Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-05-25
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 25 mai 1908 25 mai 1908
Description : 1908/05/25 (A2,N238). 1908/05/25 (A2,N238).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646622g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
I - --1
t*Année.«N°238(Quotidien^* LeNutnèro : 5 centimes
Ëundi 25 Ma! 1906
14
41-4
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKl
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
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Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
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27, Bouleuard Poissonnière, PAEiti
or TÉLÉPHONE : 288-07
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UN AN 6 MSI3
Paris et Départements 24 fr. l':: fr,
Étranger. 40 » ii'J o
ZAMAR
Ce n'était pas un gaillard ordinaire
tue Zamar!
Simple machino, à l'Odéon, — mais à
l'Odéon des temps héroïques, où l'on re-
prenait Henriette Maréchal, des Gon-
court, alors qu'Albert Lambert fils, Se-
vero Torelli déjà, n'avait pas encore fait
son service militaire, — Zamar traînait
les cœurs après lui, de par les avantages
de sa prestance, le feu noir de ses yeux,
et le sac de noix de ses biceps redon-
dants.
Zamar, avant d'équiper des décors et'
de remuer des châssis, avait eu une jeu-
nesse plutôt aventureuse. Enfant de la
place Maub, entraîné aux achats à la
foire d'empoigne, et fort expert en, grivè-
lerie, monte-en-l'air souvent, souteneur
toujours, il avait maintes fois risqué s'as-
seoir sur le banc de bois de la correc-
tionnelle. Mais, tout à coup, la grâce
l'avait touché et il était devenu homme
de théâtre !
Depuis, plus un reproche à lui adres-
ser. Le métier lui plaisait; le milieu le
« bottait » et il eût pu, — s'il disait été
pratiquant de religion, — dévoiler à son
confesseur une âme au moins aussi blan-
che que celle de beaucoup de bourgeois
respectables et vénérés.
Mais la vertu ne lui avait pas enlevé le
charme; ce qui arrive quelquefois. Et il
était demeuré un admirable mâle, aux
regards qui promettent et aux muscles
qui tiennent. C'est ce dont la sensible
Tigride Lenoir s'aperçut, un bel après-
midi, au cours d'une répétition.
Tigride Lenoir avait été une des trois
ou quatre « grandes cocottes » de la fin
du second Empire. Elle avait croqué des
sommes folles et en avait conservé de
raisonnables. Puis, elle aussi, la grâce du
théâtre l'avait touchée et elle s'était muée
en comédienne. Point maladroite d'ail-
leurs, après quelques leçons. Au reste,
afin de ne pas perdre sa main, elle
n'avait pas dételé tout à fait les chevaux
de sa Volupté, et pour l'instant, quoique
trop grasse et quelque peu molle, elle
conduisait encore, guides hautes, un ban-
quier bonapartiste, un député radical,
orateur redouté, qui depuis. mais alors
il était dans l'opposition; et un vieux
prince d'une des familles ayant régné en
Inn Et~uu Ic:.o ,m.,i .;03 plai-
sants la surnommaient : Tigride Lenoir
ou « l'Union des partis ».
Tigride, à qui jamais personne n'avait
refusé quelque chose, ne se refusait rien
non plus, elle-même. L'envie lui étant
venue de Zamar, cela ne traîna pas.
Le soir, — ce soir-là,— la représen-
tation terminée, à cette heure du départ
où étoiles et petit personnel gagnent,
égalitairement, la même porte de sortie,
l'actrice posa un doigt, — ce doigt qui
menait par le bout du nez, et pas à l'œil,
un gros financier, un parlementaire in-
fluent et une Altesse Royale, — sur
l'épaule du machiniste. Et le geste fut si
clair et le sourire dont il s'accompagnait
si dénué d'ambiguïté, que Zamar, enlevé
comme une simple Sabine, se trouva,
sans avoir eu le temps de réfléchir à ce
qui lui arrivait, confortablement assis
dans le coupé de Tigride, à côté de Tigri-
de en personne, qui sentait bon et se
pressait fortement contre lui.
Deux heures plus tard environ, dans
Je somptueux hôtel proche du Parc Mon-
ceau, les lumières de la chambre à cou-
cher brillaient encore. Zamar avait fait
vaillamment son devoir, ainsi qu'en té-
moignait le désordre éloquent du vaste lit
carré. Et Tigride, ayant mis pied à terre.
se réfugia dans son cabinet de toilette,
afin de se rafraîchir les tempes et d'apai-
ser les battements de son cœur satisfait.
Et, ce faisant, elle se disait, courtisane
accoutumée aux extases reconnaissantes
de ses élus : « Ce garçon doit être fou de
joie! Il ne doit pas en revenir! Ce qu'il
va être intimidé tout à l'heure! »
Il s'en fallait de beaucoup ! Sitôt seul,
Zamar s'était levé, avait été chercher,
dans les poches de sa cotte jetée négli-
gemment sur un pouf, une vieille pipe en
terre sombrement culottée; tranquille, il
l'avait bourrée, puis il s'était recouché et
allait craquer une allumette sur son on-
gle, quand Tigride réapparut. Alors. le
derrière dans la soie et la dentelle, la face
épanouie et l'esprit à l'aise, il cria, d'une
voix triomphante :
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar !
L'allumette flamba, le tabac grésilla, et
trois grosses bouffées de fumée d'un ca-
poral très ordinaire déroulèrent leurs
volutes épaisses sous le baldaquin scan-
dalisé.
Quand à Tigride, elle était restée à la
porte, atterrée, médusée, stupide! Ah
bien ! il ne s'épatait pas, celui-là !
Zamar, en effet, ne s'épatait guère. Il
ne s'étonna pas davantage quand Tigri-
de, reprenant ses sens et l'usage de la
parole, le pria de s'en' aller, «' « tout de
suite, tout de suite! » et il s'en fut, sitôt
rhabillé, sans dédain, mais sans enthou-
siasme, — poliment.
Hélas! Zamar n'avait pas été initié
aux délicatesses des Cours. De retour au
théâtre, il ne sut pas tenir sa langue ; dès
le lendemain, le récit de l'aventure cou-
rut de bouches à oreilles, sur le plateau
et dans les loges, et du cintre aux des-
sous : le supplice de Tigride Lenoir com-
mença.
Dès lors, elle ne put plus traverser les
coulisses sans entendre partout, à tout
moment, ne s'adressant pas à elle, mais
chuchotée à mi-voix, ou même dite à
voix haute, la fameuse phrase :
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar!!!
Elle passait devant un peintre en train
de camoufler un panneau:
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar!!! articulait
le décorateur en agitant son pinceau, les
yeux obstinément fixés sur son ouvrage.
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar!!! susurrait
l'accessoiriste croisé dans un couloir,
une cheminée sous le bras.
Pauvre Tigride Lenoir ! Son fin profil
bourbonien, — dans sa maturité, légère-
ment blette, elle ressembla étrangement
à Louis XVIII jeune, — se crispait de
fureur toutes les deux minutes. Et rien
à dire! Elle fut sur le point d'abandon-
ner la scène.
