Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-05-17
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 17 mai 1908 17 mai 1908
Description : 1908/05/17 (A2,N230). 1908/05/17 (A2,N230).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646614x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
L'Anné. N° 230(Quotidien) Le Numéro : 5 centimes
Dimanche 17 Mai 1908.
COMŒDIA
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKi
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Étranger 40 a 20 D
ARISTOTE A PARIS (1)
LE TYRAN
Ainsi que nous en étions convenus,
j'allai le soir même à son hôtel chercher
v Aristote pour le conduire au spectacle. Je
trouvai le grand philosophe couché de-
puis plusieurs heures et dormant déjà.
Ma venue le surprit étrangement, car il
ne l'attendait plus. Aussitôt que je lui eus
exposé le but de ma démarche, il se leva
violemment sur son séant, frappant ses
mains l'une contre l'autre et s'écria :
- 0 Homme-Parisien ! es-tu dénué de
tout bon sens ou es-tu, ayant vidé des
coupes trop abondantes avec tes amis?
car, par Jupiter! qui s'imaginerait un
seul instant d'aller au théâtre au milieu
de la nuit? A moins, par Bacchus! qu'il
ne s'agisse, de toute évidence, de prati-
quer des orgies honteuses dans le temple
de la déesse ou de courir en chantant
dans les faubourgs, en jouant de la flûte
et en sautant sur un pied comme tout
homme privé de raison.. Ignores-tu donc
qu'une telle attitude n'est point celle d'un
philosophe et qu'elle conviendrait mieux
à quelque Agnon de Téos ayant des clous
d'argent à ses pantoufles ou à quelque
Léonnatus faisant apporter du sable d'E-
gypte pour ses gymnases par plusieurs
chameaux ou encore à quelque autre cour-
tisan d'Alexandre traînant à sa suite,
dans les terres lydiques, des troupes de
baigneurs et des valets de chambre pour
faire son lit.
Avec patience, j'interrompis petit à pe-
tit ce flux de paroles et je m'efforçai d'ex-
pliquer au Prince des philosophes que
tel était, l'usage à Paris. Il rit beaucoup
et me demanda de me retirer quelques
instants pendant qu'il procéderait aux
soins de sa toilette.
Au bout d'une heure d'attente dans le
nall de l'hôtel, mon attention fut attirée
par une courtoise mais vive discussion
qui semblait provenir du premier étage
et je reconnus tout aussitôt la voix d'A-
ristote :
— Par Jupiter ! criait le philosophe,
est-il donc écrit au livre du Destin que
ces barbares m'accableront toujours du
poids de leur stupidité et qu'il me fau-
dra subir les observations les plus ridi-
cules des esclaves eux-mêmes?
— Mais, monsieur, reprenait obséquieu-
sement la voix d'un larbin, si monsieur
veut prendre la peine de venir jusqu'au
bureau de l'hôtel, je suis sûr que mon-
sieur s'arrangera facilement avec mon-
sieur et que toute satisfaction pourra
être donftée à monsieur. Seulement,
dame! moi, monsieur, n'est-ce pas? c'est
moi qui me ferais attraper; alors, n'est-
ce pas? j'aimerais mieux que ça soye
monsieur qui prévienne !
Je m'avançai quelque peu intrigué.
Au haut du grand escalier, le
philosophe, vêtu de ses habits de fête,
apparaissait traînant derrière lui un
matelas arraché à son lit et tenant de
l'autre main, un candélabre électrique,
naturellement éteint. Dès qu'il me vit,
il manifesta sa joie.
— Par Jupiter! fit-il, ô Homme-Pari-
sien porteur-de-paroles-ailées, je suis
content de te voir; tu n'auras point
de peine à expliquer à cet esclave stu-
pide qu'allant, d'une part, au théâtre, il
me faut, suivant l'usage, faire apporter,
pour garnir les gradins, un coussin digne
de moi ; et que, d'autre part, traversant
les faubourgs en pleine nuit, il est né-
cessaire que nous portions avec nous
quelques lampes d'argile pour guider
nos pas et nous empêcher de nous en-
foncer dangereusement dans la boue. Au
reste, ajouta-t-il, par les dieux infer-
naux ! mon âme est inquiète par rapport
au prodige qui m'est envoyé, car, d'une
part, lorsque cette lampe est sur la ta-
ble, elle éclaire ; et, lorsque je la prends
avec moi, étant sur le point de partir, elle
s'éteint, signifiant sans doute par là que
les dieux refusent leur protection à une
expédition qui n'est point étant leur plai-
sant.
Après une demi-heure d'explications
détaillées, je pus enfin remettre les cho-
ses au point et nous partîmes pour l'O-
péra.
Là, de nouvelles déceptions m'atten-
daient. Sitôt qu'il fut entré, le prince des
philosophes jeta les yeux autour de lui
avec stupeur et commença de tels dis-
cours que je dus le prier de se retirer
quelques instants avec moi dans les cou-
loirs pour éviter un scandale, que je sen-
tais imminent.
— 0 stupide ! disait Aristote, en frap-
pant violemment le sol du pied, ô stu-
pide! qui pense pouvoir te moquer impu-
nément d'un homme tel que moi en l'en-
traînant dans un établissement de bains,
en lui faisant croire que c'est là le plus
grand théâtre de la ville ! Et quelles sont,
par Jupiter, je te le demande, ces fem-
mes non vêtues et ces hommes en che-
mise dénués de tout ornement, sortant
apparemment du bain, qui, dans l'atmo-
sphère lourde des thermes, regardent
quelques vierges dansant la Cordace, tan-
dis que des esclaves habiles raclent sans
doute la sueur de leurs membres fati-
gués. T'ai-je dit que je voulais de nou-
veau prendre un bain ; et comment, par
Jupiter! veux-tu faire croire que ce bou-
ge peut, en aucune manière, tenir lieu
d'un grand théâtre où, suivant l'habitude,
(li Voir Comœdia du 22 Membre 1907.
les plus nobles expressions de la pensée
humaine se développât dans le cadre
naturel qui leur est familier, sous les
rayons étincelants de Phœbus. Si donc
tu J es, ne voulant pas être mis en croix
et avoir la langue arrachée avec des te-
nailles rougies par le feu, hâte-toi de me
conduire, s'il en est temps encore, dans
un théâtre digne de moi et situé en de-
hors des faubourgs, comme il convient.
Après quelques hésitations, et crai-
gnant de me brouiller à tout jamais avec
le grand homme, je me décidai à le con-
duire dans un music-hall pourvu d'un
jardin et exposé à souhait à la brise du
soir.
Cette idée fut couronnée de succès.
