Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-01-10
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 10 janvier 1908 10 janvier 1908
Description : 1908/01/10 (A2,N102). 1908/01/10 (A2,N102).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646486q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
--
2° *A*onée. - N° 102 Quotidien) Le Numéro : 5 centime#
.;
Vendredi 10 Janvier 1908î\
t»
Rédacteur en Chef s G* dù PAWLOWSKI '-
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
1 boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE ; 238-07
Presse Télégraphique : COMŒDlA"PAR'iS
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOIS
taris et Départements. 24 fr. 2 fr.
tranger 40 » 20 »
fcs^
RÉDACTION & ADMINISTRATION =
27, Bouleuard, Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒBÏA=PARfS
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOIS
Paris et Départements, 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
La Médaille
Pour Hugues Delorme.
était à un de ces dîners parisiens
sont tous les convives sont cités, le len-
demain, dans les courriers mondains des
journaux. La maîtresse de maison est
une grande dame Qui s'occupe, à la fois,
d'art et de politique. Tout en patronnant
de retentissantes auditions musicales, en
tnerpSant des expositions, elle prépare
^échS aVra«on et, de quatre à cinq, elle
réfléchit It à la manière la plus aisée de
Son er la royauté en France.
Son mari est un vieillard silencieux et
distingué Qui collectionne les médailles et
les pièces de monnaie. Il en a rempli des
appartements entiers et s'est acquis une
brillante réputation dans la partie.
Or l'autre semaine, il avait réuni à
sa table ce qu'on a coutume d'appeler
l'élite de la meilleure société. Il y avait
six académiciens dont trois de l'Acadé-
mie française ; deux ministres, dont un
socialiste ; un auteur dramatique, le di-
recteur d'un grand journal réaction-
naire, Uti général, un chirurgien émi-
nent, trois membres de l'Union, un sé-
nc-t tur y Un poète, un chroniqueur, un
n» le rédacteur en chef d'une
'pipQrta nte revue, un ancien ténor mon-
dain et un jeune et spirituel compositeur
de musique, tous s'intéressant aux
vieilles monnaies, tous un peu collec-
Pô î
Une seule femme --- la maîtresse de
mulson - et vingt-trois hommes, y
compris le numismate.
avait êrrie de passer à table, celui-ci
avait même de passer à table, celui-ci
avais pris à part tous ses invités et leur
avait annoncé pour le dessert une ex-
traordinaire surprise. Mais, dès le
deuxième service, personne n'y put te-
nir : on Voulut savoir, et, cédant à tant
dit :
d'insistance, notre hôte prit la parole et
— Messieurs, je vous ai tous réunis
ici, d' f Ord Pour le plaisir de vous voir
à ma table, ensuite pour la joie de vous
le Plu er la, Pièce la plus rare, le trésor
le plus unique, la merveille la plus in-
comparable que vous ayez jamais con-
templée jusqu'ici. Je l'ai depuis un mois,
elle vient d'être trouvée en Egypte. C'est
le perle e de ma collection. Je l'ai payée
deux cent mille francs, je la vendrai un
million quand il me plaira.
On fit silence, une pièce qui valait un
million Ce n'était pas un spectacle ordi-
— La voici: poursuivit l'heureux pro-
priétaire, et il la tendit à son voisin.
C'était une sorte de grande médaille
en or, de Cinq à six centimètres de dia-
mètre environ. Elle circula de main en
main, chacun voulait la voir. Pensez
donc! tenir un million dans sa main,
même pendant un instant, cela n'est pas
donné à tout le monde! La pièce circu-
ait, circulait, quand, tout à coup, elle
disparut. Parfaitement, elle disparut ! elle
a chercha, elle demeurait introuvable.
Ce fut d'abord de l'étonnement, bientôt
de la stupeur. Quel mystérieux Arsène
Lupin était introduit dans cette aristo-
cratique Salle à manger et avait pris le
visage respesctable d'un de ces hôtes il-
res
On Ie disait, on se regardait avec ter-
reur. le numismate était livide et sa
tIlOt S éventait nerveusement sans dire
Alors, auteur dramatique, en homme
qui a l'habitude de dénouer les situa-
tions les Plus inextricables, rompit le si-
— Nous sommes tous d'honnêtes
gens, Us nous connaissons, nous
avons lesa plus entière confiance les uns
dans les autres. Aussi, n'ayons pas de
sot amour-propre! Une pièce qui vaut
un million a disparu, je suis sûr qu'on la
retrouvera, mais comme il est possible
qu'un de nous l'ait égarée par mégarde,
je propose que nous vidions tous nos
poches.
Cette proposition fut acceptée avec
joie, presque avec enthousiasme. Et ce
fut pour tout le monde un double plaisir
que de déposer sur la table, devant les
regards ébahis des maîtres d'hôtel, mou-
choir, clefs, monnaie, portefeuille, étui
à cigarettes, boîtes d'allumettes ou bon-
bonnière. 1
Deux des convives, pourtant, n a-
vaient pas bougé. L'un d'eux allait bal-
butier quelques explications, mais l'au-
tre, très énergiquement, l'arrêta :
- Je trouve ce moyen d'investigation
blessant et humiliant pour nous. Je m'y
refuse. Je ne viderai pas mes poches.
— Moi non plus! reprit l'autre.
Le premier était un académicien qui
compte les plus retentissants succès au
théâtre et dans le roman ; le second, un
général qui démissionna bruyamment
voici quelques années. ,,.,
Tous les assistants protestèrent aussi-
tôt: :
— Mais personne ne vous soupçonne.
Vous le savez bien.
— Je l'espère, répliqua le dissident.
— Vous êtes libre d'agir comme il
vous plaît, reprit un peu sèchement le
collectionneur.
— J'y compte bien!.
Je vous ai dit que tout cela se passait
pendant le deuxième service. Vous ima-
ginez comment dut s'écouler le reste du
repas. On ne parlait qu'à voix basse,
oh n'osait plus adresser la parole aux
deux protestataires ; on les regardait
avec méfiance; l'écrivain plastronnait,
portait beau ; le général semblait écroulé.
Le maître et la maîtresse de la maison
se lançaient, à travers la salle, des re-
gards significatifs ; on eût dit, à voir tou-
tes ces figures bouleversées, qu'il y avait
un mort dans la chambre voisine.
A un moment, un domestique cassa
un verre et tout le monde sursauta ner-
veusement. C'était, je vous l'assure, un
dîner impressionnant.
Il s'acheva enfin. On quitta la table
pour passer au fumoir ou au salon. Et
en se levant, la maîtresse de maison fit
tomber la fameuse médaille,, qui avait
tout simplement glissé sur sa jupe, sous
sa serviette.
Ce fut un soulagement. On respira.
Chacun à son tour se précipita vers les
deux victimes et éprouva le besoin de
les assurer de sa sympathie et de sa con-
fiance.
— Mais pourquoi avez-vous refusé de
vider vos poches, demanda le chronir
queur?
- Maintenant, vous allez le savoir,
répondit l'écrivain.
Et se fouillant, ir sortit. - devinez
quor? — une pièce de monnaie exacte-
ment pareille au « trésor unique » qui
venait de causer un tel émoi.
— Mon cher, continua-t-il, impitoya-
ble, en s'adressant au maître de céans,
j'avais apporté cette pièce pour vous la
faire voir, mais quand vous nous avez
montré la vôtre, exactement pareille, je
n'ai pas voulu - je suis un homme bien
élevé! — vous dire devant tous vos in-
vités que votre estimation était un peu
fantaisiste. Votre pièce n'est pas rare,
n'est pas incomparable, ne vaut pas un
million, loin de là. J'ai payé la pareille
— -jugez-en ! - - trois mille francs, et
vous en trouverez dix autres identiques
rue des Saints-Pères.
