re?te toujoursde mau
vaises impres ions dans le cœur.
» Je l'interdis donc d'une manière absolue à tous
les cabaretiers et débitant de boissons dàns le dé
partement de la Loire-Inférieure, ainsj que dans
les foires et rcunioiis charopêtris. f
" » Je vous invite, Messieurs, à notifieivcette pro
hibition autour de vous et à tenir strfetement la
main à ce qu'elle ne soit pas enfreinte.,»
Le. gouvernement a reçu la dépêche"sui-
_ -y • . Strasbourg, 21 juillet ; ll ; h. 20.,
''Le préfet du'département 'du Bàs-Bhin à M. le
minisire de l'intérieur. - :
Le Piincc vient de rentrer à'Strasbourg au mi
lieu des acclamations de la loule. Un simple pi
quet de cuirassiers escortait sa voiture ; mais tou
te la population de. Strasbourg, avide de contem
pler encore une fois les traits, du Prince, criait :
Vive Napoléon! Vive l'Empereur! Vive le sau
veur de la France !
De la porte d'Austerlitzà la préfecture une-pluie
3e bouquets a rempli sa voiture. Jamais l'amour
du peuple ne s'est Iraduit d'une manière plus sym
pathique et plus enthousiaste.
. Le Moniteur delta Moselle publie Je com
muniqué suivant qui donne l'itinéraire du
prince-Président pour son retour à Paris :
« Le prince-Présidentj pour retournera
Paris, quittera Strasbourg, jeudi 22 courant,
à une heure de l'après-midi. Il sera à deux
heures et demie à Sarrtbourg, à quatre heu
res à Lunéville, où il passera les troupes de
la garnison en revue, et arrivera à sept heu
res et demie du soir à Nancy, oùil couchera.
S. A. repartira le lendemain matin, de .très
bonne heure. »
On lit ce soir dans la Patrie la note sui
vante : '
Son Altesse, Mgr le prince-Président de la Ré
publique arrivera demain à Paris, à six heures
dmehemin de fer de Strasbourg, • avec tous les
honneurs dûs à son rang. L'arm :e de Paris tout
entière sera sous les ara;es, et fera la haie-surson
passage, de la rue de Chabrol à l'Elysée.
Les ministres présens à Paris en grand unifor
me, le général en cht f Magnan, le général Carre
let, tous les officiers généraux de la division et
l'état-major de la place iront au devant du prince
et l'escorteront depuis la gare du chemin de fer
jusqu'à son palais.
I. Hier soir, vers dix heures et par une obs-
1 curité presque complète, le maréchal Exel-
mans se promenait à cheval aux environs de
Sèvres, avec son fils, M.. Maurice Exelmans,
et un domestique. Un camion vint à passer,
le cheval du maréchal prit peur, renversa
son cavalier et partit au galop dans la direc-
tionde Paris. Le capitaine Exelmans crut que
son père voulait accélérer son retour, et mit
aussi «on cheval au galop. Il ne s'aperçut de
i'absenee du maréchal qu'après avoir atteint
le cheval fugitif. Il revint alors sur ses pas
avec une inquiétude'qui devait être .trop
.cruellement justifiée. Le domestique du
maréchal s'était aperçu de la chute de son
maître, et . l'avait relevé. On était accouru
à ses cris , et on avait transporté l'illus
tre, blessé dans une auberge du voisinage.
-^Nïjus^vons le Tegret d'annoncer que tous les
secours ont été inutiles. Le maréchal a suc
combé à trois heures du matin aux suites de
sa chute.
La tête du maréchal avait porté sur une
pierre saillante qui avait produit une frac
ture étoiléc de l'occipital. Le blessé n'a pas
retrouvé connaissance un instant. ■ '
Le ministre de la marine, qui se trouvait
en visite chez la princesse Mathilde, au pa
villon de Breteuil, s'est empressé de se ren
dre à Sèvres, et après avoir envoyé chercher
des secours, il est accouru à'Parispour préve
nir le ministre de l'intérieur; mais quand
celui-ci est arrivé auprès du maréchal, -Je
bles-sé avait rendu le dernier soupir.
Il ne restât plus qu'à lui rendre les der
niers honneurs, et M. de Persigny fit venir
de Saint-Cloud un détachement d'infan
terie pour escorter le corps jusqu'au palais
de la Légion-d'houneur. Le corps-fut placé
sur un-brancard, et le triste cortège, parti
de Sèvres à cinq heures et demie du ma
tin, est arrivé à la grande chancellerie à sept
heures.
Le maréchal Exelmans avait 76 ans; c'est
entra Sèvres.et .Verstille", à Velizy, qu'il
avait livré son dernier combat, en 1815.
Les ministres présens à Paris, les ma
réchaux, le général en chef de l'armée de
Paris , les généraux commandant les di-
'visionset les différentes brigades de l'ar
mée, un grand nombre d'officiers supé
rieurs et de ûauts dignitaires de l'Etat, se
sont rendus à la grande chancellerie de la
Légion-d'Honneur pour présenter à Mme la
maréchale Exelmans et à ses fils leurs com-
plimens de condoléance.
Une dépêche télégraphique a été expédiée
au Président delà République pour lui an
noncer ce triste événement.
Le journal radical le Daily-News fait, dans
l'article suivant, l'énumération des pertes
que l'opposition a éprouvées dans la lutte
électorales ' ^ -
« En tète des pertes subies par le pârîïïiljèral,
il faut placer la non réélection de M. Bernai. Il y
aura peu d'anciens membres des. deux côtés de la
nouvelle chambre qui ne regrettent l'ex prési
dent des voies et moyens, que distinguaient à
un si haut degré son intelligence et son urbanité.
D'un accès facile, il était toujours prêt à fournir des
lumières sur les questions de détails. On n'oubliera
pas son assiduité si constante, son aptitude si re
marquable aux affaires, lorsqu'il avait à présider
les comités de toute la chambre. Si l'on considère
en outre que le Lancaster a exclu aussi M.Greene,
qui était le président de sir Robert Peel pour les
voies et moyens, l'absence de M. Bernai, dans le
parlement qui va s'ouvrir, ne sera que plus viver
ment sentie.
La perte de ces deux hommes, d'une expérience
parlementaire consommée, servira cependant à
faire de la réélection de M. Shaw-Lefèvre, à la
présidence de la chambre une nécessité politi
que. Il est probable que le gouvernement adoptera
et favorisera, sans y avoir une grande confiance,
.les prétentions, de M. Wilson Patten, à la prési
dence des voies et moyens. M. Wilson P_atten a,
sans doute, l'intelligence des affaires et occupera
le fauteuil avec honneur ; mais il est, à tous égards,
inférieur à M. Bernai, et, il n'est, sous aucun rap
port, à la hauteur de M. Greene.
A côte de la perte de M. Bernai, nous placerons
l'exclusion de M. Horsman et de sir Edward Bux-
ton. Nous pourrions encore, dans une chambreoù
les réformateurs ucclç-iastiques. seront en petit
nombre, ajouter avec raison, à ces deux noms,
celui.de M. • Hardcastle* Le prochain parlement
sera le premier, de l'époque moderne, .dans
-laquelle l'hériiier'apparent de la maison (Je
Forfescjie n'aura pas eu un siège; et l'on au
rait pu plus aisément se passer de maints,
personnages du parti libéral, que du lord ac
tuel Ebrington, car, quoique en fait de politique
générale, lord Ebrington fût disposé à se ranger
trop strictement du cô é (Je lord J. Russell, il avait
une spécialité, c'était la reforme sanitaire. M. Ans-
tey aussi, quoi qu'en puissent dire les whijs, et
malgré le tort qu'il s'est toujours fait à lui-même,
est une perte réelle, c'arM.Ânstey était le chef d'an
parti perdu ; mais, bien qu'il fût bruyant et em
porté, il était plein de-courage ; il avait encore
plus de savoir et d'habileté. Les whigs ont à dé
plorer la défaite de sir. John Romilly et celle de
sir William Somerville. Les plus graves intérêts
du public, l'honneur et la pureté de la justice,
gagneront à l'absence du premier du parle
ment. Toutefois, en comptant même ces pertes,
nos rangs sont nombreux et compacts". Nous li
vrerons la bataille à lord- Derby, avec la certi
tude de remporter la vicioire. »
. Nous voyons que tous les journaux de
Madrid s'occupent de la proposition de fu
sion que l 'Epoca a mise en avant dans un
article que nous avons reproduit. L 'Heraldo
et l'Espagnol ont été suivis dans cette voie par
le Constitucional, le Clamor publico, journal
progressiste, et enfin ynrl'Espagne et l'Ordre.