Quel que fût spn dédain pour les dimen-
sions restreintes de la scène, le philoso-
phe, convenablement installé dans une
loge garnie de coussins consentit à sui-
vre le spectacle que je dus lui expliquer
point par point.
Son attention fut vivement attirée par
les acteurs figurant, suivant l'usage, M.
Pelletan et M. Clemenceau, et son émo-
tion ne connut plus de bornes lorsque je
lui expliquai l'entrée grotesque et pré-
vue de M. Fallières.
— 0 chère barbe! je ne puis d'une
part que te remercier de m'avoir con-
duit dans le plus grand théâtre de cette
ville où véritablement, par Jupiter ! sont
flétris comme il convient les actes du
gouvernement, suivant la tradition de la
Grande Comédie.. Mais, d'autre part, il
me semble qu'étant donnée la violence
de ces critiques, la représentation ne va
point pouvoir s'achever et que le Tyran,
averti en temps utile par ses espions ai-
lés, va envoyer incontinent des soldats
pesamment armés, qui, sans pitié, passe-
ront tous les spectateurs au fil de l'épée,
à moins qu'ils ne cherchent leur salut en
suivant le chemin sacré d'Hellé ou de
la nymphe Sequane.
Et quant à moi, par Jupiter! bien
que regrettant une seconde fois la vie
qui me fut accordée, je saurai mourir
ainsi qu'il convient sans m'attacher aux
genoux de nos bourreaux, comme le
font les femmes et les petits enfants, car
il faut, oui véritablement, que la tyran-
nie de ce Fallières soit bien atroce pour
que tous ces hommes n'hésitent point à
risque* tour existence pour la flétrir tOrtF-
me étant désespérés. A moins toutefois
que la sédition militaire ne se prépare,
car voici que, très évidemment, les sol-
dats qui sont là me semblent gagnés à
votre cause; car, d'une part, j'en ai ob-
servé un qui emmenait au dehors de la
salle un spectateur qui protestait contre
ce genre de spectacle, et, d'autre part,
je ne le vois point s'étonner des injures
que l'on profère contre le Tyran. Et, cer-
tes, c'est là le signe le plus certain, par
Jupiter! de la sédition militaire.
Je m'efforçai d'expliquer encore au
philosophe quel était le jeu de nos ins-
titutions et que, nos gouvernants étaient
choisis par le suffrage même du peuple.
Aristote réfléchit longuement et s'é-
cria :
— Voici très certainement, ô Hom-
me-Parisien! le signe le plus certain que
je suis étant parmi des fous capables de
retenir seulement l'attention du méde-
cin ; car, d'une part, tu me dis que vous
êtes choisissant librement le Tyran, et
voici que, d'autre part, vous êtes cons-
tamment le raillant et, ce faisant, très
évidemment, vous êtes vous raillant
vous-mêmes de la façon la plus absurde
et donnant raison aux plus effrénés
partisans de la tyrannie. Car si, d'une
part, vous êtes raillant le Tyran que
vous vous êtes librement choisi pour le
seul plaisir de le faire, il est évident,
d'autre part, que lorsqu'un Tyran vous
est imposé par la force, les railleries
dont il est l'objet sont dénuées de toute
valeur. Et, par Jupiter ! n'est-il pas exact
de dire que votre République se range
ainsi non point parmi les aristocratiques,
ni non plus parmi les démocratiques,
mais bien plutôt parmi celles du genre
autophage, et que cette absence de res-
pect pour tout pouvoir légitime et con-
senti marque sa chute prochaine.
— Le programme! mon Prince? in-
terrompit obséquieusement un camelot
en se hissant sur le bord de la loge.
Le prince des philosophes s'arrêta net
et, souriant:
— Allons, fit-il, je vois que si res
citoyens ont perdu toute mesure et se
laissent prendre aux plus basses flagor-
neries des sycophantes, les véritables gens
du peuple, par contre, sont encore ca-
pables de discerner et d'honorer le vrai
mérite là où il se trouve.
Et, dans la main du camelot, le grand
philosophe laissa tomber quelques drach-
mes.
G. de PAWLOWSKI.
Echos
D
u bon tabac.
Le théâtre de la foire va renaître à
la fête de Neuilly. Queue sera sa situation
vis-à-vis de la Société des auteurs? Celle-ci
y percevra-t-elle des droits? En tout cas,
les droits à percevoir dans ces théâtres en
toile, pour méprisés qu'ils soient générale-
ment, ne sont pas encore si méprisables.
C'est Paul Féval qui, le premier, à notre
connaissance, toucha des droits d'auteur
dans un de ces établissements.
Il assistait à une représentation, combien
tronquée, du Bossu, dans un théâtre forain ;
l'entrepreneur du spectacle, ayant appris
que l'auteur était dans la salle, se fit pré-
senter et, par reconnaissance, offrit de lui
verser une somme de cinquante centimes
par représentation. Comme Féval souriait,
le directeur ajouta: « C'est peu, évidem-
ment, mais songez que nous donnons huit
représentations dans la journée et six pen-
dant la soirée. Ce sera pour vos cigates. »
Sept francs de tabac par jour, Féval, à
ce prix-là, pouvait fumer du caporal supé-
rieur. -
L
es feux de la rampe.
La cantatrice allemande Marie Gœtze
chantait, l'autre soir, L Or du Rhin, au théâ-
tre de Brème.
Au moment où elle se trouvait tout au
bord de la scène, un court-circuit se produi-
sit qui communiqua le feu à sa robe.
L'actrice vit parfaitement la flamme, mais
elle eut le sang-froid de terminer sa scène,
pour éviter au public une panique qui aurait
pu être meurtrière.
Ce n'est que dans la coulisse qu'elle fut.
secourue.
Voilà bien ce qu'on peut appeler graver
les feux de la rampe.
p
rojets.
Rencontré dans les couloirs du Palais-
Royal. la jolie Marthe Regnier. — Au cours
de la conversation que nous avons eue avec
elle, la charmante artiste nous a fait part
de ses projets d'avenir, qui sont fort beaux.
C'est ainsi qu'après la reprise de Jeunesse,
qui n'est pas encore certaine, la délicieuse
créatrice de Mademoiselle Josette ira faire
une courte saison à Banyuls-de-l'Orne, puis
s'étant tranquillement reposée à sa villégia-
ture habituelle, près de Cabourg, elle nous
reviendra, engagée pour toute la saison par
le Gymnase, pour créer le principal rôle
des pièces de MM. de Fiers et de Caillavet,
de Gavault, et d'un auteur dont le nom est
inconnu.
Et puis. Mais d'ici là le hasard nous re-
mettra sur le chemin de la jolie Marthe,
M
axime Gorki. librettiste.
