Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-06-23
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 23 juin 1908 23 juin 1908
Description : 1908/06/23 (A2,N267). 1908/06/23 (A2,N267).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76466516
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
2'Année.--N° 267 (Quotidien) lA Numbo : 5 centimes
1
Mardi 23 Juin 1908. !
-Polk
rédacteur en Chef : G* de PAWLOWSKi
RÉDACTION & ADMINISTRATION 1
27, Bouleuard Poissonnière, PARIS,
TÉLÉPHONE : 288-97
adresse Télégraphique : CO/LFZDIA-PARI&
ABONNEMENTS :
UN AN 8 110.
-. -
Paris et Départements 24 fr. 12 firv
Étranger. 40 » 20 »
1
RÉDACTION & ADMINISTRATION ?
27, Bouleuard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE: 2nS - 0'7 !
Adresse Télégraphique : C0MŒD1A»PARI$
ABONNEMENTS: -
..UN AN 6 FFLOTS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étiange. 40 > 20 »
Enseignes
et Titres
Les Parisiens et autres gens de villes
qui, depuis des semaines, errent sur les
côtes flamandes, normandes, bretonnes,
vendéennes ou du Midi, en quête de
Villas à louer ; les groupes errants que
Ton voit s'arrêter devant les grilles, les
chercheurs d'édens au mois et d'oasis
à la saison, tous ces affamés de bonheur
agreste ont eu l'occasion de faire de dou-
loureuses expériences sur l'exagération
mensongère des indicateurs et des écri-
teaux.
Ils savent que, dans l'annonce d'une
superbe maison ou d'un joli cottage, il
ne faut pas s'abuser sur les sens des
mots « joli » et « superbe ». Mainte « vil-
là des Hortensias» n'a tout juste, dans
un coin de poudreuse verdure, que deux
ou trois fleurs justificatrices de son ti-
tre. Mais « le cœur des citadins » est tou-
jours prêt à s'exalter pour des noms de
!fleurs, comme à des musiques guerriè-
res. Et il suffit de consulter, au passage,
les plaques des petites résidences d'été
pour se rendre compte du besoin de poé- --
sie qui orne l'âme des gens, et l'ornera
toujours.
Ce qu'il y a d'admirable, c'est que les
, propriétaires des nombreux « Mon Rê-
ve » qui bordent les routes des stations
balnéaires, c'est que les parrains de ces
sèches petite? bâtisses n'ont pas voulu
simplement en faire accroire aux locatai-
res possibles, et que cette villa sans om-
bre, entourée d'une petite cour d'arbus-
tes, répond parfaitement à leur propre
idéal. Et c'est avec une parfaite bonne
foi qu'en rédigeant leur annonce, ils
n'ont pas craint d'écrire: Elégant et
charmant cottage.
Un matin, en rentrant chez moi, au
petit jour, je goûtais avec délices l'air
irais du matin. Il n'y a que les gens
qui se couchent tard qui peuvent appré-
cier le charme de l'aurore. CÊUX qui se
lèvent tôt sont encore endormis et bouf-
fis. Ils n'ont pas l'esprit dégagé et cette
perspective agréable d'aller se coucher.
Et puis, ils ne lisent pas les enseignes.
On ne lit bien les enseignes que lors-
que les boutiques sont fermées. Quand
îe magasin dort, ainsi que totrte la mal
son,N quand la rue est déserte et silen-
cieuse, les vieilles enseignes chevrotent
toujours, et un peu plus haut. ce qu'elles
ont à dire. Je n'avais jamais remarqué
que ce marchand de vins, devant lequel
je passe tous les jours, s'intitulait: «Au
bouquet de lilas ».
■ Je pense qu'il y a quarante ans,
quand ce titre a été choisi, il, a été dis-
cuté par toute la famille, puis" que l'on
a fait venir un peintre, à qui l'on a
dit : « Vous allez me peindre une ensei-
gne, avec ces mots: Au bouquet de li-
las.
- Quand cette enseigne a été placée, on
est venu la regarder. Des voisins se sont
approchés et ont donné leur avis, géné-
ralement favorable.
Et le patron, encaissant leur suffrage,
a dit à sa famille : « Untel est venu voir
l'enseigne. Il la trouve très bien. »
Comœdia citait, l'autre jour, des en-
seignes très plaisantes. J'en ai rencontré
souvent d'inexplicables.
Par quelle outrecuidance étonnante
cette petite laiterie, de deux mètres de
façade, s'intitule-t-elle : Laiterie continen-
tale?
A Ostende, il y avait, jadis, un su-
perbe magasin de chaussures qui doit
exister encore. On y voyait, à la devan-
ture, des chaussures d'un luxe inouïe,
en cuir de Russie vert, avec des orne-
ments d'or et des boucles en vrais bril-
lants. L'enseigne portait ces mots : Au
Pauvre Diable.
Rien n'est si difficile que la recherche
d'un titre. J'ai fait bien souvent des piè-
ces dont le titre n'est venu qu'après. Les
meilleurs titres que j'ai trouvés, c'est
pour les pièces qui n'ont jamais été fai-
tes.
Mon bagage dramaitque, déjà considé-
rable, s'accrut de trois pièces jamais
écrites : Le Second dans Rome, Les
Deux Cloches, Les Vertus à la Mode.
On les a annoncées plusieurs fois. Et
c'est de celles-là que je parle, quand on
me demande ce que j'ai sur le chan-
tier.
Un auteur devrait toujours choisir un
titre à sa pièce avant de la porter au di-
recteur. Il s'éviterait ainsi de pénibles
recherches, au moment où le directeur
lui dit: « Eh bien, nous passons dans
huit jours, et il me faut votre titre pour
combiner une affiche ».
On est agité, mal disposé. L'approche
de la première vous a enlevé toute con-
fiance. Les interprètes répètent sans
conviction. A quoi bon chercher un titre
pour cette pièce mort-née?. On cher-
che tout de même. On trouve quelque
chose qui vous emballe. Un parent par-
tial vous déclare que c'est merveilleux.