Le premier de ces deux journaux, passe pour
recevoir les inspirations des amis de la rei
ne-mère, «t le second est ministériel.. -
L'Ordre dit que si la fusion se présentait
comme une grande pensée, comme une idée
véritablement patriotique, il n'hésiterait pas
à l'accepter et; à la soutenir; mais il n'y
trouve aucun caractère d'utilité actuelle et
ne la croit .pas opportune. L'Espagne pense
comme l'Ordre, toutenreconnaissantquel'u-
niondes partis, lorsqu'elle a pour objet de
terminer parles moyens'légaux une situation
notoirementimpopulaireet nuisible au pays
est une idée qui ne sera jamais repoussée
par elle. '
Tout ceci indique que les partis commen
cent à comprendre que le temps presse et
qu'il faut aussi en Espagne une solution
avant que les cortès se réunissent, ainsi
qu'elles le doivent d'après la Constitution,
c'est-â-dire avant la fia de l'année.
JEn un mot, si, comme tout le monde le
croit, le ministère a renoncé à ses projets de
coup d'Etat, il faut régulariser la situation
et tacher de bien vivre.avec les institutions
actuelles; il faut sortir de l'impasse gouver
nementale où le ministère est acculé.
Nos correspondans de /Madrid pensent
qu'on pourrait bien finir pàrûnetransaction
qui rendrait le parti libéral de,la Jeune Espa
gne assez fort pour lutter contre les vieux pré
jugés qui menacent aujourd'hui de lever la
tête, et qui seraient bien vite anéantis si on
voulait s'entendre. Mais il faudrait assez de
patriotisme et d'abnégation de la part du mi
nistère actuel et de ses amis, pour faciliter
à la jeune reine l'occasion de profiter de
ces idées de conciliation, de cet élan pro vi
dentiel qui tendent â réunir pour la pre
mière fois toutes les fractions du parti qui
a donné à Isabelle II le trône constitutionnel
de l'Espagne.
11 faudrait que les amis du maréchal Nar-
vaez missent de côté leurs ressentimens, ou
bliassent les ingratitudes dont ils.ont été vic
times, et se moûtrassent.généreux,
Il faudrait que lespi'ogressisteâ fussent un
peu xnoins iaéolpgues,. et renonçassent à
iMéelkedaAoutxhanger avant d'avoir rien,
créé. • ' '
■ Si tous les partis constitutionnels consen*
tent à faire - qùelque sacrifice -d'amour pro
pre en faveur de leur patrie, la brise actuellè
pourra se terminer d'une manière favorablé
au pays. Mais si le ministère Bravo-Murilloj
par obstination à garder le pouvoir, se refu
se à faire toute concession à l'opinion, et
continue à s'appuyer exclusivement sur les
courtisans du palais, le parti libéral se dir
visera et s'affaiblira de jour en jour. Cela
est tellement évident., que le ministère lui-
même ne pourra s'aveugler sur la situation.
On peut donc espérer que la fusion discutée
et appuyée aujourd'hui par toute la presse
libérale de Madrid aura un bon résultat.
Un de nos correspondans de Madrid se dit
en mesure d'affirmer que la reine se proposé
de séjourner très peu à Madrid à l'avenir;
Elle passerait la plus grande partie de l'an*-
née dans les résidences royales d'Aranjuez,
la Granja, l'Escurial et le Pard'ol
L*. B onifàce.
On a reçu à Liverpool des nouvelles de
New-York jusqu'à la date du 10 juillet. Les
fêtes de l'anniversaire de l'indépeudance . et
des chaleurs excessives, avaient suspendu
à peu près complètement les . travaux'd»4
congrès. On fait politique important s'était
produit, à savoir une «désunion -complète
dans les rangs du parti whig par suite de la dé
signation du général Scott comme candidat
du parti à la présidence. Il a été jusqu'ici
impossible de rallier les dissidens qui de^
viennent chaque jour plus nombreux. M.
Webster s'étant rendu à Boston, y a. été
l'objetd'une véritable ovation. Trente mille
personnes se sont portées à sà rencontre ,
et l'ont conduit processionnellement àJ'hô-
tel-de-ville. Des meetings ont eu lieu dans
le Massachussets, et on y a décidé de ne rien
épargner pour faire échouer la candidature
du général Scott.
C'est là un mouvement purement local
et qui ne saurait prendre une grande ex
tension au nord; une démarche bien plus
.grave menace d'enlever au général Scott
les Etats du sud. Plusieurs notabilités "du
parti whig, sénateurs .ou représentant-^
ont publié un manifeste dans lequel ils décla
rent que le général Scott, avec les opi
nions qu'il a professées toute sa vie, ne
peut avoir accepté sincèrement le pro
gramme de la convention de Baltimore,
et ils engagent, en conséquence, leurs conci
toyens à lui refuser leurs suffrages. Ce mani
feste a produit la plus grande sensation, â
cause des noms dontil est signé, et ilparaîtle
coup de grâce de la candidature du général
Scott.*On s'attend généralement- à--ce..que
les whigs du sud adoptent un candidat par
ticulier; et cette division d'un parti qui
avait le plus grand besoin de demeurer
uni rend d'autant plus inévitable le suc
cès du général Pierce, que les démocrates,
si divisés avant la désignation du général,
se sont tous ralliés franchement à cette can
didature improvisée, et voteront tous com
me un seul homme. . C ucheval- C larigny.
DIRECTION DES BALLONS.
Hier ont eu lieu à i'Hippiîirome des expériences
aérostaliques qui ont déihontré une fois de plus
la difficulté, sirion l'impossibilité de diriger les '
ballons et de naviguer, dans les régions de l'air
comme sur la plaine liquide. Bien que les expé
riences ne fussent pas publiques, les invités étaient
nombreux, et dans l'assemblée, assez mêlée, on
remarquait des représentai de la presse"', des ama
teurs de sciences (amateurs des deux sexes), des
professeurs ut surtout des élèves de l'école centrale
des Arts et Manufactures à laquelle ont appartenu
MM. David et Ciama, collaborateurs de M. Gifi'ard,
qui devait gouverner l'aérostat. L'enlèvement du
ballon-avait été. annoncé pour six heures, (heure
du reste fort mal choisie),, et, à huit heures, le
départ n'était pas encore effectué, au grand désap
pointement de la majorité des spectateurs, qui'n'a
vaient pas-dîné. _
On a eu pendant ce temps tout le loisir d'exa
miner la-machine au moyen de laquelle devait
être résolu le problème de la locomotion aérienne.
Le système se composede l'aérostat, qui estimmense,
qui a la forme d'un cachalot, et qu'on avaitdistendu
avec le gaz de l'éclairage ; au dessous est appendue
une longue tige de bois horizontale avec une voile
à l'une des extrémités, en guise "de gouverpàil, ét
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL DU 23 JUILLET.
IL FAIT OHE JEUNESSE SE PASSEE
XVIII."
1 Nous leviendrons maintenant à l'hôtel de
Morvilliers, au. moment même où la mar-
auise avait remis- à l'un de ses gens la lettre
destinée à presser l'arrivée du vieux curé,
lettre détournée, on le sait, de sa destina
tion, par une de. ces fraudes que la morale
publique réprouve sévèrement, mais que
l'amour rend parfois excusables.
Dès. ce moment, un malaise inexplicable
sembla glacer vis-a-vis l'un de l'autre la mère
et le fils. Tristan cessa de se plaindre, Mme
de Morvilliers n'osa plus le consoler. Quand
le dîner fut servi, les deux convives s'assirent
en face l'un de l'autre, touchant à peine aux
mets qui leur étaient présentés, et, à de ra
res intervalles seulement, quelques paroles
insignifiantes vinrent résonner dans le vide
de ce double mutisme.
