Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-09-10
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 10 septembre 1908 10 septembre 1908
Description : 1908/09/10 (A2,N346). 1908/09/10 (A2,N346).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646000t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
2e Année, ==N° 346 (Quotidien)
Lë Nùmêro : 3 cêiitîfàëS
Jeudi 10 Septembre 1908.
Rédacteur en Chef fi. de PAWLOWSK1
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA*PARIS
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOIS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE: 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA-PARIS
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UN AN 6 MOIS
UN AN -
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 - a
PLAISIRS D'ETE
Un dénouement
Or donc, après avoir été saisi de ver-
tige devant le vide effrayant de sa pen-
; sée. et la fatale blancheur de son papier,
le jeune dramaturge, se raccrochant à
;deux aphorismes successifs: « L exécu-
tion n'est rien » et: « Le sujet n'est
rien » — le jeune dramaturge aperçoit
qu'il n'a pas la vie sauve, et qu'il est
tout de même indispensable, en matière
dramatique, que quelque chose soit quel-
'Que chose.
Alors, il décide : « Le dénouement est
tout. »
Et je ne trouve pas cela si ridicule.
Avec un excellent sujet et une bril-
lante exécution, maint auteur imprudent
s'est égaré dans le plus ténébreux des
fours, parce qu'il n'avait qu'un mauvais
dénouement, ou pas de dénouement du
tout.
C'est, en effet, sur le dénouement
d'une pièce que le public quitte le théâ-
tre, — à moins d'incendie, d'indisposi-
sition du principal interprète, de grève
des électriciens, ou de quelque autre cir-
constance analogue qu'un auteur sérieux
ne saurait souhaiter et qu'il est, en
tout état de cause, impossible de pré-
voir.
Le public s'en va sur le dénouement;
comme il a horreur des efforts de mé-
moire, c'est le dénouement seul qu'il re-
tient. Le dénouement détermine son im-
ipression et sa conviction définitives sur
la pièce qu'on vient d'avoir l'honneur de
représenter devant lui.
Pièce stupide, bon dénouement: ex-
cellente soirée. Nous avons de merveil-
leuses qualités d'oubli.
Pièce admirable, mauvais dénoue-
ment : insuccès d'estime. Au fond,
l'homme a horreur des distinctions sub-
tiles qui l'obligent à motiver son avis
après avoir payé sa place.
Pièce hors ligne, pas de dénouement:
débâcle. Ici, nous sommes en pleine
tranche de vie. Le spectateur ne coupe
cas dans cette tranche-là. Avant tout, il
veut une histoire. Une histoire qui ne
finit pas n'est pas une histoire. D'ail-
leurs, la conception de l'infini dépasse
notre intelligence et nous inspire un dé-
goût sans nom.
En principe, s'il tient absolument à
faire une pièce, contre le gré de ses
Barents, contre les enseignements du
passé, contre toute sagesse et contre
toute vraisemblance - en principe, le
ieune dramaturge devra donc se con-
vaincre qu'il ne s'agit pas de dénouer
une situation, mais bien de situer un dé-
nouement. Tel est le grand secret du
théâtre. Pour un auteur expérimenté, il
ne fait point doute que le Créateur con-
çut la magnifique scène du Jugement
dernier avant d'imaginer le monde.
Il faut commencer une pièce par la
fin : trouver un dénouement de choix, et
remonter d'acte en acte, jusqu'à l'ex-
position. En route, on trouve toujours
Je sujet. C'est automatique.
Voici, par exemple, pour une pièce
du genre noble, un dénouement qui ne
peut que soulever des acclamations una-
nimes : un malfaiteur repenti adopte les
enfants d'une religieuse qui n'avait pas
la vocation.
f ,Le professionnel le plus livide et le
plus atone ne sera pas sans découvrir,
pU premier coup d'œil, les nombreux
tableaux qu'il y a à tirer d'un dénoue-
ment pareil. Toutes les combinaisons
pittoresques et compliquées, angoissan-
tes et attendrissantes, s'offrent avec une
merveilleuse spontanéité ; les décors sor-
tent sans aide du magasin, les accessoi-
res se lèvent, si j'ose dire, comme un
seul homme, et la plume du jeune dra-
maturge n'a, si j'ose dire encore, qu'à
se laisser faire: La Nuit du Crime, la
Prise de voile, l'Enlèvement, la Défail-
lance, la Crèche, la Fortune, le Rachat.
Tant d'actes mouvementés s'imposent
ilue l'on s'y perd. Mais si on ne sait par
~ù commencer, du moins est-on certain
Se pouvoir finir. Personne, dans le bâ-
~ment, ne me démentira si j'affirme que
r'est bien l'essentiel.
Hélas! le jeune dramaturge pèche tou-
jours par outrecuidance. Après avoir dé-
cide que le dénouement est tout, il n'en
part pas moins à l'aventure, parce qu'il
a, en lui-même, toute la confiance que
le commun ne lui accorde pas. II dit:
« Marchons toujours, nous verrons bien
après. » Et il marche, il marche comme
un petit soldat. Il écrit un acte, un se-
cond, trois, quatre, cinq; tout à coup,
un peu essoufflé, il se rend compte qu'il
n'y a pas de raison pour que cela fi-
nisse. — et (Ju'iI v a cependant une rai.
son péremptoire pour - en finir: c'est
qu'il est trois heures du matin à n'im
Porte quelle horloge de n'importe quel
théâtre.