Heureusement pour l'équilibre de ses
traits, quelque temps après, le Théâtre-
Français changeait de maître. Emile Per-
rin prenait sa retraite; et l'un des pre-
miers actes de son successeur était d'en-
gager Tigride Lenoir. Tigride ne se fit
point. prier, fière, sans doute, d'entrer
dans la Grande Maison, — elle n'y dé-
buta jamais d'ailleurs, M. Claretie étant
déjà M. Claretie ! — mais heureuse, sur-
tout, d'échapper enfin aux trop fréquents
rappels de la pipe grillée, une nuit, par
Zamar !
Louis MARSOLLEAU.
Nous publierons demain un article de :
TRISTAN BERNARD
Le Théâtre
pour le Théâtre
J'exposais hier, ici même, la triste situa-
tion du public à qui l'on offre ou des
pièces idiotes soi-disant mises à sa portée.
ou des pièces incompréhensibles destinées
à lui donner de hautes leçons d'art et de
moralité, mais à qui l'on ne fournit jamais
de pièces de théâtre sans plus, telles qu'on
les concevait encore très clairement il y a
de cela quelques années seulement.
Le nouveau spectacle de l'Odéon peut
fournir, je crois, un facile exemple de ce
contre sens théâtral.
C'est une chose absolument entendue:
il est ridicule, il est stupide de donner de
.r_:u_- ytiiaou—ao»j— futaimiu 1 ",
de plaire au public en se mettant à sa por-
tée. Il est évident, en effet, que l'on va au
théâtre pour acquérir quelque chose, pour
augmenter son patrimoine intellectuel et que
l'on n'y va point pour retrouver l'insuffi-
sance ou la bêtise dont on est enveloppé
chaque jour. Mais faut-il en conclure que le
théâtre doit être une chaire de professeur
ou de prédicateur, une simple salle de con-
férence où l'on développe une leçon de mo-
rale ou d'histoire naturelle? cela je ne le
crois pas.
Vouloir faire de Faction directe en ma-
tière de théâtre, vouloir atteindre sans tran-
sition le but moral que l'on se propose, cela
n'est en somme, toutes proportions gardées,
guère plus absurde que de proposer de dé-
biter les statues du Louvre en tas de cail-
loux pour l'empierrement pratique des Tui-
leries, ou que de transformer les salles du
Musée en usine électrique pour augmenter
pratiquement le bien-être des habitants de
Paris.
En matière d'art ou de littérature, l'ac-
tion est cfautant plus réelle qu'elle est in-
directe. C'est ainsi, quoi qu'on en dise, que
les études secondaires classiques, dénuées
de toute portée pratique, sont en somme les
,meilleures pour former dans la vie quoti-
dienne des hommes complets, et que, les
voyages, f aits dans un seul but d'agrément,
peuvent souvent préparer, mieux que des
études techniques, à la airection pratique
d'une usine ou d'un atelier.
Je crois donc que la critique fera toujours
fausse route en accueillant au théâtre de la
façon la plus enthousiaste des pièces de
haute tenue littéraire sans doute, mais faites
exclusivement pour le livre, et qui demeu-
rent incapables de charmer et de retenir
l'attention des spectateurs.
En réalité, il impbrte peu qu'une pièce
de théâtre n'ait aucune portée morale,
qu'elle ne combatte ni l'alcoolisme, ni l'a-
varice ni l'orgueil, ni même la gourman-
dise.
Dès l'instant que le spectateur prend plai-
sir à la voir, qu'il s'enthousiasme aux meil-
leures scènes, et s'amuse de bon cœur, vous
pouvez tenir pour 'certain que sa valeur
morale s'en trouve augmentée et que s'é-
veillent en lui de nouvelles énergies insoup-
çonnées. Il en deviendra meilleur sans que
l'on puisse dire comment et, surtout, sans
que l'on soit capable d'établir la moindre re-
lation entre, les actions utiles qu'entraînera
ce changement de tout son être et les paro-
les qui furent prononcées sur la scène.
Le théâtre qui provoque une telle trans-
formation, sans dire pourquoi, est le seul
théâtre que l'on devrait encourager, sous
peine de rebuter les spectateurs les plus
patients ou de les jeter dans un snobis-
me ignorant qui, en matière intellectuelle,
demeure la pire de toutes les impasses.
1. G. DE PAWLOWSKI.
v
Échos
il
ie primadonna qui est un homme.
Une amusante découverte vient d'ê-
re faite — un peu par hasard — en Hon-
grie. Pendant vingt-trois ans, une actrice
i$sez connue, Aranka Gyœngy, a pu jouer,
i Budapest et dans d'autres villes, des rôles
ie soubrette, puis de première chanteuse,
;ans que personne se doutât qu'elle était —
m homme. « II » ou « elle » s'appelle en
éalité Stephane Moezi et est né en 1873, à
)alassagyarmat. Dès douze ans, déguisé en
'etite fille, il débutait sur une scène de
Budapest.
Ce qui rend l'affaire plus piquante, c'est
que cette supercherie a été découverte par
un brave provincial. Il y a quelques jours,
Aranka Gyœngy se présentait devant le
maire d'une petite ville du comté de Zola,
et demandait les autorisations nécessaires
pour les représentations d'une troupe de
passage qu'elle dirigeait. Le maire remar-
qua quelque chose de « pas naturel » dans
son attitude,. la fit examiner par la sage-,
femme de l'endroit et tout se découvrit. -
Ajoutons qu'Aranka Gyœngy était célè-
bre, à Budapest, par la pudeur émue et in-
dignée avec laquelle elle repoussait les hom-
mages trop pressants de certains admira-
teurs.
L
a messe sur la scène
On joue en ce moment,, au théâtre
au Bush Temple, a Chicago, une pièce inti-
tulée Une Femme de l'Ouest, dont une scè-
ne représente la célébration de la messe.
Le décor reproduit avec la plus scrupuleuse
exactitude l'intérieur d'une église catholi-
que, avec l'autel et ses ornements, les cier-
ges, les objets du culte.
Un prêtre, revêtu des habits sacerdotaux,
célèbre l'office pendant quelques minutes,
prononçant les paroles liturgiques qu'accom-
pagne la musique rituelle.
Chose plus curieuse, l'auteur de cette
pièce est un ecclésiastique, le R. P. L.-G.
Vaughan, et il prétend qu'il n'y a tè~t~
crilège ni profanation. « La scène, dit-il, est
interrompue avant le moment de la consé-
cration de l'hostie, et c'est tout simplement
un tableau vivant qui ne doit pas scandali-
ser plus qu'une peinture à l'huile. »
c
ouleur locale.
On a beaucoup parlé, et avec de lar-
ges éloges, du décor de POlyphème.
L'auteur de l'esquisse s'est taillé pres-
que de la gloire avec la reprise de l'œuvre
d'Albert Samain.
Félicitations, congratulations allèrent à
M. Edouard Fournier, qui ne cachait pas sa
fierté de recevoir tant de louanges.
Mais un mauvais plaisant ne s'avisa-t-il
pas de dire tout le bien qu'il pensait du ri-
deau de fond.
M. Edouard Fournier remercia, mais.
avec un sourire jaune.
Hélas! le fond n'est pas de M. Edouard
Fournier; c'est tout bonnement un fond du
répertoire qui sert dans Rodogune, Trilby,
Médée, Mithridate, Andromaque, etc., etc.
Il est vrai qu'à la Comédie-Française on
voit bien des figurants porter le même cos-
tume dans Médée et, le lendemain, dans
La Fille de Roland.
