La Basilique de Mattaincourt
par Francis Roussel
La renaissance médiévale tient dans l'histoire
de l'art du xixe siècle une place très importante.
Ce renouveau eut plusieurs conséquences :
naissance de l'histoire de l'art médiéval,
conservation des bâtiments, renouveau théo-
rique et renaissance architecturale. Ce mouve-
ment, le néo-gothique, en opposition avec
le classicisme qui ne prônait que l'architecture
grecque et romaine, sera une renaissance
de l'architecture nationale qui, suivant l'état
des connaissances historiques et archéolo-
giques, revêtira toutes les livrées de l'art
gothique.
Dans un premier temps, l'époque du
« néo-gothique romantique » (fin du XVIIIe
siècle-1840), on construit peu et les références
à l'architecture médiévale, mêlées de roman-
tisme, sont les xve et xvie siècles. La connais-
sance technique, les architectes vont l'acquérir
peu à peu dans leurs restaurations et au
contact même de leurs futurs modèles. Paral-
lèlement, les érudits découpent en tranches,
fixent les différentes périodes de l'époque et,
très vite, le XIIIe siècle en apparaît comme
l'apogée. Dans un second temps, et dès 1840,
les connaissances techniques et les références
stylistiques entraînent la multiplication des
constructions : c'est la phase du « néo-gothique
archéologique ».
L'église de Mattaincourt est l'une des
premières manifestations de ce renouveau
médiéval en Lorraine. L'histoire de sa construc-
tion et les réactions qu'elle suscita sur le
plan local et régional lui donnent une place
particulière. Son édification, saluée avec
enthousiasme lors de sa consécration, est due
à la rencontre de trois personnalités : Pierre
Fourier, l'inspirateur de l'oeuvre, curé de
Mattaincourt de 1597 à 1632; Charles Hadol,
le maître d'œuvre, qui n'eut de cesse, dès
son arrivée à la cure en 1831, de réaliser un
édifice digne à ses yeux de son illustre prédé-
cesseur; Louis-Auguste Boileau, le maître
de l'ouvrage, jeune architecte qui réalisa
ici sa première œuvre.
Le village de Mattaincourt n'avait pas
connu une grande renommée avant la venue
de Pierre Fourier. Au lendemain du concile
de Trente, celui-ci y appliqua avec une telle
ardeur les idées nouvelles que, dès sa mort,
le Bon Père fut l'objet d'une grande dévotion
qui, se transformant très vite en culte,
rendit rapidement l'église trop petite (1).
En 1760, la communauté de Mattaincourt
projette d'allonger la nef et de reconstruire
la tour et la sacristie. Ces travaux sont
achevés en 1763.
La Révolution interrompt les pèlerinages,
l'église devient Temple de l'Être suprême,
puis les paroissiens, refusant d'obéir à leur
curé, prêtre assermenté, ne fréquentent plus
l'église. Il faut attendre l'arrivée du curé
Hadol, en 1831, pour voir renaître le culte
du bienheureux Pierre Fourier.
Né en 1802 à Remiremont, Hadol prend pos-
session de la cure de Mattaincourt le 1er juil-
let 1831. Très vite, il renouvelle l'esprit de
sa communauté et relance le pèlerinage,
l'occasion lui en étant donnée, une année
après son arrivée, par le premier anniversaire
séculaire de la béatification de Pierre Fourier.
A partir de 1842, la rumeur de la canonisation
se répand et, à cette occasion, le curé Hadol
exprime son souhait de voir agrandir l'église (2).
Le 5 décembre 1843, le projet d'agrandissement
est rendu public : « L'affluence des pèlerins
est devenue si grande que M. l'abbé Hadol,
curé de Mattaincourt, a dû songer sérieuse-
ment à répondre, par l'agrandissement de
son église, au zèle pieux des fidèles qui ne
peuvent y trouver assez de place pour satisfaire
leur dévotion (3) ».
L'ancienne église, offrant 240 places, ne
pouvait en effet contenir une population de
1. Plan en croix latine (L. 30 m, 1. 10 m, h. 7,70 m) ;
nef à un seul vaisseau de deux travées, transept peu sail-
lant; chœur à deux travées plus étroites que celles de
la nef, terminé par une abside à trois pans; tour-clocher
hors-œuvre sur la façade occidentale; sacristie sur le pan
nord de l'abside. Église voûtée d'ogives, « gothique rayon-
nant avec voûtes très nervurées, piliers intérieurs très
minces, absence d'arcs-boutants, épais contreforts au
droit des retombées sur les murs extérieurs ». Archives
des Vosges, série O. Registre des délibérations du Conseil
municipal, séance du 30 juin 1845.
