Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1907-10-20
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 20 octobre 1907 20 octobre 1907
Description : 1907/10/20 (A1,N20). 1907/10/20 (A1,N20).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76453187
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
Première Année. — N° 20 (Quotidien).
I# Numéro : # cçauej&s
Dimanche 20 Octobre 190&
COMŒDIA
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKt
(
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE; 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA-PARIS
1. ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOIS
ïaris et Départements. 24 fr. 12 fr.
tranger. 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
,27, Boulevard Poissonnière, PARIS
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Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Etranger. 40 » 20 »
^HïStE COUR â JARDIN
Son Mari
Le drame des Bouffes-Parisiens qui
sollicite si vivement notre curiosité de-
puis une semaine, demeure jusqu'ici
mystérieux et inexplicable. Pourquoi
Louis Mégève a-t-il tiré quatre coups de
revolver? Folie? Vengeance? Crime
passionnel? On ne sait rien.
Or, le hasard m'a révélé les raisons
étranges, et si humaines pourtant, de
Cet Il ne me sem-
ble ^Compréhensible. Il ne me sem-
ble pas qu'il soit nécessaire, pour les
faire connaître, d'attendre le bon plaisir
du juge d'instruction.
Il y a trois ans, Suzanne Divois, l'hé-
roïne Infortunée de ce drame, n'était en-
core que Mlle Divois, lorsqu'elle fut
convoitée Par Louis Mégève et par
Gréaume, le célèbre acteur. Ce qui
donna longtemps à croire que Gréaume
l'emporterait, c'est qu'il flattait le goût
de s ^ne fille pour le théâtre et qu'il
ne se point opposé à ce qu'elle-
même m°ntât sur les planches. Mais
l'amour est plus fort que tout, et Su-
zanne aUllait Louis Mégève. Elle le
Prouva en lui accordant sa main, malgré
le gros Sacrifice qu'il exigeait de sa
~Le erment fut solennel : Suzanne
enoncerait à toute ambition théâtrale.
ment serment, elle ne le tint pas seule-
tnent en fait, elle y resta fidèle même en
pensée. Et cela lui fut facile, car elle
était infiniment heureuse. Durant les
longs mOIS que Mégève, mari passion-
né et amant ombrageux, la promena
parmi amant ombrageux, la promena
parmi les plus beaux paysages du
monde, jamais l'ombre d'un regret n'ef-
fleura son bonheur. Suspendue au bras
de celui qu elle aimait, elle n'avait d'au-
tre espoir que de vivre indéfiniment la
Monotone et divine de l'amoureuse.
Le destin ne le permit pas. Une série
de chances contraires désorganisa la
fortune de Mégève, qui, finalement,
après de mauvaises spéculations, se rui-
s une affaire hasardeuse qu'il
entreprise.
Du jour au lendemain, ce fut la mi-
^Wre r' Mégève trouva une place. Mais
*^ Appointements pouvaient lui per-
d® conserver à sa femme le luxe
ici -là se plaisait à l'envelopper jus-
Il s'ouffrit pour elle. Il eut peur qu'elle
De Se lassât et que les -privations de
t°Ut cs sortes ne finissent par la rebuter.
Et fut lui, le premier, qui aborda la
que estion du théâtre. Suzanne multiplia
les objections, le supplia de renoncer à
un projet dont les conséquences lui sem-
lent redoutables. Il s'obstina.
l'ijj. Je veux que tu sois heureuse.
~L'idée de ton bonheur passe avant tout,
avant ma jalousie elle-même. D'ailleurs,
puis-je être encore jaloux après trois ans
d'intimité et de tendresse?
Six semaines plus tard, Suzanne Di-
e avait repris son nom de jeune
fille) débutait en province. L'année sui-
vante, le directeur des Bouffes l'enga-
geait Pour créer le rôle de Bertrande
Altie r dans la pièce de Boisrouvry. On
n'a oublié le succès qu'elle y rem-
porta. C'était la gloire, et c'était aussi la
Et leur vie continua, paisible et con-
.tait t Des le premier jour, Mégève s'e-
It tenu résolument à l'écart de sa
e Pour tout ce qui concernait son
existence d'actrice. Il ne lisait même pas
le compte rendu des premières, même
pas la rubrique des journaux où se pu-
blien t, tous les matins, l'histoire de ce
rEtla MOnde tumultueux et fiévreux -
rèti ames déguisées, bulletins de santé,
es et nouvelles sur chacun et sur
Wne- Il travaillait, se rendant ponc-
~à la maison de commerce où
119Vait trouvé une petite situation.
^r' Un soir que sa femme venait de
partir Pour la représentation, il aperçut
Jir table de leur chambre, un livre
%t^ titre de leur chambre, un livre
4p e titre le frappa : Bertrande Al-
31p, était la pièce de Boisrouvry, ré-
~cemment parue en volume, la pièce où
li'ne triomphait depuis deux mois.
ftk^it le livre au hasard, et il lut :
BERTRANDE ALTIER (elle baisse la tête,
; doublée). — Oh! Philippe, je
l bIlez en supplie, ayez pitié de moi.. ou-
4n aveu involontaire.
ltQlldllIPPE. - Aveu inutile, Ber-
N h Votre amour? mais il se trahit
dans chacune de vos paroles, dans cha-
de vos gestes.
Vre de baisers la main de Bertrande,
r 9, Qlldo res montent le long du bras. Elle
llne,)
Nerveusement, Mégève se reporta au
~it eu livre, à la page où se trouve
lprite la distribution des rôles. Phi-
était Gréaume, le célèbre acteur,
t d'autref ois.
|a'lp ht comme un fou. Dehors, il sau-
N,Une voiture.
Importe où, cocher. Au bois
ta agne. a Auteuil.
PA tout prix, il voulait s'éloigner de
fie îs et Prendre le temps de la ré-
Paris et Pendre le temps de la ré-
~~n recouvrer son sang-froid. Mais,
dix minutes après, il criait par la por-
Il, r^?cher, aux Bouffes-Parisiens.
~s'y cacha
Devant lui, à dix pas, Suzanne allait
vennait.
* C'était la première fois qu'il la voyait
ainsi. Les bras nus, la gorge riue, elle
lui parut admirablement belle. Il l'écou-
ta et la regarda. Elle jouait avec une
grande simplicité et un charme en-
joué qui ravissaient le public.
Mais Gréaume entra, elle et lui de-
meurèrent seuls, et Mégève fut très
étonné d'entendre que sa femme prenait
tout à coup une autre voix, la voix qu'il
croyait être seul à connaître, sa voix
'd'amoureuse si émue et si douce.
C'était naturel, puisqu'elle aimait cet
homme dans la pièce. Pourtant, ce fut
pour Mégève une souffrance horrible.
Et la scène commença, la fameuse
scène que nous avons tous entendue, et
qui valait tant d'ovations à Suzanne Di-
vois. Et de fait, elle y était exquise,
grave, joyeuse, coquette, pudique, et
toujours si sincère!
Mégève subissait le plus abominable
des supplices. Suzanne, sa chère Su-
zanne, livrant ainsi à toute une foule, ce
qu'il y avait en elle de plus intime et de
plus sacré! Il se contint. Suzanne n'était
là qu'une interprète. Elle n'aimait pas
cet homme, et si quelque chose subsis-
tait en Gréaume des sentiments passés,
Suzanne, elle, y demeurait insensible.
Un détail le confirma dans cette idée.
Gréaume lui ayant pris la main, elle
l'avait repoussé avec plus de rudesse
que ne l'exigeait le rôle, et comme si la
femme eût accentué la révolte de la co-
médienne.