La marquise et son fils avaient simultané
ment les yeux baissés. La marquise, acca
blée par le souvenir d'une de ces capitula
tions intérieures que la conscience déchire
éternellement après qu'on les lui a imposées;
Tristan, sous la préoccupation d_e vœux tu-
multueux ? de désirs inavoués qu'avait rani-
.més en lui la révélation qu'il àvaitsurprise.
On passa la soirée dans le même embar
ras, dans la même réserve, la mère se ha
sardant à peine â parler, tremblaut surtout
* La reproduction est interdite.
d'évoquer le souvenir de Louise, comme si
elle eût dû, en prononçant ce nom," éveiller
le remords quelle espérait endormir; Tris
tan, rêveur, distrait, mais n'osant pas s'en
aller avant l'heure ordinaire, et redoutant
déjà instinctivement que la moindre hâte
dans son départ ne fût, vis-à^vis de sa mère,
une confession de projets vaguement coupa
bles, projets dont la marquise de Morvilliers
avait été sans doute involontairement en
traînée à se faire la complice.
En quittant sa mère, Tristan, comme les
jours précédens, liii avait annoncé sa visite
pour le lendemain; mais le lendémain il ne'
parut pas à l'hôtel j et ne prit même pas le
soin (auquel il ne manquait jamais d'ordi
naire) de se faire excuser.
On devine sans peine quels furent les tour
nions de la marquise, à quelles cruelles con
jectures elle se livra comme complément
des pressenti mens funestes qui l'avaient agi- <
tée durant toute cette journée ; sa conscien
ce avait renouvelé ces impressions pénibles
et vengeresses avec d'autant plus de force,
que la réflexion les avait"aggravées.
Le soir venu, la marquise,de plus en plus
agitée et inquiète, privée d'ailleurs de l'as
sistance de Fenestrauge qui n'avait pas en
core reparu à Paris, prit le parti d'envoyer
chez son fils un domestique de confiance,
armé des plus expresses recommandations
pour connaître et scruter, au besoin, les
causes de l'absence de Tristan. Ce messager
revint bientôt après et raconta à la marquise
que M. le comte Tristan était sorti ^vec son
valet de chambre, qu'il semblait fort agité,
et qu'enfin depuis le matin ori ne l'avait pas
.revu. . : •
; Ces nouvelles n'étaient pas faites pour cal-
. mer les ipquiétudes de la marquise, qui s'ar
rêta immédiatement à cette pensée : qu'une
seule personne était en position de lui four
nir des renseignemens précis sur le compte
dé son fils. Cette.personne pouvait-elle être
autre que Louise auprès de laquelle îi était
évident que Tristan avait dû chercher à pé
nétrer, à laquelle il avait écrit tout au moins?
La marquise, on s'en souvient sans doute,
en se séparant de sa lectrice, lui avait indi
qué elle-même la maison dans laquelle elle
devait trouver un asile. Dieu plus, elle lui
avait promis de venir procéder elle-même à
son installation, et d'adoucir par ses visites
les ennuis.de la claustration à laquelle Louise
se condamnait jusqu'à l'arrivée de son on
cle. Mais si, plus d'une fois depuis la veille
au soir, là pensée était venue à Mme de
Morvilliers d'accofnplir la promesse qu'elle
avait faite à la jeune fille, toujours le cou
rage lui avait manqué pour l'exécuter. De
quel front aborderait-elie l'orpheline qui
avait été confiée à sa garde par un ministre
de la religion, après avoir laissé pénétrer le
secret d'où dépendait peut-être l'honneur
de cette jeune fille? Pourrait-elle bien, elle,
la marquise de Morvilliers,alliée aux premiè
res maisons de France, environnée de l'esti
me et delà considération générales, regar
der sans rougir l'humble nièce d'un pau
vre curé de campagne?.
A ce moment pourtant^ et surexcitée par
des anxiétés que doublait encore les indi
ces recueillis par son domestique, Mme de
Morvilliers demanda sa voiture, et se fit con
duire au Marais, dans la lûaison occupée par
les anoinus serviteurs drf l'amiral de Morvil
liers, et où Louise avait dû chercher un
asile. >
Quelque chose lui disait que c'était là seu-
lemeat (dût sa conscience , s'y soulever plus
douloureusement encore) qu'elle pourrait
mettre un terme à l'incertitude qui la dé
chirait.
, Arrivée à la maison qu'elle avait pris soin
dè désigner elle-même à sa lectrice, et, des
cendue de sa voiture avec effort, la marquise
de Morvilliers demanda d'abord à parler aux
anciens serviteurs qui occupaient cette mai
son. On lui ditqu'iis étaient à la campagne.
— Mais , ajouta-t-elle avec inquiétude,
n'y a-t-il pas quelqu'un ici pour les rempla
cer?.. Une jeune personne ne s'est-elle pas
présentée hier... de ma part... pour choisir
un logement dans cette maison?.. Cette jeime
personne est chez elle, sans doute... ne
puis-je la voir?
■ Uue bonne grosse servante, à laquelle ces
questions étaient adressées, se mit à contem
plée Mme de Morvilliers avec une certaine
défiance, comme si elle hésitait à répondre;
enfin elle parut à grand'peine se rassurer,
en observant l'extérieur si respectable de la
marquise, et lui indiqua, en balbutiant, le
logement de Louise, qui était situé'au deuxiè
me étage. . , .
La marquise monta péniblement les de
grés, et porta à la sonnette une main telle
ment agitée, qu'elle eut peine à-la saisir, et
que la sonnette frémit à peine sous ce faible
contact. On ne répondit pas. La 'marquise
sonna plus vivement;... on ne répondit point
encore... La marquise ne savait, dans les
cruelles appréhensions auxquelles elle était
eu proie, si elledevaildésirer de VQir Louise,
ou préférer encore d'être obligée de se reti
rer sans avoir parlé à la j^une fille; mais, au
momeut où elle remettait la main sur la
rampe pour descendre l'escalier, une lumiè
re brilla derrière la porte et l'on put distin
guer l'ombre d'une tête qui se courbait vers
la serrure, pour regarder à l'extérieur. Un
instant après,la porte s'ouvrit avec une cer
taine vivacité, et Louise,pâle comme une om
bre, se dressa devant la marquise à qui elle
fit signe d'entrer.
La marquise suivit en frémissant sa jeune
lectrice, qui l'invita à s'asseoir.
Dominée encore par ses inquiétudes, M:r,e
de Morvilliers allait prononcér le nom. de
Tristan; mais ce nom expira sur ses lèvres...
Elle ne put articuler que quelques mo:s iu-
signiflans.
— Louise, je viens... bien tard sans doute;
mais, ce malin, je n'ai pu me rendre auprès
de vous, comme je vous l'avais promis.
— Je vous ai attendue, en effet, Madame la
marquise, répondit Louise avec un accent
glacial, mais a présent je ne vous attendais
plus.
La marquise demeura attérée sous cette
froide parole ; cependantelle appréhenda un
instant de s'être méprise, et frémit en pen
sant qu'il pouvait y avoir là quelque allusion
à un malheur arrivé ù son fils." Cette appré
hension lui rendit la force nécessaire pour
parler de lui.
— Mon fils!... dit-elle, mon fils!... est-ce
que vous auriez quelque chose à m'appren-
dre sur Tristan?
— Votre fils !... Ah ! c'est lui que vous ve
nez me demander? Madame la marquise, re
partit Louise avec un indicible accent d'in-
diguation profonde et concentrée.'
Mme de "Morvilliers pâlit et sentit son
cœur défaillir. -
— Votre fils... continua Louise, ah ! je le
conçois! vous n'étiez pasassezsûrede l'issue
que pourraient avoir les pièges qu'il; tendait
à une pauvre fille..,, vous doutiez encore dé'
sa victoire... vous avez voulu vous assurer
paf vous-même du succès de votre complot
commun!.. f
La marquise fit un geste qui était à la
fois une dénégation et une Supplication.
— Oh ! ne cherchez pas à nier, Madame...
