Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-08-06
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 06 août 1908 06 août 1908
Description : 1908/08/06 (A2,N311). 1908/08/06 (A2,N311).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7645966c
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
2" Année, ==N° 311 (Quotidien)
- -
Le Numéro : 5 centimes
- Jeudi 6 - - 1
COMŒDIA
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKI
, RtDACTION & ADMINISTRATION :
r-« Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDlA.PARIS
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOIS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 p
RÉDACTION & ADMINISTR^TION^>v
- -
27, Boulevard Poissonnière, - p â R -
TÉLÉPHONE: 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDlA.PARIS
ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOîS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
Un dénouement
Lorsque le directeur des Folies-Extra-
Jagantes eut demandé à Brisard, auteur
dramatique, qui, précisément, rôdait
4ans les coulisses :
— Tiens, au fait, n'auriez-vous pas
Une petite machine à monter tout de
suite?
Brisard répondit avec assurance:
- Certainement si.
Le directeur continua.
Il exprima son désir qu'elle fut en
deux actes — condition sine qua non; et,
Satisfait sur ce point, souhaita de pouvoir
utiliser sa « place publique » et le « sa-
lOn turc » de la précédente pièce. Il limi-
a à priori les personnages à quatre ;
la figuration à néant; observa que les
Accessoires devraient être réduits au
sjfict minimum, à cause des dépenses, et
s inquiéta de savoir si, au milieu du
deux », on pourrait introduire la danse
russe.
Brisard ne cessa de consentir à tout
Ce que lui valait la considération directo-
riale. Aussi bien, les réponses affirma-
mes lui étaient-elles faciles, car il n'avait
Pas la moindre « petite machine» de ter-
minée.
Brisard n'ignorait plus, après quinze
3ns de métier, qu'il est absolument inu-
hle d'écrire une pièce entière, celles-ci
étant, après les interventions successives
du directeur, des amis, des premiers rô-
:es, des copistes et du souffleur, complè-
taient modifiées entre la lecture et la
répétition générale.
Par contre, Brisard avait un assor-
tent considérable de « commence-
ments » : Deux à trois cents premières
Scènes de premiers actes, amorces d'œu-
Vres de toute nature. Elles étaient réper-
toriées dans les tiroirs de son secrétaire
Psr catégories : livrets d'opéra, revues de
n d'année, drames, charades de salon,
tragédies en vers, tragédies en prose,
Pantomimes, ballets, pochades pour ca-
arets, levers de rideau, etc., etc.
Le lendemain — on « passait» trois
jOurs après, — Brisard vint au théâtre
f^fcc un tiroir plein et sortit de cet éven-
*àire un stock de débuts appropriés.
Après une rigoureuse sêîecfîôù, le di-
recteur opta pour un drame :
— Un drame, disait-il, car il excellait
aux aphorismes, c'est toujours bon : Ou
112 public frémit et il est content, ou il
fIt. et il est encore satisfait. Que peut-
On vouloir de plus?.
,Dès les premiers mots de la première
scene, le directeur des Fantaisies-Extra-
Vagantes arrêta Brisard.
- Ça va, faites répéter de suite 1
Brisard objecta timidement :
, — C'est que. c'est qu'il me reste en-
tore quelques petites choses à revoir et.
> Le directeur l'envoya promener.
On fit donc place au théâtre. On com-
mença.
A l'avant-scène, sous l'inspirant rayon-
nenient de la balladeuse et avec les con-
seils du père noble qui était metteur en
Scène et régisseur. Brisard combina fié-
vreusement ses « raccords », qui consis-
tent à mettre sur un cahier vierge tou-
tes les tirades et toutes les répliques qui
lui venaient à l'esprit. On portait d'ur-
gence les feuillets au copiste, tandis que,
Sur le plateau, on « enchaînait» avec ra-
6e, mais sans désespoir,
L'après-midi qui précédait la répétition
générale, le directeur tint, pour la pre-
mière fois, à écouter un instant le drame.
j1 éprouva quelque stupeur aux propos
tenus par les artistes. C'était une pièce
tassez extraordinaire, mais il n'y prêta
Qu'une médiocre attention.
Brisard lui avait d'ailleurs dit:
— Le dénouement seul a de l'impor-
tance, or toute ma pièce est dans le dé-
nouement.
On ne le répéta pas, ce dénouement.
il était trop tard.
Chacun s'en fut dîner en hâte.
- A la grâce de Dieu ! avait dit le di-
recteur.
Brisard, resté seul à seul avec ses pen-
ses, se demanda s'il irait dîner ou s'il
-tudierait son dénouement.
Après réflexion, il conclut:
- On a le temps. Je verrai bien à
entr'acte, avant le « deux », la tournure
qUe ça prend!
Il convient d'expliquer ici que Brisard,
malgré sa grande expérience du théâtre,
n avait jamais connu l'impression pro-
dulte sur le public parles dénouements
ee ses œuvres, dénouements dont il se
misait volontiers gloire.
La malchance, les cabales, mille autres
choses de ce genre, en avaient toujours
Autrement décidé.
Toujours il avait fallu baisser le rideau
aVant la fin de la pièce pour protéger le
matériel et les artistes.
Brisard y était habitué. le dénoue-
ment de la pièce des Fantaisies-Extrava-
Rantes avait donc une médiocre impor-
ance.
Ce fut tout à fait imprévu. Le public,
Interdit au premier abord, s'intéressa
Peu à Deu aux incohérents propos tpsèifc
par les quatre personnages sur la place
publique. On crut à un vaudeville quali-,
fié drame par manière de plaisanterie et
on trouva très drôle le vaudeville.
Au deuxième acte, le public s'enthou-
siasma. Tandis qu'on interrompait cha..
que scène par de longues salves d'ap
plaudissements, Brisard se faufila pru-
demment vers la sortie des artistes.
— Cela ne peut pas durer! pensait-il,
Cela dura.
Cela dura jusqu'au-.moment où, au
beau. milieu, l'intrigue, inextricablement
embrouillée, les artistes s'arrêtèrent de
parler, jetant des regards-effarés dans la
coulisse, tendant l'oreille au souffleur.
Après un temps, on sépara, par le ri-
deau, la scène de la salle stupéfaite. -,
— Brisard!.. où est Brisard? hurlait
le directeur.
On découvrit Brisard dans la loge du
concierge.
— Et le dénouement?
— Quel dénouement?
— Le dénouement de la pièce, nom de
Dieu! quen avez-vous fait?. le souf-
fleur n'a rien!
- Mon Dieu ! répliqua Brisard atter-
ré. Les rosses de spectateurs qui n'ont
pas encore emboité!. Mais. c'est qu'il
n'est pas écrit. j'ai tellement peu l'habi
tude.
Il va falloir prétexter une indisposition
d'artiste, songeait le directeur, lorsque
Brisard eut une inspiration subite.
— Pas du tout, fit-il; pour une fois
que je tiens ;un succès. laissez-moi
faire.
Il monta sur la scène, fit leverïle ri-
deau et, bon enfant, en camarade :
— Mesdames, messieurs, vous me
voyez flatté et confus : c'est la première
fois que le public permet aux artistes
d'achever de représenter devant lui une
pièce de moi. Je ne m'y attendais guère,
je vous le jure. C'est pourquoi j'ai né-
gligé de débrouiller l'imbroglio dont vous
venez d'être témoins ; mais puisque cela
vous intéresse, apprenez donc que j'ai
l'intention de tout arranger, dans une
dernière scène, en punissant le vice et en
récompensant la vertu.
On n'en crut pas un mot. On trouva
que cette intervention de l'auteur était
une idée fort originale. Une ovation fit
de Brisard, pendant quelques minutes, un
grand homme !