Dès lors, il vit nettement ce qu'il y
avait de réel et ce qu'il y avait de fac-
tice dans le jeu de l'interprète. Il distin-
gua Suzanne de Bertrande, et chaque
fois que Philippe n'était plus l'acteur, et
mêlait à son rôle un peu des sentiments
personnels et des instincts de Gréaume,
Mégève percevait nettement le petit re-
cul de celle qu'il aimait.
— La vaillante, la loyale créature,
murmura-t-il.
La scène cependant devenait plus ar-
dente et Philippe plus pressant. Mégève
tressaillit, son rival s'était mis à genoux
et Bertrande s'alanguissait. Faible, dé-
semparée, elle avouait son amour, elle
avouait les combats qui la déchiraient.
Philippe saisit la main, elle ne la retira
pas.
En vérité, rien n'était admirable
comme le spectacle de cette femme
qui luttait -4omrëT le --éèeie- et-^ ebAtrë"fâ
tentation. Le public écoutait, dans un si-
lence haletant. -
— Oh ! Philippe, je vous en supplie,
ayez pitié de moi. oubliez mon aveu
involontaire.
— Aveu inutile, Bertrande. Votre
amour? mais il se trahit dans chacune
de vos - paroles.
Il couvrit de baisers la main de la
jeune femme. Elle essaya de se défen-
dre, s'abandonna, puis se reprit, et de
nouveau, très lâche, céda. Et Mégève
étouffa un rugissement de colère. Il avait
eu soudain l'impression aiguë et péné-
trante que la lutte de Suzanne n'était pas
simulée. Elle luttait réellement contre
elle-même, maîtresse encore de ses sens,
moins éperdue déjà, et toute frémis-
sante. Ce n'était plus Bertrande, mais
Suzanne qui palpitait au contact de ces
baisers.
Les lèvres de Gréaume montèrent le
long du bras. Suzanne défaillit. Ses yeux
se voilèrent, sa gorge se gonfla, un fris-
son faisait trembler ses doigts. Ah!
comme il les connaissait bien, ces signes
évidents de son désir! Qu'elle fût con-
sentante ou non, que toute son honnê-
teté se révoltât contre la caresse subie,
n'importe, elle en goûtait la joie! elle
en éprouvait l'ivresse ! Seule avec cet
homme, elle se fût donnée! elle se fût
donnée puisqu'elle ne luttait même
plus, vaincue, toute sa chair offerte!
Gréaume se souleva. Vivement, vio-
lemment, il lui saisit les lèvres à pleines
lèvres. Elle eut un cri de volupté et de
douleur. Ah! ce cri, ce cri de bête qui
mord et qui se pâme, comme il l'avait
entendu, déjà! Et à pleines lèvres, à
son tour, à lèvres vivantes et frisson-
nantes, elle rendit le baiser!
.Mégève sortit son revolver et tira. Il
tira quatre fois. Au second coup, Su-
zanne tomba, blessée à mort. Au qua-
trième coup, Gréaume fut atteint.
Maurice LEBLANC.
-— — i» 9 ■»
Nourrices sèches
Rien n'est plus touchant que les soins
dont on entoure les nourrices dans nos mé-
nages parisiens; leurs moindres désirs de-
viennent des ordres, et l'on s'efforce, par
tous les moyens possibles, de leur éviter
toute contrariété. Il s'agit, en effet, avant
toute chose, de la santé du « petit », qu'une
simple colère du biberon-vivant pourrait
compromettre.
Aussi, la nourrice peut-elle s'installer en
sécurité avec toute sa famille, recevoir ses
cousins les charbonniers dans le salon et
héberger une interminable horde de culti-
vateurs, tandis que ses maîtres, terrorisés,
la regardent avec admiration du fond de la
cuisine.
Certains acteurs, il faut bien le recon-
naître, jouent à peu près le même rôle vis-
à-vis des infortunés auteurs qui leur ont
confié leur enfant.
Dès le début, il s'agit d'éviter toute con-
trariété aux comédiens, de subir leurs moin-
dres fantaisies, dût le texte de la pièce s'en
ressentir effroyablement, et ces traditions,
avouons-le, sont parfois d'un goût qui n'est
même plus douteux!
Dèt! les premières représentes, l'in-
dépendance rfes interprètes. s'uffirme en-
cerf dwaniaii"; elle devient hors de pro-
portion lorsque le succès s'établit au bout
de quelques semaines.
Dans la grande salle du Palais, au milieu
des gardes respectueux, l'empereur n'hé-
site pas à inviter ouvertement le pape ma-
lade à diner et demande à la princesse de
venir pêcher à la ligne avec lui, le lende-
main, à Joinville-le-Pont.
Les spectateurs, dont la patience est in-
finie, ne remarquent souvent pas ces bec-
quets imprévus - ou tout au moins les su-
bissent avec un respect qui ne témoigne
guère en faveur de leur intelligence ou de
l'idée qu'ils ont du talent de l'auteur!
Parfois des querelles personnelles s'en
mêlent. C'est ainsi qu'il me souvient d'un
acteur de l'Odéon qui, dans les rôlés les
plus calmes, devenait presque turie'ux cha-
que lois qu'il quittait la scène. Il s'agissait,
en effet, pour lui, d'ouvrir la porte avec la
plus grande brusquerie possible pour rabo-
ter le nez d'une vieille mère d'actrice qui
le guettait toujours derrière les portants.
Parfois, sans aller si loin, et avec les
meilleures intentions du monde, les inter-
prètes dénaturent totalement une -pièce et
la rendent ridicule en voûtant lui faire du
bien. - —
Certains cherchent à placer coûte que
coûte (toujours dans l'intérêt de la pièce)
leurs petits talents de société et s'obstinent,
sans aucune raison, à jouer dû cor de
chasse au moment de l'enterrement P£wce
qu'ils savent en jouer, ou à jongler avec
leur épée lorsqu'ils figurent M. de Talley-
rand, sous le vain prétexte que cela amuse
tout le monde lorsqu'ils font cela dans un
dîner de noce avec les couteaux de table.
De telles trahisons ne sont point faites
pour rehausser le prestige de notre produc-
tion dramatique. Nos acteurs auraient tout
avantage à ne plus les pratiquer et à res-
pecter davantage un répertoire que le seul
talent des auteurs suffit déjà trop souvent
à éreinter.
- G. DE PAWLOWSKI.
Échos
1
1 nous tombe sous les yeux une curieuse
affiche théâtrale datant du 2 mai 1824,
imprimée sur beau papier parchemme et
dont se servit, pour annoncer son arrivée
aux habitants de la « bonne ville » d'Agen,
un impresario de l'époque: Fradin père.
Voici quel était le programme de la pre-
smière soirée: « Le Coiffeur et le Perru-
quier, vaudeville nouveau en un acte par
-Mcédé de La Visite à Bedlam, vaudeville en
un acte par M, Brazier. Le spectacle com-
mencera par Le Billet de logement, opéra-
vaudeville en un acte par M. Léger. Le
spectacle sera terminé par Werther ou les
Egarements d'un cœur sensible, drame co-
mique mêlé de chant, par MM. Duval et
Rougemont.
<( Par ordre supérieur, il est expressé-
ment défendu de lire aucun billet jeté sur
le théâtre.
« On commencera à six heures et demie
très précises.
« Premières, 2 fr. 20; secondes, 1 fr. 10;
parterre, 0 fr. 75; paradis, 0 fr. 10. »
En ce temps-là, on commençait de bonne
heure; dans la même soirée l'on entendait
de l'opéra, du vaudeville, du drame, et l'on
payait peu!. L'idéal, quoi!
L
'Opéra et Les Huguenots.
La première des Huguenots date du
29 février 1836. Attre et la belle Demou-
geot ont remplacé Nourrit et Mme Falcon.
M. Gailhard tient, pour deux mois, encore,
le sceptre de M. Véron. M. Gailhard n'eut
point commis la gaffe de M. Véron.
