Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-09-18
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 18 septembre 1908 18 septembre 1908
Description : 1908/09/18 (A2,N354). 1908/09/18 (A2,N354).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76460084
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
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2'Annêe. =»N»354 (QuotidienV je-e Numéro : 5 centimes
Vendredi 18 Septembre 1908.
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Rédacteur en Chef: G, de PAWLOWSKl
RÉDACTION & ADMINISTRATION «
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
- TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA=PARIS
ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOIS
- -
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION : -.
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
e Adresse Télégraphique : COMŒDlA=PARlS
ABONNEMENTS :
UN AN 6 MO.'S
- -
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
Les Pots
et les Taupes
Larousse dit que le pot est un vase
de terre ou de métal » et que les taupes
sont des « mammifères insectivores aux
yeux peu développés et qui vivent sous
terre ».
Nous, nous appelons « pot » celui qui
nous enroue à force de hurler quand
nous lui parlons, et « taupe », tel autre
qui suit les prêtres dans la rue, les pre-
nant pour des femmes.
Vaut-il mieux être pot ou taupe?
Si l'une de ces infirmités est désagréa-
ble pour un monsieur quelconque, elle
est désastreuse pour un comédien.
Un bureaucrate peut, impunément,
« porter du 2», ça n'a aucune impor-
tance. Il chausse son nez de besicles ; si
ça ne suffit pas, il superfète avec un lor-
gnon et n'est en rien gêné pour salir
avec de l'encre noire du beau papier
blanc qui ne lui a rien fait.
Mais quel martyre pour un artiste
dramatique que d'être taupe ou pot!
Le dur d'oreilles est très à plaindre.
La moindre distraction lui est interdite,
sous peine de commettre d'irréparables
gaffes..,
Il continue tranquillement à se maquil-
ler dans sa loge, sans se douter que
« c'est commencé » - il n a pas oui
l'avertisseur.
Dans la coulisse, il ne doit prendre
part à aucune conversation ; il s'oublie-
rait, et, comme la réplique donnée en
scène ne peut le frapper, v'lan! il rate
son entrée.
Les tours pendables qu'on fait a ces
auberges pleines sont innombrables!
La plus classique consiste à attirer
l'impercepteur dans un coin et à lui
dire :
— Mon vieux, écoute-moi; tu sais si
je suis un bon copain? Il faut que je te
donne un conseil, dans ton intérêt, uni-
quement. Tu n'en doutes pas!.. Je ne
suis pas jaloux de toi, c'pas? Nous ne
jouons pas le même emploi. et puis,
nous le jouerions, du reste. Mais en-
fin, ça n'est pas le cas. moi, je joue
les bellâtres ; toi, tu ne peux pas. Bref,
j'écoutais ta scène, tout à l'heure, avec
la duchesse. eh bien! mon vieux, que
veux-tu que je te dise?. ça n'est pas
ça!. Ça n'est pas ça du tout!. Oh!
parbleu! tu la joues bien. tu as parfai-
tement compris le rôle. D'abord, tu as
très bien habillé le bonhomme. Et puis,
enfin, quoi ! je ne veux pas te faire des
compliments, je n'ai pas l'intention de
t'emprunter cent sous.. Tu sais parfai-
tement et mieux que moi ce que tu vaux.
II n'y a rien à reprendre à ta diction
nette, impeccable, à ton geste sobre mais
aisé, à ta physionomie si mobile sur la-.
quelle on lit tous les sentiments que tu
es sensé éprouver. Tout ça est très bien ;
seulement. voilà. tu l'as prise trop
bas, ta scène. on ne t'entend pas, ma
parole!. Ainsi, pendant que tu répé-
tais, je suis allé dans le fond de la salle.
Je ne la connaissais pas, cette scène, et
les camarades m'avaient tous dit que tu
la jouais très bien. Hier, tu as fait
pleurer Adolphe. il est vrai qu'il pleure
pour rien!. Eh bien! mon vieux, tu
sais, j'avais beau tendre l'oreille à la
déchirer. rien. nib.pas ça! Et c'est
dommage, parce qu'elle est à grand effet
et, sûrement, c'est cette scène-la qui
doit emporter le« morceau. Si cette scè-
tie-la ne les dégèle jJas. pas la peine
de continuer. la pièce est dans le lac.
Donc, mon gros, vas-y carrément,
donne de la voix. Ce n'est pas ça qui
te gêne, d'ailleurs. C'est même précisé-
ment parce que je sais que ce n'est pas
,ça qui te gêne, que tu en as à revendre,
de l'organe, que je me permets, par
'pure amitié pour toi, de te dire: Vas-y,
gueule !
— Mais, mon petit, c'est une scène
confidentielle. j'apprends à la duchesse
que son mari la trompe. Son mari est
dans la pièce à côté, il peut entendre, la
cloison est mince, et s'il surgit.
— Oui, je sais bien, parbleu! tout ce
que tu fais est très raisonné, mais enfin
ie ne t'apprendrai pas que le théâtre
est le royaume de la convention, sans
quoi. il n'y aurait plus de théâtre pos-
sible.
- Ah! tais-toi! j'ai des enfants.
•— Il est certain qu'il y a un milieu.
Je ne te conseille pas de brailler, mais
de là à dire la messe basse.
— C'est bien, je te remercie; je ferai
attention.
Et, le soir venu, alors que la duchesse,
tout en émoi, murmure faiblement ses
répliques, son partenaire gueule comme
un sourd qui cherche à ameuter le quar-
tier.
Conséquence: emboîtage.
Une autre petite plaisanterie qui a
bien son parfum est la suivante :
Comme les artistes savent que le
sourd parle « au jugé», lorsque les lè-
vres de celui qui lui donne la réplique
cessent de remuer, ce dernier, sa répli-
que dite, continue à mâcher des mots
sans son, ce qui fait que «le temps»
Peut durer comme ça jusqu'à la. pro-
chaine Exposition : le sourd ne parlera
que lorsque Vautre arrêtera ses mandi-
bules.
Je pourrais continuer ainsi à vous nar-
rer des tas d'histoires de ce genre, mais
Je ne veux pas fournir à ceux de mes
camarades enclins aux blagues des re-
cettes pour embêter leurs partenaires à
l'ouïe rebelle.
J'aime mieux raconter ce qu'un lous-
tic a fait à un de mes collègues, nommé
Dalbert, qui, lui, fait partie des taupes.
Oh! oui, il en fait partie, le bougre!
D'abord, à la ville, quand on le de-
mande au téléphone, instinctivement,
il salue l'appareil et met son lorgnon
pour mieux voir. Que de fois, dans son
empressement soigneux à hospitaliser
un bouton qui brillait par terre, s'est-il
baissé pour ramasser un joli petit cra-
chat!
Dans combien de décbrs a-t-il voulu
sortir par la cheminée, contre tous les
usages établis.
Ce pauvre Dalbert est tellement
myope qu'un soir, ayant à chanter
sur un grand théâtre une chansonnette
et désirant, autant que possible, « aller
en mesure », il fit mettre une ampoule
électrique au bout du bâton du chef
d'orchestre!! (Authentique.)
Cependant, je crois que la plus sémil-
lante est celle qui lui est arrivée au
théâtre des Célestins, de Lyon.
Il jouait Saint-Gaudens dans La Dame
aux Camélias. Vous étonnerais-je beau-
coup en vous disant que le rôle de
Marguerite Gautier était tenu par Sa-
rah Bernhardt — qui le jouait sans
souffleur.