» Mais voyez, tout de même, si j'avais
vidé mes poches, qu'on n'eût pas re-
trouvé votre pièce et que j'eusse montré
celle-ci, tout le monde m'eût pris pour
un voleur. Et l'on me prenait aussi pour
un voleur, parce que j'ai refusé. Voilà,
tout simplement, où un excès de bonne
éducation peut entraîner un honnête
homme!. a
-Et vous? dèmanda-t-on au général.
— Moi, dit-il, avec timidité, je peux
bien vous l'avouer maintenant, si je n'ai
pas vidé mes poches, c'est qu'elles ne
contenaient qu'un mouchoir déchiré, une
vieille blague à tabac usée — et deux
sous.
» Et je ne voulais pas, devant vous,
étaler et avouer une pareille misère,. »
L'histoire est d'hier.
Pierre MORTIER.
-
Nous publierons ^demain un article de
J.-H. ROSNY
Échos
Ce soir, à huit heures et demie, à Tria-
non-Lyrique, première représentation (à ce
théâtre) de: Le Pré aux Clercs, opéra-co-
mique en trois actes, de Planard, musique
d'Hérold. -
Ce soir, à minuit et demi, à la Gaîté.:Ro.
chechouart, répétition générale de la revuM
Ce soir, à huit heures trois quarts, à la
Folie-Pigalle, répétition générale du nou-
veau spectacle.
T
oujours la question des droits.
Elle n'est pas neuve, la question! Et
si Comœdia l'a remise sur le tapis, pour le
plus grand bien des auteurs lésés et volés,
d'autres avant lui avaient signalé les abus
criards auxquels donne lieu la perception
des droits en province.
Le 27 juin 1906 — il y a dix-huit mois
- notre excellent confrère Max Maurey si-
gnalait, dans un « leader ».de Gil Blas, la
situation irrégulière et grotesque du Kur-
saal de Lille, où le contrôleur en chef se
trouvait être, en même temps, représentant
de la Société des Auteurs et était ainsi ap-
pelé quotidiennement à se contrôler t'ùi-
même !
Quant, à l'inspecteur du droit des pau-
vres, il n'existait que sur le papier ou, tout
au moins, ^'il existait en chair et en os, il
ne mettait jamais les pieds au théâtre. le
soir!! (Sic.)
Des cette époque, M. Rctëm # PIe"
prenait la parole à l'assemblée générale des
Auteurs et demandait, avec une âpre mais
vaine énergie, que l'on s'occupât un peu
de la manière dont étaient perçus les droits
en province. ---
Il paraît que l'on s'en occupe depuis qâuel-
ques jours.— et ce ne sera point un des
moindres titres de gloire de Comœdia d'a-
voir attaché ce grelot.
c
orrespondange :
Monsieur le Directeur, -1
Je n'ai aucun souvenir d'avoir engagé un
pari sur la longévité de Comœdia.
Mais j'ai toujours payé mes dettes., Que
celui avec qui j'ai parié veuille bien se faire
connaître et réveiller ma mémoire endor-
mie, je vous réponds qu'il recevra de moi
ce que je lui dois.
Veuillez agréer l'assurance de mes sen-
timents distingués. ,
Paul GAVAULT.
G
ros émoi hier rue Auber. A la nuit
tombante, on voyait apparaître, à
l'une des fenêtres de l'Opéra,..derrière le
monument de Garmer,. un. long - -ïtieHlar.d,
paie et décharné;' qui faisait, à Paidè de
ses bras- immenses, des signaux désespérés
aux passants. « Quvrez-moi, criait-il, je
suis enfermé: ». Déjà la foule: attribuait à
M. Gailhard les. crimes les plus atroces.
On racontait que les remaniements de la
salle avaient fait découvrir des cachettes
comparables aux plus noires geôles de la
Bàstille et le vieillard apparaissait comme
un nouveau Latude.
N'écoutant que son courage, un brave
cocher de l'Urbaine s'élança chez le con-
cierge, lequel, armé d'une clef monumen-
tale et d'un flambeau, vint délivrer.
M. Bourgault-Ducoudray en personne. Le
sympathique compositeur s'était simplement
attardé dans les couloirs de la Bibliothèque
et s'était laissé prendre entre les deux fer-
metures de la porte de la rue et de la com-
munication avec la salle. Il y a des gens
qui trouvent cela trop simple et qui se mé-
fient encore.
D
usausoy, joaillier expert, 4, boulevard
des Italiens, achète toujours comp-
tant: bijoux, diamants, perles et pierres
fines.. Il-donne presque toujours une plus-
value sur le prix offert par n'importe quelle
maison.
c
omœdia annonçait hier qtie M, Jules
Bois avait envoyé ses témoins à M.
Vincent d'Indy. Nous croyons savoir, d'a-
près une information digne de foi, que
M. Vincent dlndy a constitué les siens dans
la journée d'hier. L'un — soyons discret
— serait le fils d'un célèbre compositeur
français, loutre un compositeur également
réputé, d'origine belge.
A
h! mais! ,
La chose se passe à la dernière réu-
nion au Comité de la Comédie-Française,
et ces messieurs, entre eux, éprouvent une
fois de plus le besoin d'affirmer qu'ils ne
sont pas gens à se laisser conduire.
L'un d'eux, l'un des plus notoires, ré-
sume ainsi la situation: « Chaque fois
qu'un ministre voudra nous imposer des
candidats sociétaires de son choix, nous les
blackboulerons impitoyablement! »
Et allez donc !
A
l'Orphelinat des Arts.
L'Orphelinat des Arts était en fête,
hier: pour commencer joyeusement l'année
nouvelle, Mme Jeanne Poilpot avait fait
une surprise à ses soixante-dix petites
filles: un arbre de Noël délicieusement dé-
coré et chargé de jolis cadeaux. Nous eû-
4iies aussi un concert donné par les orphe-
lines elles-mêmes, et auquel Mmes de Nuo-
vina, Lecontë et M. Brunot apportèrent cha-
ritablement le concours de leurs "beaux ta-
lents; Un délicieux goûter réunit petits et
grands et termina cette joyeuse journée.
Reconnu dans l'assistance élégante et
nombreuse: la duchesse d'Uzès, Mmes Ro-
ty, Jules Dietz-Monnnin, Ganderax, Phi-
lippir'-Pterson- Scalini; Rachel Boyef, Saint-
Oermain, André, Kr^Uss, Parés, Bruno-Pé-
!~i~t ..MAt,..Mâriani, J eah-lMitp Forain)
Poilpot, etc.
L
es ravissants objets de toute nature fa-
briqués par le maître orfèvre Leroy,
22, rue Réaumur, sont de ceux qu'un
homhie de goût peut toujours offrir en
n'importe quelle circonstance^ avec la cer-
titude de les voir bien accueillis.
A
u dîner des Théâtres, chez Cham-
peaux — ces dîners si suivis par
toute la genry parisienne; deux actrices
causaient d'un ténor de province retiré
de la scène :
-i- Sais-tu, ma chère, ce qu'il m'a donné
comme raison, lorsqu'il a quitté le théâtre?
— • ? ? -
— J'ai la voix tellement forte, a-t-il dit,
que mon médecin me conseille de ne plus
chanter. Il a peur que je me crève le tym-
pan !.