2. Espérance, Courrier de Nancy, 7 juillet 1844.
3. Espérance, Courrier de Nancy, 5 décembre 1843.
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par Francis Roussel
La renaissance médiévale tient dans l'histoire
de l'art du xixe siècle une place très importante.
Ce renouveau eut plusieurs conséquences :
naissance de l'histoire de l'art médiéval,
conservation des bâtiments, renouveau théo-
rique et renaissance architecturale. Ce mouve-
ment, le néo-gothique, en opposition avec
le classicisme qui ne prônait que l'architecture
grecque et romaine, sera une renaissance
de l'architecture nationale qui, suivant l'état
des connaissances historiques et archéolo-
giques, revêtira toutes les livrées de l'art
gothique.
Dans un premier temps, l'époque du
« néo-gothique romantique » (fin du XVIIIe
siècle-1840), on construit peu et les références
à l'architecture médiévale, mêlées de roman-
tisme, sont les xve et xvie siècles. La connais-
sance technique, les architectes vont l'acquérir
peu à peu dans leurs restaurations et au
contact même de leurs futurs modèles. Paral-
lèlement, les érudits découpent en tranches,
fixent les différentes périodes de l'époque et,
très vite, le XIIIe siècle en apparaît comme
l'apogée. Dans un second temps, et dès 1840,
les connaissances techniques et les références
stylistiques entraînent la multiplication des
constructions : c'est la phase du « néo-gothique
archéologique ».
L'église de Mattaincourt est l'une des
premières manifestations de ce renouveau
médiéval en Lorraine. L'histoire de sa construc-
tion et les réactions qu'elle suscita sur le
plan local et régional lui donnent une place
particulière. Son édification, saluée avec
enthousiasme lors de sa consécration, est due
à la rencontre de trois personnalités : Pierre
Fourier, l'inspirateur de l'oeuvre, curé de
Mattaincourt de 1597 à 1632; Charles Hadol,
le maître d'œuvre, qui n'eut de cesse, dès
son arrivée à la cure en 1831, de réaliser un
édifice digne à ses yeux de son illustre prédé-
cesseur; Louis-Auguste Boileau, le maître
de l'ouvrage, jeune architecte qui réalisa
ici sa première œuvre.
Le village de Mattaincourt n'avait pas
connu une grande renommée avant la venue
de Pierre Fourier. Au lendemain du concile
de Trente, celui-ci y appliqua avec une telle
ardeur les idées nouvelles que, dès sa mort,
le Bon Père fut l'objet d'une grande dévotion
qui, se transformant très vite en culte,
rendit rapidement l'église trop petite (1).
En 1760, la communauté de Mattaincourt
projette d'allonger la nef et de reconstruire
la tour et la sacristie. Ces travaux sont
achevés en 1763.
La Révolution interrompt les pèlerinages,
l'église devient Temple de l'Être suprême,
puis les paroissiens, refusant d'obéir à leur
curé, prêtre assermenté, ne fréquentent plus
l'église. Il faut attendre l'arrivée du curé
Hadol, en 1831, pour voir renaître le culte
du bienheureux Pierre Fourier.
Né en 1802 à Remiremont, Hadol prend pos-
session de la cure de Mattaincourt le 1er juil-
let 1831. Très vite, il renouvelle l'esprit de
sa communauté et relance le pèlerinage,
l'occasion lui en étant donnée, une année
après son arrivée, par le premier anniversaire
séculaire de la béatification de Pierre Fourier.
A partir de 1842, la rumeur de la canonisation
se répand et, à cette occasion, le curé Hadol
exprime son souhait de voir agrandir l'église (2).
Le 5 décembre 1843, le projet d'agrandissement
est rendu public : « L'affluence des pèlerins
est devenue si grande que M. l'abbé Hadol,
curé de Mattaincourt, a dû songer sérieuse-
ment à répondre, par l'agrandissement de
son église, au zèle pieux des fidèles qui ne
peuvent y trouver assez de place pour satisfaire
leur dévotion (3) ».
L'ancienne église, offrant 240 places, ne
pouvait en effet contenir une population de
1. Plan en croix latine (L. 30 m, 1. 10 m, h. 7,70 m) ;
nef à un seul vaisseau de deux travées, transept peu sail-
lant; chœur à deux travées plus étroites que celles de
la nef, terminé par une abside à trois pans; tour-clocher
hors-œuvre sur la façade occidentale; sacristie sur le pan
nord de l'abside. Église voûtée d'ogives, « gothique rayon-
nant avec voûtes très nervurées, piliers intérieurs très
minces, absence d'arcs-boutants, épais contreforts au
droit des retombées sur les murs extérieurs ». Archives
des Vosges, série O. Registre des délibérations du Conseil
municipal, séance du 30 juin 1845.
2. Espérance, Courrier de Nancy, 7 juillet 1844.
3. Espérance, Courrier de Nancy, 5 décembre 1843.
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