Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-05-19
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 19 mai 1852 19 mai 1852
Description : 1852/05/19 (Numéro 140). 1852/05/19 (Numéro 140).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 140.
' BUREAUX : rite déTaM* (Pnlalï-RoyalJjBn 1 to:
B 1852.— MERCREDI 19 MAI.
VEUX Oïl VA5QWJïES3£Ktf|
PARIS 1S F. PAS TKIitESTai.
ÉPARTEMENS. 16 F. —
UN NUMÉRO 90 CENTIMES.
' voua les pats étrangers , se reporter
aa tableau qui sera publié dans le journiV
les 10 et as de dljaque mois]
Les abcnntmeiis datent des 1»' et 1$
de chaque mot'fj 4
9
S'adresser, franco, pour la rédaction, à M. CtiCHEVAt-CURteriT, rédacteur en chef.
Les articles déposés ne sont pas rondos]
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
I
1,
Ois'ahraa, dan» Ut département, auzlMmageries et aux Direction$ de poste. — A Londres, tken MM. C owie et fils.
— A Strasbourg, chez M. A iexandb», mur l'Allemagne^
j v S'adresser', franco? pour l'administration, à M. D enain, directeur'. .
I I<çi annonces sont reçues an bureau du journal ; etîchei M. PANIS, régisseur, 10, place do l|
PAR1&, 18 MAI.
* ■ !
le fibre-échange «t to priacipes de 89.
Nous avions dit aux libre-échangistes : Du
moment où vous reconnaissez que le système
protecteur a produit des résultats excellens,
qu'il a enrichi les peuples, qu'il a contribué
puissamment aux progrès de la civilisation
vous ruinez vous-même la science économi
que qui sert de base à votre théorie du Iibre-
Miauge. Il ne reste plus rien de toutes ces
démonstrations mathématiques par lesqud
les vous prétendiez établir que le système pro
lecteur était nécessairement une cause d a-
pàuvrissemeht* de ruine et de misère pour
les pays qui l'appliquent. Cessez donc
de nous parler d'une, science qui, dé votre
aveu, a reçu le démenti le plus éclatant de la
pratique ; laissezrla dans, les livres et n en
importunez plus les gouvernemens.
Le Journal des Débats a suivi nos conseils.
11 n'invoque plus les principes de l'école éco
nomique , il n'entreprend même plus de les
défendre : c'est sous l'invocatien des grands
principes proclamés en 89 qu'il place main
tenant le libre-échange. Ainsi, à L'en croire, la
■protection a été bonne autrefois, comme
l'esclavage. qui substitua le commerce des
hommes à l'anthropophagie, comme le
servage qui remplaça l'esclavage par une
condition plus douce, et qui rend encore,
de grands services en Russie, comme le
régime des maîtrises et des jurandes qui;
fut lui-même un progrès sur.le régime pré
cédent; mais elle doit disparaître comme
toutes ces institutions semi-sauvages et féo
dales, parce qu'elle est en contradiction fla
grante avec les grands principes de 89. con-,
sacrés par laConstitution .de 185-2. En .effet,
la protection viole l'égalité devant la loi, elle
•est contraire â la liberté civile, elle constitue
un privilège payé par la société. — Qui se se
rait jamais douté que la protection fût un
attentat si abominable contre tous nos
droits!
La protection viole l'égalité devant la loi !
En vérité, nous ne comprenons plus. Est-ce
que tous les Français ne sont pas égaux de-;
vaut toutes les lois commerciales, comme
devant les lois civiles et politiques? Est-ce
que tous, sous les mêmes conditions, ne peu^
vent pas se livrer à l'iudustric, au commer-:
ce, à la production de la richesse? Comment
l'égalité devant la loi peut-elle être atteinte
par des règlemens qui laissent à chacun les
aiêmes facultés et imposent les mêmes res
trictions? On aurait bien dû prendre la peine
de nous l'expliquer.
11 est vrai qu'on parle de redevances qu$
la société paierait aux industries protégées.
Ne semblerait-il pas que nos agriculteurs*
nos manufacturiers, nos producteurs sont
armés et organisés en guerre, qu'ils tien
nent la lance sur la gorge du pays ! Les so
cialistes ne s'exprimeraient pas autrement.
Est-ce quepdepuis' 4789r le système de la
la protection n'a pas subi toutes les épreu
ves de la discussion et du vote? Est-ce que
l'Assemblée constituante, la Convention, le
Directoire, l'Empire, la Restauration, le
gouvernement de Juillet, la République de
4848 n'ont pas successivement adopté, main
tenu ce système ? Quoi! parnptant de gou
vernemens tous se sont laissé Violenter ou
ont violenté la nation ! Quoi ! parmi tant
d'assemblées aucune n'a exprimé la volonté
et l'intérêt du pays! Cela n'est pas soutena-
ble; Nous avons vu,depuis soixante ans,tou
tes les formes essayées ; tous les principes
politiques appliqués, abandonnés ou repris
pour être délaissés encore ; tous les gou
vernemens renversés les uns sur les autres 1 ;
ia protection est restée debout au milieu de
ces secousses, de ces révolutions* de ces rui
nes; et en présence de la consécration qu'elle
a reçue de tous les régimes, vous vous écriez :
« On nous opprime, on nous violente, on
nous exploite! » Etonnez-vous donc, après
cela, que la société ne vous écoute pas, et
vous laisse crier :dans le désert !
Ce qu'il importe dé remarquer, c'est que,
si depuis soixante ans, tous les gouverne
mens ont abouti au maintien de la protec
tion, tous, ne l'ont pas fait avec une égalé
spontanéité. L'Empire et la Restauration, il
est jrai » furent résolument protecteurs;
mais, personne ne l'ignore, la politique du
chef de aotre dernier gouvernement monar
chique avait des tendances vers les théories
opposées. Par intermittences, ces tendances
se manifestaient dans les projets de l'admi
nistration : tantôtVétait la négociation an
noncée d'un nouveau traité de 1786 avec l'An
gleterre: tentât la suppression de nos douanes
sur la frontière belge; tantôt des remaniemens
de tarifs au profit de l'industrie étrangère,
tantôt des, refus de protection à des indus
trie;; naissantes, entre autres à nos filatures
de chanvre et de lin. Ces tentatives semèrent
1 inquiétude, et il est permis de croire qu'elles
ont ete pour quelque chose dans l'isolement
ous esttrouvé le pouvoir en 1848.Quoi qu'il en
soit, certes, si jamais la partie fut belle pour le
libre-échange, ce fut dans les huit dernières
années de ce règne. Il occupait les chaires
publiques. Il avait obtenu l'autorisation
d'ouvrir dans les quartièrs populeux, au
centre d« Paris, des clubs économiques- où
il se livrait aux prédications les plus vi
rulentes contre notre législation économi
que. Il se multipliait par les livres, parles
brochures, par les journaux, par les publi
cations de toute espèce. Il possédait les pré
férences peu dissimulées du gouvernement,
qui l'encourageait a être fer t. Il avait enfin,
pour couronner tant d'avantages, le crédit,
l'ascendant, la diplomatie* la vigilance et
l'habileté de l'Angleterre. Si le libré-échange
représentait réellement l'intérêt général,
comme il le prétendait, le moment de
son triomphe était venu. Disposant de
tant de puissance, maître de tant de po
sitions , appuyé sur tant de forces ma
térielles et morales, ralliant autour de lui
les 36 millions de consommateurs qu'il*mon-
trait tous les jours exploités, opprimés, af
famés, il allait avoir bien vite raison de
cettepetite poignée de hobereaux industriels,
de tette féodalité nouvelle du marteau et
du coton! Qu'advint-il cependant? Ce vaste,
développement de moyens échoua contre
le bon sens public. Le libre-échange se rui
na lui-même par l'effet de sa propre discus
sion. Il ^marcha d'éehecs en échecs ; il fut
réduit à se désavouer, et, convaincu d'im
puissance, il tomba dans le discrédit.
Que conclure de là, sinon que la pro
tection ne blesse nullement cette égalité de
vant la loi sur laquelle on est si susceptible
dans notre pays. La France a choisi libre
ment et a librement conservé la législation
économique qui nous régit» S'entêter à re
garder comme un débris des institutions
eodales un système qui a survécu à tous les
gouvernémens * à toutes les assemblées, à
tous les modes d'élection, c'est vouloir fer
mer les yeux à la lumière* c'est vouloir res
ter sous l'empire des illusions.
Est-il besoin- d'ajouter que la protection
ne viole pus plus la liberté civile que l'éga-
ité devant la loi? L'échange fût-il un droit
naturel, comme on l'affirme, il ne s'en sui
vrait pas pour cela que la société ne pour
rait pas en restreindre l'usage. Tout citoyen,
)ar cela seul qu'il fait partie d'une nation
civilisée, doit consentir à subordonner
'exercice de ses droits et de ses facultés
aux règles de l'intérêt social. Cela' est
vrai pour toutes les manifestations de la
volonté humaine. Ainsi les lois qui régis
sent l'échange ont le même caractère que
celles qui régissent la propriété, la liberté
individuelle, la^erté de la presse, etc., etc.
Sans doute,-il n^faut pas, comme le socia
lisme j confisquer l'individu au profit de
la soeiété ; mais il ne faut pas davantage,
comme l'école du libre-échange, confisquer
la société au profit de l'individu. Comment
ls Journal des Débats peut-il réclamer, en
matière de commerce; cette liberté illimitée
qu'il repousse en matière de presse, d'asso
ciation, etc.? S'il y a inconséquence, c'est
évidemment de son côté.
Mais le système protecteur crée des privi
lèges. Des privilèges pour qui ? Vous seriez
vraiment bien embarrassés de aous le dire.
