Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-10-27
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 27 octobre 1908 27 octobre 1908
Description : 1908/10/27 (A2,N393). 1908/10/27 (A2,N393).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646046t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
2e Annee. « IS 393 (QuotratenJ
Le Numêro :'S centimes
Mardi 21 Octobre 1908.
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKI -
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UN AN 6 MOI»
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'Étranger. 4tO D 20 »
Une Epreuve
Mon ami Thoneau est un écrivain
Charmant, un observateur délicat, un
buteur dramatique plein d'esprit, de
grace et de vérité. Personne ne connaît
Mieux que moi son talent, car il me lit
touteS ses pièces, et chacune plutôt deux
OIS qu'une.
Je n'aime pas qu'on me lise des pièces.
I Au lycée, j'étais un des élèves les
:tnoins attentifs de la classe. J'écoutais
deux minutes les explications du profes-
i8eur, puis je me lançais sur une autre
?oute. Maintenant, quand on me lit des
Pièces, fussent-elles des chefs-d'œuvre,
"7" j'ai déjà eu l'honneur d'entendre des
chefs-d'œuvre, — j'ai toutes les peines
du monde à ne pas lâcher le lecteur. Je
y16 cramponne à lui comme un petit en-
Iant aux jupes de sa mère. Mais la foule
IIOUS sépare ! Bientôt, nous sommes très
join l'un de l'autre. Et de nouveau,
brusquement, je l'aperçois devant moi,
Jui lit avec passion, avec fougue, et j'ai
1 e moment d'effarement qu'on a le ma-
*ln. quand on se réveille dans une charn-
ue d'hôtel, et qu'on se dit: « Où suis-
3e donc? »
i, Mon ami Thoneau sait tout cela. Mais
dirait.qu'il n'en a cure. Il aime, lui,
«re ses pièces. Avant le succès de la pre-
mière, avant le succès de la lecture aux
Mstes, avant l'heureux résultat de la
ecture aux directeurs, il faut qu'il se
¡Paye des petits triomphes séparés en Ii-
Jjnt sa pièce à chacun de ses amis.
J'aime mieux, d'ailleurs, entendre ou
j|3ire^ semblant d'entendre une pièce en
hete-à-tête avec l'auteur. Car la présence
Id, un tiers suffit pour faire naître en moi
Impérieuse, la tyrannique, la torturante
-envie de rire (qui, bien entendu, ne
Jient jamais nous tourmenter à l'audi-
tion des pièces comiques).
.l noneau m avait dit: « a terminé
¡Un acte nouveau. Quand désirez-vous
11 entendre? »
Quand je désirais l'entendre?
Je répondis: « Mais tout de suite.
demain. après-demain! »
> - Je viendrai après-demain matin, dit
:l honeau.
- Attendez. Non. Après-demain,
jai quelque chose. Qu'est-ce que j'ai
donc, après-demain?. J'ai quelque
- chose. Venez plutôt mercredi. ou je<>
1 C'est cela, venez vendredi. Vous
Jn ,Ȃ; tes pas superstitieux?
Il était superstitieux. Mais il préférait
venir le vendredi qu'un jour plus tard.
- Je viendrai, dit-il, vendredi matin.
■ Non, vendredi soir. Le matin,
nous serions dérangés.
Je savais très bien que je n'y échap-
perais pas. Mais je voulais obtenir tous
les sursis. Le vendredi matin, j'écrirais
Un petit bleu, pour dire que je.n'étais
Pas bien portant, et pour gagner deux
ou trois jours.
Il se trouva que le vendredi matin, je
Souffrais d'un très fort mal de dents.
Comme je souffrais véritablement, je
écrivis pas à Thoneau que j'étais souf-
frant. Il aurait cru à un mensonge. Il
valait bien mieux le laisser venir, pour
qu'il pût constater que j'étais vraiment
malade. Alors, je dirais: « Vous voyez,
je suis absolument hors d'état de vous
écouter. »
Tout se passa d'abord comme je l'a-
vais espéré. Thoneau, armé de son ma-
nuscrit, se présenta vers six heures du
SOir. Il me vit installé sur un fauteuil,
effligé d'une fluxion indéniable, avec un
rempart d'ouate autour de mes oreilles
et de mon visage asymétrique.
- Mon vieux, je suis navré. Je vous
al laissé venir, parce que je pensais que
va irait mieux ! Mais ça reprend terri-
dément depuis une demi-heure.
— Pourtant, ça enfle, dit Thoneau.
vous devriez ressentir un certain -soula-
gement.
- En effet. Mais, j'ai un autre ab-
Ces de 1 autre côté. Je suis désolé de
vous avoir fait venir pour rien.
- Mais je suis content d'être venu
y «us voir. Je suis ennuyé seulement que
vous soyez souffrant.
- Alors, à quel jour voulez-vous que
nous remettions cette lecture? Mardi ou
mercredi?
— Ce sera comme vous voudrez, cher
ami !
Je ressentis à ce moment un tel sou-
lagement que je quittai imprudemment
le ton languissant que j'avais adopté.
rfhon3U ne manqua pas de s'en aper-
cevoir
— Ce qui m'ennuie de ne pouvoir
vous lire la pièce aujourd'hui, c'est que
j'ai pris jour demain avec Antoine, et je
ne serais pas fâché d'avoir votre avis
avant. Comme vous paraissez un peu
mieux maintenant.
- Mon vieux, je suis mieux. Mais
ça ne prend Par secousses brusques.
Vous commenceriez votre lecture, et
Vous seriez obligé de l'interrompre au
iQiilieu
- Essayons toujours, dit Thoneau.
— Je serai un très mauvais public, au-
jourd'hui !
— Mais non, mais non! dit Thoneau.
Il avait déjà débarrassé une petite ta-
ble et déficelait rapidement son manus-
crit.
- Je commence.
- Allez-y!
La lecture commença. C'était, je le
vis plus tard à la représentation, une
très jolie pièce. Pour le moment, j'en-
tendais parler confusément une baronne
nommée Mathilde, un nommé Gaston,
et une femme de chambre. A force de
tâcher d'avoir mal aux dents, j'avais
mal aux dents, en effet, mais pas assez
pour être en état de gémir avec une
conviction suffisante. De temps en
temps je jetais un coup d'œil sur le ma-
nuscrit. Il était écrit sur de grandes pa-
ges, de l'écriture de l'auteur. Manuscrit
assez épais, ma foi! C'était un fort acte.
Les pages étaient numérotées. Dans un
mouvement qu'il fit pour approcher le
cahier de la lumière, les pages s'écartè-
rent et il me sembla que le chiffre 34
était écrit sur la dernière. Nous n'étions
qu'à la page 6. La page 7 dura long-
temps. La moitié de la page 8 était bar-
rée, et j'avais déjà enregistré ce petit
bénéfice d'une demi-page, quand je vis
que la page suivante se numérotait ef-
frontément 8 bis.
Alors, quoi? nous ne savions plus où
nous allions. Il y avait des bis mainte-
nant ! Et peut-être, qui sait? des ter et
des ouater! Heureusement que je voyais
toujours pas mal de lignes rayées, des
longueurs évidentes, des développements
psychologiques qu'il s'était décidé à sup-
primer.
— Ça vous plaît-il? demanda tout à
coup Thoneau.
— Mais oui, beaucoup.
