Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-02-29
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 29 février 1908 29 février 1908
Description : 1908/02/29 (A2,N152). 1908/02/29 (A2,N152).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76465365
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
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1 "Y,.
2' Annèe. - - No 152 (Quotidien',
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ÈÀ ffîumëro : à centimes
Samedi 29 Février 19002
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Rédacteur en Chef G. de PAWLOWSKi
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Bouleuard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA.PARIS
ABONNEMENTS:
v UN AN 6 MOIS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Bouleuard. Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA*PAR!$
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOfS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
La Cerise
« .Vous avez mangé la cerise,
Je vous en ferai avaler la queue ».
(Le Trésor des Ménages, 1818.)
.11 se sent guilleret, de belle hu-
meur; parbleu! la répétition annoncée
n a pas lieu et le voilà libre à trois
sures de * l'après-midi..
f - Lansquet, mon ami, que vas-tu
aIre de ta journée?
Lansquet sourit au soleil, hume l'air
Printanier à pleins poumons. Aussi bien,
ce tragédien de premier ordre à deux
cents francs par mois, trouve-t-il pour
ne fois l'existence bonne, surtout
quand le théâtre de Montmartre lui oc-
troie quelques heures de liberté.
f - Lansquet, mon ami, que vas-tu
faire de ta journée?
Il irait bien au café, mais ce n'est
Point l'heure de la manille. Faut-il
aller chercher des sensations piquan-
ts de vertige sur le pont des But-
es-Chaumont? C'est loin. Ou se payer
e tour de Paris dans le chemin de fer
de Ceinture? En somme, comment dia-
Ie tuer le temps? Cette sacrée répéti-
"Dn aurait franchement bien pu avoir
leu! Mais il y songe: sa femme!.
Sa bonne Adèle.! Dire qu'il n'y pen-
sait pas. Certes, c'était, ou jamais, le
moment de lui faire une surprise.
- A la cerise, la belle cerise, à sept
ous la cerise! crie la marchande qui
Pousse sa rampante charrette dans les
Jambes de Lansquet qui ne lui en garde
Pas rancune et même sort sept sous de
a Poche en échange desquels il reçoit
Un cornet rempli de boules rouges.
- Ça fera plaisir à Adèle, pense-t-il.
Et, pour voir si les cerises sont vrai-
Ir.ent bonnes, il en mange en montant
Escalier.
I-ansquet grimpe quatre à quatre.
lan r il glisse sur un palier, s'étale
ec les cerises, qui s'éparpillent.
diable, les cerises! Les voilà au rez-
"'chaussée et Lansquet atteignait juste-
ent son cinquième; il n'y en a plus
nU Une au fond sac." Zut! Lansquet
ne descendra pas. Adèle mangera la
e j'aère.
t Lansquet entre chez lui en sifflotant.
* * Porte de la chambre à coucher est
Verte- Il s'arrête sur le seuil. Un
OUISsement.
d Sur le guéridon, un képi; au dossier
de la chaise se moule un dolman ; par
terre9 une culotte rouge à bandes noires
tassée sur elle-même en tire-bouchon.
l' e Peignoir d'Adèle pend à la clef de
armoire à glace. Le désordre règne
nS les « dessous » épars sur le. plan-
cher. Un sabre, un grand sabre est étalé
à Plat sur les bras du fauteuil.
c Cela est surprenant et, toutefois,
ompréhensible: Adèle a un amant!
Adèle et son amant sont justement
en s dans le lit, dans leur lit à Adèle
!tt à Lansquet. dans son lit à lui, Lans-
q et, car ce lit est son bien il le pos-
aIt avant son mariage.
C'est un peu raide !
f Adèle pousse un cri et s'enfouit sous
es couvertures. Son amant se lève. Il
comme d'usage, en chemise et, pour
a bienséance, en caleçon.
Lansquet demeure interdit à l'entrée
de la chambre. Que va-t-il faire? Ses
regards vont au képi, dont les galons
d' Or reluisent au soleil. Lansquet compte
ues galons : Trois. Un capitaine. Adèle a
c, capitaine pour amant! Un capitaine,
c' est quelque chose, mais il n'en est pas
moins vrai que.
— Je me tiens à vos ordres, mon-
sieur! déclare le capitaine, très digne
bien qu'en caleçon.
VOilà Lansquet bien avancé, encore
q e ce soit assez flatteur pour un simple
ç0Jïïedien de Montmartre d'avoir un ca-
aine à ses ordres.
hlansquet, qui a joué le classique.
c erche, dans sa mémoire, quelque
cho Se a répondre à ce capitaine. Mais
rn n y a pas de souffleur et Lansquet, qui
anque de mémoire, ne trouve rien.
D'ailleurs, il est hypnotisé par le
grand sabre. S'ils se battent en duel,
comme dans Le Bossu, par exemple, lui
aussi Lansquet aura un grand sabre.
Belle affaire, s'il ne sait pas s'en ser-
vir! andis que le capitaine, vraisembla-
blement. Mieux vaudrait que Lansquet
fût seul à l'avoir. A tout hasard, il le
prend
Lansquet a bondi vers le fauteuil, a
dégainé: l'arme apparaît luisante, re-
cfoutahi et pointue, dangereuse dans.les
niai ç maladroites de Lansquet. Le ca-
Pitain a légèrement pâli.
Lansquet sent qu'il va pleurer, car
d'attendrissantes pensées lui montent du
cœur à l'esprit. Lui qui était si content
de rentrer Pour voir Adèle; lui qui, au
lieu Jller au' café, avait acheté sept
sous de cerises!. Il n'en reste plus
qu'une!. Dieu de Dieu! ça n'est pas
Adèle lUI la mangera! Adèle, l'infidèle!
Adèle, la
Où est Cette cerise? Tiens, elle est
tombée par terreî Lansquet, machinale-
ment, veut, du bout du sabre, la pousser
dans la cneminée, mais voici qu'elle se
plante. à la pointe de l'arme. Ah! par
exemple ! Voilà Lansquet qui embroche
des cerises, .maintenant. Si seulement
c'était le capitaine! Mais, au fait, c'est
Lansquet qui a le sabre et le capitaine
n'en a pas. Attends un peu, capitaine de
malheur ! Lansquet prend sa pose de la
grande scène du « trois », se met en
garde.
M'as-tu vu? Oui. Adèle, justement,
risque un œil terrifié hors de la couver-
ture. '-,
Ah ! qu'il est beau, Lansquet, devant
le capitaine, avec son sabre moucheté
par une cerise, comme s'il. tenait, au
bout de l'arme, un cœur sanglant.
Une idée, soudain.
— Mangez ! fait-il.
Le capitaine recule d'épouvante. Sur
la lèvre de Lansquet erre un mauvais
rictus : -
— Mangez, vous dis-je!
La cerise effleure la moustache de
l'officier. Celui-ci, à force de reculer, a
rencontré le mur.
— Faudra-t-il donc vous enfoncer la
cerise dans la bouche? interroge Lans-
quet, cruel et railleur.
Que va-t-il se passer? On n'en sait
rien. Le capitaine n'ose le prévoir.
Adèle ne veut y penser. Lansquet lui-
même n'en sait encore rien.
La cerise approche des lèvres. élit
les touche ; son contact huniide et frais
fait frissonner. Lentement, les lèvres
s'ouvrent, la cerise s'enfonce entre les
dents. Le capitaine, les yeux mi-clos, va
défaillir. lorsque Lansquet lâche le
sabre, qui tombe et rebondit en tinta-
marre sur le plancher.
Et Lansquet de déclamer, magna-
nime :
— Vous pouvez sortir maintenant,
Monsieur; mais souvenez-vous que'" si
vous dites un mot de cette aventure; que
si jamais vous vous présentez chez moi :
vous avez mangé la cerise. je vous en
ferai avaler la queue !
Pierre SOUVESTRE.
Nous publierons demain un article de
NOZIÈRE
L'arbre - de la scierice
Les savants, qui, ne respectent rien, ont
publié, dernièrement, des tables dynamo-
inétriques d'après lesquelles il appert que
la torce des athlètes augmente dans une
notable proportion lorsqu'il se trouve, parmi
les spectateurs, des dames qui les re-
gardent. *
Poussant plus loin leur comparaison, ils
ont même remarqué que cette action était
analogue à celle de l'acide formique, mais
que la puissance féminine dépassait de
beaucoup celle" des fourmis.
Un simple examen des faits prouve que
les lutteurs ne sont pas seuls avantagés sur
ce point et que les littérateurs eux-mêmes
ont trouvé, de tout temps, de précieux en-
couragements dans cette collaboration tout
indirecte ébauchée dans le primitif Eden.
Qu'il s'agisse de La Fontaine ou de Jean-
Jacques Rousseau; qu'il s'agisse de la
Rouennaise qui, de l'aveu même de Cor-
neille, le fit devenir poète; qu'il s'agisse de
nos meilleurs auteurs contemporains; que
l'on me permettra de ne point citer, il est
évident que cette heureuse influence ne
s'est jamais démentie.
Tout le mondé sait, en effet, que les pen-
sées nouvelles naissent de l'association des
idées, et cette association n'en est que meil-
leure lorsqu'elle s'extériorise.
A ce propos, il faut bien reconnaître ce-
pendant que nos littérateurs actuels se
trouvent particulièrement désavantagés et
que les salons d'aujourd'hui ne leur four-
nissent plus le teuain de culture qu'ils of-
traient autrefois.
Sane vouloir critiquer l'homme éminem-
ment respectable qu'est l'actuel chef de
l'Etat, il est bien évident que nos meilleurs
salons ressemblent assez à ceux de l'Elysée
et que les encyclopédistes s'y trouveraient
quelque peu dépaysés. Quelle que soit l'ha-
bileté que montrent nos Saint-Cyriens, en
jouant au ping-pong, il faut bien recourir
au bridge pour masquer le vide des conver-
sations actuelles et lorsque, par nasard, un
artiste, s'aventure dans ces milieux essen-
tiellement financiers, il y devient un objet
de curiosité analogue au marhadia de Bir-
manie ou .aux Esquimaux du Jardin d'Ac.
climatation. C'est tout juste si la maîtresse,
de maison, en fin de soirée, ne lui offre
pas un cachet pour son dérangement.
Un homme célèbre invité dans de pa-
reilles conditions, il y a de cela quelques
années et sentant qu'on attendait de lui
quelque chose d'extraordinaire, s'avisa, mé-
thodiquement et paisiblement, de démonter
entièrement le piano.
Cela n'eut point, lorsqu'il eut fini, le
succès qu'il en espérait et tant d'ingratitude
le révolta. On attendait, en effet, quelque
chose d'extraordinaire de sa part et, vérita-
blement, il ne pouvait mieux taire.
Est-ce incapacité de la part des gens du
monde? N'est-ce point plutôt — car il est
difficile de l'admettre dans de telles pro-
portions — simple hypocrisie ou manque
absolu de simplicité? Je le croirais plutôt.
Il y eut, autrefois, pour tenir des salons lit-
téraires avec succès, des femmes qui n'é-
taient qu'accueillantes ou bonnes, sans que
la nature les ait particulièrement avanta-
gées au physique ou au moral, et cela leur a
suffi pour créer autour d'elles un mouve-
ment^littéraire durable et profond. Seule-
ment, 'elles avaient derrière elles tout un
glorieux. passé pour le faire et elles n'é-
taient point obligées, comme aujourd'hui,
de défendre, à coup d'orgueil et de bluff,
une situation récemment acquise par de
hardis coups de mains.
G. DE PAWLOWSKI. i
1 Échos
Ce soir, à huit heures, à l'Odéon, pre-
mière représentation de Ramuntcho, pièce
en cinq actes et dix tableaux, de Pierre Loti,
musique de scène de Gabriel Pierné.
Ce soir, à huit heures un quart, au théâ-
tre Sarah-Bernhardt, reprise de L'Aiglon,
pièce en six actes, d'Edmond Rostand.
Ce soir, à huit heures et demie, au Châ-
telet, répétition générale de La Revue du
Châtelet, pièce à grand spectacle en trois
actes et vingt-huit tableaux, de De Gorsse
et Nanteuil, musique de Marius Baggers.
Ce soir, à huit heures et demie, au Tria-
non-Lyrique, première représentation (à ce
théâtre) de Zampa, opéra-comique en trois
actes, de Melesville, musique de F. Hérold.
MM. les critiques, soiristes et courriéris-
tes seront reçus à la représentation de lundi.
Ce soir, à huit heures et demie, au théâ-
tre Cluny, première représentation (à ce
théâtre) de La Mariée du Mardi-Gras, folie-
vaudeville en trois actes, de Gtangé et Lam-
bert Thiboust, et de Les 37 sous, de Al.
Montaudoin, vaudeville en un acte, de Labi-
che et E. Martin.
MM.- les critiques, soiristes et courriéris-
tes seront reçus au contrôle sur présenta-
tion de leur carte.
Ce soir, à huit heures et demie, au théâ-
tre Molière, première représentation de La
Bonne Entente, comédie en un acte1 de Mau-
rice Lefèvre.
Cet après-midi, à deux heures et demie,
à la Scala, répétition générale, et ce soir,
à neuf heures, première représentation de
Cinq minutes d'amour, opérette à spectacle!
en six tableaux, de Ch. Esquier, musique.
de Christiné. (
Ce soir, à neut heures, à l'Eldorado, pre-
mière représentation de Cordon sanitaire,
un acte d'André de Lorde et G. Montignac,
et Bat-Flanc, un acte de Bonis-Charancle.
L
e Foyer de discorde.
Hier matin, un de nos oIns imnnrtants
confrères annonçait tumultueusement que
M. Claretie allait suspendre les répétitions
du Foyer à la Comédie-Française. : c.
Nous n'avons pu joindre dans la journée
ni M. Mirbeaii, ni M. Ciareti^v mais nous
avons pu rencontrer Mme Mirbeau, qui
nous a autorisé à démentir énergiquement
cette information trop sensationnelle.
Il est possible, il est même vrai que M.
Claretie est choqué par l'audace de cet ou-
vrage, où M. Mirbeau attaque vivement et
à visage découvert des gens très considéra-
bles.
Mais la pièce est reçue, elle lera jouée.
Le premier acte est déjà""mis en sqène et le
travail des répétitions se poursuit très acti-
vement.
LE QUATRAIN DU JOUR
LEVER D'ÉTOILE
On dit que « la belle Lison »
Va tâter du théâtre et cherche un acte en prose.
Le titre est trouvé, je le lui propose ;
C'est: L'Affaire de la poison!
1
'JW
1 reste.
Nous avions raison de douter et de ne
pas accueillir aussi complaisamment que
certains de nos confrères une information
au moins prématurée.
Voici la lettre que M. Arthur Meyer écrit
à M. Duquesnel :
Mon cher Duquesnel,
Quoique certaines attaques soient le « ca-
suel » des hommes en évidence, je ne voudrais
pas que mon silence accréditât des rumeurs,
nées de la malice des uns, propagées par la
malveillance des autres. Je n'ai jamais songé
- est-il besoin de le dire? — à me séparer
de vous, pour cette double raison, c'est que je
ne le trouverais pas bon et que mes lecteurs le
trouveraient très mauvais.
Cordialités,
Arthur MEYER.
Nous ne serons donc pas privés des sa-
voureuses chroniques de M. Duquesnel.
Ç'eût été, d'ailleurs, grand dommage..
M.
-
le Préfet et les tournées classiques.
Le fait est d'hier. Il s'est cassé
dans une ville du Midi — naturellement.
Une tournée de Paris — Baret, pour ne
pas citer de nom — qui vient de promener
Britannicus en province avec succès, arrive
dans un vieille cité célèbre par une chan-
son de Désaugiers.
Le commissaire central, à peine la tour-
née débarquée, lance aux trousses de son
administrateur tous les agents de la ville.
Ils sont huit qui courent partout, visitent
hôtels et cafés d'un sourcil soupçonneux.
Enfin ils réussissent à mettre la main sur'
l'acteur. Ils l'amènent comme un malfai-
teur, par la force, au bureau du commis-
saire central. Lors, celui-ci, avec un doux
sourire :
-
— Voilà, c'était pour vous dire que M. le
Préfet désirait deux places de faveur pour
ce soir!.
Quelle charmante ville, quel bon commis-
saire et combien le Préfet a l'amour des
classiques !
D
usausoy, joaillier expert, 4, boulevard
des Italiens, achète touiours rnmn.
tant : bijoux, diamants, perles et, pierres
fines. Il donne presque toujours une plus-
value sur le prix offert par n'importe quelle
maison. 1
p
1 )J~*
ublicité.
Un iel1np !:IÍ1tpI1r l'rrn.n,":. ,::¡,,-'" ..--
pièce est actuellement représentée" a trouvé
un moyen ingénieux de satisfaire à la fois
son goût pour le champagne et son pen-
chant pour-l'économie.
Il a tout simplement fait dire à l'un de
ses personnages, qui va boire:
-: Un verre de Champagne, mon cher?
Du X. (marque connue)— naturellement.
C'est le meilleur.
Et il reçut de la maison favorisée une
caisse de cent bouteilles. -
Mais quelle ne fut pas sa surprise d'en-
tendre, l'autre soir, l'acteur qui interprète
ainsi son personnage-réclame, répondre à
son invitation:
— Non, mon cher, pas de cette saleté-là.
On ne boit plus que du Y. (autre marque
connue).
Ajoutons — sans nous préoccuper du
nombre de bouteilles offert par la maison
Y. à l'auteur — que le meilleur Champa-
gne est sans contredit le Champagne. (la
case est encore à louer).
s
les mots:
Vous n'ignorez pas que l'illustre
doyen du Théâtre-Français méprise les piè-
ces légères. Le moindre succès de comédie
sur la scène qu'il illustre le met hors de
lui. 1
Après la représentation d 'Œdipe-Roi, il
recevait l'autre jour, dans sa loge, les com-
pliments de ses admirateurs.
, Il les écouta modestement et, prenant un
temps, il s'écria, avec la voix que vous
savez:
— Tout de même, Œdipe, c'est autre
chose que. L'Amour brûle!
L'Amour brûle pour L'Amour veille!.
M. Mounet-Sully ne connaît que les classi-
ques.
E
n sortant du théâtre, allez souper chez
f Paillard, le restaurateur à la réputa-
tion mondiale. -
Vous trouverez chez lui une table au con-
fort tout moderne et vous serez en compa-
gnie de ce que le Tout-Paris compte de cé-
lébrités. -
L
a Parisienne tient plus à ses dents qu'à
ses diamants. Aussi, pour conserver
intactes les perles enchâssées dans le corail
de ses gencives, emploie-t-elle de préfé-
rence la pâte dentifrice glycérine Geilé Frè-
res.
L
es voitures Unie sont cette année les
t voitures à la mode. Et c'est justice,
car ce sont bien les plus silencieuses, les
plus économiques, les plus pratiques en un
mot.
Hier, à la sortie du Vaudeville, nous
avons eu la curiosité de compter les voitu-
res de cette marque. Nous en avons trouvé
dix-sept. Bien entendu, dans ce chiffre ne
figurent que les voitures de maître. C'est
un' joli record.
o
tf d'eatusofit mé-
chants, et que, par contre, les bu-
veurs de vin sont parés de multiples qua-
lités.
Aux amateurs de vrai vin, de vin naturel,
nous donnons le conseil de faire leur pro-
vision chez Truchon et Leclerc, 36, rue des
Nuits, à Paris-Bercy.
A
vant d'assister au bal de la bijouterie,
L qui a lieu ce soir au Grand Hôtel, de
nombreux couples se sont donne rendez-
vous pour dîner au restaurant Lapré, rue
Drouot..
Maurice, le roi des maîtres d'hôtel, a
préparé à leur intention des mets exquis
qu'ils pourront arroser de vins sans pareils.
Voilà plus qu'il n'en faut pour danser
toute une nuit sans fatigue.
NOUVELLE A LA MAIN
L
a saison de M. Antoine sera des plus
f brillantes. Après Son Père et L-Ap-
prentie, il monte Ramuntcho.
On ne saurait être mieux. loti!
Le Masque de Verre.
Une extraordinaire
innovation commerciale
de Charron
On sait toute l'importance qu'a prise en ma-
tière d'industrie automobile la publicité faite
par la clientèle elle-même.
Comme le dit don Gormas, dans Le Cid, les
discours sont bons et les raisonnements ne sont
pas mauvais, mais
« Les exemples vivants sont d'un autre pou-
[voir! »
De même, il est très intéressant de lire la
description d'une voiture, de se rendre compte
des raisons qui ont motivé tel choix, mais c'est
autrement indiscutable de la voir marcher, d'en
posséder une ou de connaître quelqu'un qui en
possède une.
M. Charron, qui s'est toujours montré non
seulement merveilleux commerçant et sérieux
industriel, mais avisé psychologue, a compris
et estimé cette précieuse collaboration de la
clientèle, et c'est pourquoi il vient de décider
une mesure qui est, à elle seule, toute une pe-
tite révolution dans le monde de l'automobile.
Vous habitez Veulettes, et vous voulez ache-
ter .une voiture automobile. Il n'y a pas encore
de représentant de Charron à Veulettes, et il
s'agit, bien entendu, d'un petit trou, car la
Charron est, on le sait, la favorite de nos
grandes plages; vous vous décidez et vous
achetez une Charron.
— Vous allez me rendre un service, dit
Charron, vous allez porter mon nom là où il
n'est point encore, vous allez me servir d'exem-
ple vivant, et, tout en contribuant à votre agré-
ment, vous contribuerez à mes affaires; il est
juste que je vous en tienne compte. Je ne vous
demande pas de chanter mes louanges; ceci me
regarde, à moi de vous fournir la bonne voi-
ture, mais vous circulez; on dira: « Tiens,
quelle est cette voiture? — Une Charron. »
Je suis persuadé, comme je crois ma voiture
excellente, que cette publicité me sera utile.
Aussi je vous en tiens compte et vous fais des
conditions spéciales. Ecrivez-moi, je vous les
enverrai. Ce n'est pas tout. Votre exemple a
été suivi. Vous n'en savez peut-être rien. Vous
avez dit un jour à votre ami, au cercle: « Je
suis content de ma voiture. » Ou bien vous
l'avez emmené en promenade. Il été épaté. Il
achète une Charron.
« Vous avez été mon agent inconscient, dit
Charron, et je vous fais à vous et à tous ceux
qui ont une Charron dans votre ville une ris-
tourne sur le lord de l'a voilure, »
Telle est l'innovation de Charron, simple et
juste, innovation fondamentale, profonde, qui
va, nous en sommes c.ertam¡, bouleverser le
marché françair.
UN PAVÉ DANS LA MARE AUX CANARDS
*
Un scandaleux
abus de confiance
'—Vous rie trouvez pas, Monsieur, que
lorsqu on désire connaître « vrai-
ment » les choses, on arrive à com-
mettre bien des vilenies, que le mon-
de indulgent masque sous le nom de
« rosseries ».
- Je suis absolument de votre avis,
Madame.
(Interview de Mme Lara,
14 février 1908.)
Las des « potins » et des « sous-enten-
dus » que l'on murmurait autour de lui,
Comcedia se résolut à connaître la vérité;
non cette vérité banale que l'indulgence du
monde sait parfois répéter, mais cette vé-
rité brutale qui ne mâche pas ses mots, et
cela de la bouche même des artistes que la
critique quotidienne agaçait, et de ne s'a-
dresser qu'aux pensionnaires des Théâtres
Subventionnés, puisque à eux seuls le jour-
LE COUPABLE
M. Mainsonneuve
,'. Correspondant de «L'Intetnatioiial KevW»
''lit "A .-'" - ,,"- --* *--- - 1. - 1
nal consacre, chaque jour, un compte rendu.
Il fallait trouver un subterfuge; il ne fal-
lait pas qu'un collaborateur étranger au
journal recueillît ces précieuses informa-
tions qui montraient tout à nu l'âme eh-
tachée d'erreurs des comédiens et des chan-
teurs. Il fallait aussi qu'aucun soupçon ne
pût planer sur celui chargé-de cette en-
quête. Ce fut alors que l'idée est venue
d'emprunter la correspondance d'une « ima-
ginaire revue à paraître en^n^leterre »,
et de marquer ainsi la personnalité du re-
porter. Un cent de cartes de visite et de
l'audace, et la chose fut faite.
Donc, !e dernier jour de janvier et les
premiers jours de février, les principaux ar-
tistes des théâtres subventionnés — exac-
tement cinquante-huit - reçurent cette let-
tre:
« Monsieur (ou Madame),
« Mon directeur de Londres me prie,
ayant l'intention de créer, dans sa Revue
qui doit paraître prochainement, une partie
de critique théâtrale, de faire une enquête,
à ce sujet,- auprès des principaux artistes
de Paris.
« Seriez-vous assez aimable pour m'ac,
corder une entrevue et me faire savoir à
quelle heure je pourrais vous rencontrer?
« Dans l'attente d'une réponse favorable,
veuillez croire, etc. *
« Thomas MAISONNEUVE,
« Correspondant parisien de l'Inter-
national Review. »
Evidemment, c'est une « série d'abus de
confiance n que je viens de commettre; il
n'y a pas, hélas! d'autre nom à donner à
des actes qui consistent à écrire d'abord,- à
se présenter et à être reçu ensuite sous un
titre qui ne vous appartient pas et à fein-
dre d'ignorer un journal auquel on colla-
bore. -
Cet abus de confiance, je l'ai commis ou-
vertement, loyalement — le cliché ci-contre
en fait foi — je n'ai pas contrefait mon écri-
ture détectable, je ne me suis pas « ma-
quillé » comme les héros de Balzac, Carlos
Herrera ou Cauquoèlle, ou même comme
mon ami Brasseur, grime génial des temps
modernes. Non, j'avais ma figure de tous
les jours. J'ai la conscience d'avoir agi
courtoisement avec les hommes, galamment
avec les femmes.
Certes, bien des foi.s i.l .m'a fallu répri-
mer des gestes de surprise, écouter des ca-
lomnies ou de perfides médisances avec un
air d'innocence que toutes les interviews,
même faites « pour l'étranger », ne me ren-
dront pas. Le seul regret que j'ai éprouvé,
c'est d'être obligé de « renier » un journal
où d'excellents camarades me font la be-
sogne aimable, mais ne souffre:t-on pas tou-
jours un peu quand on veut connaître cette;
chose si rare: la vérité.
Si ces interviews paraissent strictement
rapportées, ce n'est nullement par esprit da
vengeance.. Il ne faut pas que les artistes.
considèrent Comœdia comme un épouvan-
tail, mais comme un ami parfois sévère,
parfois moqueur, parfois « rosse », mais
n'est-ce pas le fait d'un ami véritable que
d'avoir la liberté de langage et d'écriture.
Comœdia est un ami désintéressé qui a
quelquefois — d'aucuns m'ont dit trop sou-
vent — la phrase un peu dure, niais qui
connaît suffisamment sa rhétorique' pour
leur offrir, quand il le juge à propos, la plus
belle gerbe de fleurs qui soit au monde.
J'ai la conviction que ceux ou que celles
qui m'ont si aimablement reçu n'auront con-
tre moi nulle haine, parce qu'ils reconnaî-
tront que c'est « pour leur bien » et pour
dissiper de fâcheux malentendus que j'ai
agi ainsi. J'attends, confiant, une absolution
pleine et entière.
Comœdia est, « avant tout », un journal
sincère. Le ton indépendant de ses articles
effarouche les artistes accoutumés à plus de
douceurs, à plus de louanges, disons le
mot, à plus « de pommade ». Eh! parbleu !
Comœdia n'est pas fait avec des « commu-
niqués » ou des « notes » envoyés par les
intéressés. C'est à peu près le seul qui ne
les fasse pas payer, et c'est le seul qu'ils
accusent.
Je ne parle pas de l'enfantillage qui con-
siste, de la part des ennemis de Comœdia,
à s'écrire les uns aux autres des lettres de
complaisance. Non, j'ai recueilli des accusa-
tions plus graves dont je parlerai tout à
l'heure.
Dès maintenant, je tiens à dire que Co-
mœdia serait enchanté d'avoir des « preu-
ves sérieuses, même orales »: qu'on lui
présente un' artiste qui. puisse déclarer
« qu'il a payé quelque chose ». Ce jour-là,
il sera heureux de déposer une plainte con-
tre l'escroc qui lui aura volé du papier à
lettres ou se sera servi de son nom..
Rien n'empêchait Comœdia de s'établir
sur les bases habituelles et de faire payer
les portraits et les communiqués. Il ne l'a
pas fait, car cette méthode empêchait l'au-
torité et l'indépendance nécessaires auprès
du public pour un journal à grosse vente,
et le mettait seulement au rang d'une petite
rubrique semblable à celle des autres jour-
naux.
Puisqu'il est dit que Comœdia doit lut-
ter constamment contre de véritables sotti-
ses, pour dissiper toute équivoque il reste
acquis qu'il fait de la « publicité commer-
ciale » n'ayant naturellement rien à voir
avec le monde des théâtres, puisqu'elle ne
s'adresse « qu'aux entreprises purement in-
dustrielles ».
Ceci peut paraître une naïveté, mais, de-
vant les insinuations et les équivoques des
lettres fréquentes qu'il reçoit et qui lui re.
prochent « d'égarer l'esprit qui a aidé à sa
formation », il se devait de faire cesser les
racontars qui prétendent que c'est t'artiste
qui paie les portraits publiés pour des pro-
duits de consommation. Nous sommes telle-
LES TROIS ACCUSATEURS
M. Sevellhao
de l'Opéra-Comique
M. Esealats
de l'Opéra
M. Nulbo
de l'Opéra
ment débordés de stupidité quotidiejrne que
l'on m excusera d'être obligé de le dire.
Ceci écrit, et il fallait l'écrire, je passe
aux interviews intéressantes que les artis-
tes ont bien voulu m'accorder
L'Enquête
Invariablement, je posais ces deux ques-
tions: 1° Comment trouvez-vous que la cri.
tique est faite à Paris? 2° Comment dési-
reriez-vous qu'elle soit faite pour le bien
des artistes et du public? Puis, dans le cou-
rant de la conversation, je glissais d'une
VOIX dégagée mais curieuse: Et Comœdia.
quelle est votre opmitfn sur ce journal qui
est le seul qui s'occuptiPexclusivement de
théâtre?
«
A la Comédie-Française
C'est le soir. Je me présente à la con-
ciergerie de la Comédie-Française:
- Madame Pierson?
- Vous vous adresserez à l'huissier de
service, et vous lui demanderez le numéro
de sa loge.
Je monte au premier étage. Huissier, ha-
bit nouv Je présente ma carte.
— Adressez-vous à l'huissier de la
scène, au bout du couloir, au fond et à
droite t
1 "Y,.
2' Annèe. - - No 152 (Quotidien',
P--
ÈÀ ffîumëro : à centimes
Samedi 29 Février 19002
)
,
Rédacteur en Chef G. de PAWLOWSKi
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Bouleuard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA.PARIS
ABONNEMENTS:
v UN AN 6 MOIS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Bouleuard. Poissonnière, PARIS
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Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
La Cerise
« .Vous avez mangé la cerise,
Je vous en ferai avaler la queue ».
(Le Trésor des Ménages, 1818.)
.11 se sent guilleret, de belle hu-
meur; parbleu! la répétition annoncée
n a pas lieu et le voilà libre à trois
sures de * l'après-midi..
f - Lansquet, mon ami, que vas-tu
aIre de ta journée?
Lansquet sourit au soleil, hume l'air
Printanier à pleins poumons. Aussi bien,
ce tragédien de premier ordre à deux
cents francs par mois, trouve-t-il pour
ne fois l'existence bonne, surtout
quand le théâtre de Montmartre lui oc-
troie quelques heures de liberté.
f - Lansquet, mon ami, que vas-tu
faire de ta journée?
Il irait bien au café, mais ce n'est
Point l'heure de la manille. Faut-il
aller chercher des sensations piquan-
ts de vertige sur le pont des But-
es-Chaumont? C'est loin. Ou se payer
e tour de Paris dans le chemin de fer
de Ceinture? En somme, comment dia-
Ie tuer le temps? Cette sacrée répéti-
"Dn aurait franchement bien pu avoir
leu! Mais il y songe: sa femme!.
Sa bonne Adèle.! Dire qu'il n'y pen-
sait pas. Certes, c'était, ou jamais, le
moment de lui faire une surprise.
- A la cerise, la belle cerise, à sept
ous la cerise! crie la marchande qui
Pousse sa rampante charrette dans les
Jambes de Lansquet qui ne lui en garde
Pas rancune et même sort sept sous de
a Poche en échange desquels il reçoit
Un cornet rempli de boules rouges.
- Ça fera plaisir à Adèle, pense-t-il.
Et, pour voir si les cerises sont vrai-
Ir.ent bonnes, il en mange en montant
Escalier.
I-ansquet grimpe quatre à quatre.
lan r il glisse sur un palier, s'étale
ec les cerises, qui s'éparpillent.
diable, les cerises! Les voilà au rez-
"'chaussée et Lansquet atteignait juste-
ent son cinquième; il n'y en a plus
nU Une au fond sac." Zut! Lansquet
ne descendra pas. Adèle mangera la
e j'aère.
t Lansquet entre chez lui en sifflotant.
* * Porte de la chambre à coucher est
Verte- Il s'arrête sur le seuil. Un
OUISsement.
d Sur le guéridon, un képi; au dossier
de la chaise se moule un dolman ; par
terre9 une culotte rouge à bandes noires
tassée sur elle-même en tire-bouchon.
l' e Peignoir d'Adèle pend à la clef de
armoire à glace. Le désordre règne
nS les « dessous » épars sur le. plan-
cher. Un sabre, un grand sabre est étalé
à Plat sur les bras du fauteuil.
c Cela est surprenant et, toutefois,
ompréhensible: Adèle a un amant!
Adèle et son amant sont justement
en s dans le lit, dans leur lit à Adèle
!tt à Lansquet. dans son lit à lui, Lans-
q et, car ce lit est son bien il le pos-
aIt avant son mariage.
C'est un peu raide !
f Adèle pousse un cri et s'enfouit sous
es couvertures. Son amant se lève. Il
comme d'usage, en chemise et, pour
a bienséance, en caleçon.
Lansquet demeure interdit à l'entrée
de la chambre. Que va-t-il faire? Ses
regards vont au képi, dont les galons
d' Or reluisent au soleil. Lansquet compte
ues galons : Trois. Un capitaine. Adèle a
c, capitaine pour amant! Un capitaine,
c' est quelque chose, mais il n'en est pas
moins vrai que.
— Je me tiens à vos ordres, mon-
sieur! déclare le capitaine, très digne
bien qu'en caleçon.
VOilà Lansquet bien avancé, encore
q e ce soit assez flatteur pour un simple
ç0Jïïedien de Montmartre d'avoir un ca-
aine à ses ordres.
hlansquet, qui a joué le classique.
c erche, dans sa mémoire, quelque
cho Se a répondre à ce capitaine. Mais
rn n y a pas de souffleur et Lansquet, qui
anque de mémoire, ne trouve rien.
D'ailleurs, il est hypnotisé par le
grand sabre. S'ils se battent en duel,
comme dans Le Bossu, par exemple, lui
aussi Lansquet aura un grand sabre.
Belle affaire, s'il ne sait pas s'en ser-
vir! andis que le capitaine, vraisembla-
blement. Mieux vaudrait que Lansquet
fût seul à l'avoir. A tout hasard, il le
prend
Lansquet a bondi vers le fauteuil, a
dégainé: l'arme apparaît luisante, re-
cfoutahi et pointue, dangereuse dans.les
niai ç maladroites de Lansquet. Le ca-
Pitain a légèrement pâli.
Lansquet sent qu'il va pleurer, car
d'attendrissantes pensées lui montent du
cœur à l'esprit. Lui qui était si content
de rentrer Pour voir Adèle; lui qui, au
lieu Jller au' café, avait acheté sept
sous de cerises!. Il n'en reste plus
qu'une!. Dieu de Dieu! ça n'est pas
Adèle lUI la mangera! Adèle, l'infidèle!
Adèle, la
Où est Cette cerise? Tiens, elle est
tombée par terreî Lansquet, machinale-
ment, veut, du bout du sabre, la pousser
dans la cneminée, mais voici qu'elle se
plante. à la pointe de l'arme. Ah! par
exemple ! Voilà Lansquet qui embroche
des cerises, .maintenant. Si seulement
c'était le capitaine! Mais, au fait, c'est
Lansquet qui a le sabre et le capitaine
n'en a pas. Attends un peu, capitaine de
malheur ! Lansquet prend sa pose de la
grande scène du « trois », se met en
garde.
M'as-tu vu? Oui. Adèle, justement,
risque un œil terrifié hors de la couver-
ture. '-,
Ah ! qu'il est beau, Lansquet, devant
le capitaine, avec son sabre moucheté
par une cerise, comme s'il. tenait, au
bout de l'arme, un cœur sanglant.
Une idée, soudain.
— Mangez ! fait-il.
Le capitaine recule d'épouvante. Sur
la lèvre de Lansquet erre un mauvais
rictus : -
— Mangez, vous dis-je!
La cerise effleure la moustache de
l'officier. Celui-ci, à force de reculer, a
rencontré le mur.
— Faudra-t-il donc vous enfoncer la
cerise dans la bouche? interroge Lans-
quet, cruel et railleur.
Que va-t-il se passer? On n'en sait
rien. Le capitaine n'ose le prévoir.
Adèle ne veut y penser. Lansquet lui-
même n'en sait encore rien.
La cerise approche des lèvres. élit
les touche ; son contact huniide et frais
fait frissonner. Lentement, les lèvres
s'ouvrent, la cerise s'enfonce entre les
dents. Le capitaine, les yeux mi-clos, va
défaillir. lorsque Lansquet lâche le
sabre, qui tombe et rebondit en tinta-
marre sur le plancher.
Et Lansquet de déclamer, magna-
nime :
— Vous pouvez sortir maintenant,
Monsieur; mais souvenez-vous que'" si
vous dites un mot de cette aventure; que
si jamais vous vous présentez chez moi :
vous avez mangé la cerise. je vous en
ferai avaler la queue !
Pierre SOUVESTRE.
Nous publierons demain un article de
NOZIÈRE
L'arbre - de la scierice
Les savants, qui, ne respectent rien, ont
publié, dernièrement, des tables dynamo-
inétriques d'après lesquelles il appert que
la torce des athlètes augmente dans une
notable proportion lorsqu'il se trouve, parmi
les spectateurs, des dames qui les re-
gardent. *
Poussant plus loin leur comparaison, ils
ont même remarqué que cette action était
analogue à celle de l'acide formique, mais
que la puissance féminine dépassait de
beaucoup celle" des fourmis.
Un simple examen des faits prouve que
les lutteurs ne sont pas seuls avantagés sur
ce point et que les littérateurs eux-mêmes
ont trouvé, de tout temps, de précieux en-
couragements dans cette collaboration tout
indirecte ébauchée dans le primitif Eden.
Qu'il s'agisse de La Fontaine ou de Jean-
Jacques Rousseau; qu'il s'agisse de la
Rouennaise qui, de l'aveu même de Cor-
neille, le fit devenir poète; qu'il s'agisse de
nos meilleurs auteurs contemporains; que
l'on me permettra de ne point citer, il est
évident que cette heureuse influence ne
s'est jamais démentie.
Tout le mondé sait, en effet, que les pen-
sées nouvelles naissent de l'association des
idées, et cette association n'en est que meil-
leure lorsqu'elle s'extériorise.
A ce propos, il faut bien reconnaître ce-
pendant que nos littérateurs actuels se
trouvent particulièrement désavantagés et
que les salons d'aujourd'hui ne leur four-
nissent plus le teuain de culture qu'ils of-
traient autrefois.
Sane vouloir critiquer l'homme éminem-
ment respectable qu'est l'actuel chef de
l'Etat, il est bien évident que nos meilleurs
salons ressemblent assez à ceux de l'Elysée
et que les encyclopédistes s'y trouveraient
quelque peu dépaysés. Quelle que soit l'ha-
bileté que montrent nos Saint-Cyriens, en
jouant au ping-pong, il faut bien recourir
au bridge pour masquer le vide des conver-
sations actuelles et lorsque, par nasard, un
artiste, s'aventure dans ces milieux essen-
tiellement financiers, il y devient un objet
de curiosité analogue au marhadia de Bir-
manie ou .aux Esquimaux du Jardin d'Ac.
climatation. C'est tout juste si la maîtresse,
de maison, en fin de soirée, ne lui offre
pas un cachet pour son dérangement.
Un homme célèbre invité dans de pa-
reilles conditions, il y a de cela quelques
années et sentant qu'on attendait de lui
quelque chose d'extraordinaire, s'avisa, mé-
thodiquement et paisiblement, de démonter
entièrement le piano.
Cela n'eut point, lorsqu'il eut fini, le
succès qu'il en espérait et tant d'ingratitude
le révolta. On attendait, en effet, quelque
chose d'extraordinaire de sa part et, vérita-
blement, il ne pouvait mieux taire.
Est-ce incapacité de la part des gens du
monde? N'est-ce point plutôt — car il est
difficile de l'admettre dans de telles pro-
portions — simple hypocrisie ou manque
absolu de simplicité? Je le croirais plutôt.
Il y eut, autrefois, pour tenir des salons lit-
téraires avec succès, des femmes qui n'é-
taient qu'accueillantes ou bonnes, sans que
la nature les ait particulièrement avanta-
gées au physique ou au moral, et cela leur a
suffi pour créer autour d'elles un mouve-
ment^littéraire durable et profond. Seule-
ment, 'elles avaient derrière elles tout un
glorieux. passé pour le faire et elles n'é-
taient point obligées, comme aujourd'hui,
de défendre, à coup d'orgueil et de bluff,
une situation récemment acquise par de
hardis coups de mains.
G. DE PAWLOWSKI. i
1 Échos
Ce soir, à huit heures, à l'Odéon, pre-
mière représentation de Ramuntcho, pièce
en cinq actes et dix tableaux, de Pierre Loti,
musique de scène de Gabriel Pierné.
Ce soir, à huit heures un quart, au théâ-
tre Sarah-Bernhardt, reprise de L'Aiglon,
pièce en six actes, d'Edmond Rostand.
Ce soir, à huit heures et demie, au Châ-
telet, répétition générale de La Revue du
Châtelet, pièce à grand spectacle en trois
actes et vingt-huit tableaux, de De Gorsse
et Nanteuil, musique de Marius Baggers.
Ce soir, à huit heures et demie, au Tria-
non-Lyrique, première représentation (à ce
théâtre) de Zampa, opéra-comique en trois
actes, de Melesville, musique de F. Hérold.
MM. les critiques, soiristes et courriéris-
tes seront reçus à la représentation de lundi.
Ce soir, à huit heures et demie, au théâ-
tre Cluny, première représentation (à ce
théâtre) de La Mariée du Mardi-Gras, folie-
vaudeville en trois actes, de Gtangé et Lam-
bert Thiboust, et de Les 37 sous, de Al.
Montaudoin, vaudeville en un acte, de Labi-
che et E. Martin.
MM.- les critiques, soiristes et courriéris-
tes seront reçus au contrôle sur présenta-
tion de leur carte.
Ce soir, à huit heures et demie, au théâ-
tre Molière, première représentation de La
Bonne Entente, comédie en un acte1 de Mau-
rice Lefèvre.
Cet après-midi, à deux heures et demie,
à la Scala, répétition générale, et ce soir,
à neuf heures, première représentation de
Cinq minutes d'amour, opérette à spectacle!
en six tableaux, de Ch. Esquier, musique.
de Christiné. (
Ce soir, à neut heures, à l'Eldorado, pre-
mière représentation de Cordon sanitaire,
un acte d'André de Lorde et G. Montignac,
et Bat-Flanc, un acte de Bonis-Charancle.
L
e Foyer de discorde.
Hier matin, un de nos oIns imnnrtants
confrères annonçait tumultueusement que
M. Claretie allait suspendre les répétitions
du Foyer à la Comédie-Française. : c.
Nous n'avons pu joindre dans la journée
ni M. Mirbeaii, ni M. Ciareti^v mais nous
avons pu rencontrer Mme Mirbeau, qui
nous a autorisé à démentir énergiquement
cette information trop sensationnelle.
Il est possible, il est même vrai que M.
Claretie est choqué par l'audace de cet ou-
vrage, où M. Mirbeau attaque vivement et
à visage découvert des gens très considéra-
bles.
Mais la pièce est reçue, elle lera jouée.
Le premier acte est déjà""mis en sqène et le
travail des répétitions se poursuit très acti-
vement.
LE QUATRAIN DU JOUR
LEVER D'ÉTOILE
On dit que « la belle Lison »
Va tâter du théâtre et cherche un acte en prose.
Le titre est trouvé, je le lui propose ;
C'est: L'Affaire de la poison!
1
'JW
1 reste.
Nous avions raison de douter et de ne
pas accueillir aussi complaisamment que
certains de nos confrères une information
au moins prématurée.
Voici la lettre que M. Arthur Meyer écrit
à M. Duquesnel :
Mon cher Duquesnel,
Quoique certaines attaques soient le « ca-
suel » des hommes en évidence, je ne voudrais
pas que mon silence accréditât des rumeurs,
nées de la malice des uns, propagées par la
malveillance des autres. Je n'ai jamais songé
- est-il besoin de le dire? — à me séparer
de vous, pour cette double raison, c'est que je
ne le trouverais pas bon et que mes lecteurs le
trouveraient très mauvais.
Cordialités,
Arthur MEYER.
Nous ne serons donc pas privés des sa-
voureuses chroniques de M. Duquesnel.
Ç'eût été, d'ailleurs, grand dommage..
M.
-
le Préfet et les tournées classiques.
Le fait est d'hier. Il s'est cassé
dans une ville du Midi — naturellement.
Une tournée de Paris — Baret, pour ne
pas citer de nom — qui vient de promener
Britannicus en province avec succès, arrive
dans un vieille cité célèbre par une chan-
son de Désaugiers.
Le commissaire central, à peine la tour-
née débarquée, lance aux trousses de son
administrateur tous les agents de la ville.
Ils sont huit qui courent partout, visitent
hôtels et cafés d'un sourcil soupçonneux.
Enfin ils réussissent à mettre la main sur'
l'acteur. Ils l'amènent comme un malfai-
teur, par la force, au bureau du commis-
saire central. Lors, celui-ci, avec un doux
sourire :
-
— Voilà, c'était pour vous dire que M. le
Préfet désirait deux places de faveur pour
ce soir!.
Quelle charmante ville, quel bon commis-
saire et combien le Préfet a l'amour des
classiques !
D
usausoy, joaillier expert, 4, boulevard
des Italiens, achète touiours rnmn.
tant : bijoux, diamants, perles et, pierres
fines. Il donne presque toujours une plus-
value sur le prix offert par n'importe quelle
maison. 1
p
1 )J~*
ublicité.
Un iel1np !:IÍ1tpI1r l'rrn.n,":. ,::¡,,-'" ..--
pièce est actuellement représentée" a trouvé
un moyen ingénieux de satisfaire à la fois
son goût pour le champagne et son pen-
chant pour-l'économie.
Il a tout simplement fait dire à l'un de
ses personnages, qui va boire:
-: Un verre de Champagne, mon cher?
Du X. (marque connue)— naturellement.
C'est le meilleur.
Et il reçut de la maison favorisée une
caisse de cent bouteilles. -
Mais quelle ne fut pas sa surprise d'en-
tendre, l'autre soir, l'acteur qui interprète
ainsi son personnage-réclame, répondre à
son invitation:
— Non, mon cher, pas de cette saleté-là.
On ne boit plus que du Y. (autre marque
connue).
Ajoutons — sans nous préoccuper du
nombre de bouteilles offert par la maison
Y. à l'auteur — que le meilleur Champa-
gne est sans contredit le Champagne. (la
case est encore à louer).
s
les mots:
Vous n'ignorez pas que l'illustre
doyen du Théâtre-Français méprise les piè-
ces légères. Le moindre succès de comédie
sur la scène qu'il illustre le met hors de
lui. 1
Après la représentation d 'Œdipe-Roi, il
recevait l'autre jour, dans sa loge, les com-
pliments de ses admirateurs.
, Il les écouta modestement et, prenant un
temps, il s'écria, avec la voix que vous
savez:
— Tout de même, Œdipe, c'est autre
chose que. L'Amour brûle!
L'Amour brûle pour L'Amour veille!.
M. Mounet-Sully ne connaît que les classi-
ques.
E
n sortant du théâtre, allez souper chez
f Paillard, le restaurateur à la réputa-
tion mondiale. -
Vous trouverez chez lui une table au con-
fort tout moderne et vous serez en compa-
gnie de ce que le Tout-Paris compte de cé-
lébrités. -
L
a Parisienne tient plus à ses dents qu'à
ses diamants. Aussi, pour conserver
intactes les perles enchâssées dans le corail
de ses gencives, emploie-t-elle de préfé-
rence la pâte dentifrice glycérine Geilé Frè-
res.
L
es voitures Unie sont cette année les
t voitures à la mode. Et c'est justice,
car ce sont bien les plus silencieuses, les
plus économiques, les plus pratiques en un
mot.
Hier, à la sortie du Vaudeville, nous
avons eu la curiosité de compter les voitu-
res de cette marque. Nous en avons trouvé
dix-sept. Bien entendu, dans ce chiffre ne
figurent que les voitures de maître. C'est
un' joli record.
o
tf d'eatusofit mé-
chants, et que, par contre, les bu-
veurs de vin sont parés de multiples qua-
lités.
Aux amateurs de vrai vin, de vin naturel,
nous donnons le conseil de faire leur pro-
vision chez Truchon et Leclerc, 36, rue des
Nuits, à Paris-Bercy.
A
vant d'assister au bal de la bijouterie,
L qui a lieu ce soir au Grand Hôtel, de
nombreux couples se sont donne rendez-
vous pour dîner au restaurant Lapré, rue
Drouot..
Maurice, le roi des maîtres d'hôtel, a
préparé à leur intention des mets exquis
qu'ils pourront arroser de vins sans pareils.
Voilà plus qu'il n'en faut pour danser
toute une nuit sans fatigue.
NOUVELLE A LA MAIN
L
a saison de M. Antoine sera des plus
f brillantes. Après Son Père et L-Ap-
prentie, il monte Ramuntcho.
On ne saurait être mieux. loti!
Le Masque de Verre.
Une extraordinaire
innovation commerciale
de Charron
On sait toute l'importance qu'a prise en ma-
tière d'industrie automobile la publicité faite
par la clientèle elle-même.
Comme le dit don Gormas, dans Le Cid, les
discours sont bons et les raisonnements ne sont
pas mauvais, mais
« Les exemples vivants sont d'un autre pou-
[voir! »
De même, il est très intéressant de lire la
description d'une voiture, de se rendre compte
des raisons qui ont motivé tel choix, mais c'est
autrement indiscutable de la voir marcher, d'en
posséder une ou de connaître quelqu'un qui en
possède une.
M. Charron, qui s'est toujours montré non
seulement merveilleux commerçant et sérieux
industriel, mais avisé psychologue, a compris
et estimé cette précieuse collaboration de la
clientèle, et c'est pourquoi il vient de décider
une mesure qui est, à elle seule, toute une pe-
tite révolution dans le monde de l'automobile.
Vous habitez Veulettes, et vous voulez ache-
ter .une voiture automobile. Il n'y a pas encore
de représentant de Charron à Veulettes, et il
s'agit, bien entendu, d'un petit trou, car la
Charron est, on le sait, la favorite de nos
grandes plages; vous vous décidez et vous
achetez une Charron.
— Vous allez me rendre un service, dit
Charron, vous allez porter mon nom là où il
n'est point encore, vous allez me servir d'exem-
ple vivant, et, tout en contribuant à votre agré-
ment, vous contribuerez à mes affaires; il est
juste que je vous en tienne compte. Je ne vous
demande pas de chanter mes louanges; ceci me
regarde, à moi de vous fournir la bonne voi-
ture, mais vous circulez; on dira: « Tiens,
quelle est cette voiture? — Une Charron. »
Je suis persuadé, comme je crois ma voiture
excellente, que cette publicité me sera utile.
Aussi je vous en tiens compte et vous fais des
conditions spéciales. Ecrivez-moi, je vous les
enverrai. Ce n'est pas tout. Votre exemple a
été suivi. Vous n'en savez peut-être rien. Vous
avez dit un jour à votre ami, au cercle: « Je
suis content de ma voiture. » Ou bien vous
l'avez emmené en promenade. Il été épaté. Il
achète une Charron.
« Vous avez été mon agent inconscient, dit
Charron, et je vous fais à vous et à tous ceux
qui ont une Charron dans votre ville une ris-
tourne sur le lord de l'a voilure, »
Telle est l'innovation de Charron, simple et
juste, innovation fondamentale, profonde, qui
va, nous en sommes c.ertam¡, bouleverser le
marché françair.
UN PAVÉ DANS LA MARE AUX CANARDS
*
Un scandaleux
abus de confiance
'—Vous rie trouvez pas, Monsieur, que
lorsqu on désire connaître « vrai-
ment » les choses, on arrive à com-
mettre bien des vilenies, que le mon-
de indulgent masque sous le nom de
« rosseries ».
- Je suis absolument de votre avis,
Madame.
(Interview de Mme Lara,
14 février 1908.)
Las des « potins » et des « sous-enten-
dus » que l'on murmurait autour de lui,
Comcedia se résolut à connaître la vérité;
non cette vérité banale que l'indulgence du
monde sait parfois répéter, mais cette vé-
rité brutale qui ne mâche pas ses mots, et
cela de la bouche même des artistes que la
critique quotidienne agaçait, et de ne s'a-
dresser qu'aux pensionnaires des Théâtres
Subventionnés, puisque à eux seuls le jour-
LE COUPABLE
M. Mainsonneuve
,'. Correspondant de «L'Intetnatioiial KevW»
''lit "A .-'" - ,,"- --* *--- - 1. - 1
nal consacre, chaque jour, un compte rendu.
Il fallait trouver un subterfuge; il ne fal-
lait pas qu'un collaborateur étranger au
journal recueillît ces précieuses informa-
tions qui montraient tout à nu l'âme eh-
tachée d'erreurs des comédiens et des chan-
teurs. Il fallait aussi qu'aucun soupçon ne
pût planer sur celui chargé-de cette en-
quête. Ce fut alors que l'idée est venue
d'emprunter la correspondance d'une « ima-
ginaire revue à paraître en^n^leterre »,
et de marquer ainsi la personnalité du re-
porter. Un cent de cartes de visite et de
l'audace, et la chose fut faite.
Donc, !e dernier jour de janvier et les
premiers jours de février, les principaux ar-
tistes des théâtres subventionnés — exac-
tement cinquante-huit - reçurent cette let-
tre:
« Monsieur (ou Madame),
« Mon directeur de Londres me prie,
ayant l'intention de créer, dans sa Revue
qui doit paraître prochainement, une partie
de critique théâtrale, de faire une enquête,
à ce sujet,- auprès des principaux artistes
de Paris.
« Seriez-vous assez aimable pour m'ac,
corder une entrevue et me faire savoir à
quelle heure je pourrais vous rencontrer?
« Dans l'attente d'une réponse favorable,
veuillez croire, etc. *
« Thomas MAISONNEUVE,
« Correspondant parisien de l'Inter-
national Review. »
Evidemment, c'est une « série d'abus de
confiance n que je viens de commettre; il
n'y a pas, hélas! d'autre nom à donner à
des actes qui consistent à écrire d'abord,- à
se présenter et à être reçu ensuite sous un
titre qui ne vous appartient pas et à fein-
dre d'ignorer un journal auquel on colla-
bore. -
Cet abus de confiance, je l'ai commis ou-
vertement, loyalement — le cliché ci-contre
en fait foi — je n'ai pas contrefait mon écri-
ture détectable, je ne me suis pas « ma-
quillé » comme les héros de Balzac, Carlos
Herrera ou Cauquoèlle, ou même comme
mon ami Brasseur, grime génial des temps
modernes. Non, j'avais ma figure de tous
les jours. J'ai la conscience d'avoir agi
courtoisement avec les hommes, galamment
avec les femmes.
Certes, bien des foi.s i.l .m'a fallu répri-
mer des gestes de surprise, écouter des ca-
lomnies ou de perfides médisances avec un
air d'innocence que toutes les interviews,
même faites « pour l'étranger », ne me ren-
dront pas. Le seul regret que j'ai éprouvé,
c'est d'être obligé de « renier » un journal
où d'excellents camarades me font la be-
sogne aimable, mais ne souffre:t-on pas tou-
jours un peu quand on veut connaître cette;
chose si rare: la vérité.
Si ces interviews paraissent strictement
rapportées, ce n'est nullement par esprit da
vengeance.. Il ne faut pas que les artistes.
considèrent Comœdia comme un épouvan-
tail, mais comme un ami parfois sévère,
parfois moqueur, parfois « rosse », mais
n'est-ce pas le fait d'un ami véritable que
d'avoir la liberté de langage et d'écriture.
Comœdia est un ami désintéressé qui a
quelquefois — d'aucuns m'ont dit trop sou-
vent — la phrase un peu dure, niais qui
connaît suffisamment sa rhétorique' pour
leur offrir, quand il le juge à propos, la plus
belle gerbe de fleurs qui soit au monde.
J'ai la conviction que ceux ou que celles
qui m'ont si aimablement reçu n'auront con-
tre moi nulle haine, parce qu'ils reconnaî-
tront que c'est « pour leur bien » et pour
dissiper de fâcheux malentendus que j'ai
agi ainsi. J'attends, confiant, une absolution
pleine et entière.
Comœdia est, « avant tout », un journal
sincère. Le ton indépendant de ses articles
effarouche les artistes accoutumés à plus de
douceurs, à plus de louanges, disons le
mot, à plus « de pommade ». Eh! parbleu !
Comœdia n'est pas fait avec des « commu-
niqués » ou des « notes » envoyés par les
intéressés. C'est à peu près le seul qui ne
les fasse pas payer, et c'est le seul qu'ils
accusent.
Je ne parle pas de l'enfantillage qui con-
siste, de la part des ennemis de Comœdia,
à s'écrire les uns aux autres des lettres de
complaisance. Non, j'ai recueilli des accusa-
tions plus graves dont je parlerai tout à
l'heure.
Dès maintenant, je tiens à dire que Co-
mœdia serait enchanté d'avoir des « preu-
ves sérieuses, même orales »: qu'on lui
présente un' artiste qui. puisse déclarer
« qu'il a payé quelque chose ». Ce jour-là,
il sera heureux de déposer une plainte con-
tre l'escroc qui lui aura volé du papier à
lettres ou se sera servi de son nom..
Rien n'empêchait Comœdia de s'établir
sur les bases habituelles et de faire payer
les portraits et les communiqués. Il ne l'a
pas fait, car cette méthode empêchait l'au-
torité et l'indépendance nécessaires auprès
du public pour un journal à grosse vente,
et le mettait seulement au rang d'une petite
rubrique semblable à celle des autres jour-
naux.
Puisqu'il est dit que Comœdia doit lut-
ter constamment contre de véritables sotti-
ses, pour dissiper toute équivoque il reste
acquis qu'il fait de la « publicité commer-
ciale » n'ayant naturellement rien à voir
avec le monde des théâtres, puisqu'elle ne
s'adresse « qu'aux entreprises purement in-
dustrielles ».
Ceci peut paraître une naïveté, mais, de-
vant les insinuations et les équivoques des
lettres fréquentes qu'il reçoit et qui lui re.
prochent « d'égarer l'esprit qui a aidé à sa
formation », il se devait de faire cesser les
racontars qui prétendent que c'est t'artiste
qui paie les portraits publiés pour des pro-
duits de consommation. Nous sommes telle-
LES TROIS ACCUSATEURS
M. Sevellhao
de l'Opéra-Comique
M. Esealats
de l'Opéra
M. Nulbo
de l'Opéra
ment débordés de stupidité quotidiejrne que
l'on m excusera d'être obligé de le dire.
Ceci écrit, et il fallait l'écrire, je passe
aux interviews intéressantes que les artis-
tes ont bien voulu m'accorder
L'Enquête
Invariablement, je posais ces deux ques-
tions: 1° Comment trouvez-vous que la cri.
tique est faite à Paris? 2° Comment dési-
reriez-vous qu'elle soit faite pour le bien
des artistes et du public? Puis, dans le cou-
rant de la conversation, je glissais d'une
VOIX dégagée mais curieuse: Et Comœdia.
quelle est votre opmitfn sur ce journal qui
est le seul qui s'occuptiPexclusivement de
théâtre?
«
A la Comédie-Française
C'est le soir. Je me présente à la con-
ciergerie de la Comédie-Française:
- Madame Pierson?
- Vous vous adresserez à l'huissier de
service, et vous lui demanderez le numéro
de sa loge.
Je monte au premier étage. Huissier, ha-
bit nouv Je présente ma carte.
— Adressez-vous à l'huissier de la
scène, au bout du couloir, au fond et à
droite t
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