Alors, le jeune dramaturge perd 'a
tête: il tue son héros, ou son héroïne, à
moins qu'il ne les marie le plus arbi-
trairement du monde.
Aussi retrouvons-nous la trace de tels
excès dans la tragédie, la comédie ef le
Vaudeville de tous les temps: c'est que
bien des pièces furent écrites par leurs
dramaturges alors que ceux-ci étaient
encore jeunes. On sait, du reste, que la
jeunesse des dramaturges, qui. çomflien-
ce très tôt, se poursuit très tard.
De tous les dénouements possibles ou
inadmissibles, la mort et le mariage sont
incontestablement les plus usages. On
continue néanmoins d'y recourir, en dé-
sespoir de cause. -
Ils ne constituent pas, il faut le aire,
des dénouements essentiellement mau-
vais. Même, ils connurent des heures
de vogue intense. Les Grecs, dont nous
avons si grand souci, ne concevaient pas
qu'une action théâtrale pût s'achever
autrement que par un décès au moins.
Ils reconnaissaient dans la mort l'œuvre
principale de cette Fatalité à laquelle ils
tenaient tant, malgré qu'ils ne lui appli-
quassent pas encore l'épithète d' « an-
tique ».
Un peu plus tard, j'entends sous le rè-
gne de Scribe, la mode fut au mariage.
Le public avait évolué : il se faisait de
la Fatalité une représentation plus bour-
geoise, sinon moins rigoureuse.
De nos jours, le dénouement du ma-
riage est très gêné par le développe-
ment de l'adultère. C'est pourquoi le
jeune dramaturge aux abois recourt plus
communément à la formule grecque.
Par malheur, le spectateur d'aujour-
d'hui se moque de la Fatalité sous tou-
tes ses formes. Il ne veut pas en en-
tendre parler. Ce qui met le jeune dra-
maturge dans une situation bien fâ-
cheuse, Plus fâcheuse encore que celles
dont son imagination fait les frais.
Du point de vue de la technique théâ-
trale, c'est fort injuste, avouons-le. Si
l'on veut bien y réfléchir, la mort reste
le seul dénouement qui dénoue vraiment
quelque chose. Elle seule constitue un
dénouement digne de ce nom, un dé-
nouement véritable. Tout autre dénoue-
ment remet les choses en question.
Epargnez Hippolyte et sa marâtre : cette
mansuétude entraînera des conséquen-
ces auxquelles on n'ose pas songer, et
dont le grand Racine ne se fût pas tiré,
même à son déshonneur.
Henry KISTEMAECKERS.
Le choc en retour
Nous sommes tellement habitués aujour-
d'hui à oublier tous les principes généraux
qui nous régissent lorsqu'il s'agit de ques-
tions sociales, que la décision prise-par, Je
juge de paix du Xe, au sujet de l'affaire
des électriciens, ne manquera point de sou-
lever une grosse émotion dans tous les
partis.
Rien au fond n'est cependant plus normal
qu'un pareil jugement.
Lorsqu'il s'agit des actes de la vie cou-
rante, on n'hésite point en toute occasion à
appliquer dans toute leur rigueur les ar-
ticles 1382 et suivants du Code civil.
De la meilleure loi du monde, en dehors
de toute compétence pénale, agissant dans
la plénitude de notre droit, nous avons oc-
casionné un préjudice: le tribunal déclare
que nous devons le réparer.
C'est ainsi que l'on se souvient peut-être
de cette femme qui mourut il y a quelques
mois de saisissement dans son jardin en
voyant passer sur la route une voiture au-
tomobile.
Le chauffeur fut bel et bien condamné
à des dommages et intérêts pour ce choc
en retour qu'il n'avait certainement pas
prévu.
En matière sociale, il en va de même.
Que l'on accumule des dispositions et
des rèplements restreignant chaque jour les
possibilités d'exploitation des affaires com-
merciales, que l'on augmente chaque jour
leurs dépenses sans se préoccuper d'assurer
corrélativement leurs recettes,cela peut être
infiniment discutable mais relève exclusive-
ment du domaine électoral, et nous n'avons
qu'à enregistrer les mesures prises sans pro-
tester. Seulement alors, puisque par ailleurs
ces affaires commerciales sont soumises à
toutes les exigences du droit commun, il
est tout au moins juste de leur laisser !en
dernière réserve la possibilité de jouir de
ses avantages et d'établir commercialement
toute l'étendue du préjudice matériel qui
leur est causé.
Tant que l'Etat ne se chargera pas d'as-
surer en même temps les recettes et les
dépenses d'une exploitation commerciale,
l'article 1382 sera la seule possibilité qui
subsistera dans un monde déséquilibré
d'échapper à la destruction complète de
toutes les activités et de toutes les initia-
tives du pays.
G. DR PAWLOWSKI.
Échos
Ce soir, à 9 heures, réouverture du Vau-
deville avec Patachon, de MM. Maurice
Hennequin et Félix Duquesnel.
N
os artistes.
C'est par le rôle de Lakmé qu'ellej
avait déjà joué avec un vif succès l'an der-
Reutlinger phot.
Mlle Berthe Mendès
nier, que Mme Berthe Mendès vient de
faire sa rentrée à l'Opéra-Comique.
Les habitués de la salle Favart ont revu
avec plaisir cette chanteuse légère, habile.
dont ils n'avaient pas oublié la voix souple
et le charme prenant.
01
h! oh! c'est une impératrice!.