.Lorsque ce fut fini, Brisard, heureux
de l'avoir échappé belle, mais penaud,
déclara au directeur :
— Je ne me couche pas que le dé-
nouement ne soit écrit. -
— Gardez-vous .en bien, répliqua ce-
lui-ci. Nous tenons un succès. je vous
l'avais dit. n'ajoutez pas une ligne.
mais redites-leur donc simplement de-
main ce que vous avez dit ce soir.
C'est un dénouement ça, que diable!
Pierre SOUVESTRE.
Nous publierons demain un article de
HENRY KISTEMAECKERS
Nœuds gordiens
Il n'est point de préjugé plus répandu
chez nos auteurs que celui des situations
neuves.
Dès qu'il s'agit de concevoir une pièce
-nouvelle, directeur et auteur se prennent la
tête à deux mains et cherchent avidement
le cas bizarre et inédit que l'on pourrait
présenter aux spectateurs pour provoquer
leur enthousiasme pendant quelques cen-
taines de représentations.
On sait à quels procédés conduit inévi-
tablement une pareille recherche. Tous les
moyens sont bons. On fait appel aux cas
les plus imprévus, aux passions soi-disant
les plus perverses et qui ne sont, les trois
quarts du temps, que parfaitement grotes-
ques ou ridicules. Si cela ne suffit point,
on terme le théâtre après Je troisième acte,
on invite les spectateurs en petit comité à
assister sous le sceau du secret au qua-
trième et l'on abreuve ensuite la presse de
communiqués confidentiels où l'on révèle
à l'avance ce qui se passera au cinquième
acte.
On apprend ainsi avec terreur que, vers
la fin de la pièce, l'adjudant des tirailleurs
bengalis avouera devant le conseil de guer-
re sa passion perverse pour le crocodile de
l'empereur ou que la comtesse, à la fin du
repas, révélera à ses convives qu'elle leur
a fait manger un cent d'hameçons dans l'é-
nigmatique pâté de maquereaux qui leur fut
servi au deuxième acte. Cela s'appelle
« troublante perversion » ou « l'assassin
érotomane » et il n'est plus guère au
monde que M. Bérenger pour croire que de
pareilles âneries conduisent la France aux
abîmes.
Il serait cruel, en pareille matière, de
vouloir faire de faciles comparaisons, mais
si nos auteurs dramatiques consentaient a
relire certains auteurs qui eurent beaucoup
de succès, Molière, par exemple, ils cons-
tateraient avec stupéfaction le manque com-
plet de moyens imprévus dont disposait cet
auteur. Ils constateraient, avec non moins
d'étonnement, la pauvreté inouïe de ses scé-
narios et l'indigence absolue de ses dénoue-
ments. Et comme, il taut bien le reconnai-
tre, toutes ses pièces ont eu assez de suc-
cès, ils comprendraient peut-être alors,
qu'ici comme ailleurs, le talent n'a que
faire des situations de roman feuilleton et
que la valeur tout entière d'une pièce dé-
pend de la valeur de son auteur.
Seulement, je le sais bien, avec de pa-
reils raisonnements, on ne ferait plus ja-
mais de pièces, et il faut, hélas! bien vivre.
QLJM: PAWLOWSKI,
Échos
L
surs- vacances.
II serait téméraire de penser que les
jeunes lauréats du Conservatoire consacrent
à un repos bien gagné le temps de leurs va-
cances.
La plupart en profitent pour-prendre part
à des représentations, et quelques-uns pour
en organiser. -
C'est .ainsi-que^MM. Pierre Dupré et
Villaret,. chanteurs récompensés, jouent l'o-
péra-comique,;et même l'opéra-comique iné-
dit,^dans le Midi; que Mlle Borione chante
à Hendaye, Mlle Marcelle Demougeot au
'Mont-Dore, et que bientôt, à Béziers, Mlles
Panis, Kaiser et Fraisse seront, dans Le
Premier glaive, les charmantes interprètes
de la musique de M. Henri Rabaud.
Les comédiens ne le leur cèdent en rien.
A Béziers encore, Mlle Norma jouera la
pièce de M. Népoty; Mlle Fillacier jouait
ces temps-ci à Ostende, et tandis que Mlle
Marialise joue, pour Orange, Regina des
Burgraves, Mlle Pacitti, à Enghien, joue.
au baccara.
A
vant La Furie.
Malgré l'interruption momentané
que les vacances ont apportée aux répéti-
tions de La Furie, M. Jules-Bois et M. Ra-
phaël Duflos qui, on le sait, s'est chargé de
la mise en scène, n'ont pas cessé de se
préoccuper de la première qui doit avoir
lieu à la fin de septembre.
Vers le 20 août, l'auteur et le sociétaire
s'embarqueront pour aller prendre des no-
tes à Candie.
M. Jules Bois y a, d'ailleurs, effectué
déjà urr premier voyage. :-
«E
n plein air.
:- A propos du théâtre-d'Aulnay-sous-
Bois, sait-on que c'est à deux pas, au
Raincy, que furent données les deux pre-
mières représentations complètes de Tar-
tulle ?
Le château du Raincy appartenait alors à
la princesse palatine qui donna ces repré-
sentations les 29 novembre 1664 et 8 no-
vembre 1665, en présence du grand Condé.
Ce château avait été construit sur l'em-
placement de l'ancien monastère de la fo-
rêt de Bondy par Jacques Bordier, conseil-
ler et secrétaire du roi, d'après les plans
de Leveau, et lui avait coûté plus de 4 mil-
lions 500.000 livres; Lebrun l'avait décoré
et Le Nôtre en avait dessiné les jardins.
Ce château fut démoli sous Louis-Phi-
lippe^ après qu'au moment de la tourmente
révolutionnaire Couthon eut proposé d'en
faire, un « établissement pour l'éducation
des troupeaux » !
L
fennemi est "dans la salle.
La,scène s'est passée dernièrement
dans un théâtre mondain (ce n'est pas chez
M. de Clermont-Tonnerre) où l'on repré-
sentait ï une bluette pastorale en trois ta-
bleaux. L'auteur, ainsi que cela arrive sou-
vent dans les entreprises mondaines, était
en plus • directeur de la scène, régisseur,
souffleur, voire machiniste, et comme tel
préposé au rideau. Il allait le lever sur le
deuxième tableau lorsque, risquant un œil
dans le trou adéquat, il aperçut son plus
mortel ennemi au premier rang des chai-
ses. Alors l'auteur-machiniste refusa de
lever le rideau! Pas plus!. Affolement des
« administrateurs », suppliques vaines à
l'ennemi d'avoir à quitter sa place, et im-
patience du public qui, n'ayant pas payé,
n'était, suivant la logique bien parisienne,
aucunement disposé à l'indulgence et par-
lait d'essayer la capacité guerrière des ban-
quettes. Il fallut donc bien lever quand
même. Pauvre auteur ! Voyez-vous cet
exemple suivi par les auteurs de profes-
sion, aux répétitions générales? Hélas, le
rideau ne se lèverait jamais!
NOS ARTISTES
(Paul Boyer et Bert, phot.)
M.^Codard
lui a .joué hier soir, à l'Opéra, le rôle de Lohengrin
c
onvalescence.
M. Francis de Croisset. Qui a été
gravement atteint de la fièvre scarlatine et
dont un moment la santé avait inspiré des
inquiétudes, est actuellement en pleine con-
valescence.
11 a ptï quitter hier Pans pour se rendf**
à. Saint-Gervais, où se trouve déjà installé
'son collaborateur, M. Maurice Leblanc.
* Nous souhaitons à notre ami un prompt
rétablissement.
D
usausoy ! Dusausoy ! Voilà le nom de
l'expert joaillier du 4, boulevard des
Italiens, qui achète le plus cher bijoux, dia-
mants, perles. M. Dusausoy prie de bien se
renseigner sur la .valeur avant de lui vendre.
