Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1907-11-19
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 19 novembre 1907 19 novembre 1907
Description : 1907/11/19 (A1,N50). 1907/11/19 (A1,N50).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7645348c
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
-. 1 .-.
tannée. - N' 50 (Quolldlen) Le Numéro: 5 centimes - , Mardi 19 Novembre 1907.
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Rédacteur en Chef : G. de PA WLOWSKI
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^ACTION & ADMINISTRATION :
27, Bouleuard Poissonnière, PARIS
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Étranger. 40 » 20 »
Académies
Des fervents de Jules Renard s'étaient
réunis pour fêter son élection à l'Acadé-
mie G oncourt
Rejouissons -nous, dit l'un. Mais un
homme qui porte ce titre, « Jules Re-
nard », n' a pas besoin de sous-titres. Re-
nard, depuis longtemps, faisait partie
de cette Académie secrète que tout bon
~lettré ai II1e à élire au dedans de soi. Au
fond, c'est dans ces ateliers, tout à fait
mystérieux, que se frappent les vraies
médailles de la gloire. Les autres mé-
dailles, c'est, plus ou moins, de la fausse
monnaie 9ui n'est pas sûre d'avoir cours
sans les âges futurs. Les électeurs de
cette Académie inaccessible demeurent
on ne sait où. On ne peut pas les inviter
à dîner, on ne leur rend pas visite,
comme à MM. René Bazin, Costa de
Beauregard, qui sont obligés, pendant
une période électorale académique, de te-
nir 0i4v!*rte la porte de leur logis, si
~en que >5 Q i des indigents, ayant fait acte
de candidats, y entrent, l'hiver, pour
chauffer.
Dans 0tre Académie secrète, le nom-
bre des places n'est pas limité; on l'aug-
mente pour faire entrer ceux qui en sont
dignes; On le diminue quand le grand
:~~PO~t ne donne pas; elle n'a aucun
rapport avec votre Académie de quarante
personnes, dont les dimensions sont im-
~ables, et où l'on se sert de ce que
l'on a sous la main : duc, orateur, poète
~ou général, pour remplir les espaces vi-
des, comme avec des copeaux.
Au moins, à l'Académie Goncourt
n'adment-on que des écrivains. A l'Aca-
démie française, ils ont des combinaisons
spéciales, quand, par suite de raisons
~eures, Ils ont, comme on dit dans les
~eaux de location, des fauteuils de re-
~or. Ai 11:S1: en ce moment, sur leurs trois
~fauteuils disponibles, ils en abandonnent
~aux poètes ; ils en destinent un autre
~grand mathématicien; quant au
~troisième c'est celui du directeur de La
~des Deux-Mondes, qui a sa place
à l'Académie, comme le préfet de police
~se ge dans les théâtres subvention-
I est .A- i.d,ent que ces traditions ne
~pas inutiles pour faire durer le pres-
~de l' Ac idémie. On a dit qu'elle re-
~sur x fortes ewIwihw t te SIRF
.QDV .j es gens de lettres, qui aiment à
~doyer des ducs, et celui des ducs, qui
~ent a dire : « C'est nous qui sont
« écrivains! »
~Au dix-huitième siècle, on s'est moqué
de l'Aca s; mie' parce qu'elle avait admis
~son sein de grands seigneurs qui
ne savaient ^ent pas l'orthographe. Aujour-
d'hui, l es grands seigneurs se sont mis
à écrire: C est tout ce que n9us Y avons
~gagné.
Aussitôt qu'un homme de haute nais-
~sance a publié quelques livres qui, bien
raient lui valoir les palmes, on
~hâte » de l'admettre parmi les Qua-
~.Je rêve une scène de revue où
humb les ducs, leur baluchon à la
chanteraient, sur l'air du Grand
!\
Dans Je plus beau des Instituts,
Puisque à venir on nous engage,
Avis arrivons, fort bien vêtus,
Avec not' pauv',petit bagage.
Quelquefois, le pauvre petit bagage est
~un pauvre énorme bagage, si le grand
~gneur a d'abondante papiers de fa-
mille à compulser.
— Mais, dit quelqu'un, l'Académie
française n'est-elle pas une fondation
très bienfaisante ? Elle est riche. Elle
possède Chantilly. Elle distribue en prix
~des sommes considérables.
— Je vous accorde que c'est une œu-
vre sociale très précieuse, aussi admi-
~rable dans son genre que les Asiles de
JSe gouttes de lait et la Société
~protection des paysages. E1 même,
qt¡, nt de côté les avantages maté-
riels qu'elle fait à ses lauréats, et pour
parler qUe de ses élus, elle ne peut
~que du bien aux pauvres talents
~qu'elle hospitalise sous son dôme. Elle
~donn e un peu du prestige des grands
~écrivains qu'elle a.toujours abrités. C'est
~lontine de gloire pour les modestes
~génies.
~Seulement, et c'est grave, elle fait bien
ij^i a x Vrais écrivains qu'elle attire.
~produit, chez les romanciers et
~auteurs dramatiques, une espèce de
~un retour d'âge un peu effrayant.
~veulent tout à coup devenir des pen-
~O r ,^n écrivain de premier ordre,
d. dépouille sa pensée de ses
~ements littéraires, apparaît souvent
~un enseur de sixième catégorie,
~écrivains ne sont que des habil-
~d'idées. Ils lancent des idées
& lance de jolies femmes —
~mettant de belles toilettes sur le
Idée: Ils prétendent nous montrer
toutes- nues, comme elles
~sembleront chétives et insignifiant
harem imposant de tel
~philosoophe, penseur de profes-
L'Académie a le tort d'être pour
~minus, OÙ arrêt définitif, une station
Q, U le génie de tout le monde
les v^ais écrivains ne '-""
~vais les vrais éCrIVainS ne s'arrêtent
%i nt des globe-trotters inlas-
~qui °Yagent pour le plaisir de
!!$ SOnt faits pour les risques
continue *, pour les aventures incertai-
nes dans le nouveau. Mirbeau aurait-il
pu écrire ce livre admirable: Les Mé-
moires d'une Femme de chambre, s'il
avait été candidat à l'Académie?
Certes, les qualités dites académiques
sont appréciables; mais elles n'ont vrai-
ment de valeur que lorsqu'elles en ac-
compagnent d'autres, moins académi-
ques, et lorsque « le bon goût» et « la
mesure» ont quelque chose d'important
à modérer.
Tristan BERNARD.
Nous publierons demain un article de
FÉLIX GALIPAUX
Soirées perdues
Il existe, dans le règlement du Conser-
vatoire, un certain article suivant lequel les
élèves n'ayant pas encore concouru ne peu-
vent présenter comme scène d'examen que
des œuvres classiques.
Cet article n'est pas sans révolter les
jeunes élèves qui se sentent des aspirations
vers ,le théâtre moderne et qui trouvent
parfaitement injuste qu'on les juge d'après
un théâtre ancien, ridicule et désuet, qu'el-
les n'ont jamais eu l'intention de jouer sur
aucune scène.
Volontiers elles se comparent à des pein-
tres comme Courbet, Sézanne ou Monet,
que l'on contraindrait à composer des ta-
bleaux à la façon de David.
J'avoue que, pour ma part, ie trouverais
la réforme que l'on en pourrait taire des
plus justes et des plus heureuses. Elle
aboutirait, comme déià en d'autres matiè-
res pour le baccalauréat, à séparer nette-
ment, une lois pour toutes, ceux qui com-
prennent l'utilité des étddes anciennes et
ceux qui n'y comprennent rien.
Il y a des gens, en èfjet, qui n'ont ja-
mais pu saisir quel pouvait être l'usage du
grec ou du latin dans l'instruction classi-
que, 'et, véritablement, il était navrant de
forcer ces malheureux à se livrer à une
étude qui ne correspondait en rien à leur
tempérament.
Il en va de même pour le Conservatoire.