M. Catulle Mendès, après avoir été
assister aux représentations d Orange, vient
de passer quelques semaines de repos —
de repos bien gagné - dans les Pyrénées.
On l'a vu applaudissant Siegfried au Théâ-
tre de la Nature de Cauterets; il a contem-
plé, à Biarritz, le soleil qui se couche dans
l'Océan, et, en un élégant costume de fla-
nelle, il s'en fut à Saipt-Sébastien suivre
les courses de taureaux.
Les théâtres qui rouvrent, la saison qui
commence, vont bientôt le rappeler à Pa-
ris. Il reviendra, solide et vaillant, prêt à
reprendre, d'un cœur léger, la tâche quo-
tidienne. •
Et la joie du plus glorieux poète de ce
temps sera d'autant plus vive qu'elle se
doublera de la satisfaction du devoir accom-
pli.
En effet, profitant de ses vacances, MM.
Catulle Mendès a, nous dit-on, complète-
ment achevé la pièce qu'il doit lire inces-
samment à Mme Sarah Bernhardt et qui
a, on le sait, pour sujet, la visite que durant
son séjour à l'Ile d'Elbe, Marie Walewska
fit à Napoléon Ier.
Ajoutons, pour être précis, car lorsqu'il
s'agit des grands hommes, aucun détail ne
doit être omis, que la pièce est complète-
ment terminée, qu'elle est en prose et que
le titre définitif en est L'Impératrice.
Un beau titre! une belle pièce; vous
verrez!.
p
lusieurs millions à la disposition de
l'expert Dusausoy, 4, boulevard des
Italiens, qui achète de suite à première vue
et à leur réelle valeur, bijoux, diamants et
pierres fines. Grand choix d'occasions. *
O
u'en dit Brummel?
Un de nos lecteurs de province nous
adresse une intéressante question que nous
nous empressons de transmettre à M. Jean
de Mitty, confident de Sir Marmaduck, à
MM. André de Fouquières, Marcel Boulen-
ger, Bernard Boutet de Monvel et à quel-
ques autres contemporains notoires réputés
pour leur élégance et chargés par la con-
fiance publique de faire la mode à Paris.
Comment faut-il, en cette saison, s'ha-
biller pour aller au théâtre?
Il semble évident tout d'abord qu'on doit
adopter le costume traditionnel, l'uniforme
de théâtre, habit et chapeau haut-de-forme.
Mais, d'autre part, la saison est fort peu
avancée. L'été n'est pas fini, ou du moins,
pourrait-on dire en paraphrasant le mot
d'Arnold Mortier: « l'automne est venu
cette année passer l'été à Paris ». Et l'en
comprend que maints spectateurs hésitent
à reléguer pour un an l'ample et conimcde
smoking et le petit chapeau.
Dites-nous, messieurs Jean de Mitty; con-
fident Sir Mannaluok, André de Fou-
quières, Marcel Boulenger, Bernard Boutet
de Monvel et autres aimables augures, est-
ce là une grande hérésie, ou nous autorisez-
vous à prendre avec la mode ces accommo-
dements?
T
elle loge, telle artiste!
La Maison des Bambous, 33, rue du
4-Septembre, sait seule créer pour nos
étoiles l'écrin digne de leur beauté, par la
richesse et l'originalité de son installation.
NOUVELLE A LA MAIN
0
n parle de X., l'auteur dramatique
dont les fructueux succès ne se
comptent plus et qu'on a connu autrefois
petit rédacteur de petits journaux, courant
faméliquement le fait-divers.
, - Il a rudement réussi, celui-là. Parti
d'où il est parti. et arrivé où il en est..
On peut dire qu'il est le fils de ses œuvres.
— Quel dommage qu'il n'en soit pas
le père!
Le Masque de Verras.
Nous publierons demain un article de
J.-H. ROSNY
GttÀNt'ËCtiAlàÊ't'tfe À LA ëCALA 4P. Boyer et Bert. phot.)
Il fallait que la lumière fût:
Le juge de paix l'a déclaré !
LES TROIS HUIT :
8 francs à Mansuelle
8 francs à Castel
8 francs à "Dornag
Ernest Brod phot. M. Pataud M. Mansuelle
PENDANT LA SUSPENSION D'AUDIENCE
M. Pataud et M. Mansuelle en haut des marches de l'escalier de la rue du Château d'Eat
Les questions les plus graves sont parfois so-
lutionnées d'aimable façon.
Il ne nous appartient pas, dans ce journal,
d'insister outre mesure sur la portée sociale, sur
l'intérêt énorme aue comportent les grèves ou-
vrières. Ceci n'est point de notre domaine, encore
qu'il nous arrive de supporter — comme un peu
tout le monde — les conséquences de ces mani-
festations pacifiques. La politique, l'économie po-
litique même, si l'on veut, ne sauraient prétendre
à une place intéressante dans le domaine artisti-
que dont nous nous efforçons d'être les défen-
seurs inlassables.
Toutefois, en cette circonstance — il s'agit,
vous le devinez bien, de l'affaire Pataud-Man-
suelle-Castel-Beaucamp, dit Donnay — nous
croyons devoir déroger quelque peu à nos habi-
tudes et rendre compte d'un procès politioue,
puisque la corporation artistique s'y trouve mêlée
eh tant que partie.
*
On connaît les faits.
