Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1920-09-09
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 09 septembre 1920 09 septembre 1920
Description : 1920/09/09 (A14,N2824). 1920/09/09 (A14,N2824).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76477439
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/05/2015
COMŒDIA
1" ANNEE - N° 2824 - Le N° 20 cent
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27, Boulevard Poissonnière, PARIS (2*Yj
lONDON OFFICE, 20, High Holborn W. C. 1
Holij 5.352 Principal Correspondant H. Bonnair.
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t- ranc? et Colonies. 50 » 26 » 13 D:
•'l'aiigd- ., 70 » 36 » 49 »
guoîîarai. — JEUDI 9 SEPTEMBRE 1920
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UN CAPITAN
La saison des théâtres, et surtout du
'neiîia va recommencer. C'est au ciné-
, a Que se trouve aujourd'hui la grande
^'Pitation populaire. Or le spectacle
v * films n'est * rien d'autre, le plus sou-
Il - que ce que fut jadis la Comédie
,Lalitnne-. on y voit des types aussi inva-
raWes que Pantalon. Arlequin, Isabelle
OU le Capitan.
y^ e Capitan? Vous le connaissez bien,
dl cinéma, et au vrai théâtre aussi,
pilleurs, et même dans le roman : c'est
financier.
1) apposez, en effet, que vous ayez
Ver* le roman d'hier, ou que vous
vo Us trouviez à la nouvelle pièce, ou que
Us assistiez au film inédit.
a scène représente une soirée mon-
daint,, une garden-party ou un bureau
SQ ltlptueux. Un homme déjà grisonnant
p. Promène çà et là, prononçant une
k'ese de temps en temps, échangeant
su Poignées de mains; à moins qu'as-
t,',,I,,e'v-ànt une table encombrée, 11 ne
te des papiers en mâchonnant un
6|are. Le visage de cet homme est fort
expressif; son sourcil se fronce volon-
tiers; son œil perce comme une vrille
les interlocuteurs ; il a le geste impé-
rieux. On devine qu'un monde de pro-
jets effrayants et de combinaisons im-
menses, non moins que diaboliques,
fermente sous son front. Il a l'esprit
prompt, déconcertant, et la volonté ja-
mais en repos. Impérieux, dès qu'on le
contrairie, hautain et cassant tout-à-
coup, ambitieux à faire peur, terrible-
me nt adroit, génial, surhumain ce
bonhomme iredout-able, ce héros, vous
avez reconnu? C'est le Financier.
Mais plutôt que de le décrire davan*
lage, cherchons comment a pu s'im-
planter si solidement chez nous cette
espèc e de traître de mélodrame. Car
enfin, serions-nous tellement naïfs?
Voici donc maintenant que nos amuseurs
nous racontent, sans se gêner des his-
toires. invraisemblables, des contes à
dormir debout, dans lesquels paraissent
des types de roman populaire, des
« banquiers » d'image d'Epinal, des
surhommes de pacotille, bons pour
ebouir des collégiens — et nous mar-
chons comme des jeannots qui n'ont ja-
mais rien vu?
Eh! à qui la faute, sinon à nous-
mêmes?* ~? Le grand public n'a jamais que
le romancier qu'il mérite, et les drâma-
qu'il a voulus. Qu'un artiste
charmant nous offre le récit d'une aven-
ture pleine de fantaisie, débordante et
comme écumante d'imagination, et vous
air dégoûté de M. -Prudhomme.
Ça fera cet amateur de films ou
oeuvres qu'on appelle fortes, ça, de
l'art? Mais non, ce sont des histoires
du j(),s enfants, bonnes pour les livres
du jour de l'an, où des motifs à faire
rêver les. petites demoiselles de pro-
vince, affamées de romanesque. » Et
hausser les épaules! -
Alors, devant cette malveillance et
cette pfiance universelles à l'égard de
la littérature », comme ils disent
avec mépris, que vouiez-vous que de-
trav S écrivains (ceux qui écrivent
ou travaillent pour la foule, s'entend)?
Ils ne pouvait cependant pas raconter
d nt les potins du magasin ou
ceux de la concierge: il leur fallait un
~turier, un gaillard, un héros- et sé-
rieux, et un peu grave , que en imposât
enfin. Ils avaient besoin de quelqu'un
C^IÎIA Jenir lieu du brigand gentil-
du tyran, du Méphistophélès en
chambre, si cher aux romantiques éper-
dus de 1840; il 'leur fallait le bon vieux
un peu satanique, sans le
contraste duquel Ja naïveté persécutée
des jeunes premiers perdrait tout son
charme ; et puisqu'ils ne pouvaient plus
nous montrer ,dans notre vie moderne,
le condottière casqué, le gaillard féroce,
embossé dans sa cape et portant le feu-
tre sur les yeux, ils devaient donc In-
venter un autre conquérant mieux adapté
à notre monde prosaïque et bourgeois,
un autre lutteur pour la vie, que l'on pût
habiller comme chacun de nous, un
bravo qui' fût au moins d'aspect vrai-
semblable sur le boulevard comme à la
Bourse: et ils ont fabriqué de toutes piè-
ces ce personnage aujourd'hui bien dé-
fini, le Capitan pour grandes personnes,
autrement dit le Financier - leur Finan-
cier.
Dans la Comédie Italienne, il y a
Colombine, Arlequin, Briguelle, Scara-
mouche le Docteur de Bologne. Dans
la Comédie parisienne, nous avons l'A-
moureux, la Jeune Première, le Confi-
dent, la Conseillère et le Financier.
Bien entendu, je ne prétends point
que le financier n'existe pas, et que ce
personnage a été fabriqué de toutes piè-
ces. Non, certes. N'imitons pas tout
justement ceux que nous raillons, et
n'allons rien exagérer. Il est certain que
l'homme habitué à manier des sommes
d'argent, à en jouer, à les faire vivre.
agir et produire, il est bien certain que
ce spécialiste présente certains traits qui
lui sont communs avec ses pareils. Par
exemple, on pourrait dire que le bour-
sier se montre assez fréquemment géné-
reux, qu'il serait même enclin, au be-
soin, à jeter l'argent par les fenêtres.
Il se plaît à contrefaire volontiers le
mystérieux, comme s'il connaissait tou-
jours ,et cachait de grands secrets d'Etat.
Il ne déteste pas de paraître.