Après ça?
M
ot de situation.
L'élégant et somptueux hôtel de la
Société des auteurs et compositeurs drama-
tiques possède, nous l'avons dit, un petit
jardin avec de minuscules parterres, un ar-
bre et deux bancs de pierre; au milieu de
l'unique allée de ce parc en miniature se
dresse la statue de Beaumarchais. C'est ce
qui a permis - à Charles Quinel de baptiser
le jardinet des Auteurs du nom de « Square
Beaumarchais.». Le même Quinel Charles
disait tout bas à son collaborateur Henry
Moreau, pendant l'orageuse assemblée gé-
nérale: « Ce n'est pas une raison parce que
nous habitons maintenant rue Henner, pour
faire les Henner-gumènes, soyons simple-
ment Henner-giques!. »
D
ébuts.
1 M. Henri de Régnier va remplacer, on
1 e sait, au Journal des Débats, notre éminent
confrère M. Emile Faguet..
Hier, il publiait son premier feuilleton, et
on attendait ce début non sans impatience.
Comment allait se comporter envers les au-
teurs dramatiques le poète des Médailles
d argile ? Comment allait-il • remplir; les
fonctions, nouvelles pour lui, de critique?
Or, par un hasard heureux, il s'est trouvé
que M. Henri Régnier avait justement à ju-
ger une œuvre poétique: Polyphème.
On devine comment l'excellent écrivain
s'est acquitté de cette heureuse tâche.
Il y a un dieu pour les poètes !
A PROPOS DE « CHERUBIN »
Marie-Louise Herrouet
A
t..78' - , x
vant Velléda. > -
Au moment où l'Odéon va donner la
première de l'œuvre nouvelle de Maurice
Magre, rappelons à ce propos un amusant
souvenir. - -
L'an dernier, Velléda fut jouée au théâ-
tre en plein air de Cauterets, et y obtint, si
l'on s'en réfère aux critiques d'alors, un
succès considérable.
Quand le rideau baissa sur le vers final,
le public enthousiaste réclama à grands cris
fauteur.
Notre confrère Jules Rateau, organisateur
Je la journée, chercha vainement Maurice
nagre dans tous les recoins du théâtre;
Maurice Magre restait introuvable!
On finit par le découvrir dans la monta
gne qui domine la scène ; il s'était enfui
modestement et attendait, blotti derrière un
quartier de roche, que' les spectateurs ces-
sassent de récamer sa présence pour l'ova-
tionner.
M. Jules Rateau l'appréhenda violem-
ment, le ramena au théâtre et le livra, tel
un martyr chrétien aux fougues de l'arène,
à Mlles Brille, Roch, Pouzols et Faber, gra-
cieux fauves.
Et, au centre de cette escorte charmante,
le poète dut apparaître sur le plateau, où
d'enthousiastes acclamations l'accueillirent.
L
'avez-vous vue?
Qui?
La grosse caisse de l'atelier des maîtres
décorateurs Jambon et Bailly. Elle a voulu
aller au bal des Quat'z'Arts, au bras d'un
ex-élève. de Jambon: le graveur Gaston
Trilleau, et tandis que son cavalier lui fai-
sait des infidélités avec une trompette, elle
a fui on ne sait où !
Il paraît qu'on l'a vue se hisser à bord
d'une automobile qu'elle rencontra au mi-
lieu des Champs-Elysées.
Le pauvre Gaston Trilleau s'arrache les
cheveux de désespoir; il a couru de la pré-
fecture de police à la fourrière sans pouvoir
retrouver la grosse caisse qui, jusqu'à pré-
sent, n'avait cessé d'être vénérée comme le
fétiche de l'atelier Jambon et Bailly.
OM Comme.IDt la chanson:
« A celui qui la ramènera,
le Récompense il y aura! »
A
qui peut-on s'adresser pour vendre un
d joli bijou à sa réelle valeur? Dusau-
soy, 1 expert bien connu du 4, boulevard
des Italiens, se met à la disposition des per-
sonnes soucieuses de leurs intérêts. Grand
choix d'occasions.
c
* haliapine, directeur de théâtre.
* Les journaux russes annoncent que
Chahapine songe a fonder, a Moscou, un
Opéra. Il formera sa troupe avec les meil-
leurs chanteurs de Russie et peut-être de
l'étranger, et fera appel à des peintres cé-
lèbres pour les décors. Il aurait l'intention
de rompre avec toute routine. On fait ce-
pendant remarquer que, pour le moment,
Chaliapine est encore lié par un traité à
l'Opéra de Saint-Pétersbourg. :
H
ier, aujourd'hui. et demain. *
Les temps ont marché et il est plai-
sant de retrouver le compte rendu d un ban-
quet donné jadis par feu la revue La Plume,
en l'honneur d'Octave Mirbeau, et auquel
M. Jules Claretie, présent, fut remercié en
termes pompeux d'avoir monté Les Aflai-
-res sont tf~ Affaires.
Le regretté Hécislas Golberg, entre au-
tres, s'exprimait en ces termes: « M.
Claretie qui aime le combat — il en a
donné des preuves — a- ouvert les portes
de la Comédie aux pensées hardies; tout en
continuant la tradition du Théâtre-Français,
il veut la consolider en la renouvelant, etc.))
Et M. Jules Claretie envoyait le lende-
main, au directeur de La Plume, la lettre
suivante :
Cher et aimable confrère,
Je me reproche de ne pas vous avoir dit, hier,
publiquement merci, et cependant vous m'ave2
,touché au vif, vous et M. Golberg, et'je tiens
à bien le constater.' Mais un seul nom devait
être fêté, celui de l'auteur des Affaires sont les
Affaires, - et mon « courage » n'est pas bien
grand d'avoir senti la beauté de cette oeuvre
puissante. Je n'aurais, été « courageux » - que
s'il y avait eu péril. Il n'y en avait pas. Dites-
vous bien, cher monsieur, et dites à votre colla-
borateur que vous m'avez du moins fait grand
plaisir. Imprimez-le même si vous voulez, et
croyez que je me suis senti tout rajeuni parmi
ces jeunes (maîtres d'aujourd'hui et de demain),
et que je me retrouverai avec joie, l'automne
venu, autour de cette table de La Plume, où
l'on fête la cordialité chez ceux qui luttent.
comme le! disait M. Mirbeau en son toast, et
la fraternité dans la beauté, comme vous l'avez
dit et proclamé.
* Votre tout dévoué.
Jules CLARETIE.
7 juin ipos.
Voilà ce que pensait, hier, M. Jules Cla-
retie de M. Octave Mirbeau. On sait ce
qu'il en pense aujourd'hui. Mais qu'en pen-
sera-t-il demain?.
L"
s Dîner des Théâtres, créé par Cham-
peaux, jouit d'une réputation vraiment
méritée. -
L'incomparable restaurateur a su attirer
chaque soir dans ses luxueux salons de la
place de la Bourse, le Tout-Paris artistique,
littéraire, financier et mondain.,.-
L
es pneumatiques sont en progrès, no-
tamment les antidérapants, et le der-
nier progrès chez ces derniers est le nou-
veau ferré Gaulois des Etablissements Ber-
gougnan, qui, au reste, ont été les premiers
à établir l'antidérapant tout caoutchouc. Le
nouveau Gaulois est absolument efficace
contre le dérapage,' du commencement de
son emploi jusqu'à son usure complète.
