Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1941-07-26
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 26 juillet 1941 26 juillet 1941
Description : 1941/07/26 (N6). 1941/07/26 (N6).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7653525q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/06/2015
e
C O M CE - - D I A
DU COTE
r
.D E S A R I S(
Deux grands visuels
Ed, cil de GONCOURT
: >, par Pierre du COLOMBIER
Il
l semble que certains êtres aient reçu
le privilège de se trouver juste au
centre de leur temps. Il suffit de
.piquer 'sur. leur nom la pointe d'un
..cbmpas,' puis de décrire des cercles de
plus en plus vastes : on embrasse tout.
En * cç .qui concerne le Second Empire, il
en est 'ainsi des deux frères confondus :
• Edmond et Jules de Gôncourt. Initiateurs
où témoins, ils ont une importance .égale
pour l'histoire des lettres et celle des arts
: plastiques, plus encore même pour celle
des changements du goût. Jusqu'ici ils n'a-
vaient guère été étudiés que par des teri-
vafns, et" -pout leur œuvre littéraire. I)
extste. à* vrai dire, un épais bouquin —
c'est une-thèse de doctorat publiée en
1920 — t^sous le titre : L'esthétique des
Goncourt. Affriolés, bien des curieux se
sont jetés sur ce livre: Rares sont ceux
qui ne l'ont point laissé retomber. avec
découragement. L'auteur y étudie fort
doctement le système esthétique dès deux
frères,' de: ces nerveux, de ces écorchss,
dont, le signe distinctif est d'avoir une
têtré fort peu.' philosophique. Professeur
Que l'on est dépourvu d'esthét'que, m'ob-
jectera-t-on, c'est-en avoir une encore.
N'empêche que c'est une mauvaise mé-
thode pour aborder les gens de cet aca-
bit, que d'en traiter ex cathedra: Il faut
vivre avec eux participer à leurs crises,
à leurs plaisirs, à leurs découragements.
Et la souplesse ne suffit pas encore,
leur exégète doit encore connaître.. par
expérience, ce qui ne s'apprend point dans
les livrés : la volupté d'une ligne, celle
d'une couleur. Or, c'est le mérite tout spé-
cial du .volume que vient de leur consa-
crer François Fosca, lequel, comme cha-
cun sait, est peintre en même temps qu'é-
crivain (1).;.
Pour la majorité des gens, les organes
des sens ne Jouent qu'un rôle d'informa-
teurs. Mais chez - certains 'individus ces
organes des sens, et dans ce casla vue,
éprouvent des voluptés très vives et qui
déviennent très raffinées ». Quand on a
dit que les Goncourt sont d'abord des
« sensuels-visuels ». on tient une de leurs
clefs.
L'un'et l'autre pratiquaient l'aquarelle.
Jules fut-un excellent aquafortiste, dont
l'œuVre- ne comprend pas moins de qua-
tre-vingt-six pièces. Et les tentatives- d'Ed-
mond dar.3 le même genre témoignent
surtout de. sa. bonne volonté, il était aussi
biberotetÛ" que 'son frère, éprouvait le
même plaisir à manier une garde de sabre
japonais, à se. pencher pendant des heu-
res sur un dessin ou une gravure.
Mais surtout leur technique d'écrivains;
ce fameux" style artiste, ce style Goncourt
qui, après avoir fait leur renom, nous est
devenu insupportable, on ne lui rend véri-
tablement justice que quand on a lu leurs
analyses des gravures ou des dessins du
dix-huitième. Il n'est aucun critique d'art
qui ne se soit cassé la tête sur ce pro-
blème désespérant : transposer dans le
langage la sensation que fait éprouver la
fine arabesque d'un trait, la trace hum'de
d'un pinceau d'aquarelle, la touche d'une
broisse sur la toile. Or, ce problème, les
Goncourt l'ont- résolu, et Plus d'une fois.
Et quand ils commentant un dessin de
Boucher, qu'ils ont devant les yeux — on
en est sûr — à l'instant même où ils
écrivent, ils arrivent à donner'à un degré
presque hallucinant l'illusion de « pré-
sence ».
D
ANS l'histoire des arts plastiques de
leur temps, leur nom s'attache r
trois grands thèmes : l'avènement
du réalisme, la découverte ae la ja-
ponerie, la résurrection du dix-huitième:
Le réalisme, ils en ont surtout. donné la
théorie dans Manette Salomon. Mais la
théorie seulement. -Avec ce mélange de
prescience intuitive et de timidité qui les
distingué, ils n'ont à peu près rien com-
pris à ce qui semblait la vérification
même de leurs thèses : ils ont a peu près
• ignoré Manet, et leur critique d'art, sou-
vent décevante, préfère Gavarni à Dau
roier; Decamps à Delacroix. Dans leur
goût. il y a quelque chose d'étriqué. Ce-
pendant il n'est que juste, comme fait
François Fosca", de rapprocher d'eux les
critiques de leur temps. S'il leur a man-
oué la divination d'un Baudelaire et d'ur.
Théophile Silvestre, leur expérience tech-
*ni
ment l'œuvre d'art les ont protégés de ces
développements discursifs, de ce faux bril-
lant de cette inanité sonore dont trop
d'écrivains ont donné le redoutable exem-
ple lorsqu'ils se sont aventurés à parler
tableaux.
Ils étaient à peu près persuadés d'avoir
découvert le Japon. Historien incorrup-
tible, Fosca démontre qu'il faut rabattre
.de leurs prétentions à cet égard. En vérité,
quand ils y vinrent, les estampes japo-
naises avaient attiré depuis plusieurs an-
nées l'attention d'un petit milieu d'ar-
tistes. Tout au plus contribuèrent-ils lar-
gement à les populariser.
Au fond, ce qu'ils ont le plus aimé, c'est
leuT cher dix-huitième. Cet amour expli-
que d'ailleurs les limites de leur' goût.
Mais là, entre des bornes assez rappro-
EDMOND ET JULES DE CONCOURT
Collection Prbuté.
(Lithographie de Gavarni).
chées, ils sont incomparables. Le livre
qu'ils ont-consacré à leur siècle de prédi-
lection, reste, malgré les progrès de l'éru-
dition, encore inégalé. Surtout ils ont
formé ce chef-d'œuvre vivant et exem-
plaire — malheureusement passager —
qu'a été leur collection. Quand, en 1935
nous en avons vu les bribes rassemblées,
nous avons conçu ce qu'avait pu être la
vente triomphale de 1897 qui marque une
date dans l'histoire da la curiosité. Nous
nous sommes émerveillés que des particu-
liers, dont les moyens étaient, en somme,
modestes, aient pu réunir tant de pièces
dont beaucoup étaient de premier ordre,
aucune n'était indifférente. Ce fut là une
des réussites les plus complètes dans
l'existence de ces deux. hommes, qui, en
-dépit de leur réputation considérable
ont connu plus de demi-succès que de
succès, ce dont ils ont souffert non pas
seulement, comme on le croit trop, par
vanité blessée, mais parce qu'ils avaient
le sens d'avoir beaucoup apporté à leur
énooueh
(1) Editions Albin Michel.
1
fêlégances 1941
BAS ET JAMBES
]
'IMAGINE que lorsque nos
arrière-petits,-neveux iront
admirer, en des Carnava-
let de l'avenir, les expo-
sitions > rétrospectives du cosiu-
ine, ils trouveront dans les vi-
trines- matière à se réjouir.
, — Qui sait, remarqua mon
amie Gisèle, à qui je faisais
part de mes réflexions ; nos ar-
rière - petits - neveux it 1 auront
peut-être pas autant de raisons
que tu le penses de se moquer
de nôtre évoque. Peut-être mê-
me auront, ils' de bonnes raisons
de la regretter, exactement com-
me nous pouvons regretter l'é-
poque de la robe à vertugadin
ou l'époque de la chaussure à la
poulaine.
— Nos arrière-petits-neveux re-
gretteront peut-être notre épo-
que, répliquai-je, mais rien ne
les empêchera de s'esbaudir de-
vant nos modèles, alors suran-
nés, de robes, de chapeaux et
..e chaussures:., exactement com-
me nous nous esbaiïdissons de-
vant les robes à panier», les co
thurnes et les cabriolets de nos
arrière-gra ii d'tantes
— Ce qui étonnera peut-être
nos arrière petites-nièces, dit Gi-
sèle, après avoir rêvé un ins-
tant, cb sera de voir, exposés en
bonne place dans les vitrines de
l'exposition dont tu me parles,
les flacons des teintures, qui,
actuellement, tiennent lieu de,
bas à nos élégantes, le bas syn-
thétique dans toute sa splen-
.deur. *
— Je n'aime pas beauCoup ces
teintures, dis-je, mais j'avoue
que j'aime mieux voir des jam
bes brunies au 200 fin d Elisa-
beth Ar-den, que des jambes nues
et livides.