BALLADES
NOS JOLIES DAMES DE COMEDIE
(Suite)
Il n'est bon bec que de Paris!
Citons parmi les jeunes femmes
Dont nos pauvres cœurs sont éprise
Greuze, Brésil aux yeux de gemmes,
Et l'amante des chrysanthèmes,
Jeanine Zorelli. Desclos,
Macnyll.. ô doux épithalames:
Ce sont les princesses du beau!
Onduleuse Mitzy-Dalthy,
Kerwich, Taillade. je me pâme
Et vous, petit page Bovy,
Qu'avec Robinne l'on acclame.
Paz Ferrer, brune sur mon âmel
Bernard-Colonna, Romano.
Clado, vibrante, qui m'enflammer
Ce sont les princesses du beau 1
Vous: douce Carmen Deraisy,
Bérangère qui tient le drame.
Ailleurs: Valdec, Marthe Lutzi,
Pouzolz-Lili, Dauzon qui brame
Sur l'amant percé d'une lame.
Desroches, Clairville aux bons mots,
Les sœurs Fusier. Lauzière. Dame t
Ce sont les princesses du beau !
ENVOI
Puisqu'il faut arrêter la gamme.
J'arrête. et je dis tout de go,
Qu'on se sent le cœur multigame
Près de ces princesses du beau.
- ARMORY^
A
Pont-aux-Dames, ces jours derniers.
Le temps est superbe, l'air est tout
calme et le silence délicieux. Un pécheur,
le panama lui couvrant la tête,. pêche. Au
fait, pêche-t-il? Approchons-nous. Le pê-
cheur, d'un œil, observe sa ligne, qui ne
pique pas bien souvent du reste. De l'autre
il lit. Approchons-nous encore. Le pêcheur
est M. Coquelin. Il se repose en recher-
chant les poissons du petit ruisseau de la
maison de retraite. Comme les poissons,
malins, mordent rarement, l'inoubliable
Cyrano s'amuse à lire Will Trimm et cie-
car M. Coquelin est chauffeur et les récits
automobiles de notre collaborateur 'Kiste-
maeckers le ravissent.
L
euri3 mots. 1 1
C'est l'été que les vrais « ama-
teurs » suivent avec le plus d attention les
représentations quotidiennes de la Comédie
Française.
Le répertoire est plus varié que pendant
la saison, où les pièces nouvelles sont jouées
quatre fois par semaine. De jeunes pension-
naires s'essaient en des rôles difficiles; des
sociétaires reprennent d'anciens succès.
Tout un petit groupe fidèle *se complaît à
ces soirées d'août.
Or, ce public spécial a remarqué depuis
peu de temps un admirable figurant.
Grand, souple, les traits fins sans mol-
lesse, l'œil large et lumineux, il porte fort
galamment la cape et le feutre espagnols,
ou, à l'occasion, la tunique du guerrier ro-
main. Il paraît, en outre, animé d'une flam-
me intérieure. Il participe, muet mais vi-
vant, à l'action. Il esquisse avec à-propos
des gestes heureux, sans cependant quitter
la réserve qui convient à un figurant.
Bref, on en causa à plusieurs reprises,
ces soirs derniers, dans les couloirs. C'est
presque une réputation qui commence à
s'établir.
On en parlait l'autre jour chez un très
spirituel pensionnaire qui, quoique fort
jeune, connaît parfaitement l'esprit de la
Maison :
— Je ne l'ai jamais vu Est-il vraiment
si bien que cela? interrogea-t-il.
Et, sur une réponse affirmative, le pen-
sionnaire conclut, dans un sourire:
— Le malheureux! Il se permet d'être
bien. On va le f. à la porte!
p
oints de vue russes.
On se rappelle l'éclatant succès
qu'obtint, à la fin de la saison dernière, sur
la scène de l'Opéra-Comique, Snegou-
rotchka, le conte lyrique de Rimsky-Kor-
sakoff.
Le ballet, particulièrement, fut tellement
applaudi que, chaque soir, on dut le bisser.
Il faut croire que, malgré nos excellen-
tes relations diplomatiques, le goût russe
diffère terriblement du goût français.
Lisez plutôt cet extrait du Slovo, publié
par la Grande Revue.
.Ce ballet fait fureur. Mais, en réalité, c'est
une terrible ineptie. On y voit se précipiter sur
la scène des espèces de femmes sauvages avec
des tambours de basque, des Bohémiens, peut-
être, ou des Tcherkesses; derrière elles, quel-
que chose qui ressemble à des polichinelles et
des êtres dans le genre des Petits-Russiens.
Tout cela saute et se jette en tous sens, pous-
sant des cris sauvages. Les hommes bondissent
à des hauteurs impossibles, puis font un tour de
danse qui rappelle la kerghisika. L'entrain et
la gaieté sont extrêmes : les Français hurlent
d'enthousiasme.
Pour nous, spectateurs ordinaires de l'O-
péra-Comique, cette opinion a tout au moins
le mérite de l'imprévu.
L
e tourisme n'est agréable qu'avec une
automobile souple et rapide, consom-
mant peu d'essence et de pneumatiques.
C'est la justification de la vogue des voitu-
res Unie, construites par ce mécanicien
compétent qu'est Georges Richard, et dont
la 12 chèvaux, notamment, est une mer-
veille de régularité.
NOUVELLE A LA MAIN
s
ous prétexte de surveiller le fonctionne.
ment de la lumière à l'Opéra, - certain
inspecteur de la compagnie d électricité ne
quitte guère le foyer de la danse.
Une de ces demoiselles a dit:
— Pour un électricien, il s'intéresse
beaucoup trop aux jupes de. gazel
himmm 4$ Y~M'~
Les femmes excentriques
au Théâtre
.—————_— ——————
Je n ai pas la prétention de vous apprendre
que les rôles de femme au théâtre ne se com-
posent point seulement d'un débit de voix or-
donné et de gestes classiques, dans un décor
qu'on porte avec soi et qui s'appelle robe. Des
actrices existent qui se moquent de l'esthétique
établie, font bon marché de la ligne, en scène,
et, consentant par tempérament ou sacrifices
d âge à jouer les excentriques, apportent dans
ces emplois un peu gros, mais d'un effet cer-
tain, leurs qualités personnelles pour composer
des types qui méritent de trouver place dans
Comœdia.
Ce sont celles qui, dans le répertoire con-
temporain, laissent dans le public la trace la
plus profonde.
On peut, en effet, au sortir du théâtre, ne
pas se souvenir complètement du sourire de
l'ingénue et de la façon menue, menue dont,
au deuxième acte, elle avançait au bout de son
bras grêle l'innocence vaporeuse de son éven-
tail de plumes ; on peut oublier la moue dé-
daigneuse de la grande coquette et la manière
olympienne dont elle repoussait les avances
d'un bellâtre flavescent, et les embarras d'une
traîne qui n'en finissait plus. Mais ce qu'on
n'oublie pas, par exemple, c'est le procédé en
dehors, le jeu débordant des excentriques, cette
manière de comique qui se moque de la rampe,
saute par-dessus, dans une cascade imprévue
pour bondir sur le spectateur, le prendre à la
gorge et le forcer à rire.
Voyez, dans un genre relevé, Augustine Le-
riche, par exemple. Dans ce corps resté sou-
ple et jeune, le diable habite, c'est certain. Les
gestes sont vifs, le pas assuré, et d'une bouche
aux lèvres rapides — si je Deux dire — les mots
tombent drus, et si irrésistibles qu'ils sont
commé une source qui dévale. Et la belle-mère
qu'elle est, dans La Maîtresse de piano, par
exemple, suffit à nous faire souhaiter, si nous
avons des soifs matrimoniales, de rencontrer
sur notre route, au carrefour de l'hyménée,
une belle-maman semblable à elle.
