8 POITOU ET VENDÉE.
boutique venait de s'ouvrir (1), était chargé de se le procurer au plus vite, sans parler
des livres proscrits qui, chaque année, leur arrivaient cachés dans les ballots de mar-
chandises apportés de toutes parts à la foire de la Grand Saint-Jean. Le formidable éclat
de rire que provoquèrent les Epistolas obscurorum virorum, d'Ulric de Hutten, publiées
en 1514, retentit peut-être, grâce à ce stratagème, jusque sous le bosquet de lauriers (2)
qui abritait leur petit cénacle de chercheurs à la piste du juste et du vrai, et de railleurs,
si bien disposés à faire litière des rogatons emmagasinés, durant le moyen-âge, pour
servir d'aliments à la crédulité et la sottise humaines.
C'est dans ce milieu que grandit François Rabelais, à partir du moment (1508?) où
les d'Estissac le placèrent, à l'âge de douze ou quatorze ans, sous la direction du cousin
de leur sénéchal (3).
Rapides furent les progrès de l'élève, qui s'assimila, avec une étonnante facilité, les
diverses connaissances possédées par les amis de son mentor ; grammaire, philologie,
jurisprudence, médecine, philosophie, théologie, pédagogie et autres branches du savoir
humain lui devinrent familières. Cette variété de connaissances acquise par lui dans
une petite ville, est la plus forte preuve que plusieurs travaillèrent à son instruction,
et que des relations journalières existaient entre les hommes dont les noms ont été
cités plus haut et Pierre Lamy (4).
Avec Rabelais se trouvait un autre novice qui se livrait aux même études ; mais il
était plus jeune que lui de quelques années. Il se nommait Louis Vinet, nom tant soit
peu défiguré par Budé, en le traduisant en grec (5), et appartenait à une famille bour-
geoise du Bocage.
Dix ans s'étaient à peine écoulés que le fils de l'apothicaire de Chinon attirait sur lui
l'attention des érudits les plus renommés du royaume. Plusieurs de ses confrères, fort
irrités déjà de l'introduction dans leur cloître de livres dangereux à leurs yeux (6), car
(1) La première mention qu'on ait de lui date de 1515, T1 vivait encore en 1541. Le nom de ses des-
cendants se retrouve en 1680 sur les registres de l'état-civil protestant de Fontenay. (Greffe du tribunal
civil ) Les derniers connus sont les enfants de Paul d'Angicourt, libraire, qui avait épousé, le 26 avril
1637, Geneviève Amproux, de Blain, en Bretagne. Ils se retirèrent dans le Bocage au moment de la
révocation de l'édit de Nantes, et de là partirent pour la Prusse.
(2) Lettre de P. Lamy à André Tiraqueau, en tête du livre d'Amaury Bouchard intitulé : Almarici
Bouchardi TÏJÇ ')'1J'IICC(XWXÇ yÛTXvjç, adversus Andream Tiraquellum, 1522, in.4°.
(3) Geoffroy d'Estissac était né en 1495, puisqu'il avait vingt-trois ans en 1518. Jean du Bellay,.
autre compagnon d'enfance de Rabelais, avait reçu le jour en 1492. Ces deux dates permettent
d'indiquer d'une manière approximative celle de la naissance de ce dernier.
(4) On a compris par erreur Antoine Ardillon parmi les savants que Rabelais connut à Fontenay,
tandis qu'il n'entra en relation suivie avec lui qu'à l'époque de son séjour à Ligugé. Ardillon était alors
abbé de Fontaine-le-Comte, près Poitiers après avoir été longtemps prieur de Sainte-Marie-du-Bois de
Secondignv. (Gallia Christiana.)
(5) Budé, Epistolas grzcse, le nomme «ÏUVETOÇ.