Est-ce que toutes les branches de la produc
tion ne sont pas également accessibles à tous
les citoyens ? Sansdoule la société croitdevoir
protéger plus ou moins telle ou telle indus
trie, selon qu'elle est plus ou moins faible,
selon qu'elle est plus on moins en me
sure de résister à la concurrence étran
gère. Qu'en résulte-t-il? Est-ce qu'une in
dustrie , protégée ou non, peut donner
de plus grands bénéfices que les autres, sans
gu'aiissiiôt la concurrence intérieure vienne
les réduire au taux normal? Il n'y a donc
ni privilège , ni monopole , ni dîme , ni
exaction. Ce sont des mots qu'il serait de
bon goût de ne plus employer dans de
semblables discussions. Si l'on veuty mettre
un p»u de benne foi, on reconnaîtra que la
. protection n'a pas été imaginée et ne s'exerce
pas en vue d'établissemens particuliers,
qu'elle est dans le droit général, dans le droit
commun, et qu'elle n'a d'autre principe que
l'intérêt même du pays qu'elle féconde et
qu'elle enrichit en le dotant de nouveaux
moyens de travail. .
Reste le grand, l'éternel argument des li
bre-échangistes la protection sacrifie le
consommateur. N'avons-nouspas déjà mon
tré que cet argument repose sur une confu
sion de mots et d'idées? Production et con
sommation, on ùe saurait trop Je redire,
sont deux états cûexistans dans l'individu so
cial; tout producteur est consommateur ;
tout consommateur est producteur. Une fa
mille qui n'aurait pas dans son sein l'un des
élémens de la production; le capital actif,
l'intelligence, l'industrie, les bras ou la
terre, serait bientôt condamnée à mourir de
faim du à vivre aux dépens de la charité pu
blique. Nous ne consommons qu'en propor
tion de ce que nous produisons d'une ma
nière ou d'une autre. La consommation est
subordonnée à la prospérité de la produc
tion, comme les effets sont proportionnés
aux causes. Or, puisque produire ét consom
mer se tiennent, tout système qui favorise
le travail national, développe par cela même
la consommation nationale. L'histoire des
peuples le prouve d'une manière surabon
dante.
On voit, eh résumé, que les principes de
89, les principes de liberté civile et d'égalité
devant la loi, ne sont nullement intéressés
dans le débat engagé entre le système pro
tecteur et le libre-échange. C'est d'ailleurs ce
qui ressort d'une manière évidente de tous
les écrits des hommes les plus remarquables
qui ont préparé cette grande oêuvre de régé
nération, ou qui ont été appelés à y prendre
part. Nous nous sommes déjà appuyés, dans
cette polémique, sur l'autorité de Montes
quieu. Nous complétons la citation que nous
lui avons empruntée : « La liberté du
commerce* dit-il dans son Esprit des Lois j
n'est pas une faculté accordée aux négocians
de faire ce qu'ils veulent, ce serait bien plu
tôt sa servitude . Ce qui gêne le négociant,
ne gêne pas le commerce. C'est dans les pays
de liberté que le négociant trouve des contra
dictions sans nombre; et il n'est jamais \
moins croisé par les lois que dans lés pays de
servitude . » Voilà ce que pensait le génie le
plus éminent de notre pays, celui dont les
législateurs de 89 n'étaient que les disci
ples. Nous pouvons également invoquer
['opinion de l'homme qui fut à la fois le
finaatier populaire et l'économiste orga
nisateur de cette époque. Necker, écrivant
l'Eloge de Colbert eu-présence des premières
manifestations de l'école du laisser-faire, fé
licitait le grand ministre de Louis XIV de
s'être toujours inspiré de l'élude des faits
plutôt que de maximes abstraites, et il ajou-,
tait : « Quoi de plus facile que de gouverner
le monde avec un* seul principe, la liberté
parfaite ! Cela ne donne pas la moindre
peine. On dit à l'intérêt personnel et à
l'ignorance : je me fie à vous. S'ils heur
tent, s'ils fracassent en route, on ne s'en in
quiète pas. On demande un ou deux siècles
pour en voir l'effet. Si la société bouleversée
se refuse à poursuivre cette expérience, on
l'accuse d'impatience, elle seule devient cou
pable, et le principe garde encore sa gloire
et ses prétentions ! » Ne dirait-on pas que
ces lignes aient été écrites hier !
Cessez donc de vous mettre sous l'inyoca-
tion de 1789 ; datez plutôt de 1786. Cette
date, qui marque un des. plus cruels désas
tres de l'industrie française, vous appartient ;
car elle rappelle la première application de
vos doctrines en France. j. buiut.
. — .IX. ■ . . :
->* ....
On lit dans le-Moniteur*. ' ~
« Des journaux ont paru s'étonner que le
gouvernement n'ait pas permis de publier la
lettre écrite par M. le comte de Chambord
aux légitimistes pour leur conseiller le re
fus du serment, Le gouvernement n'avait
aucun intérêt à empêcher cette publication.
S'il n'eût' obéi 1 à des considérations d'un
ordre supérieur, il se serait empressé de
Adonner à ces documens une publicité qui ne
pouvait lui être qu'avantageuse ; mais, au-
dessus de l'intérêt particulier, il y a le respect
de la Constitution et du principe sur lequel
elle repose. Le gouvernement ne saurait au
toriser la publication d'une lettre qui con
seille de refuser le serment exigé par la
Constitution, en s'appuyant sur un principe
essentiellement contraire à celui de la souve
raineté nationale. ( Communiqué.)
Le conseil d'Etat est saisi, depuis quelques
jours, d'un projet de loi sur les douanes.
On cite, parmi les dispositions principales,
celle qui affranchit les matières premières
employées dans les constructions maritimes,
et celle qui lève la prohibition sur les pote
ries. Cette proposition soulève des questions
importantes que nous examinerons avec
SOin. J. DURAT.
Les pouvoirs du président actuel des Etats-
Unis expirent le 4 mars 1853. G'est au mois
de novembre de cette année que l'élection
de son successeur aura lieu, et c'est dans
.le courant de juillet au plus tard que les
partis feront choix de leur candidat.
Toutes les questions politiques perdent de
leur importance à l'approche de cette épreu
ve décisive ; elles s'effacent toutes devant les
combinaisons qui peuvent assurer le triom
phe du candidat adopté par chaque parti.
Les démocrates des Etats-Unis hésitent en
tre trois personnes : le général Cass, M. Bu-
chanan, ancien ministre des affaires étran
gères dé M. Polk, et un magistrat, M. Dou-
glass, qui a pour lui les sympathies des
Etats à esclaves. Le général Cass a d'ardens
amis dans les Etats du Nord, mais il a con
tre lui l'insistance avec laquelle il a poussé à
plusieurs reprises les Etats-Unis à intervenir
dans les querelles du vieux monde. Si les idées
et les motions de M. Cass avaient été adop
tées, les Etats-Unis seraient aujourd'hui en
guerre avec trois ou quatre des puissances
européennes. Aucun des trois candidats dé
mocrates ne se recommande d'ailleurs par
des services éminens,ni par l'éclat du talent :
tous les trois sont des hommes extrêmement
médiocres.
Le parti whig est en ce moment au pou
voir. L'immensepopularité du généralTaylor
a valu, en 1848, auparti qui avait su le choisir
pour candidat un facile triomphe. Les whigs.
en demeurant unis, pouvaient compter sur
uite nouvelle tlctoire; mais leurs divisions ren
dent aujourd'hui fort incertaine l'issue de la
prochaine lutte. Ils s'étaientsi bien trouvés en
1S48 d'avoir fait choix d'un général que leurs
regards se sont portés tout d'abord sur le
conquérant du Mexique; Le général Scott est
un officier distingué, qui a déployé dans la
guetre du Mexique de grandes qualités mili
taires, et qui s'est montré sous ce rapport
fort supérieur au généralTaylor; mais il n'a
pas lés qualités toutes, personnelles qui
avaient gagné à ce vieux soldat l'affection
du peuple américain. Le général Taylor
semblait un vieux Romain, quelque Cu-
rius ou quelque Gincinnatus ressuscité
dans les forêts du Nouveau - Monde : sa
simplicité, sa franchise, ses manières ou
vertes, la mâle concision de son langage
et son héroïque bravoure lui avaient con
quis tous les cœurs. Le général Scett est
Un excellent officier , sachant admirable
ment sOn iiiétier, filais ufl peu Vantard* pro
digue de paroles, de dépêches et de procla
mations, se donnant volontiers des airs d'A
chille et d'Alexandre. Ses amis les plus zélés
reconnaissent en outre qu'il n'a m les con
naissances ni les aptitudes qu'on doit cher
cher chez un chef de gouvernement ; et ils
ne peuvent invoquer en sa faveur que ses
victoires.
Tel est pourtant sur les démocraties l'as
cendant delagloire militaire, que le général
Scott aurait eu de grandes chances d'être
élu, sans les fautes de ses amis. L'initiative
de la candidature, du général appartient à cette
portion des|\vhigsduNord qui esUnfectée des
doctrine abolitionistes. L'appui des free-sei-
lers, ainsi qu'on les nomme, a fait faire un
chemin rapide à cette candidature; mais, dans
l'enivrement du succès, les partisans du gé
néral n'ont pas tardé à laisser voir qu'ils
comptaient faire tourner son triomphe au
profit de leurs doctrines particulière», et ins
taller , grâce à lui, l'abolifionisipe - au
pouvoir. On comprend quelles aîsraies
ûv telles intentions ont dû exciter au seifl
des Etats à esclaves : et les progrès de la
candidature de M. Scott se sont arrêtés à fa
limite qui sépare le Sud duNordde l'Union.
Néanmoins, quelles que fussent les justes dé
fiances des whigs du Sud, la nécessité'-de de
meurer unis était si bien comprise de tous,
qu'une tentative de conciliation eut lieu.
On convoqua à une réunion tous les mem
bres du congrès appartenant au parti whig.