Sait-on que Maxime Gorki, dont les
journaux ont annoncé l'arrivée prochaine à
Paris, pour applaudir soji ami Chaliapine,
est un fervent de musique et un dilettante
éclairé? L'illustre romancier termine en ce
moment un livret musical pour le jeune
compositeur Jean Nouguès, qui fut son hôte
cet hi ver à Capjrî. ,'
oe sèfa 19, n'esta 'pas; m opéra franco-
russe.
Vive l'alliance!
L
a bonne entente.
La scène se passe dans un théâtre
de genre a Berlin. Au fur et à mesure que
les répétitions avancent, les rapports entre
auteur et directeur sont devenus plus ten-
dus.
Il « ne reconnaît plus sa pièce », tandis
que le directeur déclare « qu'elle ne fera
aucun effet », à moins de larges coupures
et d'amputations héroïques. ,.
Or, il n'a aucun tempérament chirurgi-
cal et s'oppose, avec une farouche énergie,
à ce que l'on enlève le moindre bout de dia-
logue.
Aux dernières répétitions d'ensemble,
l'auteur occupe un fauteuil dans la salle; le
directeur, homme prudent, reste à l'avant-
scène. Manifestement, un dialogue intermi-
nable de l'acte principal paraît tout à fait
inutile et oiseux. Le directeur s'avance vers
la rampe et demande, en s'efforçant d'avoir
l'intonation polie: « L'auteur consent-il à
ce que l'on biffe cette scène? » Protesta-
tions furieuses de l'interpellé qui, cramoisi,
s'écrie: « Non, non, non!!! » Froidement,
le directeur se retourne alors vers les in-
terprètes: « Par conséquent, la scène est
biffée sans l'autorisation de l'auteur. »
Et ainsi fut fait.
c
ruelle énigme.
Au quatrième acte d'Hippolyte et
Aricie, dans un décor néo-romain, il n'est
pas sans joie de remarquer que des artistes
du corps de ballet en peplum dansent une
« matelotte ».
Les origines de cette danse sont-elles
donc si lointaines et si nobles que les con-
temporains d 'Hippolvte l'aient tant furieuse-
ment pratiquée?
Ou est-ce Rameau lui-même qui exigea
pour la représentation de son opéra* que les
théories des danseurs antiques évoluassent
de cette façon?
Ou est-ce simplement le régisseur de
la danse qui songea à varier. « éclectique-
ment » les divertissements /.d'Hippolyte et
Aricie? V
On ne sait pas!.
L
'auto de Thespis.
Avant-hier, une auto de 'place, char-.
gee ae six ou sept jeunes hommes et jeu-
nes femmes parcourait les rues à très vive
allure.
Et la bande bruyante poussait des cris:
« Conspuez Sarah!. Conspuez Sarah! »
Ils firent le tour du bois, puis la mani-
festation prit fin devant la maison même de
la grande tragédienne, aux cris souvent ré-
pétés de : « Conspuez. Sarah ! »
Nous nous approchâmes et nous recon-
nûmes, aux visages glabres des hommes et,
chez les femmes, à un air de famille qui
les apparentait avec madame Cardinal, de
jeunes espoirs. C'étaient les élèves de la
classe de Mme Sarah Bernhardt qui mani-
festaient contre l'absence, persistante à son
cours de « la Patronne'».
Le
vélo et la limousine.
Un de nos meilleurs confrères, - celui
que l'on voit toujours rouler dans Pans sur
son infatigable bécane, et qui, la saison
prochaine, doit faire jouer sur un théâtre
du boulevard une adaptation d'ouvrage cé-
lèbre dont nous avons déjà parlé, recevait
récemment une lettre d'une actrice plus
opulente que talentueuse, et qui, naturelle-
ment, mais saris le cdifcfiftttrj, fe priait de
lui réserver ùrt rôlei, ,' -
Il sortait hier du Vaudeville, toujours ju-
ché sur sa bicyclette, et s'engageait dans la
cohue de la Chaussée-d'Antin quand, tout
à coup, il se trouva pris, cerné, dans un tel
embarras de coupés, de fiacres, de taxis,
de camions et d'automobiles, qu'il dut, pour
ne pas être écrabouillé, sauter au petit
bonheur.
Un large marchepied lui tendait les bras
(façon de parler); il s'y réfugia d'un bond.
C'était celùi d'une splendide limousine dans
laquelle se prélassait, indolente et majes-
tueuse, une incomparable créature de luxe:
- Monsieur! monsieur! — s'écria-t-elle
à la vue de l'intrus - c'est inconcevable!.
un tel sans-gêne!. -
Un peu froid, trop froid peut-être, notre
cycliste de déclarer:
— Je .vous prie de m'excuser, Madame,
mais la nécessité. Au fait, n'est-ce pas à
Mlle Z., du théâtre X., que j'ai l'honneur
de parler?
- Parfaitement, Monsieur — riposta la
beauté d'un ton sec - je suis Mlle Z., du
théâtre X.
— En ce cas, Mademoiselle, je suis bien
heureux de faire votre connaissance, quand
ce ne serait que pour vous dire que j'ai bien
reçu votre lettre, mais que vous n'avez pas
du tout le physique de l'emploi pour. jouer
dans ma pièce du Vaudeville !
- La dame était, sous son fard, d'un rouge
de pivoine. Une éclaircie s'était produite
dans la cohue des voitures. Notre confrère
avait disparu.
L
es plaisirs du voyage.
Pendant le séjour du Président de la
Kepublique a Londres, les officiers et ma-
rins du croiseur français le Léon-Gambetta
assisteront à une matinée donnée en leur
honneur au Palace, un des plus grands
music-halls de Londres.
On espère que M. Fallières pourra passer
quelques instants à cette matinée, en reve-
nant, du banquet officiel qui sera donné au
Guild Hall- --
T
rès admirée, hier après-midi, à la gé-
, néraie du Clown, une délicieuse créa-
tion de Linzeler, le couturier du 112, bou-
levard Haussmann; c'est une ravissante
robe d'après-midi en tulle noir fantaisie sur
fond blanc. Corsage garni de filet brodé for-
mant bretelles et retombant sur les man-
ches en Alençon crème; jupe empire gar-
nie d'e .quilles filet brodé, terminées par des
franges de soie. -
L
e temps n'est pas loin où, de sa voix
magnifique, le bon chansonnier Marcel
Legay damait à tous les -"
montmartrois : • • *
Moulin-Rouge, Moulin-Rouge, ;
Pôiir qui" mouds-tu tous les jours,?