— C'est que vous gardez un tel si-
lence, me dit-il, que je suis un peu déso-
rienté. Je vous avoue que j'attendais
quelques marques d'approbation.
Je le rassurai, par civilité, par bonté
même :
- Ça me plaît énormément. Je trouve
cela amusant, plein de jolis détails. Si
je ne manifeste pas, c'est la faute à ce
sacré mal de dents.
- J'étais un peu inquiet, dit Tho-
neau.
Je le rassurai encore.
Je le rassurai même trop.
Car, l'instant d'après, je vis avec ter-
reur qu'il me lisait même les coupures!
Tristan BERNARD.
Nous publierons demain un article de
FÉLIX GALIPAUX
Spectateurs
On .js'étonne depuis longtemps de i'intétêt
prodigieux qu'une simple ouvreuse a su
donner à d'ingrats comptes rendus de con-
certs, et l'on admire avec raison l'esprit, le
bon sens et le cœur dont cette femme mo-
deste fait preuve d'une inlassable façon.
Pour peu que l'on étudie un peu le pu-
blic tel qu'il se montre dans les couloirs de
nos théâtres, un pareil tour de force s'ex-
plique' mieux.
On peut penser, en effet, sans paradoxe,
que la critique véritable d'une «pièce pour-
rait être faite de l'extérieur en analysant
seulement l'état d'esprit du public qu'elle
attire, et ce serait là, pour les moralistes,
un interminable sujet d'étude.
Voyez, par exemple, les dernières pièces
de Bourget ou de Bernstein; les partisans
de l'un ont applaudi à tout rompre, avec
ensemble, l'œuvre de leur chef de file;
ceux de M. Bernstein ont grogné et pro-
testé avec une évidente muflerie, et cela
n'est point sans donner quelque appui aux
théories sociales de M. Bourget.
Examinez également le public bon en-
fant, aimable et conciliant qui s'étouffe sans
se bousculer au vestiaire de l'Opéra-Comi-
que ou de l'Odéon, comparez-le aux quel-
ques habits noirs qui s'écrasent mécham-
Ment et volontairement lors d'une répétition
générale de l'Opéra. Lorsque vous saurez
que le monde officiel dominait en cet en-
droit, vous ne serez pas sans inquiétude
sur l'arrivisme et le manque absolu de po-
litesse qui caractérisent. ses représentants.
L'ouvreuse est donc particulièrement
bien, placée pour connaître l'état d'esprit
des couloirs; on me permettra cependant
de lui reprocher, pour mon compte, d'igno-
rer ce qui se passe dans la salle et de pré-
tendre, par exemple, que je me suis ennuyé
au Crépuscule des Dieux, alors qu'avec
respect je n'en ai point perdu une note. Au
surplus, j'avais à mon côté un wagnérien
passionné qui n'eût toléré de ma part au-
cune défaillance. Au moindre bruit, dans la
salle, il roulait des yeux terribles et sifflait,
tel une tête de Gorgone, dans la direction
des perturbateurs.
A la fin cependant le calme se fit et le
charme wagnérien opéra. Mon voisin, à la
manière d'un fakir, put se concentrer en
lui-même et, devenu indifférent aux vagues
figurations de la scène, il ne tarda pas à
fermer les yeux. Vers la fin du second acte
il se laissa doucement aller au fil du Rhin
et sa tête vint progressivement s'appuyer
sur mon épaule.
Brusquement, cependant, au dernier acte,
il se réveilla en sursaut, poussa un chut
terrible et s'arrêta court, un peu gêné.
Au bruit de son joyeux refrain, le régi-
ment Siegfried venait, une fois encore, de
faire ses cuivres.
G. DE PAWLOWSKI.
Echos
Ce soir, à huit heures un quart, au Théâ-
tre lyrique municipal de la Gaité, avec le
concours des artistes de l'Opéra-Comique,
reprise de Mignon.
..x~
Ce soi-r, à neuf heures, au Vaudeville,
reprise de Un Divorce, de MM. Paul Bour-
get et André Cury.
Ce soir, à huit heures-et demie, à l'Athé-
née, répétition générale de: Arsène Lupin
(nouvelles aventures, d'après les romans de
M. Maurice Leblanc)" pièce en trois actes
et quatre tableaux, de MM. Francis de
Croisset et Maurice Leblanc.
(Les dames ne seront admises à l'orches-
tre et au balcon que sans chapeau.)
Ce soir, à neuf heures, à la Scala, pre-
mière représentation de Occupe-toi d'Emi-
lienne! revue en deux actes et dix tableaux,
de MM. Rip et Arnould.
L
'auto de Thespis.
L'usage des tournées en automobile
n'est pas encore général. Il faut trop de
voitures, en effet pour transporter de ville
en ville toute une troupe.
Mais un impresario anglais vient d'avoir
une idée très pratique et si simple que per-
sonne n'y avait encore songé.
The Tatler.
Il a fait construire un important omnibus
automobile à deux plates-formes. Tous ses
comédiens y trouvent place, et il peut éga-
lement y placer leurs bagages, les acces-
soires et les costumes.
Plus de trains manqués, plus d'attentes
meurtrières la nuit dajis les gares, plus
d'itinéraires compliqués.
Sans compter que l'arrivée dans les vil-
les de province de cette pittoresque voiture
constitue une précieuse réclame.
Ah! décidément, ces anglo-saxons!.
L
e gentilhomme pelousard.
Il a été beaucoup parlé de lui ces
temps-ci. On examinait l'opportunité et les
conditions de son engagement dans notre
premier théâtre de comédie.
On affirme même que, grâce au patro-
nage de deux grands poètes, auteurs de la
Maison, son engagement serait signé de-
puis deux jours.
Et tandis qu'à ce point le monde artis-
tique se montre préoccupé de lui, le distin-
gué gentleman, oubliant qu'il est aussi co-
médien, se dissimule parmi les habitués de
la pelouse de Longchamp et, après avoir
joué l'unité au mutuel, suit avec une atten-
tion passionnée le cheval qui porte sa
chance avec lui.
E
n province. - -
C'est une matinée de charité. Le pro-
gramme, ou l'élément dramatique remporte,
se déroule avec monotonie.
Mais voici que le commissaire parlant
au public annonce d'une voix tonnante:
— M. X., dans Ruy BIas: la scène du
Banquet !
Et M„ X. de commencer:
Bon appétit, messieurs!
L
'amusement des enfants.
> Roméo et Juliette se rendent chez
Louise où ils trouvent la Maison en ordre.
jean de Nivelle y tient un conciliabule avec
l'Autre (vous savez bien, celui qui a
l'Oreille tendue). Que se disent-ils? Ils
parlent du Roi, qui d'après eux est Un mari
trop malin et qui se sert de l'Or de l'Emigré
pour faire le Tour du monde en 80 fours
à la recherche du Petit Fouchard, lequel
s'est réfugié au pays d'Israël.
Tout irait bien si Madame Bluff, parée
de la Ceinture de Balbine, ne s'était ren-
due à l'Agence Legri pour faire agir les
Quinze mille ayant à leur tête Mam'zelle
Trompette et le Caïd, qui ont plusieurs
Rendez-vous bourgeois Parmi les Pierres.
Mais le Chant du Cygne retentit: il est
l'Heure de la Bergère. — Occupe-toi d'A-
mélie! s'écrie le Bon Roi Dagobert en en-
trant, moi je passe mon Pantaloon, car c'est
aujourd'hui le Grand soir, l'Emouvante
journée va enfin se terminer!