Désireux de s'assurer un second Robert
le Diable, celui avait traité par écrit avec
Meyerbeer. Meyerbeer devait fournir Les
Huguenots à jour fixe, comme on livre un
sac de charbon ou un pardessus, et ce sous
peine d'un dédit de trente mille francs.
Le maestro travaillait avec une sage len-
teur; Les Huguenots ne purent être « ver-
sés » à l'échéance. M. Véron eut le cou-
rage d'exiger et d'encaisser les trente mille
francs. Meyerbeer bouda; Les Huguenots
faillirent ne point voir la rampe.
A la retraite de M. Véron, son succes-
seur Duponchel eut le bon goût - et l'ha-
bileté — de rembourser vingt mille francs
au glorieux auteur. Scribe, l'auteur du li-
vret et des vers suivants :
Un vieux soldat doit souffrir et se taire
• Sans murmurer
avait empoché les dix mille francs man-
quant pour le préjudice causé par le retard
du musicien ! Moins chevaleresque que
M. Duponchel, il les garda.
E
phémérides.
Ce fut le 20 octobre 1857 que
Markowskî, rerugie polonais et type des
plus originaux, inaugura, en association
avec un nommé Covary, sa fameuse salle
de danse située 12, rue Buffaultv Là furent
lancées plusieurs danses de caractère long-
temps célèbres dont Markowski était l'in-
venteur, parmi lesquelles il convient de ci-
ter la Lisbonnienne, le Fango, l'Impériale,
la Friska et surtout la Scottisch.
u
n becquet? Qu'est-ce qu'un becquet?
On appelle ainsi, en matière de théâ-
tre, toute modification apportée au texte
d'un ouvrage après sa remise aux acteurs.
L'origine du mot est assez jolie et vaut
d'être connue.
Voltaire, à la veille de faire représenter
une de ses premières tragédies, les rôles
sus et déjà répétés, il lui venait à tout mo-
ment dans l'esprit de nouveaux vers, de
nouvelles pensées qu'il fallait distribuer
aux uns et aux autres jusqu'au jour de la
représentation. Mais l'acteur Dufrène, ex-
cédé d'avoir à ôter et à remettre continuel-
lement dans sa-mémoire les productions de
ce génie inépuisable, prit le parti de se
faire céler chez lui, afin de mettre un terme
à cette abondance de corrections. Or, Vol-
taire s'avisa d'un charmant stratagème pour
triompher de cette résistance. Il fit faire un
beau pâté de perdrix r«ttge& et le fit paiv
venir à son interprète *6us tin nom d'êm-
prunt. Au milieu du repas, où Dufrène avait
réuni nombreuse compagnie, on ouvrit le
pâté. Surprise! Chaque perdrix portait'dans
son bec un petit billet qui mentionnait un
nouveau changement. Alors le comédien, ne
croyant pas devoir résister à cet ingénieux
expédient, se résigna à apprendre toutes
les corrections qu'un auteur aussi recom-
mandable voulut bien lui imposer.
o
uand Rosambeau, un des meilleurs ac-
teurs qu'ait eus l'Odéon de jadis
n'avait pas de quoi donner à souper à ses
enfants, il employait, pour les décider à se
coucher sans manger, le procédé suivant,
des plus ingénieux:
- Ceux qui voudront ne pas souper ce
soir, leur disait-il, auront chacun un sou!.
Tous acceptaient. Mais, le lendemain ma-
tin, ils avaient une faim canine. Alors, Ro-
sambeau s'écriait: 1
— Que ceux qui veulent déjeuner me
donnent chacun un sou!.
Il rentrait ainsi dans ses déboursés et
avait économisé un repas. Ce qui, aux mo-
ments de gêne, est urre chose essentielle,
même pour un acteur.
L
u sur l'affiche de la semaine d'un
1- « concerticule » dés boulevards. exté-
rieurs t
M. GADBIN
L'ex-écrasé vivant des Folies-Bergère dans son
répertoire.
Et, plus 'drôle :
LA CASSEROLE
Drame en un acte d'Oscar Météniet.
M. Brunin fils jouera le rôle du Merlan qu'il a
créé CHEZ SON PÈRE
H
arel, directeur de la Porte-Saint-Mar-
tin, disait un jour au père Moëssard,
qui était gros comme une tonne:
— Mon petit Moëssard, faites-moi encore
cette concession. Elle est, comme vous
voyez, des plus légères.
Moëssard recula d'un pas, rejeta en ar-
rière sa bonne grosse tête rouge, mit sa
main droite dans son gilet et répliqua d'un
ton magistral :
- Monsieur Harel, c'est de concessions
en concessions que Louis XVI -- monta sur
l'échafaud !. ------.- -
c
omme le racontait l'autre jour Çomœ-
dia, Rossini avait la répartie facile et
il aimait ceux qui faisaient preuve de la
même faculté.
Un matin, sa cuisinière entre pour pren-!
tfrtr'fes* ordres w sujet des repas de lai
journée.
Absorbé par son travail et impatienté par
la nécessité de répondre, il se retourne
brusquement: « Pour le déjeuner? Eh bien!
faites de la m. »
Alors, la cuisinière :-- « Et pour les domes-
tiques, Monsieur? »
Rossini fut ravi et octroya à sa cuisinière
une gratification de vingt francs.
C'est le cas de dire que cette réponse
porta bonheur au cordon bleu. -
L
e talent de M. Toselli.
On annonce que le contrat passé en-
tre un impresario et M. Toselli, l'époux de
l'ancienne princesse de Saxe, vient d'être
rompu au dernier moment parce que « les
facultés artistiques de l'artiste ont été ju-
gées trop inférieures pour assurer le suc-
cès ».
c
Dur et jardin.
On a pu déjà, dans Comœdia, trou-
ver de nombreuses explications des mots
« cour » et « jardin ».
Il est bon d'ajouter un joli mot, adressé
par A. Lambert père à Ravet, de la Comé-
die-Française, lors des débuts de ce der-
nier-k lOdéon-
- Quand tu débutes, quand tu arrives
devant le public, ton cœur bat toujours du
côté cour.
Q'est à la fois bref, précis et un peu
ému, comme il convient. On retient cette
définition-là.
L
e Ménestrel annonce gravement qu'un
membre de la Chambre des Communes
a interpellé le mimstere pour lui demander
d'interdire les doubles représentations théâ-
trales du dimanche à Londres.
Notre confrère ignore évidemment ce
qu'est le terrible dimanche de Londres'; les
théâtres n'y donnent pas deux représenta-
tions, ni. même une seule, mais restent
strictement fermés, comme tous les maga-
sins, à l'exception de quelques rares res-
taurants. C'est l'ennui lourd, absolu, tel
qu'un certain nombre de fanatiques vou-
draient l'imposer à Paris.
L'abominable appréhension de l'artiste
avant d'entrer en scène, à laquelle Delna
elle-même n'échappait pas, s envole dès
que nos étoiles vont aux feux de la rampe
dans une Bayard sans peur et. sans re-
proche, dont le joli magasin, 10, boulevard
de la Madeleine, a tant de superbes spéci-
mptic
Le 1.000e Constat.
Nous avons omis de signaler a nos lec-
trices que la si jolie robe de Mlle Mistin-
guett, que nous reproduisions hier, est la
création d'Henry, le couturier de la rue
Taitbout, déjà renommé. Il est également
l'auteur de ses toilettes si remarquées dans
le succès des Folies-Dramatiques.
NOUVELLE A LA MAIN
u
n auteur dramatique se plaint amère-
ment à un directeur de théâtre de ce
que celui-ci lui rende son manuscrit après
l'avoir gardé pendant plus d un an:
- Vous m'avez bercé d'espérances illu-
soires. J'avais confiance en vous, et fina-
lement vous m'avez joué.