Le 6 août, à huit heures du' soir, la lumière
électrique s'éteignit progressivement. Dans tous
les établissements publics, dans les cafés, dans
les journaux (hélas ! cinquante francs de bougies;
heures supplémentaires, départs manqués, frais
divers.), l'obscurité la plus profonde régna de
huit heures un quart à dix heures.
La vie parisienne fut interrompue, et les heu-
res furent noires — très noires — n'en déplaise
à l'ami Xavier Privas.
M. Mansuelle, artiste de café-concert, « chan-
teur cominue à voix », ainsi qu'il appert d'une
carte que j'ai reçue, devait chanter ce soir-là à
Printania. Il ne put exécuter les termes de son
contrat ; car, si les rossignols ne chantent jamais
que la nuit, les rossignols de music-halls ne sau-
raient faire valoir la souplesse de leurs trilles
devant des banquettes et dans l'obscurité.
Çonséquemm,ent, son directeur ne lui -
pas le montant de son cachet, et subséquemment,
il assigna en remboursement (20 francs) !e bon
poète Pataud, secrétaire général du Syndicat des
électriciens, dont le geste autoritaire « était un
obstacle à la consommation du beefsteack jour-
nalier ».
L'exemple de M. Mansuelle fut suivi par MM.
Castel, du Casino de Montmartre, et Beaucamp,
dit Donnay, de Bobino, qui agissaient en sus au
nom de leurs camarades et du personnel des éta-
blissements auxquels ils appartiennent.
L'affaire vint le 14 août en conciliation devant
le juge de paix du dixième arrondissement. M.
Pataud — le camarade Pataud — fit déclarer par
un autre camarade qu'il était à la mer (heure.'
prolétaire!) et qu'il ne pouvait se déplacer.
Le permis de citer fut donc délivré aux d* ;
deurs, et l'affaire revenait hier devant la ,-:-,;..
juridiction.
Une heure de l'après-midi, rue du ,Q,7.* t
l'Eau. Une cohue invraisemblable. Vn ; •
J.'ordre même, comme s'il s'agissait d'un ,".:;:;-',
tre en déplacement (M. Pataud Ve sera pe être
un jour, qui sait?).
Un grand nombre de conf rères. Tous les jour-
naux sont représentée. (Jn trouve au moins des
figures de connaissance.,
Les « chevaliers tiu déclic » sont là, solides
au poste. Une grande journée se prépare.
Lorsaue nous entrons dans la salle d'audience
— ! < le des fjius spacieuses que connaissent les
m" s parAsie nés - les « parties sont déjà in-
f es ■>.
; barve. ont pris place, dans l'ordre, M*
revern de sa toge, avocat de MM Man-
et Castel; Me Poirault, avocat-conseil des
Syndicats d'artistes: artistes lyriques, ar-
omatiques, artistes choristes, artistes mu-
■■ lequel assistait. M. Pataud. qui était
:.' côtés. ,
il peut sembler étrange que quatre syndicats
d'artistes permettent à leur avocat-const: de
j prêter assistance à l'adversaire d'un « camarade
artiste n. En matière syndicale, la discipline est
formelle. MM. Mansuelle, Castel et Beaucamp ne
sont pas svndiqués. M. Pataud l'est: les syndi-
cats, tousses syndicats, doivent soutenir le syn-
diqué. C'est ce qu'ils ont fait. Si les demandeurs,
du reste, avaient été syndiqués, on les aurait cer-
tainement exclus de leur syndicat.
Cette interprétation très étroite des règlements
cégàhstes peut cependant produire quelques
joyeuses anomalies si nous nous en référons à la
lettre de M. Castel, qui nous écrivit récemment :
Le Syndicat des artistes lyriques, dont îo su';*
très heureux de ne pas faire partie, a offert u,
cou: j'irs de son avocat. M' Poirault, à M. Pataud,
qi~ st<' empresse de l'accepter. Je ne veux pas
q u aimer ce procédé qui confirme une fois de * 'us
le peu de solidarité qui existe dans notre cia.-se
malheureusement, et voilà le côté comique de l'af-
faire. Le Syndicat semble ignorer que, parmi les
artistes signataires du Casino de Montmartre, que
je représente, plusieurs font partie de ce même
Syndicat.
Mais passons 1
Le fauteuil du juge est occupé, en l'absence
du titubé, M. Couton, en vacances, par M.
Henriqut juge suppléant, avocat à la cour.
M. H'. iiriquez est un jeune magistrat de la
nouvelle école; une fine moustache brune, éjéc
gemment retroussée, lui donne un air cavalier
et les veux très vifs, animés parfois, pétillent
d'intelligence. Qu'il nous rappelle peu — qu'on
nous pardonne ce souvenir personnel — le juge
de paix maussade, lequel nous condamnait — il
y a quelques années déjà - à payer à notre
tailleur une note fantastique:
De suite, Me Mazet exposa la question. Fort
îoquemment, en termes mesurés, il réclama
justice. Reconnaissant que la grève était un droit,
il affirma, au nom de ses clients, que, les ou-
vriers n'ayant pas quitté les usines, il n'y avait
pas et: grève. La cessation du travail, en effet,
n'avait été que de deux heures, et les électri-
ciens étaient restés à côté de leurs machines
après avoir interrompu simplement le courant. Il
ajouta, en outre, qu il n'y avait pas eu grève
puisqu'aucune revendication n'avait été formulée,
et que l'on ne conçoit guère une grèVe sans re-
vendication. C'était donc, a-t-il dit, une véritable
plaisanterie.
