Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1919-12-22
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 décembre 1919 22 décembre 1919
Description : 1919/12/22 (A14,N2562). 1919/12/22 (A14,N2562).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7653329p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 08/06/2015
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04s-e,pfflka •r^fVée d'ordinaire à. l'usage des
rois. Qui nteraft, après cela, le prestige du
nom ?
Toise la salle, vibrante, s'absocia frénétique-
ment à l'hommage, des anciens. Et ce fut un
spectacle très émouvant. - -- • -
Jean Bastia, annuaire vivant, m'arrête et me
reproche mon erreur.. Le Longuevills accueilli
par le public avec ces marques de respectueux
enthousiasme, ne serait autre que le Fugère
d'antan, celui de la chanson de la Sauge du
jongleur de Notre-Dame. Il est plus que septua-
génaire, et ses huit dernières années se sent
passées daais la retraite. Le sujet d'étonnemsnt,
le voilà, jeunesse éternelle des vrais grands
artistes. L'entière possession de leur métier et
i'eur foi les rendent invulnérables aux atteintes
de l'âge. La virtuosité accomplie persiste au-
tant que le cerveau qui l'a façonnée. La maî-
trise n'est pas tant dominée par les artères
et par le muscle que par le coeur et par l'in-
telligence. Aujourd'hui seulement, nous déce-
lons à quel point le talent de Fugère était ex-
traordinaire. Trissé dans scn air du 3e acte,.,
le chanteur, malgré son émotion et sa fatigua,
sut trouver chaque fois l'émission qui conve-
nait à son état physique, et l'acteur varier son
jeu aj gré de son inimitable fantaisie.
Cette variété de moyens devrait-elle nous sur-
prendre? Habitué à voir !e comédien, quels
que soient l'atmosphère, l'ambiance et le mo-
ment. figé dans son geste, immuable dan3 son
interprétation, immobile dans la tradition, le
spectateur s'étonne d'une si riche spontanéité.
Apprenons plutôt, par cet exemple, à quoi sert
la technique : non pas à stéréotyper la forme,
mais à mettre l'artiste au-dessus de toutes les
contingences.
L?. réapparition de kjicien Fugère sur la scène
est, en même temps qu'une sorte de miracle,
un enseignement de premier ordre que les jeu-
nes ne négligeront pas.
Pour ses débuts. Mlle Réville s'est, en un
mot, imposée. Elle a, déjà, de "l'aisance et de
l'autorité. Sa tâche était lourde; elle s'en est
acquittée sans faiblir. Agréable à regarder, pas
maladroite dans l'action, même par comparai-
son avec ses habiles partenaires, possédant en
outre une certaine rouerie vocale, non sans
analogie avec celle de tel ménage de chanteurs
bien connus, elle paraît solidement armée pour
l'avenir. Elle pourra, je suppose, réussir, sur-
tout si elle a la précieuse sagesse de concevoir
ce qui lui reste à apprendre et de perfectionner
quelques détails.
Or, au premier contact, il semblerait que sa
voix n'eût pas encore obtenu toute l'homo-
généité désirable. Elle se scinde, cette voix, en
trois compartiments trop caractérisés: grave et
médium, où çlle manquerait vite d'éclat et de
portée; tessiture moyenne, où elle est déli-
cieuse ; aigu, dans lequel elle resterait en géné-
ral un peu verte. Ce n'est là, répétons-le, qu'une
impression première, qui ne tient d'ailleurs
pas compte des facteurs d'appréhension et d'inex-
périence théâtrale, et que Mlle Réville tibus
contraindra probablement à corriger, dès la pro-
chaîne rencontre. L'épreuve a été pleinement
favorable et le succès de cette artis'e fut très
vif *
J'ai déjà parlé plusieurs fois de Mlle Favart,
que te n'aurais pas, du reste, l'outrecuidance
de juger. Gracieuse, .mutine,, charmante comé-
dienne et diseuse experte, nous la retrouvons
ici tout entière avec ses innombrables supério-
rités, et aussi* avec ces inégalités vocales qui
constituent elles-mêmes une. partie de son at-
trayante personnalité.
M. -Pujol, victime d'un fâcheux enrouement,
arriva jïért&Iement jusqu'à la fin de. son rôle.
Accident dont il serait souverainement injuste
de lui faire grief. Le public, et c'est son droit,
juge sur le résultat. Il n'a pas à tenir compte
des embûches semées par la mauvaise saison
sur le chemin des chanteurs. Il vient au spec-
tacle non pour s'exercer à l'indulgence, mais
pour y prendre de la satisfaction. Toutefois, M.
Pujol est trop légitimement estimé des habitués
olairvoyaflfs de t'Opéra-Comique pour ternir son
excellente réputation à cause d'une conjoncture
visiblement indépendante de sa volonté. Pour
èma part, le reste sur le jugement favorable que
je pffluis: dernièrement sur lui.
M. Azéma. sujet utile entre tous, campa épi-
sodiquement un Louis XII de belle allure.
M. Baugé rend, lui aussi. salle Favart, les
plus estimables services. Quoi .qu'il soit de mes
amis, l'ai, par un scrupule -peut-être excessif,
attendu jusqu'ici,- persuadé que j'en trouverais
l'occasion, pour lui .accorder dans ces colon-
nes une place prépondérante. L'occasion, il nous
l'a amptement fournie. Son interprétation du
rôle de Ctériient Marot ne fut rien moins qu:une
sorte de révélation. A mon avis, il s'y est élevé
d'»^e dasse et y a définitivement trouvé son
aSSJette, Une belje voik, suffisamment volumi-
neuse, bien timbrée, conduite avec un art sou-
ple et ttne méthode sévère; des effets hon-
nêtes et d'autant plus frappants; un bon-
igarçofifiêsme élégant et sobre, .une franche al-
lure: telles sont les vertus essentielles qui lui
conquireuf. à juste titre, l'unanime suffrage. Je
crois que, s'il acquérait encore, dans son jeu,
une simplicité plus large, plus personnelle, avec
un pets plus de fantaisie, il arriverait sans
peine à gravir les cimes auxquelles il est fondé"
à aspire**. - *
* Bref, ovation générale, et pour les interpré-
tés et pour leurs .auteurs.
RAYMOND CHARPENTIER.
-ON ÉCRIT
.Mon cher Comœdia,
Strasboéwg voit Malikoko, roi nègre défiler
triomphalement au "Châtelet; pendant que notre'
opérette Gai, gai, marions-nous attend les feux
de la rampe.
Le troisième acte de notre ouvrage se passe
également à StrasbÕurg, le )our.d3 l'entrée des
également à Strasbourg, le jour; de l'entrée des
troupes françaises.
Nous avouons avoir pris cette idée dans fe
dénouement'd'une teagédie signée Foch. ac-
clamée. et comment!
Maury NICOL et F. MASSON.
NOVATEURS, A VOS PIECESl
f
■ * s :
M. A. Séché, *.
i nouveau lecteur
de la Comédie=Française
remplace M. Blavet
OU L'ON VOIT EXPLIQUER COMMENT UN CRI-
TIQUE LITTERAIRE POURRAIT DEVENIR
.,- DIRECTEUR DE THEATRE -- -'
- Un destin malicieux, nous dit M. Séché,
m'a toujours poussé vers Je théâtre malgré
!.Photo A-bel),.
M. Alphonse SECHE
moi. Que grâces .lui soient rendues, car je n'eus
jamais qu'à m'en louer! J'ai hasardé mes pre-
miers vagissements, à Nantes, un jour de foire,
entre un coup de grosse caisse et un boniment
de Paillasse ! Mon horoscope était ainsi facile
à tirer: En 1902, sans avoir rien cherché, re-
tenu par mes travaux critiques, je reçois des
mains de More!, Romain Rolland, George Bizet,
Gabriel Trarieux, la Revue d'Art dramatique,
dont je conserve avec Rolland la direction
« Jules Bertaut me propose d'écrire avec
lui L'Evolution du Théâtre contemporain. Nou-
veau pas dans le temple de Melpomène. Je re-
tourne à mes travaux. Troisième intervention
du destin malicieux: fondation du Nouveau
Théâtre d'Art que Payen, Souchon, Lenormand
et Alfred Mortier me lègtrent. J'y joue Lenor-
mand à ses débuts et nombre d'oeuvres d'avant-
garde: Une des dernières pièces représentées :
Un Sans-Patrie, écrite en collaboration avec Ju-
les Bertaut (publiée par Comœdi;¡¡) et jouée
par Durée et Nady Berry, qui interprète aujour-
d'huUMme en Folie.
« La guerre survient et le destin malicieux
me guette toujours.- Emile Fabre me fait appe-
ler et me charge .du Théâtre aux Armées, que
nous mettons debout, lui et moi, ce qui fait
penser M. DaHmier à le rattacher ensuite aux
Beaux-Arts j'étais ainsi devenu un familier de la
Comédie,et durant deux ails.. Feus l!ûccasion,jus-
qu'à son retour, de suppléer M. Georges Ri-
cou, au secrétariat général. C'est ainsi que,
tout naturellement sans doute, je fus appelé à
remplacer, comme lecteur, M. Blavet, qui sou-
haitait prendre sa retraite.
« Entre temps, grâce à l'amitié de Romain
Coolus, M. Antoine Bannès me pria d'organiser
les représentations des Trente Ans de Théâtre.
J'ai gardé pour la fin le meilleur. Ce destin
malicieux déjià nommé, me fit rencontrer à la
Comédie-Française Mlle Andrée de Ghauveron,
que j'eus le plaisir d'épouser. Ce destin mali-
cieux lut donc mon bon génie. Qui sait, peut-être
finirai-je un jour dans la peau d'un directeur
de théâtre, après avoir abandonné la critique?
— Henry Becque, avec son âpre-té coutu-
mière, affirme dans ses Souvenirs que. les lee-
teurs du Théâtre Français ne sont là que pour
en fermer les portes, -et.
— Je ne m'illusionne pas sur mon autorité
de lecteur; mais nous pouvons rendre service
aux jeunes auteurs. Je m'y efforcerai de mon
mieux. Sans doute, le nombre des pièces déjà
reçues et à jouer nous impose d'être très sé-
vères. Mais la hardiesse et le talent forcent
toutes les pontes,-et je serai heureux-d'avoir à
signaler au Comité les œuvres neuves, hautes
ou curieuses que j'aurai la bonne fortune de dé-
couvrir. A. L.