C
onnaissez-vous le secret du Dia-
mant?. Telle est la question angois-
sante que se posent plusieurs partis qui se
trouvent aux prises à ce propos depuis plu-
sieurs mois. Les chimistes, les joailliers, les
alchimistes, — il en est encore, — et le
public bon enfant. s'intéressent a ! affaire
Lemoine.
Il est cependant une autre question d in-
térêt public qui devrait arrêter aussi longue-
ment l'attention générale.
- Où s'amuse-t-on véritablement? de-
vrait-on demander à tout le monde.
* Mais la question serait trop vite résolue,
car l'unanimité des « interrogés » répon-
drait:
— Au Moulin-Rouge Palace ! ! !
NOUVELLE A LA MAIN
Struggle lor lite.
Une danseuse même de l'Opéra-Comique
déclare, chaque fois qu'on lui demande
quels sont ses moyens d'existence:
« Moi, je gagne ma vie avec mes jambes.
Ce sont mes pattes alimentaires.
Le Masque de Verre.
1 ALICE VERLET
Elle va nous dire au revoir, l'Enfant gâtée
des Parisiens, la reine de Navarre adorée
des abonnés de l'Opéra, l'inoubliable Naïa-
de, Mais qu'elle soit Gilda, Juliette, Zerline,
Marguerite, Thaïs, aussi bien que Lakmé,
Traviata, Lucie, c'est chaque fois, pour elle,
le même triomphe.
De taille moyenne, un visage d'enfant,
1 1 Reutttngtr, plot*
des yeux immenses changeant comme lae
mer; le teint idéal des filles du Nord, une
petite bouche servant d'écrin à trente-deux
perles, un nez fripon, l'air moqueur, mais'
surtout si bon et si doux ; des attaches
d'une finesse extrême. Voilà, au physique,
Alice Verlet. Presque sauvage, aimant peu
le. monde, très instruite, parlant plusieurs
langues, bonne, camarade, le cœur sur la
main, sa main ouverte à toutes les infortu-
nes, amie sûre, voilà la femme. ..,
Quant à l'artiste, il faudrait une r - i ?
plus autorisée-qûe la mienne pour i'ana.v-
ser., Mais ce que je puis dire, c 'est
l'étendue de sa voix, au timbre >?x<.vprion-,
nel, comprend trois octaves; elle pt':'; t .Van-
ter avec autant de facilité Griséluy c—e
La Reine de la Nuit, où les contr.e-/a ne sont
qu'un jeu pour elle. Ce qu'il y a de trè- re-
marquable chez. Alice Verlet.. c'est la com-
préhension merveilleuse de ses rôles: elle
peut passer du tragique au tendre et même
s'attaquer au comique, c'est toujours la mê-
me perfection; travailleuse à l'extrême, mu-
sicienne dans l'âme, malgré tous se^ dons,
elle pioche tous ..ses rôles avec conscience
et n'est jamais contente d'elle-même Le
public lui prouvera, mardi, au Trocadcro,
qu'il n'est pas de son avis.
BERTHE DE CARTIGNY.
A PROPOS DU FOYER.
"La Moabite de Déroule de
Un précédent. lUI Comme quoi une pièce reçue au Thé~l.~
Français n'y est pas toujours représentée.-De 1860
:'" à 1908. « Retrait ou procès?
Entre un jugement qui date de 1837, et
qui condamna la Comédie-Française à payer
à-Victor Hugo, 6.000 francs de dommages-
intérêts pour retards apportés aux représen-
tations d'Hernarii et de Marion de Lorme, et
le récent ju'gement qui condamne M. Clare-
tie à remettre en répétitions Le Foyer, la
pièce "dè MM. 'Octàve Mirbeau et Nàtan-
son, il y a place, pensons-nous, pour un
vouvenir qu'il convient d'exhumer de' l'his-
toire contemporaine du théâtre. -
Le fait se place en 1880. Il s'agit de la
"bce La Moabite, de son auteur,. M. Paul
Déroulède, et ae m. Perrin, lequel régnait
à cette époque à la Comédie-Française.
M. Paul Déroulède avait derrière lui, à
ce moment-là, soixante-quinze éditions des
Chants du Soldat et deux drames, Juan
1 énner et VHetman, représentés avec suc-
cès. Il venait de composer La Moabite, qu'il
porta à l'Odéon; à la fin de 1879. -
M. Perrin connut l'existence du manus-
crit qui attendait- son tour — un tour pro-
hain — au théâtre de la rive gauche.
Il fit' alors auprès de M. Déroulède des
démarches — heureux auteur! - et sur
sa promesse formelle de monter le drame
en vers La Moabite, pour la « campagne de
l'hiver qui allait commencer », M., Paul
Déroulède sê/ rendit' à l'Odéon, retira la
pièce, et, tout joyeux, la porta place du
Théâtre-Français.
L'hiver arriva, mais il n'amena pas avec
lui la répétition de La Moabite. La pièce
avait été prise le 1er mai pour passer le
1er novembre.
M. Déroulède .attendait.
Le Français resta muet.
On vit, dans les couloirs, se profiler la
haute silhouette de l'auteur qui visita sou-
vent M. Perrin. M. Déroulède qui est un
esprit distingué dont la droiture ne se 'Com-
plaît guère aux intrigues des couloirs, te-
nait, à son interlocuteur, ce simple lan-
~ac~* ,.-'
Le drame était reçu. Il devait le. joi.or.
C'était logique.
C'était tellement logique qu'un be. u •<" ,
M. Paul Déroulède retira tout simp cme.il
sa pièce.
Il aurait pu dire, avec un de ses r.:;¡" In-
nages de La Moabite, Misaël, au de.!- .!
acte, en parlant du Français:
La terre, sous le ciel, a de plus vastes ! ¡tPS.
Et puisque celle-ci n'est qu'angoisse et que joutes.
J'en sors.
L'auteur de La Moabite, en effei. s de !a' maison de Molière avec La ,';¡'(" i U'
sous le bras. Il jeta le manuscrit dans son
tiroir, puis, un jour le fit imprimer avec
cette mention:
Drame repu au Théâtre-Français ci ¡¿'.,n
représenté; ,
* *
Que-s'était-il donc passé ? Mon P ira !
Une chose toute simple et qui seml i,
de tradition parmi certains adminisîjeteurs
de la Comédie-Françaige-, qui par.-osent
se passer la consigne des atermoiement et
des réticences. Je laisse, ici, la p. c e à
M.- Paul Déroulède qui, en une trù-> r Î-
rieuse lettre-préface dans son édircr. J0
La Moabite -' très rare, aujourd'hui. —
conte ses démêlés avec le Claretie du mo-
ment :
« Raconterai-je comme quoi. il y a un
an, dit-il, M. Perrin m'avait fait quitter
l'Odéon pour la Comédie-França'ise ? Par
quelles promesses, il s'était engagé à ouvru*
la campagne de cet hiver? A quoi bon? Al.
Perrin n'a pas nié ses engagements : il a
même été à la veille de les tenir tous, pour-
quoi donc n'en a-t-il tenu aucun?