NOUVELLE A LA MAIN
D
ans un théâtre de province où 'Ie's
abonnés sont particulièrement ner-
veux, un cabotin ennuyeux comme la pluie
est, chaque soir, l'objet de manifestations
peu sympathiques de la part du public qui
demande la résiliation de l'engagement de
ce barbier.. !
Et, le directeur- de s'écrier, en donnant
son congé, à l'artiste:, * -
— Voilà ce qui peut s'appeler : suppri-
mer les feux du rasoir ! ',
Le Masque de Verrez
LA COMPAGNIE SICILIENNE DE GIOVANNI GRASSC
AU THÉÂTRE DE L'ŒUVRE
MALIA (Le Maléfice)
de L. CAPUANA
Rassurez-vous! Je ne vous parlerai ni de
la Sicile, ni de l'Etna,' ni de la Méditerra-
née, bleue; verte ou grise, ni de la lave des
volcans qui roule, là-bas, sur le sol, tout
aussi brûlante que dans le cœur des
hommes.
Je ne vous parlerai ni de Crispi, le gallo-
phobe1, ni de Nasi, que de méchantes gens
MIMI AGUGLIA
ont traduit en justice; ils protégèrent tes
débuts de la- compagnie sicilienne, cepen-
dant. Mais ils furent ministres. et c'est suf-
fisant. v
Je ne vous dirai pas un mot de Lugné-
Poë. Son œuvre et l'Œuvre parlent pour
lui.
Je vous dirai simplement, ce qui s'est
passé entre- neuf heures et minuit, à Ma-
rigny, au grand étonnement de ceux qui s'y
trouvaient.
Nous étions donc hier, en ce lieu esti-
val, quelques centaines de Parisiens : criti-
ques, soiristes,-hommes de lettres, hommes
de théâtre, journalistes, auteurs' dramati-
ques, réunis pour assister à la répétition
générale d'une pièc/ sicilienne, écrite par
un Sicilien, pour des Siciliens, en; dialecte
sicilien^ et jouée par la compagnie sicilienne
qui a à sa tête le Cav. Uff. Giovanni
Grasso. (C'est 'ainsi aue parle le pro-
gramme. )
Nous étions venus un peu sceptiques et
nous attendions avec la résignation qu'on
apporte dans l'accomplissement d'un devoir
de politesse. Vous voyez: je ne vous cache
rien.
Comme de juste, pas un de nous n'enterfJ
dait un mot de la langue qu'on allait par-
ler. Même l'aurions-nous - sue, comment
1 entendre lorsque, à l'ouverture du rideau/'
une foule bigarrée, bruyante, colorée, dan-
sant, criant, chantant, buvant'nous eut fait
comprendre des yeux, des gestes et de lsr
voix que la fête commençait.
Car la pièce de Capuana, qui s'appelle,
Malià (Le Maléfice) qu'on jouait hier et qui.
est assez sombre,.comme on va le voir, dé-
bute dans la joie.
Nous ne fûmes pas longs à comprendre
et l'action s!engagea, se poursuivit, se dé-
noua en pleine clarté, tant extraordinaire-
ment- compréhensible fut le jeu. des acteurs.
Quant à :la pièce, en voici l'analyse :
Nedda épouse Cola, et le bonheur est sur
tous les visages; sur tous, sauf sur celui'
de la sœur de Nèdda, la fatale Jana. Som-
bre, farouche, belle de fureur contenue,
NAL CIVIL DE LA SEINE
(Première Chambre)
ire Alvarez
Comeedia
J. Le jugement
LE TRIBUNAL
Aprés avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que Albert-Raymond Gourron. dit Alva-
va » Desgrange, directeur du journal
p 'à n.ob a Pawlowski, son rédacteur en
ert Oudot gérant. et à Julien Torchet,
le paiement conjoint et solidaire de la somme de
cent mille francs à titre de dommages-intérêts;
qu'il 1 Pfétenn que ce journal aurait engagé con-
tre lui, dès le premiers jours de sa fondation,
~'Ul\e C > sous la signature de J. Tor-
mPagne d'hostilité systématique qui
lui aurait causé le plus grave préjudice ;
*
Attendu que si, dans l'intérêt de l'Art
dramatique comme dans l'intérêt du public,
à impoprte de maintenir hors d'atteinte les
dtoirs de la CritiQue- et si, d'autre part, les
artostes, en se consacrant au théâtre, doi-
vent faire abandon de toute susceptibilité
et se résigner à être l'objet des apprécia-
tions les plus diverses, tussent-elles des
cette critque ne saurait toutefois s'exercer
sans contrôle ,t. ",,trôle et sans limites, et dépasser
le but qu'elle Poursuit.
Qu'elle cesse d'être permise, lorsque, ne s'a-
fressant plus au talent même de l'artiste, elle
ise plus particulièrement celui-ci dans ses in-
térêts privés, v^s Portant atteinte à sa considé-
ration professionnelle ;
Attendu nQll jl re-suite des documents de la cau-
,. s-
se qu'après un premier article conçu dans deï
termes désobligeants pour le demandeur et in-
séré dans le numéro du 3 octobre 1907, le jour-
nal Comœdia fit paraître, à la rubrique « Opé-
ra » dans le numéro du 10 octobre, sous la si-
gnature de J. Torchet, un article exclusivement
consacré à Alvarez ;
Qu'après avoir rappelé le souvenir de ses dé-
buts et sévèrement critiqué l'artiste dans un rôle
qu'il venait d'interpréter, à" l'Opéra, Hauteur
ajoute: « On m'affirme que la prochaine direc-
tion s'est assuré le concours de M. Alvarez à
des conditions exorbitantes; ce serait une faute
et une maladresse. Je refuse d'y croire; si l'en-
gagement est signé, le public se chargera, j'es-
père, de le faire résilier. Au besoin, je l'y aide-
rai, par haine du faux art. »
Attendu que dans cet article Julien Torchet ne
se borne pas à critiquer le talent de l'artiste,
comme il en avait le droit absolu, qu'il incite,
en quelque sorte, la nouvelle direction à ne pas
signer, ou à résilier, s'il était déjà contracté,
l'engagement d'Alvarez, et le public à provoquer
cette mesure, promettant, au besoin, son appui
personnel;
Attendu qu'en s'exprimant dans ces termes au
sujet de l'engagement du demandeur, qu'il
n'avait qualité ni pour déconseiller ni pour faire
résilier, Julien Torchet a excédé les limites per-
mises tie la critiqué et porté atteinte à la consi-
dération professionnelle de ce dernier;
Qu'en outre, relevant dans l'assignation du 8
novembre 1907, le véritable nom du demandeur,
Julien Torchet, en cherchant a ridiculiser sur ce
nom patronymique, a aggravé ses torts par l'in-
sertion qu'il a faite à la dernière page du jour-
nal, dans les programmes de l'Opéra, de la
mention suivante: « Albert-Raymond Gourron,
dit Alvarez », alors que le dernandeur, n'a - jamais
joué', et n'est connu, au théâtre que- sous le
pseudonyme d'Alvarez ; ,
Attendu que ces procédés et les divers articles
désobligeants pour "le 'demandeur, parus soit
avant, soit après l'article spécialement visé du
10 octobre 1907, constituent, par leur ensemble,
une sorte de dénigrement systématique qui lui
a causé,, à défaut d'un préjudice matériel suffi-
samment établi,, un. préjudice moral incontestable,
dont il lui est dû réparation; ,
Que la somme de 100.000 ïrancs qu'il réclame
est toutefois hors de proportion avec-le montant
du préjudice qu'il a subi; "','
En ce qui concerne DesgraI9. directeur, et
de Pawlowski, rédacteur en chef.