Marcel Legay chante encore sur la Butte
et triomphe dans un répertoire nouveau;
mais, bien, qu'il ne l'évoque plus aussi fré-
quemment, le Moulin-Rouge moud tou-
jours!. Il moud sans doute des farines
somptueuses, car le Moulin-Rouge-Palace
est trop petit pour contenir la foule des fins
gourmets qui s'y retrouvent tous les soirs.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain un article de:
PAUL DOLLFUS
,.. L' AFFAIRE DONIZETTI
Un coup de Théâtre.s
A la requête des "Héritiers", forts d'un jugement pai*
défaut rendu contre la S. D. A. D., un huissier a
"opérâ", hier, dans DOUZE établissements
de spectacles.
L' « affaire Donizetti » est entrée depuis
hier dans une phase nouvelle. Cette af-
faire, on le sait, est toute une histoire, et,
si l'histoire connaît parfois des tournants
dangereux, la journée du 16 mai sera cer-
tainement une date.
Mais résumons les faits :
Le 2 mai dernier, le Tribunal de CQm-
merce du département de la Seine se réu-
nissait, ainsi que nous l'avons dit du reste,
à la requête de MM. Gaëtano Donizetti et
Giuseppe Donizetti, représentés par Me
Taupin, agréé.
Ces messieurs demandaient quelques
comptes à la Société des Auteurs et Com-
positeurs dramatiques, dont le siège était
à cette époque rue Hippolyte-Lebas, n° 8.
M. Borderel, juge, président d'audience;
MM. Mauffroy et Carré, juges: MM. Troul-
lier, Franck, Carpentier, Marcoux, juges
suppléants, ne purent que constater l'ab-
sence des représentants de la S. D. A. D.
et rendirent un jugement par défaut.
Ce jugement a été signifié avant-hier 15
mai à la Société des Auteurs. Le voici ré-
sumé en quelques lignes:
« La Société des Auteurs et Compositeurs
dramatiques est tenue de rendre compte à
MM. Donizetti, en leur qualité d'héritiers et
représentants ou ayants droit de Donizetti,
« des droits d'auteurs qu'elle a perçus, tant
en France qu'à l'étranger, depuis son der-
nier règlement de compte de 1865, sur les
représentations des œuvres de Donizetti, et
en particulier sur les représentations de Lu-
cie' de Lammermoor, La Favorite, La Fille
du Régiment et Don Pasquale ». Elle est
condamnée à payer le montant de ces droits
d'après le compte qui en sera dressé con-
tradictoirement entre les parties, avec inté-
rêt à 5 du jour de chaque encaissement,
et, dès à présent, et par provision, devra
payer aux « héritiers » la somme de dix
mille francs en compte et à valoir. »
Or, les héritiers Donizetti ont de la mé-
fiance, comme le condamné par persuasion,
eyt ils l'ont bien Fn'ofiirÊ HréF en signitrant,
par exploit de Me Brionne, huissier, 33,
Faubourg-Montmartre, leurs intentions à
douze directeurs de théâtre de Paris.
Leu';"mandataire s'est,- en effet, présenté
à l'Opéra, à la Comédie-Française, à l'Opé-
ra-Comique, à la Gaîté-Lyrique, à la Porte-
Saint-Martin. au Vaudeville, au Gymnase, à
la Renaissance, aux Folies-Dramatiques, aux
Nouveautés, à l'Athénée et au Théâtre Ré-
jane. Il a remis aux directeurs, ou « person-
nes à leur service », une feuille de papier
bleu dans laquelle MM. Donizetti déclarent:
« Que la Société des Auteurs et Compo-
siteurs dramatiques ayant manifesté la vo-
lonté de retarder, par tous moyens de pro-
cédure, le règlement des sommes dues et
leur revenant, ils ont le plus grand intérêt
à prendre dès à présent des mesures con-
servatoires, dans l'ignorance où ils sont de
ce que peut devenir ladite Société, leur dé-
bitrice. »
Ils s'opposent donc formellement à ce que
les directeurs de théâtre remettent à la
S. D. A. P. la part de un pour cent qui
lui revient sur les recettes brutes de chaque
représentation.
Ils s'opposent, en outre, à ce que les
« signifiés » versent entre les mains de la
S. D. A. P. la recette des représentations
données exclusivement au profit et bénéfice
de celle-ci.
Ils déclarent enfin, dans leur exploit, -que
la présente opposition est ainsi faite « îfeur
sûreté, conservation, et avoir paiement: 10
de la somme de dix mille francs montant de
la provision allouée par le jugement suc-
visé; 2° toutes les sommes dues à raison
des droits perçus depuis le règlement de
compte remontant à 1865, pour lesquelles
la Société est également condamnée par le,
dit jugement; 3° et celle de 2.500 franc-
pour frais évalués ».
Et voilà!
Que va-t-il se passer maintenant?
-Le Président de la République francisa
a mandé et ordonné à tous huissiers, « saf,
ce requis, de mettre le jugement à exécu-
tion, aux procureurs généraux et aux pro-
cureurs de la République près les Tribunaux
de première instance, d'y tenir la main, à
tous les commandants et officiers de la forcc-
publique de prêter main forte lorsqu!ils.on
seront légalement requis ».
Contre toutes ces puissances réunies —
qui se trouvent d'accord cette fois avec le
simple bon sens — que pourra faire la So-
ciété des Auteurs ?
ROBERT OUDOT,
Ce qu'on en pense
'-- dams leâ théatrét
Nous avons fait hier soir une rapide -en-
quête dans les principaux théâtres sur lai
portée de cet incident.
Nous devons déclarer que nous avoirs
rencontré partout la plus complète indiffé-
rence.
Plusieurs administrateurs paraissent mê-
me avoir très mal compris de quoi il s'agis-
sait et semblent s'imaginer qu'on leur ré-
clame seulement des droits sur les ouvragea
de Donizetti qu'ils pourraient représenter.
En tout cas, pensent-ils, payer à la So-
ciété. ou payer aux héritiers Donizetti est
toujours payer.
Alors?.
,', THÉÂTRE FEMINA
UIDIN Comédie en Vers, en trois actes-,
D , de M. Francis de Croissef
(Paul Boyer. phot.) Qabrielle Dorziat
Gaston Duboso
- oanche ToUtain
-
Marie-Louise Herrtfuet Pierre Stemper André Bruld
Je fùs de ceux, assez rares, qui protestè-
rent tout de suite, dès juin 1901, voilà tan-
tôt sept ans, contre l'injuste et vilain malen-
tendu privant Chérubin de sa première à la
Comédie-Française. Et ce ne fut pas com-
me fiche de consolation à l'auteur, si cruel-
lement déçu, mais en toute sincérité, que
je lui promis alors une belle revanche, cer-Y
tain Que l'œuvre pouvait attendre et ne per*
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Étranger 40 a 20 D
ARISTOTE A PARIS (1)
LE TYRAN
Ainsi que nous en étions convenus,
j'allai le soir même à son hôtel chercher
v Aristote pour le conduire au spectacle. Je
trouvai le grand philosophe couché de-
puis plusieurs heures et dormant déjà.