Dalbert est un sarah bernhardiste
fervent! Que d'articles fougueux n'a-t-il
pas écrits dans Le Murmure de la Biè-
vre, en faveur de la décoration de la
grande tragédienne, ci-devant profes-
seur du Conservatoire!
Pour faire partie des tournées Sarah,
Dalbert jouerait pour rien. du moins,
il l'affirme (Ulimann m'a dit que c'était
de la blague).
Bref, Sarah n'a pas un pensionnaire
plus dévoué, plus zélé, plus attentionné
que Dalbert, qui se trouve toujours par
hasard sur la route de la grande artiste
quand elle se dirige de sa loge vers le
plateau, prêt à lui ouvrir une porte ou
soulever une portière.
Comme il est en scène à la fin de la
pièce, moment psychologique des ova-
tions, des fleurs et des hurrahs, un soir,
un camarade, à l'instant où Marguerite
venait de rendre son 4,653" dernier sou-
pir, lui pousse le coude en lui murmu-
rant:
.,. Le bouquet. le-bouquet.
Dalbert, léger, fringant, se précipite
à la rampe et s'empare vivement d'un
amas de. fleurs. Mais à peine avait-il em-
poigné la gerbe que des cris de putois
retentirent. Le malheureux myope arra-
chait sans s'en douter le chapeau fleuri
et les chichis d'une spectatrice qui se di-
rigeait vers la sortie.
Félix GALIPAUX.
Nous publierons demain un article de,
GEORGES LECOMTE
L'Etat médecin
Le tyran Ugolin dévorait ses enfants pour
leur conserver un père; l'Etat, dans notre
pays, témoigne une égale sollicitude en-
vers les artistes lyriques et se plaît à les
jeter dans la rue pour leur éviter les hor-
reurs du trottoir.
Depuis une année que les quêtes sont
supprimées, trois cents concerts de pro-
vince ont été fermés et quinze cents per-
sonnes privées de toute ressource. Ce ré-
sultat était à prévoir et, sous ce titre:
« Une nouvelle mise en scène de Tartufe »,
je l'ai signalé ici-même, il y a de cela long-
temps. Cela me valut, du reste, quelques
lettres aimables dans lesQuelles on m'ac-
cusait tout simplement d'être l'un des plus
fermes défenseurs de la prostitution en
France. Je ne m'en émus guère, car cette
façon de discuter les problèmes économi-
ques fut toujours habituelle dans notre
pays. Chaque fois que des économistes sé-
rieux ont signalé un phénomène social et
l'ont enregistré scientifiquement, ils ont été
accusés tout aussitôt d'être les auteurs res-
ponsables du mal qu'ils dénonçaient. C'est
ainsi qu'Adam Smith devint l'avôtre du ca-
pitalisme et Malthus celui de ia dépopula-
tion, ce qui est à peu près aussi logique
que d'accuser Pasteur d'avoir introduit la
rage en France et le docteur Roux d'avoir
inventé le croup. Mais c'est comme cela.
Aussi bien, les pcliticiens, depuis plu-
sieurs années, ont-ils pensé qu'il valait
mieux renoncer à toute étude sérieuse des
problèmes sociaux et'qu'il était plus avan-
tageux pour eux de personnifier, aux yeux
de la foule, des promesses illusoires plutôt
que des réalités inévitables.
Au àirplus, cela simplifie singulièrement
leur travail. Lorsqu'un ouvrier se plaint de
ne pas gagner suffisamment, on décrète
l'augmentation des salaires: lorsqu'il de-
mande à ne plus travailler, on vote le re-
pos obligatoire ; et tout est terminé.
L'Etat ressemble, en cela, aux médecins
qui s'inquiètent tort peu de savoir quelles
sont les ressources de leurs clients et se
contentent d'indiquer des remèdes utopi-
ques. Lorsqu'une mendiante vient les con-
sulter pour un rhume, ils lui conseillent un
voyage en Egypte et une cure d'air à Bé-
narès; ils n'ont plus, ensuite, qu'à toucher
le prix de la consultation avec l'intime sa-
tisfaction d'avoir dit tout ce qu'il fallait.,
Peut-être, un jour, se décidera-t-on, dans
notre pays, à comprendre que les questions
économiques ne relèvent pas de la politique
et que la vie n'est pas un roman. Les ar-
tistes lyriques, actuellement sur le pavé,
commencent, je crois, à avoir quelques idées
nettes sur ce point. La corde qu'on leur a
donnée pour les soutenir leur serre un peu
le cou et leur enthousiasme pour les me-
sures prises en leur faveur par l'Etat me
paraît, depuis un an, s'être singulièrement
atténué.
G. DE PAWLOWSKI.
Échos
Ce soir, à huit heures et demie, réou-
verture de la Comédie de l'Epoque, 10,
boulevard Beaumarchais: La Demoiselle de
chez Maxim, Hôtel de l'Ouest, chambre 22.
A
l'assaut du billet de faveur.
Les membres de la commission de
la Société des auteurs sont revenus de va-
cances pleins d'ardeur. Ils sont décidés à
ne point ménager leurs peines. La lettre
que M. Maurice Hennequin, secrétaire de
la commission, a adressée à chacun d'eux
en est la preuve.
En raison de l'échéance prochaine — le
1er octobre — du nouveau traité signé avec
dix des plus importants directeurs de théâ-
tre de Paris, et de la discussion du traité
de M. Antoine, arrivé à expiration, les mem-
bres de la commission se réuniront au-
jourd'hui, à une heure et demie. Le
même jour, à trois heures, ils s'entendront
avec le groupe d'études récemment créé
pour Paris.
Et demain, à deux heures, nouvelle
réunion de la commission, qui discutera la
conduite à tenir vis-à-vis de l'Association
des directeurs de théâtre, dont le président,
M. Albert Carré, et quelques membres dé-
légués par leurs collègues, seront reçus à
trois heures et demie.
Sous la présidence de M. Paul Hervieu,
la commission des auteurs ne dort pas sur
ses lauriers.
D
imanche soir, Mme Catulle Mendès,
qui villégiature à Saint-Jean-de-Luz
depuis le mois d'août, se trouvait dans la
salle des fêtes du casino, avec son jeune
fils, bambin d'une douzaine d'années,
quand, soudain, elle s'aperçut de la dispa-
rition de ce dernier.
Mme Catulle Mendès
D'où grand émoi et recherche immé-
diate du jeune fugitif. Grâce à l'obligeance
de plusieurs amis, le coupable, qui était
allé se mêler à la foule pour prendre part
aux réjouissance publiques de la « triki-
traka », grand divertissement espagnol, sur
la place Louis-XIV, reparut honteux et con-
fus,et, devant sa gracieuse maman, qui l'ad-
monestait sévèrement, il jura, mais un peu
tard, qu'on ne l'y prendrait plus.
u
es pronostics d'Apolonius.
Un intéressant organe quotidien,
mort trop jeune, Tragœdia, avait, en-
tre autres belles découvertes, mis la main
sur un jeune vieux major tout à fait remar-
quable, qui répondait au nom harmonieux
d'Apolonius, et dont les prévisions — soit
science, soit hasard — se réalisèrent tou-
jours de point en point.
Voici ce qu'il nous promet pour cette
seconde quinzaine de septembre:
Du 16 au 18, incertain, plutôt beau; du
19 au 22, nuageux, mais beau, un peu
chaud. Le 22 au soir et le 23 au matin,
gouttes et ondées, temps frais, et, du 23
au soir jusqu'au 30, nuageux mais beau,
assez chaud, parfois même très chaud.