Attendu que ces articles, dont le premier re-
monte au début même de la fondation du journal,
n'ont pu, à raison de leur continuité, échapper à
l'attention vigilante du rédacteur en chef ;
Qu'il en est de même pour Desgrange qui, au
surplus, ainsi que le déclare le directeur de
l'Opéra, dans une lettre écrite au demandeur, le
12 octobre 1907, le surlendemain du jour où .pa-
raissait l'article incriminé,. a reconnu que son
rédacteur avait eu, selon sa propre expression,
« la plume un ppu lourde » ; ,
Que leur responsabilité doit. donc être réte-
nue avec celle du gérant Robert Oudot ;
PAR CES MOTIFS,
Condamne Julien Torchet, Desgrange, de
Pawlowski, Oudot, conjointement et solidaire-
ment à payer au demandeur la somme de quin-
ze cents francs, à titre de dommages-intérêts,
pour les causes sus-énoncées ;
Ordonne à titre de supplément de dommages-
intérêts, l'insertion du présent jugement' dans
le journal Comœdia, à la place où a paru l'ar-
ticle incriminé et dans quatre journaux de Pa-
ris, au choix du demandeur, sans que le coût
de Chaque insertion puisse dépasser 200 francs;
Les condamne,, en outre,, sous la même soli-
darité, aux dépens, dont distraction au profit
de Me Dalléry, avoué, qui l'a requise aux of-
fres de droite : , ;
Ce qu'en pense Comœdia
Tel qu'il est et quelles 'que soient les
conclusions qu'il renferme à notre endroit,
ce jugement; , avons-nous besoin de. le
dire, nous cause un très vif plaisir.
Nous l'avons dit nettement,. en effet,
depuis le premier jour, ce qui nous inté-
ressait dans cette affaire cc n'étaient pas les
vérscmnaHtés sans' grande importance de
ceux qui' s'y trouvaient engagés, mais bien
là délimitation nécessaire et définitive :du
Droit de critique. Or, cette délimitation est
aujourd'hui chose faite et tous les. amis
véritables de l'Art le constateront avec un
réel bonheur:
L'art, en effet, s'est trouvé soumis jus-
qu'à ce jour dans notre- pays à un régime
privilégié qui lui a permis de se dévelop-
per a-son aise et l'on pouvait craindre
qu'en raison des principes nouveaux de
notre société moderne, sa commercialisa-
"tion ne soit à la merci d'un jugement.
Ce régime, d'exception,, tout le monde le
sait, c'est le droit que l'on a de 'critiquer
ùri artiste: franchement, rudement, bruta-
lement parfois, injustement même au be-
soin, car personne n'est infaillible, sans
avoir à s'inquiéter des' conséquences com-
merciales inévitables que peut avoir cette
critique.
Soumettre la question aux tribunaux ci-
vils, c'était renoncer à ce régime d'excep-
tion et, en plaçant l'altaire sur un terrain
commerce, provoquer une condamnation
logique au point de vue commercial., C'était
faire, en d'autres matières, ce Que ferait le
membre d'un grand cercle qui, ayant perdu
une somnte importante au jeu, oublierait tes
habitudes spéciales de son monde et sou-
mettrait l'affaire aux tribunaux. D'avance,
il saurait iJUe les tribunaux le libéreront
de sa dette, mais ce serait du même coup
détruire le régime spécial sur lequel re-
posent les relations-cordiales qui existent
entrée gens du monde. -.,
En matière de théâtre, alliûns-hous avoir
aussi une exception de jeu permettant aux
acteurs d'échapper aux critiques en se re-
fugiant entre les bras du Tribunal? On
pouvait te cràindre et cela etlt, du - coup,
ruiné l'art dramatique français'tbtit éritief.
Une fois de-plus, je le répète, le Tribu-
nal a maintenu nettement les droits de la
critique et il l'a fait avec une netteté et
une indépendance que l'on peut admirer
sans réserve de la part de gens a qui l'on
ne demandait, somme toute, que de juger,
au civil, une .affaire de gros sous.
Mais, nous dira-t-on, quel que soit votre
contentement, vous n'en êtes pas moins
condamnés et si, avec quinze cents francs,
M. Alvarez ne peut plus faire, pour cet
été, l'achat de la maison qu'il espérait peut-
être et qu'il se proposait, sans doute, de
baptiser Villa Comoedia, il n'en est pas
motus vrai que le jugement, sur deux
points, vous donne tort.
Eh bien! qu'il nous soit permis, mainte-
nant que cette affaire est terminée, de dire
notre opinion en toute franchise. Dès l'ins-
tant que le souci légitime de notre défense
ne nous oblige plus à taire sur ce point la
sourde oreille, nçus ne faisons aucune diffi-
culté pour admettre que la phrase de notre
ami Torchet concernant la résiliation de
l'engagement Alvarez était une insigne
maladresse juridique et que sa* lecture, le
lendemain, lit bondir notre cœur de vieux
juriste.
Nous faisons d'autant moins de difficul-
tés pour le reconnaître que si, véritable-
ment, Alvarez s'était trouvé en présence
d'un journal faisant contre lui une campa-
gne personnelle et de mauvaise foi, jamais
pareille phrase, dans des épreuves relues
quotidiennement par un juriste expert, n'eût
été imprimée.Pour. qu'elle ait passé, il fallait
qu'elle eût été écrite par un littérateur dé-
gagé de toute préoccupation extérieure, ne
suivant que son inspiration et ne voyant
dans ses menaces que des adjectifs desti-
nés à renforcer sa démonstration.
En pratique, Torchet n'entehdait dire
qu'une chose, c'est, selon lui, qtt'Alvarez
chantait faux, et ses imprécations n'avaient
dans son esprit que la valeur d'arguments
tels que « les dieux l'écrasent! » ou
« que Jupiter le confonde ! » Seulement
comme les dieux n'existent pas, il eût été
plus prudent, au point de vue juridique, de
lès invoquer en pareille circonstance plu-
tôt que la nouvelle Direction de l'Opéra.
Que celui d'entre les littérateurs qui, dans
le feu d'une argumentation, n'a jamais pro-
nonce une phrase que pût relever une assl<
gnation, lui jette la première pierre.
En tout cas, pour tous les honnêtes
gens, cette imprudence ne constituera ja-
mais qu'un simple brevet d'honnêteté.
Quant à l'argument qui consiste à nous
incriminer d'avoir publié le véritable nom
de M. Alvarez, on nous permettra très res-
pectueusement de le considérer comme la
seule partie faible du jugement.
Etant donné que c'est sous ce nom que
M. Alvarez esh désigné dans le jugement et
que linsertionxde ce jugement est ordon.
née dans les principaux journaux parisiens,
on excusera la respectueuse épouvante que
nous éprouvons en constatant que c'est le
Tribunal lui-même qui va forcer nos con-
frères à désigner une tois de plus M. Al-
varez sous son nom prohibé.
Souhaitons confraternelle ment à nos amis
de la Presse parisienne de ne point encou-
rir pour ce fait les rigueurs du Tribunal, et
contentons-nous, pour nous-même, de con-
tinuer comme auparavant, qu'il s'agisse de
M. Alvarez ou de nos amis, notre critique
rigoureusement impartiale du mouvement
dramatique, sans préoccupation cette tois,
appuyé que nous sommes sur le jugement
qui nous y autorise.