Si cette histoire vous amuse, nous allons
la. re.re.recommencer !
LE BON CONSEILLER
Scénette intime en un acte
Monsieur, frileusement enveloppé dans un
pyjama de vigogne, déguste son déjeuner
du matin. La porte s'ouvre, et Jean, le
fidèle Jean, paraît portant sur un plateau
courrier et quotidiens.
- Eh bien, Jean, quel temps aujourd'hui ?
— Très froid, monsieur. La brise est glaciale
et monsieur fera bien de ne sortir que chaude-
ment vêtu. A ce propos, je ferai respectueuse-
ment remarquer à monsieur que sa garde-robe
est bien dépourvue: ses costumes et ses pardes-
sus ne sont plus de mode, ses chemises en bien
mauvais état; quant aux chaussettes, caleçons,
cravates et autres accessoires, le tout est en
quantité fort insuffisante. Je ne parle pas à mon-
sieur de ses chapeaux, sachant trop bien le soin
qu'il a de les renouveler chaque saison.
— Diable! Diable! Mais tu as raison de me
prévenir; je suis libre aujourd'hui, et je vais
consacrer mon temps à mes fournisseurs habi-
tuels.
— Habituels! Monsieur a bien dit habituels!
On voit bien que monsieur a été absent de Paris
depuis de longs mois et qu'il ne sait plus ce qui.
s'y passe. Et que le fournisseur habituel et su-
ranné n'existe plus depuis que s'est ouverte la
merveilleuse Maison qui. en quelques jours, a su
capter la confiance du Tout-Paris mondain!
— Quelle nouvelle m'apprends-tu ? Te moque-
rais-tu de moi, jean il
— Comment monsieur peut-il penser de pa-
reilles choses! Que monsieur se rende chez
Joseph PAQUIN, BERTHOLLE et Cie, 43,
boulevard des Capucines, et monsieur verra de
ses yeux la Maison la mieux installée et la
mieux organisée. Il y trouvera les tissus les plus
beaux et les coupeurs les plus réputés; le linge
le plus fin et les cravates les plus riches qu'il soit
jamais possible de rêver. Et je ne parle pas à
monsieur des chapeaux! Que monsieur sache
seulement que le célèbre Le Margy, de la Comé-
die-Impériale, n'en veut plus porter d'autres. Je
glisse sur les cannes et mille autres bibelots qui
sont tout à fait délicieux. Lundi 26 octobre et
pendant toute la semaine, il y a exposition de
trousseaux pour hommes, chez J. Paquiii, Bsr=
tholle et Cle. Que monsieur en profite, et sur-
tout que monsieur excuse mon bavardage !
— T'excuser. Jean, allons donc; tu sais bien
que tu flattes ma manie! Redonne-moi du cho-
colat. Comme dans Le Chant du Cygne, j'ai le
cœur en liesse. Ohé! Ohé!. J'irai demain me
rajeunir boulevard des Capucines. — Rideau.
E
ncore un!
Après Jean de Reszké, l'éminent
ténor de mondiale réputation, Imbart de la
Tour, une autre vedette de l'ut de poitrine,
professe lui aussi l'art de les émettre. Es-
pérons que le distingué créateur de L'Or
du Rhin et de Fervaal apprendra à ses élè-
ves non seulement ce secret, mais encore
celui, non moins précieux, de gagner de
gros appointements. malgré le dangereux
Syndicat des directeurs de théâtre!
c
'est à la marque de Dion-Bouton que
l'automobilisme doit son développe-
ment. Grâce a ses admirables voitures, les
profanes furent de suite conquis à la loco-
motion nouvelle, et aujourd'hui encore la
quatre cylindres de Dion-Bouton reste le
plus joli chef-d'œuvre de mécanique.
Le Masque de Verre.
A la Société des Concerts du Conservatoire
M. Messager est élu directeur
, à l'unanimité
La Société des Concerts du Conservatoire a
tenu hier une assemblée générale extraordi-
naire pour nommer le successeur de M. Georges
Marty.
A l'unanimité, M. André Messager a été élu
directeur de la Société des Concerts.
Ce choix, qui semble contredire la lettre fort
nette par laquelle M. André Messager déclinait
toute candidature à un poste qu'il jugeait peu
compatible avec ses fonctions de directeur de
l'Opéra, s'est fait très naturellement.
On se souvient que la succession de M. Geor-
ges Marty provoqua, dès qu'elle s'ouvrit, quel-
que fiévreuse' agitation dans le monde musical
très justement préoccupé des destinées de ce
poste envié.
En vérité, il ne fut fait alors — et il ne s'est
(Henri Manuel. pllot.)
M. André Messager
produit depuis — acune déclaration de candida-
ture. On prononça un peu au hasard les noms
de MM. André Messager. Vincent d'Indy, Ga-
briel Pierné, Paul Vidal, Henri Büsser, et Hen-
ri Rabaud. MM. André Messager, Vincent d'In-
dy, Gabriel Pierné et Henri Büsser ayant fait
connaître qu'ils n'étaient pas candidats, MM.
Paul Vidal et Henri Rabaud restaient seuls en
présence, du moins dans les prévisions pu-
bliques.
Mais la Société des Concerts, dans une réu-
nion préliminaire, décida de faire auprès de M.
Messager une démarche pressante pour le faire
revenir sur sa décision. Et le directeur de l'O-
péra. d'abord inflexible, finit par céder à une
aussi flatteuse insistance, mais sous la condition
d'une entière approbation ministérielle.
Une démarche directe fut. faite aussitôt au-
près du ministre des Beaux-Arts, qui ratifia par
avance la nomination de M. Messager.
C'est dans ces conditions exemptes d'incerti-
tudes, que s'est tenue hier, au Conservatoire,
l'assemblée générale de la Société des Concerts.
M. Gabriel Fauré, directeur du Conservatoire,
présidait, assisté de MM. Philippe Gaubert, se-
cond chef d'orchestre; Heymann, secrétaire;
Clary, Mimart, Couppas, Austruy, Guillaume et
Gallon, chef des chœurs, qui composent le co-
mité.
M. Gabriel Fauré prononça un bref mais élo-
quent éloge de M. Georges Marty et indiqua la
date du 15 novembre pour le concert que la
Société se propose de donner au bénéfice de la
famille de son ancien directeur.
Puis M. Heymann, secrétaire, proposa au
vote des 88 sociétaires le nom de M. André Mes-
sager, qui fut élu par 85 voix. Il y eut 3 abs-
tentions. M. Roch, membre des chœurs, ayant
fait remarquer que M. Messager n'avait fait
aucune déclaration de candidature, son observa-
tion ne fut pas accueillie.
Le choix que vient de faire la Société des
Concerts rencontrera une faveur générale. Il est
de ceux qui permettent de féliciter sans réserve
et celui qui ep est l'objet et ceux qui l'ont fait.
Il emprunte même aux circonstances actuelles un
caractère très significatif.
Il consacre souverainement le mérite de M.
André Messager et le triomphe personnel que
lut valut la très parfaite interprétation orches-
trale du Crépuscule des Dieux, qu'il a dirigée..
FAUBLAS.