M
ax Linder mourant.
Max Linder, le joyeux comique des
Variétés, qui se trouvait en vacances, ces
jours-ci, à Bordeaux, est à l'agonie.
Notre collaborateur Rouzier-Dorcières,
qui est un de ses amis intimes, a reçu, hier
soir, de MM. Brisson et Laroque — de
deux côtés différents — deux dépêches,
hélas! identiques. Les deux télégrammes,
sans expliquer les causes de la maladie, an-
noncent que le jeune premier comique est
à toute extrémité.
Nous voulons croire que ces nouvelles
de Bordeaux sont prématurées et que Max
Linder, le joyeux acteur, le champion d'es-
crime, reviendra à la vie, à ses amis, au
succès.
L
es débuts de Christine Nilsson.
La reprise de Paul et Virginie, à la
Gaîté Lyrique, a rappelé l'attention pu-
blique sur Christine Nilsson, la créatrice
inoubliable du rôle de Virginie.
On sait que, emmenée à Paris par des
dames de la société suédoise, qui l'avaient
découverte, jouant du violon, dans les rues
de Stockholm, elle fut confiée à la garde
de la veuve d'un musicien de l'Opéra et
que celle-ci la remit immédiatement entre
les mains du seul professeur qu'elle eut ja-
mais, qui lui fit, complète, son éducation
musicale et la présenta à M. Carvalho,
alors directeur du Théâtre Lyrique.
- Ce professeur n'était autre que François
Martel, dont le fils est mort récemment,
professeur lui aussi.
L
'école des ministres.
A la gare de Lyon. Il s'en va là-
bas, dans le Centre, porter la bonne pa-
role. Hauts fonctionnaires, employés, agents
et badauds lui font cortège. Le chef de
gare, casquette en main, l'accompagne au
wagon réservé et lui ouvre la Dortière-
Mais le grand homme' paraît inquiet. Il
cherche quelque chose. Il est fiévreux, im-
patient. Il y a comme de l'angoisse dans
son regard. Puis, tout à coup, il sourit. Son
visage s'illumine. Là, dans un comparti-
ment, à côté de son wagon, un rideau s'est
écarté et une petite main s'agite.
Elle est là !. Il monte alors d'une em-
jambée et le train se met en marche.
Et aussitôt, alors, elle se jette dans ses
bras. Elle y reste longtemps.
Demain, les journaux diront l'éloquence
du ministre, son arrivée triomphale, l'ar-
deur avec laquelle il a défendu la cause
de la démocratie et propagé, dans les mas-
ses, la défiance contre l'Eglise. Et personne,
parmi tous ceux qui admireront sa parole
et applaudiront à son succès, ne se doutera
jamais que la République n'y était pour
rien.
A Paris, ils se voyaient trop rarement.
Ils sont trop connus. On jase trop sur leur
compte. Alors, elle a demandé un petit
congé et ils sont partis, heureux, insou-
cieux, loin des indiscrets et des théâtres du
boulevard. --
c
'est du Nord que nous vient la lu-
mière, mais du Midi que nous vient
le succès.
Deux œuvres musicales qui vont bientôt
être reprises à Paris: Au temps jadis, bal-
let en trois actes, de M. Maurice Vaucaire,
et Œil de Gazelle, opéra-comique en trois
actes, de M. Paul Ferrier, dont Mlle Ma-
riette Sully créa le principal rôle, ont été,
on le sait, créés à Monte-Carlo.
Nous les reverrons.
A
u pays d'Aristarque.
Derniers tuyaux: Le grand poète
qui devait prendre la critique dramatique
dans un journal du matin à trois sous, la
prendrait, nous dit-on, dans un autre jour-
nal du matin à trois sous. Et cela au
grand déplaisir d'un de ses jeunes et bril-
lants et talentueux confrères auquel il
semblait qu'elle dût naturellement revenir.
Attendons.
B
ulletin.
Nous sommes heureux d'annoncer
que M. Victorien Sardou est entré en
pleine convalescence. L'éminent académi-
cien, qu'une bronchite avait alité, a pu se
lever depuis deux jours.
L
es idées noires.
Quand, la semaine dernière, on ap-
prit la crise soudaine de neurasthénie dont
vient d'être .atteinte Mme,.Gense, on négligea
de rappeler que l'amusante artiste, si re-
marquée dans Le Coup de Jarnac, avait été
mariée avec une célébrité du théâtre.
Devinez avec qui?
Avec le fameux Chocolat, le joyeux com-
père de Footit. --
v
œu.
es derniers livres de Marinetti, sa
revue littéraire: Poesia, qui est parmi les
plus intéressants périodiques de ce moment,
surtout la valeur littéraire d'une pièce
telle que Le Roi Bombance, font espérer
qu'il nous sera bientôt donné d'applaudir à
Paris une œuvre dramatique d'un des meil-
leurs écrivains de la jeune école italienne.
Et M. Marinetti, qui compte à Paris tant
d'admirateurs et d'amis, ne manquerait pas,
chez nous, de remporter le succès qu'il mé-
rite — c'est-à-dire un très grand succès.
L
administration est satisfaite.
C'était au nouveau Lyrique, pen-
dant un entr acte de Paul et Virgine. Cinq
ou six personnes étaient arrêtées devant la
nouvelle ordonnance sur les théâtres, im-
mense placard affiché en bonne place dans
le couloir du rez-de-chaussée. Mais, tels
que les spectateurs de la fable:
Ëcarquillaient les yeux et ne pouvaient rien voir !
C'est que le texte de la susdite ordon-
nance est protégé par un épais treillage de
fils de fer, qui le garantit à tel point qu'il
est impossible d'en déchiffrer une seule
ligne.
MM. Isola frères sont aussi facétieux
que charmants directeurs.
L
a question d'argent.
e métier devient bon. D'ici peu de
temps, les chefs d orchestre n'auront plus
rien à envier aux ténors. Comme eux, ils
toucheront la forte somme, le jour où l'idée
leur viendra de traverser l'Atlantique pour
aller faire fortune en Amérique.
Au Manhattan Opéra de New-York, le
maestro Campanini touche la somme ron-
delette de 3,750 francs par semaine, et le
capellmeister Mahler touche, pour une sai-
son de deux mois et demi — exactement,
du 1er février au 15 avril — 62,500 francs.
Muck, un autre capellmeister réputé,
touche de la Société symphonique de Bos-
ton, 75,000 francs pour une saison de cinq
mois. Pour la même durée d'engagement,
un débutant, M. Karl Potlig, chef d'orches-
tre à Philadelphie, reçoit 40,000 francs.
En, France, quand un chef d'orchestre
gagne 12,000 francs pour l'année, il peut
s'estimer heureux!
D
e tous les succès dont puisse le plus
s'enorgueillir une marque de cons-
truction, au même titre qu'une œuvre ar-
tistique, c'est encore celui du suffrage de
la masse qui est le plus probant. Et c'est
le cas des voivjres Bayard, qu'on sait être
en majorité sur les routes, depuis les aler-
tes 10 chevaux jusqu'aux puissantes limou-
sines de tourisme. -
u
n point stratégique bien connu des ai-
mables viveurs de Paris, comme des
gourmets raffinés, cest le oun-ouge-
Palace qui, de Montmartre, attire vers la
Butte Sacrée tous ceux qui aiment délicieu-
sement dîner, dans un cadre exquis, tout
parfumé de gaieté. Ce bel établissement
fait honneur à Paris et à la cuisine fran-
çaise.