Et Madeleine Guitty ? Vous l'avez vue, je
pense, au Grand-Guignol, chez Max Maurey,
quand elle jouait Rosalie. Les yeux, chez Au-
gustine Leriche, s'allument, pétillent et lancent
des éclairs malicieux. Chez Guitty — dans Ro-
salie tout au moins — les yeux deviennent, vo-
lontairement, des boules de verre, ternes et
sans reflets, stupides à souhait. Et la physio-
nomie suit, et le corps aussi, dans la robe de
futaine qui le recouvre, avec deux mains rou-
ges aux doigts gourds qui brinqueballent. Que
vous laissiez à Madeleine Guitty son enveloppe
grossière de bonne à tout faire ou que vous
lui offriez, au vestiaire du vaudeville, une roba
à ramages et des capelines d'un autre âger
toujours il se dégagera d'elle ce je ne sais quoi
de force comique qui enlève le rire.
Dans un autre ordre d'idées, prenons, si voue
le voulez, Edmée Lescot. Edmée Lescot- P dfr'
ront, sur le mode interrogatif, les gens peu ren<
seignés. C'est une femme extraordinaire qui
tint la scène longtemps et qui, aujourd'hui,
dans une retraite inopportune, conserve une vi-
gueur, une vivacité et un comique tels qu'une
stupéfaction me vient toujours quand je la ren-
contre, promenant son sourire amusé et éter-.
nellement jeune, qu'il ne se trouve pas un di-
recteur assez avisé pour tirer parti de son talent
qui se repose, mais ne meurt point. L'ancienne
pensionnaire de Grau et de Gunsbourg, qui lâ-
cha l'opéra-bouffe pour le concert, promena
d'un hémisphère à l'autre la fantaisie calvacfloi
dante de sa nature chantante, disante, dansante,,
et l'imprévu de ses chansons françaises, anglais
ses, russes, espagnoles, merveilleusement sew
Madeleine Guitty ledmée Lescot Augustine Leriche
Edmée Lescot
vie, en cela, du reste, par sa connaissance attJ
pays et de la langue qu'on y parle.
Et Jeanne Bloch? Est-elle assez une excen *
trique, celle-là? Je sais bien que son jeu estl
comme son physique: un peu bien gros; mais
tout de même, quand elle créa sur les scènes^
parisiennes ce type inoubliable de femme-ramaI;
lot, avouez que ce fut une trouvaille.
Depuis, elle s'est spécialisée dans la revues
Elle s'y montre, dans la cuirasse qui la bas-!
tionne et dans son jeu : débordants. Son phy-4
sique, qui fait frémir les spectateurs que guetta
l'embonpoint, est devenu chez elle non unei
tare, mais un extraordinaire moyen qui s'ajoute)
à ceux, comiques, qu'elle possède. Qu'elle soitj
gendarme ou agent, qu'elle soit un président)
Fallières, à l'imposante carrure, elle est vraM
ment unique, et de sa personne, qui roule dm1
côté cour au côté jardin, le rire se dégage,
énorme comme elle; mais le rire s 'analyse-t-il ?'.
Montrez vos dents, braves gens, riez et nel
cherchez pas le fin du fin des choses.
E. ROUZIER-DORCIËRFS.
LETTRE DE BA YREUTH
66 PARSIFA99 1
Dans Le Cas Wagner, qui reste la bro-
chure la plus lue de Nietzsche, ce fantai-
siste à grosses moustaches affirme, entre
autres blagues, que tous les drames wag-
nériens reposent uniquement sur l'idée de
rédemption: Le Vaisseau fantôme et Tann-
hæuser, c'est le vicieux rédimé par une
vierge innocente; Parsifal, c'est la rôtis-
seuse de balais rachetée par un cocque-
bin, etc.
C'est de la synthèse exagérément sim-
pliste. Mais, dans l'oeuvre wagnérien, sus-
citeur de tant de gloses bafouilleuses, on
peut affirmer que Parsifal est la production
autour de laquelle furent accumulées le plus
d'incompréhensions. Je n'ai pas oublié le
temps où l'un des plus avertis commenta-
teurs du maître traitait ce drame symboli-
que d'« œuvre de sénilité », alors qu'« œu-
vre de sérénité » eût été plus juste.
Aujourd'hui, Parsifal n'est plus guère
discuté; on l'acclame en Amérique et en
Hollande (malgré les protestations de la fa-
mille Wagner qui voudrait réserver au seul
Bayreuth ce spectacle fructueux) ; c'est lui
qui réunit le plus grand nombre d'admira-
teurs forcenés, surtout parmi les-Allemands
chez qui le souci des contingences laisse
toujours subsister un fonds inépuisé de
mysticisme. Pendant le deuxième acte, tout
à l'heure, mon voisin, un Wurtembergeois
barbu, transpirant d'émotion, pleurait com-
me un veau qui a perdu madame sa mère.
Et, le spectacle terminé, une blonde Muni-
choise du meilleur demi-monde, transportée
par l'adorable chant du hautbois de L'En-
chantement du Vendredi-Saint, me confiait:
« Ça me rappelle mon premier commu-
nion )> : ce disant, elle mastiquait une con-
sidérable côtelette de cochon, aggravée de
compote d'abricots.
Avouons-le, npus autres Français, si peu
mystiques, il nous faut un effort pour nous
mettre au point, pour vibrer à l'unisson de
cette légende sacrée, pour admettre, sinon
pour admirer ce Graal où fut recueilli le
sang du Crucifié, cette lance de Longinus
arrachée aux mains ffidigafes d'Acjfortaa wr
le magicien Klingsor, cette blessure du Ro?
coupable qu'avive la quotidienne célébration'
des rites, ce que feu Sarcey appelait, cha-t
que dimanche soir, « la Cène à faire n.
Pourtant, je n'y contredis point, cette re-11
présentation de Parsifal fut belle, impres-(
sionnante même, sous la direction énergie
Que et compréhensive du Dr Muck, « .uru
bras et un cerveau ». Les chœurs des che-!
vahers sonnèrent superbement, et ce fut.urJ
pur délice d'entendre les voix des enfants,
argentines, sous la coupole du Temple. J'a-!
joute que, rieuses, les Filles-Fleurs de'
Klingsor surent nuancer à ravir leur chant!
de séduction: Wir spielen nicht um Gold?
« c'est à l'œil qu'on consomme», et l'on!
s'explique malaisément que Parsifal ait pu
résister aux invites prodiguées par ces'
joyeuses commères de. Klingsor.
Il chante bien, M. Burrian, moins puis-
sam ment que le créateur du rôle. Vair
Dyck, mais avec intelligence; malheureu-,
sement, ses talonnettes ne réussissent !Jas
a dissimuler que ce « reine Thor » de?
Dresde est un p'tit bonhomme, un pltit
bonhomme pas plus haut qu'ça » Mais
public l'a acclamé, un public d'élite où cu),
minaient la reine de Wurtemberg le prince
Ferdinand de Bulgarie, le duc de Cobourg
Excusez du peu!