Dès l'instant que l'on considère Molière
comme un vieux raseur, auteur de pièces
vieillotes dans lesquelles il n'est même pas
question du Métro ou des cours de la
Bourse, il va de soi que l'on ne pourra ja-
mats le jouer - d'une façon convenable et
qu'il vaut mieux, dès le début, y renoncer.
Il va de soi également que les êtèves
s'inscriront #» G^mry0eire pmtr î'eeseh
gnement moderne auront aussi un grand in-
térêt à ce qu'on les exclue à tout jamais de
nos scènes subventionnées, du Théâtre-
Français et de l'Odéon particulièrement, où
quelques vieux rossignols comme vous et
moi pourront se réunir de temps à autre, en
toute tranquillité, pour entendre les pièces
du répertoire classique qui charment encore
leurs préjugés vieillots.
G. DE PAWLOWSKI.
Échos
Ce soir, à huit*heures et demie, au Théâ-
tre Réjane, première représentation de
Après le Pardon, pièce en quatre actes de
Mme Mathilde Serao et M. Pierre Decour-
celle.
Ce soir, à neuf heures, au théâtre
des Nouveautés, répétition générale de
Vingt jours à l'ombre, comédie en quatre
actes de MM. Maurice Hennequin et Pierre
Veber.
E
n 1779, Echo et Narcisse, de Gluck,
déplut. Et la Presse le dit.
Aussitôt, le lieutenant de police Lenoir
enjoignit aux critiques du Journal de Paris
et des Petites Affiches de^ parler « en ter-
mes plus mesurés'- de l'effet que produi-
saient les nouveau opéras. Quant au rédac-
teur du Journal Musical, il reçut une répri-
mande particulière « sur la manière peu
convenable » dont il avait formulé ses ap-
préciations.
En outre, Lenoir écrivit au garde des
.sceaux pour l'engager à mater les hardies-
ses de ces - gens de plûTïie": Ah r monsieur
Alvarez, c'était le bon temps!
B
on jour, confrère !
C'est décidé ! Mlle Cécile Sorel, sans
pour cela renoncer au tneatre, devient jour-
naliste. Elle va rédiger le courrier de la
mode dans un grand périodique, Si elle y
réussit, les bons confrères ne manqueront
pas de dire qu'elle est meilleure comédienne
que bon écrivain. Heureusement, ses peti-
tes camarades, jalouses de ses succès, pour-
ront répondre ; qu 'elle est meilleur écrivain
que bonne comédienne.
De l'inconvénient d'avoir plusieurs flè-
ches à son arc !.
p
our le sociétariat. -
La lutte est entamée. On combat,
on prépare ses battenes, on tait agir toutes
les influences dont on dispose en vue des
prochaines élections au sociétariat à la Co-
médie-Française.
Parmi les pensionnaires auxquels un
nombre de parts plus ou moins grand sera
échu, on donne comme certains M. Grand,
Mlle Berthe Gerny. et Mm e Louise Silvain,
Par contre, les chances* de Mlles Delvair et
Géniat diminuent de plus en plus.
Après le grand succès qu'elle a remporté
dans Electre, surtout après sa prochaine in-
terprétation de Phèdre, la nomination de
Mme Silvain peut être considérée comme
assurée. Il lui sera attribué trois douziè-
mes. ,
"Mais ce qui révolutionne la Maison, c'est
la nouvelle que Mlle Berthe Cernv sera,
du premier coup, élevée sociétaire à six
douzièmes. Une demi-gart pour une artiste
qui ne compte guère, à part La Rivale, de
très grands succès, et qui, surtout, n'a pas
encore déhuté dans le classique, cela sem-
ble pour certains une faveur un peu exces-
sive. , ,
Et l'on ne manque pas de dire et de faire,
dire, dans certains journaux, qu'on verrait,
dans ce trop rapide avancement, une nomi-
nation que «, la faveur a pu faire autant que
le mérite ».
Mais l'on doit ce respect au pouvoir.
p
seudonymes. ,
On sait que, suivant un nouveau ré-
glement, les membres de la Société des au-
teurs sont obligés, pour consulter le livre
des recettes quotidiennes des théâtres, de
signer leur nom sur un registre spécial.
Nous avons feuilleté l'autre jour ce vo-
lume. Il contenait une superbe collection de
signatures autographes. A côté de celles des
auteurs vivants, nous avons reconnu celles
de Shakespeare, Molière, Corneille, Té-
rence, Aristophane et Schiller!.
Cette fantaisie de certains sociétaires ou
Stagiaires n'a rien de surprenant, car le pré-
posé au registre, qui est certainement un
brave et excellent père de famille eLle mo-
dèle des employés de bureau, ne connaît
pas beaucoup la littérature dramatique.
L'autre jour, un de nos collaborateurs,
membre de la Société, s'en fut consulter le
fameux livre des recettes. L'employé, qui
ne le connaissait pas — on ne peut connaî-
tre tout le monde! —^ lui demanda. ,.Son
nOO.
Avec fierté, l'auteur répondit:
- Marivaux !..,
L'employé ne sourcilla pas, mais, prenant
un temps, il poursuivit:
— Comment l'écrivez-vous?.
— Comme il vous plaira.
Et, si vous passez rue Hippolyte-Lebas,
feuilletez le registre; vous y verrez que
M. « Mariveau » est venu s'informer des
dernières recettes des théâtres parisiens.
L
a religion au théâtre.
Nous avons eu Le Retour de Jérusa-
lem de M. Maurice Donnay, Décadence de
M. Albert Guinon, et L'Exode de M. René
Fauchois, qui envisageaient, à des points de
vue différents, les mariages mixtes, les ma-
riages entre catholiques et Israélites..
Nous croyons savoir que la prochaine
pièce que notre collaborateur Nozière don-
nera, en collaboration avec M. Alfred Sa-
voir, roulera sur le même sujet.
Ce jour-là, le critique de La Libre Parole
sera dans la salle.
T
'op d'enthousiasme.
Un imprésario français, chevalier de
la Légion d'honneur -—' us. ne, sont pas si
nombreux! — eut l'honneur, voici quel-
ques rrîôïs7 cl'ëfre convié, à Berlin, à une
soirée que tflft-nait- rempwow a'iWtemftgft®,
'l'empereur d'Allemagne, vous avez bien
lu!. • ■
Il y avait là des artistes et des musi-
ciens, et plusieurs Français. Or, il paraît
que lorsque l'Empereur fit son entrée, no-
tre homme de théâtre, s'adressant aux au-
tres invités, s'écria, transporté d'une en-
thousiaste admiration: •
- Voilà vraiment l'Empereur qu'il nous
faudrait!.
Un peu déplacée, tout de même, cette
exclamation !
1
1 y a quinze jours, pendant qu'à la Co-
médie-Française, en matinée d'abonne-
ment, une talentueuse artiste interprétait,
avec une intensité tragique hors de pair, le
rôle de Médée, le Tribunal de la Seine pro-
nonçait le divorce à son profit en lui con-
fiant la garde de sa fille.
Monsieur Toto, douze ans, qu'on avait
emmené en récompense de bonnes notes de
quinzaine, apprend le soir, au dîner de fa-
mille, la décision du Tribunal; et, encore
sous l'impression d'horreur du meurtre du
fils de Jason, il murmure: « C'est pas pru-
dent! Pour le cas qu'elle en fait, de ses
gosses! »
L
a parole est d'argent.
Savoir se taire en scène, tout en de-
meurant dans l'action, n'est pas le moindre
mérite d'un grand artiste.
On voit parfois — même sur des.scènes
subventionnées — des acteurs de beaucoup
de talent qui, lorsqu'ils n'ont rien à dire,
semblent se désintéresser complètement du
personnage qu'ils représentent.
C'est là une fâcheuse habitude qui coûta,
l'an dernier, à un jeune pensionnaire, une
diminution de 600 francs.