Le Masque de Verre.
Les Deux Hommes
Ce qui fait le bonheur des uns !
Que ne puisse arrêter "Sherlock H olmes" P.
Je Voudrais toujours "Tirer au Flanc" 1.
Que pensez=f:)ous de Mathusalem ?.
M .Gémier M. Rolle
Des deux plus grands succès qu on ait enre-
gistrés depuis de longues années, l'un s'est
terminé dimanche, l'autre n'est pas loin de sa
fin.
Sherlock Holmes a momentanément inter-
rompu ses exploits au Théâtre-Antoine et, bien-
tôt, le retour de Monsieur le maire mettra un ter-
me aux prouesses que durant plus de quinze
cents soirées Tire au flanc accomplit à Déjgzet.
Si « le génie est une longue patience », com-
me a dit un philosophe, MM. Rolle et Gémier
doivent être des hommes de génie et c'est une
bonne fortune de converser, en notre temps mé-
diocre, avec des humains aussi favorisés.
Je leur fus donc, voici quelque temps déjà,
rendre visite et, avec ce respect que l'on doit
aux héros, je les interrogeai. Il ne me convenait
point d'adresser à de tels mortels une question
banale ; les propos futiles, les lieux communs,
les phrases toutes faites me semblaient dépla-
cés.
Je voulais trouver un préambule original, une
entrée en matière brillante, et ne sachant com-
ment entamer la conversation, je leur dis tout
simplement :
— Que pensez-vous de Mathusalem?.
M. Rolle est un vieux philosophe. Le directeur
de Déjazet, auquel une longue expérience des
choses du théâtre et de la vie a donné, sur
tous sujets, un sens parfait des réalités, m'a dit :
— Mathusalem est un grand homme ! Je le
bénis, je lui rends grâce et je forme le voeu
qu'il puisse de longues années encore prolonger
le cours de son existence favorisée.
» Je voudrais,, nous dit-il, avec une gravité
extasiée, que Tire au flanc continuât toujours.
Quel" pMTsIr "j 'aurais à voir, les générations se
succédant, les saisons accomplissant leur cours,
les régimes politiques se modifiant, les aéro-
planes faisant place aux autobus, l'Alsace et la
Lorraine nous étant rendues, M. Jaurès deve-
nant silencieux, M. Hervé patriote, M. Grégori
dreyfusard, M. Catulle Mendès collaborant avec
M. Victorien Sardou. quel plaisir j'aurais à
voir longtemps encore Tire au flanc orner l'affi-
che de mon théâtre.
» Mon rêve, mon seul désir sont que l'œuvre
millénaire de MM. Sylvane et Mouézy-Eon ré-
siste à tout, et, qu'après être entrée si facilement
dans la longévité, elle passe dans l'immortalité
pour demeurer ensuite et immuablement dans
l'éternité.
» C'est si fructueux d'abord et si commode
ensuite un succès de ce genre ! La besogne est
simplifiée, le travail directorial presque nul. On
n'a plus l'ennui de lire des pièces, on est '-c-
barrassé de l'aride et hasardeux devoir de cher-
cher — souvent vainement!— le succès; };us
de répétitions, plus de critiques dont il Sa''e
supporter le verdict souvent sévère. On peut
cultiver son jardin, lire les bons auteurs, vivre,
à son gré, d'une vie méditative ou joyeuse, et
se dire que, sans qu'on ait rien à faire, rien à
penser et rien qui vous inquiète, une bonne
pièce, vous rapporte chaque soir de quoi sa-
tisfaire les besoins et les goûts d'un homme
modeste qui, en se contentant tous les jours de
peu, finit par beaucoup acquérir au bout de l'an.
» C'est le rêve., c'est l'âge d'or, et que peut-
on désirer de plus que de voir l'âge dJor ne
jamais s'achever!. »
M. Gémier, qui est brutal et concis en scs
jugements, m'a simplement répondu :
— Mathusalem me dégoûte !. C'est un vieux
•raseur!. J'ai horreur.de ces crampons qui
s'incrustent et dont on ne peut se débarrasser.
» D'abord un succès aussi durable que cebiï
de Sheriock Holmes me déroute et me démonte.
Il change à la fois toutes mes habitudes et rou-
tes celles de mon théâtre. Je suis accoutume à
plus de variété, à moins de monotonie dans
l'existence, et, pendant quatre cents jours, avoir
chez soi le même monsieur qui, sous prétexte
qu'il vous enrichit, vous contraint à subir ses
raisonnements et à admirer son mérite, je vous
le dis, c'est excessif ! Je préfère à ce triomphe in-
curable, à cette fortune à perpétuité, les bons
petits spectacles qui durent six semaines, à :)ui
cinquante ou soixante jours de vie suffisent am-
plement et qui meurent de bonne heure.
» Place aux jeunes!. C'est un supplice
épouvantable pour un artiste consciencieux, pour
un homme qui connaît les devoirs et les char-
ges que son passé et la glorieuse successif
qu'il a acceptée lui commandent, de se dire,
que parce qu'une pièce fait tous les soirs le
maximum, il ne pourra plus jamais jouer une
œuvre nouvelle, révéler un talent inconnu, et
qu'il usera sa jeunesse et son activité dans une
oisiveté dorée.
» Faut du Sherlock Holmes, ce n'est pas moi
qui dirait le contraire, mais tout de même pas
trop n'en faut!.
» Et je crois qu'il serait temps que je f?ssë
autre chose !. » •
Ainsi parlèrent — ou à peu près — ces aci.x
hommes. J'écoutai et je notai leur enthousiasme
et leurs doléances et je pensai que le cœur
humain est rempli «Tinsondables contradictions,
que l'homme est divers et capricieux et que ce
qui fait le bonheur des uns ne fait pas toujours
le.bonheur des autres.
Tout de même, si je pris la plus large part
à la satisfaction de M. Rolle, je ne plaignis
pas trop M. Gémier.
Durant ces réflexions, un homme me heurta,
je levai la tête et reconnus un directeur de
théâtre qui collectionne les fours et dont jamais
les pièces ne tiennent l'affiche plus d'une se-
maine.
Il semblait douloureux et penchait lourdement
la tête. Quand il me vit, il voulut m'apitover
sur son triste sort et me conter ses malheurs,
mais je l'interrompis, et brutalement je lui. 1
criai :
— Vous en avez une veine!.
Cet homme m'a pris pour un fou.
PIERRE MORTIER.
Les Artistes lyriques et la Quête
M. Desomer iE. Brod, viiom
-"
AU CASINO DU POINT-DU-JOUR Mme aune.
lanière et l'enfant n'en perdent pas une bouchée
Je sors à l'instantâè la seconde réunion or-
ganisée par les artistes lyriques indépendants,
dans la salle de concert de l'Avenue du Pont-de-
Flandre et le souci de la vérité m'oblige à
dire — ce qui n'est pas une tâche bien pénible
- que le succès de cette soirée fut encore plus
grand, s'il est possible, que celui remporté la
veille par les dévoués organisateurs.
Le comité de défense des artistes indépen-
dants â fait, en peu de temps, une grande r -
sogne, et ceux dont il a charge de défendre ks
intérêts devront lui savoir gré de n'avoir pas
compté ni son temps ni sa peine.