M. le comte de Morvilliers a su que je n'étais
point partie pour la Vendée; il a su qu'entre
mille retraites que je pouvais choisir, c'é
tait celle-ci à laquelle je m'étais arrêtée sur ■
votre propre indication, Madame ; il n'a pu
le savoir que parce que vous le lui avez ait
ou parce que vous lui avez laissé voir ma
lettre... ma lettre que j'avais confiée à votre -
loyauté et à votre foi comme un dernier sa
lut ! Cette lettre, vous ne la lui avez pas seule
ment laissé voir, vous la lui avez livrée !.. car
M. de Morvilliers m'a avoué ici même qu'il
l'avait reprise et brûlée, que mon oncle ne
viendrait pas, et qu'ainsi, par une entente
abominable, par une indigne trahison que
confessent votre trouble et votre pâleur,
j'étais abandonnée, sans protection, sansap-
pui, sans espoir, aux fantaisies'et aux dis
tractions du dernier rejeton de la famille ds
Morvilliers. Ne faut-il pas, comme dit M. le
vicomte de Fçnestrauge; que jeunesse se
passe? -
— Louise, ne croyez pas... balbutia la
marquise.
— Ecoutez-moi, Madame... Je suis orphe- -
line, reprit Louise, et je n'ai jamais connu
ma famille ; ainsi Dieu lui-même m'avait
mise sous la sauvegarde de tous lès senti-
mens de pitié et de générosité instinctives
qu 'il ne permet pas mêmeà l'humanité la
plus dégradée d'oublier jamais!... Un bon
curé se chargea de moi!... Il n'avait pas
cru devoir me confier/à de meilleures, à
de plus honorables màins.qa'à celles de la
marquise de" Morvilliers L. Mme de Morvil-
BUREAUX. : rue de Valois PalaMeyalj. n i®.
B
1833.-VENDREDI 25 JUILLET.
PRIX SE Ii'AEOHKEEÏEÎST
PARIS..- 18 F. m TBIMESTM-
DÏPÂ.RTEUENS. 1© Fw —
ON NUSIÉaO : 20 CSNTUm.
root les pats ënàngbrs, 48 raporter
au tableau qui sera publié dans le journal,
les 10 et 25 da ohaque moi*.
Les abomemens datent de) 1" et 18
tit chaque voit.- ■
S'adresser , franco, pour la rédaction, à M3 Ctrcim 'jU>CiJtfUGNy, ras
Les articles déposés ne sont pas rendus}
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
.On s t éxme i da*slei département, m* Messagiries et aux Direction* de poste*— A Lonrlrei. thei MM» Cownt tt ïhî J I S'odresier, fraBCOÏpct /r l'admifiittratio», à M. DïNAtN, directemrï ,
— A Strasbourg, ches M. AtSiiNDHE, pour l'Allemagne ^ . [ Les annonces sont resne* au turean d'J jonrtsah et ohe* M. PANIS, régisseur, 10, place de la Bburs
PARIS, 22 JUILLET,
La commission d'enquête sur la, marine
militaire avait à étudier une question fojrt
importante, celle - de savoir quelle part il
faut f
formations ont été recueillies à ce sujet.
E q principe, l'Etat doit tous les ençoura-
gemens possibles à l'industrie privée ; il est
tenu d'éviter de lui faire çoncurrencc, et il
ne peut légitimement se réserver l'exécution
directe de certains grands travaux que si l'in
térêt public le commande ou si l'industrie
n'a pas les moyens de les accomplir. L'inté
rêt public est clairement engagé dans la
construction.de la flotte. Il s'agit de savoir si
l'industrie particulière est impuissante à, le
satisfaire.
Il faut distinguer les deux espèces de cons
tructions que l'Etat peut demander à l'in
dustrie, car les résultats de l'expérience que
l'administration a déjà faite à cet égard sont
fort différens. Ce sont les coques de bâtiment
en bois ou en fer, et les machines à vapeur.
Nous croyons que les usines françaises sont
actuellement en état de fournir à notre ma
rine top les Içs machines nécessaires. Au con
traire les constructeurs de nos ports sont
évidemment hors d'état de produire des bâ
ti mens tels que les vaisseaux et les grandes
frégates. . ,
.En outre on conteste même à la généra
lité d'entre eux la faculté de construire de
bons navires de flottille. Le fait eit que l'ad
ministration de la marine a. fait des essais
malheureux en ce genre. Un ceriain nom
bre de petits navires, et notamment des
bricks, livrés par l'industrie, ont été l'objet
xlfs plus -vives critiques dans nos ports mili
taires. -Des plaintes sont parvenues aux: mi
nistres placés à la tête de la marine. De
leur côté les constructeurs ont défendu leurs
œuvres avec véhémence ; ils ont mis les
plaigsans au défi de prouver leurs accusa
tions. Cette preuve : eût été, en certains cas,
.si difficile à faire et si dispendieuse,que l'ad
ministration ne pouvait pas être sérieuse
ment tentée de pousser bien loin les choses.
La plupart du temps, quand ces accusaiions
étaicnt.'produites, le prix du navire avait été
compté au constructeur, et la marine n'avait
plus qu'à tirer le meilleur parti possible de
son acquisition. Ce qui a paru le.plus clair
dans tout ceci, c'.est une certaine rivalité
ëntre lês ports militaires et les ports de com
merce. ,
En admettant,au surplus, que les vices si
gnalés dans les constructions faites par l'in
dustrie aient existé rééellement et n'aient
.pas été exagérés, il faudrait'encore se rendre
compte de leurs causes, examiner s'ils n'é
taient pas inévitables et s'il ne serait pas
possible'd'en ; prévenir le renouvellement.
L'Etat procède par voie d'adjudication pu
blique à la concession des bàtimens que l'in
dustrie est chargée de construirè. L'adjudi
cation publique a un principal avantage,
c'est dé plàcer au-dessus du,soupçon la pro
bité de l'administration j mais la. probité
la plus scrupuleuse et la plus austère doit,
'en ^certains cas, savoir laisser le champ li
bre à la calomnie, et la mépriser dans l'in
térêt du pays. Lorsqu'il s'agit de construire
un navire qui doit porteï le pavillon de
la France, sur lequel de braves marins ex
poseront leur vie, et de qui dépendra une
partie de l'honneur militaire et de la fortune
du pays, le gouvernement nous semble avoir
le droit incontestable de choisir librement
ceux à qui il confie cet important travail.
Parmi les constructeurs, il y eu a qui met-,
tent'lcur gloire à bien faire, quiontàsoute-
nir une renommée bien acquise, Qui se distin
guant par une capacité éprouvée, qui offrent
enfin des garanties exceptionnelles. Ceux-
ci sont le plus souvent écartés par le hasard
de l'adjudication publique. C'est quelque
chose d'aveuglé et de sourd que l'adjudica
tion. Un rabais de quelques centimes la fait
échoir au moios capable et quelquefois au
moins honnête. Un çposlructeur conscien-
cieux-aiaaera toujours,mieux renonca'Àune
entreprise que de la soumissionner, à un
iprix. insuffisant. Au contraire, un concur-
; rent moins scrupuleux • se chargera à tout
prix d'une fourniture, en se réservant de
frauder l'Etat et de né lui livrer que des
produits de qualité inférieure. - *
Il n'y a donc pasà hésiter; il faut renoncer
à concéder par voie d'adjudication publique
les constructions confiées à l'industrie. En
Angleterre, l'amirautén'v a jamaiseurecours.
Elle interroge les principaux constructeurs;
elle reçoit leurs offres, et elle désigne en
suite librement celui qu'elle croit le plus
capable d'exécuter ses plans. Pourquoi ne
ferions-nous pas de même en France? Il
faut enfin répudier cette politique qui con
sistait avoir le gouvernement en continuelle
suspicion et à le tenir en échec. Perpétuelle
ment occupé à se défendre, et gêné, dans
tous ses mouvemens, par la prévision des
attaques que chacun de ses actes suscitait, il
ne pouvait jamais prendre une allure déci
dée^ une vigoureuse initiative. Ce syslèmede
défiance a fait son temps. Laissons à l'admi
nistration u-a'e libre carrière, sauf à punir
d'une manière exemplaire les agens qui se
raient prévaricateurs.
L'adjudication, d'ailleurs, n'a, en pareille
matière, qu'un prétexte sérieux, c'est l'éco
nomie. Or on a établi, lors de la dernière
enquête faite en Angleterre sur l'état de la
marine Toyale britannique, que les frais
d'entretien et de réparation des navires - dé
fectueux, construits à bon marché, les ren
daient bientôt plus dispendieux qu'un bon
bâtiment payé cher.