Soit, mais il ne faut guère aller plus
loin, ni grandir, ou plutôt grossir outre
mesure le type du financier, si l'on veut
demeurer exact et précis. Pourquoi le
changer invariablement en une sorte de
terrible ciseau de proie, presque irré-
sistible? Serait-ce pour ne pas se priver
d'un commode Deus ex machina? Dra-
maturges et romanciers populaires se
trouvent-ils si pauvres, qu'ils aient en-
core et toujours besoin, pour mener à
bien Jeurs fictions, d'un être plus puis-
sant que les autres, et quasi-surnaturel,
d'une façon d'enchanteur Merlin?
"La vérité est plus fine. Plus soumis
que quiconque aux étranges variations
des événements, dont pas un seul n'est
sans influencer en quelque manière sur
'ilndustrie ou la Bourse, le financier
moderne se montre attentif plutôt qu'im-
patient d'en, finir, prudent et dépourvu
d'audace plutôt qu'inventeur de plans
énormes, et très respectueux du Destin,
loin de vouloir mater et asservir celui-ci.
Le grand manieur de capitaux n'ignore
pointce"qué vaut le meilleur projet, en
face de cette bête incertaine qu'on nom-
me la Fortune. Il sait qu'une idée de
génie, pour peu que le moindre hasard
la contrarie, durera ce que durent les
roses: l'espace d'un cours de Bourse.
Si l'on veut se montrer véridique, il y
a lieu de renoncer au personnage un peu
guignol èt stéréotypé des films. Plus de
ces puissants seigneurs, maîtres sataiii-
ques des hommes et des événements!
Plus de ces Capitans, Spaventos des
Banques, Matamores des coulisses, et
Fracasses de la Corbeille ! Plus de loups
qui, dans le bois des affaires, dévorent
les pauvres petits Chaperons-rouges!.
Ou plutôt, non, ne changez donc
rien, gardez votre Capitan. Il ne faut
pas troubler le public en ses habitudes:
cela le désoblige, et personne n'y gagne
rien.
Marcel BOULENGER.
UNE DISTINCTION BIEN MERITEE
M. Léon Bailby,
Directeur de L'Intransigeant
est nommé chevalier
é\ Légion d'honneur
récom penser lies services rendus pen-
tti erre et de,puis la cessation des hosti-
lités, de nombreuses promotions et noniuiations
dans notre ordre natioflâ'l ont été décidées par
des ministres compétents.
Dépuis hier, un certain nombre die nos conci-
sont ce J.^nneur aipres avoir été à la
— et ci n est qufg justice.
t "QQI Léon BAILnv
¡'l' Illations 811- g,rad-- de
U'VPH au \.ve
de la Légion d'honneur, ,icavixes au
i"1I.T¡Q tCtel , 1 s
fi îfflk"' relevons aVec le p u
eur de 17„^n*nt confrère
()" l, te-Ur -
nt d. ilZTre ei:n anact- cordant.
-. "",. s'est honoré en accorda
t.
cetiæ distinction (avec un motif qui est une no-
ble ciitation) au parfait écrivain, au grand philan-
thiropc -qu'est M. Léon Bailb-y.
Les Pahsiens n'ont pas oublié ces éditoriaux
d'une lucide énergie qui, pendant la guerre, eur
rent sur'Fesgirit public une influence si continue
et si opportune. Les hostilités finies, M. Bailby.
ému par l'intquiétudie des innombrables démobi-
lisés, créa1 cet « office de placement », qui fut
le consoliâ'teur de tant de serviteurs de ta pa-
trie et dont l'efficacité immédiate ne s'est pas
démentie un ins'^nt.
Q-u!2 de journalistes, aujourd'hui « arrivés »,
doivent leur gloire à ce subtil dénicheur de
jeunes talents. Ami fervenit des lettres, patriote
éclairé, le plus aâcmtable et le plus indulgent
confrère, il ne compte dans la presse parisienne
que des sympathies. Qu'il trouve ici nos affec-
tueuses et cordiales félicitations*
- ■- *■
Échos
9 Septembre 1876. - Au Grand-Théâtre de Bor-
deaux, tnauguralion du buste du Ligier par
Gouaiïdot,. -
u
n singulier ~émandeur.
Ils sont nombreux ceux oui se
:roient autorisés à demander, des billets de
faveur, et les quémandeurs ne craignent
pas de faire valoir les titres Les plus divers.
L'un de ceux-ci soHkiæaÜ dernièrement
deu>j places d'un de nos plus aimables se-
:rétaires généraux, et il s'intituikit: ;
« Secrétaire de M. X., ancien député,
:< non réélu aux dernières élections. »
U
n homme ennuyé.
C'est un artiste — dans son genre
-r- qui< chôme depuis sept ans : le veilleur
du beffroi e-n Flandre, qui, toutes
les nuits, soufflait tous les quarts d'heure,
uine note moyennageuse dans une trompe
ad hoc.
Pendant les années de guerre, la sirène
et la berloque eussent trouvé en lui l'hom-
me qu'il faHa,i,t. Quel métier a-t-il exercé
pendant ce temps-là? Peut-être bien celui ;
des armes. Mais, la paix nous est revenue
Il est sans place, le8 temps sont durs..*
FANTAISIE
,Rallye = 'Pape,.
Je le trouvai assis sous des sapins habi-
lement taillés pour n'offusquer d'aucune
ombre la butte d'un vert vénéneux où s'é-
bat. le prolétariat des districts bellevillois.
C'est un vieux type de lettres auquel il eti
beaucoup pardonné parce qu'il a beaucoup
peiné. Il ne cultive pas le symbole ni ne
ténte l'élision d'aucune analogie. Tant que
le beurre sera à sept francs et la ligne (là
sienne) à deux sous, il prétend domestiquer
le romanesque et se nourrir d'aventures. Il
portait en bandoulière une jumelle qu'il
aveignait de temps à autre d'un geste brus-
que pour se boucher la vue avec. Et il avait
alors la pose de guet du pêcheur qui épie
les soubresauts de son flotteur. -
— Voyez, me dit-il tout à coup, cette
théorie de charrettes à bras qui sinue là-
bas, à cent pieds au-dessous de nous. Ça
devrait être des marchands de prunes, mais
ils sont en retard. Dès que la première char-
rette de prunes apparaitra, je vous fausse-
rai compagnie et voici pourquoi : lisez
cela.