1. —- N'est-ce pas ce que vous attendiez de
nioi ?
Le Masque de Verre.
-, Théâtre National de l'Odéon
L'ALOUETTE
Pièce en quatre actes, de M. de Wildenbruch,
traduction de M. Emile Lutzi
it
Deux frères ont hérité d'une usine à
papier florissante. L'un, Herman Lan-
genthal, âgé de dix-huit ans, est le mau-
vais sujet, qui renâcle au travail, veut
faire la fête et méprise les ouvriers.
L'autre, l'aîné, homme mûr, est le bon
patron, austère moraliste et socialiste
aux intentions noblement humanitaires.
On l'appelle monsieur Auguste.
Dans la maison va et vient une petite
servante, Hélène, dite familièrement
i*
En haut et 2 gauche: Mlle LION (Julienne). — En haut et à droite: M. VARGAS
(Auguste Langenthal). — Au milieu: Mlle BARJAC (L'Alouette). — En bas et à
gauche: Mme L. COLAS (Mme veuve Schmalenbach. - En bas et à droite: M. BER,
NARD (PaulTlefeld).
Lina, fille de la veuve Schmalenbach,
nièce de l'ouvrier pessimiste Alexis
Schmalenbach, et fiancée au bon ouvrier
Ilefeld, qui est le modèle des puiseur*
(le puiseur, paraît-il, est l'ouvrier de qui
dépend la pâte plus ou moins fine du
papier.) *
Herman lutine Hélène, et veut la dé-
baucher. Monsieur Auguste la défend.
Tous deux la surnomment l'Alouette.
Même Herman n'hésite pas à trouver
que c'est une alouette huppée.
Les deux frères s'attrapent violem-
ment a propos de l'Alouette. Ici finit le
premier acte.
Au second, monsieur Auguste vient
chez la mère Schmalenbach et lui de-
mande la main d'Hélène. Stupeur
des Schmalenbach, maman et oncle.
Stupeur plus grande encore d'Hé-
lène, qui, pleine de vénération pour
monsieur Auguste, n'ose lui dire non
et lui avouer qu'elle est fiancée à Ile-
feld. Scène touchante et bien connue, où
Ilefeld, apprenant que sa promise peut
devenir la femme du patron, se sacrifie
au bonheur de la famille, et surtout de
la maman Schmalenbach, qui est un peu
paralysée, et qu'on va pouvoir envoyer
aux bains. (Sic.)
Au troisième acte, Hélène est fiancée
à monsieur Auguste, qui est allé à Ber-
lin lui acheter une belle robe neuve dans
un magasin de confections. Malgré cette
robe, la pauvre alouette reste gau-
che, mal élevée, cassant son sucre avec
ses dents et buvant son café dans sa
soucoupe. On fait comprendre à mon-
sieur Auguste qu'il aura quelque peine
à la rendre une femme du monde. Il
n'en persiste pas moins à vouloir 1 épou-
ser. Ilefeld vient, entre temps, déclarer
qu'il quitte l'usine, lui, le meilleur ou-
vrier puiseur. Monsieur Auguste ne de-
vine pas pourquoi et se reproche son
socialisme, inutile avec des ingrats. En
revanche; Herman, lui, devine qu'Hé-
lène a quelque chose sur le cœur qu'elle
n'avoue pas. Décidé à rompre le ma-
riage de son frère, il décide la naïve
alouette à partir avec lui pour Berlin,
et, en attendant l'heure du train, à ve-
nir s'entretenir avec lui, à minuit, dans
sa chambre, de ce beau projet qui n'em-
pêchera pas la mère SchmaTenbach d'al-
ler aux bains. (Toujours sic.)
Au dernier acte, l'alouette est dans la
chambre du Lovelace Hermann, où se
trouvent des divans, de la fine, du ma-
laga. Il boit un verre de fine. Elle boit
quelques verres de malaga. Il veut la
violer Elle comprend enfin pourquoi il
l'a fait venir là. Elle crie. Monsieur Au-
guste arrive, l'arrache à l'étreinte du
jeune satyre, qui s'enfuit. Ilefeld sur-
vient à point pour l'explication finale.
Monsieur Auguste se sacrifie, à son
tour, devant l'amour des deux jeunes
sens. Le bon ouvrier et l'honnête ser-
vante se marieront, et l'usine ne sera
pas privée de son meilleur puiseur.
Cette pièce créée il y a goule ans.
à Vienne, par Mme Odilon, a été jouée
plus de cinq cents fois en Allemagne
avec un succès triomphal.
A Paris, nous en avons trouvé l'esprit
formidablement lourd, les péripéties en-
fantines, le sujet berquinard, et le tout
nous a paru, sans doute à tort, un chef-
d'œuvre de niaiserie.
Il faut remercier Antoine. de nous
avoir démontré, avec tant de preuves à
l'appui, combien le cerveau allemand ef
différent du nôtre ; maïs peut-être le sa*
vions-nous assez pour n'avoir pas be-
soin d'une démonstration aussi écra-
sante.
JEAN RICHEPIN
Comment ils ont joué
Ils ont joué un peu couleur des ailes
de l'alouette, cela va sans dire. Mais ce-
lui qui mérite d'être cité en tête de tous,
c'est Bernard, que l'affiche nomme en
dernier. Dans le rôle de Paul Ilefeld, il
a trouvé des accents de simplicité et de
sincérité tout à fait prenants; il a joué
vrai et il a été touchant
Vargas (Auguste Langenthal) a pour
lui sa voix chaude et bien timbrée. Il a
montré une certaine autorité dans son
rôle de directeur et de. frère ennemi, et
aussi de la chaleur. Mais il n'y avait pas
grand chose a tirer de son personnage.
Maupré est élégant dans Herman
Langenthal; il a composé son rôle avec
intelligence. Maupré, qui est tout jeune,
devra veiller a son articulation; sa voix
est blanche ; s'il ajoute à cela une diction
qui manque de netteté, il ne sera guère
compris quand il parlera.
Desfontaines a pittoresquemènt campé
un personnage épisodique de chiffonnier
hirsute (Alexis Schmalenbach).
Mlle Barjac brune, jouait Hélène. Je
crois qu il y a là une erreur de distribu-
tion. Il aurait fallu une Gretchen blonde,
qui aurait donné à l'Alouette une iml
pression de légèreté résignée, alors- que
Mlle Barjac a le tempérament d'une ré-
voltée. Mlle Sylvie semblait plutôt indi-
quée.
Mme Jeanne Lion est chargée du rôle
de julienn'e, la cousine d'Auguste Lan-
genthal. Elle a bien indiqué l'amour
qu elle ressent en secret pour son cou-
sin.
J'ai gardé pour la fin Mme Luce Colas
tout à fait exquise dans la veuve Schma-
lenbach; elle a la spécialité de ces
paysannes; elle sait donner à chacun de
ces personnages le caractère qui lui
convient. Celui de la veuve Schmalen-
bach est fort joliment esquissé.
La mise en scène. « Les décors
Une pièce comme L'Alouette n'exige
pas une mise en scène extraordinaire.
Antoine a pourtant su lui donner de la
couleur locale, l'ambiance allemande
qu'elle réclamait.
Le décor du Premier et du troisième
actes représente la villa du directeur Au-
guste Langenthal. C'est le décor que
nous avons vu au troisième acte de La
Française, d'Eugène Brieux. Antoine l'a
modifié pour L'Alouette au moyen d'une
toile de fond qui représente les maison!
d'un village allemand avec leur architec
ture, leur forme si spéciale.
Au deuxième acte, nous sommes dant
la chambre de la veuve SChmalenbach,
Là, c'est bien l'iritérieur pauvre alle-
mand, avec les rideaux rouges au -n f-J.