ÇA LA
Jeudi 25 décembre, chez Mme Aurel, Royère
portera de Guy Lavaud ; Suzanne Delvé, José
Roland, diront les poèmes ; Renée du Minil dira
le,Reliquaire, de Verlaine.
Décentralisation artistique. — Notre confrère
Irénée Mauget prend la di/reotion de la Salle des
Fêtes de Baulogne-sur-Seine. pour y donner des
représentations classiquifes et y Fat'-ife d importan-
tes créations. If ouvre samedi avec Le Médecin
malgré lai, joué par M. Adet. /Ville Yvonne Ga-
baroche chantera de Vieux Noëls et ses chan-
sons anciennes. Jeudi, M. Ricou fera une confé-
rence sur les airs célèbres d'opéra comique, et
Mlle Musidora jouera une pièce inédite. M, Mau-
get melt à l'étude une œuvre nouvelle en trois
actes, de M. Auguste Villeroy.
Le théâtre du Tristnon Dramatique est fondé
pour permettre aux jeunes artistes et aux jeunes
auteur de se produire, de se faire apprécier, en
leur offrant, par ses représentations, de lutter
contre la décadence de notre art dramatique.
Le Trianon dramatique débutera par La Favo-
risée, trois actes de Camille de Traversi et d'A-
drien Bousquet.
Les Conférences
à 1er Université des Annales
M. MAURICE EMMANUEL NOUS DIT « COMMENT
IL FAUT INTERPJlEY-ER LES IMPRESSION'
NISTES » M. PAUL LOYONNET JOUE
LEURS OEUVRES
-,
Les Galas de Musique consacrés à l'inter-
prétation des chefs-d'œuvre du piano ont été
clôturés samedi par une causerie de M. Maurice
Emmanuel sur les Impressionnistes.
Le conférencier nous explique comment les
Impressionnistes ont été les premiers à symbo-
liser une idée, un sentiment qui, jusqu'ici, ne
semblaient pas transposables dans le domaine
de la musique. Parmi les modèles du genre, il
faut citer Debussy, qui a' été un véritable no-
vateur. Il a trouvé, en effet, des phrases, des
périphrases et des figures musicales inconnues
avant lui. tout en sachant garder le sens de la
mesure. Son goût l'a préservé des excès où nous
voyons tomber ses imitateurs.
Tandis que, depuis la Renaissance, la langue
musicale a toujours été très simple, nous voyons
apparaître, avec Debussy, une extension formi-
dable du langage sonore qui fait que le piano
devient un orchestre à lui tout seul. Il faut
que les mains se prodiguent et représentent à
la fois des groupes de sonorités qui prétendent
conserver toute leur activée pendant la durée
de la pièce.
Ce ci.-i caractérise la technique de Debussy,
c'est l'éparpillement sonore. Il aime aussi les
sons répétés auxquels il faut donner tout juste
la nuance d'effacement qu'ils appellent. On de-
vra aussi considérer les arpèges comme au-
tre chose que l'émiettement harmonique d'au-
trefois: c'est un dessin buriné avec un soin
jaloux qu'il faudra se garder d'escamoter.
En ce qui concerne les imitateurs de De-
bussy, M. Maurice Emmanuel constate l'exagé-
ration dans laquelle ils sont tombés. Il s'est
produit avec eux un phénomène de surenchère
qui fait que leur musique est quelquefois in-
fernale.
Le conférencier conseille en terminant de ne
pas faire preuye d'intolérance systématique à
l'égard des œuvres de Debussy, en n'admettant
uniquement que les compositions classiques et
post-classiques. La musique est un art essen-
tiellement ondoyan" et divers. Il faut être ac-
cueillant aux artistes qui lui ont fait parler un
langage nouveau.
M. Paul Loyonnet a ensuite, grâce à son ta-
lent, réconcilié avec les Impressionnistes leurs
adversaires les plus irréductibles, en nous
jouant quelques œuvres de Moussorgsky, De-
bussy, Granados, A. Casella, etc
Edouard REVERAND.
"Comœdia" chez les Etudiants
,
Aucune activité littéraire ou autre, du jour
oit elle se montre hardiment originale, ne laisse
étrangère l'Association Générale des Etudiants.
L'oeuvre de réforme, ou mieux de rénovation,
entreprise par leurs aînés, les Compagnons, ne
pouvait que trouver un bienveillant accueil chez
les Etudiants. Aussi était-ce dans la salle des
Fêtes de leur Maison qu'avait lieu, lundi der-
nier, sous la présidence de M. Cazamian, maî-
tre de conférences à la Sorbonne, une causeria
de M. Georges Duhamel sur l'Ecrivain et l'E-
vénement.
Dans une courte allocution, M. Pierre Cor-
bin, présiden-t de la Commission des Fêtes de
l'Association, -présenta aux Etudiants l'auteur
de la « Vie des Martyrs » et leur expliqua le
puissant intérêt qu'ils pouvaient avoir à enten-
dre un écrivain leur exposer lui-même le but
profondément humain, de son oeuvre et la gra-
titude qu'ils lui devaient d'être venu refaire
devant eux la genèse féconde de l'Idée.
M. Cazamian prit ensuite la parole. Il mar-
qua en traits énergiques la forte personnalité
du conférencier: sens précis des réalités, péné-
tration de l'Acte et de l'Idée. Ce dernier con-
cept est précisément le point de départ de l'oeu-
vre des Compagnons.
Et M. Duhamel commença alors sa conférence,
et dès les premiers mots l'auditoire fut conquis.
D'une voix aux tonalités nettes et effacées, M.
Duhamel nous exprima sa foi, la foi en sa mis-
sion, en celle de tout écrivain : se pénétrer de
l'événement, l'amener à soi, faire que les stro-
phes ou les périodes envolées, en soient direc-
tement inspirées, ou le préparent, que le poète
soit doublement l'homme: pour agir — pour
chanter les actes.
Puis le conférencier rechercha si beaucoup
d'écrivains avaient eu cette conception. Depuis
Aristote jusqu'à Voltaire et André Chénier, en
passant par Milton et Vauban, tous les écrivains
ont été des hommes d'action, participant à l'é-
vénement et payant leur geste de la disgrâce et
parfois de la vie: Il évoqua le souvenir de ces
admirables conducteurs d'hommes que furent
Hugo et Lamartine, qui ne craignirent pas d'a-
bandonner leur tour d'ivoire pour Je. corps à
corps avec l'événement. Mais, ajouta M. Duha-
mel, l'écrivain doit prendre garde d'éviter un
.écueil : l'asservissement à un parti. Il faut que
ce soit l'écrivain qui conseille, qui prêche, qui
conduise; il ne faut pas qu'il prostitue sa plume
à des pratiques auxquelles sa conscience reste
étrangère. En définitive, il faut qu'il pense ses
actions et qu'il « agisse ses pensées » et ainsi
son œuvre sera vraie, humaine, elle sera le
reflet des mille faces de la vie, ses espoirs, ses
désirs, ses haines et ses désespérances.
Cette conférence, qui fut interrompue ipar de
nombreux applaudissements, remporta le plus lé-
gitime succès. Il est d'un heureux augure pour
la prochaine conférence organisée par les Com-
pagnons le 15 décembre, et qui sera faite ipar
M. Jacques Copeau, récemment de retour de
New-York, ou il y dirigea avec tant d'intelli-
gence artistique, notre Théâtre Français.
RENÉ SÔZKOWSKI.
; PETITE CORRESPONDANCE
Un vieux lecteur. — La Société des Artistes
humoristes : président, M. Abel Faivre ; secré-
taire général, M. Louis Valllet, 46, rue des Mar-
tyrs ; la Société des Dessinateurs humoristes
(président M. J.-L. Forain) : secrétaire général,
M. M. Neumont, t, place du Calvaire.
Leconte (Rouen). — 1° Ce ténor ne chante
pas à la Gaîté; 2° Oui, nous ferons un concours
de ténors; 30 Ce rôle est joué dans cette tradi-
HOM à t'Opéra-Comique; 4° N'est pas profes-
seur au Conservatoire; 5° Nous avons un cor-
respondant à Rouen.
AU THÉATRE DE LA SCALA
-- i'~ - .r 1. '- .--;; r- "1
do
Le Coup de Jarnac
li - VaudeVille; en trois, actes, de MM, H. de Corsse et M. de Marsan
; JLe Coup de Jarnac est le type même du boi
waûdeville capable de déchaîner les rires d'une
'éalie prête à accepter toutes les conventions et
toutes les invraisemblances. Il y à là le fonc-
tionnaire timoré, contraint par des circonstances
fortuites de faire passer une chanteuse de café-
concert. jxjyr sa femme aux yeux des parents
(PILoto, Manuel? j
-I :
; :..
—
M. LURVILLÊf
(Fayot te)
Mie Paule M O RLY
tBobmcttej
M. Marcel SIMON
(Hl'.étiltlou)
M'te DEVIMEUR
(Ray monde)
M. QORBY
Lie c uni
Mme MILLER
Mme Ba,nafolli:»
M. PREVOST
(Le VicMnte)
provinciaux dont il escompte l'héritage ; il y
a le commandant de zouaves au tempérament
sattguin, l'ami dévoué qu'on charge de toutes
les besognes, l'amoureux berné, la bonne ridi-
cule, le chef de bureau gâteux et, même, la
petite femme honnête et sentimentale, enfin,
comme l'on dit vulgairement, toutes les herbes
de la Saint-Jean dont les effets sont assurés.
Mais il y a aussi plus et mieux : un grand
nombre de mots d'esprit dont plusieurs sont
d une finesse rare.
C'est une de ces œuvres qu'il ne faut pas
vouloir juger selon les principes habituels de
la critique et qu'on doit se contenter d'écouter
avec une âme simple et reposée.
7 Elles représentent un délassement agréable,
une détente heureuse. On y rit franchement,
sans arrière-pensée, car les auteurs les ont
écrites sans prétention, avec bonne humeur, en
s'amusant eux-mêmes.
Le Coup de Jarnac est enlevé avec un brio
magnifique, par une troupe excellente, dirigée
et soutenue par M. Marcel Simon, comédien
hors ligne qui sait être d'un comique irrésisti-
ble en évitant les exagérations. Mlle Paule' Mar-
ly a de la gaîté, du mouvement, M. Gorby est
un excellent acteur de composition. Mlle Pau-
line Carton une fantaisiste de tout premier ordre.