Cette sévérité était juste. Un bon comé-
dien doit sa,oir«écouter. H. ,u_' ,
Le grand acteur anglais Garrick disait
d'une de ses camarades qui mettait beau-
coup de feu dans les tirades de ses rôles,
mais attendait ses répliques avec un sourire
placide :
— C'est une bonne fille. Elle a de la co-
lère, mais pas de rancune.
Méditez bien cette parole, Mlle X.
V
roici une aventure point banale qui amu-
sera sans doute certains et nortera
profit à quelques-uns. Le Tribunal - de Com-
merce est saisi d'un différend qui met aux
prises un auteur et le directeur d'un théâ-
tre gai.Xe'directeur réputé, qui jongle avec
les centièmes, jaloux apparemment des
hauts faits de Déjazet, a résolu d'avoir aussi
sa millième dûment constatée. Et, sur son
affiche, comme titre même de son specta-
cle, éclate un chiffre du plus heureux pré-
sage. Contre ce directeur, favorisé de la
fortune, se dressent deux auteurs.
Le premier lui a vendu un vaudeville
qui, après remaniement, est devenu le spec-
tacle actuellement en cours de succès dans
son théâtre. A tort ou à raison, il se plaint
que certaines conventions arrêtées entre
eux n'aient pas été respectées. Il en réclama
l'exécution par des procédés.. énergiques,
et l'affaire se serait peut-être arrangée sans
l'indiscrétion d'un de nos confrères, indis-
crétion qui a mis le feu aux poudres.
Et le second? Celui-là n'a rien vendu,
mais il déclare que le troisième acte du
spectacle actuellement en cours de succès
reproduit les procédés scéniques de l'acte
troisième d'un vaudeville déposé par lui au
même théâtre. Il en a référé à la Commis-
sion des Auteurs, mais l'arbitrage de cette
dernière a été repoussé.
Sans doute va-t-il se pourvoir devant les
juge?
Quoi qu'il en soit, un premier procès est
déjà engagé. Il ne peut manquer de faire
-du bruit.
O
n va jouer, comme on sait, à l'Opéra,
un ballet de M. Henry Maréchal, Le
M i -- A- lut ~~:I\J _L- --
Lac aes Aulnes. Vi, Hl. Vjaunaiu Uiume uc
ballet fort économiquement. Déjà, il y a
trois ans, il avait fait une reprise du Freis-
chutz avec des décors de Guillaume Tell,
d'Hellé, de Faust et des Maîtres-Chanteurs ;
des costumes des Huguenots. Puis une re-
prise de Thamara avec des costumes du
Roi de Lahore et des toiles de Roméo et
Juliette. Pour Le Lac des Aulnes, c'est
Hamlet qui va servir et des costumes de
Briséis et de La Ronde des Saisons. ,
L
a gloire ou le petit jeu des majorations.
Faire le maximum! Rêve des direc-
teurs et des auteurs :
— Eh bien! cher ami, ce succès?
— Nous faisons huit mille, mon cher.
Evidemment, l'auteur qui peut faire cette
réponse aux complimenteurs insidieux est
bien l'homme le plus fortuné du monde.
Mais il ne suffit pas de le proclamer. Il
existe, hélas! un moyen de contrôle: le re-
gistre des recettes de la Société, que les
aimables confrères ne manquent pas de
compulser malicieusement.
Alors? Alors, c'est bien simple. On dé-
clare à la Société deux ou trois mille francs
de plus par jour. Le directeur, d'accord
avec l'auteur, paie les droits relatifs à la
somme déclarée et U demeure convenu que,
lè dix du mois suivant (jour des paiements
à la Société) l'auteur restituera le montant
des droits indûment encaissés par lui. Ainsi
tout va parfaitement. Il y a bien, en outre,
sur les sommes majorées, une petite perte
sèche (9.09 pour cent, part de l'Assistance
publique; à deux, on peut se payer ça!).
Et le jeu innocent fonctionne assez réguliè-
rement dans certains théâtres et avec cer-
tains auteurs.
Mais où la chose devient amusante, c'est
quand — ainsi que cela s'est produit sur
une grande scène du boulevard — l'auteur
néglige de tenir ses engagements et que,
après des mois de majorations outrancières,
il oublie de faire au directeur les restitu-
tions convenues.
Que peut faire le directeur? Celui dont
il s'agit, qui n'est pourtant pas un franc
imbécile, s'est trouvé désarmé. Ce qui ne
veut pas dire qu'il avait ri!
O
n va reprendre L'Attaque du Moulin,
de M. Bruneau, à la Gaîté-Lyrique.
Or, on sait que, bien que l'action du dramç
-lyrique de l'auteur de LJ Ouragan se-pàSs,,:
durant la guerre ,de„ 1820-7,1, M. AJbert
GlfM avait cru devoir, Tors de la première
représentation à l'Opéra-Comique, « si-
tuer » l'action de L'Attaque,du Moulin sous
la première République. Aujourd'hui, après
Mlle Fiti, Discipline, La Retraite, le public
parisien s'est habitué aux uniformes alle-
mands. Et l'on verra, à la prochaine reprise
de L'Attaque du Moulin, les casques à
pointe sur la scène de la Gaîté.
L
a retraite de M. de Max.
Le bruit se répand, encore à mots
couverte, que M. de Max songerait à quit-
ter le théâtre.
Rien ne permet, pour l'instant, de confir-
mer cette nouvelle. M. de Max joue avec un
très vif succès, à l'Odéon, deux rôles dans
La Jeunesse du Cid; plusieurs très belles
créations lui sont prochainement réservées
sur différentes scènes; et l'on a même an-
noncé qu'il devait interpréter le prochain
drame de Mlle Jehartne d'Orliac.
Il paraît bien peu vraisemblable, d'ail-
leurs, qu'un acteur aimant son art comme
M. de Max pense à l'abandonner en pleine
force et en plein succès, on peut même dire
en pleine jeunesse. -
b
usausoy, joaillier expert, 4, boulevard
des Italiens; achète toujours comp-
tant: bijoux, diamants, perles et pierres
fines. Il donne presque toujours une plus-
value sur le prix offert par n'importe quelle
maison. - j
., NOUVELLE A LA MAIN
L
u sur un tableau d'un théâtre de pro-
vince: : -',
Pour la représentation d'ensemble du ballet
LES SIRÈNES
Premières danseuses à deux heures pour
Je quart..
Naïades à une heure et demie.
Tritons à une heure.
Et Ondines à midi précis.
Le Masque de Verre.
Pour nos Abonnés
Comœdia, dès ses premiers numéros, a
promis des primes 4 ses abonnés, et nous
sommes heureux, aujourd'hui, d'annoncer
que nous sommes en état de donner large
satisfaction à tous nos amis, abonnés jus-
qu'à ce jour.
A partir d'aujourd'hui, nos abonnés d'un
an pourront venir retirer dans nos bureaux,
lé matin de neuf heures à midi et l'après-
midi de deux à sept heures :
Une magnifique boîte contenant trois
"pains de savon extra fin et sortant de la
maison si renommée Compagnie des Par-
fums Orientaux.
Ceux de nos lecteurs qui ne pourraient
ou ne voudraient se déplacer pourront nous
faire parvenir la somme de 0 fr. 25 pour
l'expédition dans Paris, et de 0 fr. 85 pour
l'expédition à domicile en province; cette
somme représente strictement les frais d'en-
voi.
Nos abonnés de six mois pourront égale-
ment retirer, dans les mêmes conditions :
Un flacon d'extrait pour le mouchoir, du
parfum à la mode Chrvsantémis, sortant
également de la Compagnie des Parfums
Orientaux.
Les frais d'expédition, pour ceux de nos
abonnés de six mois qui ne voudront pas
venir chercher leur prime, seront de 0 fr. 40
pour Paris et la provkice.
D'ici quelques jours, nous annoncerons de
splendides primes pour. tous nos nouveaux
abonnés.
Mélodrame à Bishopsgate
Une promenade nocturne dans le U Londres ignoré : le
Quartier Italien, le Quartier J uif, le Standard=Theatre.
Vers la lumière !.