On apporte le titre au directeur.
- Et c'est pour ça que vous avez
réfléchi toute la nuit?
Le directeur appelle un de ses pen-
sionnaires.
— Nous avons un titre pour la pièce.
Vous allez me dire ce que vous en pen-
sez.
Et il prononce le titre d'une voix
molle.
L'artiste regarde l'auteur, puis le di-
^cteur. Puis il fait la moue
B. CERNY TRUFFIER R. DU MINIL GRAÎÎDVAL B. CERNY DEHELLY MAYER GÊNIAT
---..- L .-.~--.------.-----..--.- .- .—-----— -, ', - ., -.. ,---- -. ■ •• ■ ~- - - - T®Nuur -13WB1" ,
Paul'Boirer et Bert, phot. LE MISANTHROPE N L'ECRAN BRISE
On cherche autre chose que l'on sou-
met à un autre artiste, qui a la spécia-
lité de ne se tromper jamais sur les ti-
tres. Or il déclare que les titres que
vous lui soumettez sont des titres de
fours..
Cet artiste a un sens mystérieux de ce
-qui doit réussir. Il raconte lui-même, à
ce sujet des histoires édifiantes. A Deau-
ville, il prend un nom de cheval sur le
programme, et, sans s'y- connaître, trou-
ve le gagnant. C'est incompréhensible,
mais c'est comme ça.
On découvre le lendemain un autre
titre. Pas mauvais, dit le directeur, mais
trop long pour l'affiche. Vous auriez des
lettres grêles, qui ne se verraient pas.
« Après vous, s'il en reste », est un
titre de revue. « Le mécano et la dan-
seuse ». ça n'est jamais qu'une pièce
en un acte.
— Le titre ne signifie rien, dit le théo-
ricien de la maison. Le public ne sait
pas le titre des pièces. Il va voir la pièce
de la Renaissance ou la pièce des Varié-
tés.
— Pourtant? Si le titre est plaisant,
engageant?
— Un bon titre n'a jamais sauvé une
mauvaise pièce.
C'est entendu. Mais un bon titre ne
fait pas de mal à une bonne pièce. Et,
comme ce jour-là on est persuadé qu'on
fait un nièce admirable, on rentre chez
soi, on réfléchit, mais on réfléchit sé-
rieusement; le cerveau travaille, et ne
fait: pas du sur place. Et l'on finit par
trouver un titre qui plaît à tout le théâ-
tre. On fait partir immédiatement la
note aux journaux. La pièce est annon-
cée le lendemain avec son nom, son éti-
quette éternelle que répéteront nos pe-
tits-neveux. Le surlendmain paraissent
des lettres de revendication: d'un ro-
mancier dont le roman a été imprimé en
feuilletons il y a douze ans; d'un auteur
dramatique qui a remis un manuscrit au
directeur de tel théâtre.
— Excellent, dit le directeur. Gardez
votre titre. Ne le changez qu'à la der-
nière extrémité. Attisez la polémique.
Excellent conseil. Je prends désormais
par principe, sauf à le changer après,
le titre de pièces déjà existantes, avec
l'espérance, jamais déçue, que les inté-
ressés le revendiqueront.
Tristan BERNARD.
Échos
L
'ouvreuse-nursery.
Que faire de son bébé, lorsque, sans
bonne ni nourrice, on veut absolument as-
sister au spectacle? Rester à la. maison.
Evidernnient i * A Paris, mais pas en Amé-
rique, car c'est de New-York, encore une
fois, que nous arrive la lumière.
Un directeur intelligent vient d'adjoindre
au vestiaire une petite nursery très bien
organisée avec tout ce qu'il faut pour en-
dormir, biberonner ou calmer le bambin.
La maman le dépose entre les mains de
l'ouvreuse. à côté de son manteau. Elle
reçoit un double numéro,, le 22 par exem-
ple, et, sans souci, elle peut jouir du spec-
tacle.
A la sortie, elle réclame le double 22, on
lui place le bambin endormi dans le bras
droit, le manteau sous le bras gauche, et
chacun se sépare content de l'innovation.
On dit que le Grand-Théâtre de Finlande
a loué, dans l'Auberoff-Strand, tout un rez-
de-chaussée destinée à l'essai de cette
transatlantique innovation.
Helsingfors, hélas! n'est pas encore Pa-
ris !
p
i rojets.
- Il se pourrait que le théâtre de l'A-
thenee inscrivit a son programme de la sai-
son prochaine, L'Allumeuse, de notre excel-
lent confrère Camille Audigier.
On se souvient que cette comédie en
trois actes, qui parut ici même en feuille-
ton, met fort adroitement en scène le
monde si curieux des théâtres : acteurs, au-
teurs, directeurs et critiques.
L'action se passe à l'Odéon, mais ce
n'est là qu'une simple indication de mise
en scène.
M. Deval, qui lut L'Allumeuse dans Co-
mœdia, sut en découvrir les brillantes qua-
lités, et déclara à l'auteur qu'il était tout
disposé « à en causer avec lui ».
Nos lecteurs seront d'avis que le très
averti directeur de. l'Athénée ne saurait
faire un meilleur choix, car L'Allumeuse
est une pièce très littéraire, très « théâ-
tre », dont le succès dans nos colonnes doit
faire préjuger celui, plus complet encore,
qui l'attend sur la scène. ,
Et, en toute sincérité, Comœdia slestime
heureux què, grâce à lui, un talent qui n'a
pas donné que des promesses, pût obtenir
de nouveau la consécration de la rampe.
p
ourquoi les vents avaient cessé.
On a remarqué (et on s'en est même
inquiété) que les concours publics du Con-
servatoire, qui chaque année se suivaien't,
subissent cette fois une interruption. C'est
ainsi qu'il y a un intervalle de cinq jours
entre le concours d'opéra (11 juillet) et ce-
lui des instruments à vent (16 et 17 juillet).