Il me tendait un sac en papier déchiré
bilatéralement de façon à rétablir in-exten-
sa le texte imprimé de la page qui aVlÛt
servi à confectionner le sac. Je lus: r
« et maintenant si vous voulez savoir
où va tout ce butin fiscal, suivez-moi, je
vous mènerai dans un monde de budgétivo-
res spéciaux qui roulent sur l'or, dans un
monde logé et nourri aux frais de la prin-
cesse, et meublé avec le gaspillage des
stocks, un monde à qui l'argent tient aux
mains comme l'œuf au derrière d'une poule,
des gens qui dirigent des choses inexistan'
les, solutionnent des problèmes chiméri-
ques, occupent, en qualité de danseurs, d s
postes de mathématiciens, écument avec au-
tant d'habileté le monde des arts à Paris
que celui des badernes officielles changées
du relèvement des régions dévastées toi de
l'administration des provinces occupées.
suivez-moi, vous dis-je, et.
le reste du texte avait disparu dans fe $é-
coupure du sac. - - -:-
— Et c'est pour cela, me dit mon ami,
c'est pour cela que je guette depuis trois
jours les marchands de prunes qui débou-
client tous les matins dans ce quartier où
fut acheté le sac révélateur. Il me faut la
suite. vous comprenez. le sac découpé
dans la partie du texte qui situe, exactement
celle humanité de Cocagne où l'on remue
les millions à la pelle — quand ce ne se-
rait. que pour la signaler à la vindicte pu-
bliqne. j'ai déjà acheté une dizaine de kilos
de prunes et risqué le choléra, mais l'âme
de vache à. lait que m'a faite le fisc vaut le
meilleur des contrepoisons. »
Toutes choses égales ne faut-il pas fidrtù-
rer un homme assez naïf pour dramatiser
les bouillons littéraires que trimballent nos
poussettes ambulantes?
'- ': ,- JULES HOCHE.
u
n Joseph inconnu.
Nous connaissions déjà, dans le 4Q-
maine pictural d'innombrables Joseph —
depuis celui des fresques du Campo-Swrrto ;
de Pise jusqu'à ceux de Philippe de CtNtm-
paigne, de Rembrandt, de Ribera, de V-élas-
qu-ez, etc. - ,,;. -
La composition musicale s'é n or gu-einit, de
l'Opéra de Méhul « embelli » par Bout-1
gault-Ducoudray. ■
La littérature sérieuse -aUi sens de ce terme — ne s'était point attardée,
croyait-on, à la description des étsts d'âme
du personnage biblique. Or, nous appre
nous aujourd'hui qu'il n'en est rien: uiï 1
écrivain illustre entre tous, Gœthe, a
« commis » un Joseph. Il fut si mécontent
du drame qu'il.avait écrit q-u'il le livras aux
flammes, en 1762, ma.is un exemplaire; suè*
siste, afHrme un journal de Hambourg. Il l:
est des exhumations qui n'ajoutent rièia à
la gloire d'un écrivain.
L
a barbe,.
a barbe. ;;
1 Les échos de Deauville ont rapporté
que M. Sacha Guitry a laissé pousser sa
barbe, ce qui lui donne un vague air de res-
semblance avec le duc d'Orléans. On a
donné à la décision de M. Sacha Guitry
de ne plus se raser, diverses raisons, mais
personne n'a trouvé la' vérité.' Révélons-là,
comme un point d'histoire.
Si M.* Sacha Guitry est barbu, c'est que
dans sa prochaine pièce Je t'aime! qu'on
répète au Théâtre Edouard-VII, il doit in-
c'alrner le rôle d'un homme à barbe, et,
comme M. Sacha Guitry professe une sain-
te horreur pour tout ce qui est postiche,
il paraîtra devant le public avec une barils
naturelle.
M
odèles d'hiver.
Les couturiers commencent actuelle-
ment à exposer leurs colletions d'hiver.
Celles-ci 'sont des plus importantes et cer-
taines d'entre elles ne comprennent pas
moins de cinq ou six cents modèles.
Si quelques maisons ont pris l'habitude
d'ordonner ces modèles par un simple nu-
méro, il en est beaucoup encore qui les
baptisent de' noms évocateurs.
A signaler, cette saison, le modèle Lan-
dru, et cet autre, primitivement appelé
Amour vif qu'on débaptisa pour lui: donner
le nom d'Hera Mirtel.
v
oici le moment où, rentrant de la pla-
ge, des Nilles d'eaux, il nous faut
- "1 "'f. -1 'Il T. ----
songer a nos toilettes anIVeT. ivoire pre-
mière visite sera certainement- pour F,
FRANCIS, 5, avenue Matignon (Champs-
Elysées), couturier dont la ;eune gloire s'af-
firme de plus en plus par le goût délicat qui
préside à la création de ses modèles. Sa
collection d'hiver qui sera prête à partir
du 10 courant est encore plus réussie que
les précédentes; ses manteaux sont merveil-
leux de chic et de simplicité; ses tailleurs,
comme toujours, sont parfaits d'élégance.
et que dire des robes flou? Sinon qu'un
coup d'œil vaudra mieux que toutes les des-
criptions.
F. FRANCIS voulant favoriser Les artistes
les traitera de façon particulière dès qu'el-
les se recommanderont de Comœdia.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain une scène de
« LA MORT ENCHAINEE $
de M. MAURICE MAGRE
et « La Musique chez soi. n tU, ;
HENRI COLLETS
A LA COMÊmE=FRANÇAISE
LA MORT ENCHAÎNÉE
Pièce dramatique, en trois actes, en Vers, de M. Maurice Magre
\j" DEUXIEME ACTE (Photo -r.':¡f' 13eril
- t/lle DELVAIR M- de MAX
-. 1 1 1 1 {L-a Mort) {Slsypnei .,
Voilà une belle fournée pour les lettres.
Le pièce de M. Maurice Magre a soulevé
tes applafudiiss'ements unanimes et je gage
#ue le public éakiera, de nombreux soirs,
•He noble effort d'un véritable poète.