Nous ignorons, nous qui vivons dans le
West End, et ne sortons guère de cinq à
six rues, combien Londres est grand,, admi-
rable, varié. Nous savons bien 'qu'il y a,
quelque part, dans l'Est, un endroit appelé
Whitechapel et des Docks et des misérables
qui vivent une vie étrange, aussi étrangers
• à notre Londres que s'ils en habitaient à
mille lieues.
Cependant, ce soir, nous nous étions dé-
cidés, Frank et moi, à une petite excursion
UN COIN DU QUARTIER ITALIEN
tt gÂàCHÊ DE #Hlf'ECHAPEL
excentrique. Justement, nous nous sentions
très disposés à nous étonner et a fris-
sonner, pleins de sympathie, de sentimen-
talité et d'humour, grâce à des vins de
choix. On s'attendrit mieux sur la misère
d'autrui après un bon dîner. Et, vraiment,
les homards grillés du Reform Club sont
tout à fait remarquables. 1 1
Je n'aurais jamais cru que Bishopsgate
fût si loin ; nous roulions en hansom depuis
tantôt vingt-cinq minutes dans le plus mer-
veilleux décor londonien. Les lumières vio
lentes d'Oxford street, sa foule pressée, des
avenues calmes plantées d'arbres, de res--
pectables, demeures qui furent « adresse
chic » au temps du Régent, l'affolement
d'une énorme gare, des rues étroites bor-
dées de hautes maisons, puis d'autres, plus
larges avec de petites bâtisses à deux étages
peu élevés, avaient déjà défilé devant nos
yeux. Maintenant, c'était Safran Hill, sinis-
tre, des bouges, le quartier italien dont la
police veut bien ignorer les coups de cou-
teau quasi-quotidiens; quelques omnibus en-
core sillonnaient la route, mais plus un seul
cab. Dieux! ces masures basses, toutes pa-
reilles, où des gens vivent, attendant, d'y
mourir et faisant sécher leur linge aux fe-
nêtres dénuées de rideaux! Et cette odeur
puissante, indéfinissable de fabac, de brouil-
lard et de pavés de bois goudronnés, si ca-
ractéristique !.
Enfin, les rails des tramways suburbains
commençaient de marquer le sol de deux
lignes parallèles et luisantes, et, aux murs,
les premières affiches en langue juive
avaient fait leur apparition, en même temps
que les noms, au-dessus des devantures,
prenaient des allures terriblement hébraï-
ques. Dans des rues adjacentes, des mar-
chands en plein vent offraient-leurs denrées,
bananes, morceaux de viande saignante,
choux et pommes de terre, aux lueurs de
lampes d'acétylène blafardes et fumeuses;
un orgue de barbarie surmonté d'un singe
jouait des airs essoufflés ; des enfants cou-
raient et hurlaient, coiffés de bérets rouges
et drapés de tabliers sales. Jamais je n'avais
vu tant d'enfants. On aurait dit des fourmis
sortant, inépuisables, d'une fourmilière: il
en surgissait des portes sombres, des étala-
ges douteux, des bornes, des ruisseaux, de
partout. -
A la porte d un ont, une grosse femme
à lèvres lippues, à corsage de satin rouge
et aux mains couleur de foie cru, complé-
tées d'ongles noirs, accueillait les clients
d'exclamations gutturales que nous ne èom-
prenions pas. Et je sais, je sais mainte-
nant que. dans de tels bars, les fourchettes
sont attachées par des chaînettes aux tables
de bois et que, quelquefois, des insectes se
sauvent quand vous déplacez la salière, des
insectes avec beaucoup de pattes. Frank le
sait aussi et nous frémissons de concert en
songeant aux pauvres gens qui mangent sur
ces tables, ou est-ce en pensant aux bêtes
effarouchées?
Notre hansom roule sur une vraie litière
de guenilles, d'immondices, de légumes dé-
chiquetés, de paille et de choses inconnues.
Tous les murs, maintenant, sont recouverts
d'affiches en caractères hébraïques; c'est
bien le ghetto, le pays du'sweated labour,
où, pour quelques pence et beaucoup d'in-
sultes, des esclaves travaillent et suent toute
la tongue journée. Mais nous n'y pouvons
rien, n'est-ce pas? Ce problème du East
End s'affirme résolument insoluble.
La rue s'élargit et devient plus propre.
Des clartés électriques percent le brouil-
lard gris pâle; voici enfin Bishopsgate et le
Standard Theatre,
Il faut avoir vu un mélodrame populaire
anglais, spectacle inoubliable, toujours le
même, qu'il soit intitulé The worst woman
in london ou The girl who wrecked her
home: une sombre histoire assaisonnée d'un
peu de comic relief pathétique et pitoyable,
d'un enfantillage, d'une invraisemblance.
inimaginables. L'on y peut contempler: le
traître vilain en haillons entrer comme chez
lui dans un bal élégant, sans que personne
s'en inquiète; un salon qui donne directe-
ment sur la rue pour que la neige puisse
pénétrer en tourbillons, effet saisissant, par
la porte ouverte; une femme chic arriver à
Hyde Park vers quatre' heures de l'après-
nidi, déco,lletée jusqu'au bas du dos, cha-
peautée de plumes et d'un diadème de dia-
nants par-dessus sa coiffure; on y entend
l'actrice chargée du rôle de la duchesse
prononcer les a comme des i et oublier par-
.fois ses h, et le premier rôle déclamer
'd'une voix terrifiante:. « Il n'y a plus ni
duchesse ni inférieur!. Rien qu'un homme
et une femme. Duchesse! duchesse 1 je
vous aime! » On peut lire ,
qui détaille les qualités-et 1:
des personnages: Vivian (an
ney), Tom Holmes (every in;
man), Paul Revel (one of th.
la disgrâce to the name ôf
voit le public rire et pleurer
prendre parti, siffler le vilai
vient saluer devant le ride
voit surtout le public. Ces s.
m'étonnent et je les admire.
L'immense théâtre est pi
pit à six pence -jusqu'aux s'
ænt une demi-couronne. De^
apporté et leur dîner et leur
dorment sur leurs genoux. (
Pas de contremarques et qu:.
place, de façon à ce que le
le bénéfice des wiskies et
sans cette ordonnance, se co
de l'autre côté de la route. A,
entr'acte un garçon passe
rangs, demandant à chacu
yours? » ce qui correspond :
« Qu'est-ce que vous prenez
de simplicité et d'assurance
l'on boit!.
Aux fauteuils, trônent les
et leurs épouses; ils ont des
ses, des teints huileux, de-
laineuses; elles ont des c
étroits; des franges sur le fr
che au cou, des perles fausr
gard féroce. Derrière moi,
dames passent tous les entrï
ter la valeur d'un,.bracelet
linos que l'une ,'Veut vendr
avant le dernier tableau, 1'.
donne quatre shillings et deu:
beaucoup .de gémissements.
pas son temps à Bishopsgat
riers assis à mon côté siffl
qui vient de filouter quelqu
st pleurent aux malheurs de
avec sincérité.
Au dehors, les trains fréq)
trict Railway passent avec un
raille et de sifflets qui éb
théâtre et nous ahurit. Mais
spectateurs du Standard, acc
font pas attention.
.Et nous retraversons les
cessifs, nous retrouvons les
bres, les maisons grisâtres, 1
qui se dépeuplent. Les enfa;
chés. Il fait humide et fro
devant nous, à quelques mi
un mur opaque de nuages,
vons une dernière affiche: «'
tlemen, 5 pence » qui nous a
Dénétrons. dans une zone su:
soudain brouillard est tombé,
fog jaunâtre, suffocant, pesa
transit, nous suffoque, nous ;
enlise. Les murs d'ouate se 1
tour de nous. Dieux!. notr
oaraît, dévoré par la brume,
succombent à leur tour. Nous
tourés de remuantes ténèbr
des bruits invisibles, effarant
tannée. - N' 50 (Quolldlen) Le Numéro: 5 centimes - , Mardi 19 Novembre 1907.