» Pourquoi oif pour qui m'a-t-il déclaré
tout à coup qu'il ajournait ma pièce à des
temps meilleurs, au mois de janvier par
exemple, ou de février, ou peut-être bien do
mars, enfin à Pâaues ou au plus tard À la
Trinité?
t*Année.«N°238(Quotidien^* LeNutnèro : 5 centimes
Ëundi 25 Ma! 1906
14
41-4
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKl
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
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UN AN 6 MSI3
Paris et Départements 24 fr. l':: fr,
Étranger. 40 » ii'J o
ZAMAR
Ce n'était pas un gaillard ordinaire
tue Zamar!
Simple machino, à l'Odéon, — mais à
l'Odéon des temps héroïques, où l'on re-
prenait Henriette Maréchal, des Gon-
court, alors qu'Albert Lambert fils, Se-
vero Torelli déjà, n'avait pas encore fait
son service militaire, — Zamar traînait
les cœurs après lui, de par les avantages
de sa prestance, le feu noir de ses yeux,
et le sac de noix de ses biceps redon-
dants.
Zamar, avant d'équiper des décors et'
de remuer des châssis, avait eu une jeu-
nesse plutôt aventureuse. Enfant de la
place Maub, entraîné aux achats à la
foire d'empoigne, et fort expert en, grivè-
lerie, monte-en-l'air souvent, souteneur
toujours, il avait maintes fois risqué s'as-
seoir sur le banc de bois de la correc-
tionnelle. Mais, tout à coup, la grâce
l'avait touché et il était devenu homme
de théâtre !
Depuis, plus un reproche à lui adres-
ser. Le métier lui plaisait; le milieu le
« bottait » et il eût pu, — s'il disait été
pratiquant de religion, — dévoiler à son
confesseur une âme au moins aussi blan-
che que celle de beaucoup de bourgeois
respectables et vénérés.
Mais la vertu ne lui avait pas enlevé le
charme; ce qui arrive quelquefois. Et il
était demeuré un admirable mâle, aux
regards qui promettent et aux muscles
qui tiennent. C'est ce dont la sensible
Tigride Lenoir s'aperçut, un bel après-
midi, au cours d'une répétition.
Tigride Lenoir avait été une des trois
ou quatre « grandes cocottes » de la fin
du second Empire. Elle avait croqué des
sommes folles et en avait conservé de
raisonnables. Puis, elle aussi, la grâce du
théâtre l'avait touchée et elle s'était muée
en comédienne. Point maladroite d'ail-
leurs, après quelques leçons. Au reste,
afin de ne pas perdre sa main, elle
n'avait pas dételé tout à fait les chevaux
de sa Volupté, et pour l'instant, quoique
trop grasse et quelque peu molle, elle
conduisait encore, guides hautes, un ban-
quier bonapartiste, un député radical,
orateur redouté, qui depuis. mais alors
il était dans l'opposition; et un vieux
prince d'une des familles ayant régné en
Inn Et~uu Ic:.o ,m.,i .;03 plai-
sants la surnommaient : Tigride Lenoir
ou « l'Union des partis ».
Tigride, à qui jamais personne n'avait
refusé quelque chose, ne se refusait rien
non plus, elle-même. L'envie lui étant
venue de Zamar, cela ne traîna pas.
Le soir, — ce soir-là,— la représen-
tation terminée, à cette heure du départ
où étoiles et petit personnel gagnent,
égalitairement, la même porte de sortie,
l'actrice posa un doigt, — ce doigt qui
menait par le bout du nez, et pas à l'œil,
un gros financier, un parlementaire in-
fluent et une Altesse Royale, — sur
l'épaule du machiniste. Et le geste fut si
clair et le sourire dont il s'accompagnait
si dénué d'ambiguïté, que Zamar, enlevé
comme une simple Sabine, se trouva,
sans avoir eu le temps de réfléchir à ce
qui lui arrivait, confortablement assis
dans le coupé de Tigride, à côté de Tigri-
de en personne, qui sentait bon et se
pressait fortement contre lui.
Deux heures plus tard environ, dans
Je somptueux hôtel proche du Parc Mon-
ceau, les lumières de la chambre à cou-
cher brillaient encore. Zamar avait fait
vaillamment son devoir, ainsi qu'en té-
moignait le désordre éloquent du vaste lit
carré. Et Tigride, ayant mis pied à terre.
se réfugia dans son cabinet de toilette,
afin de se rafraîchir les tempes et d'apai-
ser les battements de son cœur satisfait.
Et, ce faisant, elle se disait, courtisane
accoutumée aux extases reconnaissantes
de ses élus : « Ce garçon doit être fou de
joie! Il ne doit pas en revenir! Ce qu'il
va être intimidé tout à l'heure! »
Il s'en fallait de beaucoup ! Sitôt seul,
Zamar s'était levé, avait été chercher,
dans les poches de sa cotte jetée négli-
gemment sur un pouf, une vieille pipe en
terre sombrement culottée; tranquille, il
l'avait bourrée, puis il s'était recouché et
allait craquer une allumette sur son on-
gle, quand Tigride réapparut. Alors. le
derrière dans la soie et la dentelle, la face
épanouie et l'esprit à l'aise, il cria, d'une
voix triomphante :
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar !
L'allumette flamba, le tabac grésilla, et
trois grosses bouffées de fumée d'un ca-
poral très ordinaire déroulèrent leurs
volutes épaisses sous le baldaquin scan-
dalisé.
Quand à Tigride, elle était restée à la
porte, atterrée, médusée, stupide! Ah
bien ! il ne s'épatait pas, celui-là !
Zamar, en effet, ne s'épatait guère. Il
ne s'étonna pas davantage quand Tigri-
de, reprenant ses sens et l'usage de la
parole, le pria de s'en' aller, «' « tout de
suite, tout de suite! » et il s'en fut, sitôt
rhabillé, sans dédain, mais sans enthou-
siasme, — poliment.
Hélas! Zamar n'avait pas été initié
aux délicatesses des Cours. De retour au
théâtre, il ne sut pas tenir sa langue ; dès
le lendemain, le récit de l'aventure cou-
rut de bouches à oreilles, sur le plateau
et dans les loges, et du cintre aux des-
sous : le supplice de Tigride Lenoir com-
mença.
Dès lors, elle ne put plus traverser les
coulisses sans entendre partout, à tout
moment, ne s'adressant pas à elle, mais
chuchotée à mi-voix, ou même dite à
voix haute, la fameuse phrase :
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar!!!
Elle passait devant un peintre en train
de camoufler un panneau:
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar!!! articulait
le décorateur en agitant son pinceau, les
yeux obstinément fixés sur son ouvrage.
— Et maintenant, qui c'est qui va en
griller une?. C'est Zamar!!! susurrait
l'accessoiriste croisé dans un couloir,
une cheminée sous le bras.
Pauvre Tigride Lenoir ! Son fin profil
bourbonien, — dans sa maturité, légère-
ment blette, elle ressembla étrangement
à Louis XVIII jeune, — se crispait de
fureur toutes les deux minutes. Et rien
à dire! Elle fut sur le point d'abandon-
ner la scène.
Heureusement pour l'équilibre de ses
traits, quelque temps après, le Théâtre-
Français changeait de maître. Emile Per-
rin prenait sa retraite; et l'un des pre-
miers actes de son successeur était d'en-
gager Tigride Lenoir. Tigride ne se fit
point. prier, fière, sans doute, d'entrer
dans la Grande Maison, — elle n'y dé-
buta jamais d'ailleurs, M. Claretie étant
déjà M. Claretie ! — mais heureuse, sur-
tout, d'échapper enfin aux trop fréquents
rappels de la pipe grillée, une nuit, par
Zamar !