RENCONTRES 6 VISITES '-
Au nouvel hôtel
de Mme Héglon
Nous reVerrons la grande artiste au théâtre. e. La façon
d'enseigner l'art lyrique, « De Thaïs à Dalila.
Une interview ?
Le nez au vent, avec dans le cœur, malgré
l'automne, le joyeux refrain du « Printemps qui
chante », je passais avenue Henri-Martin, pas
plus tard qu'hier après-midi.
A l'angle de la rue Cortambert, un cab-auto
venait de s'arrêter: une main se tendait. Je ne
me trompais pas: c'était bien vers moi que la
main se tendait, avec le petit signe convention-
nel du (c Bonjour ami, comment ça va? »
Tiens ! Mme Héglon.
Et votre serviteur de se précipiter vers le
cab-auto.
Quelques instants acres — (faites avancer vo-
tre montre, me souffle Comœdia, qui n'aime
pas les longues visites) — quelques instants
après nous étions dans le salon du nouvel hôtel
que Mme Héglon a fait construire au numéro
64 de la rue Cortambert.
— Alors, c'est donc vrai, ce qu'on annonce?
sans dire adieu au théâtre, vous allez cependant
consacrer presque tout votre temps à l'ensei-
gnement ?
-C:est vrai.
- Et cet hôtel Louis XVI, si vaste, avec ses
grandes salles. c'est pour vos élèves?
— Pour mes élèves amateurs et profession-
nels, car j'enseigne aussi à des artistes qui ont
à se perfectionner dans tel ou tel rôle.
— Tel ou tel rôle? Même en dehors de votre
propre répertoire?
Une seconde, Mme Héglon laisse en suspens
mon étonnement, puis, d'un trait, elle m'ex-
plique :
— Même en dehors de mon répertoire. Ce se-
rait trop commode de n'avoir qu'à rappeler à
ses élèves la façon dont on a tenu un emploi.
Il m'est plus agréable, quoique plus difficile,
d'étudier pour mes élèves les rôles les plus
différents, les plus opposés souvent.
« C'est ainsi que, si vous venez cet hiver
assister à une de mes leçons, vous me verrez
jouer Thaïs, après avoir donné Carmen, et en-
core Ophélie, Marguerite, Tosca, Manon,
Orphée, Eisa, aussi bien que Dalila, Aida,
Omphale, Cassandre, Messaline, Théodora.
<( J'entends que l'esthétique domine: il
faut que la physionomie exprime toujours ce
qu'elle veut dire et que l'allure et le masque
soient en étrrite corrélation. Les yeux, selon
moi, constituent l'auxiliaire le plus précieux du
jeu de physionomie: j'y attache une particulière
attention. Tout, du reste, a une importance : les
mains (je ne dis pas les bras) qui veulent tant
dire, les jambes, la tête, tout doit concourir à
l'expression.
« II est également, si je puis dire, un art
annexe dont t'ai volontiers souci: c'est l'art du
costume. J'arrange moi-même des draperies sur
mes élèves.
« J'ai voulu qu'en venant ici les élèves ne
trouvent pas la leçon d'ensemble si commune
à beaucoup de professeurs, et où la convention
est souveraine. Ici, chacun doit trouver assise
à sa personnalité; j'essaye de pénétrer/de de-
viner les « moyens » de chacun, — moyens
que les intéressés eux-mêmes ignorent souvent
— et je développe ces moyens selon chacun.
a Mais, je vous demande pardon, cher ami,
c'est un véritable cours que je vous fais en
ce moment! *
— Et fort intéressant, T- si intéressant que
je m'en vais, ma foil tout rapporter aux leo
teurs de Comœdia.
Mme Héglon (Moreau.jetJ3Cl8. pbaftX
(D'après le tableau de Ferdinand Humbert).
— Non, pas cela. Dites plutôt combien l'al
été contente des résultats que j'ai obtenus, en
juillet dernier au Conservatoire Femina: deux)
premiers prix, Mmes Claude Girard et Rippa.
Monti; un deuxième prix, M. Letel.
« C'est d'ailleurs à la suite de ces résultats
que j'ai été sollicitée d'un peu partout et quel
Jean de Reszké lui-même m'a confié' de ses
élèves pour la mise en scène. française.
— Pour la mise en scène, et aussi.
— Vous le devinez -' pour tout. Car le.'
m'occupe énormément de la pose de la voix, de
l'articulation, du développement de la voix. Te-.
nez, moi qui suis le contralto le plus grave
qu'on ait pu entendre et descends jusqu'au
contre-ut, je fais monter mes élèves jusqu'au
contre-fa.
— Ah ! votre voix, chère madame, po'urquoi
nous en privez-vous?
— Mais qui vous dit que je ne rechanterai pas
au théâtre ; qui vous dit qu'en ce moment mê-
me, on ne m'offre pas une création?
- Une création?
- Vous voilà brûlant d'être indiscret!
- Non, mais je prends acte de vos paroles,
car lorsqu'on a votre talent, on se doit encore
au public, et d'ailleurs ne serait-ce pas le meik
leur exemple à donner à vos élèves? Quant à
moi, je me rappelle tous ces rôles dans les-
quels je vous ai applaudie: Dalila, Cassandre,
Omphale, Messaline, Théodora. où vous êtes
unique de beauté de voix et d'expression.
Et je reparle à Mme Héglon de sa belle car-
rière artistique, carrière modèle et qui doit con-
tinuer pour la joie de tous.
J'avais, écoutant la grande artiste, sorti un
menu block-notes et préparé le pencil de Tinter*
view :
— Nous disions donc, chère madame, qu'ace
tuellement, au numéro 15 du boulevard Lannes,
- à partir de novembre au Conservatoire Fe,
mina, — et vers la fin de l'année en votra
superbe hôtel du 64 de la rue Cortambert, — à
hautes demoiselles et jeunes gens de marque,
vous enseignerez le chant, la mise en seLle et
ce qui s'y rattache. Et surtout, chantez vuus*
même, il y a trop longtemps qu'on vous espère'
et quel plus merveilleux enseignement.
Si, à ce propos, je vous interviewais?
EDOUARD BEAUDU.
M. Jules Vois contre M. Jules Claretie
UN ULTIMATUM
Comme nous l'avions laissé prévoir, les né-
gociations sont rompues entre M. Jules Bois et
M. Jules Claretie. Hier, en manière d'ultimatum,
l'auteur de La Furie a fait tenir par huissier à
l'administrateur général de la Comédie-Française
ce petit exploit.
L'an mil neuf cent huit, le vingt-six octobre, à
la requête de Monsieur Jules Bois, homme de
lettres, demeurant à Paris. dix-huit, boulevard
Emile-Augier,
le, -etc.
Fais défense à monsieur Claretie, administra-
teur, général du théâtre de la Comédie-Française
et représentant de la Société du dit théâtre, sü
à Paris, rue de Richelieu, n°* 2, 4 et 6,
D'interrompre, serait-ce d'un jour. les répéti-
tions de la pièce La Furie, qui, selon les engage-
ments formels du dit monsieur Claretie ès qua-
lités, et l'évidence des faits, doit être maintenant
la première nouveauté de cette saison à la Co*
médie-Française.
Et à même requête que dessus, je lui ai fait
sommation d'avoir, à cet effet et sans le moindre
retard, à livrer à monsieur Jules Bois la scène
du dit théâtre, ainsi que l'exige la bonne ordo..
nance des répétitions.