- Moi, dit Gisèle, avec sa vé-
hémence habituelle, o'estbien
simple : je ne peux pas voir des
jambes nues à Paris gans en
éprouver un malaise. Je trouve
qu'il y a quelque chose d'indé
cent dans cette exhibition de
mollets plus ou moins nets dans
leur blancheur maladive. Leur
vue m'inspire la même gêne que
celle des baigneurs tout blancs
qui se mèlaient, au temps des
vacances, aux baigneurs bronzés
des plages. Tu sais, ajouta-t-elle,
qu'il existe des teintures très
bien, qui imitent le bas chair à
s'y méprendre.
— Oui, je sais, mais quel tra-
vail de s'enduire ainsi chaque
jour les mollets de matière co
lorante ! Et puis, malgré tout,
l'imitation n'est jamais parfai-
tè-:.. Il Y manque la couture, le
talon.
- Tu es mal informée, protesta
mon amie. Tiens, en ce moment,
il y a un coiffeur chez qui tu
peux te faire teindre les jam-
bes.
— Un coiffeur ?
- Parfaitement, un coiffeur
Pendant que l'artiste capillaire
s'occupe de ta permanente et
que la manucure te polit les on-
gles un spécialiste te badigeon-
ne les tibias avec art et délica-
tesse. C'est du beau travail. A
l'aide d'un pinceau très fin, ce
spécialiste te fait au dos des
mollets une imitation parfaite
de la couture du bas et, au ta
Ion, une imitation non moins
parfaite du « renforcé »..
- Nous er viendrons' peut-être
bientôt, dis-je en riant, au ta-
touage de la couture, des ba
guettes et même des mailles.
— Nous n'en somme" pas en-
core là ! *
— Tout cela est très joli par
, beau temps, dis-je; pour essayer
de calmer,un peu l'enthousias-
me de Gisèle, mais quand il
pleut, cette teinture doit dé
teindre et couler en traînées la-
mentables le long des jambes ?
-Pas du tout, répliqua Gi-
,sèle : cette teinture résiste à
l'eau.
— Ah ! mais, alors, le soir,
pour se laver les jambes ?
— Heu !.. répondit-elle en hé-
sitant, je ne sais pas. Il faudra
que je me renseigne.
VACANCES 1941
- Quel genre -de robes ein,
porteras-tu en vacances nie
demanda Gisèle.
— Tu ferais mieux de me de-
mander d'abord si j'irai en va-
cances. lui répondis - je -iu
riant.
— Moi. me dit Gisèle, j'avais
rêvé d'aller passer un mois à
Deauville, mais il paraît que
c'est impossible. J'irai donc me
reposer quelques semaines en
Touraine.
- Tu dis cela comme si on
t'arrachait le coeur Tu n'ai-
mes pas la Touraine ?
:.- Je l'adore, mais j'adore
aussi la mer. et puis, à la
mer. on peut s'habiller,
— Tu veux dire Qu'on peut
se déshabiller.
— Je sms d'autant plus l'a,
vrée, poiir%iivit Gisèle, dédai-
gnant mon ironie, Que je m'é-
tais fait faire quelques robes,
imprimées charmantes, un ou
deux paréos et surtout un
étonnant maillot de bain en
satin lastex orné de fleurs rou-
ges et blanches. Il faudra que
je te montre ça.
— Mais tout cela n'est pas
perdu, lui dis-je. Si tu veux
rester ici quelques jours avec
moi, et pour peu Clue le beau
temps persiste, je te ferai trou-
ver plus d'une occasion' dé
mettre tes robes légères et d'ex-
hiber ton étonnant maillot en
lastex.
— On ne peut tout de même
pas, protesta-t-elle, se prome-
ner en maillot de bain' ou en
paréo aux Champs-Elysées !
— Non, bien sûr ! mais tu
peux, aux Champs-Elysées, le
promener vêtue de petites ro-
bes légères,. coiffée d'ulf de ces
gracieux paillassons de papier
dont tu disais tant de bien
l'autre jour, et chaussée de
sandales à semelles de bois —
Tu ne serais pas seule. Cer-
taines terrasses des Champs-
Elysées valent bien le bar du
Soleil. On y rencontre les mê-
mes gens, d'ailleurs. Quant a
.toit maillot de bain, tu peux
l'utiliser à la piscine clu Ra-
cing ou chez Deligny. Les élé-
gantes n'y manquent pas — j'y
ai vu l'autre jour, de jeunet
et très jolies femmes qui se
prélassaient au soleil dans des
maillots aussi étonnants que le
tien. J'en ai remarqué plu-
sieurs. Le satin lastex est très
en vogue, cette année — noir a
fleurs rouges, comme le tien,
ou à fleurs vertes et blanches,
ou bien ivoire à fleurs brique-
ou jaunes entremêlées de feuil-
les vertes. Ou bien, encore, et
toujours en lastex, des maillots
à larges rayures bleues et ro-
ses, bleues et jaunes, bleues et
rôties. Tout cela du nlus ura-
cieux effet.
Après le bain (car rien ne
t'empêche de te baigner), tri
peux remplacer ton maillot par
un short et une petite blouse.
J'ai vu des ensembles fort
seyants de shorts en toile de
lin verte et bleue dont les bre-
telles coupent agréablement la
soie de blouses à carreaux mul-
ticolores.
— Je n'aime pas les shorts,
aéclara Gisèle.
- Pourquoi ne mettrais-tu
pas, alors, une petite robe de
plage ? Il en est d'adorables en
toile de lin imprimée blanc sur
bleu, rouge sur vert, ou en toute
autre teinte.
'Æ- Je crois que maigre tout
j'irai en Touraine. J'y retrou.
ver éti des amis et nous organi-
serons des jeux de plein air. Je
préfère encore la vraie campa-
qne à la fausse plaie.
- Je vois ça d'ici, dis-je en
souriant. Vous jouerez au cro-
quet, aux boulet, au ballon,
etc., etc.
— Ce sont des jeux qui don-
nent du mouvement et qui ou-
vrent l'appétit. ,
— C'est bien ce que je leur
reproche. Mais tu pourras alors
utiliser tes robes légères.
— J'ai justement dans ma
malle une robe de Paquin qui
est une petite merveille. En
loile imprimée bleu marine sur
fond blanc, elle se boutonne de-
vant du haut en bas, ce qui
permet les mouvements les pt-.ix
violents. On met là-dessous une
petite culotte de jersey et on
peut se livrer sans indiscrétion
à tous les jeux de plein air. Il
faudra aussi que je te montre
une robe sans manches que m'a
faite Véra-Boréa. en toile de
lin blanche avec, sur la jupe,
de larges bandes verticales bleu
marine. Pour le croquet, le
tennis, et même les boules que
tu as l'air de plaisanter, c'eut
une robe parfaite.
— Je ne te demande pas s'il
y a une rivière, dans ce coin
où tu projettes d'aller. Il y en
a de si charmantes dans ta
ioulce Touraine.
— .Oui, mais l'eau y est trop
froide pour moi. Nous ferons du
canotage.
- Pour le canotage, j'espère
que tu as pris tes précautions.
— J'emporte uii costume de
chez Lanvin, en toile brique.
Large pantalc : et veste à gros
boutons s'ouvrant sur une blou
se imprimée. J'aurais aimé em-
porter également un ensemble
délicieux de Raphaël. pantalon
blanc, veste rouge et blouse
écossaise, mais n'est-ce pas, on
ne peut pas tout avoir. Il faut
se contenter de ce qu'on a.
— Bien sûr !. Et il faut en
laisser un peu pour les autres.
Lucienne MASSET.
MONTHERLANT
--.- -
>
et le corps humain-
par Pierre de MASSOT
Ceux qui, comme moi, considèrent que dans
l'œuvre si vaste déjà et si prodigieusement di-
perse de Montherlant, les Olympiques tiennent
une place de premier ordre, ceux-là prendront
à .a lecture de Paysage des Olympiques (1) un
plaisir tout singulier. Double plaisir, puisqu'aussi
bien le texte et les illustrations s'harmonisent à
miracle..
C'est de ces dernières que nous parlerons tout
d'abord. Elles sont dues à un photographe dont
nous ignorons s'il est amateur ou professionnel,
M. Karel Egermeier, mais duquel nous sommes
certain qu'il avait compris exactement le but et
le désir de Montherlant. Ses reproductions sont,
à tous égards, admirables. Il a eu ce bon goût
de nous présenter des athlètes, tant féminins
que masculins, plutôt dans leurs heures d'alan.
guissement et de loisir sur les terrains de jeux
qu'en pleine action. Et cependant, à chacun
d'entre eûx, comment n'appliquer point la défi-
nition, de Plotin : « Le beau est la splendeur du
vrai » ? Tous sont beaux : hommes, jeunes fem-
mes, adolescents, parce que tous authentiques.