Louis MARSOLLEAU.
Nous publierons demain un article de :
TRISTAN BERNARD
Le Théâtre
pour le Théâtre
J'exposais hier, ici même, la triste situa-
tion du public à qui l'on offre ou des
pièces idiotes soi-disant mises à sa portée.
ou des pièces incompréhensibles destinées
à lui donner de hautes leçons d'art et de
moralité, mais à qui l'on ne fournit jamais
de pièces de théâtre sans plus, telles qu'on
les concevait encore très clairement il y a
de cela quelques années seulement.
Le nouveau spectacle de l'Odéon peut
fournir, je crois, un facile exemple de ce
contre sens théâtral.
C'est une chose absolument entendue:
il est ridicule, il est stupide de donner de
.r_:u_- ytiiaou—ao»j— futaimiu 1 ",
de plaire au public en se mettant à sa por-
tée. Il est évident, en effet, que l'on va au
théâtre pour acquérir quelque chose, pour
augmenter son patrimoine intellectuel et que
l'on n'y va point pour retrouver l'insuffi-
sance ou la bêtise dont on est enveloppé
chaque jour. Mais faut-il en conclure que le
théâtre doit être une chaire de professeur
ou de prédicateur, une simple salle de con-
férence où l'on développe une leçon de mo-
rale ou d'histoire naturelle? cela je ne le
crois pas.
Vouloir faire de Faction directe en ma-
tière de théâtre, vouloir atteindre sans tran-
sition le but moral que l'on se propose, cela
n'est en somme, toutes proportions gardées,
guère plus absurde que de proposer de dé-
biter les statues du Louvre en tas de cail-
loux pour l'empierrement pratique des Tui-
leries, ou que de transformer les salles du
Musée en usine électrique pour augmenter
pratiquement le bien-être des habitants de
Paris.
En matière d'art ou de littérature, l'ac-
tion est cfautant plus réelle qu'elle est in-
directe. C'est ainsi, quoi qu'on en dise, que
les études secondaires classiques, dénuées
de toute portée pratique, sont en somme les
,meilleures pour former dans la vie quoti-
dienne des hommes complets, et que, les
voyages, f aits dans un seul but d'agrément,
peuvent souvent préparer, mieux que des
études techniques, à la airection pratique
d'une usine ou d'un atelier.
Je crois donc que la critique fera toujours
fausse route en accueillant au théâtre de la
façon la plus enthousiaste des pièces de
haute tenue littéraire sans doute, mais faites
exclusivement pour le livre, et qui demeu-
rent incapables de charmer et de retenir
l'attention des spectateurs.
En réalité, il impbrte peu qu'une pièce
de théâtre n'ait aucune portée morale,
qu'elle ne combatte ni l'alcoolisme, ni l'a-
varice ni l'orgueil, ni même la gourman-
dise.
Dès l'instant que le spectateur prend plai-
sir à la voir, qu'il s'enthousiasme aux meil-
leures scènes, et s'amuse de bon cœur, vous
pouvez tenir pour 'certain que sa valeur
morale s'en trouve augmentée et que s'é-
veillent en lui de nouvelles énergies insoup-
çonnées. Il en deviendra meilleur sans que
l'on puisse dire comment et, surtout, sans
que l'on soit capable d'établir la moindre re-
lation entre, les actions utiles qu'entraînera
ce changement de tout son être et les paro-
les qui furent prononcées sur la scène.
Le théâtre qui provoque une telle trans-
formation, sans dire pourquoi, est le seul
théâtre que l'on devrait encourager, sous
peine de rebuter les spectateurs les plus
patients ou de les jeter dans un snobis-
me ignorant qui, en matière intellectuelle,
demeure la pire de toutes les impasses.
1. G. DE PAWLOWSKI.
v
Échos
il
ie primadonna qui est un homme.
Une amusante découverte vient d'ê-
re faite — un peu par hasard — en Hon-
grie. Pendant vingt-trois ans, une actrice
i$sez connue, Aranka Gyœngy, a pu jouer,
i Budapest et dans d'autres villes, des rôles
ie soubrette, puis de première chanteuse,
;ans que personne se doutât qu'elle était —
m homme. « II » ou « elle » s'appelle en
éalité Stephane Moezi et est né en 1873, à
)alassagyarmat. Dès douze ans, déguisé en
'etite fille, il débutait sur une scène de
Budapest.
Ce qui rend l'affaire plus piquante, c'est
que cette supercherie a été découverte par
un brave provincial. Il y a quelques jours,
Aranka Gyœngy se présentait devant le
maire d'une petite ville du comté de Zola,
et demandait les autorisations nécessaires
pour les représentations d'une troupe de
passage qu'elle dirigeait. Le maire remar-
qua quelque chose de « pas naturel » dans
son attitude,. la fit examiner par la sage-,
femme de l'endroit et tout se découvrit. -
Ajoutons qu'Aranka Gyœngy était célè-
bre, à Budapest, par la pudeur émue et in-
dignée avec laquelle elle repoussait les hom-
mages trop pressants de certains admira-
teurs.
L
a messe sur la scène
On joue en ce moment,, au théâtre
au Bush Temple, a Chicago, une pièce inti-
tulée Une Femme de l'Ouest, dont une scè-
ne représente la célébration de la messe.
Le décor reproduit avec la plus scrupuleuse
exactitude l'intérieur d'une église catholi-
que, avec l'autel et ses ornements, les cier-
ges, les objets du culte.
Un prêtre, revêtu des habits sacerdotaux,
célèbre l'office pendant quelques minutes,
prononçant les paroles liturgiques qu'accom-
pagne la musique rituelle.
Chose plus curieuse, l'auteur de cette
pièce est un ecclésiastique, le R. P. L.-G.
Vaughan, et il prétend qu'il n'y a tè~t~
crilège ni profanation. « La scène, dit-il, est
interrompue avant le moment de la consé-
cration de l'hostie, et c'est tout simplement
un tableau vivant qui ne doit pas scandali-
ser plus qu'une peinture à l'huile. »
c
ouleur locale.
On a beaucoup parlé, et avec de lar-
ges éloges, du décor de POlyphème.
L'auteur de l'esquisse s'est taillé pres-
que de la gloire avec la reprise de l'œuvre
d'Albert Samain.
Félicitations, congratulations allèrent à
M. Edouard Fournier, qui ne cachait pas sa
fierté de recevoir tant de louanges.
Mais un mauvais plaisant ne s'avisa-t-il
pas de dire tout le bien qu'il pensait du ri-
deau de fond.
M. Edouard Fournier remercia, mais.
avec un sourire jaune.
Hélas! le fond n'est pas de M. Edouard
Fournier; c'est tout bonnement un fond du
répertoire qui sert dans Rodogune, Trilby,
Médée, Mithridate, Andromaque, etc., etc.
Il est vrai qu'à la Comédie-Française on
voit bien des figurants porter le même cos-
tume dans Médée et, le lendemain, dans
La Fille de Roland.
Après ça?
M
ot de situation.