* ,, *■ •. •-
Rédacteur en Chef : G. de PA WLOWSKI
■ "'!II:. ..:, •
^ACTION & ADMINISTRATION :
27, Bouleuard Poissonnière, PARIS
TtLÉPiroNE : 288-07
CSSe TélégraPhique : C0MŒDIA*PÀRIS
ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOIS
Paris et Département. 24 fr. 12 fr.
Etranger 40 a 20 a
REDACTION & ADMINISTRATION:
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Uresse Télégraphique : C0MŒDÏA=PAR1S
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UN AN 0 MOIS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Étranger. 40 » 20 »
Académies
Des fervents de Jules Renard s'étaient
réunis pour fêter son élection à l'Acadé-
mie G oncourt
Rejouissons -nous, dit l'un. Mais un
homme qui porte ce titre, « Jules Re-
nard », n' a pas besoin de sous-titres. Re-
nard, depuis longtemps, faisait partie
de cette Académie secrète que tout bon
~lettré ai II1e à élire au dedans de soi. Au
fond, c'est dans ces ateliers, tout à fait
mystérieux, que se frappent les vraies
médailles de la gloire. Les autres mé-
dailles, c'est, plus ou moins, de la fausse
monnaie 9ui n'est pas sûre d'avoir cours
sans les âges futurs. Les électeurs de
cette Académie inaccessible demeurent
on ne sait où. On ne peut pas les inviter
à dîner, on ne leur rend pas visite,
comme à MM. René Bazin, Costa de
Beauregard, qui sont obligés, pendant
une période électorale académique, de te-
nir 0i4v!*rte la porte de leur logis, si
~en que >5 Q i des indigents, ayant fait acte
de candidats, y entrent, l'hiver, pour
chauffer.
Dans 0tre Académie secrète, le nom-
bre des places n'est pas limité; on l'aug-
mente pour faire entrer ceux qui en sont
dignes; On le diminue quand le grand
:~~PO~t ne donne pas; elle n'a aucun
rapport avec votre Académie de quarante
personnes, dont les dimensions sont im-
~ables, et où l'on se sert de ce que
l'on a sous la main : duc, orateur, poète
~ou général, pour remplir les espaces vi-
des, comme avec des copeaux.
Au moins, à l'Académie Goncourt
n'adment-on que des écrivains. A l'Aca-
démie française, ils ont des combinaisons
spéciales, quand, par suite de raisons
~eures, Ils ont, comme on dit dans les
~eaux de location, des fauteuils de re-
~or. Ai 11:S1: en ce moment, sur leurs trois
~fauteuils disponibles, ils en abandonnent
~aux poètes ; ils en destinent un autre
~grand mathématicien; quant au
~troisième c'est celui du directeur de La
~des Deux-Mondes, qui a sa place
à l'Académie, comme le préfet de police
~se ge dans les théâtres subvention-
I est .A- i.d,ent que ces traditions ne
~pas inutiles pour faire durer le pres-
~de l' Ac idémie. On a dit qu'elle re-
~sur x fortes ewIwihw t te SIRF
.QDV .j es gens de lettres, qui aiment à
~doyer des ducs, et celui des ducs, qui
~ent a dire : « C'est nous qui sont
« écrivains! »
~Au dix-huitième siècle, on s'est moqué
de l'Aca s; mie' parce qu'elle avait admis
~son sein de grands seigneurs qui
ne savaient ^ent pas l'orthographe. Aujour-
d'hui, l es grands seigneurs se sont mis
à écrire: C est tout ce que n9us Y avons
~gagné.
Aussitôt qu'un homme de haute nais-
~sance a publié quelques livres qui, bien
raient lui valoir les palmes, on
~hâte » de l'admettre parmi les Qua-
~.Je rêve une scène de revue où
humb les ducs, leur baluchon à la
chanteraient, sur l'air du Grand
!\
Dans Je plus beau des Instituts,
Puisque à venir on nous engage,
Avis arrivons, fort bien vêtus,
Avec not' pauv',petit bagage.
Quelquefois, le pauvre petit bagage est
~un pauvre énorme bagage, si le grand
~gneur a d'abondante papiers de fa-
mille à compulser.
— Mais, dit quelqu'un, l'Académie
française n'est-elle pas une fondation
très bienfaisante ? Elle est riche. Elle
possède Chantilly. Elle distribue en prix
~des sommes considérables.
— Je vous accorde que c'est une œu-
vre sociale très précieuse, aussi admi-
~rable dans son genre que les Asiles de
JSe gouttes de lait et la Société
~protection des paysages. E1 même,
qt¡, nt de côté les avantages maté-
riels qu'elle fait à ses lauréats, et pour
parler qUe de ses élus, elle ne peut
~que du bien aux pauvres talents
~qu'elle hospitalise sous son dôme. Elle
~donn e un peu du prestige des grands
~écrivains qu'elle a.toujours abrités. C'est
~lontine de gloire pour les modestes
~génies.
~Seulement, et c'est grave, elle fait bien
ij^i a x Vrais écrivains qu'elle attire.
~produit, chez les romanciers et
~auteurs dramatiques, une espèce de
~un retour d'âge un peu effrayant.
~veulent tout à coup devenir des pen-
~O r ,^n écrivain de premier ordre,
d. dépouille sa pensée de ses
~ements littéraires, apparaît souvent
~un enseur de sixième catégorie,
~écrivains ne sont que des habil-
~d'idées. Ils lancent des idées
& lance de jolies femmes —
~mettant de belles toilettes sur le
Idée: Ils prétendent nous montrer
toutes- nues, comme elles
~sembleront chétives et insignifiant
harem imposant de tel
~philosoophe, penseur de profes-
L'Académie a le tort d'être pour
~minus, OÙ arrêt définitif, une station
Q, U le génie de tout le monde
les v^ais écrivains ne '-""
~vais les vrais éCrIVainS ne s'arrêtent
%i nt des globe-trotters inlas-
~qui °Yagent pour le plaisir de
!!$ SOnt faits pour les risques
continue *, pour les aventures incertai-
nes dans le nouveau. Mirbeau aurait-il
pu écrire ce livre admirable: Les Mé-
moires d'une Femme de chambre, s'il
avait été candidat à l'Académie?
Certes, les qualités dites académiques
sont appréciables; mais elles n'ont vrai-
ment de valeur que lorsqu'elles en ac-
compagnent d'autres, moins académi-
ques, et lorsque « le bon goût» et « la
mesure» ont quelque chose d'important
à modérer.
Tristan BERNARD.
Nous publierons demain un article de
FÉLIX GALIPAUX
Soirées perdues
Il existe, dans le règlement du Conser-
vatoire, un certain article suivant lequel les
élèves n'ayant pas encore concouru ne peu-
vent présenter comme scène d'examen que
des œuvres classiques.
Cet article n'est pas sans révolter les
jeunes élèves qui se sentent des aspirations
vers ,le théâtre moderne et qui trouvent
parfaitement injuste qu'on les juge d'après
un théâtre ancien, ridicule et désuet, qu'el-
les n'ont jamais eu l'intention de jouer sur
aucune scène.
Volontiers elles se comparent à des pein-
tres comme Courbet, Sézanne ou Monet,
que l'on contraindrait à composer des ta-
bleaux à la façon de David.
J'avoue que, pour ma part, ie trouverais
la réforme que l'on en pourrait taire des
plus justes et des plus heureuses. Elle
aboutirait, comme déià en d'autres matiè-
res pour le baccalauréat, à séparer nette-
ment, une lois pour toutes, ceux qui com-
prennent l'utilité des étddes anciennes et
ceux qui n'y comprennent rien.
Il y a des gens, en èfjet, qui n'ont ja-
mais pu saisir quel pouvait être l'usage du
grec ou du latin dans l'instruction classi-
que, 'et, véritablement, il était navrant de
forcer ces malheureux à se livrer à une
étude qui ne correspondait en rien à leur
tempérament.
Il en va de même pour le Conservatoire.