Il ne suffît pas d'ailleurs que le gouverne-,
ment ait la liberté de choisir les construc
teurs, il faut, en outre, qu'il organise dans
leurs chantiers, une surveillance Effective.
Aujourd'hui; quand l'administration confie
à l'industrie l'exécution d'un bàiiment, elle
commet à la surveillance des travaux un
ingénieur et deux contre-maîtres. Si l'in
génieur; pouvait êire toujours présent
dans le chantier, de construction, les fraudes
seraient difficiles. Mais cet offniec est elicrgé
d'autres travaux, et, souvent, sa résidence
est. éloignée de la demeure du constructeur;
sa surveillance se réduit donc à une inspec
tion passagère, dont il est aisé d'éluder l'ef
fet.Quantaux contre-maîtres, ils n'ont ni l'au
torité, ni les connaissances nécessaires pour
exercer un contrôle sérieux sur les travaux
de chaque jour. Aussi certains TcmsïrubtëiûS'
peuvent-ils impunément employer des bois
refusés dans les arsenaux. Une surveillance
bien organisée empêcherait de tels abus ; elle
corrigerait, en outre, jour par jour, les er
reurs nombreuses que commet naturelle
ment l'industrie dans la construction d'une
machine de guerre, qui diffère, sous bien
des rapports, des bàtimens destinés au com
merce.
..... Enfin il y aurait à réformer les, usages
consacrés en ce qui concerne les avances à
faire aux constructeurs. En l'état du com-
merce.et de l'industrie française,il estimpos-
sible d'imposer aux constructeurs l'obliga
tion de terminer leurs travaux avant d'en
recevoir le prix. Précédemment, l'Etat leur
a accordé un quart du prix pendant la cons
truction, la moitié lors de la mise à l'eau, et
le dernier quart après l'achèvement com
plet des travaux.
Celte distribution a l'inconvénient d'enga
ger l'Etat envers le constructeur, de telle
sorte que le bâtiment, étant presque entiè
rement payé d'avance, l'administration n'est
plus libre de le refuser, malgré les vices
qu'elle peut reconnaître dans sa construc
tion. Les constructeurs, d'un autre côté, se
plaignent des lenteurs que l'administration
apporte dans le règlement desescomptes;
il en est qui ont attendu, disent-ils, ce rè
glement pendant quatorze, mois. Ce retard,,
causé par des formalités trop multipliées,
leur aurait fait perdre avec les intérêts de
leur capital tout le bénéfice de l'entreprise.
En Angleterre les fournisseurs, sur la pré
sentation des pièces requises, reçoivent- un
..bon sur la banque d'Angleterre et sont payés
à rinsïà'nt même • ce bon s'obtieri! dans les 1
bureaux en vingt-quatre heures, après jus
tification des circonstances prévues dans le
marché passé avec l'administration. Nos for
mes de comptabilité sont moins vives. Mais,
sang exiger un règlement-dè compte en vingt-
quatre heures,les constructeurs peuvent rai
sonnablement demander qu'on' ne le leur
fasse pas attendre pendant qualprze mois.
Nous venons de dire à quelles-conditions
l'industrie privée peut construire de bons
navires de flottille. Il nous reste à exprimer
un avis sur la fournituredes machines à va
peur destinées à la flotte. dena.ijy. ■
En têtedeson numéro du20 juillet* l'Union
irctorae.publie un premier avertissement, ;
qu'elle'vient de recevoir : - i
a Le préfet delà Loire-Inférieure,
» Vu l'article 32 du.décret du 17 février 1852 :
sur la presse ; . t
> » Vu l'article.du journal l'Union bretonne (nu- !
méro du 17 juillet), signé Ernest Merson, eom- \
mençant par ces inots : , !
« Noire querelle avec i'Espévaiice du Peuple,- etc.,
etc. » et se terminant par ceux-i i : « Nous avons ,
tout préparés des argumens et des pièces qui de-r
vront du moins la rendre décisive. »
» Considérant que cet article contient à l'égard
du rédacteur d'une feuille publique d'amers sar
casmes qui-dépassent lés'fcornes dans lestpielles la -<
polémique doit se renfermer, et qu'il est du de
voir de l'autorité d'atteindre' de Son blâme un tel
langage »
» Arrête": • _ 6
» Art. 1 er . Un premier avertissement est donné
au journal l'Union bretonne, dans la personne de
son rédacteur en chef et gérant, M. Ernest Merson;
» Art. 2. Le présent arrêté sera, aux termes
de l'article 19 du décret précité,'inséré en tête du
plus prochain numéro du journal l'Union bretonne.
m Art. 3. M. le commissaire central de police
de Nantes est chargé de l'exécution de cet arrêté.
» Nantes, le 19 juillet 1832.
» Le préfet, e. de mentque. »
L'Espérance a reçu de soir côté l'avertisse
ment suivant :
préfecture de la loire-inférieure.
Cabinet du préfet.
Le préfet de la Loire-Inférieure,
Vu l'art; 32 du décret du 17 février 18b2 sur la
presse;
Vu l'article du journal- l'Espérance du peuple
(numéro du 19 juillet), signé Emerand de la Uo-
cliette, commençant par ces rapts : >'
« Nou3 ne crofons pas que jam'ais homme ait
poussé plus loin le grotesque et le ridicule, etc ; »
et se terminant par ceux-ci : « Il y a des insectes
qu'on ne peut écraser, parce qu'ils s'aplatissent
sous le piei ; » ;
Considérant q'ué cet article contient à l'égard du
rédacteur d'ulie feuille publique des injures et des
'vïSIcfltés "dë- îangBtgë-Vjui
voir de l'autorité de frapper de son blâme un-tel
langage,
■ Arrête.
Art. 1 er . Un deuxième avertissement est donné
au journal l'Espérance dit Peuple, dans la person
ne, des sieurs Emerand de la lV>chclte> l'un de ses
rédacteurs, et Brodu, son gérant. '
Art; 2: Le présent arrête serai, aux termes de
l'art.. 19 du décret précité, .inséré tn lète du plus
prochain numéro du journal F Espérance.
Art. 3. M. le commissaire central de police de
Nantes est chargé de Pexéciition du présent arrêté.
Nantes, le 20 juillet 1852.
Le préfet, e. de mentque. ,
Le même préfet de la Loire-Inférieure
vient d'adresser la lettre suivante à MM* les
sous-préfets et maires du département-:
« Nantes, le 19 juillet 1852»-
» Messieurs,
» Il est arrivé à ma connaissance que, dans un
assez grand, nombre de communes, .des cabaretiers,
sans dou e pour attirer les consommateurs^ atta
chaient à une corde un poulet ou des' volatiles
quelconques, qu'on les suspendait à un arbre, que.
des pierres leur étaient lancées d une distance con
venue, et que celui qui avait , porté le coup de
mort était le vainqueur. „■ •«
» Souvent l'agonie des pauvres volatiles est-
Jongue et truelle. S'
. » C't st là, Messieurs, un jeu qui ne «attrait être
toléré. Il accoutume les hommes, les femmes, les
enfans même à la vue du sang. Les siîplfrances
provoquent le rire, et il en re?te toujoursde mau
vaises impres ions dans le cœur.
» Je l'interdis donc d'une manière absolue à tous
les cabaretiers et débitant de boissons dàns le dé
partement de la Loire-Inférieure, ainsj que dans
les foires et rcunioiis charopêtris. f
" » Je vous invite, Messieurs, à notifieivcette pro
hibition autour de vous et à tenir strfetement la
main à ce qu'elle ne soit pas enfreinte.,»
Le. gouvernement a reçu la dépêche"sui-
_ -y • . Strasbourg, 21 juillet ; ll ; h. 20.,
''Le préfet du'département 'du Bàs-Bhin à M. le
minisire de l'intérieur. - :
Le Piincc vient de rentrer à'Strasbourg au mi
lieu des acclamations de la loule. Un simple pi
quet de cuirassiers escortait sa voiture ; mais tou
te la population de. Strasbourg, avide de contem
pler encore une fois les traits, du Prince, criait :
Vive Napoléon! Vive l'Empereur! Vive le sau
veur de la France !
De la porte d'Austerlitzà la préfecture une-pluie
3e bouquets a rempli sa voiture. Jamais l'amour
du peuple ne s'est Iraduit d'une manière plus sym
pathique et plus enthousiaste.