Le Numêro :'S centimes
Mardi 21 Octobre 1908.
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKI -
RÉDACTION & ADMINISTRATION
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Adresse Télégraphique : COMŒDlA.PARIS
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UN AN oncle
Parïs et Départements. 24 fr. 12 fr.
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UN AN 6 MOI»
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Paris et Départements 24 fr. 12 frv
'Étranger. 4tO D 20 »
Une Epreuve
Mon ami Thoneau est un écrivain
Charmant, un observateur délicat, un
buteur dramatique plein d'esprit, de
grace et de vérité. Personne ne connaît
Mieux que moi son talent, car il me lit
touteS ses pièces, et chacune plutôt deux
OIS qu'une.
Je n'aime pas qu'on me lise des pièces.
I Au lycée, j'étais un des élèves les
:tnoins attentifs de la classe. J'écoutais
deux minutes les explications du profes-
i8eur, puis je me lançais sur une autre
?oute. Maintenant, quand on me lit des
Pièces, fussent-elles des chefs-d'œuvre,
"7" j'ai déjà eu l'honneur d'entendre des
chefs-d'œuvre, — j'ai toutes les peines
du monde à ne pas lâcher le lecteur. Je
y16 cramponne à lui comme un petit en-
Iant aux jupes de sa mère. Mais la foule
IIOUS sépare ! Bientôt, nous sommes très
join l'un de l'autre. Et de nouveau,
brusquement, je l'aperçois devant moi,
Jui lit avec passion, avec fougue, et j'ai
1 e moment d'effarement qu'on a le ma-
*ln. quand on se réveille dans une charn-
ue d'hôtel, et qu'on se dit: « Où suis-
3e donc? »
i, Mon ami Thoneau sait tout cela. Mais
dirait.qu'il n'en a cure. Il aime, lui,
«re ses pièces. Avant le succès de la pre-
mière, avant le succès de la lecture aux
Mstes, avant l'heureux résultat de la
ecture aux directeurs, il faut qu'il se
¡Paye des petits triomphes séparés en Ii-
Jjnt sa pièce à chacun de ses amis.
J'aime mieux, d'ailleurs, entendre ou
j|3ire^ semblant d'entendre une pièce en
hete-à-tête avec l'auteur. Car la présence
Id, un tiers suffit pour faire naître en moi
Impérieuse, la tyrannique, la torturante
-envie de rire (qui, bien entendu, ne
Jient jamais nous tourmenter à l'audi-
tion des pièces comiques).
.l noneau m avait dit: « a terminé
¡Un acte nouveau. Quand désirez-vous
11 entendre? »
Quand je désirais l'entendre?
Je répondis: « Mais tout de suite.
demain. après-demain! »
> - Je viendrai après-demain matin, dit
:l honeau.
- Attendez. Non. Après-demain,
jai quelque chose. Qu'est-ce que j'ai
donc, après-demain?. J'ai quelque
- chose. Venez plutôt mercredi. ou je<>
1 C'est cela, venez vendredi. Vous
Jn ,Ȃ; tes pas superstitieux?
Il était superstitieux. Mais il préférait
venir le vendredi qu'un jour plus tard.
- Je viendrai, dit-il, vendredi matin.
■ Non, vendredi soir. Le matin,
nous serions dérangés.
Je savais très bien que je n'y échap-
perais pas. Mais je voulais obtenir tous
les sursis. Le vendredi matin, j'écrirais
Un petit bleu, pour dire que je.n'étais
Pas bien portant, et pour gagner deux
ou trois jours.
Il se trouva que le vendredi matin, je
Souffrais d'un très fort mal de dents.
Comme je souffrais véritablement, je
écrivis pas à Thoneau que j'étais souf-
frant. Il aurait cru à un mensonge. Il
valait bien mieux le laisser venir, pour
qu'il pût constater que j'étais vraiment
malade. Alors, je dirais: « Vous voyez,
je suis absolument hors d'état de vous
écouter. »
Tout se passa d'abord comme je l'a-
vais espéré. Thoneau, armé de son ma-
nuscrit, se présenta vers six heures du
SOir. Il me vit installé sur un fauteuil,
effligé d'une fluxion indéniable, avec un
rempart d'ouate autour de mes oreilles
et de mon visage asymétrique.
- Mon vieux, je suis navré. Je vous
al laissé venir, parce que je pensais que
va irait mieux ! Mais ça reprend terri-
dément depuis une demi-heure.
— Pourtant, ça enfle, dit Thoneau.
vous devriez ressentir un certain -soula-
gement.
- En effet. Mais, j'ai un autre ab-
Ces de 1 autre côté. Je suis désolé de
vous avoir fait venir pour rien.
- Mais je suis content d'être venu
y «us voir. Je suis ennuyé seulement que
vous soyez souffrant.
- Alors, à quel jour voulez-vous que
nous remettions cette lecture? Mardi ou
mercredi?
— Ce sera comme vous voudrez, cher
ami !
Je ressentis à ce moment un tel sou-
lagement que je quittai imprudemment
le ton languissant que j'avais adopté.
rfhon3U ne manqua pas de s'en aper-
cevoir
— Ce qui m'ennuie de ne pouvoir
vous lire la pièce aujourd'hui, c'est que
j'ai pris jour demain avec Antoine, et je
ne serais pas fâché d'avoir votre avis
avant. Comme vous paraissez un peu
mieux maintenant.
- Mon vieux, je suis mieux. Mais
ça ne prend Par secousses brusques.
Vous commenceriez votre lecture, et
Vous seriez obligé de l'interrompre au
iQiilieu
- Essayons toujours, dit Thoneau.
— Je serai un très mauvais public, au-
jourd'hui !
— Mais non, mais non! dit Thoneau.
Il avait déjà débarrassé une petite ta-
ble et déficelait rapidement son manus-
crit.
- Je commence.
- Allez-y!
La lecture commença. C'était, je le
vis plus tard à la représentation, une
très jolie pièce. Pour le moment, j'en-
tendais parler confusément une baronne
nommée Mathilde, un nommé Gaston,
et une femme de chambre. A force de
tâcher d'avoir mal aux dents, j'avais
mal aux dents, en effet, mais pas assez
pour être en état de gémir avec une
conviction suffisante. De temps en
temps je jetais un coup d'œil sur le ma-
nuscrit. Il était écrit sur de grandes pa-
ges, de l'écriture de l'auteur. Manuscrit
assez épais, ma foi! C'était un fort acte.
Les pages étaient numérotées. Dans un
mouvement qu'il fit pour approcher le
cahier de la lumière, les pages s'écartè-
rent et il me sembla que le chiffre 34
était écrit sur la dernière. Nous n'étions
qu'à la page 6. La page 7 dura long-
temps. La moitié de la page 8 était bar-
rée, et j'avais déjà enregistré ce petit
bénéfice d'une demi-page, quand je vis
que la page suivante se numérotait ef-
frontément 8 bis.
Alors, quoi? nous ne savions plus où
nous allions. Il y avait des bis mainte-
nant ! Et peut-être, qui sait? des ter et
des ouater! Heureusement que je voyais
toujours pas mal de lignes rayées, des
longueurs évidentes, des développements
psychologiques qu'il s'était décidé à sup-
primer.
— Ça vous plaît-il? demanda tout à
coup Thoneau.
— Mais oui, beaucoup.