Ma venue le surprit étrangement, car il
ne l'attendait plus. Aussitôt que je lui eus
exposé le but de ma démarche, il se leva
violemment sur son séant, frappant ses
mains l'une contre l'autre et s'écria :
- 0 Homme-Parisien ! es-tu dénué de
tout bon sens ou es-tu, ayant vidé des
coupes trop abondantes avec tes amis?
car, par Jupiter! qui s'imaginerait un
seul instant d'aller au théâtre au milieu
de la nuit? A moins, par Bacchus! qu'il
ne s'agisse, de toute évidence, de prati-
quer des orgies honteuses dans le temple
de la déesse ou de courir en chantant
dans les faubourgs, en jouant de la flûte
et en sautant sur un pied comme tout
homme privé de raison.. Ignores-tu donc
qu'une telle attitude n'est point celle d'un
philosophe et qu'elle conviendrait mieux
à quelque Agnon de Téos ayant des clous
d'argent à ses pantoufles ou à quelque
Léonnatus faisant apporter du sable d'E-
gypte pour ses gymnases par plusieurs
chameaux ou encore à quelque autre cour-
tisan d'Alexandre traînant à sa suite,
dans les terres lydiques, des troupes de
baigneurs et des valets de chambre pour
faire son lit.
Avec patience, j'interrompis petit à pe-
tit ce flux de paroles et je m'efforçai d'ex-
pliquer au Prince des philosophes que
tel était, l'usage à Paris. Il rit beaucoup
et me demanda de me retirer quelques
instants pendant qu'il procéderait aux
soins de sa toilette.
Au bout d'une heure d'attente dans le
nall de l'hôtel, mon attention fut attirée
par une courtoise mais vive discussion
qui semblait provenir du premier étage
et je reconnus tout aussitôt la voix d'A-
ristote :
— Par Jupiter ! criait le philosophe,
est-il donc écrit au livre du Destin que
ces barbares m'accableront toujours du
poids de leur stupidité et qu'il me fau-
dra subir les observations les plus ridi-
cules des esclaves eux-mêmes?
— Mais, monsieur, reprenait obséquieu-
sement la voix d'un larbin, si monsieur
veut prendre la peine de venir jusqu'au
bureau de l'hôtel, je suis sûr que mon-
sieur s'arrangera facilement avec mon-
sieur et que toute satisfaction pourra
être donftée à monsieur. Seulement,
dame! moi, monsieur, n'est-ce pas? c'est
moi qui me ferais attraper; alors, n'est-
ce pas? j'aimerais mieux que ça soye
monsieur qui prévienne !
Je m'avançai quelque peu intrigué.
Au haut du grand escalier, le
philosophe, vêtu de ses habits de fête,
apparaissait traînant derrière lui un
matelas arraché à son lit et tenant de
l'autre main, un candélabre électrique,
naturellement éteint. Dès qu'il me vit,
il manifesta sa joie.
— Par Jupiter! fit-il, ô Homme-Pari-
sien porteur-de-paroles-ailées, je suis
content de te voir; tu n'auras point
de peine à expliquer à cet esclave stu-
pide qu'allant, d'une part, au théâtre, il
me faut, suivant l'usage, faire apporter,
pour garnir les gradins, un coussin digne
de moi ; et que, d'autre part, traversant
les faubourgs en pleine nuit, il est né-
cessaire que nous portions avec nous
quelques lampes d'argile pour guider
nos pas et nous empêcher de nous en-
foncer dangereusement dans la boue. Au
reste, ajouta-t-il, par les dieux infer-
naux ! mon âme est inquiète par rapport
au prodige qui m'est envoyé, car, d'une
part, lorsque cette lampe est sur la ta-
ble, elle éclaire ; et, lorsque je la prends
avec moi, étant sur le point de partir, elle
s'éteint, signifiant sans doute par là que
les dieux refusent leur protection à une
expédition qui n'est point étant leur plai-
sant.
Après une demi-heure d'explications
détaillées, je pus enfin remettre les cho-
ses au point et nous partîmes pour l'O-
péra.
Là, de nouvelles déceptions m'atten-
daient. Sitôt qu'il fut entré, le prince des
philosophes jeta les yeux autour de lui
avec stupeur et commença de tels dis-
cours que je dus le prier de se retirer
quelques instants avec moi dans les cou-
loirs pour éviter un scandale, que je sen-
tais imminent.
— 0 stupide ! disait Aristote, en frap-
pant violemment le sol du pied, ô stu-
pide! qui pense pouvoir te moquer impu-
nément d'un homme tel que moi en l'en-
traînant dans un établissement de bains,
en lui faisant croire que c'est là le plus
grand théâtre de la ville ! Et quelles sont,
par Jupiter, je te le demande, ces fem-
mes non vêtues et ces hommes en che-
mise dénués de tout ornement, sortant
apparemment du bain, qui, dans l'atmo-
sphère lourde des thermes, regardent
quelques vierges dansant la Cordace, tan-
dis que des esclaves habiles raclent sans
doute la sueur de leurs membres fati-
gués. T'ai-je dit que je voulais de nou-
veau prendre un bain ; et comment, par
Jupiter! veux-tu faire croire que ce bou-
ge peut, en aucune manière, tenir lieu
d'un grand théâtre où, suivant l'habitude,
(li Voir Comœdia du 22 Membre 1907.
les plus nobles expressions de la pensée
humaine se développât dans le cadre
naturel qui leur est familier, sous les
rayons étincelants de Phœbus. Si donc
tu J es, ne voulant pas être mis en croix
et avoir la langue arrachée avec des te-
nailles rougies par le feu, hâte-toi de me
conduire, s'il en est temps encore, dans
un théâtre digne de moi et situé en de-
hors des faubourgs, comme il convient.
Après quelques hésitations, et crai-
gnant de me brouiller à tout jamais avec
le grand homme, je me décidai à le con-
duire dans un music-hall pourvu d'un
jardin et exposé à souhait à la brise du
soir.
Cette idée fut couronnée de succès.
Quel que fût spn dédain pour les dimen-
sions restreintes de la scène, le philoso-
phe, convenablement installé dans une
loge garnie de coussins consentit à sui-
vre le spectacle que je dus lui expliquer
point par point.