M. Maurice Magre qui fut toajotKcs épris-
de légendes, a choisi pour sujet eèile du
fameux roi de Corinthe, Sisyphe, que le
divin Homère nous prése-nte comme un es-
prit 2iu-dadeux et subti'!'. Il n'a pas hérité à
enfoaire le prototype de la Bonté et de la
Justice. Ce' roi sans scrupules qui dépouil-
lait les voyageurs devient un grand me-
neur d'hommes, un précurseur, un bienfai-
teur, un évolutionniste et pour tout dire,
un révolutionnaire. S'il blasphème les dieux,
c'est parce qu'il est l'ennemi de la contrain-
te, l'adversaire de la tyrannie malfaisante,
l'apôtre-fervent delà liberté. Entendez
d'aM!eurs que les dieux ne sont ici qu'un
symbole. Le droit divin n'existe pas, Sisyphe
le nie et fui oppose le simple droit humain
dont le triomphe est nécessaire. Seul, au
milieu des antiques croyances qu'il bafoue,
dans les murs de cette Corinfhe que son gé-
nie sut construire, il renverse les idoles,
iâbolit la servitude des superstitions, prê-
che le courage, la volonté, la force, l'op-
timisme et conduit son peuple au bonheur,
en lui ouvrant te vaste champ de l'espoir
et de l'amour. -
A la tradition qui nous montre Sisyphe
tué par Thésée, Maurice Magre a préféré!
la séduisante légende d'Egine, fille du roi
Asope, erïlevée par Zeus et délivrée par le
(PhatJo sabourin, ace* Bert)
MHe DELVAIR
„>] (La Moït)
roi de Corinthe. Grâce à la fuite/d'Egine ré-
fugiée près de Sisyphe, Ja. lutte est ouver-
te entre le Héros et les Dieux. Sisyphe
garde Egine dont la grâce le ravit et défie
Zeus en plantant son glaive au seuil de,son
',paJa'¡'s. La réponse à l'outrage ne se fait
pas attendre. La Mort relève le'defv en ar-
tachant le glaive. Mais Sisyphe, aussi rusé
1 TROISIEMII: ACTE (Photo Saboulln anc1 Belt)
M. Charles CRANVAL
(Le Dieu Pa-nj
tflle GUINTINI M. R. GAILLARD
(Egine) (Glaucos)
Mlle V. BÙ;Î05
tT}ro)
M. de MAX
(ÇlïJI-kç)
M. conivai:
(Premier Maing)
qu'Ulysse, Ferne la mort, et parvient à
l'enchaîner. Désormais la paix régnera sur
- le monde. L'ingéniosité et l'énergie humait
ne ont détruit le fléau sinistre. L'ère des
félicités est ouverte. -
Les hommes d'ailleurs délivres de toute
terreur injuiieront, lapiikront la Mort qtt'iis
fe~eparfois souhaitée/ La se'ene est admirable
et Mme D-elnrrr y fut magnifique. Sisyphe
iressît Ter)
,. "(Sisypne)
aurait sauvé le monde si ses msrrncfS mau-
vais des hommes ne les précipitaient à
leur perte.
Glaucos, fils de Sisyphe, s'éprend
d'Egine qui ne résiste pas à la jeunesse
du prince. Sisyphe soupçonne la trahison,
devine l'affreuse, comédie oui lui est jouée
et connaît des tortures plus douloureuses
que -celles que lui infligeront les dieux irri-
,. tés. Pour .faire cesser le doute .qui le bou-
leverse, il feint de se rendra a la chasse
et confié à son fils la clef magique qui,
seufe, peut libérer la morts Egine, plus
éprise peut-être et plus perverse à coup
sûr,pousse Glaucos à faire tomber les chaî-
nes de la Mort afin que le destin de
Sisyphe puisse s'accomplir. Le roi de Co-
rinthe livré à la vengeance de Zeus, l'ave-
nir appartient à leur jeune amour. Mais
pour délivrer la Mort avec l'insouciance des
responsabilités, il faudrait être presque
dieu et leur désir échoue devant l'énor-
mité de l'acte. Trop lâches pour être déli-
bérément criminels, ils laissent agir J'in-
n'ocence,;La naïve Tyro, l'esclave jadis pré-
férée de Sisyphe et qui aujourd'hui, défais-
sée ne rêve-que le néant. La Mort est dé-
livrée ! i Sa vengeance sera terrible. Corin-
the est transformée en charnier et Sisyphe
assistelà l'écroulement de sa chimère. Pouir-
tant il igno.rêr:â:''la trahison de son fils et
de sa femme/ L'esclave s'accuse de tout le,
crime qujun/grand amour excuse. ,
* Sisyphe meurt et pénètre au royaume
des ombres..Mais il parvient à convaincre
Hadès de lui rendre la liberté et de lui
laisser sa ! forme première. Il apparaît à
Corinthe, le jour même où Glaucos, va de-
venir roi et. épouser Egine. Sisyphe pieut
alors mesurer l'étendue de ringratitude hu-
maine. Ses sujets dont iL, v,oUll,u,L'si âpre;,
ment le)bonheur, le renient et
mémoire,^les^diëux dont,il- combattit la
nicietîse influence sont rétablis -" sur leuirs*
autels. Son deuil n'a pas été porté par ceux
qu'il aimait. Ses efforts passés lui appa-
raissent Yains et il ne pense llh.ts on'à sa;
tisfarre sa .vengeance. Mais au momen: t>
il lève sur son fils la terne justieière, ii en-
tend les voix de sept ambres mystérieuses.
qui ont suivi ses pas dtfuàs les Enfers.
Ces ombles représentent tes p'réc«rserr« de
Sisyphe, les sages, les vaillant,,,. les apô-
tres de la pensée, les porteurs de fi..
beaux Eux aussi furent wotimes de leurs
rêves et leur activité bienfaisante ne leur
a pas valu la gloire. Mais nul effort n'est
perdu et leurs gestes successifs prokn^cb
par Sisyphe ont aidé au bien-être des
mes. Sisyphe aura des successeurs Le
grain semé germera. Que le roi de Cenmm:
rentfne dans l'ombre. Ceux à qui il a indi-
qué. le chemin continueront à marcher vers
la lumière.
Ainsi se termina sur un symbole u i pv-u
lourd et presque confus une oeuvre d:)iil
la trame apparaissait assez nette. Le troi-
sième acte n'a pas la clarté limpide, le
-chu-ud et captivant lyrisme du second. C'est
dommage. Je sais bien que le mythe de
Sisyphe prétait fatalement au. symbole et
qu'il faillait expliquer l'image du rocher par,
le perpétuel recommencement, mais il n'en
est pas moins vrai que nous finissons, sur
le spectacle de la victoire du crime et de la
niaiserie fétichiste. Le meneur cUhb'm^«
a échoué dans 60n effort. Combien d^urrès
Sisyphes devront encore soulever sur leurs
épaules Impuissantes le fardeau des erreurs
humaines, sous le fouet des imclacàble»
Erinnves. *
(PTvnTo SaBotiwp, anc~ J!('J'T'
Mlle CUINTtl)^
"JE '^ijïek
-
1 '-' ..- -.