I# Numéro : # cçauej&s
Dimanche 20 Octobre 190&
COMŒDIA
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKt
(
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE; 288-07
Adresse Télégraphique : COMŒDIA-PARIS
1. ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOIS
ïaris et Départements. 24 fr. 12 fr.
tranger. 40 » 20 »
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,27, Boulevard Poissonnière, PARIS
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Paris et Départements 24 fr. 12 fr.
Etranger. 40 » 20 »
^HïStE COUR â JARDIN
Son Mari
Le drame des Bouffes-Parisiens qui
sollicite si vivement notre curiosité de-
puis une semaine, demeure jusqu'ici
mystérieux et inexplicable. Pourquoi
Louis Mégève a-t-il tiré quatre coups de
revolver? Folie? Vengeance? Crime
passionnel? On ne sait rien.
Or, le hasard m'a révélé les raisons
étranges, et si humaines pourtant, de
Cet Il ne me sem-
ble ^Compréhensible. Il ne me sem-
ble pas qu'il soit nécessaire, pour les
faire connaître, d'attendre le bon plaisir
du juge d'instruction.
Il y a trois ans, Suzanne Divois, l'hé-
roïne Infortunée de ce drame, n'était en-
core que Mlle Divois, lorsqu'elle fut
convoitée Par Louis Mégève et par
Gréaume, le célèbre acteur. Ce qui
donna longtemps à croire que Gréaume
l'emporterait, c'est qu'il flattait le goût
de s ^ne fille pour le théâtre et qu'il
ne se point opposé à ce qu'elle-
même m°ntât sur les planches. Mais
l'amour est plus fort que tout, et Su-
zanne aUllait Louis Mégève. Elle le
Prouva en lui accordant sa main, malgré
le gros Sacrifice qu'il exigeait de sa
~Le erment fut solennel : Suzanne
enoncerait à toute ambition théâtrale.
ment serment, elle ne le tint pas seule-
tnent en fait, elle y resta fidèle même en
pensée. Et cela lui fut facile, car elle
était infiniment heureuse. Durant les
longs mOIS que Mégève, mari passion-
né et amant ombrageux, la promena
parmi amant ombrageux, la promena
parmi les plus beaux paysages du
monde, jamais l'ombre d'un regret n'ef-
fleura son bonheur. Suspendue au bras
de celui qu elle aimait, elle n'avait d'au-
tre espoir que de vivre indéfiniment la
Monotone et divine de l'amoureuse.
Le destin ne le permit pas. Une série
de chances contraires désorganisa la
fortune de Mégève, qui, finalement,
après de mauvaises spéculations, se rui-
s une affaire hasardeuse qu'il
entreprise.
Du jour au lendemain, ce fut la mi-
^Wre r' Mégève trouva une place. Mais
*^ Appointements pouvaient lui per-
d® conserver à sa femme le luxe
ici -là se plaisait à l'envelopper jus-
Il s'ouffrit pour elle. Il eut peur qu'elle
De Se lassât et que les -privations de
t°Ut cs sortes ne finissent par la rebuter.
Et fut lui, le premier, qui aborda la
que estion du théâtre. Suzanne multiplia
les objections, le supplia de renoncer à
un projet dont les conséquences lui sem-
lent redoutables. Il s'obstina.
l'ijj. Je veux que tu sois heureuse.
~L'idée de ton bonheur passe avant tout,
avant ma jalousie elle-même. D'ailleurs,
puis-je être encore jaloux après trois ans
d'intimité et de tendresse?
Six semaines plus tard, Suzanne Di-
e avait repris son nom de jeune
fille) débutait en province. L'année sui-
vante, le directeur des Bouffes l'enga-
geait Pour créer le rôle de Bertrande
Altie r dans la pièce de Boisrouvry. On
n'a oublié le succès qu'elle y rem-
porta. C'était la gloire, et c'était aussi la
Et leur vie continua, paisible et con-
.tait t Des le premier jour, Mégève s'e-
It tenu résolument à l'écart de sa
e Pour tout ce qui concernait son
existence d'actrice. Il ne lisait même pas
le compte rendu des premières, même
pas la rubrique des journaux où se pu-
blien t, tous les matins, l'histoire de ce
rEtla MOnde tumultueux et fiévreux -
rèti ames déguisées, bulletins de santé,
es et nouvelles sur chacun et sur
Wne- Il travaillait, se rendant ponc-
~à la maison de commerce où
119Vait trouvé une petite situation.
^r' Un soir que sa femme venait de
partir Pour la représentation, il aperçut
Jir table de leur chambre, un livre
%t^ titre de leur chambre, un livre
4p e titre le frappa : Bertrande Al-
31p, était la pièce de Boisrouvry, ré-
~cemment parue en volume, la pièce où
li'ne triomphait depuis deux mois.
ftk^it le livre au hasard, et il lut :
BERTRANDE ALTIER (elle baisse la tête,
; doublée). — Oh! Philippe, je
l bIlez en supplie, ayez pitié de moi.. ou-
4n aveu involontaire.
ltQlldllIPPE. - Aveu inutile, Ber-
N h Votre amour? mais il se trahit
dans chacune de vos paroles, dans cha-
de vos gestes.
Vre de baisers la main de Bertrande,
r 9, Qlldo res montent le long du bras. Elle
llne,)
Nerveusement, Mégève se reporta au
~it eu livre, à la page où se trouve
lprite la distribution des rôles. Phi-
était Gréaume, le célèbre acteur,
t d'autref ois.
|a'lp ht comme un fou. Dehors, il sau-
N,Une voiture.
Importe où, cocher. Au bois
ta agne. a Auteuil.
PA tout prix, il voulait s'éloigner de
fie îs et Prendre le temps de la ré-
Paris et Pendre le temps de la ré-
~~n recouvrer son sang-froid. Mais,
dix minutes après, il criait par la por-
Il, r^?cher, aux Bouffes-Parisiens.
~s'y cacha
Devant lui, à dix pas, Suzanne allait
vennait.
* C'était la première fois qu'il la voyait
ainsi. Les bras nus, la gorge riue, elle
lui parut admirablement belle. Il l'écou-
ta et la regarda. Elle jouait avec une
grande simplicité et un charme en-
joué qui ravissaient le public.
Mais Gréaume entra, elle et lui de-
meurèrent seuls, et Mégève fut très
étonné d'entendre que sa femme prenait
tout à coup une autre voix, la voix qu'il
croyait être seul à connaître, sa voix
'd'amoureuse si émue et si douce.
C'était naturel, puisqu'elle aimait cet
homme dans la pièce. Pourtant, ce fut
pour Mégève une souffrance horrible.
Et la scène commença, la fameuse
scène que nous avons tous entendue, et
qui valait tant d'ovations à Suzanne Di-
vois. Et de fait, elle y était exquise,
grave, joyeuse, coquette, pudique, et
toujours si sincère!
Mégève subissait le plus abominable
des supplices. Suzanne, sa chère Su-
zanne, livrant ainsi à toute une foule, ce
qu'il y avait en elle de plus intime et de
plus sacré! Il se contint. Suzanne n'était
là qu'une interprète. Elle n'aimait pas
cet homme, et si quelque chose subsis-
tait en Gréaume des sentiments passés,
Suzanne, elle, y demeurait insensible.
Un détail le confirma dans cette idée.
Gréaume lui ayant pris la main, elle
l'avait repoussé avec plus de rudesse
que ne l'exigeait le rôle, et comme si la
femme eût accentué la révolte de la co-
médienne.