Nous avons expose, dans ces colonnes, Jec re-
vendications des artistes de concert qui pn vê-
tent contre la su®pressi^ on des quêtes qui lut
2'Annêe. =»N»354 (QuotidienV je-e Numéro : 5 centimes
Vendredi 18 Septembre 1908.
-" 9 * l[< JB fl£|^88 ^ÊÊÊ
#
Rédacteur en Chef: G, de PAWLOWSKl
RÉDACTION & ADMINISTRATION «
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
- TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA=PARIS
ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOIS
- -
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION : -.
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
e Adresse Télégraphique : COMŒDlA=PARlS
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UN AN 6 MO.'S
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Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
Les Pots
et les Taupes
Larousse dit que le pot est un vase
de terre ou de métal » et que les taupes
sont des « mammifères insectivores aux
yeux peu développés et qui vivent sous
terre ».
Nous, nous appelons « pot » celui qui
nous enroue à force de hurler quand
nous lui parlons, et « taupe », tel autre
qui suit les prêtres dans la rue, les pre-
nant pour des femmes.
Vaut-il mieux être pot ou taupe?
Si l'une de ces infirmités est désagréa-
ble pour un monsieur quelconque, elle
est désastreuse pour un comédien.
Un bureaucrate peut, impunément,
« porter du 2», ça n'a aucune impor-
tance. Il chausse son nez de besicles ; si
ça ne suffit pas, il superfète avec un lor-
gnon et n'est en rien gêné pour salir
avec de l'encre noire du beau papier
blanc qui ne lui a rien fait.
Mais quel martyre pour un artiste
dramatique que d'être taupe ou pot!
Le dur d'oreilles est très à plaindre.
La moindre distraction lui est interdite,
sous peine de commettre d'irréparables
gaffes..,
Il continue tranquillement à se maquil-
ler dans sa loge, sans se douter que
« c'est commencé » - il n a pas oui
l'avertisseur.
Dans la coulisse, il ne doit prendre
part à aucune conversation ; il s'oublie-
rait, et, comme la réplique donnée en
scène ne peut le frapper, v'lan! il rate
son entrée.
Les tours pendables qu'on fait a ces
auberges pleines sont innombrables!
La plus classique consiste à attirer
l'impercepteur dans un coin et à lui
dire :
— Mon vieux, écoute-moi; tu sais si
je suis un bon copain? Il faut que je te
donne un conseil, dans ton intérêt, uni-
quement. Tu n'en doutes pas!.. Je ne
suis pas jaloux de toi, c'pas? Nous ne
jouons pas le même emploi. et puis,
nous le jouerions, du reste. Mais en-
fin, ça n'est pas le cas. moi, je joue
les bellâtres ; toi, tu ne peux pas. Bref,
j'écoutais ta scène, tout à l'heure, avec
la duchesse. eh bien! mon vieux, que
veux-tu que je te dise?. ça n'est pas
ça!. Ça n'est pas ça du tout!. Oh!
parbleu! tu la joues bien. tu as parfai-
tement compris le rôle. D'abord, tu as
très bien habillé le bonhomme. Et puis,
enfin, quoi ! je ne veux pas te faire des
compliments, je n'ai pas l'intention de
t'emprunter cent sous.. Tu sais parfai-
tement et mieux que moi ce que tu vaux.
II n'y a rien à reprendre à ta diction
nette, impeccable, à ton geste sobre mais
aisé, à ta physionomie si mobile sur la-.
quelle on lit tous les sentiments que tu
es sensé éprouver. Tout ça est très bien ;
seulement. voilà. tu l'as prise trop
bas, ta scène. on ne t'entend pas, ma
parole!. Ainsi, pendant que tu répé-
tais, je suis allé dans le fond de la salle.
Je ne la connaissais pas, cette scène, et
les camarades m'avaient tous dit que tu
la jouais très bien. Hier, tu as fait
pleurer Adolphe. il est vrai qu'il pleure
pour rien!. Eh bien! mon vieux, tu
sais, j'avais beau tendre l'oreille à la
déchirer. rien. nib.pas ça! Et c'est
dommage, parce qu'elle est à grand effet
et, sûrement, c'est cette scène-la qui
doit emporter le« morceau. Si cette scè-
tie-la ne les dégèle jJas. pas la peine
de continuer. la pièce est dans le lac.
Donc, mon gros, vas-y carrément,
donne de la voix. Ce n'est pas ça qui
te gêne, d'ailleurs. C'est même précisé-
ment parce que je sais que ce n'est pas
,ça qui te gêne, que tu en as à revendre,
de l'organe, que je me permets, par
'pure amitié pour toi, de te dire: Vas-y,
gueule !
— Mais, mon petit, c'est une scène
confidentielle. j'apprends à la duchesse
que son mari la trompe. Son mari est
dans la pièce à côté, il peut entendre, la
cloison est mince, et s'il surgit.
— Oui, je sais bien, parbleu! tout ce
que tu fais est très raisonné, mais enfin
ie ne t'apprendrai pas que le théâtre
est le royaume de la convention, sans
quoi. il n'y aurait plus de théâtre pos-
sible.
- Ah! tais-toi! j'ai des enfants.
•— Il est certain qu'il y a un milieu.
Je ne te conseille pas de brailler, mais
de là à dire la messe basse.
— C'est bien, je te remercie; je ferai
attention.
Et, le soir venu, alors que la duchesse,
tout en émoi, murmure faiblement ses
répliques, son partenaire gueule comme
un sourd qui cherche à ameuter le quar-
tier.
Conséquence: emboîtage.
Une autre petite plaisanterie qui a
bien son parfum est la suivante :
Comme les artistes savent que le
sourd parle « au jugé», lorsque les lè-
vres de celui qui lui donne la réplique
cessent de remuer, ce dernier, sa répli-
que dite, continue à mâcher des mots
sans son, ce qui fait que «le temps»
Peut durer comme ça jusqu'à la. pro-
chaine Exposition : le sourd ne parlera
que lorsque Vautre arrêtera ses mandi-
bules.
Je pourrais continuer ainsi à vous nar-
rer des tas d'histoires de ce genre, mais
Je ne veux pas fournir à ceux de mes
camarades enclins aux blagues des re-
cettes pour embêter leurs partenaires à
l'ouïe rebelle.
J'aime mieux raconter ce qu'un lous-
tic a fait à un de mes collègues, nommé
Dalbert, qui, lui, fait partie des taupes.
Oh! oui, il en fait partie, le bougre!
D'abord, à la ville, quand on le de-
mande au téléphone, instinctivement,
il salue l'appareil et met son lorgnon
pour mieux voir. Que de fois, dans son
empressement soigneux à hospitaliser
un bouton qui brillait par terre, s'est-il
baissé pour ramasser un joli petit cra-
chat!
Dans combien de décbrs a-t-il voulu
sortir par la cheminée, contre tous les
usages établis.
Ce pauvre Dalbert est tellement
myope qu'un soir, ayant à chanter
sur un grand théâtre une chansonnette
et désirant, autant que possible, « aller
en mesure », il fit mettre une ampoule
électrique au bout du bâton du chef
d'orchestre!! (Authentique.)
Cependant, je crois que la plus sémil-
lante est celle qui lui est arrivée au
théâtre des Célestins, de Lyon.
Il jouait Saint-Gaudens dans La Dame
aux Camélias. Vous étonnerais-je beau-
coup en vous disant que le rôle de
Marguerite Gautier était tenu par Sa-
rah Bernhardt — qui le jouait sans
souffleur.