M. Jean Prévost force un peu, mais il doit
porter énormément sur le gros public ; M. Lur-
ville, plus fin, tire tous ses effets d'un grand
naturel ; Mme Henriette Miller silhouette une
amusante caricature ; M. Robert Bossis, trop
maniéré, abuse des gestes équivoques, mais il
ne manque pas d'une certaine aisance.
Enfin, nous avons applaudi avec infiniment de
plaisir Mme Léone Devimeur, une comédienne
adroite, distinguée, qui mériterait, et je puis
le dire en connaissance de caysç» d'être elIl.
ployégi;i>lus souvent ,.' -'-
Somme toute, excellente soirée et gros suc-
cès,, '-,;, J.-J. Fa:
La Soirée
On connaît l'histoire du Coup de Jarnac. Je
ne la rappelle ici qu'à l'usage des mémoires
fatiguées.
Le comte Henri de Gorsse et le marquis
Maurice de Marsan, s'étaient diéfiés en public.
L'affaire fit un brutt énorme, et toute la cour
et la ville en parlèrent pendant plusieurs se-
maines.
Le duel, que François Ier défendit, fut au-
torisé, commandé même par Hemri II, dès que
celui-ci monta sur le trône.
Cet Henri II, on le s,ait, était ébéniste ama-
teur et s'amusait à confectionner des salles à
manger et des bibliothèques en série ; on dit mê-
me que c'est à lui qu'on doit les vaudevilles à
tiroirs, qui sont, comme le nom l'indique, des
sortes de meubles comiques qui vont à tous
les théâtres. —
Le dueJ eut lieu le 10 juillet 1547, pour la
première fois. Il y eut plusieurs reprises, dont
la dernière est celle de la Scala, avant-hier soir
samedi.
Le Roi, Catherine de Médicis, ile marquis de
Cora, dit Jacques Richepin; Marie La Parcerie,
le bairon Ténot, Roland d'Orgelès, Robert d'Ieu-
donné, le marquis d'Armory, le vicomte Va-
irennes-de-Bonsoir, le, baron Germain de Petit-
café, le vicomte l'Andrin, le comte VatenHc
Tarault, et la comtesse, la baronne Marcel'
Simon, le duc Paz de Sitva, le comte Christs.
de Phi-Phi, et la comtesse, le vid'ame André
Warnod, le chevalier Bayard (de la Bette Fran-
ce.), le comte Pelpel, le marquis Brigon, te'
marquis Henriquez de Zubiria, les chevaliÊ^
Rivers, Simon Arbeito, BeUiard, André le Bret,
la jolie Jasmine, danser à la cour; ,'étrange
JVaritchu et la mousseuse CamiHe Cevat. ; co-.
médiennes ordinaires de Catherine de Médicis,
étaient sur les estrades.
Un concours 'immense de spectateurs, ma -
chands bourgeois,étudiants,qui tenaient,l-es ws
pour M. de Gorsse, les autres pou-r M. de M»r
san, ne dissimulaient point leur preference. .-
Les adversaires se présentèrent dans un ap-
pareil princli&r, escortés de leurs partts&ns, les
bretteurs Marcel Simon, Gorby, Lurvige, Ro-
bert Bossis; jean Prévost et de dames a lews.
couleurs, Paule Morly, Léone Devimeur, Hep-
riette Miller.
Vers ih-uït heures et demie du soir, les i
versai r es erutrent en lice. Un millier de
battent à l'unisson, un silence de mort pîlanej"*
la foule. Us s'abordent dans un choc f it,
et les coups se succèdent avec rapidité.
combat durait depuis qu'élues moments ~,
que Paule Morly, par une feinte d'une har^dies»
extrême, se découvrit entièrement et chanta >
chanson du Petit frère à Fernand. coupai le
.,ianret de ses adversaires du tranchant de sa.
voix. > ;,.'
A partir de ce moment, le combat fut gag^-
Le coup a été imprévu et décisif. h(>c
Et le peuple de Paris, fortement impres»^"1
né, rapporta de cette émouvante soirée, ce mot :
EHe a chanté, elle a vaincu : C'est le coup'
Jan'Marnac, qui tout de suite devint proverbe.
JEAN BASTIA.
Le Carnet des Lettres
et des Arts
LA COLLINE A SANCTIFIER.
La Douce France, adoptant un projet du doc-
teur Bosredon, propose que, soit installée aux
pentes du Mont-Valérien la grande nécropole
militaire destinée à recevoir les morts de la
guerre ensevelis à Paris.
« On conserverait la citadelle pour servir de
piédestal à ua Nkrwment aux Morts ; le Mont-
Valérien deviendrait un Panthéon militaire. Une
fois reçue cette destination funéraire, la butte
s'ajouterait aux collines saintes de Paris : Sainte-
Geneviève et Montmartre. »
Le Mont-Valérien retrouverait ainsi le rôle
de paix et de douceur qu'il avait avant que le
militaire n'y installât un fort. Car il portait
jadis ce nom : Coiline du Calvaire, que lui
avaient valu les multiples calvaires que l'abbé
Charpentier y avait élevés pendant la première
moitié du dix-septième siècle. Le coUVent du
Calvaire était un lieu de pèlerinage ; et ce n'est
qu'a pris 1830 qu'il recut des casernes, des ca-
semates. -
Je souhaite, avec la Douce France et le doc-
teur JBosredon, qu'on rende la butte du Mont-
Valérien à sa destination première ; au prin-
temps, le bataillon charmant des cerisiers en
fleurs qui escaladent ses pentes feront une douée
parure aux tombes des héros et, de loin. nous
saluerons en elle la mélancolique Colline du
Souvenir. -
J. VALMY-BAYSSE.
- Dans le numéro du 1er décembre du Mer-
càre,,de France, un curieux article de M. J.
Kessel, Le Bolchevisme à travers Dostoievsky ;
des poèmes de M. Guy-Charles Gros, mes évo-
cateurs; la fin du roman de M. Jacques-Emile
Blanche : La Jeunesse de Georges Aymeris, qui
nous initie à l'éducation sentimentale et artis-
tique d'un peintre aux environs de 1880, épo-
que d'art troublante, où l'impressionnisme, en
pleine effervescence, « piétinait » quoique peu
les plates-bandes de la tradition.
','-;' Dans l'Action d'Art du .5 décembre, un
article ému et vibrant de M. Marcel Say, sur
Laurent Tailhade ; des poèmes de MM. Marcel
Martinet et René Dessambre.
— 391. Un gros numéro sous une grande
mécanique dessinée par M. ^, Ribemont-Dessaignes
qui, en un article, nous révèle à propos du Sa-
lon d'Automne que c'est Napoléon qui fit le por-
trait de David. Et puis des proses de M. Tris-
tan Tzara, de M. Picabia. Et l'adresse du jour-
nal : Dépositoire Eugène Figuière. J'envoie
391 au Four crématoire. Tout de même.
Tout de même.
- M. Vassivière a fondé l'Anti-chapelle poé-
tique. On n'y récite que les poèmes inédits
ou non, véritablement rimés et rythmés, sans
aucune licence prosodique ou grammaticale. Le
poème est examiné par M. Vassivière, qui juge
de sa correction ; puis par un comité de lecture ;
puis. mais alors, qu'est-ce qu'une chapelle litté-
raire?
— Le Pierrot Montmartrois veut lancer des
« jeunes ». Alors, il ouvre un concours de
poésies (chansons et monologues). On vous ren-
seignera 9, rue de Valois: Montmartre décen-
tralise,
- L'Art et la Vie, qui reparaît à Genève,
consacre son premier ni^sro à M. Georges
Pitoëff, qui triomphe en ce moment au Théâtre
des Arts, dans la belle pièce de M. H.-R. Le-
normand. Ce cahier sera offert gracieusement
aux lecteurs de Comœdia qui en feront la de-
mande à l'Association des Ecrivains de langue
française, 1, chemin Sautter, Genève.
— Voici, à la Librairie des Lettres, le dernier
livre de M. J.-C. Holl: La Ville-Chimère. Il
est dédié à la « mémoire du poète Léon. Deubel,
que l'indifférence et la misère acculèrent au
suicide », et cette dédicace nous en dit déjà
beaucoup. Le style de M. J.-C. Holl est âpre
et s'adapte bien au sujet de son livre. Vous
avez deviné que La Villc-Chitnè?6, c'est r&
ris. Paris qui prend encore quelque choses-
Mais j'ai tu ce livre avec émotion. Et j al
pensé à Léon Deubel. et à Louis iPergaud..,,
un autre disparu qui avait été son ami.
— La petite Femme incolore trottine dans
livre que vient de faire paraître M. Daniel iftfl
che, à la Renaissance du Livre. Une .f cè-
de -petite femme, petitement contée. Une
tite femme incolore, d'apparence seulement, dit
le prière d'insérer. Je veux bien.
— Pathétique et vibrant, traversé de ce~
mélancolie dont Paul-Louis Garnier impregj1
toutes, ces œuvres, Lydia de Tunis nous arn »■
et remet en lumière la figure de ce fier écrlvatQ
trop tôt disparu. Librairie des Lettres
t— Ariane, ma Sœur. par M. Edouard Schnei,'
der, une œuvre poignante et douloureuse que
traverse une grande inquiétude sentimentate.
L'éte* rnelle contradiction amoureuse y est évo-
quée dans un style aux belles lignes. ti.
— Un prisonnier de guerre revient de capi1*
vité ; il ne trouve pas auprès de sa fem^
l'accueil qu'il espérait ; il connaît même t'in-
différence des foules. Et tout cela l'étonné
C'est l'histoire d'un homme et de beaucOUP
d'hommes : c'est Le Retour, par M. T. Tritby.
Librairie des Lettres.
— Jean, reste au Faubourg, par M. Roland
Charmy, avec une préface de M. Victor SneH-
Ce livre vivant, vibrant, s'ajoute aux réquisi-
toires contre l'enseignement actuel. Et comme
il arrive à son heure pour préserver du mirage
de la profession libérale les indécis, les insuffi-
samment armés. Renaissance du Livre.
f— L'Aube éperdue, de-M. J,.-Ch. Renaud, va
paraître : elle avait été annoncée pour octobre
1914. Retard causé par la guerre, nous dit 1 aU"
teur. ,,,: <
- Nous apprenons que notre confrère Albert j
du Moulin est chargé de la Soirée Iparisien'ite,'
ainsi que d'une partie de la critique (concerts,
music-halls, musique) au nouveau quotidien a"
soir, La Belle France.