La vérité est qu'il faut rendre la salle
de l'Opéra-Comique pour les préparatifs de
la représentation gratuite du 14 juillet. Il
faut notamment supprimer l'estrade qui re-
couvre l'orchestre des musiciens pendant
les concours.
Et voilà pourquoi, cette année, les vents
suivent de si loin les autres bruits du Con-
servatoire.
M
lie Stella, de la Cigale, l'héroïne du
drame que nous avons raconté hier,
nous paraît posséder une jolie dose de
sang-froid. D'aucunes, après une pareille
émotion, s'enseveliraient dans la douleur et
rechercheraient la solitude pour pleurer à
leur aise: Mlle Stella a l'âme mieux trempée
et elle a tenu à le prouver en allant, le soir
même, allègrement figurer dans la Revue
de de Fiers et Héros.
N'allez pas en déduire que Mlle Stella
est réfractaire à tout bon sentiment; bien
au contraire, elle a des trésors d'affection
à dépenser, et les gracieuses souris blan-
ches, dont l'élevage est sa constante préoc-
cupatio'n, sont de très heureuses petites
bêtes.
0
ccupe-toi de. mon chien.
Georges Feydeau est, on le sait, un
délicieux humoriste, tout dans la vie sem-
ble fait pour que sa verve s'exerce.
Et cette fois c'est la vie qui s'est amu-
sée de lui, Feydeâu vit l'autre jour dans
une boutique connue un amour de petit
tout, il entre et s'enquiert du prix: 1,500
francs lui est-il répondu.
L'heureux auteur sort de sa poche quinze
beajjx billets de cent francs, et radieux em-
porte le joli animal.
Le lendemain, un malencontreux auto-
taxi passe sur le pauvre quadrupède et lui
casse une patte.
Feydeau, toujours gracieux, vient de lui
en faire poser une en bois, car l'amputation
fut jugée indispensable..
Et depuis lors, ce chien de quinze cents
francs promène mélancoliquement une
jambe en pitchpin, pareil en cela aux
glorieuses victimes du devoir qui, clopin
dopant, font le tour du jardin des Inva-
lides; v
A
utour de Tristan.
Nous recevons de M. Louis Artus
l'aimable lettre suivante, que nous nous fai-
sons un plaisir d'insérer:
Mon cher Masque de Verre,
Puisque vous avez bien voulu vous occuper de
Tristan et Iseut de Joseph Bédier et de moi,
voulez-vous me faire l'amitié d'annoncer que ce
n'est pas "Louis' Artus seul, qui tire un drame
du beau livre de Joseph Bédier. Bédier et moi,
nous nous y appliquons ensemble.
Je ne saurais me passer ^du concours du suc-
cesseur de Gaston Paris au Collège de France.
Sa connaissance approfondie des mœurs du dou-
zième siècle, son style rigoureusement inspiré
des rudes chansons de gestes, si plein pourtant
, de grâce naturelle et de poésie, son érudition
me sont indispensables pour mener à bien une
entreprise qui serait sans doute au-dessus de mes
forces.
Quelle admirable Iseut nous promet Mme Sa-
rah Bernhardt ! Elle a prouvé qu'ejle tenait beau-
coup à prêter à notre héroïne les, prestiges de
son merveilleux génie dramatique. Vous pensez
si cela nous ravit!. Elle s'est engagée à ne
jouer aucune œuvre nouvelle avant la nôtre.
Nous travaillons donc dans la confiance et
dans la joie à l'adaptation scénique d'une belle
légende tour à tour tragique, bouffonne et vo-
luptueuse.
Croyez-moi, mon cher Masque de Verre, très
cordialement à vous.
.-. Louis ARTUS.
L
e propriétaire d'une' des plus impor-
tantes maisons de modes de Paris
vient de s'entendre avec la direction des
Grandes Auditions Lyriques du Jardin des
Tuileries, pour offrir à son personnel des
entrées aux concerts du soir. N'est-ce pas
la meilleure façon et la plus agréable de
récompenser des ouvrières et de se les
attacher par l'amabilité? N'est-ce pas aussi
un hommage rendu au caractère artistique et
moralisateur des auditions lyriques des Tui-
leries.
D
Regner, 4, rue des Capucines, paye cher
bijoux, diamants, perles, automobiles,
reconnaissances du Mont-de-Piété, 100 %,
les dégage sans frais, même chez des tiers.
L
ui est parti avant-hier à 5 heures du
matin de sa coquette villa de Vau-
cresson. A midi, sur sa fidèle automobile
Zedel, il arrivait à Saint-Honoré-les-Bains
(à 300 kilomètres de Paris!) sans la moindre
anicroche.
Lui, c'est cet excellent Gémier.
Elle, elle est partie dans son coupé Re-
nault pour Chatel-Guyon. N'allez pas croire,
au moins, qu'elle ne sache pas conduire;
la grande artiste tient le volant dans la
perfection ; mieux encore, nous la vimes
déjà prendre la direction d'un canot auto-
mobile.
Elle, c'est Andrée Mégard.,
T
rrès admirée hier soir chez Paillard, la
toute jolie Yvonne D. dans sa mer-
veilleuse robe empire, où l'on reconnaissait
le goût impeccable de Linzeler, le délicat
couturier du 112, boulevard Haussmann.
M
Albert Halphen, 5, rue de Provence,
a ouvert récemment, au 241 de la
rue Saint-Honoré, près la place Vendôme,
un nouveau magasin dans lequel sa nom-
breuse clientèle trouvera, comme par le
passé, de superbes occasions en bijouterie,
orfèvrerie, meubles, bronzes et objets d'art.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain un article de
PIERRE MORTIER
1
Magistrature 1:
Littéraire
Si le mot maître n'avait été, depuis long- t
longtemps, discrédité par tous les- rats d'hô-
tel de la littérature, c'est, sans aucun doute,
aux critiques qu'il conviendrait de l'appli-
quer encore, au sens le plus littéral. ;
Il me semble, en effet, que le rôle du \,
critique doit, avant toute chose, être ana-
logue à celui du magistrat romain chargé
de dire le droit sans autre commentaire, et 1
de nous présenter, en face de toutes les
contingences de la vie quotidienne, l'étalon
primitif d'après lequel toutes les oeuvres
nouvelles doivent se mesurer.