Dalbert est un sarah bernhardiste
fervent! Que d'articles fougueux n'a-t-il
pas écrits dans Le Murmure de la Biè-
vre, en faveur de la décoration de la
grande tragédienne, ci-devant profes-
seur du Conservatoire!
Pour faire partie des tournées Sarah,
Dalbert jouerait pour rien. du moins,
il l'affirme (Ulimann m'a dit que c'était
de la blague).
Bref, Sarah n'a pas un pensionnaire
plus dévoué, plus zélé, plus attentionné
que Dalbert, qui se trouve toujours par
hasard sur la route de la grande artiste
quand elle se dirige de sa loge vers le
plateau, prêt à lui ouvrir une porte ou
soulever une portière.
Comme il est en scène à la fin de la
pièce, moment psychologique des ova-
tions, des fleurs et des hurrahs, un soir,
un camarade, à l'instant où Marguerite
venait de rendre son 4,653" dernier sou-
pir, lui pousse le coude en lui murmu-
rant:
.,. Le bouquet. le-bouquet.
Dalbert, léger, fringant, se précipite
à la rampe et s'empare vivement d'un
amas de. fleurs. Mais à peine avait-il em-
poigné la gerbe que des cris de putois
retentirent. Le malheureux myope arra-
chait sans s'en douter le chapeau fleuri
et les chichis d'une spectatrice qui se di-
rigeait vers la sortie.
Félix GALIPAUX.
Nous publierons demain un article de,
GEORGES LECOMTE
L'Etat médecin
Le tyran Ugolin dévorait ses enfants pour
leur conserver un père; l'Etat, dans notre
pays, témoigne une égale sollicitude en-
vers les artistes lyriques et se plaît à les
jeter dans la rue pour leur éviter les hor-
reurs du trottoir.
Depuis une année que les quêtes sont
supprimées, trois cents concerts de pro-
vince ont été fermés et quinze cents per-
sonnes privées de toute ressource. Ce ré-
sultat était à prévoir et, sous ce titre:
« Une nouvelle mise en scène de Tartufe »,
je l'ai signalé ici-même, il y a de cela long-
temps. Cela me valut, du reste, quelques
lettres aimables dans lesQuelles on m'ac-
cusait tout simplement d'être l'un des plus
fermes défenseurs de la prostitution en
France. Je ne m'en émus guère, car cette
façon de discuter les problèmes économi-
ques fut toujours habituelle dans notre
pays. Chaque fois que des économistes sé-
rieux ont signalé un phénomène social et
l'ont enregistré scientifiquement, ils ont été
accusés tout aussitôt d'être les auteurs res-
ponsables du mal qu'ils dénonçaient. C'est
ainsi qu'Adam Smith devint l'avôtre du ca-
pitalisme et Malthus celui de ia dépopula-
tion, ce qui est à peu près aussi logique
que d'accuser Pasteur d'avoir introduit la
rage en France et le docteur Roux d'avoir
inventé le croup. Mais c'est comme cela.
Aussi bien, les pcliticiens, depuis plu-
sieurs années, ont-ils pensé qu'il valait
mieux renoncer à toute étude sérieuse des
problèmes sociaux et'qu'il était plus avan-
tageux pour eux de personnifier, aux yeux
de la foule, des promesses illusoires plutôt
que des réalités inévitables.
Au àirplus, cela simplifie singulièrement
leur travail. Lorsqu'un ouvrier se plaint de
ne pas gagner suffisamment, on décrète
l'augmentation des salaires: lorsqu'il de-
mande à ne plus travailler, on vote le re-
pos obligatoire ; et tout est terminé.
L'Etat ressemble, en cela, aux médecins
qui s'inquiètent tort peu de savoir quelles
sont les ressources de leurs clients et se
contentent d'indiquer des remèdes utopi-
ques. Lorsqu'une mendiante vient les con-
sulter pour un rhume, ils lui conseillent un
voyage en Egypte et une cure d'air à Bé-
narès; ils n'ont plus, ensuite, qu'à toucher
le prix de la consultation avec l'intime sa-
tisfaction d'avoir dit tout ce qu'il fallait.,
Peut-être, un jour, se décidera-t-on, dans
notre pays, à comprendre que les questions
économiques ne relèvent pas de la politique
et que la vie n'est pas un roman. Les ar-
tistes lyriques, actuellement sur le pavé,
commencent, je crois, à avoir quelques idées
nettes sur ce point. La corde qu'on leur a
donnée pour les soutenir leur serre un peu
le cou et leur enthousiasme pour les me-
sures prises en leur faveur par l'Etat me
paraît, depuis un an, s'être singulièrement
atténué.
G. DE PAWLOWSKI.
Échos
Ce soir, à huit heures et demie, réou-
verture de la Comédie de l'Epoque, 10,
boulevard Beaumarchais: La Demoiselle de
chez Maxim, Hôtel de l'Ouest, chambre 22.
A
l'assaut du billet de faveur.
Les membres de la commission de
la Société des auteurs sont revenus de va-
cances pleins d'ardeur. Ils sont décidés à
ne point ménager leurs peines. La lettre
que M. Maurice Hennequin, secrétaire de
la commission, a adressée à chacun d'eux
en est la preuve.
En raison de l'échéance prochaine — le
1er octobre — du nouveau traité signé avec
dix des plus importants directeurs de théâ-
tre de Paris, et de la discussion du traité
de M. Antoine, arrivé à expiration, les mem-
bres de la commission se réuniront au-
jourd'hui, à une heure et demie. Le
même jour, à trois heures, ils s'entendront
avec le groupe d'études récemment créé
pour Paris.
Et demain, à deux heures, nouvelle
réunion de la commission, qui discutera la
conduite à tenir vis-à-vis de l'Association
des directeurs de théâtre, dont le président,
M. Albert Carré, et quelques membres dé-
légués par leurs collègues, seront reçus à
trois heures et demie.
Sous la présidence de M. Paul Hervieu,
la commission des auteurs ne dort pas sur
ses lauriers.
D
imanche soir, Mme Catulle Mendès,
qui villégiature à Saint-Jean-de-Luz
depuis le mois d'août, se trouvait dans la
salle des fêtes du casino, avec son jeune
fils, bambin d'une douzaine d'années,
quand, soudain, elle s'aperçut de la dispa-
rition de ce dernier.
Mme Catulle Mendès
D'où grand émoi et recherche immé-
diate du jeune fugitif. Grâce à l'obligeance
de plusieurs amis, le coupable, qui était
allé se mêler à la foule pour prendre part
aux réjouissance publiques de la « triki-
traka », grand divertissement espagnol, sur
la place Louis-XIV, reparut honteux et con-
fus,et, devant sa gracieuse maman, qui l'ad-
monestait sévèrement, il jura, mais un peu
tard, qu'on ne l'y prendrait plus.
u
es pronostics d'Apolonius.
Un intéressant organe quotidien,
mort trop jeune, Tragœdia, avait, en-
tre autres belles découvertes, mis la main
sur un jeune vieux major tout à fait remar-
quable, qui répondait au nom harmonieux
d'Apolonius, et dont les prévisions — soit
science, soit hasard — se réalisèrent tou-
jours de point en point.
Voici ce qu'il nous promet pour cette
seconde quinzaine de septembre:
Du 16 au 18, incertain, plutôt beau; du
19 au 22, nuageux, mais beau, un peu
chaud. Le 22 au soir et le 23 au matin,
gouttes et ondées, temps frais, et, du 23
au soir jusqu'au 30, nuageux mais beau,
assez chaud, parfois même très chaud.