Et, plus précisément, on loue M. Egermeier dt
ne nous avoir pas trompés, même dans quelqnti
détails quf apparaîtront bien vulgaires pour
d'aucuns : nous ravissent ces gros plans où l'ap-
pareil a fixé un pied nu d'adolescent, tel genou
rond de jeune fille dans des veloutés d'ombre et
de lumière où les défauts mêmes sont fonction
de cette beauté pour le culte de laquelle il ne
serait pas vain de vivre, mais profitable et bon.
Les planches 8. 9,- 21, 37, 43, 49, 64, 72, 73
constituent d'extraordinaires réussites.
Nous qui aimons les beaux corps, comment ne
saurions-nous pas gré à Henry de Montherlart
d'avoir dans ce magnifique album entrepris la
glorification du corps humain ? Il y fallait cette j
gentille hardiesse dont il est coutumier, car o'
Foire de Leipzig
AUTOMNE 1941
DU 31 AOUT AU 4 SEPTEMBRE
Lt' lU'ichsniesscaint. soucieux d'éviter .tuut(,
déception aux acheteurs, attire leur attention
sur le fait qu'ils ne doivent pas trop espérer nue
les mareUandises iloht la livrai_ son inteiesse un
K'and no'.Mbre d'entre eux puissent être ('trcdi-
veinent livrées. t'ar suite de la tache è('rasante
nui incuiAbe à l'éeononiie a/lcmumlc, 1'Jlcma¡{ne
n'est pas en mesure de donner satistaet 1011 a
toutes les demandes d'achat : celles-ci sont d'ail-
leurs considérâmes. L'exécution de œs coni-
mandes demanderait des années.
Si néanmoins, le Heichsniesseanit fournit aliX
visiteurs étrangers l'occasion de se rendre à la
Foire c'est uu'il oense que, dans un mutuel
désir de collahoVaïion plus étroite et atin de
y réparer pour l'avenir un terrain tavoraHe à des
échanses commerciaux, une prise de contact Iné-
senter-xit de précieux avantages.
Il ties,, hien entendu, yas impossible une cer-
tains marrhéj puissent être conclus, mats il est
très difficile de dire quelles marchandises sont
susceptibles cl être livrées.
Par contre it~ra intéressant pour le t,isitetir
français de voir les modèles nouveaux une 1 ex-
posant allemand a réalisé;, en vue de satisfaire
les besoins qui surgiront lors du retour au temps
de paix - en même temps, il pourra, a la Foire,
se documenter de façon générale sur le develop.
pement à attendre dans le domaine pratique et
écoiloilli(itie.
Ajoutons encore que le train spécial qui sera
mis en route pour Leipzig aura 1 horaire ei-
ï>eé»)artS Varis-Est. le >9 août 21 h. 40 j
Arrivée Leipzig, le 30 août. 1«> '»• ■-* ;
Retour Leipzig, le 4 septembre 1.» I •> ;
arrivée Paris-Est, le 5 septembie - "•
M FOIRE DE LEIPZIG;
7 X AUTOMNE 1941
DU 31 AOUT AU 4 SEPTEMBRE *|
Train spécial au départ de Paris
60 de réduction en Allemagne 1
Prière de s'inscrire sans perdre de temps
2, rue Meverbeer. Paris (9 )
Tél. PRO. 34-06 i
est vite à notre époque accusé de paganisme et,
mieux encore, d'immoralisme.
Ce qui caractérise l'art de Montherlant, c'['st
qu'il mêle, avec le plus rare bonheur et le plus
exquis, tous les pègres : la tendresse qui fend le
cœur, la grâce, l'ironie narquoise, la gouaille ar-
gotique et faubourienne, le pamphlet et le su-
blime, le tout traversé comme d'éclairs de fulgu-
rantes ellipses. C'est ainsi que nous trouvons Ba
conclusion d'une beauté sans égale. Que nos lec-
teurs en jugent :
« Les empires passeront ; bientôt l'indifféren-
ce de l'avenir aura résolu sans effort ce qu'il,,
appelaient leurs grands problèmes, tiré le calme
de leurs tumultes, et l'unité de leurs dissensions
ridicules. Mais le corps humain dans sa fleur,
au milieu de la nature, et ses représentations, et
ce qui est pensé sur lui, cela sera encore actuel
dans dix mille ans. On recueille d'Aristophane
qu'alors même que les marchés d'Athènes étaient
entièrement couverts de neige, on continuait d'y
vendre des fruits nouveaux et des violettes.
Qu'on ne nous embête donc pas avec le déses-
poir. Quels que soient les bouleversements et les
ruines, il. y aura toujours des enfants parmi
nous. »
Pour de telles phrases, et, comme dit Bossue t,
« tout enchantées de l'amour du monde », mê-
me si l'on avait de graves raisons de lui en vou-
loir, ce qui, juste enfer ! n'est pas notre cas,
pour des phrases si belles et qui vont si avant
dans la connaissance des cœurs, il sera toujours
pardonné à Montherlant. Car, s'il a parfois vio-
lemment détesté, il a toujours beaucoup aimé.
(1) Bernard Grasset-, éditeur.
A l'Hôtel « des Ventes;,
1 > l
MAITRE ADER
Les lèvres minces, un regard autoritaire et
pénétrant dans une figure extrêmement sympa-
thique, des gestes onctueux mais fermes, tel est
M; Ader. Pendant des heures ce jeune homme
peut sans arrêt tenir en haleine son auditoire;
ses yeux, inlassablement, vont chercher l'en-
chère au fond de la salle, reviennent à la table
pour retourner dans une direction opposée et,
son marteau manié d"une façon élégante connaît
automatiquement, semble-t-il, le moment où il
doit décrire ce demi-cercle qui englobe en un
geste toute la salle avant de tomber sur le bu-
reau. Il est, malgré son manque de cheveux
blancs, dans la grande tradition. N'est-il Das
le successeur de Me Lair-DUbreuil ?
Lorsque au début de cet hiver, Me Ader, dès
son retour de captivité reprit pour la première
fois ses fonctions, une petite émotion empoigna
la foule, et. aux souhaits de bienvenue des col-
lectionneurs présents,, il répondit, tout, en gra-
vissant les marches de l'estrade, par un sourire
un peu figé, désirant cacher son trouble. Il se
retrouvait enfin -au milieu de l'arène. La scène
fut touchante, mais dès la présentation du pre-
mier objet, le contact était établi et d'une voix
nerveuse, comme s'il n'avait jamais quitté sa
place, il scanda les prix en conjuguant l'esprit,
le pouvoir d'attraction et le charme nécessaire
à « emballer ? son public.
Au cours Se la semaine écoulée, M" Pruvost
obtint 5.600 francs pour deux vases en cérami-
que de Chine de l'époque Ming, 7.000 francs
d'une -commode en laque du XVIIIe siècle, 6.400
francs d'une salle à manger de style Louis xvi
et 80.000 francs d'une bague ornée d'un diamant
solitaire „
Ale Henri Baudoin adjugea 67.000 francs six
fauteuils d'époque régence, 3.000 francs une
série de petites gouaches sur l'église de la Ma-
deleine, 1.520. francs une petite chaire à prêcher,
1.725 francs un jéroboam de Chaval blanc 1926,
7.225 francs cent vingt bouteilles de Chamber-
tin comte de Moucheron 1936. 2.300 francs vingt
magnums de Clos Vougeot 1933
CHARLES DROUET.
Galeries d'Art ,;
GALERIE D'ART DE L'ETOILE
MAGASINS REUNIS ETOILE
avenue des Ternes, avenue Niel
Bachelet, Beaufrère, Belmondo, Besnard. Be1'1r'.
deley, Cacan. Chapelain-Midy, -. Charlemagn
Cheriane, Corneau. Creixams, Dandelot. Decnjf
rain, Delatousche. Deshayes, Diligent. Edelma^Jt''
Foy. Frelaut, Fraye, Gruet, Jacquemin. Jac*
Jltvin, Kvapil, Lamourdeèieu, Le Courtois, Lf
ànd, Le Tournier, Lombard, Massoul, Pouces"
Roig, Sigrist. Soulas, Thomsen. Traverse.. v
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SELECTION RODI.1
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EXPOSITION PROLONCEE jusqu'au 9 AOUT
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Nous rappelons que cette manifestation &>'
tistique est organisée au profil de Institué
Cardioiogique, créé par M. le professeur LaU'
bry, et pour l'œuvre de l'Aide aux Cardiaque
malheureux.