Son attention fut vivement attirée par
les acteurs figurant, suivant l'usage, M.
Pelletan et M. Clemenceau, et son émo-
tion ne connut plus de bornes lorsque je
lui expliquai l'entrée grotesque et pré-
vue de M. Fallières.
— 0 chère barbe! je ne puis d'une
part que te remercier de m'avoir con-
duit dans le plus grand théâtre de cette
ville où véritablement, par Jupiter ! sont
flétris comme il convient les actes du
gouvernement, suivant la tradition de la
Grande Comédie.. Mais, d'autre part, il
me semble qu'étant donnée la violence
de ces critiques, la représentation ne va
point pouvoir s'achever et que le Tyran,
averti en temps utile par ses espions ai-
lés, va envoyer incontinent des soldats
pesamment armés, qui, sans pitié, passe-
ront tous les spectateurs au fil de l'épée,
à moins qu'ils ne cherchent leur salut en
suivant le chemin sacré d'Hellé ou de
la nymphe Sequane.
Et quant à moi, par Jupiter! bien
que regrettant une seconde fois la vie
qui me fut accordée, je saurai mourir
ainsi qu'il convient sans m'attacher aux
genoux de nos bourreaux, comme le
font les femmes et les petits enfants, car
il faut, oui véritablement, que la tyran-
nie de ce Fallières soit bien atroce pour
que tous ces hommes n'hésitent point à
risque* tour existence pour la flétrir tOrtF-
me étant désespérés. A moins toutefois
que la sédition militaire ne se prépare,
car voici que, très évidemment, les sol-
dats qui sont là me semblent gagnés à
votre cause; car, d'une part, j'en ai ob-
servé un qui emmenait au dehors de la
salle un spectateur qui protestait contre
ce genre de spectacle, et, d'autre part,
je ne le vois point s'étonner des injures
que l'on profère contre le Tyran. Et, cer-
tes, c'est là le signe le plus certain, par
Jupiter! de la sédition militaire.
Je m'efforçai d'expliquer encore au
philosophe quel était le jeu de nos ins-
titutions et que, nos gouvernants étaient
choisis par le suffrage même du peuple.
Aristote réfléchit longuement et s'é-
cria :
— Voici très certainement, ô Hom-
me-Parisien! le signe le plus certain que
je suis étant parmi des fous capables de
retenir seulement l'attention du méde-
cin ; car, d'une part, tu me dis que vous
êtes choisissant librement le Tyran, et
voici que, d'autre part, vous êtes cons-
tamment le raillant et, ce faisant, très
évidemment, vous êtes vous raillant
vous-mêmes de la façon la plus absurde
et donnant raison aux plus effrénés
partisans de la tyrannie. Car si, d'une
part, vous êtes raillant le Tyran que
vous vous êtes librement choisi pour le
seul plaisir de le faire, il est évident,
d'autre part, que lorsqu'un Tyran vous
est imposé par la force, les railleries
dont il est l'objet sont dénuées de toute
valeur. Et, par Jupiter ! n'est-il pas exact
de dire que votre République se range
ainsi non point parmi les aristocratiques,
ni non plus parmi les démocratiques,
mais bien plutôt parmi celles du genre
autophage, et que cette absence de res-
pect pour tout pouvoir légitime et con-
senti marque sa chute prochaine.
— Le programme! mon Prince? in-
terrompit obséquieusement un camelot
en se hissant sur le bord de la loge.
Le prince des philosophes s'arrêta net
et, souriant:
— Allons, fit-il, je vois que si res
citoyens ont perdu toute mesure et se
laissent prendre aux plus basses flagor-
neries des sycophantes, les véritables gens
du peuple, par contre, sont encore ca-
pables de discerner et d'honorer le vrai
mérite là où il se trouve.
Et, dans la main du camelot, le grand
philosophe laissa tomber quelques drach-
mes.
G. de PAWLOWSKI.
Echos
D
u bon tabac.
Le théâtre de la foire va renaître à
la fête de Neuilly. Queue sera sa situation
vis-à-vis de la Société des auteurs? Celle-ci
y percevra-t-elle des droits? En tout cas,
les droits à percevoir dans ces théâtres en
toile, pour méprisés qu'ils soient générale-
ment, ne sont pas encore si méprisables.
C'est Paul Féval qui, le premier, à notre
connaissance, toucha des droits d'auteur
dans un de ces établissements.
Il assistait à une représentation, combien
tronquée, du Bossu, dans un théâtre forain ;
l'entrepreneur du spectacle, ayant appris
que l'auteur était dans la salle, se fit pré-
senter et, par reconnaissance, offrit de lui
verser une somme de cinquante centimes
par représentation. Comme Féval souriait,
le directeur ajouta: « C'est peu, évidem-
ment, mais songez que nous donnons huit
représentations dans la journée et six pen-
dant la soirée. Ce sera pour vos cigates. »
Sept francs de tabac par jour, Féval, à
ce prix-là, pouvait fumer du caporal supé-
rieur. -
L
es feux de la rampe.
La cantatrice allemande Marie Gœtze
chantait, l'autre soir, L Or du Rhin, au théâ-
tre de Brème.
Au moment où elle se trouvait tout au
bord de la scène, un court-circuit se produi-
sit qui communiqua le feu à sa robe.
L'actrice vit parfaitement la flamme, mais
elle eut le sang-froid de terminer sa scène,
pour éviter au public une panique qui aurait
pu être meurtrière.
Ce n'est que dans la coulisse qu'elle fut.
secourue.
Voilà bien ce qu'on peut appeler graver
les feux de la rampe.
p
rojets.
Rencontré dans les couloirs du Palais-
Royal. la jolie Marthe Regnier. — Au cours
de la conversation que nous avons eue avec
elle, la charmante artiste nous a fait part
de ses projets d'avenir, qui sont fort beaux.
C'est ainsi qu'après la reprise de Jeunesse,
qui n'est pas encore certaine, la délicieuse
créatrice de Mademoiselle Josette ira faire
une courte saison à Banyuls-de-l'Orne, puis
s'étant tranquillement reposée à sa villégia-
ture habituelle, près de Cabourg, elle nous
reviendra, engagée pour toute la saison par
le Gymnase, pour créer le principal rôle
des pièces de MM. de Fiers et de Caillavet,
de Gavault, et d'un auteur dont le nom est
inconnu.
Et puis. Mais d'ici là le hasard nous re-
mettra sur le chemin de la jolie Marthe,
M
axime Gorki. librettiste.