G, DE PAWLOWSKI,
2° *A*onée. - N° 102 Quotidien) Le Numéro : 5 centime#
.;
Vendredi 10 Janvier 1908î\
t»
Rédacteur en Chef s G* dù PAWLOWSKI '-
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
1 boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE ; 238-07
Presse Télégraphique : COMŒDlA"PAR'iS
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOIS
taris et Départements. 24 fr. 2 fr.
tranger 40 » 20 »
fcs^
RÉDACTION & ADMINISTRATION =
27, Bouleuard, Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒBÏA=PARfS
ABONNEMENTS:
UN AN 6 MOIS
Paris et Départements, 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
La Médaille
Pour Hugues Delorme.
était à un de ces dîners parisiens
sont tous les convives sont cités, le len-
demain, dans les courriers mondains des
journaux. La maîtresse de maison est
une grande dame Qui s'occupe, à la fois,
d'art et de politique. Tout en patronnant
de retentissantes auditions musicales, en
tnerpSant des expositions, elle prépare
^échS aVra«on et, de quatre à cinq, elle
réfléchit It à la manière la plus aisée de
Son er la royauté en France.
Son mari est un vieillard silencieux et
distingué Qui collectionne les médailles et
les pièces de monnaie. Il en a rempli des
appartements entiers et s'est acquis une
brillante réputation dans la partie.
Or l'autre semaine, il avait réuni à
sa table ce qu'on a coutume d'appeler
l'élite de la meilleure société. Il y avait
six académiciens dont trois de l'Acadé-
mie française ; deux ministres, dont un
socialiste ; un auteur dramatique, le di-
recteur d'un grand journal réaction-
naire, Uti général, un chirurgien émi-
nent, trois membres de l'Union, un sé-
nc-t tur y Un poète, un chroniqueur, un
n» le rédacteur en chef d'une
'pipQrta nte revue, un ancien ténor mon-
dain et un jeune et spirituel compositeur
de musique, tous s'intéressant aux
vieilles monnaies, tous un peu collec-
Pô î
Une seule femme --- la maîtresse de
mulson - et vingt-trois hommes, y
compris le numismate.
avait êrrie de passer à table, celui-ci
avait même de passer à table, celui-ci
avais pris à part tous ses invités et leur
avait annoncé pour le dessert une ex-
traordinaire surprise. Mais, dès le
deuxième service, personne n'y put te-
nir : on Voulut savoir, et, cédant à tant
dit :
d'insistance, notre hôte prit la parole et
— Messieurs, je vous ai tous réunis
ici, d' f Ord Pour le plaisir de vous voir
à ma table, ensuite pour la joie de vous
le Plu er la, Pièce la plus rare, le trésor
le plus unique, la merveille la plus in-
comparable que vous ayez jamais con-
templée jusqu'ici. Je l'ai depuis un mois,
elle vient d'être trouvée en Egypte. C'est
le perle e de ma collection. Je l'ai payée
deux cent mille francs, je la vendrai un
million quand il me plaira.
On fit silence, une pièce qui valait un
million Ce n'était pas un spectacle ordi-
— La voici: poursuivit l'heureux pro-
priétaire, et il la tendit à son voisin.
C'était une sorte de grande médaille
en or, de Cinq à six centimètres de dia-
mètre environ. Elle circula de main en
main, chacun voulait la voir. Pensez
donc! tenir un million dans sa main,
même pendant un instant, cela n'est pas
donné à tout le monde! La pièce circu-
ait, circulait, quand, tout à coup, elle
disparut. Parfaitement, elle disparut ! elle
a chercha, elle demeurait introuvable.
Ce fut d'abord de l'étonnement, bientôt
de la stupeur. Quel mystérieux Arsène
Lupin était introduit dans cette aristo-
cratique Salle à manger et avait pris le
visage respesctable d'un de ces hôtes il-
res
On Ie disait, on se regardait avec ter-
reur. le numismate était livide et sa
tIlOt S éventait nerveusement sans dire
Alors, auteur dramatique, en homme
qui a l'habitude de dénouer les situa-
tions les Plus inextricables, rompit le si-
— Nous sommes tous d'honnêtes
gens, Us nous connaissons, nous
avons lesa plus entière confiance les uns
dans les autres. Aussi, n'ayons pas de
sot amour-propre! Une pièce qui vaut
un million a disparu, je suis sûr qu'on la
retrouvera, mais comme il est possible
qu'un de nous l'ait égarée par mégarde,
je propose que nous vidions tous nos
poches.
Cette proposition fut acceptée avec
joie, presque avec enthousiasme. Et ce
fut pour tout le monde un double plaisir
que de déposer sur la table, devant les
regards ébahis des maîtres d'hôtel, mou-
choir, clefs, monnaie, portefeuille, étui
à cigarettes, boîtes d'allumettes ou bon-
bonnière. 1
Deux des convives, pourtant, n a-
vaient pas bougé. L'un d'eux allait bal-
butier quelques explications, mais l'au-
tre, très énergiquement, l'arrêta :
- Je trouve ce moyen d'investigation
blessant et humiliant pour nous. Je m'y
refuse. Je ne viderai pas mes poches.
— Moi non plus! reprit l'autre.
Le premier était un académicien qui
compte les plus retentissants succès au
théâtre et dans le roman ; le second, un
général qui démissionna bruyamment
voici quelques années. ,,.,
Tous les assistants protestèrent aussi-
tôt: :
— Mais personne ne vous soupçonne.
Vous le savez bien.
— Je l'espère, répliqua le dissident.
— Vous êtes libre d'agir comme il
vous plaît, reprit un peu sèchement le
collectionneur.
— J'y compte bien!.
Je vous ai dit que tout cela se passait
pendant le deuxième service. Vous ima-
ginez comment dut s'écouler le reste du
repas. On ne parlait qu'à voix basse,
oh n'osait plus adresser la parole aux
deux protestataires ; on les regardait
avec méfiance; l'écrivain plastronnait,
portait beau ; le général semblait écroulé.
Le maître et la maîtresse de la maison
se lançaient, à travers la salle, des re-
gards significatifs ; on eût dit, à voir tou-
tes ces figures bouleversées, qu'il y avait
un mort dans la chambre voisine.
A un moment, un domestique cassa
un verre et tout le monde sursauta ner-
veusement. C'était, je vous l'assure, un
dîner impressionnant.
Il s'acheva enfin. On quitta la table
pour passer au fumoir ou au salon. Et
en se levant, la maîtresse de maison fit
tomber la fameuse médaille,, qui avait
tout simplement glissé sur sa jupe, sous
sa serviette.
Ce fut un soulagement. On respira.
Chacun à son tour se précipita vers les
deux victimes et éprouva le besoin de
les assurer de sa sympathie et de sa con-
fiance.
— Mais pourquoi avez-vous refusé de
vider vos poches, demanda le chronir
queur?
- Maintenant, vous allez le savoir,
répondit l'écrivain.
Et se fouillant, ir sortit. - devinez
quor? — une pièce de monnaie exacte-
ment pareille au « trésor unique » qui
venait de causer un tel émoi.
— Mon cher, continua-t-il, impitoya-
ble, en s'adressant au maître de céans,
j'avais apporté cette pièce pour vous la
faire voir, mais quand vous nous avez
montré la vôtre, exactement pareille, je
n'ai pas voulu - je suis un homme bien
élevé! — vous dire devant tous vos in-
vités que votre estimation était un peu
fantaisiste. Votre pièce n'est pas rare,
n'est pas incomparable, ne vaut pas un
million, loin de là. J'ai payé la pareille
— -jugez-en ! - - trois mille francs, et
vous en trouverez dix autres identiques
rue des Saints-Pères.