M. Pataud répliqua.
M. Pataud est extrêmement intelligent et c'est
\jn orateur intéressant. Il représente à nos yeu*
Lë Nùmêro : 3 cêiitîfàëS
Jeudi 10 Septembre 1908.
Rédacteur en Chef fi. de PAWLOWSK1
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
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PLAISIRS D'ETE
Un dénouement
Or donc, après avoir été saisi de ver-
tige devant le vide effrayant de sa pen-
; sée. et la fatale blancheur de son papier,
le jeune dramaturge, se raccrochant à
;deux aphorismes successifs: « L exécu-
tion n'est rien » et: « Le sujet n'est
rien » — le jeune dramaturge aperçoit
qu'il n'a pas la vie sauve, et qu'il est
tout de même indispensable, en matière
dramatique, que quelque chose soit quel-
'Que chose.
Alors, il décide : « Le dénouement est
tout. »
Et je ne trouve pas cela si ridicule.
Avec un excellent sujet et une bril-
lante exécution, maint auteur imprudent
s'est égaré dans le plus ténébreux des
fours, parce qu'il n'avait qu'un mauvais
dénouement, ou pas de dénouement du
tout.
C'est, en effet, sur le dénouement
d'une pièce que le public quitte le théâ-
tre, — à moins d'incendie, d'indisposi-
sition du principal interprète, de grève
des électriciens, ou de quelque autre cir-
constance analogue qu'un auteur sérieux
ne saurait souhaiter et qu'il est, en
tout état de cause, impossible de pré-
voir.
Le public s'en va sur le dénouement;
comme il a horreur des efforts de mé-
moire, c'est le dénouement seul qu'il re-
tient. Le dénouement détermine son im-
ipression et sa conviction définitives sur
la pièce qu'on vient d'avoir l'honneur de
représenter devant lui.
Pièce stupide, bon dénouement: ex-
cellente soirée. Nous avons de merveil-
leuses qualités d'oubli.
Pièce admirable, mauvais dénoue-
ment : insuccès d'estime. Au fond,
l'homme a horreur des distinctions sub-
tiles qui l'obligent à motiver son avis
après avoir payé sa place.
Pièce hors ligne, pas de dénouement:
débâcle. Ici, nous sommes en pleine
tranche de vie. Le spectateur ne coupe
cas dans cette tranche-là. Avant tout, il
veut une histoire. Une histoire qui ne
finit pas n'est pas une histoire. D'ail-
leurs, la conception de l'infini dépasse
notre intelligence et nous inspire un dé-
goût sans nom.
En principe, s'il tient absolument à
faire une pièce, contre le gré de ses
Barents, contre les enseignements du
passé, contre toute sagesse et contre
toute vraisemblance - en principe, le
ieune dramaturge devra donc se con-
vaincre qu'il ne s'agit pas de dénouer
une situation, mais bien de situer un dé-
nouement. Tel est le grand secret du
théâtre. Pour un auteur expérimenté, il
ne fait point doute que le Créateur con-
çut la magnifique scène du Jugement
dernier avant d'imaginer le monde.
Il faut commencer une pièce par la
fin : trouver un dénouement de choix, et
remonter d'acte en acte, jusqu'à l'ex-
position. En route, on trouve toujours
Je sujet. C'est automatique.
Voici, par exemple, pour une pièce
du genre noble, un dénouement qui ne
peut que soulever des acclamations una-
nimes : un malfaiteur repenti adopte les
enfants d'une religieuse qui n'avait pas
la vocation.
f ,Le professionnel le plus livide et le
plus atone ne sera pas sans découvrir,
pU premier coup d'œil, les nombreux
tableaux qu'il y a à tirer d'un dénoue-
ment pareil. Toutes les combinaisons
pittoresques et compliquées, angoissan-
tes et attendrissantes, s'offrent avec une
merveilleuse spontanéité ; les décors sor-
tent sans aide du magasin, les accessoi-
res se lèvent, si j'ose dire, comme un
seul homme, et la plume du jeune dra-
maturge n'a, si j'ose dire encore, qu'à
se laisser faire: La Nuit du Crime, la
Prise de voile, l'Enlèvement, la Défail-
lance, la Crèche, la Fortune, le Rachat.
Tant d'actes mouvementés s'imposent
ilue l'on s'y perd. Mais si on ne sait par
~ù commencer, du moins est-on certain
Se pouvoir finir. Personne, dans le bâ-
~ment, ne me démentira si j'affirme que
r'est bien l'essentiel.
Hélas! le jeune dramaturge pèche tou-
jours par outrecuidance. Après avoir dé-
cide que le dénouement est tout, il n'en
part pas moins à l'aventure, parce qu'il
a, en lui-même, toute la confiance que
le commun ne lui accorde pas. II dit:
« Marchons toujours, nous verrons bien
après. » Et il marche, il marche comme
un petit soldat. Il écrit un acte, un se-
cond, trois, quatre, cinq; tout à coup,
un peu essoufflé, il se rend compte qu'il
n'y a pas de raison pour que cela fi-
nisse. — et (Ju'iI v a cependant une rai.
son péremptoire pour - en finir: c'est
qu'il est trois heures du matin à n'im
Porte quelle horloge de n'importe quel
théâtre.
Alors, le jeune dramaturge perd 'a
tête: il tue son héros, ou son héroïne, à
moins qu'il ne les marie le plus arbi-
trairement du monde.