Dès l'instant que l'on considère Molière
comme un vieux raseur, auteur de pièces
vieillotes dans lesquelles il n'est même pas
question du Métro ou des cours de la
Bourse, il va de soi que l'on ne pourra ja-
mats le jouer - d'une façon convenable et
qu'il vaut mieux, dès le début, y renoncer.
Il va de soi également que les êtèves
s'inscriront #» G^mry0eire pmtr î'eeseh
gnement moderne auront aussi un grand in-
térêt à ce qu'on les exclue à tout jamais de
nos scènes subventionnées, du Théâtre-
Français et de l'Odéon particulièrement, où
quelques vieux rossignols comme vous et
moi pourront se réunir de temps à autre, en
toute tranquillité, pour entendre les pièces
du répertoire classique qui charment encore
leurs préjugés vieillots.
G. DE PAWLOWSKI.
Échos
Ce soir, à huit*heures et demie, au Théâ-
tre Réjane, première représentation de
Après le Pardon, pièce en quatre actes de
Mme Mathilde Serao et M. Pierre Decour-
celle.
Ce soir, à neuf heures, au théâtre
des Nouveautés, répétition générale de
Vingt jours à l'ombre, comédie en quatre
actes de MM. Maurice Hennequin et Pierre
Veber.
E
n 1779, Echo et Narcisse, de Gluck,
déplut. Et la Presse le dit.
Aussitôt, le lieutenant de police Lenoir
enjoignit aux critiques du Journal de Paris
et des Petites Affiches de^ parler « en ter-
mes plus mesurés'- de l'effet que produi-
saient les nouveau opéras. Quant au rédac-
teur du Journal Musical, il reçut une répri-
mande particulière « sur la manière peu
convenable » dont il avait formulé ses ap-
préciations.
En outre, Lenoir écrivit au garde des
.sceaux pour l'engager à mater les hardies-
ses de ces - gens de plûTïie": Ah r monsieur
Alvarez, c'était le bon temps!
B
on jour, confrère !
C'est décidé ! Mlle Cécile Sorel, sans
pour cela renoncer au tneatre, devient jour-
naliste. Elle va rédiger le courrier de la
mode dans un grand périodique, Si elle y
réussit, les bons confrères ne manqueront
pas de dire qu'elle est meilleure comédienne
que bon écrivain. Heureusement, ses peti-
tes camarades, jalouses de ses succès, pour-
ront répondre ; qu 'elle est meilleur écrivain
que bonne comédienne.
De l'inconvénient d'avoir plusieurs flè-
ches à son arc !.
p
our le sociétariat. -
La lutte est entamée. On combat,
on prépare ses battenes, on tait agir toutes
les influences dont on dispose en vue des
prochaines élections au sociétariat à la Co-
médie-Française.
Parmi les pensionnaires auxquels un
nombre de parts plus ou moins grand sera
échu, on donne comme certains M. Grand,
Mlle Berthe Gerny. et Mm e Louise Silvain,
Par contre, les chances* de Mlles Delvair et
Géniat diminuent de plus en plus.
Après le grand succès qu'elle a remporté
dans Electre, surtout après sa prochaine in-
terprétation de Phèdre, la nomination de
Mme Silvain peut être considérée comme
assurée. Il lui sera attribué trois douziè-
mes. ,
"Mais ce qui révolutionne la Maison, c'est
la nouvelle que Mlle Berthe Cernv sera,
du premier coup, élevée sociétaire à six
douzièmes. Une demi-gart pour une artiste
qui ne compte guère, à part La Rivale, de
très grands succès, et qui, surtout, n'a pas
encore déhuté dans le classique, cela sem-
ble pour certains une faveur un peu exces-
sive. , ,
Et l'on ne manque pas de dire et de faire,
dire, dans certains journaux, qu'on verrait,
dans ce trop rapide avancement, une nomi-
nation que «, la faveur a pu faire autant que
le mérite ».
Mais l'on doit ce respect au pouvoir.
p
seudonymes. ,
On sait que, suivant un nouveau ré-
glement, les membres de la Société des au-
teurs sont obligés, pour consulter le livre
des recettes quotidiennes des théâtres, de
signer leur nom sur un registre spécial.
Nous avons feuilleté l'autre jour ce vo-
lume. Il contenait une superbe collection de
signatures autographes. A côté de celles des
auteurs vivants, nous avons reconnu celles
de Shakespeare, Molière, Corneille, Té-
rence, Aristophane et Schiller!.
Cette fantaisie de certains sociétaires ou
Stagiaires n'a rien de surprenant, car le pré-
posé au registre, qui est certainement un
brave et excellent père de famille eLle mo-
dèle des employés de bureau, ne connaît
pas beaucoup la littérature dramatique.
L'autre jour, un de nos collaborateurs,
membre de la Société, s'en fut consulter le
fameux livre des recettes. L'employé, qui
ne le connaissait pas — on ne peut connaî-
tre tout le monde! —^ lui demanda. ,.Son
nOO.
Avec fierté, l'auteur répondit:
- Marivaux !..,
L'employé ne sourcilla pas, mais, prenant
un temps, il poursuivit:
— Comment l'écrivez-vous?.
— Comme il vous plaira.
Et, si vous passez rue Hippolyte-Lebas,
feuilletez le registre; vous y verrez que
M. « Mariveau » est venu s'informer des
dernières recettes des théâtres parisiens.
L
a religion au théâtre.
Nous avons eu Le Retour de Jérusa-
lem de M. Maurice Donnay, Décadence de
M. Albert Guinon, et L'Exode de M. René
Fauchois, qui envisageaient, à des points de
vue différents, les mariages mixtes, les ma-
riages entre catholiques et Israélites..
Nous croyons savoir que la prochaine
pièce que notre collaborateur Nozière don-
nera, en collaboration avec M. Alfred Sa-
voir, roulera sur le même sujet.
Ce jour-là, le critique de La Libre Parole
sera dans la salle.
T
'op d'enthousiasme.
Un imprésario français, chevalier de
la Légion d'honneur -—' us. ne, sont pas si
nombreux! — eut l'honneur, voici quel-
ques rrîôïs7 cl'ëfre convié, à Berlin, à une
soirée que tflft-nait- rempwow a'iWtemftgft®,
'l'empereur d'Allemagne, vous avez bien
lu!. • ■
Il y avait là des artistes et des musi-
ciens, et plusieurs Français. Or, il paraît
que lorsque l'Empereur fit son entrée, no-
tre homme de théâtre, s'adressant aux au-
tres invités, s'écria, transporté d'une en-
thousiaste admiration: •
- Voilà vraiment l'Empereur qu'il nous
faudrait!.
Un peu déplacée, tout de même, cette
exclamation !
1
1 y a quinze jours, pendant qu'à la Co-
médie-Française, en matinée d'abonne-
ment, une talentueuse artiste interprétait,
avec une intensité tragique hors de pair, le
rôle de Médée, le Tribunal de la Seine pro-
nonçait le divorce à son profit en lui con-
fiant la garde de sa fille.
Monsieur Toto, douze ans, qu'on avait
emmené en récompense de bonnes notes de
quinzaine, apprend le soir, au dîner de fa-
mille, la décision du Tribunal; et, encore
sous l'impression d'horreur du meurtre du
fils de Jason, il murmure: « C'est pas pru-
dent! Pour le cas qu'elle en fait, de ses
gosses! »
L
a parole est d'argent.
Savoir se taire en scène, tout en de-
meurant dans l'action, n'est pas le moindre
mérite d'un grand artiste.
On voit parfois — même sur des.scènes
subventionnées — des acteurs de beaucoup
de talent qui, lorsqu'ils n'ont rien à dire,
semblent se désintéresser complètement du
personnage qu'ils représentent.
C'est là une fâcheuse habitude qui coûta,
l'an dernier, à un jeune pensionnaire, une
diminution de 600 francs.