— Deux médaillés de la Reconnaissance
tionale pourraient être accordées à Mlles Chris
tiane Dargyl et Marcelle Roselly qui, b durant:
les quatre années de guerre, ont inla i exiot
prêté leur concours à toutes les fêtes de CIIV
rite.
Aux approches de cette fin d'année il
n'y a certes point de trêve pour le monde
des musiciens. Tout au contraire, c'est à
qui, dt. nos associations symphoniques et
* parmi I-es virtuoses, incitera le mélomane à
;lui accorder ses préférences. Chacun d'eux,
à imitation du confiseur, roi du jour, con-
fectionne un programme fourré des plus al-
léchantes gourmandises. Et l'on n'a que
l'embarras du choix devant une telle abon-
dance de musique savoureuse, fondante ou
acidulée.
En dehors des concerts dominicaux à
grand orchestre, l'événement du jour est
sans conteste l'initiative prise par l'Office
Musica Français. Sous le titre de l' ,« Œu-
,vre Jn. dite », ont commencé à se dérouler
des m: lifestations au plus haut point inté-
re - ir>t ïs pour les jeunes compositeurs.
r -, x-c sont désormais assurés de pouvoir
faire ev tendre leurs œuvres de musique de
chambts, et la perspective même leur sou-
mit d'y sncontrer un éditeur bénévole.
La r ornière séance s'est déroulée avant*
hier 6: présence d'une.. affiuence, curieuse
et syn. aihique. EJlc comprenait des œu-
vres de MM. Igouw, Marc-David, Paul Fié-
vet, interprétés par Mme Jane Hatto et le
quatuor Robert Krettly, et une Sonate,
pour piano et violoncelle, de Joseph Bout-
nois, remarquablement traduite par Mme
Jane Boulnois et M. Gérard Hekking.
Le mouvement de l'Œuvre Inédite est
à encourager par nos mécènes. Puisse-t-il
grandir et se développer, de façon à per-
mettre dans un avenir prochain des exécu-
tions orchestrales et théâtrales aussi.
Quoique non inédit Wagner a si long-
temps disparu de l'affiche qu'il exerce un
attrait neuf sur beaucoup d'auditeurs. Le
Festival d'Art Musical, organisé au Troca-
déro samedi soir, avait donc attifé de nom-
breux fervents qui ne cachèrent point le
plaisir qu'ils y prirent. Leur enthousiasme
était même de si bonne trempe qu'il résista
à certains mouvements trop précipités pris
par M. Maurice Lévy d'une baguette un peu
nerveuse ---notamment dans Trîstan et
Yseult, puis dans L'Apprenti Sorcier.^ de
M. Paul Dukas. ;.
; Chez les spécialistes 4u clavier, lu y^'tir
tfée de Mme Jane Mortier va nous vaîoir
de belles moirées où précurseurs et moder-
nes bénéficieront d'une interprétation mu-
sicale et intelligente : son jeu n'a rien perdu
de sa fougue à la fois puissante et expres-
sive. Un très vif succès fêta sa séance
Inaugurale.
Si nous passons maintenant aux associa-
tions symphoniques, nous saluerons l'avè-
nement du romantisme dans les concerts
historiques du Cirque d'Hiver. M. Henry
Prunières l'intronisa jeudi en la personne de
Schubert et de Weber. Le premier n'était
représenté par aucun des lieder qui ont fait
sa popularité, tandis que le second triom-
pha par deux fois avec Le Freyschutz, C'est
plutôt comme symphoniste, avec des airs de
ballet de Rosamunde et sa fameuse Sym-
phonie inachevée, que Schubert a pris place
dans la galerie des Concerts Pasdeloup.
Du Chœur National Ukrainien qui se fit
entendre Ià, après avoir passé par la salle
Gaveau et le Théâtre-Lyrique, je ne dirai
rien que vous ne sachiez déjà. Sous la di-
rection de M. Koschitz, cet ensemble vocal
donne des Cantiques et Chansons populai-
res russes, une traduction admirable par la
discipline de la masse et la perfection des
nuances. Quand aurons-nous en France des
chœurs comparables à ceux-là? Heureuse-
ment que nous avons d'excellents chefs, et
M. Rhené-Baton entr'autres, qui réalisa. une
magistrale exécution des ouvertures de
Benvenuto Cellini et du Carnaval romain,
de Berlioz, ainsi que du poème Juventus, de
M. Victor de Sabata.
: Les Concerts Colonne ont été repris en
mains par M. Gabriel Pierné, retour d'Amsr
tendant. Sohumamn et Wagner encadraient
samedi une Fantaisie, Pastorale, de M.
Achille Philip. Ecrite sur deux idées, l'une
mélodique, l'autre rythmique, cette œuvre
développe suivant les procédés scolasti-
qùes. Le dimanche du Châtelet était ré-
servé aux fresques sonores. Les Béatitudes,
de Franck; la scène des Filles-Fleurs de
Parsi/al, de Wagner, et les tableaux de
rAmouir et d'e t'Incendie du Chant de la
Cloche, de M. Vincent d'Indy, fUIrent ma-
gnifiquement rendus par les masses voca-
les et instrumentales que M. Gabriel Pics-ne
dirigea avec sa maîtrise accoutumée, et aux-
quelles s'adjoignaient ces sotistes 'réputés:,
Mmres Auguez de Montalant, Gampredon,
MM. Laffitte, Huberty. Winkopp.
C'est Mme Jeanne Montjovet qui eut les
honneurs de l'affiche des Concerts Lamou-
reux. Elle phnasa avec son goût accoutumé
Stella, poème lyrique d'Henri Lutz. Mais
la pureté de son style et la perfection de
sa technique resplendissent dans le classi-
que. L'air Auprès de toi, de Bach, et un air
du, Don Juan, de Mozart, furent pour Mme
Momtjovet une occasion nouvelle de faire
apptaudi'r ses très remarquables qualités de
cantatrice. *
: Le programme comprenait en outre trois
ouvrages la Symphonie, de Franck; Slléhé-
razade, de Rimsky-Korsakow, et la pre-
mière audition de La Basilique aux Vain-
queurs, fragment du Meneur de Louves.
Mon ami et collaborateur, M. Louis Laloy,
vous donnera son impression sur ce tableau
symphonique. Mais auparavant, qu'il soit
permis au critique d'adresser ici à M. Ca-
mille Chevilland et à l'orchestre des Con-
certs Lamoureux les remerciements du com-
ppsiteur..
: -,. JEAN POUEIGH.
C'est une page fort intéressante du Me-
neur de Louves que M. CheviUard vient de
conduire, selon sa coutume, magistrale-
ment, à son concert d'hier. Ce drame lyri-
que, qui devait être joué au théâtre de la
Monnaie de Bruxeiîes quand U. guerre est
auirvenue, a été inspiré à M. Jean Poueigh
par le beau roman mérovingien de Mme
Rachilde, dont le librettiste, M. Hortola,
a respecté non seulement la couleur, les
mœurs farouches et la trouèle violence,
mais aussi le style, et partout où ce fut
possible, les mots eux-mêmes. Le sujet était
bien digne de séduire un musicien, de goût.
La figure de Basine est Tune des plus at-
tachantes que la fiction ait jamais conçues,
car cette vierge profanée demeure pure en
esprit et en volonté. Le médite d'un ange
est accompli par le péché. Elle a horreur
du mal, parce qu'elle en a subi répreuve
et le tourment. Mais l'amour guérirait son
imagination malade des souvenirs odieux
qui l'obsèdent, et la rendrait docile à la
saine loi de nature, sans l'opposition de sa
cousine Ohrooielde, qui n'a reçu en don
que l'âme inférieure, celle que l'instinct
domine sans partage. Toutes deux aimeront
le meneur de louves, le pâtre Harog, et la
jalousie fera son œuvre meurtrière. D'où
une suite de scènes où les sentiments les
Plus tentateurs se disputent ces cœurs dou-
loureux.
Le morceau que nous avons entendu,
bien que lié au drame; a plutôt un carac-
tère descriptif. Les compagnons d'Harog,
appelés à l'aide par Basirie, se sont empa-
rés diu coufvent ou eMe fut enfermée» et
festoient dans là basilique. Leur joie s'exalte
eu xythmca toms; et je loae®ai.pjstfkHiÛfcàk.-
ment l'heureux choix des thèmes, qui, sans
être empruntés à la tradition populaire, Y.,
sont fidèles cependant par l'accent et la cft"
dence, ainsi que le coloris bien tranché de
l'orchestre. C'est une musique née du so"
et dont la rusticité savoureuse a le goût
terroir.
C'est d'ailieurs une excellente codttitue'
que de donner au concert des fragment
d'œuvres scéniques, dont la com;préhensiot1''
le jour où elles paraissent au théâtre daOSi
la complexité de l'action^ et du speots^^
se trouve ainsi Wilitée.
M. Gabriel Pierné, parti pour da-utfe5
rivages, avait cédé sa baguette, à son ava^
dernier concert, à M. Mengeltberg. Rien °'
plus instructif que ces échanges. C'est aij^
que nous avons pu constater que l'MtlufiiWy
chef hollandais dirige la Symphonie héroi
que avec une pondération bien éloignée d'a
la fougue die nos maîtres de l'orcShes^®'
qui gardent ta tradition romantique de 14$1
beneek. Les deux interprétations sont
lement légitimes, un tel chef-d'œuvre
nissant en soi les caractères opposes et rc;¡rll"
plissant, selon le mot de Pascal, tout 1'#**
tre-deux. C'est un autre aspect■. moins
mi lier, qui nous en fut montré. Par cont-re,
nul doute n'était possible sur les
de Liszt, dont la radieuse abondance et »
deur généreuse furent mises en valeur afJ
une éloquence entrainante. M. MengeltJef:
sait, sans gestes superflus, détacher^
phrase. la soutenir et ta mener
jusqu'à sa conclusion. C'est un grand
liste*. ;. •.