— C'est que vous gardez un tel si-
lence, me dit-il, que je suis un peu déso-
rienté. Je vous avoue que j'attendais
quelques marques d'approbation.
Je le rassurai, par civilité, par bonté
même :
- Ça me plaît énormément. Je trouve
cela amusant, plein de jolis détails. Si
je ne manifeste pas, c'est la faute à ce
sacré mal de dents.
- J'étais un peu inquiet, dit Tho-
neau.
Je le rassurai encore.
Je le rassurai même trop.
Car, l'instant d'après, je vis avec ter-
reur qu'il me lisait même les coupures!
Tristan BERNARD.
Nous publierons demain un article de
FÉLIX GALIPAUX
Spectateurs
On .js'étonne depuis longtemps de i'intétêt
prodigieux qu'une simple ouvreuse a su
donner à d'ingrats comptes rendus de con-
certs, et l'on admire avec raison l'esprit, le
bon sens et le cœur dont cette femme mo-
deste fait preuve d'une inlassable façon.
Pour peu que l'on étudie un peu le pu-
blic tel qu'il se montre dans les couloirs de
nos théâtres, un pareil tour de force s'ex-
plique' mieux.
On peut penser, en effet, sans paradoxe,
que la critique véritable d'une «pièce pour-
rait être faite de l'extérieur en analysant
seulement l'état d'esprit du public qu'elle
attire, et ce serait là, pour les moralistes,
un interminable sujet d'étude.
Voyez, par exemple, les dernières pièces
de Bourget ou de Bernstein; les partisans
de l'un ont applaudi à tout rompre, avec
ensemble, l'œuvre de leur chef de file;
ceux de M. Bernstein ont grogné et pro-
testé avec une évidente muflerie, et cela
n'est point sans donner quelque appui aux
théories sociales de M. Bourget.
Examinez également le public bon en-
fant, aimable et conciliant qui s'étouffe sans
se bousculer au vestiaire de l'Opéra-Comi-
que ou de l'Odéon, comparez-le aux quel-
ques habits noirs qui s'écrasent mécham-
Ment et volontairement lors d'une répétition
générale de l'Opéra. Lorsque vous saurez
que le monde officiel dominait en cet en-
droit, vous ne serez pas sans inquiétude
sur l'arrivisme et le manque absolu de po-
litesse qui caractérisent. ses représentants.
L'ouvreuse est donc particulièrement
bien, placée pour connaître l'état d'esprit
des couloirs; on me permettra cependant
de lui reprocher, pour mon compte, d'igno-
rer ce qui se passe dans la salle et de pré-
tendre, par exemple, que je me suis ennuyé
au Crépuscule des Dieux, alors qu'avec
respect je n'en ai point perdu une note. Au
surplus, j'avais à mon côté un wagnérien
passionné qui n'eût toléré de ma part au-
cune défaillance. Au moindre bruit, dans la
salle, il roulait des yeux terribles et sifflait,
tel une tête de Gorgone, dans la direction
des perturbateurs.
A la fin cependant le calme se fit et le
charme wagnérien opéra. Mon voisin, à la
manière d'un fakir, put se concentrer en
lui-même et, devenu indifférent aux vagues
figurations de la scène, il ne tarda pas à
fermer les yeux. Vers la fin du second acte
il se laissa doucement aller au fil du Rhin
et sa tête vint progressivement s'appuyer
sur mon épaule.
Brusquement, cependant, au dernier acte,
il se réveilla en sursaut, poussa un chut
terrible et s'arrêta court, un peu gêné.
Au bruit de son joyeux refrain, le régi-
ment Siegfried venait, une fois encore, de
faire ses cuivres.
G. DE PAWLOWSKI.
Echos
Ce soir, à huit heures un quart, au Théâ-
tre lyrique municipal de la Gaité, avec le
concours des artistes de l'Opéra-Comique,
reprise de Mignon.
..x~
Ce soi-r, à neuf heures, au Vaudeville,
reprise de Un Divorce, de MM. Paul Bour-
get et André Cury.
Ce soir, à huit heures-et demie, à l'Athé-
née, répétition générale de: Arsène Lupin
(nouvelles aventures, d'après les romans de
M. Maurice Leblanc)" pièce en trois actes
et quatre tableaux, de MM. Francis de
Croisset et Maurice Leblanc.
(Les dames ne seront admises à l'orches-
tre et au balcon que sans chapeau.)
Ce soir, à neuf heures, à la Scala, pre-
mière représentation de Occupe-toi d'Emi-
lienne! revue en deux actes et dix tableaux,
de MM. Rip et Arnould.
L
'auto de Thespis.
L'usage des tournées en automobile
n'est pas encore général. Il faut trop de
voitures, en effet pour transporter de ville
en ville toute une troupe.
Mais un impresario anglais vient d'avoir
une idée très pratique et si simple que per-
sonne n'y avait encore songé.
The Tatler.
Il a fait construire un important omnibus
automobile à deux plates-formes. Tous ses
comédiens y trouvent place, et il peut éga-
lement y placer leurs bagages, les acces-
soires et les costumes.
Plus de trains manqués, plus d'attentes
meurtrières la nuit dajis les gares, plus
d'itinéraires compliqués.
Sans compter que l'arrivée dans les vil-
les de province de cette pittoresque voiture
constitue une précieuse réclame.
Ah! décidément, ces anglo-saxons!.
L
e gentilhomme pelousard.
Il a été beaucoup parlé de lui ces
temps-ci. On examinait l'opportunité et les
conditions de son engagement dans notre
premier théâtre de comédie.
On affirme même que, grâce au patro-
nage de deux grands poètes, auteurs de la
Maison, son engagement serait signé de-
puis deux jours.
Et tandis qu'à ce point le monde artis-
tique se montre préoccupé de lui, le distin-
gué gentleman, oubliant qu'il est aussi co-
médien, se dissimule parmi les habitués de
la pelouse de Longchamp et, après avoir
joué l'unité au mutuel, suit avec une atten-
tion passionnée le cheval qui porte sa
chance avec lui.
E
n province. - -
C'est une matinée de charité. Le pro-
gramme, ou l'élément dramatique remporte,
se déroule avec monotonie.
Mais voici que le commissaire parlant
au public annonce d'une voix tonnante:
— M. X., dans Ruy BIas: la scène du
Banquet !
Et M„ X. de commencer:
Bon appétit, messieurs!
L
'amusement des enfants.
> Roméo et Juliette se rendent chez
Louise où ils trouvent la Maison en ordre.
jean de Nivelle y tient un conciliabule avec
l'Autre (vous savez bien, celui qui a
l'Oreille tendue). Que se disent-ils? Ils
parlent du Roi, qui d'après eux est Un mari
trop malin et qui se sert de l'Or de l'Emigré
pour faire le Tour du monde en 80 fours
à la recherche du Petit Fouchard, lequel
s'est réfugié au pays d'Israël.
Tout irait bien si Madame Bluff, parée
de la Ceinture de Balbine, ne s'était ren-
due à l'Agence Legri pour faire agir les
Quinze mille ayant à leur tête Mam'zelle
Trompette et le Caïd, qui ont plusieurs
Rendez-vous bourgeois Parmi les Pierres.
Mais le Chant du Cygne retentit: il est
l'Heure de la Bergère. — Occupe-toi d'A-
mélie! s'écrie le Bon Roi Dagobert en en-
trant, moi je passe mon Pantaloon, car c'est
aujourd'hui le Grand soir, l'Emouvante
journée va enfin se terminer!