Aussi retrouvons-nous la trace de tels
excès dans la tragédie, la comédie ef le
Vaudeville de tous les temps: c'est que
bien des pièces furent écrites par leurs
dramaturges alors que ceux-ci étaient
encore jeunes. On sait, du reste, que la
jeunesse des dramaturges, qui. çomflien-
ce très tôt, se poursuit très tard.
De tous les dénouements possibles ou
inadmissibles, la mort et le mariage sont
incontestablement les plus usages. On
continue néanmoins d'y recourir, en dé-
sespoir de cause. -
Ils ne constituent pas, il faut le aire,
des dénouements essentiellement mau-
vais. Même, ils connurent des heures
de vogue intense. Les Grecs, dont nous
avons si grand souci, ne concevaient pas
qu'une action théâtrale pût s'achever
autrement que par un décès au moins.
Ils reconnaissaient dans la mort l'œuvre
principale de cette Fatalité à laquelle ils
tenaient tant, malgré qu'ils ne lui appli-
quassent pas encore l'épithète d' « an-
tique ».
Un peu plus tard, j'entends sous le rè-
gne de Scribe, la mode fut au mariage.
Le public avait évolué : il se faisait de
la Fatalité une représentation plus bour-
geoise, sinon moins rigoureuse.
De nos jours, le dénouement du ma-
riage est très gêné par le développe-
ment de l'adultère. C'est pourquoi le
jeune dramaturge aux abois recourt plus
communément à la formule grecque.
Par malheur, le spectateur d'aujour-
d'hui se moque de la Fatalité sous tou-
tes ses formes. Il ne veut pas en en-
tendre parler. Ce qui met le jeune dra-
maturge dans une situation bien fâ-
cheuse, Plus fâcheuse encore que celles
dont son imagination fait les frais.
Du point de vue de la technique théâ-
trale, c'est fort injuste, avouons-le. Si
l'on veut bien y réfléchir, la mort reste
le seul dénouement qui dénoue vraiment
quelque chose. Elle seule constitue un
dénouement digne de ce nom, un dé-
nouement véritable. Tout autre dénoue-
ment remet les choses en question.
Epargnez Hippolyte et sa marâtre : cette
mansuétude entraînera des conséquen-
ces auxquelles on n'ose pas songer, et
dont le grand Racine ne se fût pas tiré,
même à son déshonneur.
Henry KISTEMAECKERS.
Le choc en retour
Nous sommes tellement habitués aujour-
d'hui à oublier tous les principes généraux
qui nous régissent lorsqu'il s'agit de ques-
tions sociales, que la décision prise-par, Je
juge de paix du Xe, au sujet de l'affaire
des électriciens, ne manquera point de sou-
lever une grosse émotion dans tous les
partis.
Rien au fond n'est cependant plus normal
qu'un pareil jugement.
Lorsqu'il s'agit des actes de la vie cou-
rante, on n'hésite point en toute occasion à
appliquer dans toute leur rigueur les ar-
ticles 1382 et suivants du Code civil.
De la meilleure loi du monde, en dehors
de toute compétence pénale, agissant dans
la plénitude de notre droit, nous avons oc-
casionné un préjudice: le tribunal déclare
que nous devons le réparer.
C'est ainsi que l'on se souvient peut-être
de cette femme qui mourut il y a quelques
mois de saisissement dans son jardin en
voyant passer sur la route une voiture au-
tomobile.
Le chauffeur fut bel et bien condamné
à des dommages et intérêts pour ce choc
en retour qu'il n'avait certainement pas
prévu.
En matière sociale, il en va de même.
Que l'on accumule des dispositions et
des rèplements restreignant chaque jour les
possibilités d'exploitation des affaires com-
merciales, que l'on augmente chaque jour
leurs dépenses sans se préoccuper d'assurer
corrélativement leurs recettes,cela peut être
infiniment discutable mais relève exclusive-
ment du domaine électoral, et nous n'avons
qu'à enregistrer les mesures prises sans pro-
tester. Seulement alors, puisque par ailleurs
ces affaires commerciales sont soumises à
toutes les exigences du droit commun, il
est tout au moins juste de leur laisser !en
dernière réserve la possibilité de jouir de
ses avantages et d'établir commercialement
toute l'étendue du préjudice matériel qui
leur est causé.
Tant que l'Etat ne se chargera pas d'as-
surer en même temps les recettes et les
dépenses d'une exploitation commerciale,
l'article 1382 sera la seule possibilité qui
subsistera dans un monde déséquilibré
d'échapper à la destruction complète de
toutes les activités et de toutes les initia-
tives du pays.
G. DR PAWLOWSKI.
Échos
Ce soir, à 9 heures, réouverture du Vau-
deville avec Patachon, de MM. Maurice
Hennequin et Félix Duquesnel.
N
os artistes.
C'est par le rôle de Lakmé qu'ellej
avait déjà joué avec un vif succès l'an der-
Reutlinger phot.
Mlle Berthe Mendès
nier, que Mme Berthe Mendès vient de
faire sa rentrée à l'Opéra-Comique.
Les habitués de la salle Favart ont revu
avec plaisir cette chanteuse légère, habile.
dont ils n'avaient pas oublié la voix souple
et le charme prenant.
01
h! oh! c'est une impératrice!.
M. Catulle Mendès, après avoir été
assister aux représentations d Orange, vient
de passer quelques semaines de repos —
de repos bien gagné - dans les Pyrénées.