Or, dans l'état actuel de notre pensée ,
moderne, cette mesure doit nous être four- 1
nie par les idées classiques qui formèrent
notre esprit et dont dérive encore, à l'heurt ,
actuelle, toute notre littérature. Le critique
doit donc se présenter aux grands enfants
que nous sommes sous les aspects du ma-
gister, du père de famille, du maître d'école,
chargé de rappeler perpétuellement les 1
principes sur lesquels se base inévitable-
ment et par atavisme notre production la.
tine d'aujourd'hui.
Au surplus, cette perpétuelle interven-
tion ne parait point superflue. Nos meil-
leurs littérateurs, en effet, à peu d'excep-
tions près, ne sont, en somme, que de~
élèves libérés, depuis de longues années, de
la contrainte du maître et qui, ne relevant
plus que d'eux-mêmes, s'empressent de
faire, dans la vie, l'école buissonnicre.
Si la plupart d'entre eux, et je n'en ex-
cepte point certains académiciens, S£ trou-
vaient contraints. de s'asseoir, pétulant quel-
ques heures, sur les bancs du lycée, ou me- 1
me d'ùne école communale, vous pouvez
être assuré qu'ils y feraient pietre jipjire,
et que des enfants de seize ans, voire
même de douze, leur en remontreraient f
d'une étonnante façon pour tout te qui tou- J
che aux rudiments des sciences ou de la
littérature.
Je sais bien que l'un des privilèges de <
l'âge mûr c'est de n'être plus exposé à de i
pareilles confrontations, et l'on se borne gé-
néralement à supposer aux grands hommes ;
qui président les distributions de prix ou ins-
pectent des écoles, des connaissances inti-
niment supérieurés à celles de',lalls les élè- i
ves présents. Il n'en est pas moins vrai que,
dans la plupart des cas, leur infériorité réelle
est manifeste.
Aussi bien peut-on penser qu'il n'est point
inutile de créer pour eux un cours supérieur
et discret pmt-eesài-par -des- kotrmr r ;iri ïl;;
quittèrent jamais l'école, et qui peuvent,
avec tact, les avertir discrètement de leurs
erreurs le jour où ils en commettent. Ces
magistrats d'un ordre élevé sont nos criti-
ques,, et c'est pour cela que les meilleurs
d'entre eux se recruteront toujours parmi le5
maîtres d'école, c'est-à-dire parmi les trvdits.
qui restèrent toujours en contact avec l'en
seignement des Lettres. Cette nécessité, aue
tous comprennent d'instinct, a été démon-
trée une fois de plus par les réponses qui
nous sont parvenues au sujet de la nomina-
tion d'un « Prince de la Critique », et le suc
cès de M. Emile Faguet en pareille circons-
tance n'est point lait pour nous étonner..
Après le professeur devaient, immanqua-
blement venir nos littérateurs qui restèrent
le mieux en contact avec les études classi-
ques et la langue latine. L'événement n'a
point manqué, on le sait, de confirmer ces
prévisions.
1 G. DE PAWLOWSKI.
COMÉDIE-FRANÇAISE
L9Écran brisé,
Pièce en un acte,
de M. Henry 'Bordeaux^
Le Misanthrope,
Pour les débuts
de Mlle Cerny.\
La belle Sainara,
Pièce en un acte,
1 de M. E. d'HerVilly.\
Paul BOll'r. et Bort, PM4
R. BOYER LIFRAUD TRUFFIER BOVY
LA BELLE SAINARA
C'était un fort ingénieux sujet de nou-
velle, se prêtant à des développements de
pénétrante psychologie, et qui semblait de-
voir aisément se transformer en une action
dramatique vigoureuse et poignante. Il est
donc très naturel' que l'auteur se soit laissé
prendre à la tentation. Pour ses débuts au
théâtre, aucune leçon ne pouvait lui être
plus utile que cette leçon de choses, lui en-
seignant à plein et du premier coup com-
bien sont dissemblables la patiente analyse
du livre et la brutale synthèse de la rampe.
Dans un tiroir de secrétaire sont des let-
tres d'amour adressées Mathilde Monre-
vel, morte par accident. Son mari va venir
tout à l'heure et les trouver. Il adorait sa
femme et la croyait toute à lui. Marthe
Chenevray, sœur de Mathilde, veut sauver
la mémoire, de là morte, et garder pure
cette mémoire pour la petite Juliette, fille
de Mathilde et sa pupille à elle. Elle sa-
crifie son propre honneur devant Monrevel,
à qui elle s'avoue coupable, et de qui elle
réclame les lettres compromettantes, soi-
disant confiées par elle à Mathilde comme
un dépôt sacré. Ensemble, elle et Monre-
vel. ils brûlent les lettres.Puis. sur un scru-
pule du mari, qui ne veut plus laisser Ju-
liette en garde à cette adultère, Marthe set
trahit à moitié, le mari soupçonne, elle es-
saie de se défendre, ce qui est une façon
de défendre Mathilde; et enfin tout ter-
mine par un pardon probable, qu'on espère,
après une crise de sanglots où le mari sem-
ble reconnaître qu'il a eu les premiers torts
inconscients dans ce malentendu cOJ,,;,¡gal.
Et tout de suite, par cet exposé des faits,
embrouillés d'allure dans ce raccourci, mëis
fort nets à la mise en œuvre, on voit quel
écrin peut s'ouvrir là, de sentiments eu*
rieux, complexes, tragiques. Mais on w.i*
aussi que le curieux et le complexe de ces
sentiments risquent de rester un peu obs-
curs si l'on ne peut les expliquer as:-*7 ;.tn-
guersent comme dans le livre, tandis ci e
d'autre part et en même temps leur trag!-
que risque de prendre à la scène un reiiel
de mélodrame.