M. Clarence Withehill (un nom bien al-
lemand!) incarne le personnage d'Amfortas.
souverain avarié qui croit suffisant de se
plonger dans un lac pour calmer les dou-
leurs de ce que le Dr Jullien nOfnQjle dans
L Auto, discrètement, « l'autre Mal". If
reste noble, même dans les crises de la pire
souffrance, même dans la scène atrocement
douloureuse du troisième acte, même pen-
dant l'interrogatoire — si proche du comi-
que - où il cherche à confesser ce benêt
de Parsifal, qui tue les cygnes avant de
donner ceux d'un profond repentir
Kundry, l'enchanteresse, c'est Mme
Leffler-Burkardt, saisissante, au dénoue-
ment, d'humilité prostrée, quand elle ne
peut plus que murmurer « Dienen! Die-
XH?al a Mais je la nréfère encore, insidieuse
- -
Le Numéro : 5 centimes
- Jeudi 6 - - 1
COMŒDIA
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKI
, RtDACTION & ADMINISTRATION :
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Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
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Étranger. 40 » 20 »
Un dénouement
Lorsque le directeur des Folies-Extra-
Jagantes eut demandé à Brisard, auteur
dramatique, qui, précisément, rôdait
4ans les coulisses :
— Tiens, au fait, n'auriez-vous pas
Une petite machine à monter tout de
suite?
Brisard répondit avec assurance:
- Certainement si.
Le directeur continua.
Il exprima son désir qu'elle fut en
deux actes — condition sine qua non; et,
Satisfait sur ce point, souhaita de pouvoir
utiliser sa « place publique » et le « sa-
lOn turc » de la précédente pièce. Il limi-
a à priori les personnages à quatre ;
la figuration à néant; observa que les
Accessoires devraient être réduits au
sjfict minimum, à cause des dépenses, et
s inquiéta de savoir si, au milieu du
deux », on pourrait introduire la danse
russe.
Brisard ne cessa de consentir à tout
Ce que lui valait la considération directo-
riale. Aussi bien, les réponses affirma-
mes lui étaient-elles faciles, car il n'avait
Pas la moindre « petite machine» de ter-
minée.
Brisard n'ignorait plus, après quinze
3ns de métier, qu'il est absolument inu-
hle d'écrire une pièce entière, celles-ci
étant, après les interventions successives
du directeur, des amis, des premiers rô-
:es, des copistes et du souffleur, complè-
taient modifiées entre la lecture et la
répétition générale.
Par contre, Brisard avait un assor-
tent considérable de « commence-
ments » : Deux à trois cents premières
Scènes de premiers actes, amorces d'œu-
Vres de toute nature. Elles étaient réper-
toriées dans les tiroirs de son secrétaire
Psr catégories : livrets d'opéra, revues de
n d'année, drames, charades de salon,
tragédies en vers, tragédies en prose,
Pantomimes, ballets, pochades pour ca-
arets, levers de rideau, etc., etc.
Le lendemain — on « passait» trois
jOurs après, — Brisard vint au théâtre
f^fcc un tiroir plein et sortit de cet éven-
*àire un stock de débuts appropriés.
Après une rigoureuse sêîecfîôù, le di-
recteur opta pour un drame :
— Un drame, disait-il, car il excellait
aux aphorismes, c'est toujours bon : Ou
112 public frémit et il est content, ou il
fIt. et il est encore satisfait. Que peut-
On vouloir de plus?.
,Dès les premiers mots de la première
scene, le directeur des Fantaisies-Extra-
Vagantes arrêta Brisard.
- Ça va, faites répéter de suite 1
Brisard objecta timidement :
, — C'est que. c'est qu'il me reste en-
tore quelques petites choses à revoir et.
> Le directeur l'envoya promener.
On fit donc place au théâtre. On com-
mença.
A l'avant-scène, sous l'inspirant rayon-
nenient de la balladeuse et avec les con-
seils du père noble qui était metteur en
Scène et régisseur. Brisard combina fié-
vreusement ses « raccords », qui consis-
tent à mettre sur un cahier vierge tou-
tes les tirades et toutes les répliques qui
lui venaient à l'esprit. On portait d'ur-
gence les feuillets au copiste, tandis que,
Sur le plateau, on « enchaînait» avec ra-
6e, mais sans désespoir,
L'après-midi qui précédait la répétition
générale, le directeur tint, pour la pre-
mière fois, à écouter un instant le drame.
j1 éprouva quelque stupeur aux propos
tenus par les artistes. C'était une pièce
tassez extraordinaire, mais il n'y prêta
Qu'une médiocre attention.
Brisard lui avait d'ailleurs dit:
— Le dénouement seul a de l'impor-
tance, or toute ma pièce est dans le dé-
nouement.
On ne le répéta pas, ce dénouement.
il était trop tard.
Chacun s'en fut dîner en hâte.
- A la grâce de Dieu ! avait dit le di-
recteur.
Brisard, resté seul à seul avec ses pen-
ses, se demanda s'il irait dîner ou s'il
-tudierait son dénouement.
Après réflexion, il conclut:
- On a le temps. Je verrai bien à
entr'acte, avant le « deux », la tournure
qUe ça prend!
Il convient d'expliquer ici que Brisard,
malgré sa grande expérience du théâtre,
n avait jamais connu l'impression pro-
dulte sur le public parles dénouements
ee ses œuvres, dénouements dont il se
misait volontiers gloire.
La malchance, les cabales, mille autres
choses de ce genre, en avaient toujours
Autrement décidé.
Toujours il avait fallu baisser le rideau
aVant la fin de la pièce pour protéger le
matériel et les artistes.
Brisard y était habitué. le dénoue-
ment de la pièce des Fantaisies-Extrava-
Rantes avait donc une médiocre impor-
ance.
Ce fut tout à fait imprévu. Le public,
Interdit au premier abord, s'intéressa
Peu à Deu aux incohérents propos tpsèifc
par les quatre personnages sur la place
publique. On crut à un vaudeville quali-,
fié drame par manière de plaisanterie et
on trouva très drôle le vaudeville.
Au deuxième acte, le public s'enthou-
siasma. Tandis qu'on interrompait cha..
que scène par de longues salves d'ap
plaudissements, Brisard se faufila pru-
demment vers la sortie des artistes.
— Cela ne peut pas durer! pensait-il,
Cela dura.
Cela dura jusqu'au-.moment où, au
beau. milieu, l'intrigue, inextricablement
embrouillée, les artistes s'arrêtèrent de
parler, jetant des regards-effarés dans la
coulisse, tendant l'oreille au souffleur.
Après un temps, on sépara, par le ri-
deau, la scène de la salle stupéfaite. -,
— Brisard!.. où est Brisard? hurlait
le directeur.
On découvrit Brisard dans la loge du
concierge.
— Et le dénouement?
— Quel dénouement?
— Le dénouement de la pièce, nom de
Dieu! quen avez-vous fait?. le souf-
fleur n'a rien!
- Mon Dieu ! répliqua Brisard atter-
ré. Les rosses de spectateurs qui n'ont
pas encore emboité!. Mais. c'est qu'il
n'est pas écrit. j'ai tellement peu l'habi
tude.
Il va falloir prétexter une indisposition
d'artiste, songeait le directeur, lorsque
Brisard eut une inspiration subite.
— Pas du tout, fit-il; pour une fois
que je tiens ;un succès. laissez-moi
faire.
Il monta sur la scène, fit leverïle ri-
deau et, bon enfant, en camarade :
— Mesdames, messieurs, vous me
voyez flatté et confus : c'est la première
fois que le public permet aux artistes
d'achever de représenter devant lui une
pièce de moi. Je ne m'y attendais guère,
je vous le jure. C'est pourquoi j'ai né-
gligé de débrouiller l'imbroglio dont vous
venez d'être témoins ; mais puisque cela
vous intéresse, apprenez donc que j'ai
l'intention de tout arranger, dans une
dernière scène, en punissant le vice et en
récompensant la vertu.
On n'en crut pas un mot. On trouva
que cette intervention de l'auteur était
une idée fort originale. Une ovation fit
de Brisard, pendant quelques minutes, un
grand homme !
.Lorsque ce fut fini, Brisard, heureux
de l'avoir échappé belle, mais penaud,
déclara au directeur :
— Je ne me couche pas que le dé-
nouement ne soit écrit. -
— Gardez-vous .en bien, répliqua ce-
lui-ci. Nous tenons un succès. je vous
l'avais dit. n'ajoutez pas une ligne.
mais redites-leur donc simplement de-
main ce que vous avez dit ce soir.