. Le Moniteur delta Moselle publie Je com
muniqué suivant qui donne l'itinéraire du
prince-Président pour son retour à Paris :
« Le prince-Présidentj pour retournera
Paris, quittera Strasbourg, jeudi 22 courant,
à une heure de l'après-midi. Il sera à deux
heures et demie à Sarrtbourg, à quatre heu
res à Lunéville, où il passera les troupes de
la garnison en revue, et arrivera à sept heu
res et demie du soir à Nancy, oùil couchera.
S. A. repartira le lendemain matin, de .très
bonne heure. »
On lit ce soir dans la Patrie la note sui
vante : '
Son Altesse, Mgr le prince-Président de la Ré
publique arrivera demain à Paris, à six heures
honneurs dûs à son rang. L'arm :e de Paris tout
entière sera sous les ara;es, et fera la haie-surson
passage, de la rue de Chabrol à l'Elysée.
Les ministres présens à Paris en grand unifor
me, le général en cht f Magnan, le général Carre
let, tous les officiers généraux de la division et
l'état-major de la place iront au devant du prince
et l'escorteront depuis la gare du chemin de fer
jusqu'à son palais.
I. Hier soir, vers dix heures et par une obs-
1 curité presque complète, le maréchal Exel-
mans se promenait à cheval aux environs de
Sèvres, avec son fils, M.. Maurice Exelmans,
et un domestique. Un camion vint à passer,
le cheval du maréchal prit peur, renversa
son cavalier et partit au galop dans la direc-
tionde Paris. Le capitaine Exelmans crut que
son père voulait accélérer son retour, et mit
aussi «on cheval au galop. Il ne s'aperçut de
i'absenee du maréchal qu'après avoir atteint
le cheval fugitif. Il revint alors sur ses pas
avec une inquiétude'qui devait être .trop
.cruellement justifiée. Le domestique du
maréchal s'était aperçu de la chute de son
maître, et . l'avait relevé. On était accouru
à ses cris , et on avait transporté l'illus
tre, blessé dans une auberge du voisinage.
-^Nïjus^vons le Tegret d'annoncer que tous les
secours ont été inutiles. Le maréchal a suc
combé à trois heures du matin aux suites de
sa chute.
La tête du maréchal avait porté sur une
pierre saillante qui avait produit une frac
ture étoiléc de l'occipital. Le blessé n'a pas
retrouvé connaissance un instant. ■ '
Le ministre de la marine, qui se trouvait
en visite chez la princesse Mathilde, au pa
villon de Breteuil, s'est empressé de se ren
dre à Sèvres, et après avoir envoyé chercher
des secours, il est accouru à'Parispour préve
nir le ministre de l'intérieur; mais quand
celui-ci est arrivé auprès du maréchal, -Je
bles-sé avait rendu le dernier soupir.
Il ne restât plus qu'à lui rendre les der
niers honneurs, et M. de Persigny fit venir
de Saint-Cloud un détachement d'infan
terie pour escorter le corps jusqu'au palais
de la Légion-d'houneur. Le corps-fut placé
sur un-brancard, et le triste cortège, parti
de Sèvres à cinq heures et demie du ma
tin, est arrivé à la grande chancellerie à sept
heures.
Le maréchal Exelmans avait 76 ans; c'est
entra Sèvres.et .Verstille", à Velizy, qu'il
avait livré son dernier combat, en 1815.
Les ministres présens à Paris, les ma
réchaux, le général en chef de l'armée de
Paris , les généraux commandant les di-
'visionset les différentes brigades de l'ar
mée, un grand nombre d'officiers supé
rieurs et de ûauts dignitaires de l'Etat, se
sont rendus à la grande chancellerie de la
Légion-d'Honneur pour présenter à Mme la
maréchale Exelmans et à ses fils leurs com-
plimens de condoléance.
Une dépêche télégraphique a été expédiée
au Président delà République pour lui an
noncer ce triste événement.
Le journal radical le Daily-News fait, dans
l'article suivant, l'énumération des pertes
que l'opposition a éprouvées dans la lutte
électorales ' ^ -
« En tète des pertes subies par le pârîïïiljèral,
il faut placer la non réélection de M. Bernai. Il y
aura peu d'anciens membres des. deux côtés de la
nouvelle chambre qui ne regrettent l'ex prési
dent des voies et moyens, que distinguaient à
un si haut degré son intelligence et son urbanité.
D'un accès facile, il était toujours prêt à fournir des
lumières sur les questions de détails. On n'oubliera
pas son assiduité si constante, son aptitude si re
marquable aux affaires, lorsqu'il avait à présider
les comités de toute la chambre. Si l'on considère
en outre que le Lancaster a exclu aussi M.Greene,
qui était le président de sir Robert Peel pour les
voies et moyens, l'absence de M. Bernai, dans le
parlement qui va s'ouvrir, ne sera que plus viver
ment sentie.
La perte de ces deux hommes, d'une expérience
parlementaire consommée, servira cependant à
faire de la réélection de M. Shaw-Lefèvre, à la
présidence de la chambre une nécessité politi
que. Il est probable que le gouvernement adoptera
et favorisera, sans y avoir une grande confiance,
.les prétentions, de M. Wilson Patten, à la prési
dence des voies et moyens. M. Wilson P_atten a,
sans doute, l'intelligence des affaires et occupera
le fauteuil avec honneur ; mais il est, à tous égards,
inférieur à M. Bernai, et, il n'est, sous aucun rap
port, à la hauteur de M. Greene.
A côte de la perte de M. Bernai, nous placerons
l'exclusion de M. Horsman et de sir Edward Bux-
ton. Nous pourrions encore, dans une chambreoù
les réformateurs ucclç-iastiques. seront en petit
nombre, ajouter avec raison, à ces deux noms,
celui.de M. • Hardcastle* Le prochain parlement
sera le premier, de l'époque moderne, .dans
-laquelle l'hériiier'apparent de la maison (Je
Forfescjie n'aura pas eu un siège; et l'on au
rait pu plus aisément se passer de maints,
personnages du parti libéral, que du lord ac
tuel Ebrington, car, quoique en fait de politique
générale, lord Ebrington fût disposé à se ranger
trop strictement du cô é (Je lord J. Russell, il avait
une spécialité, c'était la reforme sanitaire. M. Ans-
tey aussi, quoi qu'en puissent dire les whijs, et
malgré le tort qu'il s'est toujours fait à lui-même,
est une perte réelle, c'arM.Ânstey était le chef d'an
parti perdu ; mais, bien qu'il fût bruyant et em
porté, il était plein de-courage ; il avait encore
plus de savoir et d'habileté. Les whigs ont à dé
plorer la défaite de sir. John Romilly et celle de
sir William Somerville. Les plus graves intérêts
du public, l'honneur et la pureté de la justice,
gagneront à l'absence du premier du parle
ment. Toutefois, en comptant même ces pertes,
nos rangs sont nombreux et compacts". Nous li
vrerons la bataille à lord- Derby, avec la certi
tude de remporter la vicioire. »
. Nous voyons que tous les journaux de
Madrid s'occupent de la proposition de fu
sion que l 'Epoca a mise en avant dans un
article que nous avons reproduit. L 'Heraldo
et l'Espagnol ont été suivis dans cette voie par
le Constitucional, le Clamor publico, journal
progressiste, et enfin ynrl'Espagne et l'Ordre.
Le premier de ces deux journaux, passe pour
recevoir les inspirations des amis de la rei
ne-mère, «t le second est ministériel.. -
L'Ordre dit que si la fusion se présentait
comme une grande pensée, comme une idée
véritablement patriotique, il n'hésiterait pas
à l'accepter et; à la soutenir; mais il n'y
trouve aucun caractère d'utilité actuelle et
ne la croit .pas opportune. L'Espagne pense
comme l'Ordre, toutenreconnaissantquel'u-
niondes partis, lorsqu'elle a pour objet de
terminer parles moyens'légaux une situation
notoirementimpopulaireet nuisible au pays
est une idée qui ne sera jamais repoussée
par elle. '
Tout ceci indique que les partis commen
cent à comprendre que le temps presse et
qu'il faut aussi en Espagne une solution
avant que les cortès se réunissent, ainsi
qu'elles le doivent d'après la Constitution,
c'est-â-dire avant la fia de l'année.