Dès lors, il vit nettement ce qu'il y
avait de réel et ce qu'il y avait de fac-
tice dans le jeu de l'interprète. Il distin-
gua Suzanne de Bertrande, et chaque
fois que Philippe n'était plus l'acteur, et
mêlait à son rôle un peu des sentiments
personnels et des instincts de Gréaume,
Mégève percevait nettement le petit re-
cul de celle qu'il aimait.
— La vaillante, la loyale créature,
murmura-t-il.
La scène cependant devenait plus ar-
dente et Philippe plus pressant. Mégève
tressaillit, son rival s'était mis à genoux
et Bertrande s'alanguissait. Faible, dé-
semparée, elle avouait son amour, elle
avouait les combats qui la déchiraient.
Philippe saisit la main, elle ne la retira
pas.
En vérité, rien n'était admirable
comme le spectacle de cette femme
qui luttait -4omrëT le --éèeie- et-^ ebAtrë"fâ
tentation. Le public écoutait, dans un si-
lence haletant. -
— Oh ! Philippe, je vous en supplie,
ayez pitié de moi. oubliez mon aveu
involontaire.
— Aveu inutile, Bertrande. Votre
amour? mais il se trahit dans chacune
de vos - paroles.
Il couvrit de baisers la main de la
jeune femme. Elle essaya de se défen-
dre, s'abandonna, puis se reprit, et de
nouveau, très lâche, céda. Et Mégève
étouffa un rugissement de colère. Il avait
eu soudain l'impression aiguë et péné-
trante que la lutte de Suzanne n'était pas
simulée. Elle luttait réellement contre
elle-même, maîtresse encore de ses sens,
moins éperdue déjà, et toute frémis-
sante. Ce n'était plus Bertrande, mais
Suzanne qui palpitait au contact de ces
baisers.
Les lèvres de Gréaume montèrent le
long du bras. Suzanne défaillit. Ses yeux
se voilèrent, sa gorge se gonfla, un fris-
son faisait trembler ses doigts. Ah!
comme il les connaissait bien, ces signes
évidents de son désir! Qu'elle fût con-
sentante ou non, que toute son honnê-
teté se révoltât contre la caresse subie,
n'importe, elle en goûtait la joie! elle
en éprouvait l'ivresse ! Seule avec cet
homme, elle se fût donnée! elle se fût
donnée puisqu'elle ne luttait même
plus, vaincue, toute sa chair offerte!
Gréaume se souleva. Vivement, vio-
lemment, il lui saisit les lèvres à pleines
lèvres. Elle eut un cri de volupté et de
douleur. Ah! ce cri, ce cri de bête qui
mord et qui se pâme, comme il l'avait
entendu, déjà! Et à pleines lèvres, à
son tour, à lèvres vivantes et frisson-
nantes, elle rendit le baiser!
.Mégève sortit son revolver et tira. Il
tira quatre fois. Au second coup, Su-
zanne tomba, blessée à mort. Au qua-
trième coup, Gréaume fut atteint.
Maurice LEBLANC.
-— — i» 9 ■»
Nourrices sèches
Rien n'est plus touchant que les soins
dont on entoure les nourrices dans nos mé-
nages parisiens; leurs moindres désirs de-
viennent des ordres, et l'on s'efforce, par
tous les moyens possibles, de leur éviter
toute contrariété. Il s'agit, en effet, avant
toute chose, de la santé du « petit », qu'une
simple colère du biberon-vivant pourrait
compromettre.
Aussi, la nourrice peut-elle s'installer en
sécurité avec toute sa famille, recevoir ses
cousins les charbonniers dans le salon et
héberger une interminable horde de culti-
vateurs, tandis que ses maîtres, terrorisés,
la regardent avec admiration du fond de la
cuisine.
Certains acteurs, il faut bien le recon-
naître, jouent à peu près le même rôle vis-
à-vis des infortunés auteurs qui leur ont
confié leur enfant.
Dès le début, il s'agit d'éviter toute con-
trariété aux comédiens, de subir leurs moin-
dres fantaisies, dût le texte de la pièce s'en
ressentir effroyablement, et ces traditions,
avouons-le, sont parfois d'un goût qui n'est
même plus douteux!
Dèt! les premières représentes, l'in-
dépendance rfes interprètes. s'uffirme en-
cerf dwaniaii"; elle devient hors de pro-
portion lorsque le succès s'établit au bout
de quelques semaines.
Dans la grande salle du Palais, au milieu
des gardes respectueux, l'empereur n'hé-
site pas à inviter ouvertement le pape ma-
lade à diner et demande à la princesse de
venir pêcher à la ligne avec lui, le lende-
main, à Joinville-le-Pont.
Les spectateurs, dont la patience est in-
finie, ne remarquent souvent pas ces bec-
quets imprévus - ou tout au moins les su-
bissent avec un respect qui ne témoigne
guère en faveur de leur intelligence ou de
l'idée qu'ils ont du talent de l'auteur!
Parfois des querelles personnelles s'en
mêlent. C'est ainsi qu'il me souvient d'un
acteur de l'Odéon qui, dans les rôlés les
plus calmes, devenait presque turie'ux cha-
que lois qu'il quittait la scène. Il s'agissait,
en effet, pour lui, d'ouvrir la porte avec la
plus grande brusquerie possible pour rabo-
ter le nez d'une vieille mère d'actrice qui
le guettait toujours derrière les portants.
Parfois, sans aller si loin, et avec les
meilleures intentions du monde, les inter-
prètes dénaturent totalement une -pièce et
la rendent ridicule en voûtant lui faire du
bien. - —
Certains cherchent à placer coûte que
coûte (toujours dans l'intérêt de la pièce)
leurs petits talents de société et s'obstinent,
sans aucune raison, à jouer dû cor de
chasse au moment de l'enterrement P£wce
qu'ils savent en jouer, ou à jongler avec
leur épée lorsqu'ils figurent M. de Talley-
rand, sous le vain prétexte que cela amuse
tout le monde lorsqu'ils font cela dans un
dîner de noce avec les couteaux de table.
De telles trahisons ne sont point faites
pour rehausser le prestige de notre produc-
tion dramatique. Nos acteurs auraient tout
avantage à ne plus les pratiquer et à res-
pecter davantage un répertoire que le seul
talent des auteurs suffit déjà trop souvent
à éreinter.
- G. DE PAWLOWSKI.
Échos
1
1 nous tombe sous les yeux une curieuse
affiche théâtrale datant du 2 mai 1824,
imprimée sur beau papier parchemme et
dont se servit, pour annoncer son arrivée
aux habitants de la « bonne ville » d'Agen,
un impresario de l'époque: Fradin père.
Voici quel était le programme de la pre-
smière soirée: « Le Coiffeur et le Perru-
quier, vaudeville nouveau en un acte par
-M
un acte par M, Brazier. Le spectacle com-
mencera par Le Billet de logement, opéra-
vaudeville en un acte par M. Léger. Le
spectacle sera terminé par Werther ou les
Egarements d'un cœur sensible, drame co-
mique mêlé de chant, par MM. Duval et
Rougemont.
<( Par ordre supérieur, il est expressé-
ment défendu de lire aucun billet jeté sur
le théâtre.
« On commencera à six heures et demie
très précises.
« Premières, 2 fr. 20; secondes, 1 fr. 10;
parterre, 0 fr. 75; paradis, 0 fr. 10. »
En ce temps-là, on commençait de bonne
heure; dans la même soirée l'on entendait
de l'opéra, du vaudeville, du drame, et l'on
payait peu!. L'idéal, quoi!
L
'Opéra et Les Huguenots.
La première des Huguenots date du
29 février 1836. Attre et la belle Demou-
geot ont remplacé Nourrit et Mme Falcon.
M. Gailhard tient, pour deux mois, encore,
le sceptre de M. Véron. M. Gailhard n'eut
point commis la gaffe de M. Véron.