L'élégant et somptueux hôtel de la
Société des auteurs et compositeurs drama-
tiques possède, nous l'avons dit, un petit
jardin avec de minuscules parterres, un ar-
bre et deux bancs de pierre; au milieu de
l'unique allée de ce parc en miniature se
dresse la statue de Beaumarchais. C'est ce
qui a permis - à Charles Quinel de baptiser
le jardinet des Auteurs du nom de « Square
Beaumarchais.». Le même Quinel Charles
disait tout bas à son collaborateur Henry
Moreau, pendant l'orageuse assemblée gé-
nérale: « Ce n'est pas une raison parce que
nous habitons maintenant rue Henner, pour
faire les Henner-gumènes, soyons simple-
ment Henner-giques!. »
D
ébuts.
1 M. Henri de Régnier va remplacer, on
1 e sait, au Journal des Débats, notre éminent
confrère M. Emile Faguet..
Hier, il publiait son premier feuilleton, et
on attendait ce début non sans impatience.
Comment allait se comporter envers les au-
teurs dramatiques le poète des Médailles
d argile ? Comment allait-il • remplir; les
fonctions, nouvelles pour lui, de critique?
Or, par un hasard heureux, il s'est trouvé
que M. Henri Régnier avait justement à ju-
ger une œuvre poétique: Polyphème.
On devine comment l'excellent écrivain
s'est acquitté de cette heureuse tâche.
Il y a un dieu pour les poètes !
A PROPOS DE « CHERUBIN »
Marie-Louise Herrouet
A
t..78' - , x
vant Velléda. > -
Au moment où l'Odéon va donner la
première de l'œuvre nouvelle de Maurice
Magre, rappelons à ce propos un amusant
souvenir. - -
L'an dernier, Velléda fut jouée au théâ-
tre en plein air de Cauterets, et y obtint, si
l'on s'en réfère aux critiques d'alors, un
succès considérable.
Quand le rideau baissa sur le vers final,
le public enthousiaste réclama à grands cris
fauteur.
Notre confrère Jules Rateau, organisateur
Je la journée, chercha vainement Maurice
nagre dans tous les recoins du théâtre;
Maurice Magre restait introuvable!
On finit par le découvrir dans la monta
gne qui domine la scène ; il s'était enfui
modestement et attendait, blotti derrière un
quartier de roche, que' les spectateurs ces-
sassent de récamer sa présence pour l'ova-
tionner.
M. Jules Rateau l'appréhenda violem-
ment, le ramena au théâtre et le livra, tel
un martyr chrétien aux fougues de l'arène,
à Mlles Brille, Roch, Pouzols et Faber, gra-
cieux fauves.
Et, au centre de cette escorte charmante,
le poète dut apparaître sur le plateau, où
d'enthousiastes acclamations l'accueillirent.
L
'avez-vous vue?
Qui?
La grosse caisse de l'atelier des maîtres
décorateurs Jambon et Bailly. Elle a voulu
aller au bal des Quat'z'Arts, au bras d'un
ex-élève. de Jambon: le graveur Gaston
Trilleau, et tandis que son cavalier lui fai-
sait des infidélités avec une trompette, elle
a fui on ne sait où !
Il paraît qu'on l'a vue se hisser à bord
d'une automobile qu'elle rencontra au mi-
lieu des Champs-Elysées.
Le pauvre Gaston Trilleau s'arrache les
cheveux de désespoir; il a couru de la pré-
fecture de police à la fourrière sans pouvoir
retrouver la grosse caisse qui, jusqu'à pré-
sent, n'avait cessé d'être vénérée comme le
fétiche de l'atelier Jambon et Bailly.
OM Comme.IDt la chanson:
« A celui qui la ramènera,
le Récompense il y aura! »
A
qui peut-on s'adresser pour vendre un
d joli bijou à sa réelle valeur? Dusau-
soy, 1 expert bien connu du 4, boulevard
des Italiens, se met à la disposition des per-
sonnes soucieuses de leurs intérêts. Grand
choix d'occasions.
c
* haliapine, directeur de théâtre.
* Les journaux russes annoncent que
Chahapine songe a fonder, a Moscou, un
Opéra. Il formera sa troupe avec les meil-
leurs chanteurs de Russie et peut-être de
l'étranger, et fera appel à des peintres cé-
lèbres pour les décors. Il aurait l'intention
de rompre avec toute routine. On fait ce-
pendant remarquer que, pour le moment,
Chaliapine est encore lié par un traité à
l'Opéra de Saint-Pétersbourg. :
H
ier, aujourd'hui. et demain. *
Les temps ont marché et il est plai-
sant de retrouver le compte rendu d un ban-
quet donné jadis par feu la revue La Plume,
en l'honneur d'Octave Mirbeau, et auquel
M. Jules Claretie, présent, fut remercié en
termes pompeux d'avoir monté Les Aflai-
-res sont tf~ Affaires.
Le regretté Hécislas Golberg, entre au-
tres, s'exprimait en ces termes: « M.
Claretie qui aime le combat — il en a
donné des preuves — a- ouvert les portes
de la Comédie aux pensées hardies; tout en
continuant la tradition du Théâtre-Français,
il veut la consolider en la renouvelant, etc.))
Et M. Jules Claretie envoyait le lende-
main, au directeur de La Plume, la lettre
suivante :
Cher et aimable confrère,
Je me reproche de ne pas vous avoir dit, hier,
publiquement merci, et cependant vous m'ave2
,touché au vif, vous et M. Golberg, et'je tiens
à bien le constater.' Mais un seul nom devait
être fêté, celui de l'auteur des Affaires sont les
Affaires, - et mon « courage » n'est pas bien
grand d'avoir senti la beauté de cette oeuvre
puissante. Je n'aurais, été « courageux » - que
s'il y avait eu péril. Il n'y en avait pas. Dites-
vous bien, cher monsieur, et dites à votre colla-
borateur que vous m'avez du moins fait grand
plaisir. Imprimez-le même si vous voulez, et
croyez que je me suis senti tout rajeuni parmi
ces jeunes (maîtres d'aujourd'hui et de demain),
et que je me retrouverai avec joie, l'automne
venu, autour de cette table de La Plume, où
l'on fête la cordialité chez ceux qui luttent.
comme le! disait M. Mirbeau en son toast, et
la fraternité dans la beauté, comme vous l'avez
dit et proclamé.
* Votre tout dévoué.
Jules CLARETIE.
7 juin ipos.
Voilà ce que pensait, hier, M. Jules Cla-
retie de M. Octave Mirbeau. On sait ce
qu'il en pense aujourd'hui. Mais qu'en pen-
sera-t-il demain?.
L"
s Dîner des Théâtres, créé par Cham-
peaux, jouit d'une réputation vraiment
méritée. -
L'incomparable restaurateur a su attirer
chaque soir dans ses luxueux salons de la
place de la Bourse, le Tout-Paris artistique,
littéraire, financier et mondain.,.-
L
es pneumatiques sont en progrès, no-
tamment les antidérapants, et le der-
nier progrès chez ces derniers est le nou-
veau ferré Gaulois des Etablissements Ber-
gougnan, qui, au reste, ont été les premiers
à établir l'antidérapant tout caoutchouc. Le
nouveau Gaulois est absolument efficace
contre le dérapage,' du commencement de
son emploi jusqu'à son usure complète.