» Mais voyez, tout de même, si j'avais
vidé mes poches, qu'on n'eût pas re-
trouvé votre pièce et que j'eusse montré
celle-ci, tout le monde m'eût pris pour
un voleur. Et l'on me prenait aussi pour
un voleur, parce que j'ai refusé. Voilà,
tout simplement, où un excès de bonne
éducation peut entraîner un honnête
homme!. a
-Et vous? dèmanda-t-on au général.
— Moi, dit-il, avec timidité, je peux
bien vous l'avouer maintenant, si je n'ai
pas vidé mes poches, c'est qu'elles ne
contenaient qu'un mouchoir déchiré, une
vieille blague à tabac usée — et deux
sous.
» Et je ne voulais pas, devant vous,
étaler et avouer une pareille misère,. »
L'histoire est d'hier.
Pierre MORTIER.
-
Nous publierons ^demain un article de
J.-H. ROSNY
Échos
Ce soir, à huit heures et demie, à Tria-
non-Lyrique, première représentation (à ce
théâtre) de: Le Pré aux Clercs, opéra-co-
mique en trois actes, de Planard, musique
d'Hérold. -
Ce soir, à minuit et demi, à la Gaîté.:Ro.
chechouart, répétition générale de la revuM
Ce soir, à huit heures trois quarts, à la
Folie-Pigalle, répétition générale du nou-
veau spectacle.
T
oujours la question des droits.
Elle n'est pas neuve, la question! Et
si Comœdia l'a remise sur le tapis, pour le
plus grand bien des auteurs lésés et volés,
d'autres avant lui avaient signalé les abus
criards auxquels donne lieu la perception
des droits en province.
Le 27 juin 1906 — il y a dix-huit mois
- notre excellent confrère Max Maurey si-
gnalait, dans un « leader ».de Gil Blas, la
situation irrégulière et grotesque du Kur-
saal de Lille, où le contrôleur en chef se
trouvait être, en même temps, représentant
de la Société des Auteurs et était ainsi ap-
pelé quotidiennement à se contrôler t'ùi-
même !
Quant, à l'inspecteur du droit des pau-
vres, il n'existait que sur le papier ou, tout
au moins, ^'il existait en chair et en os, il
ne mettait jamais les pieds au théâtre. le
soir!! (Sic.)
Des cette époque, M. Rctëm # PIe"
prenait la parole à l'assemblée générale des
Auteurs et demandait, avec une âpre mais
vaine énergie, que l'on s'occupât un peu
de la manière dont étaient perçus les droits
en province. ---
Il paraît que l'on s'en occupe depuis qâuel-
ques jours.— et ce ne sera point un des
moindres titres de gloire de Comœdia d'a-
voir attaché ce grelot.
c
orrespondange :
Monsieur le Directeur, -1
Je n'ai aucun souvenir d'avoir engagé un
pari sur la longévité de Comœdia.
Mais j'ai toujours payé mes dettes., Que
celui avec qui j'ai parié veuille bien se faire
connaître et réveiller ma mémoire endor-
mie, je vous réponds qu'il recevra de moi
ce que je lui dois.
Veuillez agréer l'assurance de mes sen-
timents distingués. ,
Paul GAVAULT.
G
ros émoi hier rue Auber. A la nuit
tombante, on voyait apparaître, à
l'une des fenêtres de l'Opéra,..derrière le
monument de Garmer,. un. long - -ïtieHlar.d,
paie et décharné;' qui faisait, à Paidè de
ses bras- immenses, des signaux désespérés
aux passants. « Quvrez-moi, criait-il, je
suis enfermé: ». Déjà la foule: attribuait à
M. Gailhard les. crimes les plus atroces.
On racontait que les remaniements de la
salle avaient fait découvrir des cachettes
comparables aux plus noires geôles de la
Bàstille et le vieillard apparaissait comme
un nouveau Latude.
N'écoutant que son courage, un brave
cocher de l'Urbaine s'élança chez le con-
cierge, lequel, armé d'une clef monumen-
tale et d'un flambeau, vint délivrer.
M. Bourgault-Ducoudray en personne. Le
sympathique compositeur s'était simplement
attardé dans les couloirs de la Bibliothèque
et s'était laissé prendre entre les deux fer-
metures de la porte de la rue et de la com-
munication avec la salle. Il y a des gens
qui trouvent cela trop simple et qui se mé-
fient encore.
D
usausoy, joaillier expert, 4, boulevard
des Italiens, achète toujours comp-
tant: bijoux, diamants, perles et pierres
fines.. Il-donne presque toujours une plus-
value sur le prix offert par n'importe quelle
maison.
c
omœdia annonçait hier qtie M, Jules
Bois avait envoyé ses témoins à M.
Vincent d'Indy. Nous croyons savoir, d'a-
près une information digne de foi, que
M. Vincent dlndy a constitué les siens dans
la journée d'hier. L'un — soyons discret
— serait le fils d'un célèbre compositeur
français, loutre un compositeur également
réputé, d'origine belge.
A
h! mais! ,
La chose se passe à la dernière réu-
nion au Comité de la Comédie-Française,
et ces messieurs, entre eux, éprouvent une
fois de plus le besoin d'affirmer qu'ils ne
sont pas gens à se laisser conduire.
L'un d'eux, l'un des plus notoires, ré-
sume ainsi la situation: « Chaque fois
qu'un ministre voudra nous imposer des
candidats sociétaires de son choix, nous les
blackboulerons impitoyablement! »
Et allez donc !
A
l'Orphelinat des Arts.
L'Orphelinat des Arts était en fête,
hier: pour commencer joyeusement l'année
nouvelle, Mme Jeanne Poilpot avait fait
une surprise à ses soixante-dix petites
filles: un arbre de Noël délicieusement dé-
coré et chargé de jolis cadeaux. Nous eû-
4iies aussi un concert donné par les orphe-
lines elles-mêmes, et auquel Mmes de Nuo-
vina, Lecontë et M. Brunot apportèrent cha-
ritablement le concours de leurs "beaux ta-
lents; Un délicieux goûter réunit petits et
grands et termina cette joyeuse journée.
Reconnu dans l'assistance élégante et
nombreuse: la duchesse d'Uzès, Mmes Ro-
ty, Jules Dietz-Monnnin, Ganderax, Phi-
lippir'-Pterson- Scalini; Rachel Boyef, Saint-
Oermain, André, Kr^Uss, Parés, Bruno-Pé-
!~i~t ..MAt,..Mâriani, J eah-lMitp Forain)
Poilpot, etc.
L
es ravissants objets de toute nature fa-
briqués par le maître orfèvre Leroy,
22, rue Réaumur, sont de ceux qu'un
homhie de goût peut toujours offrir en
n'importe quelle circonstance^ avec la cer-
titude de les voir bien accueillis.
A
u dîner des Théâtres, chez Cham-
peaux — ces dîners si suivis par
toute la genry parisienne; deux actrices
causaient d'un ténor de province retiré
de la scène :
-i- Sais-tu, ma chère, ce qu'il m'a donné
comme raison, lorsqu'il a quitté le théâtre?
— • ? ? -
— J'ai la voix tellement forte, a-t-il dit,
que mon médecin me conseille de ne plus
chanter. Il a peur que je me crève le tym-
pan !.
NOUVELLE A LA MAIN
D
ans un théâtre de province où 'Ie's
abonnés sont particulièrement ner-
veux, un cabotin ennuyeux comme la pluie
est, chaque soir, l'objet de manifestations
peu sympathiques de la part du public qui
demande la résiliation de l'engagement de
ce barbier.. !