On l'a vu applaudissant Siegfried au Théâ-
tre de la Nature de Cauterets; il a contem-
plé, à Biarritz, le soleil qui se couche dans
l'Océan, et, en un élégant costume de fla-
nelle, il s'en fut à Saipt-Sébastien suivre
les courses de taureaux.
Les théâtres qui rouvrent, la saison qui
commence, vont bientôt le rappeler à Pa-
ris. Il reviendra, solide et vaillant, prêt à
reprendre, d'un cœur léger, la tâche quo-
tidienne. •
Et la joie du plus glorieux poète de ce
temps sera d'autant plus vive qu'elle se
doublera de la satisfaction du devoir accom-
pli.
En effet, profitant de ses vacances, MM.
Catulle Mendès a, nous dit-on, complète-
ment achevé la pièce qu'il doit lire inces-
samment à Mme Sarah Bernhardt et qui
a, on le sait, pour sujet, la visite que durant
son séjour à l'Ile d'Elbe, Marie Walewska
fit à Napoléon Ier.
Ajoutons, pour être précis, car lorsqu'il
s'agit des grands hommes, aucun détail ne
doit être omis, que la pièce est complète-
ment terminée, qu'elle est en prose et que
le titre définitif en est L'Impératrice.
Un beau titre! une belle pièce; vous
verrez!.
p
lusieurs millions à la disposition de
l'expert Dusausoy, 4, boulevard des
Italiens, qui achète de suite à première vue
et à leur réelle valeur, bijoux, diamants et
pierres fines. Grand choix d'occasions. *
O
u'en dit Brummel?
Un de nos lecteurs de province nous
adresse une intéressante question que nous
nous empressons de transmettre à M. Jean
de Mitty, confident de Sir Marmaduck, à
MM. André de Fouquières, Marcel Boulen-
ger, Bernard Boutet de Monvel et à quel-
ques autres contemporains notoires réputés
pour leur élégance et chargés par la con-
fiance publique de faire la mode à Paris.
Comment faut-il, en cette saison, s'ha-
biller pour aller au théâtre?
Il semble évident tout d'abord qu'on doit
adopter le costume traditionnel, l'uniforme
de théâtre, habit et chapeau haut-de-forme.
Mais, d'autre part, la saison est fort peu
avancée. L'été n'est pas fini, ou du moins,
pourrait-on dire en paraphrasant le mot
d'Arnold Mortier: « l'automne est venu
cette année passer l'été à Paris ». Et l'en
comprend que maints spectateurs hésitent
à reléguer pour un an l'ample et conimcde
smoking et le petit chapeau.
Dites-nous, messieurs Jean de Mitty; con-
fident Sir Mannaluok, André de Fou-
quières, Marcel Boulenger, Bernard Boutet
de Monvel et autres aimables augures, est-
ce là une grande hérésie, ou nous autorisez-
vous à prendre avec la mode ces accommo-
dements?
T
elle loge, telle artiste!
La Maison des Bambous, 33, rue du
4-Septembre, sait seule créer pour nos
étoiles l'écrin digne de leur beauté, par la
richesse et l'originalité de son installation.
NOUVELLE A LA MAIN
0
n parle de X., l'auteur dramatique
dont les fructueux succès ne se
comptent plus et qu'on a connu autrefois
petit rédacteur de petits journaux, courant
faméliquement le fait-divers.
, - Il a rudement réussi, celui-là. Parti
d'où il est parti. et arrivé où il en est..
On peut dire qu'il est le fils de ses œuvres.
— Quel dommage qu'il n'en soit pas
le père!
Le Masque de Verras.
Nous publierons demain un article de
J.-H. ROSNY
GttÀNt'ËCtiAlàÊ't'tfe À LA ëCALA 4P. Boyer et Bert. phot.)
Il fallait que la lumière fût:
Le juge de paix l'a déclaré !
LES TROIS HUIT :
8 francs à Mansuelle
8 francs à Castel
8 francs à "Dornag
Ernest Brod phot. M. Pataud M. Mansuelle
PENDANT LA SUSPENSION D'AUDIENCE
M. Pataud et M. Mansuelle en haut des marches de l'escalier de la rue du Château d'Eat
Les questions les plus graves sont parfois so-
lutionnées d'aimable façon.
Il ne nous appartient pas, dans ce journal,
d'insister outre mesure sur la portée sociale, sur
l'intérêt énorme aue comportent les grèves ou-
vrières. Ceci n'est point de notre domaine, encore
qu'il nous arrive de supporter — comme un peu
tout le monde — les conséquences de ces mani-
festations pacifiques. La politique, l'économie po-
litique même, si l'on veut, ne sauraient prétendre
à une place intéressante dans le domaine artisti-
que dont nous nous efforçons d'être les défen-
seurs inlassables.
Toutefois, en cette circonstance — il s'agit,
vous le devinez bien, de l'affaire Pataud-Man-
suelle-Castel-Beaucamp, dit Donnay — nous
croyons devoir déroger quelque peu à nos habi-
tudes et rendre compte d'un procès politioue,
puisque la corporation artistique s'y trouve mêlée
eh tant que partie.
*
On connaît les faits.
Le 6 août, à huit heures du' soir, la lumière
électrique s'éteignit progressivement. Dans tous
les établissements publics, dans les cafés, dans
les journaux (hélas ! cinquante francs de bougies;
heures supplémentaires, départs manqués, frais
divers.), l'obscurité la plus profonde régna de
huit heures un quart à dix heures.