La présidence de cette réunion fut déférée
à un sénateur influent, M. Mangum, ami
particulier du général Scott. L'objet de
la réunion était d'arrêter les préliminai-!
res d'une convention de délégués à laquelle
serait remis le choix du candidat définitif du
parti. Un sénateur du Sud, au nom de tous
ses collègues, demanda qu'il fût expressément
déclaré que le maintien du compromis de
1850 était une condition indispensable pour
obtenir l'appui des whigs. M. AJangum, qui
avait déclare que le général Scott lui parais
sait avoir seul des chances sérieuses de suc
cès, se refusa à metlre cette proposition ;
aux voix, sous prétexte qu'elle n'était pas à
l'ordre du jour. Les sénateurs et les députés
du Sud s'écrièrent que cette objection n'avait
d'autre but que d'éviter de compromettre le
général S"Ott vis-à-vis des free-soilers, seuls
adversaires du compromis de -1880; et ils se,
retirèrent en masse de la réunion.
Ils ont exposé depuis, dans un manifeste,
les motifs de leur résolution. Le compromis
de 1850, disent-ils, a terminé par des con
cessions réciproques une lutte dans laquelle ■
l'agression était venue des Etats du Nord.
Les hommes du Sud, qui avaient le bon
droit de leur côté, se soat résignés à des sa
crifices, plutôt que de mettre en péril le
maintien de la confédération. Mais ils n'ont
consenti à ces sacrifices que sous la condition
que le compromis ne serait plusmisenques-
tion,qu'il serait accepté de part et d'autre com
me un règlement définitif de la querelle, et
qu'aucune tentative ne serait faite pour reve
nir sur aucune des cinq lois votées par le con
grès. Refuser de prendre pour programme le
maintien du compromis, c'est entretenir les
espérances hautement avouées des abolitio
nistes, c'est délier de leurs obligations les
états du Sud, c'est compromettre de nou
veau l'existence de la confédération. Com
me Américains désireux de voir subsister
l 'union de tous les Etats, comme citoyens
du Sud, obligés'de défendre leurs droits et
leurs propriétés, les représentons du Sud
déclarent ne pouvoir donner leurs suffrages
qu'à un homme dont la fidélité au compro
mis de 1850 ne sera pas douteuse.
Ce manifeste a eu un grand retentissement
aux Etats-Unis et a paru porter un coup mor
tel à la candidature du général Scott. En vain
Où a Annoncé que le général allait publier
une déclaration formelle en faveur du com
promis; aucune démarche de sa part ne ra
chètera les imprudentes démonstrations de
ses amis, et ne rendra confiance aux hommes
du Sud. Le général ne peut être désormais
le candidat que d'une fraction du parti whig,
et Ce fie serait pas trop des forces du parti
tout entier pouf le faire triompher. Les
regards se portent donc, aujourd'hui sur M.
Webster et sur M. Fillmore. Tant que M.
Clay est resté en lice, M. Webster est demeu
ré forcément sur le second plan ; depuis la
retraite du sage d'Ashland, comme on ap
pelle M. Clay, M. Webater est incontesta
blement l'homme éminent du parti whig.
Personne ne conteste son experience des
affaires , sa haute capacité, son éloquence ;
peut-être M. Webster serait-il aujourd'hui
le candidat préféré du parti whig, s'il
n'avait montré trop d'envie de le devenir,
s'il ile s'était compromis gratuitement dans
un banqueten l'honneur deM.Kossuth, et si
le Sud ne lui gardait rancune de quelques
vieux discours. Toutefois, les chances de M.
Webster deviendraient sérieuses si M. Fill
more se désistait de sa candidature en sa
faveur.
Le président actuel s'est montré un ad
ministrateur modeste, assidu et capable. Il
s'est honoré. aux yeux de l'Europe par le
soin scrupuleux avec lequel il a rempli vis-
à-vis du Mexique et de Cuba les obliga
tions internationales dont lès Américains
se montrent habituellement trop peu sou
cieux. Il a acquis dans les Etats du Sud aux
quels il était inconnu,une juste popularité par
lafermeté et ia loyauté aveclesquelles il a fait
exécuter le compromis, au risque de se sé
parer de la plupart de ses amis du Nord. Il
n'est donc pas surprenant que la majorité
des whigs du Sud incline à la réélection
de M. Fillmure , et plusieurs législatures
d'Etatsse sontprononcées formellement dans
ce sens. M. Fillmore persistera-t-il dans la
résolution qu'on lui prête de refuser une
réélection, ou acceptera-t-il dans l'inlér
son parti le renouvellement de son manda
G'est ce qu'un avenir prochain ne peut man
quer de nous apprendre:
X » CUCIIE V AL- CLA.RIGK Y.
La commission pour l'examen du projet
de loi portant modification des articles S, 6
et 7 du Code d'instruction criminelle relatifs
aux crimes et délits commis en pays étran
gers, est ainsi composée : MM. Laffitte (Char
les), Riche, O'Quin, de La Haichois, Duboys,
de Beauverger, Vernier. '
La grande affaife d'Egypte paraît définiti
vement terminée. La nouvelle d'un arrange
ment conclu au Caire, le 20 avril, entre Ab-
bas-Pacha et Fuad-Effendi, chargé des pleins
pouvoirs du divan impérial, est arrive le.%
de ce mois à Constantinople. Toutefois, la
Porte n'a reçu ses dépêches officielles que le.
6, jour du départ du dernier courrier, le doc
teur Servicen,â qui Fuad-Effendilesavait con
fiées avec ordre de les remettre au grand visir
en personne, ayant dû subir une quarantaine
d'observation de quelques jours aux Darda
nelles. Toutes les lettres particulières s'accor
dent à dire, que d'après cet arrangement, qui
doit naturellement être soumis a la ratifica
tion du sultan, Abbas-Pacha accepte le tan-
zimat dans toute sa teneur, sauf en ce qui
concerne le droit de vie ou de mort, qui est
prorogé tel qu'il existait jusqu'ici en Egypte,
encore pour sept ans. Ce point étant p^ir le fait
I'uniquesujetde discussionentre les deux pays
à propos de l'adoption du tanzimaf, a dû être
tranché tout d'abord,-et Fuad-Effendi ; con
vaincu de la justesse des motifs allègues par
le vice-roi à l'appui de ses prétentions, a mis
fin, en cédant, a tout débat ultérieur.
On prétend que le consul d'Angleterre a
fortement appuyé Abbas-Pacha, dans le cou
rant des négociations; qu'il avait même hau
tement déclaré que son gouvernement ver
rait avec beaucoup de peine qu'on marchan
dât plus long-temps au vice-roi la concession
qu'il demandait uniquement dans l'intérêt
de la sûreté des étrangers.
Fuad-Effendi n'avait pas encore abordé le
chapitre relatif aux différends existans entre
Abbas-Pacha et les autres membres de la fa
mille de feu Mehemet-Ali-Pacha. On suppo
sait généralement au Caire que cette négo
ciation ne donnerait lieu à aucune difficulté
sérieuse, £t qu'Abbas-Pacha, satisfait de ce
qu'il avait obtenu, s'efforcerait de se mon
trer facile sur tout le reste.
Une très grande agitation régnait depuis
quelques jours, à la Porte, à l'occasion de la
ferme des douanes. Lefermier actuel, M. Dgé-
zaerli, prétextant des pertes considérabl; -, ,
avait demandé une diminution de sept mê
lions de piastres sur le prix de son bail, ou
la résiliation de son contrat. L'affaire ayant
été soumise au conseil, la réduction avait
des chances d'être accordée, lorsqu'une
nouvelle compagnie , composée de six des
plus riches banquiers arméniens de Cons
tantinople , et ayant à sa tête Moustafa-
Nouri-Pacha, ancien favori du sultan Maii-
naoud* s'est présentée, en effrant non-seule
ment de continuer le marché du fermier ac
tuel, mais encore de donner 6 millions de
plus. Cette proposition, d'autant plus avan
tageuse pour le trésor, que la compagnie
offre des garanties incontestables de solva- '
bilité, a néanmoins trouvé une violente op
position su sein du conseil, et ce cfui a
surtout surpris tout le monde, c'a été de
voir le ministre des finances en faire par
tie. Quant au grand-visir, qui porte beau
coup d'intérêt à M. Dgézaerli, il a hau
tement et loyalement déclaré qu'il se pou
vait pas appuyer ses prétentions, du mo
ment que d'autres propositions plus avanta
geuses à l'Etat avaient été faites. L'affaire
toutefois n'était pas encore décidée; mais on
pensait que nonobstant la protection du
ministre des finances, elle se terminerait en
faveur de la nouvelle compagnie.
Après avoir, en quelque sorte, engagé
l'ambassade deFranceàfairevenirà Constan
tinople le vaisseau à vapeur à hélice le
Charlemagne , la Porte, cédant aux instiga
tions de sir Stratford Canning, s'est tout-à-
coup ravisée, et a déclaré qu'elle ne pouvait,,
sans contrevenir aux traités, autoriser ce
vaisseau à passer les Dardanelles. Notre char
gé d'affaires s'est abstenu d'entrer en dis
cussion à ce sujet et s'est borné à de
mander communication officielle de cette
décision, afin de la transmettre à son
gouvernement. Les choses en étaient là
lorsque par le paquebot du 2 est arrivé un
lieutenant de vaisseau, M. Coriolis, que le
commandant du Charlemagne a envoyé à
Constantinople pour savoir enfin s'il devait
s'en retourner ou continuer sa route sur la
capitale. L'arrivée de cet officier a paru faire
quelque impression à la Porte, et l'on a fait
prévenir le chargé d'affaires que l'on allait
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL, 19 MAI.
SALON.
VI.
Pvkttob *bb «bnbb. MM. Ed. Frère, Vignori,
Gcirnaert, H. Schefler, Vanschéndel, Lepoittevin,
T. Johannot, Traycr, Baron, Aug. Delacroix, Biard,
Tlédouin, Haffner, Luminais, Verdier, Penguilly,
De^illy, Boissar'd, ■
La peinture de genre -est d'invention mo
derne. L'antiquité ne l'a pas connue, au
moins co'i me spécialité; elle ne s'y montre
que comme, un accident très subordonné.