Si cette histoire vous amuse, nous allons
la. re.re.recommencer !
LE BON CONSEILLER
Scénette intime en un acte
Monsieur, frileusement enveloppé dans un
pyjama de vigogne, déguste son déjeuner
du matin. La porte s'ouvre, et Jean, le
fidèle Jean, paraît portant sur un plateau
courrier et quotidiens.
- Eh bien, Jean, quel temps aujourd'hui ?
— Très froid, monsieur. La brise est glaciale
et monsieur fera bien de ne sortir que chaude-
ment vêtu. A ce propos, je ferai respectueuse-
ment remarquer à monsieur que sa garde-robe
est bien dépourvue: ses costumes et ses pardes-
sus ne sont plus de mode, ses chemises en bien
mauvais état; quant aux chaussettes, caleçons,
cravates et autres accessoires, le tout est en
quantité fort insuffisante. Je ne parle pas à mon-
sieur de ses chapeaux, sachant trop bien le soin
qu'il a de les renouveler chaque saison.
— Diable! Diable! Mais tu as raison de me
prévenir; je suis libre aujourd'hui, et je vais
consacrer mon temps à mes fournisseurs habi-
tuels.
— Habituels! Monsieur a bien dit habituels!
On voit bien que monsieur a été absent de Paris
depuis de longs mois et qu'il ne sait plus ce qui.
s'y passe. Et que le fournisseur habituel et su-
ranné n'existe plus depuis que s'est ouverte la
merveilleuse Maison qui. en quelques jours, a su
capter la confiance du Tout-Paris mondain!
— Quelle nouvelle m'apprends-tu ? Te moque-
rais-tu de moi, jean il
— Comment monsieur peut-il penser de pa-
reilles choses! Que monsieur se rende chez
Joseph PAQUIN, BERTHOLLE et Cie, 43,
boulevard des Capucines, et monsieur verra de
ses yeux la Maison la mieux installée et la
mieux organisée. Il y trouvera les tissus les plus
beaux et les coupeurs les plus réputés; le linge
le plus fin et les cravates les plus riches qu'il soit
jamais possible de rêver. Et je ne parle pas à
monsieur des chapeaux! Que monsieur sache
seulement que le célèbre Le Margy, de la Comé-
die-Impériale, n'en veut plus porter d'autres. Je
glisse sur les cannes et mille autres bibelots qui
sont tout à fait délicieux. Lundi 26 octobre et
pendant toute la semaine, il y a exposition de
trousseaux pour hommes, chez J. Paquiii, Bsr=
tholle et Cle. Que monsieur en profite, et sur-
tout que monsieur excuse mon bavardage !
— T'excuser. Jean, allons donc; tu sais bien
que tu flattes ma manie! Redonne-moi du cho-
colat. Comme dans Le Chant du Cygne, j'ai le
cœur en liesse. Ohé! Ohé!. J'irai demain me
rajeunir boulevard des Capucines. — Rideau.
E
ncore un!
Après Jean de Reszké, l'éminent
ténor de mondiale réputation, Imbart de la
Tour, une autre vedette de l'ut de poitrine,
professe lui aussi l'art de les émettre. Es-
pérons que le distingué créateur de L'Or
du Rhin et de Fervaal apprendra à ses élè-
ves non seulement ce secret, mais encore
celui, non moins précieux, de gagner de
gros appointements. malgré le dangereux
Syndicat des directeurs de théâtre!
c
'est à la marque de Dion-Bouton que
l'automobilisme doit son développe-
ment. Grâce a ses admirables voitures, les
profanes furent de suite conquis à la loco-
motion nouvelle, et aujourd'hui encore la
quatre cylindres de Dion-Bouton reste le
plus joli chef-d'œuvre de mécanique.
Le Masque de Verre.
A la Société des Concerts du Conservatoire
M. Messager est élu directeur
, à l'unanimité
La Société des Concerts du Conservatoire a
tenu hier une assemblée générale extraordi-
naire pour nommer le successeur de M. Georges
Marty.
A l'unanimité, M. André Messager a été élu
directeur de la Société des Concerts.
Ce choix, qui semble contredire la lettre fort
nette par laquelle M. André Messager déclinait
toute candidature à un poste qu'il jugeait peu
compatible avec ses fonctions de directeur de
l'Opéra, s'est fait très naturellement.
On se souvient que la succession de M. Geor-
ges Marty provoqua, dès qu'elle s'ouvrit, quel-
que fiévreuse' agitation dans le monde musical
très justement préoccupé des destinées de ce
poste envié.
En vérité, il ne fut fait alors — et il ne s'est
(Henri Manuel. pllot.)
M. André Messager
produit depuis — acune déclaration de candida-
ture. On prononça un peu au hasard les noms
de MM. André Messager. Vincent d'Indy, Ga-
briel Pierné, Paul Vidal, Henri Büsser, et Hen-
ri Rabaud. MM. André Messager, Vincent d'In-
dy, Gabriel Pierné et Henri Büsser ayant fait
connaître qu'ils n'étaient pas candidats, MM.
Paul Vidal et Henri Rabaud restaient seuls en
présence, du moins dans les prévisions pu-
bliques.
Mais la Société des Concerts, dans une réu-
nion préliminaire, décida de faire auprès de M.
Messager une démarche pressante pour le faire
revenir sur sa décision. Et le directeur de l'O-
péra. d'abord inflexible, finit par céder à une
aussi flatteuse insistance, mais sous la condition
d'une entière approbation ministérielle.
Une démarche directe fut. faite aussitôt au-
près du ministre des Beaux-Arts, qui ratifia par
avance la nomination de M. Messager.
C'est dans ces conditions exemptes d'incerti-
tudes, que s'est tenue hier, au Conservatoire,
l'assemblée générale de la Société des Concerts.
M. Gabriel Fauré, directeur du Conservatoire,
présidait, assisté de MM. Philippe Gaubert, se-
cond chef d'orchestre; Heymann, secrétaire;
Clary, Mimart, Couppas, Austruy, Guillaume et
Gallon, chef des chœurs, qui composent le co-
mité.
M. Gabriel Fauré prononça un bref mais élo-
quent éloge de M. Georges Marty et indiqua la
date du 15 novembre pour le concert que la
Société se propose de donner au bénéfice de la
famille de son ancien directeur.
Puis M. Heymann, secrétaire, proposa au
vote des 88 sociétaires le nom de M. André Mes-
sager, qui fut élu par 85 voix. Il y eut 3 abs-
tentions. M. Roch, membre des chœurs, ayant
fait remarquer que M. Messager n'avait fait
aucune déclaration de candidature, son observa-
tion ne fut pas accueillie.
Le choix que vient de faire la Société des
Concerts rencontrera une faveur générale. Il est
de ceux qui permettent de féliciter sans réserve
et celui qui ep est l'objet et ceux qui l'ont fait.
Il emprunte même aux circonstances actuelles un
caractère très significatif.
Il consacre souverainement le mérite de M.
André Messager et le triomphe personnel que
lut valut la très parfaite interprétation orches-
trale du Crépuscule des Dieux, qu'il a dirigée..
FAUBLAS.