C
onnaissez-vous le secret du Dia-
mant?. Telle est la question angois-
sante que se posent plusieurs partis qui se
trouvent aux prises à ce propos depuis plu-
sieurs mois. Les chimistes, les joailliers, les
alchimistes, — il en est encore, — et le
public bon enfant. s'intéressent a ! affaire
Lemoine.
Il est cependant une autre question d in-
térêt public qui devrait arrêter aussi longue-
ment l'attention générale.
- Où s'amuse-t-on véritablement? de-
vrait-on demander à tout le monde.
* Mais la question serait trop vite résolue,
car l'unanimité des « interrogés » répon-
drait:
— Au Moulin-Rouge Palace ! ! !
NOUVELLE A LA MAIN
Struggle lor lite.
Une danseuse même de l'Opéra-Comique
déclare, chaque fois qu'on lui demande
quels sont ses moyens d'existence:
« Moi, je gagne ma vie avec mes jambes.
Ce sont mes pattes alimentaires.
Le Masque de Verre.
1 ALICE VERLET
Elle va nous dire au revoir, l'Enfant gâtée
des Parisiens, la reine de Navarre adorée
des abonnés de l'Opéra, l'inoubliable Naïa-
de, Mais qu'elle soit Gilda, Juliette, Zerline,
Marguerite, Thaïs, aussi bien que Lakmé,
Traviata, Lucie, c'est chaque fois, pour elle,
le même triomphe.
De taille moyenne, un visage d'enfant,
1 1 Reutttngtr, plot*
des yeux immenses changeant comme lae
mer; le teint idéal des filles du Nord, une
petite bouche servant d'écrin à trente-deux
perles, un nez fripon, l'air moqueur, mais'
surtout si bon et si doux ; des attaches
d'une finesse extrême. Voilà, au physique,
Alice Verlet. Presque sauvage, aimant peu
le. monde, très instruite, parlant plusieurs
langues, bonne, camarade, le cœur sur la
main, sa main ouverte à toutes les infortu-
nes, amie sûre, voilà la femme. ..,
Quant à l'artiste, il faudrait une r - i ?
plus autorisée-qûe la mienne pour i'ana.v-
ser., Mais ce que je puis dire, c 'est
l'étendue de sa voix, au timbre >?x<.vprion-,
nel, comprend trois octaves; elle pt':'; t .Van-
ter avec autant de facilité Griséluy c—e
La Reine de la Nuit, où les contr.e-/a ne sont
qu'un jeu pour elle. Ce qu'il y a de trè- re-
marquable chez. Alice Verlet.. c'est la com-
préhension merveilleuse de ses rôles: elle
peut passer du tragique au tendre et même
s'attaquer au comique, c'est toujours la mê-
me perfection; travailleuse à l'extrême, mu-
sicienne dans l'âme, malgré tous se^ dons,
elle pioche tous ..ses rôles avec conscience
et n'est jamais contente d'elle-même Le
public lui prouvera, mardi, au Trocadcro,
qu'il n'est pas de son avis.
BERTHE DE CARTIGNY.
A PROPOS DU FOYER.
"La Moabite de Déroule de
Un précédent. lUI Comme quoi une pièce reçue au Thé~l.~
Français n'y est pas toujours représentée.-De 1860
:'" à 1908. « Retrait ou procès?
Entre un jugement qui date de 1837, et
qui condamna la Comédie-Française à payer
à-Victor Hugo, 6.000 francs de dommages-
intérêts pour retards apportés aux représen-
tations d'Hernarii et de Marion de Lorme, et
le récent ju'gement qui condamne M. Clare-
tie à remettre en répétitions Le Foyer, la
pièce "dè MM. 'Octàve Mirbeau et Nàtan-
son, il y a place, pensons-nous, pour un
vouvenir qu'il convient d'exhumer de' l'his-
toire contemporaine du théâtre. -
Le fait se place en 1880. Il s'agit de la
"bce La Moabite, de son auteur,. M. Paul
Déroulède, et ae m. Perrin, lequel régnait
à cette époque à la Comédie-Française.
M. Paul Déroulède avait derrière lui, à
ce moment-là, soixante-quinze éditions des
Chants du Soldat et deux drames, Juan
1 énner et VHetman, représentés avec suc-
cès. Il venait de composer La Moabite, qu'il
porta à l'Odéon; à la fin de 1879. -
M. Perrin connut l'existence du manus-
crit qui attendait- son tour — un tour pro-
hain — au théâtre de la rive gauche.
Il fit' alors auprès de M. Déroulède des
démarches — heureux auteur! - et sur
sa promesse formelle de monter le drame
en vers La Moabite, pour la « campagne de
l'hiver qui allait commencer », M., Paul
Déroulède sê/ rendit' à l'Odéon, retira la
pièce, et, tout joyeux, la porta place du
Théâtre-Français.
L'hiver arriva, mais il n'amena pas avec
lui la répétition de La Moabite. La pièce
avait été prise le 1er mai pour passer le
1er novembre.
M. Déroulède .attendait.
Le Français resta muet.
On vit, dans les couloirs, se profiler la
haute silhouette de l'auteur qui visita sou-
vent M. Perrin. M. Déroulède qui est un
esprit distingué dont la droiture ne se 'Com-
plaît guère aux intrigues des couloirs, te-
nait, à son interlocuteur, ce simple lan-
~ac~* ,.-'
Le drame était reçu. Il devait le. joi.or.
C'était logique.
C'était tellement logique qu'un be. u •<" ,
M. Paul Déroulède retira tout simp cme.il
sa pièce.
Il aurait pu dire, avec un de ses r.:;¡" In-
nages de La Moabite, Misaël, au de.!- .!
acte, en parlant du Français:
La terre, sous le ciel, a de plus vastes ! ¡tPS.
Et puisque celle-ci n'est qu'angoisse et que joutes.
J'en sors.
L'auteur de La Moabite, en effei. s
sous le bras. Il jeta le manuscrit dans son
tiroir, puis, un jour le fit imprimer avec
cette mention:
Drame repu au Théâtre-Français ci ¡¿'.,n
représenté; ,
* *
Que-s'était-il donc passé ? Mon P ira !
Une chose toute simple et qui seml i,
de tradition parmi certains adminisîjeteurs
de la Comédie-Françaige-, qui par.-osent
se passer la consigne des atermoiement et
des réticences. Je laisse, ici, la p. c e à
M.- Paul Déroulède qui, en une trù-> r Î-
rieuse lettre-préface dans son édircr. J0
La Moabite -' très rare, aujourd'hui. —
conte ses démêlés avec le Claretie du mo-
ment :
« Raconterai-je comme quoi. il y a un
an, dit-il, M. Perrin m'avait fait quitter
l'Odéon pour la Comédie-França'ise ? Par
quelles promesses, il s'était engagé à ouvru*
la campagne de cet hiver? A quoi bon? Al.
Perrin n'a pas nié ses engagements : il a
même été à la veille de les tenir tous, pour-
quoi donc n'en a-t-il tenu aucun?
» Pourquoi oif pour qui m'a-t-il déclaré
tout à coup qu'il ajournait ma pièce à des
temps meilleurs, au mois de janvier par
exemple, ou de février, ou peut-être bien do
mars, enfin à Pâaues ou au plus tard À la
Trinité?
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