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12. rue La Boétie, à Paris tai
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CATALOGUE N" 1 FN IHSTIÏIBUTION
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NOUVELLE INÉDITE
de Fernand LEMOINE
'ETAIT fin novembre. Et penset
qu'elles n'étaient pas encore allées
au cimetière ! Mme Dubin en
avait honte. Elle se sentait gênée
vis-à-vis d'elle-même et vis-à-vis
du monde, de n'avoir pas encore
fait ce pèlerinage. Certes, elle y songeait.
puisque le pot de chrysanthèmes (de magnifi-
ques fleurs épanouies, jaunes et d'autres mau-
ves) était acheté depuis plusieurs jours. Mais
elle n'avait pas le temps.
Que voulez-vous, quand on est dans le com-
merce. et veuve, avec une jeune fille de vingt
ans à surveiller, on ne sait plus où donner de
la tête.
Les deux femmes travaillaient à nettoyer
à mettre en ordre, à tenir la boutique, qui ne
fermait jamais. Un café, c'est pendant les
jours de fête qu'on y fait les plus belles recet-
tes. Même le jour des .morts : les gens ont soif
en redescendant du cimetière. Si bien que la
Toussaint passa, et le Jour des Morts, et même
le 11 novembre, sans que Mme Dubin ait pu
se rendre sur la tombe de son époux. Sa fille
Jeannette -offrait bien d'aller, pour toutes deux.
porter les chrysanthèmes : mais la mère re-
fusait : .1
— Non ! Non !. D'abord, je n'aime pas
que tu sortes sans moi, surtout pour aller si
loin. Nous irons Ensemble dès que ma belle-
sœur Charlotte pourra me remplacer.
Jeannette insistait. Rien n'y faisait. Et les
belles heures de liberté entrevues par la jeune
fille s'enfuyaient avant même d'avoir été vé-
cues. Ce n'était certes pas qu'elle aimât son
père plus qu'un autre, Elle allait au cimetière
par devoir, par habitude; tout aussi absente
que sa mère de l'idée du mort. Les Rameaux, la
Toussaint : en dehors de ces deux jours la
tombe du pauvre bonhomme était bien aban-
donnée. Il est vrai que, pour ce qu'il avait
laissé d'empreinte et de souvenirs dans la vie
des deux femmes, c'était déjà bien récompensé.
M naviguait et, même auprès d'elles, il était
absent : un cuisinier qui avait cuit son sang
aux fourneaux des grands paquebots et qui, en
dehors de son métier, ne rêvait que des petites
vignettes de couleurs qu'il collectionnait avec
soin, avec jalousie. A chacun de ses voyages, il
amassait des timbres-poste, et passait son sé-
iour à tere à les classer, les cataloguer, les
écchanger. Non. Ce n'était, ni regret, ni amour
Jeannette eut simplement été heureuse d'être
libre, d'échapper un instant à la tutelle mater-
nelle. Sans projet, sans but. Pour ne_rien faire
de précis Simplement pour se sentir libre, et
un peu seule, et surtout pour que ne pèse pas
sur elle, à chacun de ses gestes, à chacun de
ses regards, l'implacable surveillance maternelle.
Et cette liberté lui était refusée ! Elle avait
maintenant une telle habitude des refus mater-
nels qu'elle n'en était même plus triste. E!le
n'était certes pas joyeuse, ni gaie *, elle ne se
sentait pas heureuse dans cette atmosphère
mais aucune angoisse ne 'la déchirait.
IE
NFIN la belle-sœur Charlotte fût libre et
le troisième samedi de novembre elle
remplaça au comptoir, derrière les sem-
piternelles bouteilles entamées. Mme UUbln et
sa fille.
'--- Nous ne serons parties que deux heures,
deux heures et demie au plus, disait la mère en
ajustant sur ses cheveux gris, un chapeau dé-
modé : le temps d'aller et de revenir.
Elle allait encore à droite, à gauche, s'affai-
rait à des choses inutiles, donnait des conseils
futiles, tournait, parlait, mettait le pot de
fleurs dans les bras de sa fille. Eiifin elle fut
prête. C'était pour se lamenter à nouveau :
— Pourvu qu'il n'y ait pas trop de monde
dans l'autobus, et que nous ayons des places
* J
assises. On n a pas idée non plus d'aller pcr' j
cher un cimetière aiissi loin.
Il faut avouer qu'elle devait traverser la ville,
prendre le tramway pour aller chercher u" a
autobus, les communications n'étant guère [
faciles. Elles partirent et tout se passa bien : L
Mme Dubin trouva une place assise. Céta'' j,
le principal.
Jeannette suivait, muette, calme, indiff®' |
rente. Elle ressentait même une ombre de bot'
heur à s'éloigner ainsi de la boutique, à voir r
des paysages nouveaux : peu importait où elle I
allât. Ces rues passantes, les alentours d'un* V
gare, puis, vers le cimetière, les petites maisortS jt)
:-.,,&tsées, le» paWHons, -quelques villas- même, leS (
champs, les arbres, la forêt, une mare qu'ort <
apercevait : oui, il importait peu vraime"* 1
qu'elle allât au cimetière, puisqu'elle éprouvait,
du plaisir à ces images neuves et rares pour
elle.
V Quand l'autobus s'arrêta au terminus, 3 J
quelque cinquante mètres de l'entrée du cime, |f
tière, elle rêvait qu'elle était heureuse. Jean'
nette descendit sans attendre sa mère, alerte-
vive, joyeuse de sentir, de retrouver en elle r|j
cette certitude de vie. de vie bouillonnante- j
rêveuse, libre, que les autres jeunes filles, ell' )
imaginait, devaient toutes trouver, «n elles-mê- ;
mes. (
Elle pensa « Paul », fit cinq pas en courant'
s'arrêta stupéfaite, embarrassée tout à coup Je
son pot de chrysanthèmes, de ses membres, 4e i
son propre corps, interdite ; le regard fixe I
celui qui passait sans la voir, qui, maintenant J
s'éloignait de cette démarche souple et large 1
qu'elle connaissait bien. I
- Qu'est-ce que tu tais) -1"
Sa mère l'avait rejointe, toujours aussi ai,
mable. Elle n'avait pas vu Paul, heureusement
Jeannette s'étant ressaisie, répondit simple-
ment :
- Je t'attendais ! > «
Elles firent route vers le cimetière.
Jeannette attachait, en se débattant, s o*
regard à la haute silhouette qui s'éloignait
grands pas. Ses cheveux bruns, longs derrière,
tombant, luisant, sur une nuque bien dégages
un complet bleu marine à grandes lignes blan'
ches qui l'allongeait encore ; sa taille mince:
ses deux bras, élégants, qu'il balançait d'une |
façon si personnelle. Oui, vraiment, il était ,
Elle s'empressa de penser : I
— Il a de vilaines mains.
Pour bien se prouver qu'elle n'était pas dupe j
et qu'elle ne l'aimait plus. Puis elle chassa tout t
d'un coup de son esprit cet être du passé ert )
évoquant ses mauvais jours, les autres femmes -
quelle lui avait connues : se forçant à pense' t
qu'après tout elle l'avait oublié et qu'il était
maintenant marié
>3 ■
IF- LLE se sentait pourtant bien triste. Pro-
Jp fondément triste. Rien ne subsistait e11
Ses elle de la joie que semblait créer la na-
ture, avec son beau soleil pâle de l'automne.
Comme elle refusait qu'il fût la cause de
cette tristesse, elle tentait de se persuade' j
que c'était ce pèlerinage sur la tombe pater' 1
nelle. le souvenir du disparu, sa peine d'orphe
line, qui la rendaient triste. Elle faisait effort
pour, penser à son père réellement, pour évo-
quer l'irrévocable. pour ressusciter des douleuf5
'amais ressenties. Elle trichait.
Sa mère pouvait parler, elle ne l'entendait
pas ; aller voir sur Jes tombes fraîches les noms
nouveaux, sujets de commentaires attristés, elle
la laissait aller. Elle était triste. Non pas triste
i pleurer, mais comme enveloppée de tristesse,
saturée d'une tristesse qui devenait physique
iusqu'à la faire pâlir, Elle cherchait dans sol'
passé, dans toute son enfance, un souvenir qui i
ne fût point celui de Paul, un souvenir de so"
oère qui puisse être une cause de tristesse.
