Titre : Dimanche illustré
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Marseille)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Lyon)
Date d'édition : 1923-09-16
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757502n
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 16 septembre 1923 16 septembre 1923
Description : 1923/09/16. 1923/09/16.
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG13 Collection numérique : BIPFPIG13
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9111967x
Source : La Cité internationale de la bande dessinée et de l'image
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 30/08/2020
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—
Tout à coup, je regardai mon ami. Il était renversé au fond de la nacelle, le corps ramassé, les doigts tordus, la tête à demi cachée sous une couverture. ]e l appelai : Pierre ! Pierre !... Pas de réponse...
A NEUF MILLE SEPT CENTS ME TRES
LES CONTES D ACTION
par MAURICE LEVEL
L E 1 er juin, à 9 heures du matin, notre
ballon sphérique, le Centaure, jau
geant 1.600 mètres cubes, bien gon
flé, vérifié avec soin, prêt à partir,
tirait doucement sur ses cordes.
Une brise d’est très légère faisait
à peine tressaillir les feuilles d’arbres ; le soleil,
lent à venir, crevait par instants les nuages
laiteux qui passaient dans le ciel. Une der
nière fois, nous fîmes le rapide inventaire
de ce que nous emportions. Rien ne man
quait : instruments, couvertures, provisions de
bouche ; nous n’avions rien oublié, même pas
la traditionnelle bouteille de champagne, que
nous devions sabler dans les airs en 1 honneur
de mon compagnon de voyage. Il allait, en
effet, accomplir avec moi sa première ascen
sion, et, bien qu’un peu nerveux, demeurait
gai, plein d’entrain, résolu. De temps en temps,
je le regardais du coin de l’œil, essayant de
lire sur son visage ses émotions fugitives. Lui,
souriant, me disait :
— Soyez sans crainte. Je me tiendrai très
bien, vous verrez.
Enfin, la demie sonna ; c’était l’heure fixée
pour le départ...
— Nous y sommes ? demanda mon ami.
•— Nous y sommes, répondis-je. Encore
une fois, sans forfanterie ni fausse honte, êtes-
vous bien décidé ?
— Mais oui, oui, fit-il avec une sorte d’irri
tation.
Je baissai la voix pour que nul n’entendît
mes paroles et qu’il ne pût se froisser de pas
ser devant les curieux pour un novice ou un
timide :
•— Vous n’ignorez pas que nous essaierons
d’atteindre les grandes hauteurs ? Ceci ne
sera pas une ascension-promenade, mais une
ascension d’expériences. J’agirai avec toute
la prudence nécessaire ; il se peut, cependant,
que vous vous sentiez incommodé à un moment
donné. Vous m’avez assuré que voéÈ aviez le
cœur parfaitement sain, les poumons solides ?
— Et je vous l’affirme encore.
— Tout est donc bien... Ah ! j oubliais,
vous n’avez dans vos poches ni allumettes, ni
briquet, regardez ?
— Rien.
'— Alors, en route !
Nous enjambâmes la nacelle. Mon ami
agita son chapeau en disant :
— Au revoir ! au revoir !
Moi, je commandai la manœuvre, et,
lorsque tout fut prêt, j’ordonnai :
— Lâchez tout !
Le ballon libre piqua droit dans le ciel ; un
instant nous pûmes entendre les cris, les excla
mations de la foule. Mon ami, penché sur la
nacelle, jetait encore des : Au revoir IA bientôt l
en faisant de grands gestes de bras. Les bruits
devinrent plus faibles, les cris indistincts, les
exclamations se firent murmures : nous mon
tions.
Une rumeur lointaine gronda sous mes
pieds, s’apaisa, se tut... Puis, plus rien que le
grand, l’admirable silence, et la fuite insen
sible vers un horizon infini, dans un ciel calme,
limpide et doux, parmi l’immensité fraîche
et parfumée où les oiseaux eux-mêmes n’osent
baigner leurs ailes... Je frappai sur l’épaule
de mon ami.