L ", ."::,, Inouïs
*
7 , • , : - .- ..- • ■
•••-
22*12* J9
ne#x qui $9 soutiennent 'd'tvôjf vu Fij^êre &*-
p\v «ans l^ongyeyiile de la C<~~ l'et exa~
renient retrouvé, encore ffu# fftfëJSfl, dans, Ftl-
gère junior. Aulgl, jfiUI flff * double .bU:
ment de vénératicm pttg&lRHe it de ptêêeftft
«àwèîiiôit, lisâèeuêiil(<"«nt-iis, des qu'il êût- mis
te M~t sur %eè»ev par la triple salve
04s-e,pfflka •r^fVée d'ordinaire à. l'usage des
rois. Qui nteraft, après cela, le prestige du
nom ?
Toise la salle, vibrante, s'absocia frénétique-
ment à l'hommage, des anciens. Et ce fut un
spectacle très émouvant. - -- • -
Jean Bastia, annuaire vivant, m'arrête et me
reproche mon erreur.. Le Longuevills accueilli
par le public avec ces marques de respectueux
enthousiasme, ne serait autre que le Fugère
d'antan, celui de la chanson de la Sauge du
jongleur de Notre-Dame. Il est plus que septua-
génaire, et ses huit dernières années se sent
passées daais la retraite. Le sujet d'étonnemsnt,
le voilà, jeunesse éternelle des vrais grands
artistes. L'entière possession de leur métier et
i'eur foi les rendent invulnérables aux atteintes
de l'âge. La virtuosité accomplie persiste au-
tant que le cerveau qui l'a façonnée. La maî-
trise n'est pas tant dominée par les artères
et par le muscle que par le coeur et par l'in-
telligence. Aujourd'hui seulement, nous déce-
lons à quel point le talent de Fugère était ex-
traordinaire. Trissé dans scn air du 3e acte,.,
le chanteur, malgré son émotion et sa fatigua,
sut trouver chaque fois l'émission qui conve-
nait à son état physique, et l'acteur varier son
jeu aj gré de son inimitable fantaisie.
Cette variété de moyens devrait-elle nous sur-
prendre? Habitué à voir !e comédien, quels
que soient l'atmosphère, l'ambiance et le mo-
ment. figé dans son geste, immuable dan3 son
interprétation, immobile dans la tradition, le
spectateur s'étonne d'une si riche spontanéité.
Apprenons plutôt, par cet exemple, à quoi sert
la technique : non pas à stéréotyper la forme,
mais à mettre l'artiste au-dessus de toutes les
contingences.
L?. réapparition de kjicien Fugère sur la scène
est, en même temps qu'une sorte de miracle,
un enseignement de premier ordre que les jeu-
nes ne négligeront pas.
Pour ses débuts. Mlle Réville s'est, en un
mot, imposée. Elle a, déjà, de "l'aisance et de
l'autorité. Sa tâche était lourde; elle s'en est
acquittée sans faiblir. Agréable à regarder, pas
maladroite dans l'action, même par comparai-
son avec ses habiles partenaires, possédant en
outre une certaine rouerie vocale, non sans
analogie avec celle de tel ménage de chanteurs
bien connus, elle paraît solidement armée pour
l'avenir. Elle pourra, je suppose, réussir, sur-
tout si elle a la précieuse sagesse de concevoir
ce qui lui reste à apprendre et de perfectionner
quelques détails.
Or, au premier contact, il semblerait que sa
voix n'eût pas encore obtenu toute l'homo-
généité désirable. Elle se scinde, cette voix, en
trois compartiments trop caractérisés: grave et
médium, où çlle manquerait vite d'éclat et de
portée; tessiture moyenne, où elle est déli-
cieuse ; aigu, dans lequel elle resterait en géné-
ral un peu verte. Ce n'est là, répétons-le, qu'une
impression première, qui ne tient d'ailleurs
pas compte des facteurs d'appréhension et d'inex-
périence théâtrale, et que Mlle Réville tibus
contraindra probablement à corriger, dès la pro-
chaîne rencontre. L'épreuve a été pleinement
favorable et le succès de cette artis'e fut très
vif *
J'ai déjà parlé plusieurs fois de Mlle Favart,
que te n'aurais pas, du reste, l'outrecuidance
de juger. Gracieuse, .mutine,, charmante comé-
dienne et diseuse experte, nous la retrouvons
ici tout entière avec ses innombrables supério-
rités, et aussi* avec ces inégalités vocales qui
constituent elles-mêmes une. partie de son at-
trayante personnalité.
M. -Pujol, victime d'un fâcheux enrouement,
arriva jïért&Iement jusqu'à la fin de. son rôle.
Accident dont il serait souverainement injuste
de lui faire grief. Le public, et c'est son droit,
juge sur le résultat. Il n'a pas à tenir compte
des embûches semées par la mauvaise saison
sur le chemin des chanteurs. Il vient au spec-
tacle non pour s'exercer à l'indulgence, mais
pour y prendre de la satisfaction. Toutefois, M.
Pujol est trop légitimement estimé des habitués
olairvoyaflfs de t'Opéra-Comique pour ternir son
excellente réputation à cause d'une conjoncture
visiblement indépendante de sa volonté. Pour
èma part, le reste sur le jugement favorable que
je pffluis: dernièrement sur lui.
M. Azéma. sujet utile entre tous, campa épi-
sodiquement un Louis XII de belle allure.
M. Baugé rend, lui aussi. salle Favart, les
plus estimables services. Quoi .qu'il soit de mes
amis, l'ai, par un scrupule -peut-être excessif,
attendu jusqu'ici,- persuadé que j'en trouverais
l'occasion, pour lui .accorder dans ces colon-
nes une place prépondérante. L'occasion, il nous
l'a amptement fournie. Son interprétation du
rôle de Ctériient Marot ne fut rien moins qu:une
sorte de révélation. A mon avis, il s'y est élevé
d'»^e dasse et y a définitivement trouvé son
aSSJette, Une belje voik, suffisamment volumi-
neuse, bien timbrée, conduite avec un art sou-
ple et ttne méthode sévère; des effets hon-
nêtes et d'autant plus frappants; un bon-
igarçofifiêsme élégant et sobre, .une franche al-
lure: telles sont les vertus essentielles qui lui
conquireuf. à juste titre, l'unanime suffrage. Je
crois que, s'il acquérait encore, dans son jeu,
une simplicité plus large, plus personnelle, avec
un pets plus de fantaisie, il arriverait sans
peine à gravir les cimes auxquelles il est fondé"
à aspire**. - *
* Bref, ovation générale, et pour les interpré-
tés et pour leurs .auteurs.
RAYMOND CHARPENTIER.
-ON ÉCRIT
.Mon cher Comœdia,
Strasboéwg voit Malikoko, roi nègre défiler
triomphalement au "Châtelet; pendant que notre'
opérette Gai, gai, marions-nous attend les feux
de la rampe.
Le troisième acte de notre ouvrage se passe
également à StrasbÕurg, le )our.d3 l'entrée des
également à Strasbourg, le jour; de l'entrée des
troupes françaises.
Nous avouons avoir pris cette idée dans fe
dénouement'd'une teagédie signée Foch. ac-
clamée. et comment!
Maury NICOL et F. MASSON.
NOVATEURS, A VOS PIECESl
f
■ * s :
M. A. Séché, *.
i nouveau lecteur
de la Comédie=Française
remplace M. Blavet
OU L'ON VOIT EXPLIQUER COMMENT UN CRI-
TIQUE LITTERAIRE POURRAIT DEVENIR
.,- DIRECTEUR DE THEATRE -- -'
- Un destin malicieux, nous dit M. Séché,
m'a toujours poussé vers Je théâtre malgré
!.Photo A-bel),.
M. Alphonse SECHE
moi. Que grâces .lui soient rendues, car je n'eus
jamais qu'à m'en louer! J'ai hasardé mes pre-
miers vagissements, à Nantes, un jour de foire,
entre un coup de grosse caisse et un boniment
de Paillasse ! Mon horoscope était ainsi facile
à tirer: En 1902, sans avoir rien cherché, re-
tenu par mes travaux critiques, je reçois des
mains de More!, Romain Rolland, George Bizet,
Gabriel Trarieux, la Revue d'Art dramatique,
dont je conserve avec Rolland la direction
« Jules Bertaut me propose d'écrire avec
lui L'Evolution du Théâtre contemporain. Nou-
veau pas dans le temple de Melpomène. Je re-
tourne à mes travaux. Troisième intervention
du destin malicieux: fondation du Nouveau
Théâtre d'Art que Payen, Souchon, Lenormand
et Alfred Mortier me lègtrent. J'y joue Lenor-
mand à ses débuts et nombre d'oeuvres d'avant-
garde: Une des dernières pièces représentées :
Un Sans-Patrie, écrite en collaboration avec Ju-
les Bertaut (publiée par Comœdi;¡¡) et jouée
par Durée et Nady Berry, qui interprète aujour-
d'huUMme en Folie.
« La guerre survient et le destin malicieux
me guette toujours.- Emile Fabre me fait appe-
ler et me charge .du Théâtre aux Armées, que
nous mettons debout, lui et moi, ce qui fait
penser M. DaHmier à le rattacher ensuite aux
Beaux-Arts j'étais ainsi devenu un familier de la
Comédie,et durant deux ails.. Feus l!ûccasion,jus-
qu'à son retour, de suppléer M. Georges Ri-
cou, au secrétariat général. C'est ainsi que,
tout naturellement sans doute, je fus appelé à
remplacer, comme lecteur, M. Blavet, qui sou-
haitait prendre sa retraite.
« Entre temps, grâce à l'amitié de Romain
Coolus, M. Antoine Bannès me pria d'organiser
les représentations des Trente Ans de Théâtre.
J'ai gardé pour la fin le meilleur. Ce destin
malicieux déjià nommé, me fit rencontrer à la
Comédie-Française Mlle Andrée de Ghauveron,
que j'eus le plaisir d'épouser. Ce destin mali-
cieux lut donc mon bon génie. Qui sait, peut-être
finirai-je un jour dans la peau d'un directeur
de théâtre, après avoir abandonné la critique?
— Henry Becque, avec son âpre-té coutu-
mière, affirme dans ses Souvenirs que. les lee-
teurs du Théâtre Français ne sont là que pour
en fermer les portes, -et.
— Je ne m'illusionne pas sur mon autorité
de lecteur; mais nous pouvons rendre service
aux jeunes auteurs. Je m'y efforcerai de mon
mieux. Sans doute, le nombre des pièces déjà
reçues et à jouer nous impose d'être très sé-
vères. Mais la hardiesse et le talent forcent
toutes les pontes,-et je serai heureux-d'avoir à
signaler au Comité les œuvres neuves, hautes
ou curieuses que j'aurai la bonne fortune de dé-
couvrir. A. L.