Cette sévérité était juste. Un bon comé-
dien doit sa,oir«écouter. H. ,u_' ,
Le grand acteur anglais Garrick disait
d'une de ses camarades qui mettait beau-
coup de feu dans les tirades de ses rôles,
mais attendait ses répliques avec un sourire
placide :
— C'est une bonne fille. Elle a de la co-
lère, mais pas de rancune.
Méditez bien cette parole, Mlle X.
V
roici une aventure point banale qui amu-
sera sans doute certains et nortera
profit à quelques-uns. Le Tribunal - de Com-
merce est saisi d'un différend qui met aux
prises un auteur et le directeur d'un théâ-
tre gai.Xe'directeur réputé, qui jongle avec
les centièmes, jaloux apparemment des
hauts faits de Déjazet, a résolu d'avoir aussi
sa millième dûment constatée. Et, sur son
affiche, comme titre même de son specta-
cle, éclate un chiffre du plus heureux pré-
sage. Contre ce directeur, favorisé de la
fortune, se dressent deux auteurs.
Le premier lui a vendu un vaudeville
qui, après remaniement, est devenu le spec-
tacle actuellement en cours de succès dans
son théâtre. A tort ou à raison, il se plaint
que certaines conventions arrêtées entre
eux n'aient pas été respectées. Il en réclama
l'exécution par des procédés.. énergiques,
et l'affaire se serait peut-être arrangée sans
l'indiscrétion d'un de nos confrères, indis-
crétion qui a mis le feu aux poudres.
Et le second? Celui-là n'a rien vendu,
mais il déclare que le troisième acte du
spectacle actuellement en cours de succès
reproduit les procédés scéniques de l'acte
troisième d'un vaudeville déposé par lui au
même théâtre. Il en a référé à la Commis-
sion des Auteurs, mais l'arbitrage de cette
dernière a été repoussé.
Sans doute va-t-il se pourvoir devant les
juge?
Quoi qu'il en soit, un premier procès est
déjà engagé. Il ne peut manquer de faire
-du bruit.
O
n va jouer, comme on sait, à l'Opéra,
un ballet de M. Henry Maréchal, Le
M i -- A- lut ~~:I\J _L- --
Lac aes Aulnes. Vi, Hl. Vjaunaiu Uiume uc
ballet fort économiquement. Déjà, il y a
trois ans, il avait fait une reprise du Freis-
chutz avec des décors de Guillaume Tell,
d'Hellé, de Faust et des Maîtres-Chanteurs ;
des costumes des Huguenots. Puis une re-
prise de Thamara avec des costumes du
Roi de Lahore et des toiles de Roméo et
Juliette. Pour Le Lac des Aulnes, c'est
Hamlet qui va servir et des costumes de
Briséis et de La Ronde des Saisons. ,
L
a gloire ou le petit jeu des majorations.
Faire le maximum! Rêve des direc-
teurs et des auteurs :
— Eh bien! cher ami, ce succès?
— Nous faisons huit mille, mon cher.
Evidemment, l'auteur qui peut faire cette
réponse aux complimenteurs insidieux est
bien l'homme le plus fortuné du monde.
Mais il ne suffit pas de le proclamer. Il
existe, hélas! un moyen de contrôle: le re-
gistre des recettes de la Société, que les
aimables confrères ne manquent pas de
compulser malicieusement.
Alors? Alors, c'est bien simple. On dé-
clare à la Société deux ou trois mille francs
de plus par jour. Le directeur, d'accord
avec l'auteur, paie les droits relatifs à la
somme déclarée et U demeure convenu que,
lè dix du mois suivant (jour des paiements
à la Société) l'auteur restituera le montant
des droits indûment encaissés par lui. Ainsi
tout va parfaitement. Il y a bien, en outre,
sur les sommes majorées, une petite perte
sèche (9.09 pour cent, part de l'Assistance
publique; à deux, on peut se payer ça!).
Et le jeu innocent fonctionne assez réguliè-
rement dans certains théâtres et avec cer-
tains auteurs.
Mais où la chose devient amusante, c'est
quand — ainsi que cela s'est produit sur
une grande scène du boulevard — l'auteur
néglige de tenir ses engagements et que,
après des mois de majorations outrancières,
il oublie de faire au directeur les restitu-
tions convenues.
Que peut faire le directeur? Celui dont
il s'agit, qui n'est pourtant pas un franc
imbécile, s'est trouvé désarmé. Ce qui ne
veut pas dire qu'il avait ri!
O
n va reprendre L'Attaque du Moulin,
de M. Bruneau, à la Gaîté-Lyrique.
Or, on sait que, bien que l'action du dramç
-lyrique de l'auteur de LJ Ouragan se-pàSs,,:
durant la guerre ,de„ 1820-7,1, M. AJbert
GlfM avait cru devoir, Tors de la première
représentation à l'Opéra-Comique, « si-
tuer » l'action de L'Attaque,du Moulin sous
la première République. Aujourd'hui, après
Mlle Fiti, Discipline, La Retraite, le public
parisien s'est habitué aux uniformes alle-
mands. Et l'on verra, à la prochaine reprise
de L'Attaque du Moulin, les casques à
pointe sur la scène de la Gaîté.
L
a retraite de M. de Max.
Le bruit se répand, encore à mots
couverte, que M. de Max songerait à quit-
ter le théâtre.
Rien ne permet, pour l'instant, de confir-
mer cette nouvelle. M. de Max joue avec un
très vif succès, à l'Odéon, deux rôles dans
La Jeunesse du Cid; plusieurs très belles
créations lui sont prochainement réservées
sur différentes scènes; et l'on a même an-
noncé qu'il devait interpréter le prochain
drame de Mlle Jehartne d'Orliac.
Il paraît bien peu vraisemblable, d'ail-
leurs, qu'un acteur aimant son art comme
M. de Max pense à l'abandonner en pleine
force et en plein succès, on peut même dire
en pleine jeunesse. -
b
usausoy, joaillier expert, 4, boulevard
des Italiens; achète toujours comp-
tant: bijoux, diamants, perles et pierres
fines. Il donne presque toujours une plus-
value sur le prix offert par n'importe quelle
maison. - j
., NOUVELLE A LA MAIN
L
u sur un tableau d'un théâtre de pro-
vince: : -',
Pour la représentation d'ensemble du ballet
LES SIRÈNES
Premières danseuses à deux heures pour
Je quart..
Naïades à une heure et demie.
Tritons à une heure.
Et Ondines à midi précis.
Le Masque de Verre.
Pour nos Abonnés
Comœdia, dès ses premiers numéros, a
promis des primes 4 ses abonnés, et nous
sommes heureux, aujourd'hui, d'annoncer
que nous sommes en état de donner large
satisfaction à tous nos amis, abonnés jus-
qu'à ce jour.
A partir d'aujourd'hui, nos abonnés d'un
an pourront venir retirer dans nos bureaux,
lé matin de neuf heures à midi et l'après-
midi de deux à sept heures :
Une magnifique boîte contenant trois
"pains de savon extra fin et sortant de la
maison si renommée Compagnie des Par-
fums Orientaux.
Ceux de nos lecteurs qui ne pourraient
ou ne voudraient se déplacer pourront nous
faire parvenir la somme de 0 fr. 25 pour
l'expédition dans Paris, et de 0 fr. 85 pour
l'expédition à domicile en province; cette
somme représente strictement les frais d'en-
voi.
Nos abonnés de six mois pourront égale-
ment retirer, dans les mêmes conditions :
Un flacon d'extrait pour le mouchoir, du
parfum à la mode Chrvsantémis, sortant
également de la Compagnie des Parfums
Orientaux.
Les frais d'expédition, pour ceux de nos
abonnés de six mois qui ne voudront pas
venir chercher leur prime, seront de 0 fr. 40
pour Paris et la provkice.
D'ici quelques jours, nous annoncerons de
splendides primes pour. tous nos nouveaux
abonnés.
Mélodrame à Bishopsgate
Une promenade nocturne dans le U Londres ignoré : le
Quartier Italien, le Quartier J uif, le Standard=Theatre.