Il se tenait le long du bord, les yeux obsti
nément fixés sur cette terre que nous quittions,
pris à la magie du décor étrange qui semblait
s’être immobilisé devant lui.
— Eh bien ! qu’est-ce que vous dites de ça?
Il se tourna vers moi et, me regardant avec
des yeux éblouis, murmura :
— C’est prodigieux... extraordinaire... Je
vous devrai la sensation la plus forte de ma vie.
— Ce n’est encore qu’un début. Attendez,
patience.
— Oh ! je ne verrai rien de plus beau...
c’est impossible...
■— Mais si, mais si. Vous vous sentez bien
à votre aise ?
— Je n’ai jamais éprouvé à un pareil degré
la joie de vivre, ma vigueur musculaire et mon
équilibre physique... Je respire... je hume
l’air avec une joie de gourmand... je le mâche
comme un affamé, et je regarde, je regarde !...
£ —'.J
L ES villes n’étaient plus que des taches.Les
rues, les places, les parcs et les rivières
semblaient autant de lignes droites, de
surfaces géométriques. Une symétrie merveil
leuse régissait toutes choses ; nous naviguions
au-dessus d’une carte d’état-major vivante
et gigantesque. De temps en temps, dans le
ciel calme, bien loin sous la nacelle, nous
voyions passer une flèche rapide et brillante :
un oiseau dont le vol n’osait atteindre notre
fuite... Et nous allions toujours, et toujours,
cependant, nous pouvions nous croire
immobiles dans l’atmosphère immobile, cette
atmosphère des grandes hauteurs où les
courants aériens ne passent plus et que le
vent n’agite jamais.
Mon ami, maintenant, s’intéressait à la
marche du ballon. Il me dit :
■— Montons-nous en ce moment ?
— Oui. Regardez flotter, verticales, les
flammes accrochées au filet ; nous montons.
— A quelle hauteur sommes-nous ?
Je consultai le baromètre et répondis :
— Deux mille huit cents mètres.
Il répéta ma phrase à mi-voix, comme se
parlant à lui-même, et ajouta avec une petite
angoisse et aussi quelque fierté :
— Deux mille huit cents mètres ! Quelle
chute si notre ballon venait à tomber.
— C’est peu probable, fis-je, à moins d’un
éclatement, mais il est rare que le fait se pro
duise. Nous pouvons être bien tranquilles.
Nous sommes chez nous...
— Oui, reprit-il avec un sourire nerveux...
A moins d’un éclatement !... Avez-vous songé
à ce que serait l’éclatement de la bulle d’air
à laquelle nous sommes accrochés ?...
— Peuh ! Ce serait si vite fait... Auriez-vous
peur ?...
— Moi ? Vous voulez rire ! Montons !
Montons encore...
— Nous montons.
— Mais vous ne jetez pas de lest et je
croyais ?...
— C’est inutile. Nous sommes dans une
couche chaude. Notre gaz se dilate automati
quement. Notre ballon, de plus en plus tendu,
s’allège à toute seconde proportionnellement
à son volume. Nous sommes aspirés... Nous
montons...
De nouveau, mon ami resta silencieux. Le
soleil très haut sur l’horizon parut s’arrêter
au-dessus de nos têtes. L’or de midi nous
enveloppait, et notre ballon, formidable, fuyait,
fuyait toujours plus haut. Puis le soleil reprit
sa course, plongea dans les nuages, se voila
de brumes, disparut. Le ciel, gris maintenant,
semblait un ciel nouveau, plus triste peut-
être, mais plus mystérieux et plus doux
à la fois. Un océan ouaté, aux vagues
molles et silencieuses, déferlait entre la terre
et nous. Une sensation d’oubli, de calme,
de solitude nous envahit : autour de nous,
sur nous, à nos pieds, le ciel sans fin...
Mon ami me demanda :
— Où sommes-nous ?...
— Dans la mer des Nuages.
— Ah ! le beau mot I La belle chose !...
Quelle heure est-il ?...
— Trois heures.
■— Nous montons ?
— Nous montons. Nous sommes à quatre
mille mètres environ. Vous ne sentez toujours
ni pesanteur de tête, ni vertiges ? Vos oreilles
ne tintent pas ?...