RENCONTRES 6 VISITES '-
Au nouvel hôtel
de Mme Héglon
Nous reVerrons la grande artiste au théâtre. e. La façon
d'enseigner l'art lyrique, « De Thaïs à Dalila.
Une interview ?
Le nez au vent, avec dans le cœur, malgré
l'automne, le joyeux refrain du « Printemps qui
chante », je passais avenue Henri-Martin, pas
plus tard qu'hier après-midi.
A l'angle de la rue Cortambert, un cab-auto
venait de s'arrêter: une main se tendait. Je ne
me trompais pas: c'était bien vers moi que la
main se tendait, avec le petit signe convention-
nel du (c Bonjour ami, comment ça va? »
Tiens ! Mme Héglon.
Et votre serviteur de se précipiter vers le
cab-auto.
Quelques instants acres — (faites avancer vo-
tre montre, me souffle Comœdia, qui n'aime
pas les longues visites) — quelques instants
après nous étions dans le salon du nouvel hôtel
que Mme Héglon a fait construire au numéro
64 de la rue Cortambert.
— Alors, c'est donc vrai, ce qu'on annonce?
sans dire adieu au théâtre, vous allez cependant
consacrer presque tout votre temps à l'ensei-
gnement ?
-C:est vrai.
- Et cet hôtel Louis XVI, si vaste, avec ses
grandes salles. c'est pour vos élèves?
— Pour mes élèves amateurs et profession-
nels, car j'enseigne aussi à des artistes qui ont
à se perfectionner dans tel ou tel rôle.
— Tel ou tel rôle? Même en dehors de votre
propre répertoire?
Une seconde, Mme Héglon laisse en suspens
mon étonnement, puis, d'un trait, elle m'ex-
plique :
— Même en dehors de mon répertoire. Ce se-
rait trop commode de n'avoir qu'à rappeler à
ses élèves la façon dont on a tenu un emploi.
Il m'est plus agréable, quoique plus difficile,
d'étudier pour mes élèves les rôles les plus
différents, les plus opposés souvent.
« C'est ainsi que, si vous venez cet hiver
assister à une de mes leçons, vous me verrez
jouer Thaïs, après avoir donné Carmen, et en-
core Ophélie, Marguerite, Tosca, Manon,
Orphée, Eisa, aussi bien que Dalila, Aida,
Omphale, Cassandre, Messaline, Théodora.
<( J'entends que l'esthétique domine: il
faut que la physionomie exprime toujours ce
qu'elle veut dire et que l'allure et le masque
soient en étrrite corrélation. Les yeux, selon
moi, constituent l'auxiliaire le plus précieux du
jeu de physionomie: j'y attache une particulière
attention. Tout, du reste, a une importance : les
mains (je ne dis pas les bras) qui veulent tant
dire, les jambes, la tête, tout doit concourir à
l'expression.
« II est également, si je puis dire, un art
annexe dont t'ai volontiers souci: c'est l'art du
costume. J'arrange moi-même des draperies sur
mes élèves.
« J'ai voulu qu'en venant ici les élèves ne
trouvent pas la leçon d'ensemble si commune
à beaucoup de professeurs, et où la convention
est souveraine. Ici, chacun doit trouver assise
à sa personnalité; j'essaye de pénétrer/de de-
viner les « moyens » de chacun, — moyens
que les intéressés eux-mêmes ignorent souvent
— et je développe ces moyens selon chacun.
a Mais, je vous demande pardon, cher ami,
c'est un véritable cours que je vous fais en
ce moment! *
— Et fort intéressant, T- si intéressant que
je m'en vais, ma foil tout rapporter aux leo
teurs de Comœdia.
Mme Héglon (Moreau.jetJ3Cl8. pbaftX
(D'après le tableau de Ferdinand Humbert).
— Non, pas cela. Dites plutôt combien l'al
été contente des résultats que j'ai obtenus, en
juillet dernier au Conservatoire Femina: deux)
premiers prix, Mmes Claude Girard et Rippa.
Monti; un deuxième prix, M. Letel.
« C'est d'ailleurs à la suite de ces résultats
que j'ai été sollicitée d'un peu partout et quel
Jean de Reszké lui-même m'a confié' de ses
élèves pour la mise en scène. française.
— Pour la mise en scène, et aussi.
— Vous le devinez -' pour tout. Car le.'
m'occupe énormément de la pose de la voix, de
l'articulation, du développement de la voix. Te-.
nez, moi qui suis le contralto le plus grave
qu'on ait pu entendre et descends jusqu'au
contre-ut, je fais monter mes élèves jusqu'au
contre-fa.
— Ah ! votre voix, chère madame, po'urquoi
nous en privez-vous?
— Mais qui vous dit que je ne rechanterai pas
au théâtre ; qui vous dit qu'en ce moment mê-
me, on ne m'offre pas une création?
- Une création?
- Vous voilà brûlant d'être indiscret!
- Non, mais je prends acte de vos paroles,
car lorsqu'on a votre talent, on se doit encore
au public, et d'ailleurs ne serait-ce pas le meik
leur exemple à donner à vos élèves? Quant à
moi, je me rappelle tous ces rôles dans les-
quels je vous ai applaudie: Dalila, Cassandre,
Omphale, Messaline, Théodora. où vous êtes
unique de beauté de voix et d'expression.
Et je reparle à Mme Héglon de sa belle car-
rière artistique, carrière modèle et qui doit con-
tinuer pour la joie de tous.
J'avais, écoutant la grande artiste, sorti un
menu block-notes et préparé le pencil de Tinter*
view :
— Nous disions donc, chère madame, qu'ace
tuellement, au numéro 15 du boulevard Lannes,
- à partir de novembre au Conservatoire Fe,
mina, — et vers la fin de l'année en votra
superbe hôtel du 64 de la rue Cortambert, — à
hautes demoiselles et jeunes gens de marque,
vous enseignerez le chant, la mise en seLle et
ce qui s'y rattache. Et surtout, chantez vuus*
même, il y a trop longtemps qu'on vous espère'
et quel plus merveilleux enseignement.
Si, à ce propos, je vous interviewais?
EDOUARD BEAUDU.
M. Jules Vois contre M. Jules Claretie
UN ULTIMATUM
Comme nous l'avions laissé prévoir, les né-
gociations sont rompues entre M. Jules Bois et
M. Jules Claretie. Hier, en manière d'ultimatum,
l'auteur de La Furie a fait tenir par huissier à
l'administrateur général de la Comédie-Française
ce petit exploit.
L'an mil neuf cent huit, le vingt-six octobre, à
la requête de Monsieur Jules Bois, homme de
lettres, demeurant à Paris. dix-huit, boulevard
Emile-Augier,
le, -etc.
Fais défense à monsieur Claretie, administra-
teur, général du théâtre de la Comédie-Française
et représentant de la Société du dit théâtre, sü
à Paris, rue de Richelieu, n°* 2, 4 et 6,
D'interrompre, serait-ce d'un jour. les répéti-
tions de la pièce La Furie, qui, selon les engage-
ments formels du dit monsieur Claretie ès qua-
lités, et l'évidence des faits, doit être maintenant
la première nouveauté de cette saison à la Co*
médie-Française.
Et à même requête que dessus, je lui ai fait
sommation d'avoir, à cet effet et sans le moindre
retard, à livrer à monsieur Jules Bois la scène
du dit théâtre, ainsi que l'exige la bonne ordo..
nance des répétitions.
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