ÇA LA
Jeudi 25 décembre, chez Mme Aurel, Royère
portera de Guy Lavaud ; Suzanne Delvé, José
Roland, diront les poèmes ; Renée du Minil dira
le,Reliquaire, de Verlaine.
Décentralisation artistique. — Notre confrère
Irénée Mauget prend la di/reotion de la Salle des
Fêtes de Baulogne-sur-Seine. pour y donner des
représentations classiquifes et y Fat'-ife d importan-
tes créations. If ouvre samedi avec Le Médecin
malgré lai, joué par M. Adet. /Ville Yvonne Ga-
baroche chantera de Vieux Noëls et ses chan-
sons anciennes. Jeudi, M. Ricou fera une confé-
rence sur les airs célèbres d'opéra comique, et
Mlle Musidora jouera une pièce inédite. M, Mau-
get melt à l'étude une œuvre nouvelle en trois
actes, de M. Auguste Villeroy.
Le théâtre du Tristnon Dramatique est fondé
pour permettre aux jeunes artistes et aux jeunes
auteur de se produire, de se faire apprécier, en
leur offrant, par ses représentations, de lutter
contre la décadence de notre art dramatique.
Le Trianon dramatique débutera par La Favo-
risée, trois actes de Camille de Traversi et d'A-
drien Bousquet.
Les Conférences
à 1er Université des Annales
M. MAURICE EMMANUEL NOUS DIT « COMMENT
IL FAUT INTERPJlEY-ER LES IMPRESSION'
NISTES » M. PAUL LOYONNET JOUE
LEURS OEUVRES
-,
Les Galas de Musique consacrés à l'inter-
prétation des chefs-d'œuvre du piano ont été
clôturés samedi par une causerie de M. Maurice
Emmanuel sur les Impressionnistes.
Le conférencier nous explique comment les
Impressionnistes ont été les premiers à symbo-
liser une idée, un sentiment qui, jusqu'ici, ne
semblaient pas transposables dans le domaine
de la musique. Parmi les modèles du genre, il
faut citer Debussy, qui a' été un véritable no-
vateur. Il a trouvé, en effet, des phrases, des
périphrases et des figures musicales inconnues
avant lui. tout en sachant garder le sens de la
mesure. Son goût l'a préservé des excès où nous
voyons tomber ses imitateurs.
Tandis que, depuis la Renaissance, la langue
musicale a toujours été très simple, nous voyons
apparaître, avec Debussy, une extension formi-
dable du langage sonore qui fait que le piano
devient un orchestre à lui tout seul. Il faut
que les mains se prodiguent et représentent à
la fois des groupes de sonorités qui prétendent
conserver toute leur activée pendant la durée
de la pièce.
Ce ci.-i caractérise la technique de Debussy,
c'est l'éparpillement sonore. Il aime aussi les
sons répétés auxquels il faut donner tout juste
la nuance d'effacement qu'ils appellent. On de-
vra aussi considérer les arpèges comme au-
tre chose que l'émiettement harmonique d'au-
trefois: c'est un dessin buriné avec un soin
jaloux qu'il faudra se garder d'escamoter.
En ce qui concerne les imitateurs de De-
bussy, M. Maurice Emmanuel constate l'exagé-
ration dans laquelle ils sont tombés. Il s'est
produit avec eux un phénomène de surenchère
qui fait que leur musique est quelquefois in-
fernale.
Le conférencier conseille en terminant de ne
pas faire preuye d'intolérance systématique à
l'égard des œuvres de Debussy, en n'admettant
uniquement que les compositions classiques et
post-classiques. La musique est un art essen-
tiellement ondoyan" et divers. Il faut être ac-
cueillant aux artistes qui lui ont fait parler un
langage nouveau.
M. Paul Loyonnet a ensuite, grâce à son ta-
lent, réconcilié avec les Impressionnistes leurs
adversaires les plus irréductibles, en nous
jouant quelques œuvres de Moussorgsky, De-
bussy, Granados, A. Casella, etc
Edouard REVERAND.
"Comœdia" chez les Etudiants
,
Aucune activité littéraire ou autre, du jour
oit elle se montre hardiment originale, ne laisse
étrangère l'Association Générale des Etudiants.
L'oeuvre de réforme, ou mieux de rénovation,
entreprise par leurs aînés, les Compagnons, ne
pouvait que trouver un bienveillant accueil chez
les Etudiants. Aussi était-ce dans la salle des
Fêtes de leur Maison qu'avait lieu, lundi der-
nier, sous la présidence de M. Cazamian, maî-
tre de conférences à la Sorbonne, une causeria
de M. Georges Duhamel sur l'Ecrivain et l'E-
vénement.
Dans une courte allocution, M. Pierre Cor-
bin, présiden-t de la Commission des Fêtes de
l'Association, -présenta aux Etudiants l'auteur
de la « Vie des Martyrs » et leur expliqua le
puissant intérêt qu'ils pouvaient avoir à enten-
dre un écrivain leur exposer lui-même le but
profondément humain, de son oeuvre et la gra-
titude qu'ils lui devaient d'être venu refaire
devant eux la genèse féconde de l'Idée.
M. Cazamian prit ensuite la parole. Il mar-
qua en traits énergiques la forte personnalité
du conférencier: sens précis des réalités, péné-
tration de l'Acte et de l'Idée. Ce dernier con-
cept est précisément le point de départ de l'oeu-
vre des Compagnons.
Et M. Duhamel commença alors sa conférence,
et dès les premiers mots l'auditoire fut conquis.
D'une voix aux tonalités nettes et effacées, M.
Duhamel nous exprima sa foi, la foi en sa mis-
sion, en celle de tout écrivain : se pénétrer de
l'événement, l'amener à soi, faire que les stro-
phes ou les périodes envolées, en soient direc-
tement inspirées, ou le préparent, que le poète
soit doublement l'homme: pour agir — pour
chanter les actes.
Puis le conférencier rechercha si beaucoup
d'écrivains avaient eu cette conception. Depuis
Aristote jusqu'à Voltaire et André Chénier, en
passant par Milton et Vauban, tous les écrivains
ont été des hommes d'action, participant à l'é-
vénement et payant leur geste de la disgrâce et
parfois de la vie: Il évoqua le souvenir de ces
admirables conducteurs d'hommes que furent
Hugo et Lamartine, qui ne craignirent pas d'a-
bandonner leur tour d'ivoire pour Je. corps à
corps avec l'événement. Mais, ajouta M. Duha-
mel, l'écrivain doit prendre garde d'éviter un
.écueil : l'asservissement à un parti. Il faut que
ce soit l'écrivain qui conseille, qui prêche, qui
conduise; il ne faut pas qu'il prostitue sa plume
à des pratiques auxquelles sa conscience reste
étrangère. En définitive, il faut qu'il pense ses
actions et qu'il « agisse ses pensées » et ainsi
son œuvre sera vraie, humaine, elle sera le
reflet des mille faces de la vie, ses espoirs, ses
désirs, ses haines et ses désespérances.
Cette conférence, qui fut interrompue ipar de
nombreux applaudissements, remporta le plus lé-
gitime succès. Il est d'un heureux augure pour
la prochaine conférence organisée par les Com-
pagnons le 15 décembre, et qui sera faite ipar
M. Jacques Copeau, récemment de retour de
New-York, ou il y dirigea avec tant d'intelli-
gence artistique, notre Théâtre Français.
RENÉ SÔZKOWSKI.
; PETITE CORRESPONDANCE
Un vieux lecteur. — La Société des Artistes
humoristes : président, M. Abel Faivre ; secré-
taire général, M. Louis Valllet, 46, rue des Mar-
tyrs ; la Société des Dessinateurs humoristes
(président M. J.-L. Forain) : secrétaire général,
M. M. Neumont, t, place du Calvaire.
Leconte (Rouen). — 1° Ce ténor ne chante
pas à la Gaîté; 2° Oui, nous ferons un concours
de ténors; 30 Ce rôle est joué dans cette tradi-
HOM à t'Opéra-Comique; 4° N'est pas profes-
seur au Conservatoire; 5° Nous avons un cor-
respondant à Rouen.
AU THÉATRE DE LA SCALA
-- i'~ - .r 1. '- .--;; r- "1
do
Le Coup de Jarnac
li - VaudeVille; en trois, actes, de MM, H. de Corsse et M. de Marsan
; JLe Coup de Jarnac est le type même du boi
waûdeville capable de déchaîner les rires d'une
'éalie prête à accepter toutes les conventions et
toutes les invraisemblances. Il y à là le fonc-
tionnaire timoré, contraint par des circonstances
fortuites de faire passer une chanteuse de café-
concert. jxjyr sa femme aux yeux des parents
(PILoto, Manuel? j
-I :
; :..
—
M. LURVILLÊf
(Fayot te)
Mie Paule M O RLY
tBobmcttej
M. Marcel SIMON
(Hl'.étiltlou)
M'te DEVIMEUR
(Ray monde)
M. QORBY
Lie c uni
Mme MILLER
Mme Ba,nafolli:»
M. PREVOST
(Le VicMnte)
provinciaux dont il escompte l'héritage ; il y
a le commandant de zouaves au tempérament
sattguin, l'ami dévoué qu'on charge de toutes
les besognes, l'amoureux berné, la bonne ridi-
cule, le chef de bureau gâteux et, même, la
petite femme honnête et sentimentale, enfin,
comme l'on dit vulgairement, toutes les herbes
de la Saint-Jean dont les effets sont assurés.
Mais il y a aussi plus et mieux : un grand
nombre de mots d'esprit dont plusieurs sont
d une finesse rare.
C'est une de ces œuvres qu'il ne faut pas
vouloir juger selon les principes habituels de
la critique et qu'on doit se contenter d'écouter
avec une âme simple et reposée.
7 Elles représentent un délassement agréable,
une détente heureuse. On y rit franchement,
sans arrière-pensée, car les auteurs les ont
écrites sans prétention, avec bonne humeur, en
s'amusant eux-mêmes.