Il lui vint enfin à l'esprit qu'un jour, quand
elle était petite, toute petite, et qu'elle portait
encore de longues boucles blondes, lui tomban' |
su* les épaules, son père l'avait prise sur ses;
genoux, pour la faire danser et lui montrer de
beaux timbres qu'il avait rapportés, grandes
vignettes de pays trop lointains, qu'il était fie'
J'exhiber neufs, achetés sur place. Il lui ava,t
oarlé de ces pays. pays de soleil. de couleurs-
de chants, de danse, et de chaleur ; puis ■'
l'avait. à nouveau, fait danser sur ses genou"
en imitant des musiques nègres entendues là'
as. Jeannette ",'P.. «ouven-iit encore, ses boM*
des blondes battaient la figure paternelle. Elle -j
riait, elle était heureuse, battait des mains e'
son père déposait sur son front de longs baisers
en la serrant fort dans ses bras. en la piquas
un peu avec son menton mal rasé.
La tristesse de Jeannette devenait plus vi"e
encore Sur le retour, pendant qu'aux côtés de
sa mère. elle attendait patiemment l'autobus-
elle tira lentement de son sac son moucho"
parfumé pour essuyer, à ses yeux, ses larmes
de tricheuse.
r*
C O M CE - - D I A
DU COTE
r
.D E S A R I S(
Deux grands visuels
Ed, cil de GONCOURT
: >, par Pierre du COLOMBIER
Il
l semble que certains êtres aient reçu
le privilège de se trouver juste au
centre de leur temps. Il suffit de
.piquer 'sur. leur nom la pointe d'un
..cbmpas,' puis de décrire des cercles de
plus en plus vastes : on embrasse tout.
En * cç .qui concerne le Second Empire, il
en est 'ainsi des deux frères confondus :
• Edmond et Jules de Gôncourt. Initiateurs
où témoins, ils ont une importance .égale
pour l'histoire des lettres et celle des arts
: plastiques, plus encore même pour celle
des changements du goût. Jusqu'ici ils n'a-
vaient guère été étudiés que par des teri-
vafns, et" -pout leur œuvre littéraire. I)
extste. à* vrai dire, un épais bouquin —
c'est une-thèse de doctorat publiée en
1920 — t^sous le titre : L'esthétique des
Goncourt. Affriolés, bien des curieux se
sont jetés sur ce livre: Rares sont ceux
qui ne l'ont point laissé retomber. avec
découragement. L'auteur y étudie fort
doctement le système esthétique dès deux
frères,' de: ces nerveux, de ces écorchss,
dont, le signe distinctif est d'avoir une
têtré fort peu.' philosophique. Professeur
Que l'on est dépourvu d'esthét'que, m'ob-
jectera-t-on, c'est-en avoir une encore.
N'empêche que c'est une mauvaise mé-
thode pour aborder les gens de cet aca-
bit, que d'en traiter ex cathedra: Il faut
vivre avec eux participer à leurs crises,
à leurs plaisirs, à leurs découragements.
Et la souplesse ne suffit pas encore,
leur exégète doit encore connaître.. par
expérience, ce qui ne s'apprend point dans
les livrés : la volupté d'une ligne, celle
d'une couleur. Or, c'est le mérite tout spé-
cial du .volume que vient de leur consa-
crer François Fosca, lequel, comme cha-
cun sait, est peintre en même temps qu'é-
crivain (1).;.
Pour la majorité des gens, les organes
des sens ne Jouent qu'un rôle d'informa-
teurs. Mais chez - certains 'individus ces
organes des sens, et dans ce casla vue,
éprouvent des voluptés très vives et qui
déviennent très raffinées ». Quand on a
dit que les Goncourt sont d'abord des
« sensuels-visuels ». on tient une de leurs
clefs.
L'un'et l'autre pratiquaient l'aquarelle.
Jules fut-un excellent aquafortiste, dont
l'œuVre- ne comprend pas moins de qua-
tre-vingt-six pièces. Et les tentatives- d'Ed-
mond dar.3 le même genre témoignent
surtout de. sa. bonne volonté, il était aussi
biberotetÛ" que 'son frère, éprouvait le
même plaisir à manier une garde de sabre
japonais, à se. pencher pendant des heu-
res sur un dessin ou une gravure.
Mais surtout leur technique d'écrivains;
ce fameux" style artiste, ce style Goncourt
qui, après avoir fait leur renom, nous est
devenu insupportable, on ne lui rend véri-
tablement justice que quand on a lu leurs
analyses des gravures ou des dessins du
dix-huitième. Il n'est aucun critique d'art
qui ne se soit cassé la tête sur ce pro-
blème désespérant : transposer dans le
langage la sensation que fait éprouver la
fine arabesque d'un trait, la trace hum'de
d'un pinceau d'aquarelle, la touche d'une
broisse sur la toile. Or, ce problème, les
Goncourt l'ont- résolu, et Plus d'une fois.
Et quand ils commentant un dessin de
Boucher, qu'ils ont devant les yeux — on
en est sûr — à l'instant même où ils
écrivent, ils arrivent à donner'à un degré
presque hallucinant l'illusion de « pré-
sence ».
D
ANS l'histoire des arts plastiques de
leur temps, leur nom s'attache r
trois grands thèmes : l'avènement
du réalisme, la découverte ae la ja-
ponerie, la résurrection du dix-huitième:
Le réalisme, ils en ont surtout. donné la
théorie dans Manette Salomon. Mais la
théorie seulement. -Avec ce mélange de
prescience intuitive et de timidité qui les
distingué, ils n'ont à peu près rien com-
pris à ce qui semblait la vérification
même de leurs thèses : ils ont a peu près
• ignoré Manet, et leur critique d'art, sou-
vent décevante, préfère Gavarni à Dau
roier; Decamps à Delacroix. Dans leur
goût. il y a quelque chose d'étriqué. Ce-
pendant il n'est que juste, comme fait
François Fosca", de rapprocher d'eux les
critiques de leur temps. S'il leur a man-
oué la divination d'un Baudelaire et d'ur.
Théophile Silvestre, leur expérience tech-
*ni
ment l'œuvre d'art les ont protégés de ces
développements discursifs, de ce faux bril-
lant de cette inanité sonore dont trop
d'écrivains ont donné le redoutable exem-
ple lorsqu'ils se sont aventurés à parler
tableaux.
Ils étaient à peu près persuadés d'avoir
découvert le Japon. Historien incorrup-
tible, Fosca démontre qu'il faut rabattre
.de leurs prétentions à cet égard. En vérité,
quand ils y vinrent, les estampes japo-
naises avaient attiré depuis plusieurs an-
nées l'attention d'un petit milieu d'ar-
tistes. Tout au plus contribuèrent-ils lar-
gement à les populariser.
Au fond, ce qu'ils ont le plus aimé, c'est
leuT cher dix-huitième. Cet amour expli-
que d'ailleurs les limites de leur' goût.
Mais là, entre des bornes assez rappro-
EDMOND ET JULES DE CONCOURT
Collection Prbuté.
(Lithographie de Gavarni).
chées, ils sont incomparables. Le livre
qu'ils ont-consacré à leur siècle de prédi-
lection, reste, malgré les progrès de l'éru-
dition, encore inégalé. Surtout ils ont
formé ce chef-d'œuvre vivant et exem-
plaire — malheureusement passager —
qu'a été leur collection. Quand, en 1935
nous en avons vu les bribes rassemblées,
nous avons conçu ce qu'avait pu être la
vente triomphale de 1897 qui marque une
date dans l'histoire da la curiosité. Nous
nous sommes émerveillés que des particu-
liers, dont les moyens étaient, en somme,
modestes, aient pu réunir tant de pièces
dont beaucoup étaient de premier ordre,
aucune n'était indifférente. Ce fut là une
des réussites les plus complètes dans
l'existence de ces deux. hommes, qui, en
-dépit de leur réputation considérable
ont connu plus de demi-succès que de
succès, ce dont ils ont souffert non pas
seulement, comme on le croit trop, par
vanité blessée, mais parce qu'ils avaient
le sens d'avoir beaucoup apporté à leur
énooueh
(1) Editions Albin Michel.
1
fêlégances 1941
BAS ET JAMBES
]
'IMAGINE que lorsque nos
arrière-petits,-neveux iront
admirer, en des Carnava-
let de l'avenir, les expo-
sitions > rétrospectives du cosiu-
ine, ils trouveront dans les vi-
trines- matière à se réjouir.
, — Qui sait, remarqua mon
amie Gisèle, à qui je faisais
part de mes réflexions ; nos ar-
rière - petits - neveux it 1 auront
peut-être pas autant de raisons
que tu le penses de se moquer
de nôtre évoque. Peut-être mê-
me auront, ils' de bonnes raisons
de la regretter, exactement com-
me nous pouvons regretter l'é-
poque de la robe à vertugadin
ou l'époque de la chaussure à la
poulaine.