Et il faut louer M. Henry Bordeaux dv
voir fort bien évité ces deux écueiîs ofte. rs
à son premier voyage dramatique. Les ^*1-
timents de ses héros restent clairs, et ieura
actions restent simples.
En revanche, il faut imcartialement lui
1
Mardi 23 Juin 1908. !
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Enseignes
et Titres
Les Parisiens et autres gens de villes
qui, depuis des semaines, errent sur les
côtes flamandes, normandes, bretonnes,
vendéennes ou du Midi, en quête de
Villas à louer ; les groupes errants que
Ton voit s'arrêter devant les grilles, les
chercheurs d'édens au mois et d'oasis
à la saison, tous ces affamés de bonheur
agreste ont eu l'occasion de faire de dou-
loureuses expériences sur l'exagération
mensongère des indicateurs et des écri-
teaux.
Ils savent que, dans l'annonce d'une
superbe maison ou d'un joli cottage, il
ne faut pas s'abuser sur les sens des
mots « joli » et « superbe ». Mainte « vil-
là des Hortensias» n'a tout juste, dans
un coin de poudreuse verdure, que deux
ou trois fleurs justificatrices de son ti-
tre. Mais « le cœur des citadins » est tou-
jours prêt à s'exalter pour des noms de
!fleurs, comme à des musiques guerriè-
res. Et il suffit de consulter, au passage,
les plaques des petites résidences d'été
pour se rendre compte du besoin de poé- --
sie qui orne l'âme des gens, et l'ornera
toujours.
Ce qu'il y a d'admirable, c'est que les
, propriétaires des nombreux « Mon Rê-
ve » qui bordent les routes des stations
balnéaires, c'est que les parrains de ces
sèches petite? bâtisses n'ont pas voulu
simplement en faire accroire aux locatai-
res possibles, et que cette villa sans om-
bre, entourée d'une petite cour d'arbus-
tes, répond parfaitement à leur propre
idéal. Et c'est avec une parfaite bonne
foi qu'en rédigeant leur annonce, ils
n'ont pas craint d'écrire: Elégant et
charmant cottage.
Un matin, en rentrant chez moi, au
petit jour, je goûtais avec délices l'air
irais du matin. Il n'y a que les gens
qui se couchent tard qui peuvent appré-
cier le charme de l'aurore. CÊUX qui se
lèvent tôt sont encore endormis et bouf-
fis. Ils n'ont pas l'esprit dégagé et cette
perspective agréable d'aller se coucher.
Et puis, ils ne lisent pas les enseignes.
On ne lit bien les enseignes que lors-
que les boutiques sont fermées. Quand
îe magasin dort, ainsi que totrte la mal
son,N quand la rue est déserte et silen-
cieuse, les vieilles enseignes chevrotent
toujours, et un peu plus haut. ce qu'elles
ont à dire. Je n'avais jamais remarqué
que ce marchand de vins, devant lequel
je passe tous les jours, s'intitulait: «Au
bouquet de lilas ».
■ Je pense qu'il y a quarante ans,
quand ce titre a été choisi, il, a été dis-
cuté par toute la famille, puis" que l'on
a fait venir un peintre, à qui l'on a
dit : « Vous allez me peindre une ensei-
gne, avec ces mots: Au bouquet de li-
las.
- Quand cette enseigne a été placée, on
est venu la regarder. Des voisins se sont
approchés et ont donné leur avis, géné-
ralement favorable.
Et le patron, encaissant leur suffrage,
a dit à sa famille : « Untel est venu voir
l'enseigne. Il la trouve très bien. »
Comœdia citait, l'autre jour, des en-
seignes très plaisantes. J'en ai rencontré
souvent d'inexplicables.
Par quelle outrecuidance étonnante
cette petite laiterie, de deux mètres de
façade, s'intitule-t-elle : Laiterie continen-
tale?
A Ostende, il y avait, jadis, un su-
perbe magasin de chaussures qui doit
exister encore. On y voyait, à la devan-
ture, des chaussures d'un luxe inouïe,
en cuir de Russie vert, avec des orne-
ments d'or et des boucles en vrais bril-
lants. L'enseigne portait ces mots : Au
Pauvre Diable.
Rien n'est si difficile que la recherche
d'un titre. J'ai fait bien souvent des piè-
ces dont le titre n'est venu qu'après. Les
meilleurs titres que j'ai trouvés, c'est
pour les pièces qui n'ont jamais été fai-
tes.
Mon bagage dramaitque, déjà considé-
rable, s'accrut de trois pièces jamais
écrites : Le Second dans Rome, Les
Deux Cloches, Les Vertus à la Mode.
On les a annoncées plusieurs fois. Et
c'est de celles-là que je parle, quand on
me demande ce que j'ai sur le chan-
tier.
Un auteur devrait toujours choisir un
titre à sa pièce avant de la porter au di-
recteur. Il s'éviterait ainsi de pénibles
recherches, au moment où le directeur
lui dit: « Eh bien, nous passons dans
huit jours, et il me faut votre titre pour
combiner une affiche ».
On est agité, mal disposé. L'approche
de la première vous a enlevé toute con-
fiance. Les interprètes répètent sans
conviction. A quoi bon chercher un titre
pour cette pièce mort-née?. On cher-
che tout de même. On trouve quelque
chose qui vous emballe. Un parent par-
tial vous déclare que c'est merveilleux.
On apporte le titre au directeur.
- Et c'est pour ça que vous avez
réfléchi toute la nuit?
Le directeur appelle un de ses pen-
sionnaires.
— Nous avons un titre pour la pièce.
Vous allez me dire ce que vous en pen-
sez.
Et il prononce le titre d'une voix
molle.