La vie parisienne fut interrompue, et les heu-
res furent noires — très noires — n'en déplaise
à l'ami Xavier Privas.
M. Mansuelle, artiste de café-concert, « chan-
teur cominue à voix », ainsi qu'il appert d'une
carte que j'ai reçue, devait chanter ce soir-là à
Printania. Il ne put exécuter les termes de son
contrat ; car, si les rossignols ne chantent jamais
que la nuit, les rossignols de music-halls ne sau-
raient faire valoir la souplesse de leurs trilles
devant des banquettes et dans l'obscurité.
Çonséquemm,ent, son directeur ne lui -
pas le montant de son cachet, et subséquemment,
il assigna en remboursement (20 francs) !e bon
poète Pataud, secrétaire général du Syndicat des
électriciens, dont le geste autoritaire « était un
obstacle à la consommation du beefsteack jour-
nalier ».
L'exemple de M. Mansuelle fut suivi par MM.
Castel, du Casino de Montmartre, et Beaucamp,
dit Donnay, de Bobino, qui agissaient en sus au
nom de leurs camarades et du personnel des éta-
blissements auxquels ils appartiennent.
L'affaire vint le 14 août en conciliation devant
le juge de paix du dixième arrondissement. M.
Pataud — le camarade Pataud — fit déclarer par
un autre camarade qu'il était à la mer (heure.'
prolétaire!) et qu'il ne pouvait se déplacer.
Le permis de citer fut donc délivré aux d* ;
deurs, et l'affaire revenait hier devant la ,-:-,;..
juridiction.
Une heure de l'après-midi, rue du ,Q,7.* t
l'Eau. Une cohue invraisemblable. Vn ; •
J.'ordre même, comme s'il s'agissait d'un ,".:;:;-',
tre en déplacement (M. Pataud Ve sera pe être
un jour, qui sait?).
Un grand nombre de conf rères. Tous les jour-
naux sont représentée. (Jn trouve au moins des
figures de connaissance.,
Les « chevaliers tiu déclic » sont là, solides
au poste. Une grande journée se prépare.
Lorsaue nous entrons dans la salle d'audience
— ! < le des fjius spacieuses que connaissent les
m" s parAsie nés - les « parties sont déjà in-
f es ■>.
; barve. ont pris place, dans l'ordre, M*
revern de sa toge, avocat de MM Man-
et Castel; Me Poirault, avocat-conseil des
Syndicats d'artistes: artistes lyriques, ar-
omatiques, artistes choristes, artistes mu-
■■ lequel assistait. M. Pataud. qui était
:.' côtés. ,
il peut sembler étrange que quatre syndicats
d'artistes permettent à leur avocat-const: de
j prêter assistance à l'adversaire d'un « camarade
artiste n. En matière syndicale, la discipline est
formelle. MM. Mansuelle, Castel et Beaucamp ne
sont pas svndiqués. M. Pataud l'est: les syndi-
cats, tousses syndicats, doivent soutenir le syn-
diqué. C'est ce qu'ils ont fait. Si les demandeurs,
du reste, avaient été syndiqués, on les aurait cer-
tainement exclus de leur syndicat.
Cette interprétation très étroite des règlements
cégàhstes peut cependant produire quelques
joyeuses anomalies si nous nous en référons à la
lettre de M. Castel, qui nous écrivit récemment :
Le Syndicat des artistes lyriques, dont îo su';*
très heureux de ne pas faire partie, a offert u,
cou: j'irs de son avocat. M' Poirault, à M. Pataud,
qi~ st<' empresse de l'accepter. Je ne veux pas
q u aimer ce procédé qui confirme une fois de * 'us
le peu de solidarité qui existe dans notre cia.-se
malheureusement, et voilà le côté comique de l'af-
faire. Le Syndicat semble ignorer que, parmi les
artistes signataires du Casino de Montmartre, que
je représente, plusieurs font partie de ce même
Syndicat.
Mais passons 1
Le fauteuil du juge est occupé, en l'absence
du titubé, M. Couton, en vacances, par M.
Henriqut juge suppléant, avocat à la cour.
M. H'. iiriquez est un jeune magistrat de la
nouvelle école; une fine moustache brune, éjéc
gemment retroussée, lui donne un air cavalier
et les veux très vifs, animés parfois, pétillent
d'intelligence. Qu'il nous rappelle peu — qu'on
nous pardonne ce souvenir personnel — le juge
de paix maussade, lequel nous condamnait — il
y a quelques années déjà - à payer à notre
tailleur une note fantastique:
De suite, Me Mazet exposa la question. Fort
îoquemment, en termes mesurés, il réclama
justice. Reconnaissant que la grève était un droit,
il affirma, au nom de ses clients, que, les ou-
vriers n'ayant pas quitté les usines, il n'y avait
pas et: grève. La cessation du travail, en effet,
n'avait été que de deux heures, et les électri-
ciens étaient restés à côté de leurs machines
après avoir interrompu simplement le courant. Il
ajouta, en outre, qu il n'y avait pas eu grève
puisqu'aucune revendication n'avait été formulée,
et que l'on ne conçoit guère une grèVe sans re-
vendication. C'était donc, a-t-il dit, une véritable
plaisanterie.
M. Pataud répliqua.
M. Pataud est extrêmement intelligent et c'est
\jn orateur intéressant. Il représente à nos yeu*
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