L'art, à son origine, croirait déroger en s'ap-
pliquant aux événemens et aux objets vul
gaires de la vie domestique: il n'y songe même
pas. Dans les temps modernes même,le Genre
n'a commencé à se faireune place à part dans
les diverses écoles qu'à l'époque de leur déclin.
Dans une seule, il a régné presque sans par
tage, et y a atteint son plus haut degré de
développement : c'est l'école hollandaise, ou
plutôt des Pays-Bas, qui se trouve la dernière
en date dans l'évolution chronologique et es
thétique de l'art. Comme expression des
mœurs et de l'état social, le Genre semble,
dans l'art, répondre à l'élément bourgeois,
devenu prédominant dans les sociétés nou
velles. Il en reproduit l'esprit et enquelque
sorte l'idéal, comme en littérature le roman,
il s 'assortit encore aux classes moyennes au
point de .vue matériel, par les proportions
raodestës âe l'es produits, qui trouvent aisé
ment une place dans le salon, le cabinet, la
chambre à coucher, la salle à manger de la
petite maison ou de l'appartement bour-
geois. La peinture, et' l'art en général, ont
successivement changé de demeure en mê
me, temps que d'objet et de principe : d'a
bord dans les temples avec les dieux,, puis
dans les palais avec les rois et les grands, en
dernier lieu dans les maiions privées avec
les ^impies citadins. Ces rapports ne sont
pas arbitraires. Pour peu qu'on y pense, on
verra qu'ils sont essentiels et déterminés par,
la marche parallèle de l'art, de la civilisation
et de la fortune publique.
En Francs, la peinture de Genre n'a pas
eu beaucoup de développement. Dans ce
pays, l'art a suivi le ton donné par l'Italie.
En outre, l'esprit du catholicisme d'une part,
et de l'autre celui de la monarchie, toujours
si prépondérans dans la nation, paraissent
peu favorables à cette forme particulière de
la peinture. Ce n'est du moins que dans des
pays protestans et à institutions communales,
qu'elle s'est propagée avec la spontanéité fé
conde d'une plante indigène. Partout ail
leurs le Genre n'â été cultivé qu'accessoi
rement ; nulle part il n'a forme le carac
tère dominant et distinctif d'une école. En
France, ce n'est que dans la dernière
moitié du siècle passé, qu'on voit paraî
tre quelques noms de peintres de Genre,
mais si clairsemés encore, que c'est à peine si
l'on en a retenu trois ou quatre. Sous lo règne
tout héroïque de David, très peu osèrent se
montrer et ils n'ont laissé aucune renom
mée. Et encore faut-il observer qne, parmi
le très petit nombre d'artistes qui, durant
•près de trois siècles, se sont essayés dans
la représentation des sujets familiers du
Genre, la plupart y ont apporté un goût et
ûn style empruntés à l'imaginatitn et à
l'histoire , de sorte qu'il en reste à peine
trois ou quatre, tels que Chardin, les frè
res Lenain, Casanova, qui les aient traités
dans l'esprit de l'école hollandaise.
De notre temps, grâce au large ecelectisme
qui a ouvert pour ainsi dire toutes les por
tes de l'art, le Genre a pris, ainsi que son
annexe obligé, le Paysage, une extension
remarquable, et c'est peut-être cette spé
cialité qui fournit le plus de talens et les
. talens les plus forts. Cependant l'influence
de l'esprit national et des habitudes tra
ditionnelles se fait encore sentir dans
l'ensemble des productions de cet ordre. Le
Genre n'est en grande partie, dans notre
école, qu'un diminutif de l'Histoire ou du
Drame. Si l'on excepte les scènes militaires,
et les rares tableaux de nature morte, presque
toutes les œuvres, qui, par le style etle carac
tère plus ou moins familier du sujet, se ratta
chent au Genre, s'en écartent néanmoins, soit
par l'intention dramatique ou sentimentale,
soit par une sorte d'idéal romanesque et fan
taisiste; ce qui les classerait dans une caté
gorie à part, à laquelle nous ne nous char?
geons pas de trouver jun nom. Il en est un
bon nombre qui, par l'ensemble des élémens
extérieurs, composant- ce qu'on appelle le
Costume, sont des vues rétrospectives d'un
passé plus ou moins éloigné (de l'époque ré
gence principalement), ou, ce qui revient à
peu près au même pour l'imagination, des
peintures de mœurs étrangères, des récits de
voyageur. Il n'en est presqu'aucune qui soit
prise dans le vif de la réalité contemporaine.
Il en est des modes d'exécution comme des
sujets, ils sont très arbitraires,et empruntés,
suivant la fantaisie ou la prédisposition du
goût de. l'artiste, à quelque maître mort ou vi
vant, choisi de préférence parmi les coloris
tes. Watteàu est particulièrement en vogue;
d'autres préfèrent Chardin; un certain nombre
s'attachent naturellement aux Hollandais.
Mais Decamps, Delacroix et Diaz, plus ou
moins heureusement fusionnés, fournissent
, la plus large part. Les manières originales
. sont, on le pense bien, d'autant plus rares
qu'elles sont plus recherchées.Nous avons der
nièrement trié, à ce titre,—et toutefois avec
lesrestrictions convenables,—-les quatre noms
de MM. Meissonnier, Bonvin, Armand Leleux
et Courbet. Il n'est pas sûr que la revue que
nous allons faire des autres peintres de Gente
nous autorise à en ajouter un cinquième.
Il en est un cependant que nous serionsbien
tenté d'inscrire, au moins par intérim : c'est
celui de M. Pierre-Edouard Frère, pour ses
deux charmans tableaux d'mtérieur (le Ton
nelier et le Chapelet), éclairés et composés à
la façon d'Ostade, mais sans pastiche, fine
ment et grassement peints , très doux à
l'œil, quoique piquans d'effet, surtout le
premier. Je n'y reprendrais qu'une certaine
mollesse générale de touche qui affadit un
peu l'esprit du dessin, et, en outre, les figu
res manquent de relief, et se détachent mal
du fond. Le tonnelier, excellent de geste,
n'a pas de corps; il paraît une ombre portée
sur lë mur ; Ces deux petites toiles, ainsi
qu'une troisième, intitulée Etude, re
présentant également un intérieur, sont
de celles qui peuvent prétendre à une place
dans un cabinet d'amateur, et qui survivent
à l'impression, si souvent éphémère, d'un Sa
lon. M. Frère à un élève, ou du moins un
imitateur fort exact. L'Heure' de Rêverie, la
Laveuse de vaisselle et l'Intérieur de M. Vi-
gnôn pourraient lui être attribués sans lui
faire trop de tort, quoique l'exécution soit un
peusèche, etle caractèredes figures d'un goût
un peu commun.
Parmi les morceaux de peinture de Genre
traités plus ou moins sciemment à la manière
hollandaise, on doit mentionner, avec l'estime
due à un travail consciencieux, à une bonne
intention et à un talent incontestable, la Li
quidation d'une Succession, œuvre d'un ar
tiste belge, dont le nom paraît, si je ne me
trompe, pour la première fois sur nos Li
vrets, M. Geirnaert. C'est une scène compo
sée à la Wilkie, exécutée à la Metzu. On trou
ve dans ce tableau un peu de tout ce qui dis
tingue ces deux maîtres, la clarté de la dis
position scénique, la recherche du carac
tère individuel des personnages, la vérité
de l'expression des sentimens et des passions
par le geste et le jeu de la physionomie, la
variété piquante des tons, la fraîcheur du.
coloris, la suavité du clair-obscur; mais tou
tes ces qualités y sont mêlées à doses si fai
bles, que le composé n'a presque plus de sa
veur. C'est comme un vin généreux étendu
d'eau. Or, nous disons, puisque le feuilleton
est tenu maintenant de parler latin, que c'est
un crime,ermen est, de tuer le Chambertin,
jugulare Falernum. Ceci entendu , il n'y a
plus que des éloges à donner à M. Geir
naert. Sa composition est intéressante et
agréable. Elle plaira sûrement à ceux qui,
heureusement pour eux, n'ont pas la mémoi
re meublée de tableaux. L'expérience en ceci,
comme dans la vie, est, au fond, peut-être
plus nuisible qu'utile; pour un mal réel
qu'elle évite, elle intercepte cent joufssanCes
innocentes.
Les peintres des ci-devant Pays-Bas se sont
mis en tête de refaire l'école du XVIl"' siècle.
Ils supposent que l'esprit des vieux maîtres,
par une opération de métempsychose, apas-
sé en eux avec la chair et le sang. L'un se
croit Ostade, un autre Ruysdaël, celui-ci
Mieris, celui-là Paul Potter; il n'est ainsi
presque pas de maître un peu connu sauf
Rembrandtqui paraît bienmort—qui ne revi
ve aujourd'hui dans la personne de quelque
honnête habitant de Bruges ou de Rotterdam.
Ces braves gens font, il faut lereconnaître, dès,
prodiges de patience et de conscience. Persua
dés, à ce qu'il paraît,que le principal mérite de
leurs anpêtres est dans un fini précieux qui
défie la loupe, dans une exactitude d'imita
tion qui rivalise avec le miroir, et dans
une extraordinaire propreté d'exécution, ils
croient naïvement avoir tout fait, lorsqu'ils
sont parvenus à donner à leur peinture'le
luisant et le poli d'une casserole fraîchement
recurée, dans laauelle se mire la ménagère
hollandaise, et l'effet magique d'un trompè-
l'œil. Mais, ce qu'ily a de plus étonnant, c'est
que ces peintures font là-bas le plus grand
effet et qui, plus est, se vendent bel. et bien,
et fort cher, car dans ce pays le goût de l'art
a survécu, contre l'ordinaire, à l'aptitude. Il
1 y a aussi, dans cet engoûment, beaucoup
' BUREAUX : rite déTaM* (Pnlalï-RoyalJjBn 1 to:
B 1852.— MERCREDI 19 MAI.