Le .style de M. Maurice Magre est ima-
gé,. ample.t coloré, émouvant. La Mort :En:
chaînée est une belle oeuvre de poète.,
poète demeuré obstinément romantiquc..;oe.
qui n'est pas pour me déptaife. On pe-ifilujj
;r^focherid'avoir remué trop d'idées socia-;
lès ên'o,-,i peu de vers, mais le reprocha
apparaîtrait sans doute slnglTrrer, Tenant
après tant de pauvretés lyriques; on potfï
aussi :lu.i faire .erief d'user d'^nc liberté •
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UN CAPITAN
La saison des théâtres, et surtout du
'neiîia va recommencer. C'est au ciné-
, a Que se trouve aujourd'hui la grande
^'Pitation populaire. Or le spectacle
v * films n'est * rien d'autre, le plus sou-
Il - que ce que fut jadis la Comédie
,Lalitnne-. on y voit des types aussi inva-
raWes que Pantalon. Arlequin, Isabelle
OU le Capitan.
y^ e Capitan? Vous le connaissez bien,
dl cinéma, et au vrai théâtre aussi,
pilleurs, et même dans le roman : c'est
financier.
1) apposez, en effet, que vous ayez
Ver* le roman d'hier, ou que vous
vo Us trouviez à la nouvelle pièce, ou que
Us assistiez au film inédit.
a scène représente une soirée mon-
daint,, une garden-party ou un bureau
SQ ltlptueux. Un homme déjà grisonnant
p. Promène çà et là, prononçant une
k'ese de temps en temps, échangeant
su Poignées de mains; à moins qu'as-
t,',,I,,e'v-ànt une table encombrée, 11 ne
te des papiers en mâchonnant un
6|are. Le visage de cet homme est fort
expressif; son sourcil se fronce volon-
tiers; son œil perce comme une vrille
les interlocuteurs ; il a le geste impé-
rieux. On devine qu'un monde de pro-
jets effrayants et de combinaisons im-
menses, non moins que diaboliques,
fermente sous son front. Il a l'esprit
prompt, déconcertant, et la volonté ja-
mais en repos. Impérieux, dès qu'on le
contrairie, hautain et cassant tout-à-
coup, ambitieux à faire peur, terrible-
me nt adroit, génial, surhumain ce
bonhomme iredout-able, ce héros, vous
avez reconnu? C'est le Financier.
Mais plutôt que de le décrire davan*
lage, cherchons comment a pu s'im-
planter si solidement chez nous cette
espèc e de traître de mélodrame. Car
enfin, serions-nous tellement naïfs?
Voici donc maintenant que nos amuseurs
nous racontent, sans se gêner des his-
toires. invraisemblables, des contes à
dormir debout, dans lesquels paraissent
des types de roman populaire, des
« banquiers » d'image d'Epinal, des
surhommes de pacotille, bons pour
ebouir des collégiens — et nous mar-
chons comme des jeannots qui n'ont ja-
mais rien vu?
Eh! à qui la faute, sinon à nous-
mêmes?* ~? Le grand public n'a jamais que
le romancier qu'il mérite, et les drâma-
qu'il a voulus. Qu'un artiste
charmant nous offre le récit d'une aven-
ture pleine de fantaisie, débordante et
comme écumante d'imagination, et vous
air dégoûté de M. -Prudhomme.
Ça fera cet amateur de films ou
oeuvres qu'on appelle fortes, ça, de
l'art? Mais non, ce sont des histoires
du j(),s enfants, bonnes pour les livres
du jour de l'an, où des motifs à faire
rêver les. petites demoiselles de pro-
vince, affamées de romanesque. » Et
hausser les épaules! -
Alors, devant cette malveillance et
cette pfiance universelles à l'égard de
la littérature », comme ils disent
avec mépris, que vouiez-vous que de-
trav S écrivains (ceux qui écrivent
ou travaillent pour la foule, s'entend)?
Ils ne pouvait cependant pas raconter
d nt les potins du magasin ou
ceux de la concierge: il leur fallait un
~turier, un gaillard, un héros- et sé-
rieux, et un peu grave , que en imposât
enfin. Ils avaient besoin de quelqu'un
C^IÎIA Jenir lieu du brigand gentil-
du tyran, du Méphistophélès en
chambre, si cher aux romantiques éper-
dus de 1840; il 'leur fallait le bon vieux
un peu satanique, sans le
contraste duquel Ja naïveté persécutée
des jeunes premiers perdrait tout son
charme ; et puisqu'ils ne pouvaient plus
nous montrer ,dans notre vie moderne,
le condottière casqué, le gaillard féroce,
embossé dans sa cape et portant le feu-
tre sur les yeux, ils devaient donc In-
venter un autre conquérant mieux adapté
à notre monde prosaïque et bourgeois,
un autre lutteur pour la vie, que l'on pût
habiller comme chacun de nous, un
bravo qui' fût au moins d'aspect vrai-
semblable sur le boulevard comme à la
Bourse: et ils ont fabriqué de toutes piè-
ces ce personnage aujourd'hui bien dé-
fini, le Capitan pour grandes personnes,
autrement dit le Financier - leur Finan-
cier.
Dans la Comédie Italienne, il y a
Colombine, Arlequin, Briguelle, Scara-
mouche le Docteur de Bologne. Dans
la Comédie parisienne, nous avons l'A-
moureux, la Jeune Première, le Confi-
dent, la Conseillère et le Financier.
Bien entendu, je ne prétends point
que le financier n'existe pas, et que ce
personnage a été fabriqué de toutes piè-
ces. Non, certes. N'imitons pas tout
justement ceux que nous raillons, et
n'allons rien exagérer. Il est certain que
l'homme habitué à manier des sommes
d'argent, à en jouer, à les faire vivre.
agir et produire, il est bien certain que
ce spécialiste présente certains traits qui
lui sont communs avec ses pareils. Par
exemple, on pourrait dire que le bour-
sier se montre assez fréquemment géné-
reux, qu'il serait même enclin, au be-
soin, à jeter l'argent par les fenêtres.
Il se plaît à contrefaire volontiers le
mystérieux, comme s'il connaissait tou-
jours ,et cachait de grands secrets d'Etat.
Il ne déteste pas de paraître.
Soit, mais il ne faut guère aller plus
loin, ni grandir, ou plutôt grossir outre
mesure le type du financier, si l'on veut
demeurer exact et précis. Pourquoi le
changer invariablement en une sorte de
terrible ciseau de proie, presque irré-
sistible? Serait-ce pour ne pas se priver
d'un commode Deus ex machina? Dra-
maturges et romanciers populaires se
trouvent-ils si pauvres, qu'ils aient en-
core et toujours besoin, pour mener à
bien Jeurs fictions, d'un être plus puis-
sant que les autres, et quasi-surnaturel,
d'une façon d'enchanteur Merlin?
"La vérité est plus fine. Plus soumis
que quiconque aux étranges variations
des événements, dont pas un seul n'est
sans influencer en quelque manière sur
'ilndustrie ou la Bourse, le financier
moderne se montre attentif plutôt qu'im-
patient d'en, finir, prudent et dépourvu
d'audace plutôt qu'inventeur de plans
énormes, et très respectueux du Destin,
loin de vouloir mater et asservir celui-ci.
Le grand manieur de capitaux n'ignore
pointce"qué vaut le meilleur projet, en
face de cette bête incertaine qu'on nom-
me la Fortune. Il sait qu'une idée de
génie, pour peu que le moindre hasard
la contrarie, durera ce que durent les
roses: l'espace d'un cours de Bourse.
Si l'on veut se montrer véridique, il y
a lieu de renoncer au personnage un peu
guignol èt stéréotypé des films. Plus de
ces puissants seigneurs, maîtres sataiii-
ques des hommes et des événements!
Plus de ces Capitans, Spaventos des
Banques, Matamores des coulisses, et
Fracasses de la Corbeille ! Plus de loups
qui, dans le bois des affaires, dévorent
les pauvres petits Chaperons-rouges!.
Ou plutôt, non, ne changez donc
rien, gardez votre Capitan. Il ne faut
pas troubler le public en ses habitudes:
cela le désoblige, et personne n'y gagne
rien.
Marcel BOULENGER.
UNE DISTINCTION BIEN MERITEE
M. Léon Bailby,
Directeur de L'Intransigeant
est nommé chevalier
é\ Légion d'honneur
récom penser lies services rendus pen-
tti erre et de,puis la cessation des hosti-
lités, de nombreuses promotions et noniuiations
dans notre ordre natioflâ'l ont été décidées par
des ministres compétents.
Dépuis hier, un certain nombre die nos conci-
sont ce J.^nneur aipres avoir été à la
— et ci n est qufg justice.
t "QQI Léon BAILnv
¡'l' Illations 811- g,rad-- de
U'VPH au \.ve
de la Légion d'honneur, ,icavixes au
i"1I.T¡Q tCtel , 1 s
fi îfflk"' relevons aVec le p u
eur de 17„^n*nt confrère
()" l, te-Ur -
nt d. ilZTre ei:n anact- cordant.
-. "",. s'est honoré en accorda
t.
cetiæ distinction (avec un motif qui est une no-
ble ciitation) au parfait écrivain, au grand philan-
thiropc -qu'est M. Léon Bailb-y.
Les Pahsiens n'ont pas oublié ces éditoriaux
d'une lucide énergie qui, pendant la guerre, eur
rent sur'Fesgirit public une influence si continue
et si opportune. Les hostilités finies, M. Bailby.
ému par l'intquiétudie des innombrables démobi-
lisés, créa1 cet « office de placement », qui fut
le consoliâ'teur de tant de serviteurs de ta pa-
trie et dont l'efficacité immédiate ne s'est pas
démentie un ins'^nt.
Q-u!2 de journalistes, aujourd'hui « arrivés »,
doivent leur gloire à ce subtil dénicheur de
jeunes talents. Ami fervenit des lettres, patriote
éclairé, le plus aâcmtable et le plus indulgent
confrère, il ne compte dans la presse parisienne
que des sympathies. Qu'il trouve ici nos affec-
tueuses et cordiales félicitations*
- ■- *■
Échos
9 Septembre 1876. - Au Grand-Théâtre de Bor-
deaux, tnauguralion du buste du Ligier par
Gouaiïdot,. -
u
n singulier ~émandeur.
Ils sont nombreux ceux oui se
:roient autorisés à demander, des billets de
faveur, et les quémandeurs ne craignent
pas de faire valoir les titres Les plus divers.
L'un de ceux-ci soHkiæaÜ dernièrement
deu>j places d'un de nos plus aimables se-
:rétaires généraux, et il s'intituikit: ;
« Secrétaire de M. X., ancien député,
:< non réélu aux dernières élections. »
U
n homme ennuyé.
C'est un artiste — dans son genre
-r- qui< chôme depuis sept ans : le veilleur
du beffroi e-n Flandre, qui, toutes
les nuits, soufflait tous les quarts d'heure,
uine note moyennageuse dans une trompe
ad hoc.
Pendant les années de guerre, la sirène
et la berloque eussent trouvé en lui l'hom-
me qu'il faHa,i,t. Quel métier a-t-il exercé
pendant ce temps-là? Peut-être bien celui ;
des armes. Mais, la paix nous est revenue
Il est sans place, le8 temps sont durs..*
FANTAISIE
,Rallye = 'Pape,.
Je le trouvai assis sous des sapins habi-
lement taillés pour n'offusquer d'aucune
ombre la butte d'un vert vénéneux où s'é-
bat. le prolétariat des districts bellevillois.
C'est un vieux type de lettres auquel il eti
beaucoup pardonné parce qu'il a beaucoup
peiné. Il ne cultive pas le symbole ni ne
ténte l'élision d'aucune analogie. Tant que
le beurre sera à sept francs et la ligne (là
sienne) à deux sous, il prétend domestiquer
le romanesque et se nourrir d'aventures. Il
portait en bandoulière une jumelle qu'il
aveignait de temps à autre d'un geste brus-
que pour se boucher la vue avec. Et il avait
alors la pose de guet du pêcheur qui épie
les soubresauts de son flotteur. -
— Voyez, me dit-il tout à coup, cette
théorie de charrettes à bras qui sinue là-
bas, à cent pieds au-dessous de nous. Ça
devrait être des marchands de prunes, mais
ils sont en retard. Dès que la première char-
rette de prunes apparaitra, je vous fausse-
rai compagnie et voici pourquoi : lisez
cela.
Il me tendait un sac en papier déchiré
bilatéralement de façon à rétablir in-exten-
sa le texte imprimé de la page qui aVlÛt
servi à confectionner le sac. Je lus: r
« et maintenant si vous voulez savoir
où va tout ce butin fiscal, suivez-moi, je
vous mènerai dans un monde de budgétivo-
res spéciaux qui roulent sur l'or, dans un
monde logé et nourri aux frais de la prin-
cesse, et meublé avec le gaspillage des
stocks, un monde à qui l'argent tient aux
mains comme l'œuf au derrière d'une poule,
des gens qui dirigent des choses inexistan'
les, solutionnent des problèmes chiméri-
ques, occupent, en qualité de danseurs, d s
postes de mathématiciens, écument avec au-
tant d'habileté le monde des arts à Paris
que celui des badernes officielles changées
du relèvement des régions dévastées toi de
l'administration des provinces occupées.
suivez-moi, vous dis-je, et.
le reste du texte avait disparu dans fe $é-
coupure du sac. - - -:-
— Et c'est pour cela, me dit mon ami,
c'est pour cela que je guette depuis trois
jours les marchands de prunes qui débou-
client tous les matins dans ce quartier où
fut acheté le sac révélateur. Il me faut la
suite. vous comprenez. le sac découpé
dans la partie du texte qui situe, exactement
celle humanité de Cocagne où l'on remue
les millions à la pelle — quand ce ne se-
rait. que pour la signaler à la vindicte pu-
bliqne. j'ai déjà acheté une dizaine de kilos
de prunes et risqué le choléra, mais l'âme
de vache à. lait que m'a faite le fisc vaut le
meilleur des contrepoisons. »
Toutes choses égales ne faut-il pas fidrtù-
rer un homme assez naïf pour dramatiser
les bouillons littéraires que trimballent nos
poussettes ambulantes?
'- ': ,- JULES HOCHE.
u
n Joseph inconnu.
Nous connaissions déjà, dans le 4Q-
maine pictural d'innombrables Joseph —
depuis celui des fresques du Campo-Swrrto ;
de Pise jusqu'à ceux de Philippe de CtNtm-
paigne, de Rembrandt, de Ribera, de V-élas-
qu-ez, etc. - ,,;. -
La composition musicale s'é n or gu-einit, de
l'Opéra de Méhul « embelli » par Bout-1
gault-Ducoudray. ■
La littérature sérieuse -aUi sens de ce terme — ne s'était point attardée,
croyait-on, à la description des étsts d'âme
du personnage biblique. Or, nous appre
nous aujourd'hui qu'il n'en est rien: uiï 1
écrivain illustre entre tous, Gœthe, a
« commis » un Joseph. Il fut si mécontent
du drame qu'il.avait écrit q-u'il le livras aux
flammes, en 1762, ma.is un exemplaire; suè*
siste, afHrme un journal de Hambourg. Il l:
est des exhumations qui n'ajoutent rièia à
la gloire d'un écrivain.
L
a barbe,.
a barbe. ;;
1 Les échos de Deauville ont rapporté
que M. Sacha Guitry a laissé pousser sa
barbe, ce qui lui donne un vague air de res-
semblance avec le duc d'Orléans. On a
donné à la décision de M. Sacha Guitry
de ne plus se raser, diverses raisons, mais
personne n'a trouvé la' vérité.' Révélons-là,
comme un point d'histoire.
Si M.* Sacha Guitry est barbu, c'est que
dans sa prochaine pièce Je t'aime! qu'on
répète au Théâtre Edouard-VII, il doit in-
c'alrner le rôle d'un homme à barbe, et,
comme M. Sacha Guitry professe une sain-
te horreur pour tout ce qui est postiche,
il paraîtra devant le public avec une barils
naturelle.
M
odèles d'hiver.
Les couturiers commencent actuelle-
ment à exposer leurs colletions d'hiver.
Celles-ci 'sont des plus importantes et cer-
taines d'entre elles ne comprennent pas
moins de cinq ou six cents modèles.
Si quelques maisons ont pris l'habitude
d'ordonner ces modèles par un simple nu-
méro, il en est beaucoup encore qui les
baptisent de' noms évocateurs.
A signaler, cette saison, le modèle Lan-
dru, et cet autre, primitivement appelé
Amour vif qu'on débaptisa pour lui: donner
le nom d'Hera Mirtel.
v
oici le moment où, rentrant de la pla-
ge, des Nilles d'eaux, il nous faut
- "1 "'f. -1 'Il T. ----
songer a nos toilettes anIVeT. ivoire pre-
mière visite sera certainement- pour F,
FRANCIS, 5, avenue Matignon (Champs-
Elysées), couturier dont la ;eune gloire s'af-
firme de plus en plus par le goût délicat qui
préside à la création de ses modèles. Sa
collection d'hiver qui sera prête à partir
du 10 courant est encore plus réussie que
les précédentes; ses manteaux sont merveil-
leux de chic et de simplicité; ses tailleurs,
comme toujours, sont parfaits d'élégance.
et que dire des robes flou? Sinon qu'un
coup d'œil vaudra mieux que toutes les des-
criptions.
F. FRANCIS voulant favoriser Les artistes
les traitera de façon particulière dès qu'el-
les se recommanderont de Comœdia.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain une scène de
« LA MORT ENCHAINEE $
de M. MAURICE MAGRE
et « La Musique chez soi. n tU, ;
HENRI COLLETS
A LA COMÊmE=FRANÇAISE
LA MORT ENCHAÎNÉE
Pièce dramatique, en trois actes, en Vers, de M. Maurice Magre
\j" DEUXIEME ACTE (Photo -r.':¡f' 13eril
- t/lle DELVAIR M- de MAX
-. 1 1 1 1 {L-a Mort) {Slsypnei .,
Voilà une belle fournée pour les lettres.
Le pièce de M. Maurice Magre a soulevé
tes applafudiiss'ements unanimes et je gage
#ue le public éakiera, de nombreux soirs,
•He noble effort d'un véritable poète.
M. Maurice Magre qui fut toajotKcs épris-
de légendes, a choisi pour sujet eèile du
fameux roi de Corinthe, Sisyphe, que le
divin Homère nous prése-nte comme un es-
prit 2iu-dadeux et subti'!'. Il n'a pas hérité à
enfoaire le prototype de la Bonté et de la
Justice. Ce' roi sans scrupules qui dépouil-
lait les voyageurs devient un grand me-
neur d'hommes, un précurseur, un bienfai-
teur, un évolutionniste et pour tout dire,
un révolutionnaire. S'il blasphème les dieux,
c'est parce qu'il est l'ennemi de la contrain-
te, l'adversaire de la tyrannie malfaisante,
l'apôtre-fervent delà liberté. Entendez
d'aM!eurs que les dieux ne sont ici qu'un
symbole. Le droit divin n'existe pas, Sisyphe
le nie et fui oppose le simple droit humain
dont le triomphe est nécessaire. Seul, au
milieu des antiques croyances qu'il bafoue,
dans les murs de cette Corinfhe que son gé-
nie sut construire, il renverse les idoles,
iâbolit la servitude des superstitions, prê-
che le courage, la volonté, la force, l'op-
timisme et conduit son peuple au bonheur,
en lui ouvrant te vaste champ de l'espoir
et de l'amour. -
A la tradition qui nous montre Sisyphe
tué par Thésée, Maurice Magre a préféré!
la séduisante légende d'Egine, fille du roi
Asope, erïlevée par Zeus et délivrée par le
(PhatJo sabourin, ace* Bert)
MHe DELVAIR
„>] (La Moït)
roi de Corinthe. Grâce à la fuite/d'Egine ré-
fugiée près de Sisyphe, Ja. lutte est ouver-
te entre le Héros et les Dieux. Sisyphe
garde Egine dont la grâce le ravit et défie
Zeus en plantant son glaive au seuil de,son
',paJa'¡'s. La réponse à l'outrage ne se fait
pas attendre. La Mort relève le'defv en ar-
tachant le glaive. Mais Sisyphe, aussi rusé
1 TROISIEMII: ACTE (Photo Saboulln anc1 Belt)
M. Charles CRANVAL
(Le Dieu Pa-nj
tflle GUINTINI M. R. GAILLARD
(Egine) (Glaucos)
Mlle V. BÙ;Î05
tT}ro)
M. de MAX
(ÇlïJI-kç)
M. conivai:
(Premier Maing)
qu'Ulysse, Ferne la mort, et parvient à
l'enchaîner. Désormais la paix régnera sur
- le monde. L'ingéniosité et l'énergie humait
ne ont détruit le fléau sinistre. L'ère des
félicités est ouverte. -
Les hommes d'ailleurs délivres de toute
terreur injuiieront, lapiikront la Mort qtt'iis
fe~eparfois souhaitée/ La se'ene est admirable
et Mme D-elnrrr y fut magnifique. Sisyphe
iressît Ter)
,. "(Sisypne)
aurait sauvé le monde si ses msrrncfS mau-
vais des hommes ne les précipitaient à
leur perte.
Glaucos, fils de Sisyphe, s'éprend
d'Egine qui ne résiste pas à la jeunesse
du prince. Sisyphe soupçonne la trahison,
devine l'affreuse, comédie oui lui est jouée
et connaît des tortures plus douloureuses
que -celles que lui infligeront les dieux irri-
,. tés. Pour .faire cesser le doute .qui le bou-
leverse, il feint de se rendra a la chasse
et confié à son fils la clef magique qui,
seufe, peut libérer la morts Egine, plus
éprise peut-être et plus perverse à coup
sûr,pousse Glaucos à faire tomber les chaî-
nes de la Mort afin que le destin de
Sisyphe puisse s'accomplir. Le roi de Co-
rinthe livré à la vengeance de Zeus, l'ave-
nir appartient à leur jeune amour. Mais
pour délivrer la Mort avec l'insouciance des
responsabilités, il faudrait être presque
dieu et leur désir échoue devant l'énor-
mité de l'acte. Trop lâches pour être déli-
bérément criminels, ils laissent agir J'in-
n'ocence,;La naïve Tyro, l'esclave jadis pré-
férée de Sisyphe et qui aujourd'hui, défais-
sée ne rêve-que le néant. La Mort est dé-
livrée ! i Sa vengeance sera terrible. Corin-
the est transformée en charnier et Sisyphe
assistelà l'écroulement de sa chimère. Pouir-
tant il igno.rêr:â:''la trahison de son fils et
de sa femme/ L'esclave s'accuse de tout le,
crime qujun/grand amour excuse. ,
* Sisyphe meurt et pénètre au royaume
des ombres..Mais il parvient à convaincre
Hadès de lui rendre la liberté et de lui
laisser sa ! forme première. Il apparaît à
Corinthe, le jour même où Glaucos, va de-
venir roi et. épouser Egine. Sisyphe pieut
alors mesurer l'étendue de ringratitude hu-
maine. Ses sujets dont iL, v,oUll,u,L'si âpre;,
ment le)bonheur, le renient et
mémoire,^les^diëux dont,il- combattit la
nicietîse influence sont rétablis -" sur leuirs*
autels. Son deuil n'a pas été porté par ceux
qu'il aimait. Ses efforts passés lui appa-
raissent Yains et il ne pense llh.ts on'à sa;
tisfarre sa .vengeance. Mais au momen: t>
il lève sur son fils la terne justieière, ii en-
tend les voix de sept ambres mystérieuses.
qui ont suivi ses pas dtfuàs les Enfers.
Ces ombles représentent tes p'réc«rserr« de
Sisyphe, les sages, les vaillant,,,. les apô-
tres de la pensée, les porteurs de fi..
beaux Eux aussi furent wotimes de leurs
rêves et leur activité bienfaisante ne leur
a pas valu la gloire. Mais nul effort n'est
perdu et leurs gestes successifs prokn^cb
par Sisyphe ont aidé au bien-être des
mes. Sisyphe aura des successeurs Le
grain semé germera. Que le roi de Cenmm:
rentfne dans l'ombre. Ceux à qui il a indi-
qué. le chemin continueront à marcher vers
la lumière.
Ainsi se termina sur un symbole u i pv-u
lourd et presque confus une oeuvre d:)iil
la trame apparaissait assez nette. Le troi-
sième acte n'a pas la clarté limpide, le
-chu-ud et captivant lyrisme du second. C'est
dommage. Je sais bien que le mythe de
Sisyphe prétait fatalement au. symbole et
qu'il faillait expliquer l'image du rocher par,
le perpétuel recommencement, mais il n'en
est pas moins vrai que nous finissons, sur
le spectacle de la victoire du crime et de la
niaiserie fétichiste. Le meneur cUhb'm^«
a échoué dans 60n effort. Combien d^urrès
Sisyphes devront encore soulever sur leurs
épaules Impuissantes le fardeau des erreurs
humaines, sous le fouet des imclacàble»
Erinnves. *
(PTvnTo SaBotiwp, anc~ J!('J'T'
Mlle CUINTtl)^
"JE '^ijïek
-
1 '-' ..- -.
Le .style de M. Maurice Magre est ima-
gé,. ample.t coloré, émouvant. La Mort :En:
chaînée est une belle oeuvre de poète.,
poète demeuré obstinément romantiquc..;oe.
qui n'est pas pour me déptaife. On pe-ifilujj
;r^focherid'avoir remué trop d'idées socia-;
lès ên'o,-,i peu de vers, mais le reprocha
apparaîtrait sans doute slnglTrrer, Tenant
après tant de pauvretés lyriques; on potfï
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