Et, le directeur- de s'écrier, en donnant
son congé, à l'artiste:, * -
— Voilà ce qui peut s'appeler : suppri-
mer les feux du rasoir ! ',
Le Masque de Verrez
LA COMPAGNIE SICILIENNE DE GIOVANNI GRASSC
AU THÉÂTRE DE L'ŒUVRE
MALIA (Le Maléfice)
de L. CAPUANA
Rassurez-vous! Je ne vous parlerai ni de
la Sicile, ni de l'Etna,' ni de la Méditerra-
née, bleue; verte ou grise, ni de la lave des
volcans qui roule, là-bas, sur le sol, tout
aussi brûlante que dans le cœur des
hommes.
Je ne vous parlerai ni de Crispi, le gallo-
phobe1, ni de Nasi, que de méchantes gens
MIMI AGUGLIA
ont traduit en justice; ils protégèrent tes
débuts de la- compagnie sicilienne, cepen-
dant. Mais ils furent ministres. et c'est suf-
fisant. v
Je ne vous dirai pas un mot de Lugné-
Poë. Son œuvre et l'Œuvre parlent pour
lui.
Je vous dirai simplement, ce qui s'est
passé entre- neuf heures et minuit, à Ma-
rigny, au grand étonnement de ceux qui s'y
trouvaient.
Nous étions donc hier, en ce lieu esti-
val, quelques centaines de Parisiens : criti-
ques, soiristes,-hommes de lettres, hommes
de théâtre, journalistes, auteurs' dramati-
ques, réunis pour assister à la répétition
générale d'une pièc/ sicilienne, écrite par
un Sicilien, pour des Siciliens, en; dialecte
sicilien^ et jouée par la compagnie sicilienne
qui a à sa tête le Cav. Uff. Giovanni
Grasso. (C'est 'ainsi aue parle le pro-
gramme. )
Nous étions venus un peu sceptiques et
nous attendions avec la résignation qu'on
apporte dans l'accomplissement d'un devoir
de politesse. Vous voyez: je ne vous cache
rien.
Comme de juste, pas un de nous n'enterfJ
dait un mot de la langue qu'on allait par-
ler. Même l'aurions-nous - sue, comment
1 entendre lorsque, à l'ouverture du rideau/'
une foule bigarrée, bruyante, colorée, dan-
sant, criant, chantant, buvant'nous eut fait
comprendre des yeux, des gestes et de lsr
voix que la fête commençait.
Car la pièce de Capuana, qui s'appelle,
Malià (Le Maléfice) qu'on jouait hier et qui.
est assez sombre,.comme on va le voir, dé-
bute dans la joie.
Nous ne fûmes pas longs à comprendre
et l'action s!engagea, se poursuivit, se dé-
noua en pleine clarté, tant extraordinaire-
ment- compréhensible fut le jeu. des acteurs.
Quant à :la pièce, en voici l'analyse :
Nedda épouse Cola, et le bonheur est sur
tous les visages; sur tous, sauf sur celui'
de la sœur de Nèdda, la fatale Jana. Som-
bre, farouche, belle de fureur contenue,
NAL CIVIL DE LA SEINE
(Première Chambre)
ire Alvarez
Comeedia
J. Le jugement
LE TRIBUNAL
Aprés avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que Albert-Raymond Gourron. dit Alva-
va » Desgrange, directeur du journal
p 'à n.ob a Pawlowski, son rédacteur en
ert Oudot gérant. et à Julien Torchet,
le paiement conjoint et solidaire de la somme de
cent mille francs à titre de dommages-intérêts;
qu'il 1 Pfétenn que ce journal aurait engagé con-
tre lui, dès le premiers jours de sa fondation,
~'Ul\e C > sous la signature de J. Tor-
mPagne d'hostilité systématique qui
lui aurait causé le plus grave préjudice ;
*
Attendu que si, dans l'intérêt de l'Art
dramatique comme dans l'intérêt du public,
à impoprte de maintenir hors d'atteinte les
dtoirs de la CritiQue- et si, d'autre part, les
artostes, en se consacrant au théâtre, doi-
vent faire abandon de toute susceptibilité
et se résigner à être l'objet des apprécia-
tions les plus diverses, tussent-elles des
cette critque ne saurait toutefois s'exercer
sans contrôle ,t. ",,trôle et sans limites, et dépasser
le but qu'elle Poursuit.
Qu'elle cesse d'être permise, lorsque, ne s'a-
fressant plus au talent même de l'artiste, elle
ise plus particulièrement celui-ci dans ses in-
térêts privés, v^s Portant atteinte à sa considé-
ration professionnelle ;
Attendu nQll jl re-suite des documents de la cau-
,. s-
se qu'après un premier article conçu dans deï
termes désobligeants pour le demandeur et in-
séré dans le numéro du 3 octobre 1907, le jour-
nal Comœdia fit paraître, à la rubrique « Opé-
ra » dans le numéro du 10 octobre, sous la si-
gnature de J. Torchet, un article exclusivement
consacré à Alvarez ;
Qu'après avoir rappelé le souvenir de ses dé-
buts et sévèrement critiqué l'artiste dans un rôle
qu'il venait d'interpréter, à" l'Opéra, Hauteur
ajoute: « On m'affirme que la prochaine direc-
tion s'est assuré le concours de M. Alvarez à
des conditions exorbitantes; ce serait une faute
et une maladresse. Je refuse d'y croire; si l'en-
gagement est signé, le public se chargera, j'es-
père, de le faire résilier. Au besoin, je l'y aide-
rai, par haine du faux art. »
Attendu que dans cet article Julien Torchet ne
se borne pas à critiquer le talent de l'artiste,
comme il en avait le droit absolu, qu'il incite,
en quelque sorte, la nouvelle direction à ne pas
signer, ou à résilier, s'il était déjà contracté,
l'engagement d'Alvarez, et le public à provoquer
cette mesure, promettant, au besoin, son appui
personnel;
Attendu qu'en s'exprimant dans ces termes au
sujet de l'engagement du demandeur, qu'il
n'avait qualité ni pour déconseiller ni pour faire
résilier, Julien Torchet a excédé les limites per-
mises tie la critiqué et porté atteinte à la consi-
dération professionnelle de ce dernier;
Qu'en outre, relevant dans l'assignation du 8
novembre 1907, le véritable nom du demandeur,
Julien Torchet, en cherchant a ridiculiser sur ce
nom patronymique, a aggravé ses torts par l'in-
sertion qu'il a faite à la dernière page du jour-
nal, dans les programmes de l'Opéra, de la
mention suivante: « Albert-Raymond Gourron,
dit Alvarez », alors que le dernandeur, n'a - jamais
joué', et n'est connu, au théâtre que- sous le
pseudonyme d'Alvarez ; ,
Attendu que ces procédés et les divers articles
désobligeants pour "le 'demandeur, parus soit
avant, soit après l'article spécialement visé du
10 octobre 1907, constituent, par leur ensemble,
une sorte de dénigrement systématique qui lui
a causé,, à défaut d'un préjudice matériel suffi-
samment établi,, un. préjudice moral incontestable,
dont il lui est dû réparation; ,
Que la somme de 100.000 ïrancs qu'il réclame
est toutefois hors de proportion avec-le montant
du préjudice qu'il a subi; "','
En ce qui concerne DesgraI9. directeur, et
de Pawlowski, rédacteur en chef.