VEUX Oïl VA5QWJïES3£Ktf|
PARIS 1S F. PAS TKIitESTai.
ÉPARTEMENS. 16 F. —
UN NUMÉRO 90 CENTIMES.
' voua les pats étrangers , se reporter
aa tableau qui sera publié dans le journiV
les 10 et as de dljaque mois]
Les abcnntmeiis datent des 1»' et 1$
de chaque mot'fj 4
9
S'adresser, franco, pour la rédaction, à M. CtiCHEVAt-CURteriT, rédacteur en chef.
Les articles déposés ne sont pas rondos]
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
I
1,
Ois'ahraa, dan» Ut département, auzlMmageries et aux Direction$ de poste. — A Londres, tken MM. C owie et fils.
— A Strasbourg, chez M. A iexandb», mur l'Allemagne^
j v S'adresser', franco? pour l'administration, à M. D enain, directeur'. .
I I<çi annonces sont reçues an bureau du journal ; etîchei M. PANIS, régisseur, 10, place do l|
PAR1&, 18 MAI.
* ■ !
le fibre-échange «t to priacipes de 89.
Nous avions dit aux libre-échangistes : Du
moment où vous reconnaissez que le système
protecteur a produit des résultats excellens,
qu'il a enrichi les peuples, qu'il a contribué
puissamment aux progrès de la civilisation
vous ruinez vous-même la science économi
que qui sert de base à votre théorie du Iibre-
Miauge. Il ne reste plus rien de toutes ces
démonstrations mathématiques par lesqud
les vous prétendiez établir que le système pro
lecteur était nécessairement une cause d a-
pàuvrissemeht* de ruine et de misère pour
les pays qui l'appliquent. Cessez donc
de nous parler d'une, science qui, dé votre
aveu, a reçu le démenti le plus éclatant de la
pratique ; laissezrla dans, les livres et n en
importunez plus les gouvernemens.
Le Journal des Débats a suivi nos conseils.
11 n'invoque plus les principes de l'école éco
nomique , il n'entreprend même plus de les
défendre : c'est sous l'invocatien des grands
principes proclamés en 89 qu'il place main
tenant le libre-échange. Ainsi, à L'en croire, la
■protection a été bonne autrefois, comme
l'esclavage. qui substitua le commerce des
hommes à l'anthropophagie, comme le
servage qui remplaça l'esclavage par une
condition plus douce, et qui rend encore,
de grands services en Russie, comme le
régime des maîtrises et des jurandes qui;
fut lui-même un progrès sur.le régime pré
cédent; mais elle doit disparaître comme
toutes ces institutions semi-sauvages et féo
dales, parce qu'elle est en contradiction fla
grante avec les grands principes de 89. con-,
sacrés par laConstitution .de 185-2. En .effet,
la protection viole l'égalité devant la loi, elle
•est contraire â la liberté civile, elle constitue
un privilège payé par la société. — Qui se se
rait jamais douté que la protection fût un
attentat si abominable contre tous nos
droits!
La protection viole l'égalité devant la loi !
En vérité, nous ne comprenons plus. Est-ce
que tous les Français ne sont pas égaux de-;
vaut toutes les lois commerciales, comme
devant les lois civiles et politiques? Est-ce
que tous, sous les mêmes conditions, ne peu^
vent pas se livrer à l'iudustric, au commer-:
ce, à la production de la richesse? Comment
l'égalité devant la loi peut-elle être atteinte
par des règlemens qui laissent à chacun les
aiêmes facultés et imposent les mêmes res
trictions? On aurait bien dû prendre la peine
de nous l'expliquer.
11 est vrai qu'on parle de redevances qu$
la société paierait aux industries protégées.
Ne semblerait-il pas que nos agriculteurs*
nos manufacturiers, nos producteurs sont
armés et organisés en guerre, qu'ils tien
nent la lance sur la gorge du pays ! Les so
cialistes ne s'exprimeraient pas autrement.
Est-ce quepdepuis' 4789r le système de la
la protection n'a pas subi toutes les épreu
ves de la discussion et du vote? Est-ce que
l'Assemblée constituante, la Convention, le
Directoire, l'Empire, la Restauration, le
gouvernement de Juillet, la République de
4848 n'ont pas successivement adopté, main
tenu ce système ? Quoi! parnptant de gou
vernemens tous se sont laissé Violenter ou
ont violenté la nation ! Quoi ! parmi tant
d'assemblées aucune n'a exprimé la volonté
et l'intérêt du pays! Cela n'est pas soutena-
ble; Nous avons vu,depuis soixante ans,tou
tes les formes essayées ; tous les principes
politiques appliqués, abandonnés ou repris
pour être délaissés encore ; tous les gou
vernemens renversés les uns sur les autres 1 ;
ia protection est restée debout au milieu de
ces secousses, de ces révolutions* de ces rui
nes; et en présence de la consécration qu'elle
a reçue de tous les régimes, vous vous écriez :
« On nous opprime, on nous violente, on
nous exploite! » Etonnez-vous donc, après
cela, que la société ne vous écoute pas, et
vous laisse crier :dans le désert !
Ce qu'il importe dé remarquer, c'est que,
si depuis soixante ans, tous les gouverne
mens ont abouti au maintien de la protec
tion, tous, ne l'ont pas fait avec une égalé
spontanéité. L'Empire et la Restauration, il
est jrai » furent résolument protecteurs;
mais, personne ne l'ignore, la politique du
chef de aotre dernier gouvernement monar
chique avait des tendances vers les théories
opposées. Par intermittences, ces tendances
se manifestaient dans les projets de l'admi
nistration : tantôtVétait la négociation an
noncée d'un nouveau traité de 1786 avec l'An
gleterre: tentât la suppression de nos douanes
sur la frontière belge; tantôt des remaniemens
de tarifs au profit de l'industrie étrangère,
tantôt des, refus de protection à des indus
trie;; naissantes, entre autres à nos filatures
de chanvre et de lin. Ces tentatives semèrent
1 inquiétude, et il est permis de croire qu'elles
ont ete pour quelque chose dans l'isolement
ous esttrouvé le pouvoir en 1848.Quoi qu'il en
soit, certes, si jamais la partie fut belle pour le
libre-échange, ce fut dans les huit dernières
années de ce règne. Il occupait les chaires
publiques. Il avait obtenu l'autorisation
d'ouvrir dans les quartièrs populeux, au
centre d« Paris, des clubs économiques- où
il se livrait aux prédications les plus vi
rulentes contre notre législation économi
que. Il se multipliait par les livres, parles
brochures, par les journaux, par les publi
cations de toute espèce. Il possédait les pré
férences peu dissimulées du gouvernement,
qui l'encourageait a être fer t. Il avait enfin,
pour couronner tant d'avantages, le crédit,
l'ascendant, la diplomatie* la vigilance et
l'habileté de l'Angleterre. Si le libré-échange
représentait réellement l'intérêt général,
comme il le prétendait, le moment de
son triomphe était venu. Disposant de
tant de puissance, maître de tant de po
sitions , appuyé sur tant de forces ma
térielles et morales, ralliant autour de lui
les 36 millions de consommateurs qu'il*mon-
trait tous les jours exploités, opprimés, af
famés, il allait avoir bien vite raison de
cettepetite poignée de hobereaux industriels,
de tette féodalité nouvelle du marteau et
du coton! Qu'advint-il cependant? Ce vaste,
développement de moyens échoua contre
le bon sens public. Le libre-échange se rui
na lui-même par l'effet de sa propre discus
sion. Il ^marcha d'éehecs en échecs ; il fut
réduit à se désavouer, et, convaincu d'im
puissance, il tomba dans le discrédit.
Que conclure de là, sinon que la pro
tection ne blesse nullement cette égalité de
vant la loi sur laquelle on est si susceptible
dans notre pays. La France a choisi libre
ment et a librement conservé la législation
économique qui nous régit» S'entêter à re
garder comme un débris des institutions
eodales un système qui a survécu à tous les
gouvernémens * à toutes les assemblées, à
tous les modes d'élection, c'est vouloir fer
mer les yeux à la lumière* c'est vouloir res
ter sous l'empire des illusions.
Est-il besoin- d'ajouter que la protection
ne viole pus plus la liberté civile que l'éga-
ité devant la loi? L'échange fût-il un droit
naturel, comme on l'affirme, il ne s'en sui
vrait pas pour cela que la société ne pour
rait pas en restreindre l'usage. Tout citoyen,
)ar cela seul qu'il fait partie d'une nation
civilisée, doit consentir à subordonner
'exercice de ses droits et de ses facultés
aux règles de l'intérêt social. Cela' est
vrai pour toutes les manifestations de la
volonté humaine. Ainsi les lois qui régis
sent l'échange ont le même caractère que
celles qui régissent la propriété, la liberté
individuelle, la^erté de la presse, etc., etc.
Sans doute,-il n^faut pas, comme le socia
lisme j confisquer l'individu au profit de
la soeiété ; mais il ne faut pas davantage,
comme l'école du libre-échange, confisquer
la société au profit de l'individu. Comment
ls Journal des Débats peut-il réclamer, en
matière de commerce; cette liberté illimitée
qu'il repousse en matière de presse, d'asso
ciation, etc.? S'il y a inconséquence, c'est
évidemment de son côté.
Mais le système protecteur crée des privi
lèges. Des privilèges pour qui ? Vous seriez
vraiment bien embarrassés de aous le dire.