Sait-on que Maxime Gorki, dont les
journaux ont annoncé l'arrivée prochaine à
Paris, pour applaudir soji ami Chaliapine,
est un fervent de musique et un dilettante
éclairé? L'illustre romancier termine en ce
moment un livret musical pour le jeune
compositeur Jean Nouguès, qui fut son hôte
cet hi ver à Capjrî. ,'
oe sèfa 19, n'esta 'pas; m opéra franco-
russe.
Vive l'alliance!
L
a bonne entente.
La scène se passe dans un théâtre
de genre a Berlin. Au fur et à mesure que
les répétitions avancent, les rapports entre
auteur et directeur sont devenus plus ten-
dus.
Il « ne reconnaît plus sa pièce », tandis
que le directeur déclare « qu'elle ne fera
aucun effet », à moins de larges coupures
et d'amputations héroïques. ,.
Or, il n'a aucun tempérament chirurgi-
cal et s'oppose, avec une farouche énergie,
à ce que l'on enlève le moindre bout de dia-
logue.
Aux dernières répétitions d'ensemble,
l'auteur occupe un fauteuil dans la salle; le
directeur, homme prudent, reste à l'avant-
scène. Manifestement, un dialogue intermi-
nable de l'acte principal paraît tout à fait
inutile et oiseux. Le directeur s'avance vers
la rampe et demande, en s'efforçant d'avoir
l'intonation polie: « L'auteur consent-il à
ce que l'on biffe cette scène? » Protesta-
tions furieuses de l'interpellé qui, cramoisi,
s'écrie: « Non, non, non!!! » Froidement,
le directeur se retourne alors vers les in-
terprètes: « Par conséquent, la scène est
biffée sans l'autorisation de l'auteur. »
Et ainsi fut fait.
c
ruelle énigme.
Au quatrième acte d'Hippolyte et
Aricie, dans un décor néo-romain, il n'est
pas sans joie de remarquer que des artistes
du corps de ballet en peplum dansent une
« matelotte ».
Les origines de cette danse sont-elles
donc si lointaines et si nobles que les con-
temporains d 'Hippolvte l'aient tant furieuse-
ment pratiquée?
Ou est-ce Rameau lui-même qui exigea
pour la représentation de son opéra* que les
théories des danseurs antiques évoluassent
de cette façon?
Ou est-ce simplement le régisseur de
la danse qui songea à varier. « éclectique-
ment » les divertissements /.d'Hippolyte et
Aricie? V
On ne sait pas!.
L
'auto de Thespis.
Avant-hier, une auto de 'place, char-.
gee ae six ou sept jeunes hommes et jeu-
nes femmes parcourait les rues à très vive
allure.
Et la bande bruyante poussait des cris:
« Conspuez Sarah!. Conspuez Sarah! »
Ils firent le tour du bois, puis la mani-
festation prit fin devant la maison même de
la grande tragédienne, aux cris souvent ré-
pétés de : « Conspuez. Sarah ! »
Nous nous approchâmes et nous recon-
nûmes, aux visages glabres des hommes et,
chez les femmes, à un air de famille qui
les apparentait avec madame Cardinal, de
jeunes espoirs. C'étaient les élèves de la
classe de Mme Sarah Bernhardt qui mani-
festaient contre l'absence, persistante à son
cours de « la Patronne'».
Le
vélo et la limousine.
Un de nos meilleurs confrères, - celui
que l'on voit toujours rouler dans Pans sur
son infatigable bécane, et qui, la saison
prochaine, doit faire jouer sur un théâtre
du boulevard une adaptation d'ouvrage cé-
lèbre dont nous avons déjà parlé, recevait
récemment une lettre d'une actrice plus
opulente que talentueuse, et qui, naturelle-
ment, mais saris le cdifcfiftttrj, fe priait de
lui réserver ùrt rôlei, ,' -
Il sortait hier du Vaudeville, toujours ju-
ché sur sa bicyclette, et s'engageait dans la
cohue de la Chaussée-d'Antin quand, tout
à coup, il se trouva pris, cerné, dans un tel
embarras de coupés, de fiacres, de taxis,
de camions et d'automobiles, qu'il dut, pour
ne pas être écrabouillé, sauter au petit
bonheur.
Un large marchepied lui tendait les bras
(façon de parler); il s'y réfugia d'un bond.
C'était celùi d'une splendide limousine dans
laquelle se prélassait, indolente et majes-
tueuse, une incomparable créature de luxe:
- Monsieur! monsieur! — s'écria-t-elle
à la vue de l'intrus - c'est inconcevable!.
un tel sans-gêne!. -
Un peu froid, trop froid peut-être, notre
cycliste de déclarer:
— Je .vous prie de m'excuser, Madame,
mais la nécessité. Au fait, n'est-ce pas à
Mlle Z., du théâtre X., que j'ai l'honneur
de parler?
- Parfaitement, Monsieur — riposta la
beauté d'un ton sec - je suis Mlle Z., du
théâtre X.
— En ce cas, Mademoiselle, je suis bien
heureux de faire votre connaissance, quand
ce ne serait que pour vous dire que j'ai bien
reçu votre lettre, mais que vous n'avez pas
du tout le physique de l'emploi pour. jouer
dans ma pièce du Vaudeville !
- La dame était, sous son fard, d'un rouge
de pivoine. Une éclaircie s'était produite
dans la cohue des voitures. Notre confrère
avait disparu.
L
es plaisirs du voyage.
Pendant le séjour du Président de la
Kepublique a Londres, les officiers et ma-
rins du croiseur français le Léon-Gambetta
assisteront à une matinée donnée en leur
honneur au Palace, un des plus grands
music-halls de Londres.
On espère que M. Fallières pourra passer
quelques instants à cette matinée, en reve-
nant, du banquet officiel qui sera donné au
Guild Hall- --
T
rès admirée, hier après-midi, à la gé-
, néraie du Clown, une délicieuse créa-
tion de Linzeler, le couturier du 112, bou-
levard Haussmann; c'est une ravissante
robe d'après-midi en tulle noir fantaisie sur
fond blanc. Corsage garni de filet brodé for-
mant bretelles et retombant sur les man-
ches en Alençon crème; jupe empire gar-
nie d'e .quilles filet brodé, terminées par des
franges de soie. -
L
e temps n'est pas loin où, de sa voix
magnifique, le bon chansonnier Marcel
Legay damait à tous les -"
montmartrois : • • *
Moulin-Rouge, Moulin-Rouge, ;
Pôiir qui" mouds-tu tous les jours,?