Le Coup de Jarnac est enlevé avec un brio
magnifique, par une troupe excellente, dirigée
et soutenue par M. Marcel Simon, comédien
hors ligne qui sait être d'un comique irrésisti-
ble en évitant les exagérations. Mlle Paule' Mar-
ly a de la gaîté, du mouvement, M. Gorby est
un excellent acteur de composition. Mlle Pau-
line Carton une fantaisiste de tout premier ordre.
M. Jean Prévost force un peu, mais il doit
porter énormément sur le gros public ; M. Lur-
ville, plus fin, tire tous ses effets d'un grand
naturel ; Mme Henriette Miller silhouette une
amusante caricature ; M. Robert Bossis, trop
maniéré, abuse des gestes équivoques, mais il
ne manque pas d'une certaine aisance.
Enfin, nous avons applaudi avec infiniment de
plaisir Mme Léone Devimeur, une comédienne
adroite, distinguée, qui mériterait, et je puis
le dire en connaissance de caysç» d'être elIl.
ployégi;i>lus souvent ,.' -'-
Somme toute, excellente soirée et gros suc-
cès,, '-,;, J.-J. Fa:
La Soirée
On connaît l'histoire du Coup de Jarnac. Je
ne la rappelle ici qu'à l'usage des mémoires
fatiguées.
Le comte Henri de Gorsse et le marquis
Maurice de Marsan, s'étaient diéfiés en public.
L'affaire fit un brutt énorme, et toute la cour
et la ville en parlèrent pendant plusieurs se-
maines.
Le duel, que François Ier défendit, fut au-
torisé, commandé même par Hemri II, dès que
celui-ci monta sur le trône.
Cet Henri II, on le s,ait, était ébéniste ama-
teur et s'amusait à confectionner des salles à
manger et des bibliothèques en série ; on dit mê-
me que c'est à lui qu'on doit les vaudevilles à
tiroirs, qui sont, comme le nom l'indique, des
sortes de meubles comiques qui vont à tous
les théâtres. —
Le dueJ eut lieu le 10 juillet 1547, pour la
première fois. Il y eut plusieurs reprises, dont
la dernière est celle de la Scala, avant-hier soir
samedi.
Le Roi, Catherine de Médicis, ile marquis de
Cora, dit Jacques Richepin; Marie La Parcerie,
le bairon Ténot, Roland d'Orgelès, Robert d'Ieu-
donné, le marquis d'Armory, le vicomte Va-
irennes-de-Bonsoir, le, baron Germain de Petit-
café, le vicomte l'Andrin, le comte VatenHc
Tarault, et la comtesse, la baronne Marcel'
Simon, le duc Paz de Sitva, le comte Christs.
de Phi-Phi, et la comtesse, le vid'ame André
Warnod, le chevalier Bayard (de la Bette Fran-
ce.), le comte Pelpel, le marquis Brigon, te'
marquis Henriquez de Zubiria, les chevaliÊ^
Rivers, Simon Arbeito, BeUiard, André le Bret,
la jolie Jasmine, danser à la cour; ,'étrange
JVaritchu et la mousseuse CamiHe Cevat. ; co-.
médiennes ordinaires de Catherine de Médicis,
étaient sur les estrades.
Un concours 'immense de spectateurs, ma -
chands bourgeois,étudiants,qui tenaient,l-es ws
pour M. de Gorsse, les autres pou-r M. de M»r
san, ne dissimulaient point leur preference. .-
Les adversaires se présentèrent dans un ap-
pareil princli&r, escortés de leurs partts&ns, les
bretteurs Marcel Simon, Gorby, Lurvige, Ro-
bert Bossis; jean Prévost et de dames a lews.
couleurs, Paule Morly, Léone Devimeur, Hep-
riette Miller.
Vers ih-uït heures et demie du soir, les i
versai r es erutrent en lice. Un millier de
battent à l'unisson, un silence de mort pîlanej"*
la foule. Us s'abordent dans un choc f it,
et les coups se succèdent avec rapidité.
combat durait depuis qu'élues moments ~,
que Paule Morly, par une feinte d'une har^dies»
extrême, se découvrit entièrement et chanta >
chanson du Petit frère à Fernand. coupai le
.,ianret de ses adversaires du tranchant de sa.
voix. > ;,.'
A partir de ce moment, le combat fut gag^-
Le coup a été imprévu et décisif. h(>c
Et le peuple de Paris, fortement impres»^"1
né, rapporta de cette émouvante soirée, ce mot :
EHe a chanté, elle a vaincu : C'est le coup'
Jan'Marnac, qui tout de suite devint proverbe.
JEAN BASTIA.
Le Carnet des Lettres
et des Arts
LA COLLINE A SANCTIFIER.
La Douce France, adoptant un projet du doc-
teur Bosredon, propose que, soit installée aux
pentes du Mont-Valérien la grande nécropole
militaire destinée à recevoir les morts de la
guerre ensevelis à Paris.
« On conserverait la citadelle pour servir de
piédestal à ua Nkrwment aux Morts ; le Mont-
Valérien deviendrait un Panthéon militaire. Une
fois reçue cette destination funéraire, la butte
s'ajouterait aux collines saintes de Paris : Sainte-
Geneviève et Montmartre. »
Le Mont-Valérien retrouverait ainsi le rôle
de paix et de douceur qu'il avait avant que le
militaire n'y installât un fort. Car il portait
jadis ce nom : Coiline du Calvaire, que lui
avaient valu les multiples calvaires que l'abbé
Charpentier y avait élevés pendant la première
moitié du dix-septième siècle. Le coUVent du
Calvaire était un lieu de pèlerinage ; et ce n'est
qu'a pris 1830 qu'il recut des casernes, des ca-
semates. -
Je souhaite, avec la Douce France et le doc-
teur JBosredon, qu'on rende la butte du Mont-
Valérien à sa destination première ; au prin-
temps, le bataillon charmant des cerisiers en
fleurs qui escaladent ses pentes feront une douée
parure aux tombes des héros et, de loin. nous
saluerons en elle la mélancolique Colline du
Souvenir. -
J. VALMY-BAYSSE.
- Dans le numéro du 1er décembre du Mer-
càre,,de France, un curieux article de M. J.
Kessel, Le Bolchevisme à travers Dostoievsky ;
des poèmes de M. Guy-Charles Gros, mes évo-
cateurs; la fin du roman de M. Jacques-Emile
Blanche : La Jeunesse de Georges Aymeris, qui
nous initie à l'éducation sentimentale et artis-
tique d'un peintre aux environs de 1880, épo-
que d'art troublante, où l'impressionnisme, en
pleine effervescence, « piétinait » quoique peu
les plates-bandes de la tradition.
','-;' Dans l'Action d'Art du .5 décembre, un
article ému et vibrant de M. Marcel Say, sur
Laurent Tailhade ; des poèmes de MM. Marcel
Martinet et René Dessambre.
— 391. Un gros numéro sous une grande
mécanique dessinée par M. ^, Ribemont-Dessaignes
qui, en un article, nous révèle à propos du Sa-
lon d'Automne que c'est Napoléon qui fit le por-
trait de David. Et puis des proses de M. Tris-
tan Tzara, de M. Picabia. Et l'adresse du jour-
nal : Dépositoire Eugène Figuière. J'envoie
391 au Four crématoire. Tout de même.
Tout de même.
- M. Vassivière a fondé l'Anti-chapelle poé-
tique. On n'y récite que les poèmes inédits
ou non, véritablement rimés et rythmés, sans
aucune licence prosodique ou grammaticale. Le
poème est examiné par M. Vassivière, qui juge
de sa correction ; puis par un comité de lecture ;
puis. mais alors, qu'est-ce qu'une chapelle litté-
raire?
— Le Pierrot Montmartrois veut lancer des
« jeunes ». Alors, il ouvre un concours de
poésies (chansons et monologues). On vous ren-
seignera 9, rue de Valois: Montmartre décen-
tralise,
- L'Art et la Vie, qui reparaît à Genève,
consacre son premier ni^sro à M. Georges
Pitoëff, qui triomphe en ce moment au Théâtre
des Arts, dans la belle pièce de M. H.-R. Le-
normand. Ce cahier sera offert gracieusement
aux lecteurs de Comœdia qui en feront la de-
mande à l'Association des Ecrivains de langue
française, 1, chemin Sautter, Genève.
— Voici, à la Librairie des Lettres, le dernier
livre de M. J.-C. Holl: La Ville-Chimère. Il
est dédié à la « mémoire du poète Léon. Deubel,
que l'indifférence et la misère acculèrent au
suicide », et cette dédicace nous en dit déjà
beaucoup. Le style de M. J.-C. Holl est âpre
et s'adapte bien au sujet de son livre. Vous
avez deviné que La Villc-Chitnè?6, c'est r&
ris. Paris qui prend encore quelque choses-
Mais j'ai tu ce livre avec émotion. Et j al
pensé à Léon Deubel. et à Louis iPergaud..,,
un autre disparu qui avait été son ami.
— La petite Femme incolore trottine dans
livre que vient de faire paraître M. Daniel iftfl
che, à la Renaissance du Livre. Une .f cè-
de -petite femme, petitement contée. Une
tite femme incolore, d'apparence seulement, dit
le prière d'insérer. Je veux bien.
— Pathétique et vibrant, traversé de ce~
mélancolie dont Paul-Louis Garnier impregj1
toutes, ces œuvres, Lydia de Tunis nous arn »■
et remet en lumière la figure de ce fier écrlvatQ
trop tôt disparu. Librairie des Lettres
t— Ariane, ma Sœur. par M. Edouard Schnei,'
der, une œuvre poignante et douloureuse que
traverse une grande inquiétude sentimentate.
L'éte* rnelle contradiction amoureuse y est évo-
quée dans un style aux belles lignes. ti.
— Un prisonnier de guerre revient de capi1*
vité ; il ne trouve pas auprès de sa fem^
l'accueil qu'il espérait ; il connaît même t'in-
différence des foules. Et tout cela l'étonné
C'est l'histoire d'un homme et de beaucOUP
d'hommes : c'est Le Retour, par M. T. Tritby.
Librairie des Lettres.