C'est un dénouement ça, que diable!
Pierre SOUVESTRE.
Nous publierons demain un article de
HENRY KISTEMAECKERS
Nœuds gordiens
Il n'est point de préjugé plus répandu
chez nos auteurs que celui des situations
neuves.
Dès qu'il s'agit de concevoir une pièce
-nouvelle, directeur et auteur se prennent la
tête à deux mains et cherchent avidement
le cas bizarre et inédit que l'on pourrait
présenter aux spectateurs pour provoquer
leur enthousiasme pendant quelques cen-
taines de représentations.
On sait à quels procédés conduit inévi-
tablement une pareille recherche. Tous les
moyens sont bons. On fait appel aux cas
les plus imprévus, aux passions soi-disant
les plus perverses et qui ne sont, les trois
quarts du temps, que parfaitement grotes-
ques ou ridicules. Si cela ne suffit point,
on terme le théâtre après Je troisième acte,
on invite les spectateurs en petit comité à
assister sous le sceau du secret au qua-
trième et l'on abreuve ensuite la presse de
communiqués confidentiels où l'on révèle
à l'avance ce qui se passera au cinquième
acte.
On apprend ainsi avec terreur que, vers
la fin de la pièce, l'adjudant des tirailleurs
bengalis avouera devant le conseil de guer-
re sa passion perverse pour le crocodile de
l'empereur ou que la comtesse, à la fin du
repas, révélera à ses convives qu'elle leur
a fait manger un cent d'hameçons dans l'é-
nigmatique pâté de maquereaux qui leur fut
servi au deuxième acte. Cela s'appelle
« troublante perversion » ou « l'assassin
érotomane » et il n'est plus guère au
monde que M. Bérenger pour croire que de
pareilles âneries conduisent la France aux
abîmes.
Il serait cruel, en pareille matière, de
vouloir faire de faciles comparaisons, mais
si nos auteurs dramatiques consentaient a
relire certains auteurs qui eurent beaucoup
de succès, Molière, par exemple, ils cons-
tateraient avec stupéfaction le manque com-
plet de moyens imprévus dont disposait cet
auteur. Ils constateraient, avec non moins
d'étonnement, la pauvreté inouïe de ses scé-
narios et l'indigence absolue de ses dénoue-
ments. Et comme, il taut bien le reconnai-
tre, toutes ses pièces ont eu assez de suc-
cès, ils comprendraient peut-être alors,
qu'ici comme ailleurs, le talent n'a que
faire des situations de roman feuilleton et
que la valeur tout entière d'une pièce dé-
pend de la valeur de son auteur.
Seulement, je le sais bien, avec de pa-
reils raisonnements, on ne ferait plus ja-
mais de pièces, et il faut, hélas! bien vivre.
QLJM: PAWLOWSKI,
Échos
L
surs- vacances.
II serait téméraire de penser que les
jeunes lauréats du Conservatoire consacrent
à un repos bien gagné le temps de leurs va-
cances.
La plupart en profitent pour-prendre part
à des représentations, et quelques-uns pour
en organiser. -
C'est .ainsi-que^MM. Pierre Dupré et
Villaret,. chanteurs récompensés, jouent l'o-
péra-comique,;et même l'opéra-comique iné-
dit,^dans le Midi; que Mlle Borione chante
à Hendaye, Mlle Marcelle Demougeot au
'Mont-Dore, et que bientôt, à Béziers, Mlles
Panis, Kaiser et Fraisse seront, dans Le
Premier glaive, les charmantes interprètes
de la musique de M. Henri Rabaud.
Les comédiens ne le leur cèdent en rien.
A Béziers encore, Mlle Norma jouera la
pièce de M. Népoty; Mlle Fillacier jouait
ces temps-ci à Ostende, et tandis que Mlle
Marialise joue, pour Orange, Regina des
Burgraves, Mlle Pacitti, à Enghien, joue.
au baccara.
A
vant La Furie.
Malgré l'interruption momentané
que les vacances ont apportée aux répéti-
tions de La Furie, M. Jules-Bois et M. Ra-
phaël Duflos qui, on le sait, s'est chargé de
la mise en scène, n'ont pas cessé de se
préoccuper de la première qui doit avoir
lieu à la fin de septembre.
Vers le 20 août, l'auteur et le sociétaire
s'embarqueront pour aller prendre des no-
tes à Candie.
M. Jules Bois y a, d'ailleurs, effectué
déjà urr premier voyage. :-
«E
n plein air.
:- A propos du théâtre-d'Aulnay-sous-
Bois, sait-on que c'est à deux pas, au
Raincy, que furent données les deux pre-
mières représentations complètes de Tar-
tulle ?
Le château du Raincy appartenait alors à
la princesse palatine qui donna ces repré-
sentations les 29 novembre 1664 et 8 no-
vembre 1665, en présence du grand Condé.
Ce château avait été construit sur l'em-
placement de l'ancien monastère de la fo-
rêt de Bondy par Jacques Bordier, conseil-
ler et secrétaire du roi, d'après les plans
de Leveau, et lui avait coûté plus de 4 mil-
lions 500.000 livres; Lebrun l'avait décoré
et Le Nôtre en avait dessiné les jardins.
Ce château fut démoli sous Louis-Phi-
lippe^ après qu'au moment de la tourmente
révolutionnaire Couthon eut proposé d'en
faire, un « établissement pour l'éducation
des troupeaux » !
L
fennemi est "dans la salle.
La,scène s'est passée dernièrement
dans un théâtre mondain (ce n'est pas chez
M. de Clermont-Tonnerre) où l'on repré-
sentait ï une bluette pastorale en trois ta-
bleaux. L'auteur, ainsi que cela arrive sou-
vent dans les entreprises mondaines, était
en plus • directeur de la scène, régisseur,
souffleur, voire machiniste, et comme tel
préposé au rideau. Il allait le lever sur le
deuxième tableau lorsque, risquant un œil
dans le trou adéquat, il aperçut son plus
mortel ennemi au premier rang des chai-
ses. Alors l'auteur-machiniste refusa de
lever le rideau! Pas plus!. Affolement des
« administrateurs », suppliques vaines à
l'ennemi d'avoir à quitter sa place, et im-
patience du public qui, n'ayant pas payé,
n'était, suivant la logique bien parisienne,
aucunement disposé à l'indulgence et par-
lait d'essayer la capacité guerrière des ban-
quettes. Il fallut donc bien lever quand
même. Pauvre auteur ! Voyez-vous cet
exemple suivi par les auteurs de profes-
sion, aux répétitions générales? Hélas, le
rideau ne se lèverait jamais!
NOS ARTISTES
(Paul Boyer et Bert, phot.)
M.^Codard
lui a .joué hier soir, à l'Opéra, le rôle de Lohengrin
c
onvalescence.
M. Francis de Croisset. Qui a été
gravement atteint de la fièvre scarlatine et
dont un moment la santé avait inspiré des
inquiétudes, est actuellement en pleine con-
valescence.
11 a ptï quitter hier Pans pour se rendf**
à. Saint-Gervais, où se trouve déjà installé
'son collaborateur, M. Maurice Leblanc.
* Nous souhaitons à notre ami un prompt
rétablissement.
D
usausoy ! Dusausoy ! Voilà le nom de
l'expert joaillier du 4, boulevard des
Italiens, qui achète le plus cher bijoux, dia-
mants, perles. M. Dusausoy prie de bien se
renseigner sur la .valeur avant de lui vendre.
BALLADES
NOS JOLIES DAMES DE COMEDIE
(Suite)
Il n'est bon bec que de Paris!