JEn un mot, si, comme tout le monde le
croit, le ministère a renoncé à ses projets de
coup d'Etat, il faut régulariser la situation
et tacher de bien vivre.avec les institutions
actuelles; il faut sortir de l'impasse gouver
nementale où le ministère est acculé.
Nos correspondans de /Madrid pensent
qu'on pourrait bien finir pàrûnetransaction
qui rendrait le parti libéral de,la Jeune Espa
gne assez fort pour lutter contre les vieux pré
jugés qui menacent aujourd'hui de lever la
tête, et qui seraient bien vite anéantis si on
voulait s'entendre. Mais il faudrait assez de
patriotisme et d'abnégation de la part du mi
nistère actuel et de ses amis, pour faciliter
à la jeune reine l'occasion de profiter de
ces idées de conciliation, de cet élan pro vi
dentiel qui tendent â réunir pour la pre
mière fois toutes les fractions du parti qui
a donné à Isabelle II le trône constitutionnel
de l'Espagne.
11 faudrait que les amis du maréchal Nar-
vaez missent de côté leurs ressentimens, ou
bliassent les ingratitudes dont ils.ont été vic
times, et se moûtrassent.généreux,
Il faudrait que lespi'ogressisteâ fussent un
peu xnoins iaéolpgues,. et renonçassent à
iMéelkedaAoutxhanger avant d'avoir rien,
créé. • ' '
■ Si tous les partis constitutionnels consen*
tent à faire - qùelque sacrifice -d'amour pro
pre en faveur de leur patrie, la brise actuellè
pourra se terminer d'une manière favorablé
au pays. Mais si le ministère Bravo-Murilloj
par obstination à garder le pouvoir, se refu
se à faire toute concession à l'opinion, et
continue à s'appuyer exclusivement sur les
courtisans du palais, le parti libéral se dir
visera et s'affaiblira de jour en jour. Cela
est tellement évident., que le ministère lui-
même ne pourra s'aveugler sur la situation.
On peut donc espérer que la fusion discutée
et appuyée aujourd'hui par toute la presse
libérale de Madrid aura un bon résultat.
Un de nos correspondans de Madrid se dit
en mesure d'affirmer que la reine se proposé
de séjourner très peu à Madrid à l'avenir;
Elle passerait la plus grande partie de l'an*-
née dans les résidences royales d'Aranjuez,
la Granja, l'Escurial et le Pard'ol
L*. B onifàce.
On a reçu à Liverpool des nouvelles de
New-York jusqu'à la date du 10 juillet. Les
fêtes de l'anniversaire de l'indépeudance . et
des chaleurs excessives, avaient suspendu
à peu près complètement les . travaux'd»4
congrès. On fait politique important s'était
produit, à savoir une «désunion -complète
dans les rangs du parti whig par suite de la dé
signation du général Scott comme candidat
du parti à la présidence. Il a été jusqu'ici
impossible de rallier les dissidens qui de^
viennent chaque jour plus nombreux. M.
Webster s'étant rendu à Boston, y a. été
l'objetd'une véritable ovation. Trente mille
personnes se sont portées à sà rencontre ,
et l'ont conduit processionnellement àJ'hô-
tel-de-ville. Des meetings ont eu lieu dans
le Massachussets, et on y a décidé de ne rien
épargner pour faire échouer la candidature
du général Scott.
C'est là un mouvement purement local
et qui ne saurait prendre une grande ex
tension au nord; une démarche bien plus
.grave menace d'enlever au général Scott
les Etats du sud. Plusieurs notabilités "du
parti whig, sénateurs .ou représentant-^
ont publié un manifeste dans lequel ils décla
rent que le général Scott, avec les opi
nions qu'il a professées toute sa vie, ne
peut avoir accepté sincèrement le pro
gramme de la convention de Baltimore,
et ils engagent, en conséquence, leurs conci
toyens à lui refuser leurs suffrages. Ce mani
feste a produit la plus grande sensation, â
cause des noms dontil est signé, et ilparaîtle
coup de grâce de la candidature du général
Scott.*On s'attend généralement- à--ce..que
les whigs du sud adoptent un candidat par
ticulier; et cette division d'un parti qui
avait le plus grand besoin de demeurer
uni rend d'autant plus inévitable le suc
cès du général Pierce, que les démocrates,
si divisés avant la désignation du général,
se sont tous ralliés franchement à cette can
didature improvisée, et voteront tous com
me un seul homme. . C ucheval- C larigny.
DIRECTION DES BALLONS.
Hier ont eu lieu à i'Hippiîirome des expériences
aérostaliques qui ont déihontré une fois de plus
la difficulté, sirion l'impossibilité de diriger les '
ballons et de naviguer, dans les régions de l'air
comme sur la plaine liquide. Bien que les expé
riences ne fussent pas publiques, les invités étaient
nombreux, et dans l'assemblée, assez mêlée, on
remarquait des représentai de la presse"', des ama
teurs de sciences (amateurs des deux sexes), des
professeurs ut surtout des élèves de l'école centrale
des Arts et Manufactures à laquelle ont appartenu
MM. David et Ciama, collaborateurs de M. Gifi'ard,
qui devait gouverner l'aérostat. L'enlèvement du
ballon-avait été. annoncé pour six heures, (heure
du reste fort mal choisie),, et, à huit heures, le
départ n'était pas encore effectué, au grand désap
pointement de la majorité des spectateurs, qui'n'a
vaient pas-dîné. _
On a eu pendant ce temps tout le loisir d'exa
miner la-machine au moyen de laquelle devait
être résolu le problème de la locomotion aérienne.
Le système se composede l'aérostat, qui estimmense,
qui a la forme d'un cachalot, et qu'on avaitdistendu
avec le gaz de l'éclairage ; au dessous est appendue
une longue tige de bois horizontale avec une voile
à l'une des extrémités, en guise "de gouverpàil, ét
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL DU 23 JUILLET.
IL FAIT OHE JEUNESSE SE PASSEE
XVIII."
1 Nous leviendrons maintenant à l'hôtel de
Morvilliers, au. moment même où la mar-
auise avait remis- à l'un de ses gens la lettre
destinée à presser l'arrivée du vieux curé,
lettre détournée, on le sait, de sa destina
tion, par une de. ces fraudes que la morale
publique réprouve sévèrement, mais que
l'amour rend parfois excusables.
Dès. ce moment, un malaise inexplicable
sembla glacer vis-a-vis l'un de l'autre la mère
et le fils. Tristan cessa de se plaindre, Mme
de Morvilliers n'osa plus le consoler. Quand
le dîner fut servi, les deux convives s'assirent
en face l'un de l'autre, touchant à peine aux
mets qui leur étaient présentés, et, à de ra
res intervalles seulement, quelques paroles
insignifiantes vinrent résonner dans le vide
de ce double mutisme.
La marquise et son fils avaient simultané
ment les yeux baissés. La marquise, acca
blée par le souvenir d'une de ces capitula
tions intérieures que la conscience déchire
éternellement après qu'on les lui a imposées;
Tristan, sous la préoccupation d_e vœux tu-
multueux ? de désirs inavoués qu'avait rani-
.més en lui la révélation qu'il àvaitsurprise.
On passa la soirée dans le même embar
ras, dans la même réserve, la mère se ha
sardant à peine â parler, tremblaut surtout
* La reproduction est interdite.
d'évoquer le souvenir de Louise, comme si
elle eût dû, en prononçant ce nom," éveiller
le remords quelle espérait endormir; Tris
tan, rêveur, distrait, mais n'osant pas s'en
aller avant l'heure ordinaire, et redoutant
déjà instinctivement que la moindre hâte
dans son départ ne fût, vis-à^vis de sa mère,
une confession de projets vaguement coupa
bles, projets dont la marquise de Morvilliers
avait été sans doute involontairement en
traînée à se faire la complice.
En quittant sa mère, Tristan, comme les
jours précédens, liii avait annoncé sa visite
pour le lendemain; mais le lendémain il ne'
parut pas à l'hôtel j et ne prit même pas le
soin (auquel il ne manquait jamais d'ordi
naire) de se faire excuser.