Marcel Legay chante encore sur la Butte
et triomphe dans un répertoire nouveau;
mais, bien, qu'il ne l'évoque plus aussi fré-
quemment, le Moulin-Rouge moud tou-
jours!. Il moud sans doute des farines
somptueuses, car le Moulin-Rouge-Palace
est trop petit pour contenir la foule des fins
gourmets qui s'y retrouvent tous les soirs.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain un article de:
PAUL DOLLFUS
,.. L' AFFAIRE DONIZETTI
Un coup de Théâtre.s
A la requête des "Héritiers", forts d'un jugement pai*
défaut rendu contre la S. D. A. D., un huissier a
"opérâ", hier, dans DOUZE établissements
de spectacles.
L' « affaire Donizetti » est entrée depuis
hier dans une phase nouvelle. Cette af-
faire, on le sait, est toute une histoire, et,
si l'histoire connaît parfois des tournants
dangereux, la journée du 16 mai sera cer-
tainement une date.
Mais résumons les faits :
Le 2 mai dernier, le Tribunal de CQm-
merce du département de la Seine se réu-
nissait, ainsi que nous l'avons dit du reste,
à la requête de MM. Gaëtano Donizetti et
Giuseppe Donizetti, représentés par Me
Taupin, agréé.
Ces messieurs demandaient quelques
comptes à la Société des Auteurs et Com-
positeurs dramatiques, dont le siège était
à cette époque rue Hippolyte-Lebas, n° 8.
M. Borderel, juge, président d'audience;
MM. Mauffroy et Carré, juges: MM. Troul-
lier, Franck, Carpentier, Marcoux, juges
suppléants, ne purent que constater l'ab-
sence des représentants de la S. D. A. D.
et rendirent un jugement par défaut.
Ce jugement a été signifié avant-hier 15
mai à la Société des Auteurs. Le voici ré-
sumé en quelques lignes:
« La Société des Auteurs et Compositeurs
dramatiques est tenue de rendre compte à
MM. Donizetti, en leur qualité d'héritiers et
représentants ou ayants droit de Donizetti,
« des droits d'auteurs qu'elle a perçus, tant
en France qu'à l'étranger, depuis son der-
nier règlement de compte de 1865, sur les
représentations des œuvres de Donizetti, et
en particulier sur les représentations de Lu-
cie' de Lammermoor, La Favorite, La Fille
du Régiment et Don Pasquale ». Elle est
condamnée à payer le montant de ces droits
d'après le compte qui en sera dressé con-
tradictoirement entre les parties, avec inté-
rêt à 5 du jour de chaque encaissement,
et, dès à présent, et par provision, devra
payer aux « héritiers » la somme de dix
mille francs en compte et à valoir. »
Or, les héritiers Donizetti ont de la mé-
fiance, comme le condamné par persuasion,
eyt ils l'ont bien Fn'ofiirÊ HréF en signitrant,
par exploit de Me Brionne, huissier, 33,
Faubourg-Montmartre, leurs intentions à
douze directeurs de théâtre de Paris.
Leu';"mandataire s'est,- en effet, présenté
à l'Opéra, à la Comédie-Française, à l'Opé-
ra-Comique, à la Gaîté-Lyrique, à la Porte-
Saint-Martin. au Vaudeville, au Gymnase, à
la Renaissance, aux Folies-Dramatiques, aux
Nouveautés, à l'Athénée et au Théâtre Ré-
jane. Il a remis aux directeurs, ou « person-
nes à leur service », une feuille de papier
bleu dans laquelle MM. Donizetti déclarent:
« Que la Société des Auteurs et Compo-
siteurs dramatiques ayant manifesté la vo-
lonté de retarder, par tous moyens de pro-
cédure, le règlement des sommes dues et
leur revenant, ils ont le plus grand intérêt
à prendre dès à présent des mesures con-
servatoires, dans l'ignorance où ils sont de
ce que peut devenir ladite Société, leur dé-
bitrice. »
Ils s'opposent donc formellement à ce que
les directeurs de théâtre remettent à la
S. D. A. P. la part de un pour cent qui
lui revient sur les recettes brutes de chaque
représentation.
Ils s'opposent, en outre, à ce que les
« signifiés » versent entre les mains de la
S. D. A. P. la recette des représentations
données exclusivement au profit et bénéfice
de celle-ci.
Ils déclarent enfin, dans leur exploit, -que
la présente opposition est ainsi faite « îfeur
sûreté, conservation, et avoir paiement: 10
de la somme de dix mille francs montant de
la provision allouée par le jugement suc-
visé; 2° toutes les sommes dues à raison
des droits perçus depuis le règlement de
compte remontant à 1865, pour lesquelles
la Société est également condamnée par le,
dit jugement; 3° et celle de 2.500 franc-
pour frais évalués ».
Et voilà!
Que va-t-il se passer maintenant?
-Le Président de la République francisa
a mandé et ordonné à tous huissiers, « saf,
ce requis, de mettre le jugement à exécu-
tion, aux procureurs généraux et aux pro-
cureurs de la République près les Tribunaux
de première instance, d'y tenir la main, à
tous les commandants et officiers de la forcc-
publique de prêter main forte lorsqu!ils.on
seront légalement requis ».
Contre toutes ces puissances réunies —
qui se trouvent d'accord cette fois avec le
simple bon sens — que pourra faire la So-
ciété des Auteurs ?
ROBERT OUDOT,
Ce qu'on en pense
'-- dams leâ théatrét
Nous avons fait hier soir une rapide -en-
quête dans les principaux théâtres sur lai
portée de cet incident.
Nous devons déclarer que nous avoirs
rencontré partout la plus complète indiffé-
rence.
Plusieurs administrateurs paraissent mê-
me avoir très mal compris de quoi il s'agis-
sait et semblent s'imaginer qu'on leur ré-
clame seulement des droits sur les ouvragea
de Donizetti qu'ils pourraient représenter.
En tout cas, pensent-ils, payer à la So-
ciété. ou payer aux héritiers Donizetti est
toujours payer.
Alors?.
,', THÉÂTRE FEMINA
UIDIN Comédie en Vers, en trois actes-,
D , de M. Francis de Croissef
(Paul Boyer. phot.) Qabrielle Dorziat
Gaston Duboso
- oanche ToUtain
-
Marie-Louise Herrtfuet Pierre Stemper André Bruld
Je fùs de ceux, assez rares, qui protestè-
rent tout de suite, dès juin 1901, voilà tan-
tôt sept ans, contre l'injuste et vilain malen-
tendu privant Chérubin de sa première à la
Comédie-Française. Et ce ne fut pas com-
me fiche de consolation à l'auteur, si cruel-
lement déçu, mais en toute sincérité, que
je lui promis alors une belle revanche, cer-Y
tain Que l'œuvre pouvait attendre et ne per*
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