— Non, non...
— Montons encore !
Et je jetai deux pelletées de sable. Cette
fuite vers les étoiles nous grisait. L’air s’étant
rafraîchi, notre gaz se condensait assez vite,
et pour monter nous jetâmes du sable presque
sans arrêt. Le ciel bientôt s’éclaira de nouveau,
le ballon réchauffé se dilata et s’éleva de lui-
même.
* * *
M on ami, les yeux fixés sur les flammes,
murmurait avec ivresse :
— Nous montons, nous montons !
Par l’appendice de notre ballon, le gaz fuyait
en sifflant doucement. Je consultai le baro
mètre :
— Combien ? fit mon ami.
— Quatre mille neuf cents environ... Avez-
vous soif ? Un peu de champagne ? .
Il hocha négativement la tête.
— Non, pas de champagne, un peu d’eau...
j’ai très soif.
Il but un grand verre et fit : Ah ! c’est bon I
Ses yeux brillaient, ses pommettes et ses
lèvres étaient très rouges. Il me sembla conges
tionné, et je sentais que je l’étais moi-même.
Mais moi, j’avais l’habitude, et puis, n’est-ce
pas, je ne devais compte de ma peau
à personne, tandis que lui... j’en étais res
ponsable.
Voyez-vous, plus j’y songe, plus je demeure
convaincu qu’on ne devrait jamais prendre
un passager avec soi pour de pareils voyages...
Sait-on les dangers qu il court, et ceux qu’il
peut vous faire courir ?... A mon tour, je bus
coup sur coup trois ou quatre gorgées d’eau
et lui dis :
— Comment vous sentez-vous ?
— Mais bien, bien, fit-il très nerveux ; mon
tons, montons encore...
Sa voix — fût-ce une illusion — me parut
venir de très loin et résonner très fort, comme
les voix qu on entend sur terre par temps
de neige.
Assis au fond de la nacelle, nous demeu
rions silencieux, un peu las, mais fouettés
par un désir de victoire, par une irritation
pareille à celle que peut éprouver un cavalier
fuyant en avant, vers le but à chaque foulée
plus prochain, sans oser regarder derrière
—
Tout à coup, je regardai mon ami. Il était renversé au fond de la nacelle, le corps ramassé, les doigts tordus, la tête à demi cachée sous une couverture. ]e l appelai : Pierre ! Pierre !... Pas de réponse...
A NEUF MILLE SEPT CENTS ME TRES
LES CONTES D ACTION
par MAURICE LEVEL
L E 1 er juin, à 9 heures du matin, notre
ballon sphérique, le Centaure, jau
geant 1.600 mètres cubes, bien gon
flé, vérifié avec soin, prêt à partir,
tirait doucement sur ses cordes.
Une brise d’est très légère faisait
à peine tressaillir les feuilles d’arbres ; le soleil,
lent à venir, crevait par instants les nuages
laiteux qui passaient dans le ciel. Une der
nière fois, nous fîmes le rapide inventaire
de ce que nous emportions. Rien ne man
quait : instruments, couvertures, provisions de
bouche ; nous n’avions rien oublié, même pas
la traditionnelle bouteille de champagne, que
nous devions sabler dans les airs en 1 honneur
de mon compagnon de voyage. Il allait, en
effet, accomplir avec moi sa première ascen
sion, et, bien qu’un peu nerveux, demeurait
gai, plein d’entrain, résolu. De temps en temps,
je le regardais du coin de l’œil, essayant de
lire sur son visage ses émotions fugitives. Lui,
souriant, me disait :
— Soyez sans crainte. Je me tiendrai très
bien, vous verrez.
Enfin, la demie sonna ; c’était l’heure fixée
pour le départ...
— Nous y sommes ? demanda mon ami.
•— Nous y sommes, répondis-je. Encore
une fois, sans forfanterie ni fausse honte, êtes-
vous bien décidé ?
— Mais oui, oui, fit-il avec une sorte d’irri
tation.