— Nos arrière-petits-neveux re-
gretteront peut-être notre épo-
que, répliquai-je, mais rien ne
les empêchera de s'esbaudir de-
vant nos modèles, alors suran-
nés, de robes, de chapeaux et
..e chaussures:., exactement com-
me nous nous esbaiïdissons de-
vant les robes à panier», les co
thurnes et les cabriolets de nos
arrière-gra ii d'tantes
— Ce qui étonnera peut-être
nos arrière petites-nièces, dit Gi-
sèle, après avoir rêvé un ins-
tant, cb sera de voir, exposés en
bonne place dans les vitrines de
l'exposition dont tu me parles,
les flacons des teintures, qui,
actuellement, tiennent lieu de,
bas à nos élégantes, le bas syn-
thétique dans toute sa splen-
.deur. *
— Je n'aime pas beauCoup ces
teintures, dis-je, mais j'avoue
que j'aime mieux voir des jam
bes brunies au 200 fin d Elisa-
beth Ar-den, que des jambes nues
et livides.
- Moi, dit Gisèle, avec sa vé-
hémence habituelle, o'estbien
simple : je ne peux pas voir des
jambes nues à Paris gans en
éprouver un malaise. Je trouve
qu'il y a quelque chose d'indé
cent dans cette exhibition de
mollets plus ou moins nets dans
leur blancheur maladive. Leur
vue m'inspire la même gêne que
celle des baigneurs tout blancs
qui se mèlaient, au temps des
vacances, aux baigneurs bronzés
des plages. Tu sais, ajouta-t-elle,
qu'il existe des teintures très
bien, qui imitent le bas chair à
s'y méprendre.
— Oui, je sais, mais quel tra-
vail de s'enduire ainsi chaque
jour les mollets de matière co
lorante ! Et puis, malgré tout,
l'imitation n'est jamais parfai-
tè-:.. Il Y manque la couture, le
talon.
- Tu es mal informée, protesta
mon amie. Tiens, en ce moment,
il y a un coiffeur chez qui tu
peux te faire teindre les jam-
bes.
— Un coiffeur ?
- Parfaitement, un coiffeur
Pendant que l'artiste capillaire
s'occupe de ta permanente et
que la manucure te polit les on-
gles un spécialiste te badigeon-
ne les tibias avec art et délica-
tesse. C'est du beau travail. A
l'aide d'un pinceau très fin, ce
spécialiste te fait au dos des
mollets une imitation parfaite
de la couture du bas et, au ta
Ion, une imitation non moins
parfaite du « renforcé »..
- Nous er viendrons' peut-être
bientôt, dis-je en riant, au ta-
touage de la couture, des ba
guettes et même des mailles.
— Nous n'en somme" pas en-
core là ! *
— Tout cela est très joli par
, beau temps, dis-je; pour essayer
de calmer,un peu l'enthousias-
me de Gisèle, mais quand il
pleut, cette teinture doit dé
teindre et couler en traînées la-
mentables le long des jambes ?
-Pas du tout, répliqua Gi-
,sèle : cette teinture résiste à
l'eau.
— Ah ! mais, alors, le soir,
pour se laver les jambes ?
— Heu !.. répondit-elle en hé-
sitant, je ne sais pas. Il faudra
que je me renseigne.
VACANCES 1941
- Quel genre -de robes ein,
porteras-tu en vacances nie
demanda Gisèle.
— Tu ferais mieux de me de-
mander d'abord si j'irai en va-
cances. lui répondis - je -iu
riant.
— Moi. me dit Gisèle, j'avais
rêvé d'aller passer un mois à
Deauville, mais il paraît que
c'est impossible. J'irai donc me
reposer quelques semaines en
Touraine.
- Tu dis cela comme si on
t'arrachait le coeur Tu n'ai-
mes pas la Touraine ?
:.- Je l'adore, mais j'adore
aussi la mer. et puis, à la
mer. on peut s'habiller,
— Tu veux dire Qu'on peut
se déshabiller.
— Je sms d'autant plus l'a,
vrée, poiir%iivit Gisèle, dédai-
gnant mon ironie, Que je m'é-
tais fait faire quelques robes,
imprimées charmantes, un ou
deux paréos et surtout un
étonnant maillot de bain en
satin lastex orné de fleurs rou-
ges et blanches. Il faudra que
je te montre ça.
— Mais tout cela n'est pas
perdu, lui dis-je. Si tu veux
rester ici quelques jours avec
moi, et pour peu Clue le beau
temps persiste, je te ferai trou-
ver plus d'une occasion' dé
mettre tes robes légères et d'ex-
hiber ton étonnant maillot en
lastex.
— On ne peut tout de même
pas, protesta-t-elle, se prome-
ner en maillot de bain' ou en
paréo aux Champs-Elysées !
— Non, bien sûr ! mais tu
peux, aux Champs-Elysées, le
promener vêtue de petites ro-
bes légères,. coiffée d'ulf de ces
gracieux paillassons de papier
dont tu disais tant de bien
l'autre jour, et chaussée de
sandales à semelles de bois —
Tu ne serais pas seule. Cer-
taines terrasses des Champs-
Elysées valent bien le bar du
Soleil. On y rencontre les mê-
mes gens, d'ailleurs. Quant a
.toit maillot de bain, tu peux
l'utiliser à la piscine clu Ra-
cing ou chez Deligny. Les élé-
gantes n'y manquent pas — j'y
ai vu l'autre jour, de jeunet
et très jolies femmes qui se
prélassaient au soleil dans des
maillots aussi étonnants que le
tien. J'en ai remarqué plu-
sieurs. Le satin lastex est très
en vogue, cette année — noir a
fleurs rouges, comme le tien,
ou à fleurs vertes et blanches,
ou bien ivoire à fleurs brique-
ou jaunes entremêlées de feuil-
les vertes. Ou bien, encore, et
toujours en lastex, des maillots
à larges rayures bleues et ro-
ses, bleues et jaunes, bleues et
rôties. Tout cela du nlus ura-
cieux effet.
Après le bain (car rien ne
t'empêche de te baigner), tri
peux remplacer ton maillot par
un short et une petite blouse.
J'ai vu des ensembles fort
seyants de shorts en toile de
lin verte et bleue dont les bre-
telles coupent agréablement la
soie de blouses à carreaux mul-
ticolores.
— Je n'aime pas les shorts,
aéclara Gisèle.
- Pourquoi ne mettrais-tu
pas, alors, une petite robe de
plage ? Il en est d'adorables en
toile de lin imprimée blanc sur
bleu, rouge sur vert, ou en toute
autre teinte.
'Æ- Je crois que maigre tout
j'irai en Touraine. J'y retrou.
ver éti des amis et nous organi-
serons des jeux de plein air. Je
préfère encore la vraie campa-
qne à la fausse plaie.
- Je vois ça d'ici, dis-je en
souriant. Vous jouerez au cro-
quet, aux boulet, au ballon,
etc., etc.
— Ce sont des jeux qui don-
nent du mouvement et qui ou-
vrent l'appétit. ,
— C'est bien ce que je leur
reproche. Mais tu pourras alors
utiliser tes robes légères.
— J'ai justement dans ma
malle une robe de Paquin qui
est une petite merveille. En
loile imprimée bleu marine sur
fond blanc, elle se boutonne de-
vant du haut en bas, ce qui
permet les mouvements les pt-.ix
violents. On met là-dessous une
petite culotte de jersey et on
peut se livrer sans indiscrétion
à tous les jeux de plein air. Il
faudra aussi que je te montre
une robe sans manches que m'a
faite Véra-Boréa. en toile de
lin blanche avec, sur la jupe,
de larges bandes verticales bleu
marine. Pour le croquet, le
tennis, et même les boules que
tu as l'air de plaisanter, c'eut
une robe parfaite.
— Je ne te demande pas s'il
y a une rivière, dans ce coin
où tu projettes d'aller. Il y en
a de si charmantes dans ta
ioulce Touraine.
— .Oui, mais l'eau y est trop
froide pour moi. Nous ferons du
canotage.
- Pour le canotage, j'espère
que tu as pris tes précautions.
— J'emporte uii costume de
chez Lanvin, en toile brique.
Large pantalc : et veste à gros
boutons s'ouvrant sur une blou
se imprimée. J'aurais aimé em-
porter également un ensemble
délicieux de Raphaël. pantalon
blanc, veste rouge et blouse
écossaise, mais n'est-ce pas, on
ne peut pas tout avoir. Il faut
se contenter de ce qu'on a.
— Bien sûr !. Et il faut en
laisser un peu pour les autres.
Lucienne MASSET.
MONTHERLANT
--.- -
>
et le corps humain-
par Pierre de MASSOT
Ceux qui, comme moi, considèrent que dans
l'œuvre si vaste déjà et si prodigieusement di-
perse de Montherlant, les Olympiques tiennent
une place de premier ordre, ceux-là prendront
à .a lecture de Paysage des Olympiques (1) un
plaisir tout singulier. Double plaisir, puisqu'aussi
bien le texte et les illustrations s'harmonisent à
miracle..