Est-ce que toutes les branches de la produc
tion ne sont pas également accessibles à tous
les citoyens ? Sansdoule la société croitdevoir
protéger plus ou moins telle ou telle indus
trie, selon qu'elle est plus ou moins faible,
selon qu'elle est plus on moins en me
sure de résister à la concurrence étran
gère. Qu'en résulte-t-il? Est-ce qu'une in
dustrie , protégée ou non, peut donner
de plus grands bénéfices que les autres, sans
gu'aiissiiôt la concurrence intérieure vienne
les réduire au taux normal? Il n'y a donc
ni privilège , ni monopole , ni dîme , ni
exaction. Ce sont des mots qu'il serait de
bon goût de ne plus employer dans de
semblables discussions. Si l'on veuty mettre
un p»u de benne foi, on reconnaîtra que la
. protection n'a pas été imaginée et ne s'exerce
pas en vue d'établissemens particuliers,
qu'elle est dans le droit général, dans le droit
commun, et qu'elle n'a d'autre principe que
l'intérêt même du pays qu'elle féconde et
qu'elle enrichit en le dotant de nouveaux
moyens de travail. .
Reste le grand, l'éternel argument des li
bre-échangistes la protection sacrifie le
consommateur. N'avons-nouspas déjà mon
tré que cet argument repose sur une confu
sion de mots et d'idées? Production et con
sommation, on ùe saurait trop Je redire,
sont deux états cûexistans dans l'individu so
cial; tout producteur est consommateur ;
tout consommateur est producteur. Une fa
mille qui n'aurait pas dans son sein l'un des
élémens de la production; le capital actif,
l'intelligence, l'industrie, les bras ou la
terre, serait bientôt condamnée à mourir de
faim du à vivre aux dépens de la charité pu
blique. Nous ne consommons qu'en propor
tion de ce que nous produisons d'une ma
nière ou d'une autre. La consommation est
subordonnée à la prospérité de la produc
tion, comme les effets sont proportionnés
aux causes. Or, puisque produire ét consom
mer se tiennent, tout système qui favorise
le travail national, développe par cela même
la consommation nationale. L'histoire des
peuples le prouve d'une manière surabon
dante.
On voit, eh résumé, que les principes de
89, les principes de liberté civile et d'égalité
devant la loi, ne sont nullement intéressés
dans le débat engagé entre le système pro
tecteur et le libre-échange. C'est d'ailleurs ce
qui ressort d'une manière évidente de tous
les écrits des hommes les plus remarquables
qui ont préparé cette grande oêuvre de régé
nération, ou qui ont été appelés à y prendre
part. Nous nous sommes déjà appuyés, dans
cette polémique, sur l'autorité de Montes
quieu. Nous complétons la citation que nous
lui avons empruntée : « La liberté du
commerce* dit-il dans son Esprit des Lois j
n'est pas une faculté accordée aux négocians
de faire ce qu'ils veulent, ce serait bien plu
tôt sa servitude . Ce qui gêne le négociant,
ne gêne pas le commerce. C'est dans les pays
de liberté que le négociant trouve des contra
dictions sans nombre; et il n'est jamais \
moins croisé par les lois que dans lés pays de
servitude . » Voilà ce que pensait le génie le
plus éminent de notre pays, celui dont les
législateurs de 89 n'étaient que les disci
ples. Nous pouvons également invoquer
['opinion de l'homme qui fut à la fois le
finaatier populaire et l'économiste orga
nisateur de cette époque. Necker, écrivant
l'Eloge de Colbert eu-présence des premières
manifestations de l'école du laisser-faire, fé
licitait le grand ministre de Louis XIV de
s'être toujours inspiré de l'élude des faits
plutôt que de maximes abstraites, et il ajou-,
tait : « Quoi de plus facile que de gouverner
le monde avec un* seul principe, la liberté
parfaite ! Cela ne donne pas la moindre
peine. On dit à l'intérêt personnel et à
l'ignorance : je me fie à vous. S'ils heur
tent, s'ils fracassent en route, on ne s'en in
quiète pas. On demande un ou deux siècles
pour en voir l'effet. Si la société bouleversée
se refuse à poursuivre cette expérience, on
l'accuse d'impatience, elle seule devient cou
pable, et le principe garde encore sa gloire
et ses prétentions ! » Ne dirait-on pas que
ces lignes aient été écrites hier !
Cessez donc de vous mettre sous l'inyoca-
tion de 1789 ; datez plutôt de 1786. Cette
date, qui marque un des. plus cruels désas
tres de l'industrie française, vous appartient ;
car elle rappelle la première application de
vos doctrines en France. j. buiut.
. — .IX. ■ . . :
->* ....
On lit dans le-Moniteur*. ' ~
« Des journaux ont paru s'étonner que le
gouvernement n'ait pas permis de publier la
lettre écrite par M. le comte de Chambord
aux légitimistes pour leur conseiller le re
fus du serment, Le gouvernement n'avait
aucun intérêt à empêcher cette publication.
S'il n'eût' obéi 1 à des considérations d'un
ordre supérieur, il se serait empressé de
Adonner à ces documens une publicité qui ne
pouvait lui être qu'avantageuse ; mais, au-
dessus de l'intérêt particulier, il y a le respect
de la Constitution et du principe sur lequel
elle repose. Le gouvernement ne saurait au
toriser la publication d'une lettre qui con
seille de refuser le serment exigé par la
Constitution, en s'appuyant sur un principe
essentiellement contraire à celui de la souve
raineté nationale. ( Communiqué.)
Le conseil d'Etat est saisi, depuis quelques
jours, d'un projet de loi sur les douanes.
On cite, parmi les dispositions principales,
celle qui affranchit les matières premières
employées dans les constructions maritimes,
et celle qui lève la prohibition sur les pote
ries. Cette proposition soulève des questions
importantes que nous examinerons avec
SOin. J. DURAT.
Les pouvoirs du président actuel des Etats-
Unis expirent le 4 mars 1853. G'est au mois
de novembre de cette année que l'élection
de son successeur aura lieu, et c'est dans
.le courant de juillet au plus tard que les
partis feront choix de leur candidat.
Toutes les questions politiques perdent de
leur importance à l'approche de cette épreu
ve décisive ; elles s'effacent toutes devant les
combinaisons qui peuvent assurer le triom
phe du candidat adopté par chaque parti.
Les démocrates des Etats-Unis hésitent en
tre trois personnes : le général Cass, M. Bu-
chanan, ancien ministre des affaires étran
gères dé M. Polk, et un magistrat, M. Dou-
glass, qui a pour lui les sympathies des
Etats à esclaves. Le général Cass a d'ardens
amis dans les Etats du Nord, mais il a con
tre lui l'insistance avec laquelle il a poussé à
plusieurs reprises les Etats-Unis à intervenir
dans les querelles du vieux monde. Si les idées
et les motions de M. Cass avaient été adop
tées, les Etats-Unis seraient aujourd'hui en
guerre avec trois ou quatre des puissances
européennes. Aucun des trois candidats dé
mocrates ne se recommande d'ailleurs par
des services éminens,ni par l'éclat du talent :
tous les trois sont des hommes extrêmement
médiocres.
Le parti whig est en ce moment au pou
voir. L'immensepopularité du généralTaylor
a valu, en 1848, auparti qui avait su le choisir
pour candidat un facile triomphe. Les whigs.
en demeurant unis, pouvaient compter sur
uite nouvelle tlctoire; mais leurs divisions ren
dent aujourd'hui fort incertaine l'issue de la
prochaine lutte. Ils s'étaientsi bien trouvés en
1S48 d'avoir fait choix d'un général que leurs
regards se sont portés tout d'abord sur le
conquérant du Mexique; Le général Scott est
un officier distingué, qui a déployé dans la
guetre du Mexique de grandes qualités mili
taires, et qui s'est montré sous ce rapport
fort supérieur au généralTaylor; mais il n'a
pas lés qualités toutes, personnelles qui
avaient gagné à ce vieux soldat l'affection
du peuple américain. Le général Taylor
semblait un vieux Romain, quelque Cu-
rius ou quelque Gincinnatus ressuscité
dans les forêts du Nouveau - Monde : sa
simplicité, sa franchise, ses manières ou
vertes, la mâle concision de son langage
et son héroïque bravoure lui avaient con
quis tous les cœurs. Le général Scett est
Un excellent officier , sachant admirable
ment sOn iiiétier, filais ufl peu Vantard* pro
digue de paroles, de dépêches et de procla
mations, se donnant volontiers des airs d'A
chille et d'Alexandre. Ses amis les plus zélés
reconnaissent en outre qu'il n'a m les con
naissances ni les aptitudes qu'on doit cher
cher chez un chef de gouvernement ; et ils
ne peuvent invoquer en sa faveur que ses
victoires.
Tel est pourtant sur les démocraties l'as
cendant delagloire militaire, que le général
Scott aurait eu de grandes chances d'être
élu, sans les fautes de ses amis. L'initiative
de la candidature, du général appartient à cette
portion des|\vhigsduNord qui esUnfectée des
doctrine abolitionistes. L'appui des free-sei-
lers, ainsi qu'on les nomme, a fait faire un
chemin rapide à cette candidature; mais, dans
l'enivrement du succès, les partisans du gé
néral n'ont pas tardé à laisser voir qu'ils
comptaient faire tourner son triomphe au
profit de leurs doctrines particulière», et ins
taller , grâce à lui, l'abolifionisipe - au
pouvoir. On comprend quelles aîsraies
ûv telles intentions ont dû exciter au seifl
des Etats à esclaves : et les progrès de la
candidature de M. Scott se sont arrêtés à fa
limite qui sépare le Sud duNordde l'Union.
Néanmoins, quelles que fussent les justes dé
fiances des whigs du Sud, la nécessité'-de de
meurer unis était si bien comprise de tous,
qu'une tentative de conciliation eut lieu.
On convoqua à une réunion tous les mem
bres du congrès appartenant au parti whig.