Je baissai la voix pour que nul n’entendît
mes paroles et qu’il ne pût se froisser de pas
ser devant les curieux pour un novice ou un
timide :
•— Vous n’ignorez pas que nous essaierons
d’atteindre les grandes hauteurs ? Ceci ne
sera pas une ascension-promenade, mais une
ascension d’expériences. J’agirai avec toute
la prudence nécessaire ; il se peut, cependant,
que vous vous sentiez incommodé à un moment
donné. Vous m’avez assuré que voéÈ aviez le
cœur parfaitement sain, les poumons solides ?
— Et je vous l’affirme encore.
— Tout est donc bien... Ah ! j oubliais,
vous n’avez dans vos poches ni allumettes, ni
briquet, regardez ?
— Rien.
'— Alors, en route !
Nous enjambâmes la nacelle. Mon ami
agita son chapeau en disant :
— Au revoir ! au revoir !
Moi, je commandai la manœuvre, et,
lorsque tout fut prêt, j’ordonnai :
— Lâchez tout !
Le ballon libre piqua droit dans le ciel ; un
instant nous pûmes entendre les cris, les excla
mations de la foule. Mon ami, penché sur la
nacelle, jetait encore des : Au revoir IA bientôt l
en faisant de grands gestes de bras. Les bruits
devinrent plus faibles, les cris indistincts, les
exclamations se firent murmures : nous mon
tions.
Une rumeur lointaine gronda sous mes
pieds, s’apaisa, se tut... Puis, plus rien que le
grand, l’admirable silence, et la fuite insen
sible vers un horizon infini, dans un ciel calme,
limpide et doux, parmi l’immensité fraîche
et parfumée où les oiseaux eux-mêmes n’osent
baigner leurs ailes... Je frappai sur l’épaule
de mon ami.
Il se tenait le long du bord, les yeux obsti
nément fixés sur cette terre que nous quittions,
pris à la magie du décor étrange qui semblait
s’être immobilisé devant lui.
— Eh bien ! qu’est-ce que vous dites de ça?
Il se tourna vers moi et, me regardant avec
des yeux éblouis, murmura :
— C’est prodigieux... extraordinaire... Je
vous devrai la sensation la plus forte de ma vie.
— Ce n’est encore qu’un début. Attendez,
patience.
— Oh ! je ne verrai rien de plus beau...
c’est impossible...
■— Mais si, mais si. Vous vous sentez bien
à votre aise ?
— Je n’ai jamais éprouvé à un pareil degré
la joie de vivre, ma vigueur musculaire et mon
équilibre physique... Je respire... je hume
l’air avec une joie de gourmand... je le mâche
comme un affamé, et je regarde, je regarde !...
£ —'.J
L ES villes n’étaient plus que des taches.Les
rues, les places, les parcs et les rivières
semblaient autant de lignes droites, de
surfaces géométriques. Une symétrie merveil
leuse régissait toutes choses ; nous naviguions
au-dessus d’une carte d’état-major vivante
et gigantesque. De temps en temps, dans le
ciel calme, bien loin sous la nacelle, nous
voyions passer une flèche rapide et brillante :
un oiseau dont le vol n’osait atteindre notre
fuite... Et nous allions toujours, et toujours,
cependant, nous pouvions nous croire
immobiles dans l’atmosphère immobile, cette
atmosphère des grandes hauteurs où les
courants aériens ne passent plus et que le
vent n’agite jamais.
Mon ami, maintenant, s’intéressait à la
marche du ballon. Il me dit :
■— Montons-nous en ce moment ?
— Oui. Regardez flotter, verticales, les
flammes accrochées au filet ; nous montons.
— A quelle hauteur sommes-nous ?
Je consultai le baromètre et répondis :
— Deux mille huit cents mètres.
Il répéta ma phrase à mi-voix, comme se
parlant à lui-même, et ajouta avec une petite
angoisse et aussi quelque fierté :
— Deux mille huit cents mètres ! Quelle
chute si notre ballon venait à tomber.
— C’est peu probable, fis-je, à moins d’un
éclatement, mais il est rare que le fait se pro
duise. Nous pouvons être bien tranquilles.