C'est de ces dernières que nous parlerons tout
d'abord. Elles sont dues à un photographe dont
nous ignorons s'il est amateur ou professionnel,
M. Karel Egermeier, mais duquel nous sommes
certain qu'il avait compris exactement le but et
le désir de Montherlant. Ses reproductions sont,
à tous égards, admirables. Il a eu ce bon goût
de nous présenter des athlètes, tant féminins
que masculins, plutôt dans leurs heures d'alan.
guissement et de loisir sur les terrains de jeux
qu'en pleine action. Et cependant, à chacun
d'entre eûx, comment n'appliquer point la défi-
nition, de Plotin : « Le beau est la splendeur du
vrai » ? Tous sont beaux : hommes, jeunes fem-
mes, adolescents, parce que tous authentiques.
Et, plus précisément, on loue M. Egermeier dt
ne nous avoir pas trompés, même dans quelqnti
détails quf apparaîtront bien vulgaires pour
d'aucuns : nous ravissent ces gros plans où l'ap-
pareil a fixé un pied nu d'adolescent, tel genou
rond de jeune fille dans des veloutés d'ombre et
de lumière où les défauts mêmes sont fonction
de cette beauté pour le culte de laquelle il ne
serait pas vain de vivre, mais profitable et bon.
Les planches 8. 9,- 21, 37, 43, 49, 64, 72, 73
constituent d'extraordinaires réussites.
Nous qui aimons les beaux corps, comment ne
saurions-nous pas gré à Henry de Montherlart
d'avoir dans ce magnifique album entrepris la
glorification du corps humain ? Il y fallait cette j
gentille hardiesse dont il est coutumier, car o'
Foire de Leipzig
AUTOMNE 1941
DU 31 AOUT AU 4 SEPTEMBRE
Lt' lU'ichsniesscaint. soucieux d'éviter .tuut(,
déception aux acheteurs, attire leur attention
sur le fait qu'ils ne doivent pas trop espérer nue
les mareUandises iloht la livrai_ son inteiesse un
K'and no'.Mbre d'entre eux puissent être ('trcdi-
veinent livrées. t'ar suite de la tache è('rasante
nui incuiAbe à l'éeononiie a/lcmumlc, 1'Jlcma¡{ne
n'est pas en mesure de donner satistaet 1011 a
toutes les demandes d'achat : celles-ci sont d'ail-
leurs considérâmes. L'exécution de œs coni-
mandes demanderait des années.
Si néanmoins, le Heichsniesseanit fournit aliX
visiteurs étrangers l'occasion de se rendre à la
Foire c'est uu'il oense que, dans un mutuel
désir de collahoVaïion plus étroite et atin de
y réparer pour l'avenir un terrain tavoraHe à des
échanses commerciaux, une prise de contact Iné-
senter-xit de précieux avantages.
Il ties,, hien entendu, yas impossible une cer-
tains marrhéj puissent être conclus, mats il est
très difficile de dire quelles marchandises sont
susceptibles cl être livrées.
Par contre it~ra intéressant pour le t,isitetir
français de voir les modèles nouveaux une 1 ex-
posant allemand a réalisé;, en vue de satisfaire
les besoins qui surgiront lors du retour au temps
de paix - en même temps, il pourra, a la Foire,
se documenter de façon générale sur le develop.
pement à attendre dans le domaine pratique et
écoiloilli(itie.
Ajoutons encore que le train spécial qui sera
mis en route pour Leipzig aura 1 horaire ei-
ï>eé»)artS Varis-Est. le >9 août 21 h. 40 j
Arrivée Leipzig, le 30 août. 1«> '»• ■-* ;
Retour Leipzig, le 4 septembre 1.» I •> ;
arrivée Paris-Est, le 5 septembie - "•
M FOIRE DE LEIPZIG;
7 X AUTOMNE 1941
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est vite à notre époque accusé de paganisme et,
mieux encore, d'immoralisme.
Ce qui caractérise l'art de Montherlant, c'['st
qu'il mêle, avec le plus rare bonheur et le plus
exquis, tous les pègres : la tendresse qui fend le
cœur, la grâce, l'ironie narquoise, la gouaille ar-
gotique et faubourienne, le pamphlet et le su-
blime, le tout traversé comme d'éclairs de fulgu-
rantes ellipses. C'est ainsi que nous trouvons Ba
conclusion d'une beauté sans égale. Que nos lec-
teurs en jugent :
« Les empires passeront ; bientôt l'indifféren-
ce de l'avenir aura résolu sans effort ce qu'il,,
appelaient leurs grands problèmes, tiré le calme
de leurs tumultes, et l'unité de leurs dissensions
ridicules. Mais le corps humain dans sa fleur,
au milieu de la nature, et ses représentations, et
ce qui est pensé sur lui, cela sera encore actuel
dans dix mille ans. On recueille d'Aristophane
qu'alors même que les marchés d'Athènes étaient
entièrement couverts de neige, on continuait d'y
vendre des fruits nouveaux et des violettes.
Qu'on ne nous embête donc pas avec le déses-
poir. Quels que soient les bouleversements et les
ruines, il. y aura toujours des enfants parmi
nous. »
Pour de telles phrases, et, comme dit Bossue t,
« tout enchantées de l'amour du monde », mê-
me si l'on avait de graves raisons de lui en vou-
loir, ce qui, juste enfer ! n'est pas notre cas,
pour des phrases si belles et qui vont si avant
dans la connaissance des cœurs, il sera toujours
pardonné à Montherlant. Car, s'il a parfois vio-
lemment détesté, il a toujours beaucoup aimé.
(1) Bernard Grasset-, éditeur.
A l'Hôtel « des Ventes;,
1 > l
MAITRE ADER
Les lèvres minces, un regard autoritaire et
pénétrant dans une figure extrêmement sympa-
thique, des gestes onctueux mais fermes, tel est
M; Ader. Pendant des heures ce jeune homme
peut sans arrêt tenir en haleine son auditoire;
ses yeux, inlassablement, vont chercher l'en-
chère au fond de la salle, reviennent à la table
pour retourner dans une direction opposée et,
son marteau manié d"une façon élégante connaît
automatiquement, semble-t-il, le moment où il
doit décrire ce demi-cercle qui englobe en un
geste toute la salle avant de tomber sur le bu-
reau. Il est, malgré son manque de cheveux
blancs, dans la grande tradition. N'est-il Das
le successeur de Me Lair-DUbreuil ?
Lorsque au début de cet hiver, Me Ader, dès
son retour de captivité reprit pour la première
fois ses fonctions, une petite émotion empoigna
la foule, et. aux souhaits de bienvenue des col-
lectionneurs présents,, il répondit, tout, en gra-
vissant les marches de l'estrade, par un sourire
un peu figé, désirant cacher son trouble. Il se
retrouvait enfin -au milieu de l'arène. La scène
fut touchante, mais dès la présentation du pre-
mier objet, le contact était établi et d'une voix
nerveuse, comme s'il n'avait jamais quitté sa
place, il scanda les prix en conjuguant l'esprit,
le pouvoir d'attraction et le charme nécessaire
à « emballer ? son public.
Au cours Se la semaine écoulée, M" Pruvost
obtint 5.600 francs pour deux vases en cérami-
que de Chine de l'époque Ming, 7.000 francs
d'une -commode en laque du XVIIIe siècle, 6.400
francs d'une salle à manger de style Louis xvi
et 80.000 francs d'une bague ornée d'un diamant
solitaire „
Ale Henri Baudoin adjugea 67.000 francs six
fauteuils d'époque régence, 3.000 francs une
série de petites gouaches sur l'église de la Ma-
deleine, 1.520. francs une petite chaire à prêcher,
1.725 francs un jéroboam de Chaval blanc 1926,
7.225 francs cent vingt bouteilles de Chamber-
tin comte de Moucheron 1936. 2.300 francs vingt
magnums de Clos Vougeot 1933
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tistique est organisée au profil de Institué
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'ETAIT fin novembre. Et penset
qu'elles n'étaient pas encore allées
au cimetière ! Mme Dubin en
avait honte. Elle se sentait gênée
vis-à-vis d'elle-même et vis-à-vis
du monde, de n'avoir pas encore
fait ce pèlerinage. Certes, elle y songeait.
puisque le pot de chrysanthèmes (de magnifi-
ques fleurs épanouies, jaunes et d'autres mau-
ves) était acheté depuis plusieurs jours. Mais
elle n'avait pas le temps.