La présidence de cette réunion fut déférée
à un sénateur influent, M. Mangum, ami
particulier du général Scott. L'objet de
la réunion était d'arrêter les préliminai-!
res d'une convention de délégués à laquelle
serait remis le choix du candidat définitif du
parti. Un sénateur du Sud, au nom de tous
ses collègues, demanda qu'il fût expressément
déclaré que le maintien du compromis de
1850 était une condition indispensable pour
obtenir l'appui des whigs. M. AJangum, qui
avait déclare que le général Scott lui parais
sait avoir seul des chances sérieuses de suc
cès, se refusa à metlre cette proposition ;
aux voix, sous prétexte qu'elle n'était pas à
l'ordre du jour. Les sénateurs et les députés
du Sud s'écrièrent que cette objection n'avait
d'autre but que d'éviter de compromettre le
général S"Ott vis-à-vis des free-soilers, seuls
adversaires du compromis de -1880; et ils se,
retirèrent en masse de la réunion.
Ils ont exposé depuis, dans un manifeste,
les motifs de leur résolution. Le compromis
de 1850, disent-ils, a terminé par des con
cessions réciproques une lutte dans laquelle ■
l'agression était venue des Etats du Nord.
Les hommes du Sud, qui avaient le bon
droit de leur côté, se soat résignés à des sa
crifices, plutôt que de mettre en péril le
maintien de la confédération. Mais ils n'ont
consenti à ces sacrifices que sous la condition
que le compromis ne serait plusmisenques-
tion,qu'il serait accepté de part et d'autre com
me un règlement définitif de la querelle, et
qu'aucune tentative ne serait faite pour reve
nir sur aucune des cinq lois votées par le con
grès. Refuser de prendre pour programme le
maintien du compromis, c'est entretenir les
espérances hautement avouées des abolitio
nistes, c'est délier de leurs obligations les
états du Sud, c'est compromettre de nou
veau l'existence de la confédération. Com
me Américains désireux de voir subsister
l 'union de tous les Etats, comme citoyens
du Sud, obligés'de défendre leurs droits et
leurs propriétés, les représentons du Sud
déclarent ne pouvoir donner leurs suffrages
qu'à un homme dont la fidélité au compro
mis de 1850 ne sera pas douteuse.
Ce manifeste a eu un grand retentissement
aux Etats-Unis et a paru porter un coup mor
tel à la candidature du général Scott. En vain
Où a Annoncé que le général allait publier
une déclaration formelle en faveur du com
promis; aucune démarche de sa part ne ra
chètera les imprudentes démonstrations de
ses amis, et ne rendra confiance aux hommes
du Sud. Le général ne peut être désormais
le candidat que d'une fraction du parti whig,
et Ce fie serait pas trop des forces du parti
tout entier pouf le faire triompher. Les
regards se portent donc, aujourd'hui sur M.
Webster et sur M. Fillmore. Tant que M.
Clay est resté en lice, M. Webster est demeu
ré forcément sur le second plan ; depuis la
retraite du sage d'Ashland, comme on ap
pelle M. Clay, M. Webater est incontesta
blement l'homme éminent du parti whig.
Personne ne conteste son experience des
affaires , sa haute capacité, son éloquence ;
peut-être M. Webster serait-il aujourd'hui
le candidat préféré du parti whig, s'il
n'avait montré trop d'envie de le devenir,
s'il ile s'était compromis gratuitement dans
un banqueten l'honneur deM.Kossuth, et si
le Sud ne lui gardait rancune de quelques
vieux discours. Toutefois, les chances de M.
Webster deviendraient sérieuses si M. Fill
more se désistait de sa candidature en sa
faveur.
Le président actuel s'est montré un ad
ministrateur modeste, assidu et capable. Il
s'est honoré. aux yeux de l'Europe par le
soin scrupuleux avec lequel il a rempli vis-
à-vis du Mexique et de Cuba les obliga
tions internationales dont lès Américains
se montrent habituellement trop peu sou
cieux. Il a acquis dans les Etats du Sud aux
quels il était inconnu,une juste popularité par
lafermeté et ia loyauté aveclesquelles il a fait
exécuter le compromis, au risque de se sé
parer de la plupart de ses amis du Nord. Il
n'est donc pas surprenant que la majorité
des whigs du Sud incline à la réélection
de M. Fillmure , et plusieurs législatures
d'Etatsse sontprononcées formellement dans
ce sens. M. Fillmore persistera-t-il dans la
résolution qu'on lui prête de refuser une
réélection, ou acceptera-t-il dans l'inlér
son parti le renouvellement de son manda
G'est ce qu'un avenir prochain ne peut man
quer de nous apprendre:
X » CUCIIE V AL- CLA.RIGK Y.
La commission pour l'examen du projet
de loi portant modification des articles S, 6
et 7 du Code d'instruction criminelle relatifs
aux crimes et délits commis en pays étran
gers, est ainsi composée : MM. Laffitte (Char
les), Riche, O'Quin, de La Haichois, Duboys,
de Beauverger, Vernier. '
La grande affaife d'Egypte paraît définiti
vement terminée. La nouvelle d'un arrange
ment conclu au Caire, le 20 avril, entre Ab-
bas-Pacha et Fuad-Effendi, chargé des pleins
pouvoirs du divan impérial, est arrive le.%
de ce mois à Constantinople. Toutefois, la
Porte n'a reçu ses dépêches officielles que le.
6, jour du départ du dernier courrier, le doc
teur Servicen,â qui Fuad-Effendilesavait con
fiées avec ordre de les remettre au grand visir
en personne, ayant dû subir une quarantaine
d'observation de quelques jours aux Darda
nelles. Toutes les lettres particulières s'accor
dent à dire, que d'après cet arrangement, qui
doit naturellement être soumis a la ratifica
tion du sultan, Abbas-Pacha accepte le tan-
zimat dans toute sa teneur, sauf en ce qui
concerne le droit de vie ou de mort, qui est
prorogé tel qu'il existait jusqu'ici en Egypte,
encore pour sept ans. Ce point étant p^ir le fait
I'uniquesujetde discussionentre les deux pays
à propos de l'adoption du tanzimaf, a dû être
tranché tout d'abord,-et Fuad-Effendi ; con
vaincu de la justesse des motifs allègues par
le vice-roi à l'appui de ses prétentions, a mis
fin, en cédant, a tout débat ultérieur.
On prétend que le consul d'Angleterre a
fortement appuyé Abbas-Pacha, dans le cou
rant des négociations; qu'il avait même hau
tement déclaré que son gouvernement ver
rait avec beaucoup de peine qu'on marchan
dât plus long-temps au vice-roi la concession
qu'il demandait uniquement dans l'intérêt
de la sûreté des étrangers.
Fuad-Effendi n'avait pas encore abordé le
chapitre relatif aux différends existans entre
Abbas-Pacha et les autres membres de la fa
mille de feu Mehemet-Ali-Pacha. On suppo
sait généralement au Caire que cette négo
ciation ne donnerait lieu à aucune difficulté
sérieuse, £t qu'Abbas-Pacha, satisfait de ce
qu'il avait obtenu, s'efforcerait de se mon
trer facile sur tout le reste.
Une très grande agitation régnait depuis
quelques jours, à la Porte, à l'occasion de la
ferme des douanes. Lefermier actuel, M. Dgé-
zaerli, prétextant des pertes considérabl; -, ,
avait demandé une diminution de sept mê
lions de piastres sur le prix de son bail, ou
la résiliation de son contrat. L'affaire ayant
été soumise au conseil, la réduction avait
des chances d'être accordée, lorsqu'une
nouvelle compagnie , composée de six des
plus riches banquiers arméniens de Cons
tantinople , et ayant à sa tête Moustafa-
Nouri-Pacha, ancien favori du sultan Maii-
naoud* s'est présentée, en effrant non-seule
ment de continuer le marché du fermier ac
tuel, mais encore de donner 6 millions de
plus. Cette proposition, d'autant plus avan
tageuse pour le trésor, que la compagnie
offre des garanties incontestables de solva- '
bilité, a néanmoins trouvé une violente op
position su sein du conseil, et ce cfui a
surtout surpris tout le monde, c'a été de
voir le ministre des finances en faire par
tie. Quant au grand-visir, qui porte beau
coup d'intérêt à M. Dgézaerli, il a hau
tement et loyalement déclaré qu'il se pou
vait pas appuyer ses prétentions, du mo
ment que d'autres propositions plus avanta
geuses à l'Etat avaient été faites. L'affaire
toutefois n'était pas encore décidée; mais on
pensait que nonobstant la protection du
ministre des finances, elle se terminerait en
faveur de la nouvelle compagnie.
Après avoir, en quelque sorte, engagé
l'ambassade deFranceàfairevenirà Constan
tinople le vaisseau à vapeur à hélice le
Charlemagne , la Porte, cédant aux instiga
tions de sir Stratford Canning, s'est tout-à-
coup ravisée, et a déclaré qu'elle ne pouvait,,
sans contrevenir aux traités, autoriser ce
vaisseau à passer les Dardanelles. Notre char
gé d'affaires s'est abstenu d'entrer en dis
cussion à ce sujet et s'est borné à de
mander communication officielle de cette
décision, afin de la transmettre à son
gouvernement. Les choses en étaient là
lorsque par le paquebot du 2 est arrivé un
lieutenant de vaisseau, M. Coriolis, que le
commandant du Charlemagne a envoyé à
Constantinople pour savoir enfin s'il devait
s'en retourner ou continuer sa route sur la
capitale. L'arrivée de cet officier a paru faire
quelque impression à la Porte, et l'on a fait
prévenir le chargé d'affaires que l'on allait
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL, 19 MAI.
SALON.
VI.
Pvkttob *bb «bnbb. MM. Ed. Frère, Vignori,
Gcirnaert, H. Schefler, Vanschéndel, Lepoittevin,
T. Johannot, Traycr, Baron, Aug. Delacroix, Biard,
Tlédouin, Haffner, Luminais, Verdier, Penguilly,
De^illy, Boissar'd, ■
La peinture de genre -est d'invention mo
derne. L'antiquité ne l'a pas connue, au
moins co'i me spécialité; elle ne s'y montre
que comme, un accident très subordonné.