L'artiste regarde l'auteur, puis le di-
^cteur. Puis il fait la moue
B. CERNY TRUFFIER R. DU MINIL GRAÎÎDVAL B. CERNY DEHELLY MAYER GÊNIAT
---..- L .-.~--.------.-----..--.- .- .—-----— -, ', - ., -.. ,---- -. ■ •• ■ ~- - - - T®Nuur -13WB1" ,
Paul'Boirer et Bert, phot. LE MISANTHROPE N L'ECRAN BRISE
On cherche autre chose que l'on sou-
met à un autre artiste, qui a la spécia-
lité de ne se tromper jamais sur les ti-
tres. Or il déclare que les titres que
vous lui soumettez sont des titres de
fours..
Cet artiste a un sens mystérieux de ce
-qui doit réussir. Il raconte lui-même, à
ce sujet des histoires édifiantes. A Deau-
ville, il prend un nom de cheval sur le
programme, et, sans s'y- connaître, trou-
ve le gagnant. C'est incompréhensible,
mais c'est comme ça.
On découvre le lendemain un autre
titre. Pas mauvais, dit le directeur, mais
trop long pour l'affiche. Vous auriez des
lettres grêles, qui ne se verraient pas.
« Après vous, s'il en reste », est un
titre de revue. « Le mécano et la dan-
seuse ». ça n'est jamais qu'une pièce
en un acte.
— Le titre ne signifie rien, dit le théo-
ricien de la maison. Le public ne sait
pas le titre des pièces. Il va voir la pièce
de la Renaissance ou la pièce des Varié-
tés.
— Pourtant? Si le titre est plaisant,
engageant?
— Un bon titre n'a jamais sauvé une
mauvaise pièce.
C'est entendu. Mais un bon titre ne
fait pas de mal à une bonne pièce. Et,
comme ce jour-là on est persuadé qu'on
fait un nièce admirable, on rentre chez
soi, on réfléchit, mais on réfléchit sé-
rieusement; le cerveau travaille, et ne
fait: pas du sur place. Et l'on finit par
trouver un titre qui plaît à tout le théâ-
tre. On fait partir immédiatement la
note aux journaux. La pièce est annon-
cée le lendemain avec son nom, son éti-
quette éternelle que répéteront nos pe-
tits-neveux. Le surlendmain paraissent
des lettres de revendication: d'un ro-
mancier dont le roman a été imprimé en
feuilletons il y a douze ans; d'un auteur
dramatique qui a remis un manuscrit au
directeur de tel théâtre.
— Excellent, dit le directeur. Gardez
votre titre. Ne le changez qu'à la der-
nière extrémité. Attisez la polémique.
Excellent conseil. Je prends désormais
par principe, sauf à le changer après,
le titre de pièces déjà existantes, avec
l'espérance, jamais déçue, que les inté-
ressés le revendiqueront.
Tristan BERNARD.
Échos
L
'ouvreuse-nursery.
Que faire de son bébé, lorsque, sans
bonne ni nourrice, on veut absolument as-
sister au spectacle? Rester à la. maison.
Evidernnient i * A Paris, mais pas en Amé-
rique, car c'est de New-York, encore une
fois, que nous arrive la lumière.
Un directeur intelligent vient d'adjoindre
au vestiaire une petite nursery très bien
organisée avec tout ce qu'il faut pour en-
dormir, biberonner ou calmer le bambin.
La maman le dépose entre les mains de
l'ouvreuse. à côté de son manteau. Elle
reçoit un double numéro,, le 22 par exem-
ple, et, sans souci, elle peut jouir du spec-
tacle.
A la sortie, elle réclame le double 22, on
lui place le bambin endormi dans le bras
droit, le manteau sous le bras gauche, et
chacun se sépare content de l'innovation.
On dit que le Grand-Théâtre de Finlande
a loué, dans l'Auberoff-Strand, tout un rez-
de-chaussée destinée à l'essai de cette
transatlantique innovation.
Helsingfors, hélas! n'est pas encore Pa-
ris !
p
i rojets.
- Il se pourrait que le théâtre de l'A-
thenee inscrivit a son programme de la sai-
son prochaine, L'Allumeuse, de notre excel-
lent confrère Camille Audigier.
On se souvient que cette comédie en
trois actes, qui parut ici même en feuille-
ton, met fort adroitement en scène le
monde si curieux des théâtres : acteurs, au-
teurs, directeurs et critiques.
L'action se passe à l'Odéon, mais ce
n'est là qu'une simple indication de mise
en scène.
M. Deval, qui lut L'Allumeuse dans Co-
mœdia, sut en découvrir les brillantes qua-
lités, et déclara à l'auteur qu'il était tout
disposé « à en causer avec lui ».
Nos lecteurs seront d'avis que le très
averti directeur de. l'Athénée ne saurait
faire un meilleur choix, car L'Allumeuse
est une pièce très littéraire, très « théâ-
tre », dont le succès dans nos colonnes doit
faire préjuger celui, plus complet encore,
qui l'attend sur la scène. ,
Et, en toute sincérité, Comœdia slestime
heureux què, grâce à lui, un talent qui n'a
pas donné que des promesses, pût obtenir
de nouveau la consécration de la rampe.
p
ourquoi les vents avaient cessé.
On a remarqué (et on s'en est même
inquiété) que les concours publics du Con-
servatoire, qui chaque année se suivaien't,
subissent cette fois une interruption. C'est
ainsi qu'il y a un intervalle de cinq jours
entre le concours d'opéra (11 juillet) et ce-
lui des instruments à vent (16 et 17 juillet).
La vérité est qu'il faut rendre la salle
de l'Opéra-Comique pour les préparatifs de
la représentation gratuite du 14 juillet. Il
faut notamment supprimer l'estrade qui re-
couvre l'orchestre des musiciens pendant
les concours.
Et voilà pourquoi, cette année, les vents
suivent de si loin les autres bruits du Con-
servatoire.