Désireux de s'assurer un second Robert
le Diable, celui avait traité par écrit avec
Meyerbeer. Meyerbeer devait fournir Les
Huguenots à jour fixe, comme on livre un
sac de charbon ou un pardessus, et ce sous
peine d'un dédit de trente mille francs.
Le maestro travaillait avec une sage len-
teur; Les Huguenots ne purent être « ver-
sés » à l'échéance. M. Véron eut le cou-
rage d'exiger et d'encaisser les trente mille
francs. Meyerbeer bouda; Les Huguenots
faillirent ne point voir la rampe.
A la retraite de M. Véron, son succes-
seur Duponchel eut le bon goût - et l'ha-
bileté — de rembourser vingt mille francs
au glorieux auteur. Scribe, l'auteur du li-
vret et des vers suivants :
Un vieux soldat doit souffrir et se taire
• Sans murmurer
avait empoché les dix mille francs man-
quant pour le préjudice causé par le retard
du musicien ! Moins chevaleresque que
M. Duponchel, il les garda.
E
phémérides.
Ce fut le 20 octobre 1857 que
Markowskî, rerugie polonais et type des
plus originaux, inaugura, en association
avec un nommé Covary, sa fameuse salle
de danse située 12, rue Buffaultv Là furent
lancées plusieurs danses de caractère long-
temps célèbres dont Markowski était l'in-
venteur, parmi lesquelles il convient de ci-
ter la Lisbonnienne, le Fango, l'Impériale,
la Friska et surtout la Scottisch.
u
n becquet? Qu'est-ce qu'un becquet?
On appelle ainsi, en matière de théâ-
tre, toute modification apportée au texte
d'un ouvrage après sa remise aux acteurs.
L'origine du mot est assez jolie et vaut
d'être connue.
Voltaire, à la veille de faire représenter
une de ses premières tragédies, les rôles
sus et déjà répétés, il lui venait à tout mo-
ment dans l'esprit de nouveaux vers, de
nouvelles pensées qu'il fallait distribuer
aux uns et aux autres jusqu'au jour de la
représentation. Mais l'acteur Dufrène, ex-
cédé d'avoir à ôter et à remettre continuel-
lement dans sa-mémoire les productions de
ce génie inépuisable, prit le parti de se
faire céler chez lui, afin de mettre un terme
à cette abondance de corrections. Or, Vol-
taire s'avisa d'un charmant stratagème pour
triompher de cette résistance. Il fit faire un
beau pâté de perdrix r«ttge& et le fit paiv
venir à son interprète *6us tin nom d'êm-
prunt. Au milieu du repas, où Dufrène avait
réuni nombreuse compagnie, on ouvrit le
pâté. Surprise! Chaque perdrix portait'dans
son bec un petit billet qui mentionnait un
nouveau changement. Alors le comédien, ne
croyant pas devoir résister à cet ingénieux
expédient, se résigna à apprendre toutes
les corrections qu'un auteur aussi recom-
mandable voulut bien lui imposer.
o
uand Rosambeau, un des meilleurs ac-
teurs qu'ait eus l'Odéon de jadis
n'avait pas de quoi donner à souper à ses
enfants, il employait, pour les décider à se
coucher sans manger, le procédé suivant,
des plus ingénieux:
- Ceux qui voudront ne pas souper ce
soir, leur disait-il, auront chacun un sou!.
Tous acceptaient. Mais, le lendemain ma-
tin, ils avaient une faim canine. Alors, Ro-
sambeau s'écriait: 1
— Que ceux qui veulent déjeuner me
donnent chacun un sou!.
Il rentrait ainsi dans ses déboursés et
avait économisé un repas. Ce qui, aux mo-
ments de gêne, est urre chose essentielle,
même pour un acteur.
L
u sur l'affiche de la semaine d'un
1- « concerticule » dés boulevards. exté-
rieurs t
M. GADBIN
L'ex-écrasé vivant des Folies-Bergère dans son
répertoire.
Et, plus 'drôle :
LA CASSEROLE
Drame en un acte d'Oscar Météniet.
M. Brunin fils jouera le rôle du Merlan qu'il a
créé CHEZ SON PÈRE
H
arel, directeur de la Porte-Saint-Mar-
tin, disait un jour au père Moëssard,
qui était gros comme une tonne:
— Mon petit Moëssard, faites-moi encore
cette concession. Elle est, comme vous
voyez, des plus légères.
Moëssard recula d'un pas, rejeta en ar-
rière sa bonne grosse tête rouge, mit sa
main droite dans son gilet et répliqua d'un
ton magistral :
- Monsieur Harel, c'est de concessions
en concessions que Louis XVI -- monta sur
l'échafaud !. ------.- -
c
omme le racontait l'autre jour Çomœ-
dia, Rossini avait la répartie facile et
il aimait ceux qui faisaient preuve de la
même faculté.
Un matin, sa cuisinière entre pour pren-!
tfrtr'fes* ordres w sujet des repas de lai
journée.
Absorbé par son travail et impatienté par
la nécessité de répondre, il se retourne
brusquement: « Pour le déjeuner? Eh bien!
faites de la m. »
Alors, la cuisinière :-- « Et pour les domes-
tiques, Monsieur? »
Rossini fut ravi et octroya à sa cuisinière
une gratification de vingt francs.
C'est le cas de dire que cette réponse
porta bonheur au cordon bleu. -
L
e talent de M. Toselli.
On annonce que le contrat passé en-
tre un impresario et M. Toselli, l'époux de
l'ancienne princesse de Saxe, vient d'être
rompu au dernier moment parce que « les
facultés artistiques de l'artiste ont été ju-
gées trop inférieures pour assurer le suc-
cès ».
c
Dur et jardin.
On a pu déjà, dans Comœdia, trou-
ver de nombreuses explications des mots
« cour » et « jardin ».
Il est bon d'ajouter un joli mot, adressé
par A. Lambert père à Ravet, de la Comé-
die-Française, lors des débuts de ce der-
nier-k lOdéon-
- Quand tu débutes, quand tu arrives
devant le public, ton cœur bat toujours du
côté cour.
Q'est à la fois bref, précis et un peu
ému, comme il convient. On retient cette
définition-là.
L
e Ménestrel annonce gravement qu'un
membre de la Chambre des Communes
a interpellé le mimstere pour lui demander
d'interdire les doubles représentations théâ-
trales du dimanche à Londres.
Notre confrère ignore évidemment ce
qu'est le terrible dimanche de Londres'; les
théâtres n'y donnent pas deux représenta-
tions, ni. même une seule, mais restent
strictement fermés, comme tous les maga-
sins, à l'exception de quelques rares res-
taurants. C'est l'ennui lourd, absolu, tel
qu'un certain nombre de fanatiques vou-
draient l'imposer à Paris.
L'abominable appréhension de l'artiste
avant d'entrer en scène, à laquelle Delna
elle-même n'échappait pas, s envole dès
que nos étoiles vont aux feux de la rampe
dans une Bayard sans peur et. sans re-
proche, dont le joli magasin, 10, boulevard
de la Madeleine, a tant de superbes spéci-
mptic
Le 1.000e Constat.
Nous avons omis de signaler a nos lec-
trices que la si jolie robe de Mlle Mistin-
guett, que nous reproduisions hier, est la
création d'Henry, le couturier de la rue
Taitbout, déjà renommé. Il est également
l'auteur de ses toilettes si remarquées dans
le succès des Folies-Dramatiques.
NOUVELLE A LA MAIN
u
n auteur dramatique se plaint amère-
ment à un directeur de théâtre de ce
que celui-ci lui rende son manuscrit après
l'avoir gardé pendant plus d un an:
- Vous m'avez bercé d'espérances illu-
soires. J'avais confiance en vous, et fina-
lement vous m'avez joué.