Nous sommes chez nous...
— Oui, reprit-il avec un sourire nerveux...
A moins d’un éclatement !... Avez-vous songé
à ce que serait l’éclatement de la bulle d’air
à laquelle nous sommes accrochés ?...
— Peuh ! Ce serait si vite fait... Auriez-vous
peur ?...
— Moi ? Vous voulez rire ! Montons !
Montons encore...
— Nous montons.
— Mais vous ne jetez pas de lest et je
croyais ?...
— C’est inutile. Nous sommes dans une
couche chaude. Notre gaz se dilate automati
quement. Notre ballon, de plus en plus tendu,
s’allège à toute seconde proportionnellement
à son volume. Nous sommes aspirés... Nous
montons...
De nouveau, mon ami resta silencieux. Le
soleil très haut sur l’horizon parut s’arrêter
au-dessus de nos têtes. L’or de midi nous
enveloppait, et notre ballon, formidable, fuyait,
fuyait toujours plus haut. Puis le soleil reprit
sa course, plongea dans les nuages, se voila
de brumes, disparut. Le ciel, gris maintenant,
semblait un ciel nouveau, plus triste peut-
être, mais plus mystérieux et plus doux
à la fois. Un océan ouaté, aux vagues
molles et silencieuses, déferlait entre la terre
et nous. Une sensation d’oubli, de calme,
de solitude nous envahit : autour de nous,
sur nous, à nos pieds, le ciel sans fin...
Mon ami me demanda :
— Où sommes-nous ?...
— Dans la mer des Nuages.
— Ah ! le beau mot I La belle chose !...
Quelle heure est-il ?...
— Trois heures.
■— Nous montons ?
— Nous montons. Nous sommes à quatre
mille mètres environ. Vous ne sentez toujours
ni pesanteur de tête, ni vertiges ? Vos oreilles
ne tintent pas ?...
— Non, non...
— Montons encore !
Et je jetai deux pelletées de sable. Cette
fuite vers les étoiles nous grisait. L’air s’étant
rafraîchi, notre gaz se condensait assez vite,
et pour monter nous jetâmes du sable presque
sans arrêt. Le ciel bientôt s’éclaira de nouveau,
le ballon réchauffé se dilata et s’éleva de lui-
même.
* * *
M on ami, les yeux fixés sur les flammes,
murmurait avec ivresse :
— Nous montons, nous montons !
Par l’appendice de notre ballon, le gaz fuyait
en sifflant doucement. Je consultai le baro
mètre :
— Combien ? fit mon ami.
— Quatre mille neuf cents environ... Avez-
vous soif ? Un peu de champagne ? .
Il hocha négativement la tête.
— Non, pas de champagne, un peu d’eau...
j’ai très soif.
Il but un grand verre et fit : Ah ! c’est bon I
Ses yeux brillaient, ses pommettes et ses
lèvres étaient très rouges. Il me sembla conges
tionné, et je sentais que je l’étais moi-même.
Mais moi, j’avais l’habitude, et puis, n’est-ce
pas, je ne devais compte de ma peau
à personne, tandis que lui... j’en étais res
ponsable.
Voyez-vous, plus j’y songe, plus je demeure
convaincu qu’on ne devrait jamais prendre
un passager avec soi pour de pareils voyages...
Sait-on les dangers qu il court, et ceux qu’il
peut vous faire courir ?... A mon tour, je bus
coup sur coup trois ou quatre gorgées d’eau
et lui dis :
— Comment vous sentez-vous ?
— Mais bien, bien, fit-il très nerveux ; mon
tons, montons encore...
Sa voix — fût-ce une illusion — me parut
venir de très loin et résonner très fort, comme
les voix qu on entend sur terre par temps
de neige.
Assis au fond de la nacelle, nous demeu
rions silencieux, un peu las, mais fouettés
par un désir de victoire, par une irritation
pareille à celle que peut éprouver un cavalier
fuyant en avant, vers le but à chaque foulée
plus prochain, sans oser regarder derrière
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