Vers la lumière !.
Nous ignorons, nous qui vivons dans le
West End, et ne sortons guère de cinq à
six rues, combien Londres est grand,, admi-
rable, varié. Nous savons bien 'qu'il y a,
quelque part, dans l'Est, un endroit appelé
Whitechapel et des Docks et des misérables
qui vivent une vie étrange, aussi étrangers
• à notre Londres que s'ils en habitaient à
mille lieues.
Cependant, ce soir, nous nous étions dé-
cidés, Frank et moi, à une petite excursion
UN COIN DU QUARTIER ITALIEN
tt gÂàCHÊ DE #Hlf'ECHAPEL
excentrique. Justement, nous nous sentions
très disposés à nous étonner et a fris-
sonner, pleins de sympathie, de sentimen-
talité et d'humour, grâce à des vins de
choix. On s'attendrit mieux sur la misère
d'autrui après un bon dîner. Et, vraiment,
les homards grillés du Reform Club sont
tout à fait remarquables. 1 1
Je n'aurais jamais cru que Bishopsgate
fût si loin ; nous roulions en hansom depuis
tantôt vingt-cinq minutes dans le plus mer-
veilleux décor londonien. Les lumières vio
lentes d'Oxford street, sa foule pressée, des
avenues calmes plantées d'arbres, de res--
pectables, demeures qui furent « adresse
chic » au temps du Régent, l'affolement
d'une énorme gare, des rues étroites bor-
dées de hautes maisons, puis d'autres, plus
larges avec de petites bâtisses à deux étages
peu élevés, avaient déjà défilé devant nos
yeux. Maintenant, c'était Safran Hill, sinis-
tre, des bouges, le quartier italien dont la
police veut bien ignorer les coups de cou-
teau quasi-quotidiens; quelques omnibus en-
core sillonnaient la route, mais plus un seul
cab. Dieux! ces masures basses, toutes pa-
reilles, où des gens vivent, attendant, d'y
mourir et faisant sécher leur linge aux fe-
nêtres dénuées de rideaux! Et cette odeur
puissante, indéfinissable de fabac, de brouil-
lard et de pavés de bois goudronnés, si ca-
ractéristique !.
Enfin, les rails des tramways suburbains
commençaient de marquer le sol de deux
lignes parallèles et luisantes, et, aux murs,
les premières affiches en langue juive
avaient fait leur apparition, en même temps
que les noms, au-dessus des devantures,
prenaient des allures terriblement hébraï-
ques. Dans des rues adjacentes, des mar-
chands en plein vent offraient-leurs denrées,
bananes, morceaux de viande saignante,
choux et pommes de terre, aux lueurs de
lampes d'acétylène blafardes et fumeuses;
un orgue de barbarie surmonté d'un singe
jouait des airs essoufflés ; des enfants cou-
raient et hurlaient, coiffés de bérets rouges
et drapés de tabliers sales. Jamais je n'avais
vu tant d'enfants. On aurait dit des fourmis
sortant, inépuisables, d'une fourmilière: il
en surgissait des portes sombres, des étala-
ges douteux, des bornes, des ruisseaux, de
partout. -
A la porte d un ont, une grosse femme
à lèvres lippues, à corsage de satin rouge
et aux mains couleur de foie cru, complé-
tées d'ongles noirs, accueillait les clients
d'exclamations gutturales que nous ne èom-
prenions pas. Et je sais, je sais mainte-
nant que. dans de tels bars, les fourchettes
sont attachées par des chaînettes aux tables
de bois et que, quelquefois, des insectes se
sauvent quand vous déplacez la salière, des
insectes avec beaucoup de pattes. Frank le
sait aussi et nous frémissons de concert en
songeant aux pauvres gens qui mangent sur
ces tables, ou est-ce en pensant aux bêtes
effarouchées?
Notre hansom roule sur une vraie litière
de guenilles, d'immondices, de légumes dé-
chiquetés, de paille et de choses inconnues.
Tous les murs, maintenant, sont recouverts
d'affiches en caractères hébraïques; c'est
bien le ghetto, le pays du'sweated labour,
où, pour quelques pence et beaucoup d'in-
sultes, des esclaves travaillent et suent toute
la tongue journée. Mais nous n'y pouvons
rien, n'est-ce pas? Ce problème du East
End s'affirme résolument insoluble.
La rue s'élargit et devient plus propre.
Des clartés électriques percent le brouil-
lard gris pâle; voici enfin Bishopsgate et le
Standard Theatre,
Il faut avoir vu un mélodrame populaire
anglais, spectacle inoubliable, toujours le
même, qu'il soit intitulé The worst woman
in london ou The girl who wrecked her
home: une sombre histoire assaisonnée d'un
peu de comic relief pathétique et pitoyable,
d'un enfantillage, d'une invraisemblance.
inimaginables. L'on y peut contempler: le
traître vilain en haillons entrer comme chez
lui dans un bal élégant, sans que personne
s'en inquiète; un salon qui donne directe-
ment sur la rue pour que la neige puisse
pénétrer en tourbillons, effet saisissant, par
la porte ouverte; une femme chic arriver à
Hyde Park vers quatre' heures de l'après-
nidi, déco,lletée jusqu'au bas du dos, cha-
peautée de plumes et d'un diadème de dia-
nants par-dessus sa coiffure; on y entend
l'actrice chargée du rôle de la duchesse
prononcer les a comme des i et oublier par-
.fois ses h, et le premier rôle déclamer
'd'une voix terrifiante:. « Il n'y a plus ni
duchesse ni inférieur!. Rien qu'un homme
et une femme. Duchesse! duchesse 1 je
vous aime! » On peut lire ,
qui détaille les qualités-et 1:
des personnages: Vivian (an
ney), Tom Holmes (every in;
man), Paul Revel (one of th.
la disgrâce to the name ôf
voit le public rire et pleurer
prendre parti, siffler le vilai
vient saluer devant le ride
voit surtout le public. Ces s.
m'étonnent et je les admire.
L'immense théâtre est pi
pit à six pence -jusqu'aux s'
ænt une demi-couronne. De^
apporté et leur dîner et leur
dorment sur leurs genoux. (
Pas de contremarques et qu:.
place, de façon à ce que le
le bénéfice des wiskies et
sans cette ordonnance, se co
de l'autre côté de la route. A,
entr'acte un garçon passe
rangs, demandant à chacu
yours? » ce qui correspond :
« Qu'est-ce que vous prenez
de simplicité et d'assurance
l'on boit!.
Aux fauteuils, trônent les
et leurs épouses; ils ont des
ses, des teints huileux, de-
laineuses; elles ont des c
étroits; des franges sur le fr
che au cou, des perles fausr
gard féroce. Derrière moi,
dames passent tous les entrï
ter la valeur d'un,.bracelet
linos que l'une ,'Veut vendr
avant le dernier tableau, 1'.
donne quatre shillings et deu:
beaucoup .de gémissements.
pas son temps à Bishopsgat
riers assis à mon côté siffl
qui vient de filouter quelqu
st pleurent aux malheurs de
avec sincérité.
Au dehors, les trains fréq)
trict Railway passent avec un
raille et de sifflets qui éb
théâtre et nous ahurit. Mais
spectateurs du Standard, acc
font pas attention.
.Et nous retraversons les
cessifs, nous retrouvons les
bres, les maisons grisâtres, 1
qui se dépeuplent. Les enfa;
chés. Il fait humide et fro
devant nous, à quelques mi
un mur opaque de nuages,
vons une dernière affiche: «'
tlemen, 5 pence » qui nous a
Dénétrons. dans une zone su:
soudain brouillard est tombé,
fog jaunâtre, suffocant, pesa
transit, nous suffoque, nous ;
enlise. Les murs d'ouate se 1
tour de nous. Dieux!. notr
oaraît, dévoré par la brume,
succombent à leur tour. Nous
tourés de remuantes ténèbr
des bruits invisibles, effarant
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