M
ax Linder mourant.
Max Linder, le joyeux comique des
Variétés, qui se trouvait en vacances, ces
jours-ci, à Bordeaux, est à l'agonie.
Notre collaborateur Rouzier-Dorcières,
qui est un de ses amis intimes, a reçu, hier
soir, de MM. Brisson et Laroque — de
deux côtés différents — deux dépêches,
hélas! identiques. Les deux télégrammes,
sans expliquer les causes de la maladie, an-
noncent que le jeune premier comique est
à toute extrémité.
Nous voulons croire que ces nouvelles
de Bordeaux sont prématurées et que Max
Linder, le joyeux acteur, le champion d'es-
crime, reviendra à la vie, à ses amis, au
succès.
L
es débuts de Christine Nilsson.
La reprise de Paul et Virginie, à la
Gaîté Lyrique, a rappelé l'attention pu-
blique sur Christine Nilsson, la créatrice
inoubliable du rôle de Virginie.
On sait que, emmenée à Paris par des
dames de la société suédoise, qui l'avaient
découverte, jouant du violon, dans les rues
de Stockholm, elle fut confiée à la garde
de la veuve d'un musicien de l'Opéra et
que celle-ci la remit immédiatement entre
les mains du seul professeur qu'elle eut ja-
mais, qui lui fit, complète, son éducation
musicale et la présenta à M. Carvalho,
alors directeur du Théâtre Lyrique.
- Ce professeur n'était autre que François
Martel, dont le fils est mort récemment,
professeur lui aussi.
L
'école des ministres.
A la gare de Lyon. Il s'en va là-
bas, dans le Centre, porter la bonne pa-
role. Hauts fonctionnaires, employés, agents
et badauds lui font cortège. Le chef de
gare, casquette en main, l'accompagne au
wagon réservé et lui ouvre la Dortière-
Mais le grand homme' paraît inquiet. Il
cherche quelque chose. Il est fiévreux, im-
patient. Il y a comme de l'angoisse dans
son regard. Puis, tout à coup, il sourit. Son
visage s'illumine. Là, dans un comparti-
ment, à côté de son wagon, un rideau s'est
écarté et une petite main s'agite.
Elle est là !. Il monte alors d'une em-
jambée et le train se met en marche.
Et aussitôt, alors, elle se jette dans ses
bras. Elle y reste longtemps.
Demain, les journaux diront l'éloquence
du ministre, son arrivée triomphale, l'ar-
deur avec laquelle il a défendu la cause
de la démocratie et propagé, dans les mas-
ses, la défiance contre l'Eglise. Et personne,
parmi tous ceux qui admireront sa parole
et applaudiront à son succès, ne se doutera
jamais que la République n'y était pour
rien.
A Paris, ils se voyaient trop rarement.
Ils sont trop connus. On jase trop sur leur
compte. Alors, elle a demandé un petit
congé et ils sont partis, heureux, insou-
cieux, loin des indiscrets et des théâtres du
boulevard. --
c
'est du Nord que nous vient la lu-
mière, mais du Midi que nous vient
le succès.
Deux œuvres musicales qui vont bientôt
être reprises à Paris: Au temps jadis, bal-
let en trois actes, de M. Maurice Vaucaire,
et Œil de Gazelle, opéra-comique en trois
actes, de M. Paul Ferrier, dont Mlle Ma-
riette Sully créa le principal rôle, ont été,
on le sait, créés à Monte-Carlo.
Nous les reverrons.
A
u pays d'Aristarque.
Derniers tuyaux: Le grand poète
qui devait prendre la critique dramatique
dans un journal du matin à trois sous, la
prendrait, nous dit-on, dans un autre jour-
nal du matin à trois sous. Et cela au
grand déplaisir d'un de ses jeunes et bril-
lants et talentueux confrères auquel il
semblait qu'elle dût naturellement revenir.
Attendons.
B
ulletin.
Nous sommes heureux d'annoncer
que M. Victorien Sardou est entré en
pleine convalescence. L'éminent académi-
cien, qu'une bronchite avait alité, a pu se
lever depuis deux jours.
L
es idées noires.
Quand, la semaine dernière, on ap-
prit la crise soudaine de neurasthénie dont
vient d'être .atteinte Mme,.Gense, on négligea
de rappeler que l'amusante artiste, si re-
marquée dans Le Coup de Jarnac, avait été
mariée avec une célébrité du théâtre.
Devinez avec qui?
Avec le fameux Chocolat, le joyeux com-
père de Footit. --
v
œu.
es derniers livres de Marinetti, sa
revue littéraire: Poesia, qui est parmi les
plus intéressants périodiques de ce moment,
surtout la valeur littéraire d'une pièce
telle que Le Roi Bombance, font espérer
qu'il nous sera bientôt donné d'applaudir à
Paris une œuvre dramatique d'un des meil-
leurs écrivains de la jeune école italienne.
Et M. Marinetti, qui compte à Paris tant
d'admirateurs et d'amis, ne manquerait pas,
chez nous, de remporter le succès qu'il mé-
rite — c'est-à-dire un très grand succès.
L
administration est satisfaite.
C'était au nouveau Lyrique, pen-
dant un entr acte de Paul et Virgine. Cinq
ou six personnes étaient arrêtées devant la
nouvelle ordonnance sur les théâtres, im-
mense placard affiché en bonne place dans
le couloir du rez-de-chaussée. Mais, tels
que les spectateurs de la fable:
Ëcarquillaient les yeux et ne pouvaient rien voir !
C'est que le texte de la susdite ordon-
nance est protégé par un épais treillage de
fils de fer, qui le garantit à tel point qu'il
est impossible d'en déchiffrer une seule
ligne.
MM. Isola frères sont aussi facétieux
que charmants directeurs.
L
a question d'argent.
e métier devient bon. D'ici peu de
temps, les chefs d orchestre n'auront plus
rien à envier aux ténors. Comme eux, ils
toucheront la forte somme, le jour où l'idée
leur viendra de traverser l'Atlantique pour
aller faire fortune en Amérique.
Au Manhattan Opéra de New-York, le
maestro Campanini touche la somme ron-
delette de 3,750 francs par semaine, et le
capellmeister Mahler touche, pour une sai-
son de deux mois et demi — exactement,
du 1er février au 15 avril — 62,500 francs.
Muck, un autre capellmeister réputé,
touche de la Société symphonique de Bos-
ton, 75,000 francs pour une saison de cinq
mois. Pour la même durée d'engagement,
un débutant, M. Karl Potlig, chef d'orches-
tre à Philadelphie, reçoit 40,000 francs.
En, France, quand un chef d'orchestre
gagne 12,000 francs pour l'année, il peut
s'estimer heureux!
D
e tous les succès dont puisse le plus
s'enorgueillir une marque de cons-
truction, au même titre qu'une œuvre ar-
tistique, c'est encore celui du suffrage de
la masse qui est le plus probant. Et c'est
le cas des voivjres Bayard, qu'on sait être
en majorité sur les routes, depuis les aler-
tes 10 chevaux jusqu'aux puissantes limou-
sines de tourisme. -
u
n point stratégique bien connu des ai-
mables viveurs de Paris, comme des
gourmets raffinés, cest le oun-ouge-
Palace qui, de Montmartre, attire vers la
Butte Sacrée tous ceux qui aiment délicieu-
sement dîner, dans un cadre exquis, tout
parfumé de gaieté. Ce bel établissement
fait honneur à Paris et à la cuisine fran-
çaise.