1. —- N'est-ce pas ce que vous attendiez de
nioi ?
Le Masque de Verre.
-, Théâtre National de l'Odéon
L'ALOUETTE
Pièce en quatre actes, de M. de Wildenbruch,
traduction de M. Emile Lutzi
it
Deux frères ont hérité d'une usine à
papier florissante. L'un, Herman Lan-
genthal, âgé de dix-huit ans, est le mau-
vais sujet, qui renâcle au travail, veut
faire la fête et méprise les ouvriers.
L'autre, l'aîné, homme mûr, est le bon
patron, austère moraliste et socialiste
aux intentions noblement humanitaires.
On l'appelle monsieur Auguste.
Dans la maison va et vient une petite
servante, Hélène, dite familièrement
i*
En haut et 2 gauche: Mlle LION (Julienne). — En haut et à droite: M. VARGAS
(Auguste Langenthal). — Au milieu: Mlle BARJAC (L'Alouette). — En bas et à
gauche: Mme L. COLAS (Mme veuve Schmalenbach. - En bas et à droite: M. BER,
NARD (PaulTlefeld).
Lina, fille de la veuve Schmalenbach,
nièce de l'ouvrier pessimiste Alexis
Schmalenbach, et fiancée au bon ouvrier
Ilefeld, qui est le modèle des puiseur*
(le puiseur, paraît-il, est l'ouvrier de qui
dépend la pâte plus ou moins fine du
papier.) *
Herman lutine Hélène, et veut la dé-
baucher. Monsieur Auguste la défend.
Tous deux la surnomment l'Alouette.
Même Herman n'hésite pas à trouver
que c'est une alouette huppée.
Les deux frères s'attrapent violem-
ment a propos de l'Alouette. Ici finit le
premier acte.
Au second, monsieur Auguste vient
chez la mère Schmalenbach et lui de-
mande la main d'Hélène. Stupeur
des Schmalenbach, maman et oncle.
Stupeur plus grande encore d'Hé-
lène, qui, pleine de vénération pour
monsieur Auguste, n'ose lui dire non
et lui avouer qu'elle est fiancée à Ile-
feld. Scène touchante et bien connue, où
Ilefeld, apprenant que sa promise peut
devenir la femme du patron, se sacrifie
au bonheur de la famille, et surtout de
la maman Schmalenbach, qui est un peu
paralysée, et qu'on va pouvoir envoyer
aux bains. (Sic.)
Au troisième acte, Hélène est fiancée
à monsieur Auguste, qui est allé à Ber-
lin lui acheter une belle robe neuve dans
un magasin de confections. Malgré cette
robe, la pauvre alouette reste gau-
che, mal élevée, cassant son sucre avec
ses dents et buvant son café dans sa
soucoupe. On fait comprendre à mon-
sieur Auguste qu'il aura quelque peine
à la rendre une femme du monde. Il
n'en persiste pas moins à vouloir 1 épou-
ser. Ilefeld vient, entre temps, déclarer
qu'il quitte l'usine, lui, le meilleur ou-
vrier puiseur. Monsieur Auguste ne de-
vine pas pourquoi et se reproche son
socialisme, inutile avec des ingrats. En
revanche; Herman, lui, devine qu'Hé-
lène a quelque chose sur le cœur qu'elle
n'avoue pas. Décidé à rompre le ma-
riage de son frère, il décide la naïve
alouette à partir avec lui pour Berlin,
et, en attendant l'heure du train, à ve-
nir s'entretenir avec lui, à minuit, dans
sa chambre, de ce beau projet qui n'em-
pêchera pas la mère SchmaTenbach d'al-
ler aux bains. (Toujours sic.)
Au dernier acte, l'alouette est dans la
chambre du Lovelace Hermann, où se
trouvent des divans, de la fine, du ma-
laga. Il boit un verre de fine. Elle boit
quelques verres de malaga. Il veut la
violer Elle comprend enfin pourquoi il
l'a fait venir là. Elle crie. Monsieur Au-
guste arrive, l'arrache à l'étreinte du
jeune satyre, qui s'enfuit. Ilefeld sur-
vient à point pour l'explication finale.
Monsieur Auguste se sacrifie, à son
tour, devant l'amour des deux jeunes
sens. Le bon ouvrier et l'honnête ser-
vante se marieront, et l'usine ne sera
pas privée de son meilleur puiseur.
Cette pièce créée il y a goule ans.
à Vienne, par Mme Odilon, a été jouée
plus de cinq cents fois en Allemagne
avec un succès triomphal.
A Paris, nous en avons trouvé l'esprit
formidablement lourd, les péripéties en-
fantines, le sujet berquinard, et le tout
nous a paru, sans doute à tort, un chef-
d'œuvre de niaiserie.
Il faut remercier Antoine. de nous
avoir démontré, avec tant de preuves à
l'appui, combien le cerveau allemand ef
différent du nôtre ; maïs peut-être le sa*
vions-nous assez pour n'avoir pas be-
soin d'une démonstration aussi écra-
sante.
JEAN RICHEPIN
Comment ils ont joué
Ils ont joué un peu couleur des ailes
de l'alouette, cela va sans dire. Mais ce-
lui qui mérite d'être cité en tête de tous,
c'est Bernard, que l'affiche nomme en
dernier. Dans le rôle de Paul Ilefeld, il
a trouvé des accents de simplicité et de
sincérité tout à fait prenants; il a joué
vrai et il a été touchant
Vargas (Auguste Langenthal) a pour
lui sa voix chaude et bien timbrée. Il a
montré une certaine autorité dans son
rôle de directeur et de. frère ennemi, et
aussi de la chaleur. Mais il n'y avait pas
grand chose a tirer de son personnage.
Maupré est élégant dans Herman
Langenthal; il a composé son rôle avec
intelligence. Maupré, qui est tout jeune,
devra veiller a son articulation; sa voix
est blanche ; s'il ajoute à cela une diction
qui manque de netteté, il ne sera guère
compris quand il parlera.
Desfontaines a pittoresquemènt campé
un personnage épisodique de chiffonnier
hirsute (Alexis Schmalenbach).
Mlle Barjac brune, jouait Hélène. Je
crois qu il y a là une erreur de distribu-
tion. Il aurait fallu une Gretchen blonde,
qui aurait donné à l'Alouette une iml
pression de légèreté résignée, alors- que
Mlle Barjac a le tempérament d'une ré-
voltée. Mlle Sylvie semblait plutôt indi-
quée.
Mme Jeanne Lion est chargée du rôle
de julienn'e, la cousine d'Auguste Lan-
genthal. Elle a bien indiqué l'amour
qu elle ressent en secret pour son cou-
sin.
J'ai gardé pour la fin Mme Luce Colas
tout à fait exquise dans la veuve Schma-
lenbach; elle a la spécialité de ces
paysannes; elle sait donner à chacun de
ces personnages le caractère qui lui
convient. Celui de la veuve Schmalen-
bach est fort joliment esquissé.
La mise en scène. « Les décors
Une pièce comme L'Alouette n'exige
pas une mise en scène extraordinaire.
Antoine a pourtant su lui donner de la
couleur locale, l'ambiance allemande
qu'elle réclamait.
Le décor du Premier et du troisième
actes représente la villa du directeur Au-
guste Langenthal. C'est le décor que
nous avons vu au troisième acte de La
Française, d'Eugène Brieux. Antoine l'a
modifié pour L'Alouette au moyen d'une
toile de fond qui représente les maison!
d'un village allemand avec leur architec
ture, leur forme si spéciale.
Au deuxième acte, nous sommes dant
la chambre de la veuve SChmalenbach,
Là, c'est bien l'iritérieur pauvre alle-
mand, avec les rideaux rouges au -n f-J.
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