L'art, à son origine, croirait déroger en s'ap-
pliquant aux événemens et aux objets vul
gaires de la vie domestique: il n'y songe même
pas. Dans les temps modernes même,le Genre
n'a commencé à se faireune place à part dans
les diverses écoles qu'à l'époque de leur déclin.
Dans une seule, il a régné presque sans par
tage, et y a atteint son plus haut degré de
développement : c'est l'école hollandaise, ou
plutôt des Pays-Bas, qui se trouve la dernière
en date dans l'évolution chronologique et es
thétique de l'art. Comme expression des
mœurs et de l'état social, le Genre semble,
dans l'art, répondre à l'élément bourgeois,
devenu prédominant dans les sociétés nou
velles. Il en reproduit l'esprit et enquelque
sorte l'idéal, comme en littérature le roman,
il s 'assortit encore aux classes moyennes au
point de .vue matériel, par les proportions
raodestës âe l'es produits, qui trouvent aisé
ment une place dans le salon, le cabinet, la
chambre à coucher, la salle à manger de la
petite maison ou de l'appartement bour-
geois. La peinture, et' l'art en général, ont
successivement changé de demeure en mê
me, temps que d'objet et de principe : d'a
bord dans les temples avec les dieux,, puis
dans les palais avec les rois et les grands, en
dernier lieu dans les maiions privées avec
les ^impies citadins. Ces rapports ne sont
pas arbitraires. Pour peu qu'on y pense, on
verra qu'ils sont essentiels et déterminés par,
la marche parallèle de l'art, de la civilisation
et de la fortune publique.
En Francs, la peinture de Genre n'a pas
eu beaucoup de développement. Dans ce
pays, l'art a suivi le ton donné par l'Italie.
En outre, l'esprit du catholicisme d'une part,
et de l'autre celui de la monarchie, toujours
si prépondérans dans la nation, paraissent
peu favorables à cette forme particulière de
la peinture. Ce n'est du moins que dans des
pays protestans et à institutions communales,
qu'elle s'est propagée avec la spontanéité fé
conde d'une plante indigène. Partout ail
leurs le Genre n'â été cultivé qu'accessoi
rement ; nulle part il n'a forme le carac
tère dominant et distinctif d'une école. En
France, ce n'est que dans la dernière
moitié du siècle passé, qu'on voit paraî
tre quelques noms de peintres de Genre,
mais si clairsemés encore, que c'est à peine si
l'on en a retenu trois ou quatre. Sous lo règne
tout héroïque de David, très peu osèrent se
montrer et ils n'ont laissé aucune renom
mée. Et encore faut-il observer qne, parmi
le très petit nombre d'artistes qui, durant
•près de trois siècles, se sont essayés dans
la représentation des sujets familiers du
Genre, la plupart y ont apporté un goût et
ûn style empruntés à l'imaginatitn et à
l'histoire , de sorte qu'il en reste à peine
trois ou quatre, tels que Chardin, les frè
res Lenain, Casanova, qui les aient traités
dans l'esprit de l'école hollandaise.
De notre temps, grâce au large ecelectisme
qui a ouvert pour ainsi dire toutes les por
tes de l'art, le Genre a pris, ainsi que son
annexe obligé, le Paysage, une extension
remarquable, et c'est peut-être cette spé
cialité qui fournit le plus de talens et les
. talens les plus forts. Cependant l'influence
de l'esprit national et des habitudes tra
ditionnelles se fait encore sentir dans
l'ensemble des productions de cet ordre. Le
Genre n'est en grande partie, dans notre
école, qu'un diminutif de l'Histoire ou du
Drame. Si l'on excepte les scènes militaires,
et les rares tableaux de nature morte, presque
toutes les œuvres, qui, par le style etle carac
tère plus ou moins familier du sujet, se ratta
chent au Genre, s'en écartent néanmoins, soit
par l'intention dramatique ou sentimentale,
soit par une sorte d'idéal romanesque et fan
taisiste; ce qui les classerait dans une caté
gorie à part, à laquelle nous ne nous char?
geons pas de trouver jun nom. Il en est un
bon nombre qui, par l'ensemble des élémens
extérieurs, composant- ce qu'on appelle le
Costume, sont des vues rétrospectives d'un
passé plus ou moins éloigné (de l'époque ré
gence principalement), ou, ce qui revient à
peu près au même pour l'imagination, des
peintures de mœurs étrangères, des récits de
voyageur. Il n'en est presqu'aucune qui soit
prise dans le vif de la réalité contemporaine.
Il en est des modes d'exécution comme des
sujets, ils sont très arbitraires,et empruntés,
suivant la fantaisie ou la prédisposition du
goût de. l'artiste, à quelque maître mort ou vi
vant, choisi de préférence parmi les coloris
tes. Watteàu est particulièrement en vogue;
d'autres préfèrent Chardin; un certain nombre
s'attachent naturellement aux Hollandais.
Mais Decamps, Delacroix et Diaz, plus ou
moins heureusement fusionnés, fournissent
, la plus large part. Les manières originales
. sont, on le pense bien, d'autant plus rares
qu'elles sont plus recherchées.Nous avons der
nièrement trié, à ce titre,—et toutefois avec
lesrestrictions convenables,—-les quatre noms
de MM. Meissonnier, Bonvin, Armand Leleux
et Courbet. Il n'est pas sûr que la revue que
nous allons faire des autres peintres de Gente
nous autorise à en ajouter un cinquième.
Il en est un cependant que nous serionsbien
tenté d'inscrire, au moins par intérim : c'est
celui de M. Pierre-Edouard Frère, pour ses
deux charmans tableaux d'mtérieur (le Ton
nelier et le Chapelet), éclairés et composés à
la façon d'Ostade, mais sans pastiche, fine
ment et grassement peints , très doux à
l'œil, quoique piquans d'effet, surtout le
premier. Je n'y reprendrais qu'une certaine
mollesse générale de touche qui affadit un
peu l'esprit du dessin, et, en outre, les figu
res manquent de relief, et se détachent mal
du fond. Le tonnelier, excellent de geste,
n'a pas de corps; il paraît une ombre portée
sur lë mur ; Ces deux petites toiles, ainsi
qu'une troisième, intitulée Etude, re
présentant également un intérieur, sont
de celles qui peuvent prétendre à une place
dans un cabinet d'amateur, et qui survivent
à l'impression, si souvent éphémère, d'un Sa
lon. M. Frère à un élève, ou du moins un
imitateur fort exact. L'Heure' de Rêverie, la
Laveuse de vaisselle et l'Intérieur de M. Vi-
gnôn pourraient lui être attribués sans lui
faire trop de tort, quoique l'exécution soit un
peusèche, etle caractèredes figures d'un goût
un peu commun.
Parmi les morceaux de peinture de Genre
traités plus ou moins sciemment à la manière
hollandaise, on doit mentionner, avec l'estime
due à un travail consciencieux, à une bonne
intention et à un talent incontestable, la Li
quidation d'une Succession, œuvre d'un ar
tiste belge, dont le nom paraît, si je ne me
trompe, pour la première fois sur nos Li
vrets, M. Geirnaert. C'est une scène compo
sée à la Wilkie, exécutée à la Metzu. On trou
ve dans ce tableau un peu de tout ce qui dis
tingue ces deux maîtres, la clarté de la dis
position scénique, la recherche du carac
tère individuel des personnages, la vérité
de l'expression des sentimens et des passions
par le geste et le jeu de la physionomie, la
variété piquante des tons, la fraîcheur du.
coloris, la suavité du clair-obscur; mais tou
tes ces qualités y sont mêlées à doses si fai
bles, que le composé n'a presque plus de sa
veur. C'est comme un vin généreux étendu
d'eau. Or, nous disons, puisque le feuilleton
est tenu maintenant de parler latin, que c'est
un crime,ermen est, de tuer le Chambertin,
jugulare Falernum. Ceci entendu , il n'y a
plus que des éloges à donner à M. Geir
naert. Sa composition est intéressante et
agréable. Elle plaira sûrement à ceux qui,
heureusement pour eux, n'ont pas la mémoi
re meublée de tableaux. L'expérience en ceci,
comme dans la vie, est, au fond, peut-être
plus nuisible qu'utile; pour un mal réel
qu'elle évite, elle intercepte cent joufssanCes
innocentes.
Les peintres des ci-devant Pays-Bas se sont
mis en tête de refaire l'école du XVIl"' siècle.
Ils supposent que l'esprit des vieux maîtres,
par une opération de métempsychose, apas-
sé en eux avec la chair et le sang. L'un se
croit Ostade, un autre Ruysdaël, celui-ci
Mieris, celui-là Paul Potter; il n'est ainsi
presque pas de maître un peu connu sauf
Rembrandtqui paraît bienmort—qui ne revi
ve aujourd'hui dans la personne de quelque
honnête habitant de Bruges ou de Rotterdam.
Ces braves gens font, il faut lereconnaître, dès,
prodiges de patience et de conscience. Persua
dés, à ce qu'il paraît,que le principal mérite de
leurs anpêtres est dans un fini précieux qui
défie la loupe, dans une exactitude d'imita
tion qui rivalise avec le miroir, et dans
une extraordinaire propreté d'exécution, ils
croient naïvement avoir tout fait, lorsqu'ils
sont parvenus à donner à leur peinture'le
luisant et le poli d'une casserole fraîchement
recurée, dans laauelle se mire la ménagère
hollandaise, et l'effet magique d'un trompè-
l'œil. Mais, ce qu'ily a de plus étonnant, c'est
que ces peintures font là-bas le plus grand
effet et qui, plus est, se vendent bel. et bien,
et fort cher, car dans ce pays le goût de l'art
a survécu, contre l'ordinaire, à l'aptitude. Il
1 y a aussi, dans cet engoûment, beaucoup
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