Citons parmi les jeunes femmes
Dont nos pauvres cœurs sont éprise
Greuze, Brésil aux yeux de gemmes,
Et l'amante des chrysanthèmes,
Jeanine Zorelli. Desclos,
Macnyll.. ô doux épithalames:
Ce sont les princesses du beau!
Onduleuse Mitzy-Dalthy,
Kerwich, Taillade. je me pâme
Et vous, petit page Bovy,
Qu'avec Robinne l'on acclame.
Paz Ferrer, brune sur mon âmel
Bernard-Colonna, Romano.
Clado, vibrante, qui m'enflammer
Ce sont les princesses du beau 1
Vous: douce Carmen Deraisy,
Bérangère qui tient le drame.
Ailleurs: Valdec, Marthe Lutzi,
Pouzolz-Lili, Dauzon qui brame
Sur l'amant percé d'une lame.
Desroches, Clairville aux bons mots,
Les sœurs Fusier. Lauzière. Dame t
Ce sont les princesses du beau !
ENVOI
Puisqu'il faut arrêter la gamme.
J'arrête. et je dis tout de go,
Qu'on se sent le cœur multigame
Près de ces princesses du beau.
- ARMORY^
A
Pont-aux-Dames, ces jours derniers.
Le temps est superbe, l'air est tout
calme et le silence délicieux. Un pécheur,
le panama lui couvrant la tête,. pêche. Au
fait, pêche-t-il? Approchons-nous. Le pê-
cheur, d'un œil, observe sa ligne, qui ne
pique pas bien souvent du reste. De l'autre
il lit. Approchons-nous encore. Le pêcheur
est M. Coquelin. Il se repose en recher-
chant les poissons du petit ruisseau de la
maison de retraite. Comme les poissons,
malins, mordent rarement, l'inoubliable
Cyrano s'amuse à lire Will Trimm et cie-
car M. Coquelin est chauffeur et les récits
automobiles de notre collaborateur 'Kiste-
maeckers le ravissent.
L
euri3 mots. 1 1
C'est l'été que les vrais « ama-
teurs » suivent avec le plus d attention les
représentations quotidiennes de la Comédie
Française.
Le répertoire est plus varié que pendant
la saison, où les pièces nouvelles sont jouées
quatre fois par semaine. De jeunes pension-
naires s'essaient en des rôles difficiles; des
sociétaires reprennent d'anciens succès.
Tout un petit groupe fidèle *se complaît à
ces soirées d'août.
Or, ce public spécial a remarqué depuis
peu de temps un admirable figurant.
Grand, souple, les traits fins sans mol-
lesse, l'œil large et lumineux, il porte fort
galamment la cape et le feutre espagnols,
ou, à l'occasion, la tunique du guerrier ro-
main. Il paraît, en outre, animé d'une flam-
me intérieure. Il participe, muet mais vi-
vant, à l'action. Il esquisse avec à-propos
des gestes heureux, sans cependant quitter
la réserve qui convient à un figurant.
Bref, on en causa à plusieurs reprises,
ces soirs derniers, dans les couloirs. C'est
presque une réputation qui commence à
s'établir.
On en parlait l'autre jour chez un très
spirituel pensionnaire qui, quoique fort
jeune, connaît parfaitement l'esprit de la
Maison :
— Je ne l'ai jamais vu Est-il vraiment
si bien que cela? interrogea-t-il.
Et, sur une réponse affirmative, le pen-
sionnaire conclut, dans un sourire:
— Le malheureux! Il se permet d'être
bien. On va le f. à la porte!
p
oints de vue russes.
On se rappelle l'éclatant succès
qu'obtint, à la fin de la saison dernière, sur
la scène de l'Opéra-Comique, Snegou-
rotchka, le conte lyrique de Rimsky-Kor-
sakoff.
Le ballet, particulièrement, fut tellement
applaudi que, chaque soir, on dut le bisser.
Il faut croire que, malgré nos excellen-
tes relations diplomatiques, le goût russe
diffère terriblement du goût français.
Lisez plutôt cet extrait du Slovo, publié
par la Grande Revue.
.Ce ballet fait fureur. Mais, en réalité, c'est
une terrible ineptie. On y voit se précipiter sur
la scène des espèces de femmes sauvages avec
des tambours de basque, des Bohémiens, peut-
être, ou des Tcherkesses; derrière elles, quel-
que chose qui ressemble à des polichinelles et
des êtres dans le genre des Petits-Russiens.
Tout cela saute et se jette en tous sens, pous-
sant des cris sauvages. Les hommes bondissent
à des hauteurs impossibles, puis font un tour de
danse qui rappelle la kerghisika. L'entrain et
la gaieté sont extrêmes : les Français hurlent
d'enthousiasme.
Pour nous, spectateurs ordinaires de l'O-
péra-Comique, cette opinion a tout au moins
le mérite de l'imprévu.
L
e tourisme n'est agréable qu'avec une
automobile souple et rapide, consom-
mant peu d'essence et de pneumatiques.
C'est la justification de la vogue des voitu-
res Unie, construites par ce mécanicien
compétent qu'est Georges Richard, et dont
la 12 chèvaux, notamment, est une mer-
veille de régularité.
NOUVELLE A LA MAIN
s
ous prétexte de surveiller le fonctionne.
ment de la lumière à l'Opéra, - certain
inspecteur de la compagnie d électricité ne
quitte guère le foyer de la danse.
Une de ces demoiselles a dit:
— Pour un électricien, il s'intéresse
beaucoup trop aux jupes de. gazel
himmm 4$ Y~M'~
Les femmes excentriques
au Théâtre
.—————_— ——————
Je n ai pas la prétention de vous apprendre
que les rôles de femme au théâtre ne se com-
posent point seulement d'un débit de voix or-
donné et de gestes classiques, dans un décor
qu'on porte avec soi et qui s'appelle robe. Des
actrices existent qui se moquent de l'esthétique
établie, font bon marché de la ligne, en scène,
et, consentant par tempérament ou sacrifices
d âge à jouer les excentriques, apportent dans
ces emplois un peu gros, mais d'un effet cer-
tain, leurs qualités personnelles pour composer
des types qui méritent de trouver place dans
Comœdia.
Ce sont celles qui, dans le répertoire con-
temporain, laissent dans le public la trace la
plus profonde.
On peut, en effet, au sortir du théâtre, ne
pas se souvenir complètement du sourire de
l'ingénue et de la façon menue, menue dont,
au deuxième acte, elle avançait au bout de son
bras grêle l'innocence vaporeuse de son éven-
tail de plumes ; on peut oublier la moue dé-
daigneuse de la grande coquette et la manière
olympienne dont elle repoussait les avances
d'un bellâtre flavescent, et les embarras d'une
traîne qui n'en finissait plus. Mais ce qu'on
n'oublie pas, par exemple, c'est le procédé en
dehors, le jeu débordant des excentriques, cette
manière de comique qui se moque de la rampe,
saute par-dessus, dans une cascade imprévue
pour bondir sur le spectateur, le prendre à la
gorge et le forcer à rire.
Voyez, dans un genre relevé, Augustine Le-
riche, par exemple. Dans ce corps resté sou-
ple et jeune, le diable habite, c'est certain. Les
gestes sont vifs, le pas assuré, et d'une bouche
aux lèvres rapides — si je Deux dire — les mots
tombent drus, et si irrésistibles qu'ils sont
commé une source qui dévale. Et la belle-mère
qu'elle est, dans La Maîtresse de piano, par
exemple, suffit à nous faire souhaiter, si nous
avons des soifs matrimoniales, de rencontrer
sur notre route, au carrefour de l'hyménée,
une belle-maman semblable à elle.