— Jean, reste au Faubourg, par M. Roland
Charmy, avec une préface de M. Victor SneH-
Ce livre vivant, vibrant, s'ajoute aux réquisi-
toires contre l'enseignement actuel. Et comme
il arrive à son heure pour préserver du mirage
de la profession libérale les indécis, les insuffi-
samment armés. Renaissance du Livre.
f— L'Aube éperdue, de-M. J,.-Ch. Renaud, va
paraître : elle avait été annoncée pour octobre
1914. Retard causé par la guerre, nous dit 1 aU"
teur. ,,,: <
- Nous apprenons que notre confrère Albert j
du Moulin est chargé de la Soirée Iparisien'ite,'
ainsi que d'une partie de la critique (concerts,
music-halls, musique) au nouveau quotidien a"
soir, La Belle France.
— Deux médaillés de la Reconnaissance
tionale pourraient être accordées à Mlles Chris
tiane Dargyl et Marcelle Roselly qui, b durant:
les quatre années de guerre, ont inla i exiot
prêté leur concours à toutes les fêtes de CIIV
rite.
Aux approches de cette fin d'année il
n'y a certes point de trêve pour le monde
des musiciens. Tout au contraire, c'est à
qui, dt. nos associations symphoniques et
* parmi I-es virtuoses, incitera le mélomane à
;lui accorder ses préférences. Chacun d'eux,
à imitation du confiseur, roi du jour, con-
fectionne un programme fourré des plus al-
léchantes gourmandises. Et l'on n'a que
l'embarras du choix devant une telle abon-
dance de musique savoureuse, fondante ou
acidulée.
En dehors des concerts dominicaux à
grand orchestre, l'événement du jour est
sans conteste l'initiative prise par l'Office
Musica Français. Sous le titre de l' ,« Œu-
,vre Jn. dite », ont commencé à se dérouler
des m: lifestations au plus haut point inté-
re - ir>t ïs pour les jeunes compositeurs.
r -, x-c sont désormais assurés de pouvoir
faire ev tendre leurs œuvres de musique de
chambts, et la perspective même leur sou-
mit d'y sncontrer un éditeur bénévole.
La r ornière séance s'est déroulée avant*
hier 6: présence d'une.. affiuence, curieuse
et syn. aihique. EJlc comprenait des œu-
vres de MM. Igouw, Marc-David, Paul Fié-
vet, interprétés par Mme Jane Hatto et le
quatuor Robert Krettly, et une Sonate,
pour piano et violoncelle, de Joseph Bout-
nois, remarquablement traduite par Mme
Jane Boulnois et M. Gérard Hekking.
Le mouvement de l'Œuvre Inédite est
à encourager par nos mécènes. Puisse-t-il
grandir et se développer, de façon à per-
mettre dans un avenir prochain des exécu-
tions orchestrales et théâtrales aussi.
Quoique non inédit Wagner a si long-
temps disparu de l'affiche qu'il exerce un
attrait neuf sur beaucoup d'auditeurs. Le
Festival d'Art Musical, organisé au Troca-
déro samedi soir, avait donc attifé de nom-
breux fervents qui ne cachèrent point le
plaisir qu'ils y prirent. Leur enthousiasme
était même de si bonne trempe qu'il résista
à certains mouvements trop précipités pris
par M. Maurice Lévy d'une baguette un peu
nerveuse ---notamment dans Trîstan et
Yseult, puis dans L'Apprenti Sorcier.^ de
M. Paul Dukas. ;.
; Chez les spécialistes 4u clavier, lu y^'tir
tfée de Mme Jane Mortier va nous vaîoir
de belles moirées où précurseurs et moder-
nes bénéficieront d'une interprétation mu-
sicale et intelligente : son jeu n'a rien perdu
de sa fougue à la fois puissante et expres-
sive. Un très vif succès fêta sa séance
Inaugurale.
Si nous passons maintenant aux associa-
tions symphoniques, nous saluerons l'avè-
nement du romantisme dans les concerts
historiques du Cirque d'Hiver. M. Henry
Prunières l'intronisa jeudi en la personne de
Schubert et de Weber. Le premier n'était
représenté par aucun des lieder qui ont fait
sa popularité, tandis que le second triom-
pha par deux fois avec Le Freyschutz, C'est
plutôt comme symphoniste, avec des airs de
ballet de Rosamunde et sa fameuse Sym-
phonie inachevée, que Schubert a pris place
dans la galerie des Concerts Pasdeloup.
Du Chœur National Ukrainien qui se fit
entendre Ià, après avoir passé par la salle
Gaveau et le Théâtre-Lyrique, je ne dirai
rien que vous ne sachiez déjà. Sous la di-
rection de M. Koschitz, cet ensemble vocal
donne des Cantiques et Chansons populai-
res russes, une traduction admirable par la
discipline de la masse et la perfection des
nuances. Quand aurons-nous en France des
chœurs comparables à ceux-là? Heureuse-
ment que nous avons d'excellents chefs, et
M. Rhené-Baton entr'autres, qui réalisa. une
magistrale exécution des ouvertures de
Benvenuto Cellini et du Carnaval romain,
de Berlioz, ainsi que du poème Juventus, de
M. Victor de Sabata.
: Les Concerts Colonne ont été repris en
mains par M. Gabriel Pierné, retour d'Amsr
tendant. Sohumamn et Wagner encadraient
samedi une Fantaisie, Pastorale, de M.
Achille Philip. Ecrite sur deux idées, l'une
mélodique, l'autre rythmique, cette œuvre
développe suivant les procédés scolasti-
qùes. Le dimanche du Châtelet était ré-
servé aux fresques sonores. Les Béatitudes,
de Franck; la scène des Filles-Fleurs de
Parsi/al, de Wagner, et les tableaux de
rAmouir et d'e t'Incendie du Chant de la
Cloche, de M. Vincent d'Indy, fUIrent ma-
gnifiquement rendus par les masses voca-
les et instrumentales que M. Gabriel Pics-ne
dirigea avec sa maîtrise accoutumée, et aux-
quelles s'adjoignaient ces sotistes 'réputés:,
Mmres Auguez de Montalant, Gampredon,
MM. Laffitte, Huberty. Winkopp.
C'est Mme Jeanne Montjovet qui eut les
honneurs de l'affiche des Concerts Lamou-
reux. Elle phnasa avec son goût accoutumé
Stella, poème lyrique d'Henri Lutz. Mais
la pureté de son style et la perfection de
sa technique resplendissent dans le classi-
que. L'air Auprès de toi, de Bach, et un air
du, Don Juan, de Mozart, furent pour Mme
Momtjovet une occasion nouvelle de faire
apptaudi'r ses très remarquables qualités de
cantatrice. *
: Le programme comprenait en outre trois
ouvrages la Symphonie, de Franck; Slléhé-
razade, de Rimsky-Korsakow, et la pre-
mière audition de La Basilique aux Vain-
queurs, fragment du Meneur de Louves.
Mon ami et collaborateur, M. Louis Laloy,
vous donnera son impression sur ce tableau
symphonique. Mais auparavant, qu'il soit
permis au critique d'adresser ici à M. Ca-
mille Chevilland et à l'orchestre des Con-
certs Lamoureux les remerciements du com-
ppsiteur..
: -,. JEAN POUEIGH.
C'est une page fort intéressante du Me-
neur de Louves que M. CheviUard vient de
conduire, selon sa coutume, magistrale-
ment, à son concert d'hier. Ce drame lyri-
que, qui devait être joué au théâtre de la
Monnaie de Bruxeiîes quand U. guerre est
auirvenue, a été inspiré à M. Jean Poueigh
par le beau roman mérovingien de Mme
Rachilde, dont le librettiste, M. Hortola,
a respecté non seulement la couleur, les
mœurs farouches et la trouèle violence,
mais aussi le style, et partout où ce fut
possible, les mots eux-mêmes. Le sujet était
bien digne de séduire un musicien, de goût.
La figure de Basine est Tune des plus at-
tachantes que la fiction ait jamais conçues,
car cette vierge profanée demeure pure en
esprit et en volonté. Le médite d'un ange
est accompli par le péché. Elle a horreur
du mal, parce qu'elle en a subi répreuve
et le tourment. Mais l'amour guérirait son
imagination malade des souvenirs odieux
qui l'obsèdent, et la rendrait docile à la
saine loi de nature, sans l'opposition de sa
cousine Ohrooielde, qui n'a reçu en don
que l'âme inférieure, celle que l'instinct
domine sans partage. Toutes deux aimeront
le meneur de louves, le pâtre Harog, et la
jalousie fera son œuvre meurtrière. D'où
une suite de scènes où les sentiments les
Plus tentateurs se disputent ces cœurs dou-
loureux.
Le morceau que nous avons entendu,
bien que lié au drame; a plutôt un carac-
tère descriptif. Les compagnons d'Harog,
appelés à l'aide par Basirie, se sont empa-
rés diu coufvent ou eMe fut enfermée» et
festoient dans là basilique. Leur joie s'exalte
eu xythmca toms; et je loae®ai.pjstfkHiÛfcàk.-
ment l'heureux choix des thèmes, qui, sans
être empruntés à la tradition populaire, Y.,
sont fidèles cependant par l'accent et la cft"
dence, ainsi que le coloris bien tranché de
l'orchestre. C'est une musique née du so"
et dont la rusticité savoureuse a le goût
terroir.
C'est d'ailieurs une excellente codttitue'
que de donner au concert des fragment
d'œuvres scéniques, dont la com;préhensiot1''
le jour où elles paraissent au théâtre daOSi
la complexité de l'action^ et du speots^^
se trouve ainsi Wilitée.
M. Gabriel Pierné, parti pour da-utfe5
rivages, avait cédé sa baguette, à son ava^
dernier concert, à M. Mengeltberg. Rien °'
plus instructif que ces échanges. C'est aij^
que nous avons pu constater que l'MtlufiiWy
chef hollandais dirige la Symphonie héroi
que avec une pondération bien éloignée d'a
la fougue die nos maîtres de l'orcShes^®'
qui gardent ta tradition romantique de 14$1
beneek. Les deux interprétations sont
lement légitimes, un tel chef-d'œuvre
nissant en soi les caractères opposes et rc;¡rll"
plissant, selon le mot de Pascal, tout 1'#**
tre-deux. C'est un autre aspect■. moins
mi lier, qui nous en fut montré. Par cont-re,
nul doute n'était possible sur les
de Liszt, dont la radieuse abondance et »
deur généreuse furent mises en valeur afJ
une éloquence entrainante. M. MengeltJef:
sait, sans gestes superflus, détacher^
phrase. la soutenir et ta mener
jusqu'à sa conclusion. C'est un grand
liste*. ;. •.
L ", ."::,, Inouïs
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