(6) Lettres écrites de la Vendée à M. Anatole de Montaiglon, p. 39.
boutique venait de s'ouvrir (1), était chargé de se le procurer au plus vite, sans parler
des livres proscrits qui, chaque année, leur arrivaient cachés dans les ballots de mar-
chandises apportés de toutes parts à la foire de la Grand Saint-Jean. Le formidable éclat
de rire que provoquèrent les Epistolas obscurorum virorum, d'Ulric de Hutten, publiées
en 1514, retentit peut-être, grâce à ce stratagème, jusque sous le bosquet de lauriers (2)
qui abritait leur petit cénacle de chercheurs à la piste du juste et du vrai, et de railleurs,
si bien disposés à faire litière des rogatons emmagasinés, durant le moyen-âge, pour
servir d'aliments à la crédulité et la sottise humaines.
C'est dans ce milieu que grandit François Rabelais, à partir du moment (1508?) où
les d'Estissac le placèrent, à l'âge de douze ou quatorze ans, sous la direction du cousin
de leur sénéchal (3).
Rapides furent les progrès de l'élève, qui s'assimila, avec une étonnante facilité, les
diverses connaissances possédées par les amis de son mentor ; grammaire, philologie,
jurisprudence, médecine, philosophie, théologie, pédagogie et autres branches du savoir
humain lui devinrent familières. Cette variété de connaissances acquise par lui dans
une petite ville, est la plus forte preuve que plusieurs travaillèrent à son instruction,
et que des relations journalières existaient entre les hommes dont les noms ont été
cités plus haut et Pierre Lamy (4).
Avec Rabelais se trouvait un autre novice qui se livrait aux même études ; mais il
était plus jeune que lui de quelques années. Il se nommait Louis Vinet, nom tant soit
peu défiguré par Budé, en le traduisant en grec (5), et appartenait à une famille bour-
geoise du Bocage.
Dix ans s'étaient à peine écoulés que le fils de l'apothicaire de Chinon attirait sur lui
l'attention des érudits les plus renommés du royaume. Plusieurs de ses confrères, fort
irrités déjà de l'introduction dans leur cloître de livres dangereux à leurs yeux (6), car
(1) La première mention qu'on ait de lui date de 1515, T1 vivait encore en 1541. Le nom de ses des-
cendants se retrouve en 1680 sur les registres de l'état-civil protestant de Fontenay. (Greffe du tribunal
civil ) Les derniers connus sont les enfants de Paul d'Angicourt, libraire, qui avait épousé, le 26 avril
1637, Geneviève Amproux, de Blain, en Bretagne. Ils se retirèrent dans le Bocage au moment de la
révocation de l'édit de Nantes, et de là partirent pour la Prusse.
(2) Lettre de P. Lamy à André Tiraqueau, en tête du livre d'Amaury Bouchard intitulé : Almarici
Bouchardi TÏJÇ ')'1J'IICC(XWXÇ yÛTXvjç, adversus Andream Tiraquellum, 1522, in.4°.
(3) Geoffroy d'Estissac était né en 1495, puisqu'il avait vingt-trois ans en 1518. Jean du Bellay,.
autre compagnon d'enfance de Rabelais, avait reçu le jour en 1492. Ces deux dates permettent
d'indiquer d'une manière approximative celle de la naissance de ce dernier.
(4) On a compris par erreur Antoine Ardillon parmi les savants que Rabelais connut à Fontenay,
tandis qu'il n'entra en relation suivie avec lui qu'à l'époque de son séjour à Ligugé. Ardillon était alors
abbé de Fontaine-le-Comte, près Poitiers après avoir été longtemps prieur de Sainte-Marie-du-Bois de
Secondignv. (Gallia Christiana.)
(5) Budé, Epistolas grzcse, le nomme «ÏUVETOÇ.
(6) Lettres écrites de la Vendée à M. Anatole de Montaiglon, p. 39.
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.32%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.32%.
- Sujets similaires Dutens Louis Dutens Louis /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Dutens Louis" or dc.contributor adj "Dutens Louis")
- Collections numériques similaires Dutens Louis Dutens Louis /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Dutens Louis" or dc.contributor adj "Dutens Louis")
- Auteurs similaires Dutens Louis Dutens Louis /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Dutens Louis" or dc.contributor adj "Dutens Louis")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 244/464
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k96733910/f244.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k96733910/f244.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k96733910/f244.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k96733910/f244.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k96733910
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k96733910
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k96733910/f244.image × Aide