M
lie Stella, de la Cigale, l'héroïne du
drame que nous avons raconté hier,
nous paraît posséder une jolie dose de
sang-froid. D'aucunes, après une pareille
émotion, s'enseveliraient dans la douleur et
rechercheraient la solitude pour pleurer à
leur aise: Mlle Stella a l'âme mieux trempée
et elle a tenu à le prouver en allant, le soir
même, allègrement figurer dans la Revue
de de Fiers et Héros.
N'allez pas en déduire que Mlle Stella
est réfractaire à tout bon sentiment; bien
au contraire, elle a des trésors d'affection
à dépenser, et les gracieuses souris blan-
ches, dont l'élevage est sa constante préoc-
cupatio'n, sont de très heureuses petites
bêtes.
0
ccupe-toi de. mon chien.
Georges Feydeau est, on le sait, un
délicieux humoriste, tout dans la vie sem-
ble fait pour que sa verve s'exerce.
Et cette fois c'est la vie qui s'est amu-
sée de lui, Feydeâu vit l'autre jour dans
une boutique connue un amour de petit
tout, il entre et s'enquiert du prix: 1,500
francs lui est-il répondu.
L'heureux auteur sort de sa poche quinze
beajjx billets de cent francs, et radieux em-
porte le joli animal.
Le lendemain, un malencontreux auto-
taxi passe sur le pauvre quadrupède et lui
casse une patte.
Feydeau, toujours gracieux, vient de lui
en faire poser une en bois, car l'amputation
fut jugée indispensable..
Et depuis lors, ce chien de quinze cents
francs promène mélancoliquement une
jambe en pitchpin, pareil en cela aux
glorieuses victimes du devoir qui, clopin
dopant, font le tour du jardin des Inva-
lides; v
A
utour de Tristan.
Nous recevons de M. Louis Artus
l'aimable lettre suivante, que nous nous fai-
sons un plaisir d'insérer:
Mon cher Masque de Verre,
Puisque vous avez bien voulu vous occuper de
Tristan et Iseut de Joseph Bédier et de moi,
voulez-vous me faire l'amitié d'annoncer que ce
n'est pas "Louis' Artus seul, qui tire un drame
du beau livre de Joseph Bédier. Bédier et moi,
nous nous y appliquons ensemble.
Je ne saurais me passer ^du concours du suc-
cesseur de Gaston Paris au Collège de France.
Sa connaissance approfondie des mœurs du dou-
zième siècle, son style rigoureusement inspiré
des rudes chansons de gestes, si plein pourtant
, de grâce naturelle et de poésie, son érudition
me sont indispensables pour mener à bien une
entreprise qui serait sans doute au-dessus de mes
forces.
Quelle admirable Iseut nous promet Mme Sa-
rah Bernhardt ! Elle a prouvé qu'ejle tenait beau-
coup à prêter à notre héroïne les, prestiges de
son merveilleux génie dramatique. Vous pensez
si cela nous ravit!. Elle s'est engagée à ne
jouer aucune œuvre nouvelle avant la nôtre.
Nous travaillons donc dans la confiance et
dans la joie à l'adaptation scénique d'une belle
légende tour à tour tragique, bouffonne et vo-
luptueuse.
Croyez-moi, mon cher Masque de Verre, très
cordialement à vous.
.-. Louis ARTUS.
L
e propriétaire d'une' des plus impor-
tantes maisons de modes de Paris
vient de s'entendre avec la direction des
Grandes Auditions Lyriques du Jardin des
Tuileries, pour offrir à son personnel des
entrées aux concerts du soir. N'est-ce pas
la meilleure façon et la plus agréable de
récompenser des ouvrières et de se les
attacher par l'amabilité? N'est-ce pas aussi
un hommage rendu au caractère artistique et
moralisateur des auditions lyriques des Tui-
leries.
D
Regner, 4, rue des Capucines, paye cher
bijoux, diamants, perles, automobiles,
reconnaissances du Mont-de-Piété, 100 %,
les dégage sans frais, même chez des tiers.
L
ui est parti avant-hier à 5 heures du
matin de sa coquette villa de Vau-
cresson. A midi, sur sa fidèle automobile
Zedel, il arrivait à Saint-Honoré-les-Bains
(à 300 kilomètres de Paris!) sans la moindre
anicroche.
Lui, c'est cet excellent Gémier.
Elle, elle est partie dans son coupé Re-
nault pour Chatel-Guyon. N'allez pas croire,
au moins, qu'elle ne sache pas conduire;
la grande artiste tient le volant dans la
perfection ; mieux encore, nous la vimes
déjà prendre la direction d'un canot auto-
mobile.
Elle, c'est Andrée Mégard.,
T
rrès admirée hier soir chez Paillard, la
toute jolie Yvonne D. dans sa mer-
veilleuse robe empire, où l'on reconnaissait
le goût impeccable de Linzeler, le délicat
couturier du 112, boulevard Haussmann.
M
Albert Halphen, 5, rue de Provence,
a ouvert récemment, au 241 de la
rue Saint-Honoré, près la place Vendôme,
un nouveau magasin dans lequel sa nom-
breuse clientèle trouvera, comme par le
passé, de superbes occasions en bijouterie,
orfèvrerie, meubles, bronzes et objets d'art.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain un article de
PIERRE MORTIER
1
Magistrature 1:
Littéraire
Si le mot maître n'avait été, depuis long- t
longtemps, discrédité par tous les- rats d'hô-
tel de la littérature, c'est, sans aucun doute,
aux critiques qu'il conviendrait de l'appli-
quer encore, au sens le plus littéral. ;
Il me semble, en effet, que le rôle du \,
critique doit, avant toute chose, être ana-
logue à celui du magistrat romain chargé
de dire le droit sans autre commentaire, et 1
de nous présenter, en face de toutes les
contingences de la vie quotidienne, l'étalon
primitif d'après lequel toutes les oeuvres
nouvelles doivent se mesurer.