Et Madeleine Guitty ? Vous l'avez vue, je
pense, au Grand-Guignol, chez Max Maurey,
quand elle jouait Rosalie. Les yeux, chez Au-
gustine Leriche, s'allument, pétillent et lancent
des éclairs malicieux. Chez Guitty — dans Ro-
salie tout au moins — les yeux deviennent, vo-
lontairement, des boules de verre, ternes et
sans reflets, stupides à souhait. Et la physio-
nomie suit, et le corps aussi, dans la robe de
futaine qui le recouvre, avec deux mains rou-
ges aux doigts gourds qui brinqueballent. Que
vous laissiez à Madeleine Guitty son enveloppe
grossière de bonne à tout faire ou que vous
lui offriez, au vestiaire du vaudeville, une roba
à ramages et des capelines d'un autre âger
toujours il se dégagera d'elle ce je ne sais quoi
de force comique qui enlève le rire.
Dans un autre ordre d'idées, prenons, si voue
le voulez, Edmée Lescot. Edmée Lescot- P dfr'
ront, sur le mode interrogatif, les gens peu ren<
seignés. C'est une femme extraordinaire qui
tint la scène longtemps et qui, aujourd'hui,
dans une retraite inopportune, conserve une vi-
gueur, une vivacité et un comique tels qu'une
stupéfaction me vient toujours quand je la ren-
contre, promenant son sourire amusé et éter-.
nellement jeune, qu'il ne se trouve pas un di-
recteur assez avisé pour tirer parti de son talent
qui se repose, mais ne meurt point. L'ancienne
pensionnaire de Grau et de Gunsbourg, qui lâ-
cha l'opéra-bouffe pour le concert, promena
d'un hémisphère à l'autre la fantaisie calvacfloi
dante de sa nature chantante, disante, dansante,,
et l'imprévu de ses chansons françaises, anglais
ses, russes, espagnoles, merveilleusement sew
Madeleine Guitty ledmée Lescot Augustine Leriche
Edmée Lescot
vie, en cela, du reste, par sa connaissance attJ
pays et de la langue qu'on y parle.
Et Jeanne Bloch? Est-elle assez une excen *
trique, celle-là? Je sais bien que son jeu estl
comme son physique: un peu bien gros; mais
tout de même, quand elle créa sur les scènes^
parisiennes ce type inoubliable de femme-ramaI;
lot, avouez que ce fut une trouvaille.
Depuis, elle s'est spécialisée dans la revues
Elle s'y montre, dans la cuirasse qui la bas-!
tionne et dans son jeu : débordants. Son phy-4
sique, qui fait frémir les spectateurs que guetta
l'embonpoint, est devenu chez elle non unei
tare, mais un extraordinaire moyen qui s'ajoute)
à ceux, comiques, qu'elle possède. Qu'elle soitj
gendarme ou agent, qu'elle soit un président)
Fallières, à l'imposante carrure, elle est vraM
ment unique, et de sa personne, qui roule dm1
côté cour au côté jardin, le rire se dégage,
énorme comme elle; mais le rire s 'analyse-t-il ?'.
Montrez vos dents, braves gens, riez et nel
cherchez pas le fin du fin des choses.
E. ROUZIER-DORCIËRFS.
LETTRE DE BA YREUTH
66 PARSIFA99 1
Dans Le Cas Wagner, qui reste la bro-
chure la plus lue de Nietzsche, ce fantai-
siste à grosses moustaches affirme, entre
autres blagues, que tous les drames wag-
nériens reposent uniquement sur l'idée de
rédemption: Le Vaisseau fantôme et Tann-
hæuser, c'est le vicieux rédimé par une
vierge innocente; Parsifal, c'est la rôtis-
seuse de balais rachetée par un cocque-
bin, etc.
C'est de la synthèse exagérément sim-
pliste. Mais, dans l'oeuvre wagnérien, sus-
citeur de tant de gloses bafouilleuses, on
peut affirmer que Parsifal est la production
autour de laquelle furent accumulées le plus
d'incompréhensions. Je n'ai pas oublié le
temps où l'un des plus avertis commenta-
teurs du maître traitait ce drame symboli-
que d'« œuvre de sénilité », alors qu'« œu-
vre de sérénité » eût été plus juste.
Aujourd'hui, Parsifal n'est plus guère
discuté; on l'acclame en Amérique et en
Hollande (malgré les protestations de la fa-
mille Wagner qui voudrait réserver au seul
Bayreuth ce spectacle fructueux) ; c'est lui
qui réunit le plus grand nombre d'admira-
teurs forcenés, surtout parmi les-Allemands
chez qui le souci des contingences laisse
toujours subsister un fonds inépuisé de
mysticisme. Pendant le deuxième acte, tout
à l'heure, mon voisin, un Wurtembergeois
barbu, transpirant d'émotion, pleurait com-
me un veau qui a perdu madame sa mère.
Et, le spectacle terminé, une blonde Muni-
choise du meilleur demi-monde, transportée
par l'adorable chant du hautbois de L'En-
chantement du Vendredi-Saint, me confiait:
« Ça me rappelle mon premier commu-
nion )> : ce disant, elle mastiquait une con-
sidérable côtelette de cochon, aggravée de
compote d'abricots.
Avouons-le, npus autres Français, si peu
mystiques, il nous faut un effort pour nous
mettre au point, pour vibrer à l'unisson de
cette légende sacrée, pour admettre, sinon
pour admirer ce Graal où fut recueilli le
sang du Crucifié, cette lance de Longinus
arrachée aux mains ffidigafes d'Acjfortaa wr
le magicien Klingsor, cette blessure du Ro?
coupable qu'avive la quotidienne célébration'
des rites, ce que feu Sarcey appelait, cha-t
que dimanche soir, « la Cène à faire n.
Pourtant, je n'y contredis point, cette re-11
présentation de Parsifal fut belle, impres-(
sionnante même, sous la direction énergie
Que et compréhensive du Dr Muck, « .uru
bras et un cerveau ». Les chœurs des che-!
vahers sonnèrent superbement, et ce fut.urJ
pur délice d'entendre les voix des enfants,
argentines, sous la coupole du Temple. J'a-!
joute que, rieuses, les Filles-Fleurs de'
Klingsor surent nuancer à ravir leur chant!
de séduction: Wir spielen nicht um Gold?
« c'est à l'œil qu'on consomme», et l'on!
s'explique malaisément que Parsifal ait pu
résister aux invites prodiguées par ces'
joyeuses commères de. Klingsor.
Il chante bien, M. Burrian, moins puis-
sam ment que le créateur du rôle. Vair
Dyck, mais avec intelligence; malheureu-,
sement, ses talonnettes ne réussissent !Jas
a dissimuler que ce « reine Thor » de?
Dresde est un p'tit bonhomme, un pltit
bonhomme pas plus haut qu'ça » Mais
public l'a acclamé, un public d'élite où cu),
minaient la reine de Wurtemberg le prince
Ferdinand de Bulgarie, le duc de Cobourg
Excusez du peu!
M. Clarence Withehill (un nom bien al-
lemand!) incarne le personnage d'Amfortas.
souverain avarié qui croit suffisant de se
plonger dans un lac pour calmer les dou-
leurs de ce que le Dr Jullien nOfnQjle dans
L Auto, discrètement, « l'autre Mal". If
reste noble, même dans les crises de la pire
souffrance, même dans la scène atrocement
douloureuse du troisième acte, même pen-
dant l'interrogatoire — si proche du comi-
que - où il cherche à confesser ce benêt
de Parsifal, qui tue les cygnes avant de
donner ceux d'un profond repentir
Kundry, l'enchanteresse, c'est Mme
Leffler-Burkardt, saisissante, au dénoue-
ment, d'humilité prostrée, quand elle ne
peut plus que murmurer « Dienen! Die-
XH?al a Mais je la nréfère encore, insidieuse
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