On devine sans peine quels furent les tour
nions de la marquise, à quelles cruelles con
jectures elle se livra comme complément
des pressenti mens funestes qui l'avaient agi- <
tée durant toute cette journée ; sa conscien
ce avait renouvelé ces impressions pénibles
et vengeresses avec d'autant plus de force,
que la réflexion les avait"aggravées.
Le soir venu, la marquise,de plus en plus
agitée et inquiète, privée d'ailleurs de l'as
sistance de Fenestrauge qui n'avait pas en
core reparu à Paris, prit le parti d'envoyer
chez son fils un domestique de confiance,
armé des plus expresses recommandations
pour connaître et scruter, au besoin, les
causes de l'absence de Tristan. Ce messager
revint bientôt après et raconta à la marquise
que M. le comte Tristan était sorti ^vec son
valet de chambre, qu'il semblait fort agité,
et qu'enfin depuis le matin ori ne l'avait pas
.revu. . : •
; Ces nouvelles n'étaient pas faites pour cal-
. mer les ipquiétudes de la marquise, qui s'ar
rêta immédiatement à cette pensée : qu'une
seule personne était en position de lui four
nir des renseignemens précis sur le compte
dé son fils. Cette.personne pouvait-elle être
autre que Louise auprès de laquelle îi était
évident que Tristan avait dû chercher à pé
nétrer, à laquelle il avait écrit tout au moins?
La marquise, on s'en souvient sans doute,
en se séparant de sa lectrice, lui avait indi
qué elle-même la maison dans laquelle elle
devait trouver un asile. Dieu plus, elle lui
avait promis de venir procéder elle-même à
son installation, et d'adoucir par ses visites
les ennuis.de la claustration à laquelle Louise
se condamnait jusqu'à l'arrivée de son on
cle. Mais si, plus d'une fois depuis la veille
au soir, là pensée était venue à Mme de
Morvilliers d'accofnplir la promesse qu'elle
avait faite à la jeune fille, toujours le cou
rage lui avait manqué pour l'exécuter. De
quel front aborderait-elie l'orpheline qui
avait été confiée à sa garde par un ministre
de la religion, après avoir laissé pénétrer le
secret d'où dépendait peut-être l'honneur
de cette jeune fille? Pourrait-elle bien, elle,
la marquise de Morvilliers,alliée aux premiè
res maisons de France, environnée de l'esti
me et delà considération générales, regar
der sans rougir l'humble nièce d'un pau
vre curé de campagne?.
A ce moment pourtant^ et surexcitée par
des anxiétés que doublait encore les indi
ces recueillis par son domestique, Mme de
Morvilliers demanda sa voiture, et se fit con
duire au Marais, dans la lûaison occupée par
les anoinus serviteurs drf l'amiral de Morvil
liers, et où Louise avait dû chercher un
asile. >
Quelque chose lui disait que c'était là seu-
lemeat (dût sa conscience , s'y soulever plus
douloureusement encore) qu'elle pourrait
mettre un terme à l'incertitude qui la dé
chirait.
, Arrivée à la maison qu'elle avait pris soin
dè désigner elle-même à sa lectrice, et, des
cendue de sa voiture avec effort, la marquise
de Morvilliers demanda d'abord à parler aux
anciens serviteurs qui occupaient cette mai
son. On lui ditqu'iis étaient à la campagne.
— Mais , ajouta-t-elle avec inquiétude,
n'y a-t-il pas quelqu'un ici pour les rempla
cer?.. Une jeune personne ne s'est-elle pas
présentée hier... de ma part... pour choisir
un logement dans cette maison?.. Cette jeime
personne est chez elle, sans doute... ne
puis-je la voir?
■ Uue bonne grosse servante, à laquelle ces
questions étaient adressées, se mit à contem
plée Mme de Morvilliers avec une certaine
défiance, comme si elle hésitait à répondre;
enfin elle parut à grand'peine se rassurer,
en observant l'extérieur si respectable de la
marquise, et lui indiqua, en balbutiant, le
logement de Louise, qui était situé'au deuxiè
me étage. . , .
La marquise monta péniblement les de
grés, et porta à la sonnette une main telle
ment agitée, qu'elle eut peine à-la saisir, et
que la sonnette frémit à peine sous ce faible
contact. On ne répondit pas. La 'marquise
sonna plus vivement;... on ne répondit point
encore... La marquise ne savait, dans les
cruelles appréhensions auxquelles elle était
eu proie, si elledevaildésirer de VQir Louise,
ou préférer encore d'être obligée de se reti
rer sans avoir parlé à la j^une fille; mais, au
momeut où elle remettait la main sur la
rampe pour descendre l'escalier, une lumiè
re brilla derrière la porte et l'on put distin
guer l'ombre d'une tête qui se courbait vers
la serrure, pour regarder à l'extérieur. Un
instant après,la porte s'ouvrit avec une cer
taine vivacité, et Louise,pâle comme une om
bre, se dressa devant la marquise à qui elle
fit signe d'entrer.
La marquise suivit en frémissant sa jeune
lectrice, qui l'invita à s'asseoir.
Dominée encore par ses inquiétudes, M:r,e
de Morvilliers allait prononcér le nom. de
Tristan; mais ce nom expira sur ses lèvres...
Elle ne put articuler que quelques mo:s iu-
signiflans.
— Louise, je viens... bien tard sans doute;
mais, ce malin, je n'ai pu me rendre auprès
de vous, comme je vous l'avais promis.
— Je vous ai attendue, en effet, Madame la
marquise, répondit Louise avec un accent
glacial, mais a présent je ne vous attendais
plus.
La marquise demeura attérée sous cette
froide parole ; cependantelle appréhenda un
instant de s'être méprise, et frémit en pen
sant qu'il pouvait y avoir là quelque allusion
à un malheur arrivé ù son fils." Cette appré
hension lui rendit la force nécessaire pour
parler de lui.
— Mon fils!... dit-elle, mon fils!... est-ce
que vous auriez quelque chose à m'appren-
dre sur Tristan?
— Votre fils !... Ah ! c'est lui que vous ve
nez me demander? Madame la marquise, re
partit Louise avec un indicible accent d'in-
diguation profonde et concentrée.'
Mme de "Morvilliers pâlit et sentit son
cœur défaillir. -
— Votre fils... continua Louise, ah ! je le
conçois! vous n'étiez pasassezsûrede l'issue
que pourraient avoir les pièges qu'il; tendait
à une pauvre fille..,, vous doutiez encore dé'
sa victoire... vous avez voulu vous assurer
paf vous-même du succès de votre complot
commun!.. f
La marquise fit un geste qui était à la
fois une dénégation et une Supplication.
— Oh ! ne cherchez pas à nier, Madame...
M. le comte de Morvilliers a su que je n'étais
point partie pour la Vendée; il a su qu'entre
mille retraites que je pouvais choisir, c'é
tait celle-ci à laquelle je m'étais arrêtée sur ■
votre propre indication, Madame ; il n'a pu
le savoir que parce que vous le lui avez ait
ou parce que vous lui avez laissé voir ma
lettre... ma lettre que j'avais confiée à votre -
loyauté et à votre foi comme un dernier sa
lut ! Cette lettre, vous ne la lui avez pas seule
ment laissé voir, vous la lui avez livrée !.. car
M. de Morvilliers m'a avoué ici même qu'il
l'avait reprise et brûlée, que mon oncle ne
viendrait pas, et qu'ainsi, par une entente
abominable, par une indigne trahison que
confessent votre trouble et votre pâleur,
j'étais abandonnée, sans protection, sansap-
pui, sans espoir, aux fantaisies'et aux dis
tractions du dernier rejeton de la famille ds
Morvilliers. Ne faut-il pas, comme dit M. le
vicomte de Fçnestrauge; que jeunesse se
passe? -
— Louise, ne croyez pas... balbutia la
marquise.
— Ecoutez-moi, Madame... Je suis orphe- -
line, reprit Louise, et je n'ai jamais connu
ma famille ; ainsi Dieu lui-même m'avait
mise sous la sauvegarde de tous lès senti-
mens de pitié et de générosité instinctives
qu 'il ne permet pas mêmeà l'humanité la
plus dégradée d'oublier jamais!... Un bon
curé se chargea de moi!... Il n'avait pas
cru devoir me confier/à de meilleures, à
de plus honorables màins.qa'à celles de la
marquise de" Morvilliers L. Mme de Morvil-
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