Le Masque de Verre.
Les Deux Hommes
Ce qui fait le bonheur des uns !
Que ne puisse arrêter "Sherlock H olmes" P.
Je Voudrais toujours "Tirer au Flanc" 1.
Que pensez=f:)ous de Mathusalem ?.
M .Gémier M. Rolle
Des deux plus grands succès qu on ait enre-
gistrés depuis de longues années, l'un s'est
terminé dimanche, l'autre n'est pas loin de sa
fin.
Sherlock Holmes a momentanément inter-
rompu ses exploits au Théâtre-Antoine et, bien-
tôt, le retour de Monsieur le maire mettra un ter-
me aux prouesses que durant plus de quinze
cents soirées Tire au flanc accomplit à Déjgzet.
Si « le génie est une longue patience », com-
me a dit un philosophe, MM. Rolle et Gémier
doivent être des hommes de génie et c'est une
bonne fortune de converser, en notre temps mé-
diocre, avec des humains aussi favorisés.
Je leur fus donc, voici quelque temps déjà,
rendre visite et, avec ce respect que l'on doit
aux héros, je les interrogeai. Il ne me convenait
point d'adresser à de tels mortels une question
banale ; les propos futiles, les lieux communs,
les phrases toutes faites me semblaient dépla-
cés.
Je voulais trouver un préambule original, une
entrée en matière brillante, et ne sachant com-
ment entamer la conversation, je leur dis tout
simplement :
— Que pensez-vous de Mathusalem?.
M. Rolle est un vieux philosophe. Le directeur
de Déjazet, auquel une longue expérience des
choses du théâtre et de la vie a donné, sur
tous sujets, un sens parfait des réalités, m'a dit :
— Mathusalem est un grand homme ! Je le
bénis, je lui rends grâce et je forme le voeu
qu'il puisse de longues années encore prolonger
le cours de son existence favorisée.
» Je voudrais,, nous dit-il, avec une gravité
extasiée, que Tire au flanc continuât toujours.
Quel" pMTsIr "j 'aurais à voir, les générations se
succédant, les saisons accomplissant leur cours,
les régimes politiques se modifiant, les aéro-
planes faisant place aux autobus, l'Alsace et la
Lorraine nous étant rendues, M. Jaurès deve-
nant silencieux, M. Hervé patriote, M. Grégori
dreyfusard, M. Catulle Mendès collaborant avec
M. Victorien Sardou. quel plaisir j'aurais à
voir longtemps encore Tire au flanc orner l'affi-
che de mon théâtre.
» Mon rêve, mon seul désir sont que l'œuvre
millénaire de MM. Sylvane et Mouézy-Eon ré-
siste à tout, et, qu'après être entrée si facilement
dans la longévité, elle passe dans l'immortalité
pour demeurer ensuite et immuablement dans
l'éternité.
» C'est si fructueux d'abord et si commode
ensuite un succès de ce genre ! La besogne est
simplifiée, le travail directorial presque nul. On
n'a plus l'ennui de lire des pièces, on est '-c-
barrassé de l'aride et hasardeux devoir de cher-
cher — souvent vainement!— le succès; };us
de répétitions, plus de critiques dont il Sa''e
supporter le verdict souvent sévère. On peut
cultiver son jardin, lire les bons auteurs, vivre,
à son gré, d'une vie méditative ou joyeuse, et
se dire que, sans qu'on ait rien à faire, rien à
penser et rien qui vous inquiète, une bonne
pièce, vous rapporte chaque soir de quoi sa-
tisfaire les besoins et les goûts d'un homme
modeste qui, en se contentant tous les jours de
peu, finit par beaucoup acquérir au bout de l'an.
» C'est le rêve., c'est l'âge d'or, et que peut-
on désirer de plus que de voir l'âge dJor ne
jamais s'achever!. »
M. Gémier, qui est brutal et concis en scs
jugements, m'a simplement répondu :
— Mathusalem me dégoûte !. C'est un vieux
•raseur!. J'ai horreur.de ces crampons qui
s'incrustent et dont on ne peut se débarrasser.
» D'abord un succès aussi durable que cebiï
de Sheriock Holmes me déroute et me démonte.
Il change à la fois toutes mes habitudes et rou-
tes celles de mon théâtre. Je suis accoutume à
plus de variété, à moins de monotonie dans
l'existence, et, pendant quatre cents jours, avoir
chez soi le même monsieur qui, sous prétexte
qu'il vous enrichit, vous contraint à subir ses
raisonnements et à admirer son mérite, je vous
le dis, c'est excessif ! Je préfère à ce triomphe in-
curable, à cette fortune à perpétuité, les bons
petits spectacles qui durent six semaines, à :)ui
cinquante ou soixante jours de vie suffisent am-
plement et qui meurent de bonne heure.
» Place aux jeunes!. C'est un supplice
épouvantable pour un artiste consciencieux, pour
un homme qui connaît les devoirs et les char-
ges que son passé et la glorieuse successif
qu'il a acceptée lui commandent, de se dire,
que parce qu'une pièce fait tous les soirs le
maximum, il ne pourra plus jamais jouer une
œuvre nouvelle, révéler un talent inconnu, et
qu'il usera sa jeunesse et son activité dans une
oisiveté dorée.
» Faut du Sherlock Holmes, ce n'est pas moi
qui dirait le contraire, mais tout de même pas
trop n'en faut!.
» Et je crois qu'il serait temps que je f?ssë
autre chose !. » •
Ainsi parlèrent — ou à peu près — ces aci.x
hommes. J'écoutai et je notai leur enthousiasme
et leurs doléances et je pensai que le cœur
humain est rempli «Tinsondables contradictions,
que l'homme est divers et capricieux et que ce
qui fait le bonheur des uns ne fait pas toujours
le.bonheur des autres.
Tout de même, si je pris la plus large part
à la satisfaction de M. Rolle, je ne plaignis
pas trop M. Gémier.
Durant ces réflexions, un homme me heurta,
je levai la tête et reconnus un directeur de
théâtre qui collectionne les fours et dont jamais
les pièces ne tiennent l'affiche plus d'une se-
maine.
Il semblait douloureux et penchait lourdement
la tête. Quand il me vit, il voulut m'apitover
sur son triste sort et me conter ses malheurs,
mais je l'interrompis, et brutalement je lui. 1
criai :
— Vous en avez une veine!.
Cet homme m'a pris pour un fou.
PIERRE MORTIER.
Les Artistes lyriques et la Quête
M. Desomer iE. Brod, viiom
-"
AU CASINO DU POINT-DU-JOUR Mme aune.
lanière et l'enfant n'en perdent pas une bouchée
Je sors à l'instantâè la seconde réunion or-
ganisée par les artistes lyriques indépendants,
dans la salle de concert de l'Avenue du Pont-de-
Flandre et le souci de la vérité m'oblige à
dire — ce qui n'est pas une tâche bien pénible
- que le succès de cette soirée fut encore plus
grand, s'il est possible, que celui remporté la
veille par les dévoués organisateurs.
Le comité de défense des artistes indépen-
dants â fait, en peu de temps, une grande r -
sogne, et ceux dont il a charge de défendre ks
intérêts devront lui savoir gré de n'avoir pas
compté ni son temps ni sa peine.
Nous avons expose, dans ces colonnes, Jec re-
vendications des artistes de concert qui pn vê-
tent contre la su®pressi^ on des quêtes qui lut
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