Que voulez-vous, quand on est dans le com-
merce. et veuve, avec une jeune fille de vingt
ans à surveiller, on ne sait plus où donner de
la tête.
Les deux femmes travaillaient à nettoyer
à mettre en ordre, à tenir la boutique, qui ne
fermait jamais. Un café, c'est pendant les
jours de fête qu'on y fait les plus belles recet-
tes. Même le jour des .morts : les gens ont soif
en redescendant du cimetière. Si bien que la
Toussaint passa, et le Jour des Morts, et même
le 11 novembre, sans que Mme Dubin ait pu
se rendre sur la tombe de son époux. Sa fille
Jeannette -offrait bien d'aller, pour toutes deux.
porter les chrysanthèmes : mais la mère re-
fusait : .1
— Non ! Non !. D'abord, je n'aime pas
que tu sortes sans moi, surtout pour aller si
loin. Nous irons Ensemble dès que ma belle-
sœur Charlotte pourra me remplacer.
Jeannette insistait. Rien n'y faisait. Et les
belles heures de liberté entrevues par la jeune
fille s'enfuyaient avant même d'avoir été vé-
cues. Ce n'était certes pas qu'elle aimât son
père plus qu'un autre, Elle allait au cimetière
par devoir, par habitude; tout aussi absente
que sa mère de l'idée du mort. Les Rameaux, la
Toussaint : en dehors de ces deux jours la
tombe du pauvre bonhomme était bien aban-
donnée. Il est vrai que, pour ce qu'il avait
laissé d'empreinte et de souvenirs dans la vie
des deux femmes, c'était déjà bien récompensé.
M naviguait et, même auprès d'elles, il était
absent : un cuisinier qui avait cuit son sang
aux fourneaux des grands paquebots et qui, en
dehors de son métier, ne rêvait que des petites
vignettes de couleurs qu'il collectionnait avec
soin, avec jalousie. A chacun de ses voyages, il
amassait des timbres-poste, et passait son sé-
iour à tere à les classer, les cataloguer, les
écchanger. Non. Ce n'était, ni regret, ni amour
Jeannette eut simplement été heureuse d'être
libre, d'échapper un instant à la tutelle mater-
nelle. Sans projet, sans but. Pour ne_rien faire
de précis Simplement pour se sentir libre, et
un peu seule, et surtout pour que ne pèse pas
sur elle, à chacun de ses gestes, à chacun de
ses regards, l'implacable surveillance maternelle.
Et cette liberté lui était refusée ! Elle avait
maintenant une telle habitude des refus mater-
nels qu'elle n'en était même plus triste. E!le
n'était certes pas joyeuse, ni gaie *, elle ne se
sentait pas heureuse dans cette atmosphère
mais aucune angoisse ne 'la déchirait.
IE
NFIN la belle-sœur Charlotte fût libre et
le troisième samedi de novembre elle
remplaça au comptoir, derrière les sem-
piternelles bouteilles entamées. Mme UUbln et
sa fille.
'--- Nous ne serons parties que deux heures,
deux heures et demie au plus, disait la mère en
ajustant sur ses cheveux gris, un chapeau dé-
modé : le temps d'aller et de revenir.
Elle allait encore à droite, à gauche, s'affai-
rait à des choses inutiles, donnait des conseils
futiles, tournait, parlait, mettait le pot de
fleurs dans les bras de sa fille. Eiifin elle fut
prête. C'était pour se lamenter à nouveau :
— Pourvu qu'il n'y ait pas trop de monde
dans l'autobus, et que nous ayons des places
* J
assises. On n a pas idée non plus d'aller pcr' j
cher un cimetière aiissi loin.
Il faut avouer qu'elle devait traverser la ville,
prendre le tramway pour aller chercher u" a
autobus, les communications n'étant guère [
faciles. Elles partirent et tout se passa bien : L
Mme Dubin trouva une place assise. Céta'' j,
le principal.
Jeannette suivait, muette, calme, indiff®' |
rente. Elle ressentait même une ombre de bot'
heur à s'éloigner ainsi de la boutique, à voir r
des paysages nouveaux : peu importait où elle I
allât. Ces rues passantes, les alentours d'un* V
gare, puis, vers le cimetière, les petites maisortS jt)
:-.,,&tsées, le» paWHons, -quelques villas- même, leS (
champs, les arbres, la forêt, une mare qu'ort <
apercevait : oui, il importait peu vraime"* 1
qu'elle allât au cimetière, puisqu'elle éprouvait,
du plaisir à ces images neuves et rares pour
elle.
V Quand l'autobus s'arrêta au terminus, 3 J
quelque cinquante mètres de l'entrée du cime, |f
tière, elle rêvait qu'elle était heureuse. Jean'
nette descendit sans attendre sa mère, alerte-
vive, joyeuse de sentir, de retrouver en elle r|j
cette certitude de vie. de vie bouillonnante- j
rêveuse, libre, que les autres jeunes filles, ell' )
imaginait, devaient toutes trouver, «n elles-mê- ;
mes. (
Elle pensa « Paul », fit cinq pas en courant'
s'arrêta stupéfaite, embarrassée tout à coup Je
son pot de chrysanthèmes, de ses membres, 4e i
son propre corps, interdite ; le regard fixe I
celui qui passait sans la voir, qui, maintenant J
s'éloignait de cette démarche souple et large 1
qu'elle connaissait bien. I
- Qu'est-ce que tu tais) -1"
Sa mère l'avait rejointe, toujours aussi ai,
mable. Elle n'avait pas vu Paul, heureusement
Jeannette s'étant ressaisie, répondit simple-
ment :
- Je t'attendais ! > «
Elles firent route vers le cimetière.
Jeannette attachait, en se débattant, s o*
regard à la haute silhouette qui s'éloignait
grands pas. Ses cheveux bruns, longs derrière,
tombant, luisant, sur une nuque bien dégages
un complet bleu marine à grandes lignes blan'
ches qui l'allongeait encore ; sa taille mince:
ses deux bras, élégants, qu'il balançait d'une |
façon si personnelle. Oui, vraiment, il était ,
Elle s'empressa de penser : I
— Il a de vilaines mains.
Pour bien se prouver qu'elle n'était pas dupe j
et qu'elle ne l'aimait plus. Puis elle chassa tout t
d'un coup de son esprit cet être du passé ert )
évoquant ses mauvais jours, les autres femmes -
quelle lui avait connues : se forçant à pense' t
qu'après tout elle l'avait oublié et qu'il était
maintenant marié
>3 ■
IF- LLE se sentait pourtant bien triste. Pro-
Jp fondément triste. Rien ne subsistait e11
Ses elle de la joie que semblait créer la na-
ture, avec son beau soleil pâle de l'automne.
Comme elle refusait qu'il fût la cause de
cette tristesse, elle tentait de se persuade' j
que c'était ce pèlerinage sur la tombe pater' 1
nelle. le souvenir du disparu, sa peine d'orphe
line, qui la rendaient triste. Elle faisait effort
pour, penser à son père réellement, pour évo-
quer l'irrévocable. pour ressusciter des douleuf5
'amais ressenties. Elle trichait.
Sa mère pouvait parler, elle ne l'entendait
pas ; aller voir sur Jes tombes fraîches les noms
nouveaux, sujets de commentaires attristés, elle
la laissait aller. Elle était triste. Non pas triste
i pleurer, mais comme enveloppée de tristesse,
saturée d'une tristesse qui devenait physique
iusqu'à la faire pâlir, Elle cherchait dans sol'
passé, dans toute son enfance, un souvenir qui i
ne fût point celui de Paul, un souvenir de so"
oère qui puisse être une cause de tristesse.
Il lui vint enfin à l'esprit qu'un jour, quand
elle était petite, toute petite, et qu'elle portait
encore de longues boucles blondes, lui tomban' |
su* les épaules, son père l'avait prise sur ses;
genoux, pour la faire danser et lui montrer de
beaux timbres qu'il avait rapportés, grandes
vignettes de pays trop lointains, qu'il était fie'
J'exhiber neufs, achetés sur place. Il lui ava,t
oarlé de ces pays. pays de soleil. de couleurs-
de chants, de danse, et de chaleur ; puis ■'
l'avait. à nouveau, fait danser sur ses genou"
en imitant des musiques nègres entendues là'
as. Jeannette ",'P.. «ouven-iit encore, ses boM*
des blondes battaient la figure paternelle. Elle -j
riait, elle était heureuse, battait des mains e'
son père déposait sur son front de longs baisers
en la serrant fort dans ses bras. en la piquas
un peu avec son menton mal rasé.
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encore Sur le retour, pendant qu'aux côtés de
sa mère. elle attendait patiemment l'autobus-
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parfumé pour essuyer, à ses yeux, ses larmes
de tricheuse.
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