Or, dans l'état actuel de notre pensée ,
moderne, cette mesure doit nous être four- 1
nie par les idées classiques qui formèrent
notre esprit et dont dérive encore, à l'heurt ,
actuelle, toute notre littérature. Le critique
doit donc se présenter aux grands enfants
que nous sommes sous les aspects du ma-
gister, du père de famille, du maître d'école,
chargé de rappeler perpétuellement les 1
principes sur lesquels se base inévitable-
ment et par atavisme notre production la.
tine d'aujourd'hui.
Au surplus, cette perpétuelle interven-
tion ne parait point superflue. Nos meil-
leurs littérateurs, en effet, à peu d'excep-
tions près, ne sont, en somme, que de~
élèves libérés, depuis de longues années, de
la contrainte du maître et qui, ne relevant
plus que d'eux-mêmes, s'empressent de
faire, dans la vie, l'école buissonnicre.
Si la plupart d'entre eux, et je n'en ex-
cepte point certains académiciens, S£ trou-
vaient contraints. de s'asseoir, pétulant quel-
ques heures, sur les bancs du lycée, ou me- 1
me d'ùne école communale, vous pouvez
être assuré qu'ils y feraient pietre jipjire,
et que des enfants de seize ans, voire
même de douze, leur en remontreraient f
d'une étonnante façon pour tout te qui tou- J
che aux rudiments des sciences ou de la
littérature.
Je sais bien que l'un des privilèges de <
l'âge mûr c'est de n'être plus exposé à de i
pareilles confrontations, et l'on se borne gé-
néralement à supposer aux grands hommes ;
qui président les distributions de prix ou ins-
pectent des écoles, des connaissances inti-
niment supérieurés à celles de',lalls les élè- i
ves présents. Il n'en est pas moins vrai que,
dans la plupart des cas, leur infériorité réelle
est manifeste.
Aussi bien peut-on penser qu'il n'est point
inutile de créer pour eux un cours supérieur
et discret pmt-eesài-par -des- kotrmr r ;iri ïl;;
quittèrent jamais l'école, et qui peuvent,
avec tact, les avertir discrètement de leurs
erreurs le jour où ils en commettent. Ces
magistrats d'un ordre élevé sont nos criti-
ques,, et c'est pour cela que les meilleurs
d'entre eux se recruteront toujours parmi le5
maîtres d'école, c'est-à-dire parmi les trvdits.
qui restèrent toujours en contact avec l'en
seignement des Lettres. Cette nécessité, aue
tous comprennent d'instinct, a été démon-
trée une fois de plus par les réponses qui
nous sont parvenues au sujet de la nomina-
tion d'un « Prince de la Critique », et le suc
cès de M. Emile Faguet en pareille circons-
tance n'est point lait pour nous étonner..
Après le professeur devaient, immanqua-
blement venir nos littérateurs qui restèrent
le mieux en contact avec les études classi-
ques et la langue latine. L'événement n'a
point manqué, on le sait, de confirmer ces
prévisions.
1 G. DE PAWLOWSKI.
COMÉDIE-FRANÇAISE
L9Écran brisé,
Pièce en un acte,
de M. Henry 'Bordeaux^
Le Misanthrope,
Pour les débuts
de Mlle Cerny.\
La belle Sainara,
Pièce en un acte,
1 de M. E. d'HerVilly.\
Paul BOll'r. et Bort, PM4
R. BOYER LIFRAUD TRUFFIER BOVY
LA BELLE SAINARA
C'était un fort ingénieux sujet de nou-
velle, se prêtant à des développements de
pénétrante psychologie, et qui semblait de-
voir aisément se transformer en une action
dramatique vigoureuse et poignante. Il est
donc très naturel' que l'auteur se soit laissé
prendre à la tentation. Pour ses débuts au
théâtre, aucune leçon ne pouvait lui être
plus utile que cette leçon de choses, lui en-
seignant à plein et du premier coup com-
bien sont dissemblables la patiente analyse
du livre et la brutale synthèse de la rampe.
Dans un tiroir de secrétaire sont des let-
tres d'amour adressées Mathilde Monre-
vel, morte par accident. Son mari va venir
tout à l'heure et les trouver. Il adorait sa
femme et la croyait toute à lui. Marthe
Chenevray, sœur de Mathilde, veut sauver
la mémoire, de là morte, et garder pure
cette mémoire pour la petite Juliette, fille
de Mathilde et sa pupille à elle. Elle sa-
crifie son propre honneur devant Monrevel,
à qui elle s'avoue coupable, et de qui elle
réclame les lettres compromettantes, soi-
disant confiées par elle à Mathilde comme
un dépôt sacré. Ensemble, elle et Monre-
vel. ils brûlent les lettres.Puis. sur un scru-
pule du mari, qui ne veut plus laisser Ju-
liette en garde à cette adultère, Marthe set
trahit à moitié, le mari soupçonne, elle es-
saie de se défendre, ce qui est une façon
de défendre Mathilde; et enfin tout ter-
mine par un pardon probable, qu'on espère,
après une crise de sanglots où le mari sem-
ble reconnaître qu'il a eu les premiers torts
inconscients dans ce malentendu cOJ,,;,¡gal.
Et tout de suite, par cet exposé des faits,
embrouillés d'allure dans ce raccourci, mëis
fort nets à la mise en œuvre, on voit quel
écrin peut s'ouvrir là, de sentiments eu*
rieux, complexes, tragiques. Mais on w.i*
aussi que le curieux et le complexe de ces
sentiments risquent de rester un peu obs-
curs si l'on ne peut les expliquer as:-*7 ;.tn-
guersent comme dans le livre, tandis ci e
d'autre part et en même temps leur trag!-
que risque de prendre à la scène un reiiel
de mélodrame.
Et il faut louer M. Henry Bordeaux dv
voir fort bien évité ces deux écueiîs ofte. rs
à son premier voyage dramatique. Les ^*1-
timents de ses héros restent clairs, et ieura
actions restent simples.
En revanche, il faut imcartialement lui
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