Attendu que ces articles, dont le premier re-
monte au début même de la fondation du journal,
n'ont pu, à raison de leur continuité, échapper à
l'attention vigilante du rédacteur en chef ;
Qu'il en est de même pour Desgrange qui, au
surplus, ainsi que le déclare le directeur de
l'Opéra, dans une lettre écrite au demandeur, le
12 octobre 1907, le surlendemain du jour où .pa-
raissait l'article incriminé,. a reconnu que son
rédacteur avait eu, selon sa propre expression,
« la plume un ppu lourde » ; ,
Que leur responsabilité doit. donc être réte-
nue avec celle du gérant Robert Oudot ;
PAR CES MOTIFS,
Condamne Julien Torchet, Desgrange, de
Pawlowski, Oudot, conjointement et solidaire-
ment à payer au demandeur la somme de quin-
ze cents francs, à titre de dommages-intérêts,
pour les causes sus-énoncées ;
Ordonne à titre de supplément de dommages-
intérêts, l'insertion du présent jugement' dans
le journal Comœdia, à la place où a paru l'ar-
ticle incriminé et dans quatre journaux de Pa-
ris, au choix du demandeur, sans que le coût
de Chaque insertion puisse dépasser 200 francs;
Les condamne,, en outre,, sous la même soli-
darité, aux dépens, dont distraction au profit
de Me Dalléry, avoué, qui l'a requise aux of-
fres de droite : , ;
Ce qu'en pense Comœdia
Tel qu'il est et quelles 'que soient les
conclusions qu'il renferme à notre endroit,
ce jugement; , avons-nous besoin de. le
dire, nous cause un très vif plaisir.
Nous l'avons dit nettement,. en effet,
depuis le premier jour, ce qui nous inté-
ressait dans cette affaire cc n'étaient pas les
vérscmnaHtés sans' grande importance de
ceux qui' s'y trouvaient engagés, mais bien
là délimitation nécessaire et définitive :du
Droit de critique. Or, cette délimitation est
aujourd'hui chose faite et tous les. amis
véritables de l'Art le constateront avec un
réel bonheur:
L'art, en effet, s'est trouvé soumis jus-
qu'à ce jour dans notre- pays à un régime
privilégié qui lui a permis de se dévelop-
per a-son aise et l'on pouvait craindre
qu'en raison des principes nouveaux de
notre société moderne, sa commercialisa-
"tion ne soit à la merci d'un jugement.
Ce régime, d'exception,, tout le monde le
sait, c'est le droit que l'on a de 'critiquer
ùri artiste: franchement, rudement, bruta-
lement parfois, injustement même au be-
soin, car personne n'est infaillible, sans
avoir à s'inquiéter des' conséquences com-
merciales inévitables que peut avoir cette
critique.
Soumettre la question aux tribunaux ci-
vils, c'était renoncer à ce régime d'excep-
tion et, en plaçant l'altaire sur un terrain
commerce, provoquer une condamnation
logique au point de vue commercial., C'était
faire, en d'autres matières, ce Que ferait le
membre d'un grand cercle qui, ayant perdu
une somnte importante au jeu, oublierait tes
habitudes spéciales de son monde et sou-
mettrait l'affaire aux tribunaux. D'avance,
il saurait iJUe les tribunaux le libéreront
de sa dette, mais ce serait du même coup
détruire le régime spécial sur lequel re-
posent les relations-cordiales qui existent
entrée gens du monde. -.,
En matière de théâtre, alliûns-hous avoir
aussi une exception de jeu permettant aux
acteurs d'échapper aux critiques en se re-
fugiant entre les bras du Tribunal? On
pouvait te cràindre et cela etlt, du - coup,
ruiné l'art dramatique français'tbtit éritief.
Une fois de-plus, je le répète, le Tribu-
nal a maintenu nettement les droits de la
critique et il l'a fait avec une netteté et
une indépendance que l'on peut admirer
sans réserve de la part de gens a qui l'on
ne demandait, somme toute, que de juger,
au civil, une .affaire de gros sous.
Mais, nous dira-t-on, quel que soit votre
contentement, vous n'en êtes pas moins
condamnés et si, avec quinze cents francs,
M. Alvarez ne peut plus faire, pour cet
été, l'achat de la maison qu'il espérait peut-
être et qu'il se proposait, sans doute, de
baptiser Villa Comoedia, il n'en est pas
motus vrai que le jugement, sur deux
points, vous donne tort.
Eh bien! qu'il nous soit permis, mainte-
nant que cette affaire est terminée, de dire
notre opinion en toute franchise. Dès l'ins-
tant que le souci légitime de notre défense
ne nous oblige plus à taire sur ce point la
sourde oreille, nçus ne faisons aucune diffi-
culté pour admettre que la phrase de notre
ami Torchet concernant la résiliation de
l'engagement Alvarez était une insigne
maladresse juridique et que sa* lecture, le
lendemain, lit bondir notre cœur de vieux
juriste.
Nous faisons d'autant moins de difficul-
tés pour le reconnaître que si, véritable-
ment, Alvarez s'était trouvé en présence
d'un journal faisant contre lui une campa-
gne personnelle et de mauvaise foi, jamais
pareille phrase, dans des épreuves relues
quotidiennement par un juriste expert, n'eût
été imprimée.Pour. qu'elle ait passé, il fallait
qu'elle eût été écrite par un littérateur dé-
gagé de toute préoccupation extérieure, ne
suivant que son inspiration et ne voyant
dans ses menaces que des adjectifs desti-
nés à renforcer sa démonstration.
En pratique, Torchet n'entehdait dire
qu'une chose, c'est, selon lui, qtt'Alvarez
chantait faux, et ses imprécations n'avaient
dans son esprit que la valeur d'arguments
tels que « les dieux l'écrasent! » ou
« que Jupiter le confonde ! » Seulement
comme les dieux n'existent pas, il eût été
plus prudent, au point de vue juridique, de
lès invoquer en pareille circonstance plu-
tôt que la nouvelle Direction de l'Opéra.
Que celui d'entre les littérateurs qui, dans
le feu d'une argumentation, n'a jamais pro-
nonce une phrase que pût relever une assl<
gnation, lui jette la première pierre.
En tout cas, pour tous les honnêtes
gens, cette imprudence ne constituera ja-
mais qu'un simple brevet d'honnêteté.
Quant à l'argument qui consiste à nous
incriminer d'avoir publié le véritable nom
de M. Alvarez, on nous permettra très res-
pectueusement de le considérer comme la
seule partie faible du jugement.
Etant donné que c'est sous ce nom que
M. Alvarez esh désigné dans le jugement et
que linsertionxde ce jugement est ordon.
née dans les principaux journaux parisiens,
on excusera la respectueuse épouvante que
nous éprouvons en constatant que c'est le
Tribunal lui-même qui va forcer nos con-
frères à désigner une tois de plus M. Al-
varez sous son nom prohibé.
Souhaitons confraternelle ment à nos amis
de la Presse parisienne de ne point encou-
rir pour ce fait les rigueurs du Tribunal, et
contentons-nous, pour nous-même, de con-
tinuer comme auparavant, qu'il s'agisse de
M. Alvarez ou de nos amis, notre critique
rigoureusement impartiale du mouvement
dramatique, sans préoccupation cette tois,
appuyé que nous sommes sur le jugement
qui nous y autorise.
G, DE PAWLOWSKI,
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.53%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.53%.
- Auteurs similaires France-Vietnam France-Vietnam /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "FrVtm0"
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/6
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7646486q/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7646486q/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7646486q/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7646486q/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7646486q
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7646486q
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7646486q/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest